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Les figures patrimoniales de la ville universitaire à Montpellier
De la valorisation d’un héritage immobilier à la recherche d’une nouvelle modernité culturelle

Les relations entre ville et université ont un fondement historique, objet d’une double valorisation universitaire et urbaine. Figures de proue de la renommée d’une cité, les lieux d’enseignement ont en effet toujours contribué à la structuration de l’espace des villes et à leur attractivité régionale, nationale voire mondiale. Les bâtiments et leurs localisations emblématiques portent aujourd’hui cet héritage1.

En France, les enjeux les plus récents, traduits en une série de plans de modernisation d’initiative gouvernementale (Université 2000, Université du 3e millénaire, Opération Campus), continuent d’interroger cette base doublement fondatrice, pour les établissements et leurs offres d’une part, pour les agglomérations d’accueil, d’autre part. La perpétuation de ce double rayonnement réciproque reste une perspective active.

Aux côtés de Bologne, Salamanque, Oxford, Cambridge, La Sorbonne ou al-Azhar au Caire, l’université de Montpellier affiche un héritage parmi les plus anciens2. Comment tout ou partie de cet héritage, aux traductions diverses, répond-il aux problématiques contemporaines associant d’une part valorisation patrimoniale et promotion d’une forme d’excellence, et d’autre part, intégration urbaine au bénéfice de la collectivité et de son rayonnement propre ? Pour célébrer les 800 ans de la Faculté de médecine, le timbre édité (fig. 1) associe le patrimoine bâti qui, aujourd’hui, incarne cet héritage dans le centre historique, à l’architecture du nouvel édifice inauguré en 2017 dans le quartier hôpitaux-facultés (conception : agence Fontès architecture).

Fig. 1. Ancrer et projeter l'héritage universitaire. Timbre édité pour les 800 ans de la faculté de médecine de Montpellier (La Poste, 2020).
Fig. 1. Ancrer et projeter l’héritage universitaire. Timbre édité pour les 800 ans de la faculté de médecine de Montpellier (La Poste, 2020).

Plusieurs leviers peuvent être identifiés et intégrés dans une lecture articulée autour de situations concrètes tirées du cas montpelliérain susceptibles d’ouvrir à des analyses et conclusions partageables.

Bien que déjà anciens, les derniers éléments d’analyse relatifs à ce cas3, servent de point d’appui. Leur lecture critique est complétée par les enseignements tirés de la participation active à deux études réalisées dans le cadre de l’opération Campus4.

L’enjeu n’est pas de dresser un état/portrait de cette ville de ce point de vue, mais de prendre appui sur ses traits caractéristiques pour qualifier le modèle qui aujourd’hui se développe en référence à ce qui a prévalu jusque-là. La promotion métropolitaine5 et ses incidences possibles sur tous les secteurs, introduisent la nouveauté. Finalement, le regard porté embrasse l’ensemble des aspects de la question, qualifie une situation, et dit la trajectoire dont elle relève, ouvrant ainsi sur les temps à venir.

Ce texte articule quatre parties. La première précise le cadre d’intelligibilité permettant de saisir le cas montpelliérain. La deuxième propose plusieurs repères offrant une juste appropriation de la singularité de cette situation. La troisième détaille le premier rapport établi entre logiques de préservation et d’aménagement, et renseigne le second faisant dialoguer logiques de reproduction et d’innovation. La quatrième partie esquisse les figures patrimoniales inspirées du cas traité.

Ville, université et patrimoine : une lecture des relations centre/périphérie

L’orientation donnée aux travaux a été plus diachronique qu’historique, tournée vers les lieux mais pas exclusivement vers les lieux, attentive à la totalité du patrimoine universitaire sans le réduire à sa dimension urbaine (bâtie), en capacité de croiser les deux approches universitaire et urbaine, mais également proactive de sorte à nourrir une forme de prospective de la question posée. L’approche développée mobilise donc plusieurs critères. Tout étant lié, une stratégie pour un territoire n’a de chance d’aboutir que si elle parvient à assurer la grande cohérence d’une lecture croisée : autrement dit, la ligne universitaire à tout point de vue (projet scientifique, programmation immobilière, partenariats, etc.) doit s’articuler à une ligne plus territoriale (projets social, économique, environnemental, urbain).

