Faire taire la différence. Prélude grec
Qui observe l’actualité éditoriale de ces dix dernières années en France, n’aura pas manqué de remarquer un phénomène indissociablement littéraire, critique et théorique. On ne compte plus les maisons d’éditions et les collections dédiées à l’écologie. Les traductions de d’auteurs et d’autrices, devenus désormais des classiques de la pensée écologique (Rachel Carson, Arne Naess, Aldo Leopold, Val Plumwood), se multiplient de même que les publications d’essais inédits de philosophes qui, comme Vinciane Despret, Baptiste Morizot ou Emanuele Coccia interrogent nos rapports aux vivants, animaux ou végétaux. Cette diffusion d’une pensée écologique touche également la littérature. En témoignent la création de prix littéraires (on songe notamment au « prix du roman d’Écologie » apparu en 2018), l’apparition de rayons dédiés et abondamment fournis dans les librairies1 et l’émergence de catégories comme celles de littérature verte et de littérature marron2. Sans doute le phénomène n’est-il pas nouveau, mais on assiste incontestablement à son accélération et à une diffusion capillaire des thèmes écologiques dans le champ littéraire ce dont témoigne l’institution universitaire elle-même à travers la création de masters et de centres de recherche en écopoétique.
Même si la poésie écologique est de fait moins souvent étudiée, les poètes ne manquent pas à l’appel et sans doute faut-il s’en réjouir. Dans un article récent, Anne Gourio, commentant des essais et recueils poétiques de Jean-Claude Pinson, Jean-Christophe Bailly, Stéphane Bouquet et Michel Deguy, note l’émergence d’une figure nouvelle, celle de l’écopoèthe :
À l’heure où se développe le courant de l’esthétique environnementale, qui tend à redéfinir les critères de définition du beau en invitant à dépasser la beauté désintéressée kantienne vers une beauté englobant les conditions de notre présence au monde, un ensemble de poètes et d’essayistes prend activement part à la défense de notre « habitation » terrestre, et ce faisant contribue à repenser l’esthétique sur fond d’éthique.3
De fait la cohérence des gestes théoriques des auteurs du corpus analysés par Anne Gourio est frappante. Les poètes qu’elle aborde dans son article s’accordent sans doute, malgré la différence de genre, avec la perspective d’écoromanciers qui tâchent, comme le résume Alexandre Gefen, de « dépasser les représentations traditionnelles non seulement par l’attention à la mise en scène de thèmes naturels, mais aussi par des tentatives de décentrement du point de vue énonciatif, en accordant à la littérature le pouvoir de rendre sensible et de faire parler l’environnement […] »4. En effet, dans le roman écologique « les narrations décentrées par la présence du monde naturel articulent de manière inattendue le monde humain à son dehors et produisent un effet de défamiliarisation aux bénéfices cognitifs autant qu’éthiques »5 bénéfices que ne renieraient sans doute ni Jean-Christophe Bailly, ni Jean-Claude Pinson, ni Michel Deguy.
C’est dans ce contexte où les préoccupations écologiques produisent une communauté de vues qui transcende genres et disciplines, que nous voudrions mettre en regard deux essais d’écopoèthes (selon le terme d’Anne Gourio) parus en 2020 : Pastoral6 de Jean-Claude Pinson et Agir non agir de Pierre Vinclair7. Jean-Claude Pinson quant à lui est né en 1947. C’est un poète philosophe puisqu’il a enseigné la philosophie de l’art à l’Université de Nantes de 1990 jusqu’à sa retraite tout en publiant recueils de poésie et essais critiques. Il est en 2020 l’auteur d’une œuvre littéraire et théorique importante. Né en 1982 et philosophe de formation lui aussi, Pierre Vinclair est aujourd’hui poète, essayiste, traducteur et animateur de la revue Catastrophes. Son œuvre littéraire et critique est déjà abondante. Les deux essais que nous nous proposons d’étudier, publiés par des poètes qui ont déjà construit un ample discours théorique, constituent ainsi une tentative d’inventer des formes de résistance écologique par l’écriture qui demeurent cohérentes avec l’essentiel des positions critiques déjà élaborées dans des textes précédents. Leur préoccupation écologique s’ente donc sur une réflexion théorique et une pratique de l’écriture affirmées indépendamment de toute préoccupation écopoétique.
L’hypothèse qui guidera notre analyse est la suivante : le projet écologique constitue un paradigme qui tend à faire passer au second plan les divergences théoriques de nos deux auteurs, divergences constituées préalablement et qui hier encore se seraient trouvées fermement accusées. L’engagement que constitue un tel projet, parce qu’il se fonde sur une ontologie (cohérente avec les thèses les plus communes du discours écologique) et une visée pragmatique (répondre à la crise écologique) clairement définies, produit donc, dans le champ de la théorie littéraire, une atténuation de clivages qui ont pourtant été structurants du romantisme à nos jours. Après une rapide présentation de chacun des essais, nous proposerons une lecture comparée de leurs divergences et ce par quoi ils se ressemblent.
