- Adaptation : on remplace un élément culturel du texte source par un autre, propre à la culture cible. Par exemple, lorsqu’on traduit mus (un jeu de cartes très populaire en Espagne, qui ne correspond pas à la belote) par « belote ». Les exemples sont nombreux dans le recueil : lorsqu’on traduit perfeito rapaz (qui est un emprunt) par « gendre idéal » dans « Sans un bruit » ou lorsqu’on traduit Virgen del Plomo par « Vierge de Plombières » dans « La mise en garde ». L’adaptation peut aller très loin, jusqu’à la création discursive, c’est-à-dire lorsqu’on établit une équivalence éphémère, imprévisible hors contexte, comme avec le néologisme enfranelamientos, rendu par « moult bandages » dans « Féministe ». C’est fréquent dans la traduction des titres d’œuvres.
- Amplification (foisonnement, étoffement, dilution, développement, explicitation) : on introduit des précisions par rapport au texte source (des informations, des explications paraphrastiques, des notes de bas de pages, etc.). Par exemple, lorsqu’on traduit villancico par « chant traditionnel de Noël » ou lorsqu’on traduit lo que vende Ansorena par « des bijoux de chez Ansorena » dans « La poignardée ». Cette technique s’oppose à l’élision.
- Calque : on traduit littéralement un mot ou un syntagme assumé comme étranger à la langue source ; il peut être lexical ou syntaxique.
- Compensation : on introduit à un autre endroit du texte cible (en amont ou en aval) un élément d’information ou un effet de style qui n’a pas pu être traduit là où il apparaît dans le texte source. C’est assez fréquent. Ainsi, dans « Sans un bruit », il est impossible de traduire tel quel l’adjectif frescachoncilla, qui combine un suffixe augmentatif (-ón) et un suffixe diminutif (-illa). On a traduit par « appétissante » et on a compensé un peu plus bas en ré-introduisant l’effet de sens produit par frescachoncilla : muy repolluda y fresca a été traduit par « fort désirable », afin d’exprimer tout à la fois la beauté, la jeunesse, la bonne santé et la sensualité, de la jeune fille.
- Élision (concentration, effacement, suppression, réduction, implicitation) : on choisit de ne pas formuler des éléments d’informations présents dans le texte en langue source. Par exemple dans « Je n’invente rien », le doublet natural y vulgarísima a été traduit de façon condensée par « très commune ».
- Équivalence : on remplace une réalité par une autre, propre à la culture cible (parfois reconnue par le dictionnaire, l’usage). Par exemple, le dicton Cuando las ranas críen pelos se traduit par « Quand les poules auront des dents ». Ainsi, dans « Entre humo » (« Écran de fumée »), l’expression como ratón en queso est traduite par « comme un coq en pâte ».
- Généralisation : on traduit un terme particulier (concret ou précis) par un terme plus général (ou plus abstrait). C’est aussi le cas quand une langue emploie un terme de plus grande extension. Par exemple, lorsqu’on traduit butaca par « place » (pour une place au théâtre, par exemple) ou mesón et posada par « auberge », plus général (« Dans nos campagnes »). La pratique inverse est la particularisation : on traduit un terme général (ou abstrait) par un terme particulier (plus précis ou plus concret) ou lorsqu’une langue emploie un terme de moindre extension. Par exemple, lorsqu’on traduit « Il/Elle le fit taire » par Le mandó callar.
- Modulation : on effectue un changement de point de vue par rapport à la formulation du texte source ; ce changement peut être lexical ou syntaxique. Par exemple, dans la première phrase de « Simplette », on a mis en avant les circonstances de la promenade de Fanny et Manolo (la campagne, le printemps), ce qui souligne l’ennui du couple, au cœur de leur désir d’enfant.
- Perte (entropie, lacune) : dans le passage de la langue source à la langue cible, il y a perte quand une partie du message ne peut plus être explicitée faute de moyens structuraux, stylistiques ou métalinguistiques. La lacune est un cas particulier de l’entropie. Cette perte peut parfois être compensée. C’est le cas dans « Dans nos campagnes », où Marie-crapaude embrasse le bout de ses doigts, littéralement, pour exprimer son enthousiasme. On a eu recours à l’expression « un geste enthousiaste de la main ».
- Traduction littérale : on traduit mot à mot un syntagme ou une expression. Par exemple : Está leyendo traduit par « Il/Elle est en train de lire ». Par exemple, lorsqu’on traduit le syntagme « Cárcel Modelo » par « Prison Modèle » dans « Sans passion ».
- Transposition : on change la catégorie grammaticale dans le texte cible. Par exemple : traduire No tardará en venir par « Il/elle sera bientôt de retour » plutôt que « Il/Elle ne tardera pas à revenir ». Dans « La mise en garde », le Oyendo initial devient « Dès qu’elle entendit » ; dans « Je n’invente rien », la multitud linchadora devient « la foule prête à le lyncher ». Un cas particulier de transposition est le chassé-croisé : on permute des signifiés et on change de catégorie grammaticale. Par exemple : Anda cuesta arriba devient « Il/Elle monte la côte en marchant ». Ce procédé est très fréquent.
- Variation : on change des éléments linguistiques qui affectent des aspects de la variété linguistique (l’origine sociale, l’origine géographique, l’âge, le genre, etc.). Par exemple, en substituant la suppression d’un -d- intervocalique en langue source qui n’est pas reproductible en langue cible par un vulgarisme lexical. Ainsi, dans « Sans passion », andar namorao est traduit par « s’amouracher ».
* Ce glossaire ad hoc a été réalisé à partir des travaux d’Amparo Hurtado.