Les rapports ou relations centre/périphérie, qui ont guidé la réflexion, se traduisent notamment sur le plan spatial. Ce rapport est au cœur de la formation historique de nos villes et régit encore nombre d’aspects liés à leur fonctionnement. Il permet de saisir ce qui, sur le plan de l’aménagement urbain, ayant eu à considérer les enjeux universitaires (en termes d’implantation notamment), a pu se traduire par un ou des gestes forts comme dans les années 19606 à Montpellier, l’implantation en périphérie nord du centre historique des campus sciences et lettres, de part et d’autre de la route de Mende7 (fig. 2).

Fig. 2. L’université gagne le nord du territoire communal. Vue aérienne oblique de 1969, depuis le sud-ouest. Avec l’aimable autorisation de Claude O’Sughrue (photo Claude O’Sughrue n° 69 024).
Fig. 2. L’université gagne le nord du territoire communal. Vue aérienne oblique de 1969, depuis le sud-ouest. Avec l’aimable autorisation de Claude O’Sughrue (photo Claude O’Sughrue n° 69 024).

Seul le plan de l’architecte Eugène Beaudouin (fig. 3), jamais appliqué, avait donné dès 1941 l’orientation, en localisant les secteurs universitaire (zone grise) et hospitalier (zone rose) précisément là où ils seront implantés et/ou développés.

Il peut être également utile de juger le comportement de ce rapport centre/périphérie dans le temps : ce qui était central hier sur le plan urbain ne l’est peut-être plus aujourd’hui, et vice-versa : de l’université historique, enfermée au centre, à son expression contemporaine qui s’affirme massivement hors de l’hypercentre, sauf pour le droit qui a su s’y maintenir en totalité, et la médecine qui y garde un pied avec l’occupation permanente depuis la Révolution française de l’ancien évêché, hérité du Moyen Âge.

De même, le traitement de l’enjeu universitaire (et de ses objets) a pu voir des questions périphériques revenir au centre. Le croisement de ces lectures spatio-temporelles (lecture urbaine et lecture universitaire) est également productif. Cette vue d’ensemble doit permettre de mieux cerner ce qui peut relever d’une stratégie en lien avec les démarches de projet – projet universitaire et projet urbain en quelque sorte – mais également et surtout intrication des deux.

Fig. 3. Plan d’aménagement et d’extension de la Ville de Montpellier. Eugène Beaudouin, 1941 (Archives Municipales de Montpellier, 2Fi562).
Fig. 3. Plan d’aménagement et d’extension de la Ville de Montpellier. Eugène Beaudouin, 1941 (Archives Municipales de Montpellier, 2Fi562).

Ainsi, comment la relation historique « ville et université » répond-elle aux problématiques contemporaines de valorisation patrimoniale croisée, de promotion d’une forme d’excellence à la fois pour la ville et l’université, et d’intégration urbaine de ce monde au bénéfice de sa communauté ainsi que de la collectivité, et de leurs rayonnements respectifs ? Comment les rapports centre/périphérie et ce qu’ils peuvent incarner aident-ils à répondre à cette question ? Dans ce texte, en conservant l’esprit de l’approche globale développée, l’analyse donne la priorité aux enjeux d’aménagement, d’urbanisme, d’architecture et de paysage.

Les deux axes d’interpellation adoptés font valoir chacun un équilibre.

Le premier équilibre articule deux premières logiques : d’une part le souci de préservation de l’identité historique et la capacité à le mettre au service d’un rayonnement renforcé, et d’autre part, l’ouverture à la nouveauté, la conquête de nouvelles positions qui peuvent disposer d’une traduction spatiale.

Le second équilibre associe deux autres logiques qui sont autant de façons de projeter : d’une part le réflexe de la reproduction c’est-à-dire le réinvestissement de l’expérience capitalisée, d’autre part, le principe de l’innovation qui, sans nécessairement s’affranchir totalement de ce qui a été, choisit de valoriser la nouveauté.