Deux essais d’écopoétique
La sauvagerie du poème selon Pierre Vinclair
Agir non agir. Eléments pour une poésie de la résistance écologique a été publié en 2020 chez José Corti dans la collection “en lisant en écrivant”, en même temps qu’un recueil de dizains, La Sauvagerie8, paru chez le même éditeur dans la collection “Biophilia”. Le premier texte est en quelque sorte un commentaire du travail mené dans le second et la coïncidence des deux publications a valeur de manifeste. Les thèses présentées par Pierre Vinclair dans son essai font suite aux réflexions menées un an plus tôt dans un autre texte, Prise de vers9, dans lequel le poète tentait de rendre compte de l’effort accompli, depuis 1870, par une poésie réputée illisible.
L’auteur part du constat que la sixième extinction de masse est en court et que cela concerne chacune de nos activités, la poésie ne faisant pas exception10. Mais, ajoute-t-il immédiatement, il n’y a pas de sens pour le poète à une prise de parole déclarative qui dénoncerait l’incurie des gouvernements en affirmant la nécessité d’une mobilisation générale. Cela serait inefficace, puisque personne ou presque n’écoute les poètes dans notre société. Dès lors, ceux-ci peuvent-ils faire autre chose que pleurer et déplorer le triste sort de Gaïa ? C’est à cette question que l’essai répondra par l’affirmative : dans le contexte de la crise écologique, la poésie peut déployer un effort de résistance qui relève de ses moyens propres si elle se fait tout à la fois (et ce sont les 7 chapitres qui scandent l’ouvrage) « sauvage », « totale », « tendue », « intéressante », « pensante », « collective » et « rituelle ».
Par « sauvage » (première caractéristique du poème), l’auteur entend « le fait que le poème ne réponde pas aux plans de l’esprit », ainsi qu’il l’exprime dans un entretien récent, qu’il soit « un corps, autrement dit une articulation mouvante d’éléments hétérogènes […] Quoique le fruit d’un artisanat humain, le poème (et sans doute l’art en général) réplique à l’humain la présence de son irréductible corps »11. La sauvagerie d’un texte impliquera ainsi sa résistance à toute synthèse herméneutique12. On retrouve ici, déjà présente dans Prise de vers, la revendication d’une illisibilité du poème. Cette illisibilité n’est pas une hermétique (puisqu’aucun sens occulte n’est crypté dans les arcanes du poème): sa fonction est non seulement de soustraire une parcelle de discours aux calculs du logos13 mais encore d’incarner « la sauvagerie en général, au moment de l’extinction massive des espèces »14
Contre le dogme d’une inaccessibilité de la totalité à la représentation dont l’auteur montre en quoi sa promotion du fragmentaire peut être parfois plus totalitaire que l’élan d’une parole qui se présente comme un tout à son lecteur15, l’œuvre conçue par Pierre Vinclair peut en outre tenter de figurer le caractère systémique et total16 (deuxième caractéristique) de la crise traversée, et devrait essayer d’incarner, notamment par le système complexe des poèmes à l’échelle du recueil, quelque chose de cette totalité que Lovelock a baptisé Gaïa et qui se trouve mise en danger par la crise globale que nous traversons. La dimension clairement utopique de l’idéal de sauvegarde que le poème cherche à atteindre définit ensuite sa tension (troisième caractéristique), l’effort presque tragique qu’il accomplit et qui fait l’intérêt (quatrième caractéristique) du drame en quoi il consiste : à savoir, la « lutte effective d’une puissance (humaine) d’énonciation et d’une puissance (inhumaine, animale peut-être) de désénonciation »17. C’est seulement en intéressant par la dramatisation d’un effort – fût-il utopique – que le poème peut espérer être une machine à penser sans concepts (cinquième caractéristique) et un levier pour reconfigurer les imaginaires dans une situation où l’avenir de la pensée doit chercher de nouvelles voies. Les contradictions de la crise écologique (celle entre les besoins vitaux et la destruction de la vie qu’ils engendrent) ne sont pas résolues dans le poème mais montées ensemble dans le recueil où elles font système et produisent de la pensée18.
Ce travail de la pensée ne peut faire l’économie de passer par le collectif (sixième caractéristique et raison pour laquelle La Sauvagerie a impliqué une cinquantaine de poètes invités) :
Ce qui ne signifie pas que le livre ne puisse être, en même temps, personnel, voire lyrique. Mais nous savons qu’il est absurde de concevoir (selon la métaphysique du sujet qui irrigue depuis cinq cents ans tous les domaines de la pensée moderne, de la philosophie à l’économie, du droit à la littérature) le moi comme un sujet souverain aux goûts singuliers, indépendant des autres et plus encore des choses de la nature (qui se contenteraient de l’environner). Bien au contraire : ce que je sens, ce que je pense et ce que je suis est non seulement lié à ce que sont et pensent et sentent tous les autres, mais aussi aux êtres naturels auprès desquels j’ai grandi, aux lieux, aux cycles, aux échanges dans lesquels j’ai été pris, et de proche en proche à tout le système des systèmes qu’est Gaïa.19
Enfin, l’effort de pensée collectif mis en mouvement par le recueil tend à instaurer une poésie rituelle, c’est-à-dire, une poésie qui invente et performe des valeurs communes, fussent-elles fragiles et fugaces comme le temps de la lecture20 : « La poésie sera rituelle si elle participe à un souci collectif et réglé pour ce qui vaut »21. Il y a là la clé de voûte du dispositif imaginé par Pierre Vinclair et ce qui en fait aussi l’originalité dans le champ de la poésie française des deux derniers siècles22. La ritualité en tant que performativité axiologique d’une parole partagée est l’horizon pratique du poème : y convergent toutes les caractéristiques précédemment définies.