La situation montpelliéraine est donc investie grâce à cette grille de lecture et d’analyse, en montrant par l’exemple8. Bien entendu, ce dispositif pourrait être reconduit dans d’autres cas.

L’hypothèse principale pose que les projets et stratégies urbaines, entendus à l’échelle d’une ville centre et plus encore d’une métropole, se doivent d’intégrer fortement la réalité « enseignement supérieur et recherche »9, aussi fragmentée soit-elle, tant d’un point de vue spatial que dans sa nature, mais également en ce qui concerne les formes qu’elle a pu prendre10. Suivant cette hypothèse, ce texte tente d’en révéler les modalités et expressions possibles.

Ville et université à Montpellier. Repères

Par la synthèse, plusieurs repères montpelliérains sont proposés en regard de la situation bordelaise, lorsque cela s’y prête. D’abord, dans les deux cas, relativement à la population, ville et agglomération affichent des structures inversées : la commune de Montpellier pèse sur son agglomération (299 096 habitants en 2020 pour la ville centre sur un effectif total de 499 761 habitants toujours en 2020 dans les 31 communes de la métropole (421 km2)), cependant qu’à Bordeaux, les 259 809 administrés (2020) doivent se situer parmi les 819 604 métropolitains (2020) peuplant les 28 communes (578 km2). La dynamique démographique restant soutenue ici et là.

Sans surprise, dans chacun des deux centres historiques, la trajectoire universitaire, ancienne (1289 à Montpellier, 1441 à Bordeaux), marque l’espace, notamment à Montpellier autour de l’enseignement du droit. Aujourd’hui, des centaines d’hectares accueillent cette réalité. Sur la partie nord du territoire montpelliérain, environ 900 ha (sur les 5688 ha que compte la commune) agencent en un bloc les principaux campus, centres de recherche et hôpitaux. Là, où, précisément, en Gironde, une logique multisite d’envergure s’anime à l’échelle métropolitaine. La composition spatiale et administrative de ces métropoles explique cette différence avec d’un côté la présence de villes petites et moyennes (Mérignac, Pessac, Talence) et de communes de plus de 20 000 habitants, de l’autre, la ville centre domine le reste du territoire d’où les villes petites et moyennes restent globalement absentes. En quarante ans, l’accroissement spectaculaire du nombre d’habitants des communes à l’ADN villageois ne parvient pas à faire de celles-ci des villes, même petites.

De part et d’autre, les composantes universitaires sont assez proches : l’université de Montpellier (droit, médecine, sciences, STAPS, pharmacie, etc.) affiche 51 000 étudiants auxquels s’ajoutent environ 20 000 étudiants (hors Béziers) de l’université Paul-Valéry Montpellier III (arts, lettres, langues, sciences humaines et sociales). L’université de Bordeaux (sciences, lettres, droit, économie, gestion, vin, santé, etc.) accueille 54 000 étudiants tandis que l’université Bordeaux Montaigne (lettres, langues, SHS, etc.) enregistre 18 000 inscriptions.

Du côté de l’emprise universitaire montpelliéraine, outre l’implantation de la faculté d’économie dans le quartier Richter relevant du secteur d’aménagement Port Marianne dans la partie est du territoire communal, l’essentiel est localisé sur les 900 hectares évoqués.

Précisément, sur la carte suivante (fig. 4), le centre historique, dans le coin inférieur droit, cerné par l’Esplanade à l’est et l’ancienne place royale du Peyrou à l’ouest, indique le premier sommet d’un triangle contenant ce vaste secteur. Notons en ce lieu la présence du jardin des plantes (1593), partie intégrante de l’université de Montpellier (faculté de médecine) qui s’y ancre (présidence de l’université de Montpellier). Les universités, centres de recherche et cités universitaires (Triolet, Boutonnet, Vert-Bois, Voie Domitienne) s’insèrent par grandes masses depuis ce point d’impulsion jusqu’aux limites nord de la commune : campus sciences, campus lettres, faculté de pharmacie, Agropolis, notamment (bleu foncé). Les établissements hospitaliers structurent l’ouest du périmètre (en bleu clair) pérennisant ainsi les implantations des premiers établissements suburbains de la fin du XIXe siècle. Les parcs, dont le zoo, et le site de Lavalette (Agropolis), complètent l’ensemble au nord.

Il y a là sans doute une première traduction d’un rapport centre/périphérie puisqu’après avoir été contenue dans le centre historique jusqu’à l’immédiat après Deuxième Guerre mondiale, l’université a trouvé son terrain d’expansion et de modernisation dans ce qui était une périphérie extrêmement proche du centre historique, mais qui restait finalement très peu urbanisée jusqu’aux années 1950.

Aujourd’hui, ce triangle dit l’université depuis son centre ordonnateur. Ce qui a été aménagé depuis plus de 60 ans a déterminé le développement de la ville au nord (fig. 5). Ce n’est pas nécessairement gage d’une belle lisibilité et d’une grande fonctionnalité, car l’urbanisation qui a accompagné l’implantation des campus (et des hôpitaux) n’a pas fait l’objet d’une anticipation sous la forme par exemple d’un plan directeur d’aménagement ou même d’une réflexion d’ensemble ; pour tout dire, une forme de laisser-aller l’a emporté. L’aménagement des campus n’a pas favorisé un développement stratégique ; bien au contraire, la fragmentation généralisée et la figure de l’enclave qualifient aujourd’hui ce vaste secteur.

Fig. 4. Emprises hospitalo-universitaires dans le nord du territoire communal (Ville de Montpellier, étude urbaine, groupement Garcia-Diaz, L. Viala et al. 2008).
Fig. 4. Emprises hospitalo-universitaires dans le nord du territoire communal (Ville de Montpellier, étude urbaine, groupement Garcia-Diaz, L. Viala et al. 2008).
Fig. 5. Les composantes de l’ensemble hospitalo-universitaire, situation en 2010 (Ville de Montpellier, étude urbaine, groupement Garcia-Diaz, L. Viala et al. 2008).
Fig. 5. Les composantes de l’ensemble hospitalo-universitaire, situation en 2010 (Ville de Montpellier, étude urbaine, groupement Garcia-Diaz, L. Viala et al. 2008).

Les logiques à l’œuvre

Exploratoire, l’analyse identifie et croise donc les quatre logiques évoquées.

De cette représentation se dégagent des configurations multiples, nuancées (fig. 6), qui pour certaines pourraient présenter un niveau de complexité supérieur en relevant à l’origine d’une position ancrée dans l’un des « carrés d’interprétation » numérotés ici de 1 à 4 (points de couleur franche) pour évoluer et se révéler dans un autre (points de couleur atténuée).

Fig. 6. Relations ville/université : positions et configurations (Laurent Viala, 2023).
Fig. 6. Relations ville/université : positions et configurations (Laurent Viala, 2023).

Des positions cardinales…

Le premier axe (ordonnées), relatif à l’état des positions, exprime les niveaux de tension possiblement observables entre une première position extrême quelque peu conservatrice (préserver) et une seconde plus progressiste (transformer). L’une et l’autre étant susceptibles d’afficher des motivations plus ou moins bénéfiques pour l’université et la collectivité.

Les logiques de préservation [P] intéressent deux registres. Le premier renvoie aux enjeux proprement patrimoniaux puisqu’il s’agit de protéger, valoriser et pérenniser les réalités matérielles et immatérielles témoignant de ce qui a été laissé en héritage et qui aujourd’hui participe du socle universitaire, mais également de son articulation à l’espace de la ville. Le second, plus restrictif, pointe les réticences dont peut faire preuve tout ou partie de l’instance universitaire lorsqu’elle est confrontée à une évolution. Il s’agit de se préserver de tout ce qui peut apparaître comme pouvant porter atteinte à l’identité de l’université. Il en va ainsi des enjeux de valorisation foncière.