Il est possible de voir dans un tel projet une manière de confiance lyrique volontaire en cela qu’il renoue aussi bien avec un chant de grande ampleur – multipliant ses objets et tentant d’en figurer une totalité – qu’avec une parole commune et célébrante qui dit sans dogmatisme la valeur fragile du vivant selon la parole réglée d’un rituel à la performativité labile.
Jean-Claude Pinson et « le pacte pastoral »
L’essai de Jean-Claude Pinson s’articule autour d’une double définition des rapports entre poésie et écologie. En effet, selon l’auteur, la poésie est à la fois « écologie première » (titre du premier chapitre) et « écologie dernière » (titre du dernier chapitre).
Si elle peut être écologie première, c’est justement parce que son logos propre est en mesure, mieux qu’aucun jeu de langage, de faire venir au jour une réalité de la Nature elle-même primairement prédisposée à la poésie pour autant qu’elle est archi-mouvement de la Vie (et non cadavre).23
La poésie est ainsi définie comme une pratique de la parole qui entretient un rapport privilégié avec l’expérience sensible de la vie dans la mesure où elle se fonde sur un « sentiment d’appartenance » et sur le « continuum ontologique qui relie la réalité sensible de la nature et les facultés poétiques »24, nous y reviendrons.
En effet, selon l’auteur, malgré la fin de la civilisation agro-pastorale actée par l’expansion rapide, au XIXe siècle, du capitalisme industriel et extractiviste25 et par la plus récente instauration d’une société de consommation qui conduit à la dilution du réel dans la multiplication des spectacularisations mass-médiatiques26, malgré, d’autre part, une tendance légitime à déconstruire « l’idéalisation mensongère » dont se nourrit l’imaginaire bucolique traditionnel27 et un scepticisme artificialiste dont on sait la prégnance dans la poésie française des deux derniers siècles, la poésie continue d’être orientée par un « pacte pastoral », ou un « contrat naturel » – ce dernier terme est emprunté à Michel Serres. Ce pacte, ou ce contrat, on l’aura compris, étant moins institués qu’essentiels, relevant à la fois d’une essence de la poésie et d’une ontologie de la continuité entre les productions humaines (poiesis) et « l’archi-événement » de la phusis selon la terminologie de Renaud Barbaras28 cité par l’auteur.
Pour notre auteur, une telle orientation se lit en filigrane du tressage moderne de deux régimes de la poésie qu’il définit dans la lignée de l’opposition schillerienne du naïf et du sentimental, opposition dont le curseur principal réside dans la plus ou moins grande immédiateté de l’expérience du monde offerte par la pratique poétique de la parole. Ces deux régimes, non exclusifs l’un de l’autre, loin s’en faut, sont d’un côté l’ironie carnavalesque (obliquement pastorale de par la vis utopica qui l’anime), de l’autre un lyrisme, chanté et explicitement pastoral29. Comme le montre Jean-Claude Pinson, chacun des deux régimes prend en charge plus ou moins directement30, la promesse utopique et poéthique d’une habitation du monde jouissive et luxueuse, qui substituerait à l’aliénation de l’homo economicus l’émancipation d’un « poétariat » :
L’aspiration à une habitation poétique de la Terre, en son messianisme propre, est non moins « indéconstructible », selon moi, que la promesse émancipatoire du marxisme. Elle continue de hanter les esprits, de stimuler les imaginations et d’insuffler de l’énergie à tous ceux qui, désormais, membres libres de ce que j’appelle le « poétariat », s’emploient, en marge du « système », à essayer des formes de vie alternatives.31
Sans doute la prise en charge d’une telle promesse par la poésie (contemporaine) conduit-elle moins à une résolution irénique qu’au maintien d’une tension (somme) toute moderne. L’essai de Pinson, tout en restant fidèle à une dialectique non résolutoire entre séparation et appartenance, entre ironie et célébration, semble valoriser et encourager les œuvres de poètes qui renouent avec la tradition lyrique du chant voire avec celle de l’hymne tels que Jean-Pierre Michel par exemple32 ou Aurélie Foglia33. Non que le regain d’enthousiasme poétique implique un optimisme ingénu, car – et c’est l’objet du dernier chapitre de l’essai – la promesse poéthique d’une vie luxueuse, motrice du chant célébratif comme des tensions élégiaques contemporaines – l’élégie se dénonçant dialectiquement derrière le masque grimaçant des dérisions carnavalesques et sceptiques – ne peut au mieux qu’accompagner les « temps de la fin » que nous sommes en train de vivre, cette succession de catastrophes inévitables, dont la durée requerra pour être habitée l’invention de « telle ou telle tonalité affective, [de] telle ou telle modalité d’action – ou de soustraction »34. C’est en ce sens donc que la poésie est une « écologie dernière » : c’est bien parce qu’elle est essentiellement vouée au pacte pastoral, parce qu’elle est « écologie première » que sa tâche peut consister à aménager maintenant la crise écologique. Sans cacher son pessimisme quant au caractère inéluctable de ce qui nous attend, Jean-Claude Pinson évoque alors certaines des postures « poéthiques » d’ores-et-déjà apparues : le retrait dans la vie profonde, anachorèse de l’écriture35, la résistance bec et ongles par l’invention de dispositions à la violence qu’il faudrait mobiliser pour défendre ce qui compte36, ou encore la création de « lieux et de formes de vie écologiques où la recherche de l’autonomie matérielle passe par la tentative de réinscription du métabolisme de l’habitat dans la nature vivante » tels que les ZAD37.