Avec ces logiques, les fonctions de commandement restent ancrées au centre à l’image des « joyaux » que sont le jardin des plantes (1593), les facultés de médecine et de droit, les deux points d’appui de la fondation universitaire (fig. 7). Notons une forme de renforcement en provenance de la périphérie avec la réinstallation d’une partie de l’université Paul-Valéry, au centre, dans l’ancien hôpital du XIXe siècle réhabilité. Relevant de ces mêmes logiques, l’échec d’Agropolis Museum (nourritures et agricultures du monde) doit être relevé ; trop à l’écart de l’effervescence quotidienne de la ville, puisque localisé en limite communale nord, l’équipement n’a pu s’ancrer. C’est un échec pour l’aménagement et le développement de la ville (bâtiment toujours à l’abandon), mais surtout un signe possiblement inquiétant pour la préservation des collections. Sans nécessairement connaître une traduction en termes d’aménagement, ces collections connaissent à Montpellier depuis plus de dix ans, une perspective plus heureuse. En effet, après avoir garanti dans le temps la protection du patrimoine bâti, l’université montpelliéraine a obtenu pour ses riches collections la reconnaissance et l’accompagnement au titre des Monuments historiques (classement et inscription) côté sciences, médecine (conservatoire d’anatomie) ou arts et lettres (musée des Moulages sur le campus Paul-Valéry)11.

Fig. 7. Ville et université : les fondements historiques préservés au centre (image google, Laurent Viala, 2023).
Fig. 7. Ville et université : les fondements historiques préservés au centre (image google, Laurent Viala, 2023).

Les logiques d’aménagement [A] ne correspondent pas nécessairement à une position contraire ; toutefois, elles disent clairement la dynamique du monde universitaire dont les positions historiques connaissent des changements d’ampleur : gagner de l’espace, accéder à des lieux plus confortables, plus en phase avec les modes d’enseignement du moment, ou bénéficier de plus de centralité pour une meilleure accessibilité et/ou exposition. Ces motivations ne sont pas exclusives les unes des autres.

Le second axe (abscisses), relatif à la dynamique des positions, associe une perspective se nourrissant de l’expérience capitalisée à une perspective plus libre mais plus risquée.

Les logiques de reproduction [R] veulent traduire l’idée de confirmation d’une légitimité historique et d’une expérience reconnue, tandis que les logiques d’innovation [I] ouvrent des voies qui, sans renoncer aux acquis ou s’en éloigner trop fortement, parviennent à renforcer l’existant qui par endroit le réclame. Un aspect de l’assise historique peut faillir, s’épuiser voire menacer de disparaître.

Côté reproduction, les logiques signalent ce qui, dans la dynamique universitaire et éventuellement urbaine, relève d’une forme de capitalisation de l’expérience, confinant par endroit à l’identification et la mobilisation de bonnes pratiques. Ce qui a fonctionné peut encore fonctionner. Une situation rend bien compte de ces logiques-là. Elle peut se lire en deux temps.

Premier temps, le passage de l’école d’agriculture à la fin du XIXe siècle à Agropolis international aujourd’hui, le grand centre de la recherche en agronomie désormais mondialement reconnu12. En 1870, l’école impériale d’agriculture de la Saulsaie (Pays de Dombes dans l’Ain) est transférée à Montpellier sur le domaine agricole de La Gaillarde. À la vielle de la Deuxième Guerre mondiale, le domaine agricole de Lavalette devient propriété de la Ville de Montpellier qui le met à la disposition de l’école. Au milieu des années 1980, l’école nationale supérieure agronomique de Montpellier est au nombre des membres fondateurs d’Agropolis (fig. 8), association dédiée à la recherche et à l’enseignement supérieur dans le champ de l’agronomie méditerranéenne et tropicale. Il y a dix ans, la Ville de Montpellier accueillait le siège du groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (CGIAR).

La seconde séquence pointe le modèle que représente l’avènement, le renforcement et le succès d’Agropolis, et sa mobilisation pour réinventer un des piliers fondateurs de l’université montpelliéraine à savoir la médecine et les recherches dans le champ de la santé. Aujourd’hui, MedVallée, promu par Montpellier Méditerranée Métropole pôle mondial d’excellence en santé globale – dont une des composantes/filières (santé, environnement) est agronomie, alimentation, agriculture – a vocation à accompagner le développement de la ville. Le tour d’horizon est complet lorsque l’on rappelle la proximité avec les trois piliers du projet MUSE (Montpellier université d’excellence) labellisé I-Site, Université d’excellence (programme d’investissement d’avenir, PIA) : nourrir, protéger, soigner.

Fig. 8. De l'école d'agriculture à MedVallée : une logique de reproduction à l’œuvre (Agropolis international, CGIAR, Université de Montpellier, Montpellier Méditerranée Métropole ; montage : Laurent Viala, 2023).
Fig. 8. De l’école d’agriculture à MedVallée : une logique de reproduction à l’œuvre (Agropolis international, CGIAR, Université de Montpellier, Montpellier Méditerranée Métropole ; montage : Laurent Viala, 2023).

… aux configurations nuancées

Les premières configurations à examiner contribuent à la structure de l’analyse. Au-delà des positions cardinales ([A], [B], [C], [D]), que disent les positions médianes attachées à chacun des quatre carrés d’interprétation (1, 2, 3, 4) et précisément les quatre positions optimales c’est-à-dire celles poussant à leur maximum les curseurs en abscisses et ordonnées (AI, IP, PR, RA) ? Toutes les autres positions seront appréciées à l’aune du sens donné à ces optimums.

À la croisée des enjeux d’aménagement et d’innovation (AI), la prise de risque dans l’investissement spatial l’emporte. Le dédoublement récent de la faculté de médecine, ancrée depuis huit cents ans dans le centre historique, avec l’implantation d’un nouveau bâtiment dans le secteur des hôpitaux, témoigne à son échelle de cette position proactive. À une autre échelle, dans les années 1960, cette configuration conduit à l’émergence du cœur moderne de l’université. Bien que n’ayant pas produit les effets structurants que l’on aurait pu espérer dans ce vaste secteur nord du territoire communal, la réalisation des deux campus a constitué un enjeu d’aménagement pour le développement de la ville. L’innovation tient tout entière dans les principes que développe l’architecte René Egger13, auquel sont confiées dans la période nombre de réalisations universitaires, notamment dans le sud de la France. Associés, les architectes montpelliérains (Jean de Richemond, Philippe Jaulmes, Jean-Claude Deshons) contribueront à leur façon à l’expression de ce renouveau : collaborant avec des plasticiens, Jaulmes et Deshons, notamment pour le campus de la faculté des lettres et des sciences sociales et humaines, feront dialoguer architecture et art, avec pour point d’orgue le portail Vasarely14. L’appréciation de cette position devient plus complexe du fait de son actualisation. En effet, l’ouverture courant 2024, en partie sud du campus de lettres, d’un nouveau grand équipement (Learning center nommé Atrium. SCAU/Coste architecture) interroge. S’il repose sur des logiques d’aménagement et d’innovation fortes, ce projet présente des qualités architecturales et urbaines qui tranchent avec celles qui ont donné son identité au campus. Si les mises à jour, les modernisations, les transformations doivent être possibles, ces évolutions doivent pouvoir être imaginées et mises en œuvre sans contrarier le contour patrimonial qui a progressivement investi la réalité qu’elles visent. Sur ce site, avec l’Atrium, notamment, nous n’avons pas la certitude que cela soit le cas. Resituée dans le schéma d’analyse, le campus de l’université Paul-Valéry glisse sans doute du carré d’interprétation n° 1 au n° 3, avec une position peu dynamique.

Rapprocher la capacité d’innovation du souci de préservation (IP) encourage une double attitude de permanence et d’ouverture à l’image de ce qui peut se jouer sur les deux campus des années 1960 avec plus ou moins de réussite. En effet, les interventions sur chacun des deux sites ne témoignent pas nécessairement d’un accord optimal. Citons simplement la tentative avortée d’implantation du Learning center, évoqué à l’instant, à cheval sur les deux sites, enjambant ainsi la route de Mende.

Faire concorder préservation et reproduction (PR) est une marque de prudence, une volonté de se saisir de l’expérience capitalisée certes, mais pour consolider l’existant, pour renforcer les bases sans trop s’ouvrir à la nouveauté. Au milieu des années 1990, parce que ses principaux acteurs l’ont défendu, sur fond de bataille politique mémorable, la faculté de droit a fait le choix de son maintien en un lieu d’ancrage historique. Georges Frêche, maire et professeur de droit, n’a pas réussi à faire triompher une logique d’aménagement conduisant à l’arrivée de la faculté de droit, avec d’autres composantes, sur le site Richter dans le secteur Port Marianne. La réalisation de ce nouveau quartier a reposé sur une double intégration réciproque ville et université. Ce sera d’ailleurs la seule expérience réelle15.