Divergences théoriques
La parole « musaïque » : une philosophie essentialiste du langage
Parce que l’une est orientée par la question pragmatique des effets à produire pour instituer une valeur partagée dans le rite fragile de la performativité poétique tandis que l’autre interroge la possibilité d’une reviviscence mystique des origines pastorales du langage, les deux pratiques de résistance écologique qui se dessinent ici pourraient sembler diamétralement opposées. En effet, chez Jean-Claude Pinson, l’orientation pastorale de la poésie est définie à partir de la définition du langage postulée par l’auteur. En effet, dans Pastoral, le langage est séparation :
en tant qu’êtres de parole nous sommes séparés (par le langage, la conscience) de ce que le philosophe Renaud Barbaras nomme « l’archi-mouvement » de la Nature – séparés de l’Être compris comme « surpuissance », comme « archi-vie » du monde (du cosmos). En conséquence, l’exil ontologique, la privation de l’Ouvert (Rilke), est notre ordinaire condition.38
Dans une telle perspective, la tension pastorale revêt une dimension qu’on pourrait qualifier aussi bien de transcendantale (puisqu’elle relève des conditions a priori de tout rapport à la parole) que de métaphysique (puisqu’elle s’origine, selon Barbaras, dans une émergence du sujet comme séparation d’avec le processus sensible de la phusis). C’est ce que confirme le recours par l’auteur à la notion mystique de « musaïque » empruntée à Giorgio Agamben39, qui nomme « notre rapport constitutif » à l’impossibilité d’accéder au lieu musical, originel, de la parole40.
Essentialisante à bien des égards, cette définition du langage comme séparation entraîne deux conséquences : l’engagement écopoétique s’il est requis par la circonstance historique (et à bien des titres Pastoral est un essai de circonstance) est toujours déjà structuralement impliqué dans tout projet poétique digne de ce nom (entendons dans tout projet qui donne voix à l’essentielle tension vers l’inaccessible origine musaïque de la parole) ; réciproquement, l’essence pastorale de la poésie constitue une précieuse ressource pour les temps à venir. Pour le dire autrement, il y a une connivence naturelle, essentielle de la poésie et de l’écologie. Cette connivence est historiquement non spécifique (elle tient à l’essence du langage, et serait indifférente aux époques) bien qu’historiquement requise (nous allons pouvoir l’utiliser pour vivre les « temps de la fin »).
Une poétique pragmatique
Rien de tel chez Pierre Vinclair : plutôt qu’elle ne se caractérise par une ascendance musaïque qui en constituerait la condition, la poésie n’existe comme genre que dans la mesure où la variété des projets singuliers qu’elle rassemble opèrent des efforts comparables41. Ce qui compte c’est donc moins de comprendre ce qu’est la poésie que d’être attentifs à ce qu’elle fait (œuvre après œuvre) et à ce qu’elle peut faire avec les moyens qui lui sont impartis. Or ces moyens, Pierre Vinclair les définit davantage à partir de notions descriptives empruntées aux sciences du langage que par référence à une philosophie mystique du langage de matrice idéaliste. Cela engage donc, que ce soit dans Prise de vers, Agir non agir ou Vie du poème, une poétique, c’est-à-dire une tentative de penser le fonctionnement du texte, les effets qu’il produit, les projets qui en accompagnent la production, etc.
Cela implique également une inquiétude quant à l’adresse et à la réception de l’acte de langage que constitue chaque poème : car si le projet dont il répond ne peut se revendiquer d’une anthropologie transcendantale qui en fonderait la pertinence, le poème doit se tourner vers son lecteur et tâcher de l’intéresser faute de quoi il court le risque de rester lettre morte. En effet, la question de l’intérêt du poème et de la valeur qu’on peut lui accorder traverse Agir non agir42 et Vie du poème43, là où chez Jean-Claude Pinson, la désaffection pour le genre poétique relèverait plutôt d’une occultation du musaïque en des temps où le bavardage inauthentique domine la société.