Enfin, rapprocher les logiques d’aménagement des logiques de reproduction (RA) encourage une régénération des bases, et peut être synonyme d’un volontarisme maîtrisé. La recomposition de la chimie en limite nord du campus de sciences, jusque-là dispersée, en est un témoignage de premier plan. Au sud du site occupé par le CNRS, l’aménagement du pôle Balard, tout en bénéficiant d’une implantation réussie sur le site de l’ancien établissement français du sang, ne rompt toutefois pas avec le principe de séparation des entités caractéristique de ce vaste quartier universitaire.

Figures patrimoniales de la ville universitaire

Comment la relation historique « ville et université » répond-elle aux problématiques contemporaines de valorisation patrimoniale croisée, de promotion d’une forme d’excellence à la fois pour la ville et l’université, et d’intégration urbaine de ce monde au bénéfice de sa communauté ainsi que de la collectivité et de leurs rayonnements respectifs ? Telle est la question qui a motivé ce texte.

Au moment de conclure, provisoirement, trois figures patrimoniales de la ville universitaire se dessinent. Elles prennent la forme de trois ordres de vérité qui ne se spatialisent pas nécessairement et peuvent être associés. La première voie est celle de la vérité historique qui repose sur l’efficacité liée à la perpétuation de l’héritage ancien, reçu, entretenu et développé sans voir sa base altérée. La deuxième vérité est fonctionnelle en ce sens que l’accent est mis sur l’adaptation et le renforcement du référentiel universitaire dans son rapport à la ville. Enfin, une vérité narrative pose la question de l’actualisation du récit intégrateur et, partant, de la capacité de réinvention de cet attelage.

Le deuxième ordre de vérité réclame un complément car il ouvre à trois enjeux concrets qui concernent plus directement le domaine dans lequel ce texte a choisi de situer le propos. L’enjeu de l’espace public, de son aménagement en lien avec les espaces collectifs des sites et de leurs qualités respectives, qui bien souvent parlent de la chose héritée, de ce qui fait patrimoine. En lien avec le précédent, l’enjeu de transparence permettant de lutter contre l’effet d’enclave qui peut s’avérer sans effet voire être apprécié par les établissements, mais qui ne va pas dans le sens d’un rapprochement de l’université et de la ville ; la première ne se donne pas à voir (sur le plan paysager notamment) et ne tire pas parti des aménités ; la seconde compose avec ces vastes emprises dont les responsables ne disposent pas toujours des moyens de hisser leurs espaces à bon niveau. Enfin, l’enjeu de construction, sur le plan urbain, de ce territoire universitaire, de sa lisibilité, de sa visibilité, surtout lorsqu’une concentration peut être observée comme c’est le cas à Montpellier sur 900 hectares. La focalisation sur le centre historique, avec maintien quasi complet des bases historiques (droit, médecine, présidence de l’UM, retour des lettres, sur le site saint Charles), semble aller dans ce sens.

La ville pense l’intégration de l’université par l’espace public. Schéma directeur
                     d’urbanisme
Fig. 9. La ville pense l’intégration de l’université par l’espace public. Schéma directeur d’urbanisme (Ville de Montpellier, étude urbaine, groupement Garcia-Diaz, L. Viala et al. 2008).
Fig. 10. L’université structure la ville. Plan d’ensemble (PRES Sud de France, concours U&U, groupement MVRDV, L. Viala et al. 2010).
Fig. 10. L’université structure la ville. Plan d’ensemble (PRES Sud de France, concours U&U, groupement MVRDV, L. Viala et al. 2010).