Les modalités pratiques d’une réalisation poétique de la résistance écologique à la raison instrumentale sont donc précisément détaillées chez Pierre Vinclair qui explique ainsi en quoi le poème est un corps où s’articulent de façon non résolutoire une diversité de logiques concurrentes voire divergentes. Ces logiques sont référentielles, pragmatiques, phoniques, syntaxiques, textuelles et culturelles et « le poème apparaît alors moins comme une opération linguistique visant à réaliser un plan de l’esprit (comme peut l’être un discours), que comme un équilibre entre diverses logiques hétérogènes qui répondent à des enjeux qui ne synthétisent pas »44. À l’ontologie du sauvage s’articule donc une description des ressources non convergentes du poème qui seront appelées à la prendre en charge par le biais de la dramatisation d’une résistance à la tendance synthétique et propositionnelle de l’énonciation.
Comme le remarque Jean-Claude Pinson dans l’entretien que nous avons déjà évoqué, ces divergences conduisent à des postures fort différentes : nous nous limiterons à noter qu’avec les gestes effectués publiquement et les stratégies éditoriales adoptées, un élément crucial de ces postures est l’ethos[45]45 construit par les deux essais et dont l’auteur de Pastoral explicite l’opposition : là où lui-même adopte une position de contemplation mélancolique, volontiers rétrospective, Pierre Vinclair pense Agir non agir comme un manifeste orienté par le projet du recueil La Sauvagerie et tendu vers l’élaboration d’une stratégie pour le mener à bien46.
Consensus sur le paradigme écopoétique
Pourtant, en dépit des différentes manières dont elle s’articule chez chacun de nos auteurs, il semblerait que la problématique écologique constitue une référence commune devant laquelle les oppositions que nous venons d’évoquer s’atténuent. On peut ainsi identifier une série de principes partagés qui relativisent, voire émoussent, les divergences théoriques et les différences de posture que nous venons de mentionner. Dans la mesure où la crise écologique trahit cruellement les limites du projet rationaliste moderne, dans la mesure encore où, pour être pensée, elle requiert la reconnaissance de ses dimensions systémique et totale ainsi qu’une prise de conscience de l’appartenance du sujet au tout de la phusis, penser les rapports entre poésie et écologie implique, pour nos auteurs, premièrement d’inscrire le poème dans le cadre d’une critique des excès du rationalisme, deuxièmement de renouer avec une pensée de la totalité et d’affirmer une ontologie matérialiste qui exclue que l’humain puisse s’excepter du vivant (ce qui implique que la parole poétique s’établisse sur le fond d’un ensemble de thèses sur l’être), troisièmement de penser des formes de subjectivations susceptibles de rappeler au sujet ses appartenances (ce qui engage une pédagogie).
Une critique du rationalisme
En effet, les deux projets se retrouvent tout d’abord dans leur opposition à une forme de rationalité dont les figures de Descartes (chez Pierre Vinclair) et de Hegel (chez Jean-Claude Pinson) sont les symboliques épouvantails. En cela, ils s’inscrivent nettement dans la perspective d’une écocritique qui, selon les termes d’Alexandre Gefen, « caresse le rêve d’un rapport intégré et renouvelé à la nature et […] vise à la sauver de l’homme, son prédateur, en proposant contre les discours techno-scientifiques une autre parole, d’ordre artistique »47. Si, au nom d’une définition interrelationnelle du sujet48, Pierre Vinclair critique au passage la métaphysique du sujet souverain impliquée par le rationalisme, c’est surtout aux implications du projet de « se rendre comme maître et possesseur de la nature » qu’il s’en prend. Bien qu’il y ait loin de cette simple formule issue d’un traité philosophique à son application politique et technique, le poète rappelle qu’elle n’en reste pas moins « la conséquence d’une métaphysique qui considère comme relevant d’essences hétérogènes l’esprit d’un côté, et la matière de l’autre », métaphysique selon laquelle « l’être pourvu de raison a le droit de disposer comme il le souhaite des êtres qui n’en sont pas pourvus »49. Et de poursuivre :
De nombreux philosophes, parmi lesquels Jacques Derrida ou Philippe Descola (et avant eux Nietzsche) ont montré que la rationalité que nous nous prêtons est d’abord une construction (et non une donnée naturelle) rhétorique, qui sert notamment à justifier une prise de pouvoir sur ce qui n’en serait pas doté. La volonté de vérité (pour le dire avec Nietzsche), le phallologocentrisme (avec Derrida), ou le Naturalisme (de Descola) relèvent d’abord d’un assaut fait sur les corps vivants50.
Si la rationalité est ici mise en cause, c’est en raison des jeux de pouvoir et d’exclusion que sa rhétorique autorise. « L’écologie, en ce sens, ne peut être seulement scientifique. Il y a en elle une aspiration à sortir de la rhétorique de la rationalité »51, aspiration dont l’auteur confie l’accomplissement à une écriture poétique à la fois sauvage et rituelle comme nous l’avons vu.
Comme celle de Pierre Vinclair, la critique que Jean-Claude Pinson fait des prétentions impérialistes de la raison n’est guère éloignée de celle de Nietzsche, Derrida, Descola. Elle prend la forme d’un anti-hégelianisme, le grief à l’encontre de Hegel tenant à ce que, au seuil de sa Phénoménologie de l’Esprit, celui-ci « renvoie à l’insignifiance la plus creuse de son être contingent, à l’inessentialité de son alogon (celui d’une différence non logique, indigne de trouver place dans le système du Savoir souverain en route vers l’absolu) » l’intuition sensible et sans catégorie, singulière et contingente, qui fait la matière de notre existence, la force de nos appartenances et l’objet même de la poésie52. Avec Pierre Vinclair, l’auteur de Pastoral pose alors la nécessité d’une ontologie poétique qui requière « une philosophie de la différence entre l’être et le connaître » inspirée de Kierkegaard ou de Bataille53. L’objectif explicite de cet anti-hégelianisme est de rétablir dans ses droits un « sentiment d’appartenance » dont la prise en charge par la poésie constitue une résistance à la folie « techno-logique » d’un capitalisme prédateur et extractiviste, conséquence d’une ubris de l’Esprit54.
Un matérialisme continuiste
Deuxième convergence importante, le retour explicité du refoulé sauvage ou alogique dans le poème se fera dans les deux cas au nom d’une pensée continuiste qui en constitue la condition. Cela passe chez Pierre Vinclair par une définition non-logique de la forme conçue, dans le sillage de l’esthétique de John Dewey, comme « une organisation des énergies de l’expérience55 ». En effet, chez Dewey l’œuvre d’art est la construction d’une expérience complète à partir de l’interaction de conditions et d’énergies à la fois organiques et issues de l’environnement56. Il n’y a donc pas de « coupure » symbolique mais une continuité de la vie et du faire humain. Et le poème de Pierre Vinclair, en tant qu’effort, tension, résistance (voir supra) se définit comme une expérience qui prend place dans le cours des expériences communes. L’essai qui viendra après Agir non agir, Vie du poème (titre dans lequel la « vie » est loin d’être une simple métaphore) retracera l’histoire de l’ontogénèse de l’expérience du poème ; il soulignera un mêmerefus « moderniste » de faire du poème une activité séparée de la vie qui consisterait « à orner par un recours à une rhétorique traditionnelle des discours idéalistes et édifiants »57.
Chez Jean-Claude Pinson, comme nous l’avons déjà indiqué plus haut, en dépit du fait que l’expérience du langage implique pour lui une séparation structurale de l’humain et de la phusis, c’est bien en vertu d’une continuité ontologique entre ces deux instances, l’une appartenant à l’autre, que s’affirme la tension pastorale – celle-ci adoptât-elle la voie carnavalesque de l’ironie ou celle, lyrique, de la célébration du vivant. Comme le rappelle Anne Gourio, inspirée des thèses matérialistes de Leopardi, la position de Jean-Claude Pinson se construit à partir d’une « métaphysique du désenchantement (le sensible est vidé de tout sacré) et d’un lyrisme repensé à partir de la ferveur et de l’énergie du sujet »58. La nature dont il est alors question n’est plus empreinte d’idéalisme et le lyrisme promu par Jean-Claude Pinson n’a rien d’une communion irénique avec le sens idéal du monde enfin retrouvé.
Une pédagogie poétique
Les thèses de ce matérialisme continuiste sont à la base du projet de rappel des appartenances de l’humain au vivant, rappel qui engage une manière de pédagogie poétique : la poésie se voit définie dans ces deux essais par sa capacité d’affecter le lecteur et de le conduire sur le chemin d’une réforme de soi. Le poème renoue donc avec un projet schillerien voire kantien d’émancipation du sujet par l’expérience esthétique59 ; le registre écologique de ses effets est donc moins directement celui de l’environnement ou celui des rapports sociaux (pour reprendre la tripartition guattarienne des Trois Écologies60) que celui de la subjectivité. Bien que, commentant le célèbre opuscule de Félix Guattari, Jean-Claude Pinson commence par affirmer que la temporalité d’une lente et profonde réforme éthique, si elle était plausible en 1989, à une époque où l’urgence de la crise écologique était moins perceptible qu’aujourd’hui, semble désormais inadéquate, par un retournement pessimiste, l’auteur de Pastoral en vient cependant à maintenir une pensée de l’effectivité du poème au niveau « moléculaire » d’une réforme des modes de subjectivation : il ne sera simplement plus question de changer le cours des choses, mais d’inventer des manières habiter « poéthiquement » le temps long des catastrophes à venir61.
Conclusion
Comme on le voit, nos deux auteurs se retrouvent, théoriquement parlant, sur des points cruciaux. Pastoral fut d’abord publié sous la forme d’un feuilleton théorique sur le site de la revue Catastrophes animée par Laurent Albarracin, Guillaume Condello et Pierre Vinclair, sur l’invitation de ce dernier : la communauté de vues tiendrait-elle donc tant aux affinités électives qu’au dialogue soutenu qui s’est noué depuis quelques années déjà entre les deux hommes ? Ou relève-t-elle plus profondément de l’installation progressive d’un paradigme écopoétique sur le fond duquel s’enlèvent aujourd’hui des différences théoriques devenues mineures ? Selon cette deuxième hypothèse, que les récents travaux d’Anne Gourio corroborent, un canon théorique serait en voie de constitution. Sa diffusion capillaire serait d’autant plus massive qu’elle se fonde sur un des consensus les moins attaquables de notre moment historique. Quoi de moins discutable aujourd’hui que la nécessité d’une attention écologique au vivant ?
À travers le prisme d’un travail sur la langue, les poètes trouvent dans leur existence, dans leur époque, dans les ratés de la culture qui les voit naître, dans les défauts et dans les forces de l’organisation socio-économique des états où ils résident, les missions et les valeurs au nom de quoi il y a lieu d’écrire, fût-ce dans le refus de toute mission. Ces valeurs et ces missions conditionnent les discours de légitimation censés assurer la pertinence d’œuvres qui, bien souvent, font déjà ou encore autre chose. L’écopoétique est sans doute une des missions les plus consensuelles (rien de mal à cela) qu’il soit donné d’observer aujourd’hui et les essais que nous avons parcourus ici s’inscrivent clairement dans le cadre de ce consensus. La mystique mélancolique de l’un et le pragmatisme poétique de l’autre se rejoignent dans une ontologie, dans une critique de la raison et dans la visée éthique d’une pédagogie poét(h)ique.
Considérées relativement à ces trois thèmes qui sont clairement homogènes à un discours écologique relativement commun, les divergences pourtant profondes que nous avons observées entre nos deux auteurs ont-elles encore un sens ? Si la poésie est toute entière définie par sa nouvelle mission, il y a fort à parier que la négative l’emporte et que le poème vaudra davantage par son impact que par la pensée qu’il propose de lui-même – à moins que celle-ci ne conditionne celui-là. En revanche, si l’on considère qu’une telle mission ne saurait occulter complètement un autre référentiel axiologique légué quant à lui par la poésie moderne (on songera aux figures tutélaires de Baudelaire, de Mallarmé ou de Rimbaud), celui d’une lucidité quant aux conditions de la pensée et de la parole, alors l’opposition entre pragmatisme linguistique et essence musaïque de la parole reste fondamentale.
Sans doute, la confrontation des deux essais étudiés ici permet-elle de thématiser le rapport problématique de ces deux référentiels axiologiques. Non que l’un puisse ou doive remplacer l’autre. Mais il semble important – et nous conclurons là – de remarquer qu’ils ne se superposent pas : tout gain en termes de lucidité quant aux conditions de la parole et de la pensée n’est peut-être pas transposable sur le plan d’une mission écopoétique ; et vice versa. Il faut en rabattre, et aux démonstrations d’une nature écopoétique de la poésie opposer peut-être, pragmatiquement, la possibilité (ou la nécessité) de projets écopoétiques plus ou moins en accord avec la cruauté d’un regard lucide sur la langue, l’imaginaire et le réel.
Références bibliographiques
- Artous-Bouvet, G., Vinclair, P. et Pinson, J.-C., 2021, « Poème et théorème : nouvelles pastorales poétiques », dans Cavallin J.-C. et Romestaing, A. (dir.), Fabula-LhT, n° 27, « Ecopoétique pour des temps extrêmes », URL : http://www.fabula.org/lht/27/pinsonvinclair.html
- Barbaras, R., 2016, Métaphysique du sentiment, Paris, édition du Cerf.
- BnF : https://www.bnf.fr/fr/lecologie-dans-le-roman-daujourdhui
- Dewey, J., 2010, L’art comme expérience, trad. J.-P. Cometti, Folio essais, Gallimard.
- Gourio, A., 2021, « L’Écopoèthe : émergence d’une nouvelle figure d’auteur en poésie contemporaine », Elfe, XX-XXI, 10, 2021, URL : http://journals.openedition.org/elfe/3798
- Gefen, A., 2021, L’Idée de littérature, Paris, Éd. José Corti.
- Guattari, F., 1989, Trois écologies, Paris, Galilée.
- Meizoz, J., 2009, « Ce que l’on fait dire au silence : posture, ethos, image d’auteur », Argumentation et Analyse du Discours, 3, 2009, URL : http://journals.openedition.org/aad/667
- Pinson, J.-C., 2020, Pastoral, Paris, Champ Vallon.
- Todorov, T., 1977, Théories du symbole, Paris, Seuil, coll. « Points ».
- Vinclair, P., 2019, Prise de vers, Sainte-Colombe-sur-Gand, La Rumeur libre.
- Vinclair, P., 2020a, Agir non agir, Paris, Éd. José Corti, coll. « En lisant en écrivant ».
- Vinclair, P., 2020b, La sauvagerie, Paris, Éd., José Corti, coll. « Biophilia ».
- Vinclair, P., 2021, Vie du poème, Genève, Labor&Fides.
Contenu média
Schoentjes, P., 2021, « Littérature et écologie : un lien de longue date », conférence prononcée le 15 avril 2021 à la Bibliothèque nationale de France. URL : https://www.literature.green/conference-bnf-litterature-et-ecologie-un-lien-de-longue-date-p-schoentjes-et-remise-du-prix-du-roman-decologie-2021/
Notes
- Pour s’en convaincre on peut consulter cette succincte bibliographie proposée sur le site de la BnF : https://www.bnf.fr/fr/lecologie-dans-le-roman-daujourdhui
- Pour une présentation synthétique de ces catégories, voir Schoentjes, 2021.
- Gourio, 2021.
- Gefen, 2021, p. 141.
- Ibid.
- Pinson, 2020.
- Vinclair, 2020a.
- Vinclair, 2020b.
- Vinclair, 2019.
- Vinclair, 2020a, p. 12 : « La poésie est concernée au même titre que toutes les autres activités humaines ».
- Artous-Bouvet, et al., 2021.
- « Le poème apparaît moins comme une opération linguistique visant à réaliser un plan de l’esprit que comme un équilibre entre diverses logiques hétérogènes qui répondent à des enjeux qui ne se synthétisent pas. » (Vinclair, 2020a, p. 25).
- Ibid., p. 22.
- Artous-Bouvet, et al., 2021.
- Vinclair, 2020a, p. 67-69.
- Remobilisant ainsi l’analogie romantique de l’oeuvre et de la totalité de la nature. Sur ce point voir : Todorov, 1977, p. 186.
- Artous-Bouvet, et al., 2021.
- Vinclair, 2020a, p. 154.
- Ibid., p. 183.
- Dans Vie du poème, Pierre Vinclair revient sur cette dimension rituelle et en explicite l’événementialité fragile : « [Le poème et sa lecture sont] une cérémonie improvisée, dont l’enregistrement est confié aux lecteurs. Simplement, à la fin du corps à corps, au moment où on pourrait se graver dans le marbre enfin la vérité sur le réel (une vérité telle qu’elle devra avoir, pour l’humanité future, valeur de bible), le poème reprend ses billes et le sens nous file entre les doigts. Tout est à recommencer. En cela le poème nie le texte sacré : car il n’y a pas deux absolus. Ou bien l’être pour exister survit à la parole qui l’incarne, ou bien il n’existe que le temps où la parole le fait advenir. Ce qui implique non seulement que la poésie ne pourrait se mettre au service d’une religion, mais qu’elle ne saurait même être engagée – sauf si l’on veut dire par engagée qu’elle essaie de sauver le réel en téléchargeant, le temps de la lecture, les mondes 1 [celui des réalités physiques] et 2 [celui des événements psychologiques, perceptifs, subjectifs] dans un monde 3 fragile ». Vinclair, 2021, p. 182-187.
- Vinclair, 2020a, p. 188.
- « C’est singulièrement ce qui nous manque pour sortir de la catastrophe écologique. Cette dimension, la plus éloignée de la poésie des cent cinquante dernières années mais la plus cruciale du dispositif que j’appelle de mes vœux, est ce qui dans le poème relève du « rituel ». Si nous ne sommes pas dans une société sans rituels (qu’on pense au baccalauréat, au mariage, aux soldes), la poésie en semble singulièrement dépourvue. Or non seulement cela n’a pas toujours été le cas, mais le poème se trouve justement être ce qui nous reste de la parole chamanique, et de la promesse d’une puissance performative de la parole. Il nous faut maintenant trouver comment la réactiver. » Artous-Bouvet, et al., 2021.
- Pinson, 2020, p. 32.
- Ibid.
- Ibid. p. 107.
- Ibid. p. 109.
- Ibid. p. 55-57.
- Barbaras, 2016.
- Pinson, 2020, p. 42-43.
- Ibid. p. 35.
- Ibid. p. 90-91.
- Ibid. p. 126-128.
- Ibid. p. 150-153.
- Ibid. p. 140.
- Ibid. p. 141-143.
- Ibid. p. 142-143.
- Ibid. p. 158-159.
- Ibid. p. 20.
- Ibid. p. 32-35.
- Ibid. p. 34.
- Vinclair, 2019, p. 5-6.
- Vinclair, 2020a, p. 111-132.
- Vinclair, 2021, p. 89-102.
- Vinclair, 2020a, p. 25.
- Pour l’articulation des notions d’ethos rhétorique et de posture voir Meizoz, 2009.
- Artous-Bouvet, et al., 2021.
- Gefen, 2021, p. 140.
- Voir Vinclair, 2020a, p. 185.
- Ibid., p. 93.
- Ibid., p. 93-94.
- Ibid., p. 95.
- Pinson, 2020, p. 38.
- Ibid., p. 40.
- Ibid., p. 20-21.
- Vinclair, 2019, p. 59.
- Dewey, 2010, p. 125.
- Vinclair, 2020a, p. 178.
- Gourio, 2021.
- Vinclair, 2020a, p. 142-143 : « Pour Kant, le sentiment du sublime a immédiatement des implications morales, puisqu’il est lié à ceux de respect et d’admiration. On peut dès lors entrevoir la dimension éthique d’une poésie sauvage : il s’agit d’une sorte d’édification, par laquelle le lecteur, fasciné comme dans « Le Jaguar » de Ted Hughes, comprend que l’énergie sauvage est la vie de cette liberté qu’il doit cultiver, et respecter, en lui. »
- Guattari, 1989, p. 12-13.
- Pinson, 2020, p. 138-140 et 162-163.