Mais l’ambition réclame l’adoption d’un parti audacieux. À la fin des années 2000, dans le cadre du concours initié par le PRES (urbanisme et université), la proposition du groupement emmené par MVRDV misait sur la traduction dans la réalité de l’espace universitaire d’une lecture prospective cherchant à optimiser la position montpelliéraine au travers d’une batterie de critères (performance, attractivité, cohésion, responsabilité) et d’indicateurs (fig. 11), afin de renouveler la lecture urbaine de la relation historique « ville et université » ; bien plus en tout cas que le schéma directeur d’urbanisme auquel aboutissait l’étude urbaine réalisée quelques mois plus tôt (fig. 9). À l’intégration de l’université par l’espace public (fig. 12), que ce schéma proposait, s’opposait une vision misant sur la structuration de l’espace de la ville par l’université (fig. 10).

Score de Montpellier
Fig. 11. Score de Montpellier (PRES Sud de France, concours U&U, groupement MVRDV, L. Viala et al. 2010).
Fig. 12. Les campus sciences et lettres : perspective pour un renouveau (Ville de Montpellier, étude urbaine, groupement Garcia-Diaz, L. Viala et al. 2008).
Fig. 12. Les campus sciences et lettres : perspective pour un renouveau (Ville de Montpellier, étude urbaine, groupement Garcia-Diaz, L. Viala et al. 2008).

Notes

  1. Florence Bourillon, Nathalie Gorochov, Boris Noguès, Loïc Vadelorge (dir.), L’Université et la ville. Les espaces universitaires et leurs usages en Europe du XIIIe au XXIe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Histoire », 2018. Christophe Charle, Jacques Verger (dir.), Histoire des universités : XIIe-XXIe siècle, Paris, PUF, 2014. Eléonore Marantz, Stéphanie Méchine (dir), Construire l’université : architectures universitaires à Paris et en Île-de-France (1945-2000), Paris, Publications de la Sorbonne, 2016.
  2. Marcel Bories, « Les origines de l’université de Montpellier », p. 92-107 dans Les Universités du Languedoc au XIIIe siècle. 5e colloque, Fanjeaux, juillet 1969, Toulouse, Édouard Privat Éditeur, 1970.
  3. Alexandre Brun, Stéphane Coursière, « Faire converger projet métropolitain et stratégies universitaires : l’autre grand chantier de Montpellier ? », Espaces et sociétés, 159, 2014/4, p. 37-57. Faire converger projet métropolitain et stratégies universitaires : l’autre grand chantier de Montpellier ? | Cairn.info
  4. La première correspond à l’étude urbaine commandée par la Ville de Montpellier sur près de 900 ha afin d’accompagner le projet porté par les universités (Étude urbaine réalisée par une équipe pluridisciplinaire dont le mandataire était le Cabinet Garcia-Diaz, 2008-2009). La seconde s’est inscrite dans le cadre du concours U&U (urbanisme et université, 2009-2010) proposé à Montpellier par le pôle de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) Sud de France. En l’occurrence, les travaux évoqués ont été développés au sein d’une équipe pluridisciplinaire placée sous l’autorité de l’agence hollandaise MVRDV. Patrick Tondat, U&U. Concours international université et urbanisme à Montpellier Sud de France, Montpellier, Éditions de l’Espérou, 2011.
  5. Loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « loi MAPTAM ».
  6. Yvon Comte, Hélène Palouzié, Jean-François Pinchon, Le campus de la faculté des Lettres et Sciences humaines de Montpellier : une création architecturale et artistique des années 1960, Montpellier, DRAC Languedoc-Roussillon, 2012.Serge Vassal, « Les nouveaux ensembles universitaires français. Éléments de géographie urbaine, Annales de Géographie, n°426, t.78, 1969, p. 131-157 [https://doi.org/10.3406/geo.1969.15836]
  7. Sur cette vue de 1969, le coin inférieur gauche permet d’entrevoir la pointe est du site historique (la Gaillarde) de l’école d’agriculture, aujourd’hui Institut agro de Montpellier. Au premier plan, la nouvelle faculté de pharmacie (1963) et, lui faisant face, au nord, la cité universitaire Voie Domitienne, construite quelques années après ; au-delà, l’hôpital pavillonnaire (psychiatrie) de la Colombière (1906), puis la cité universitaire du Triolet (1962). Sur le bord droit de la photographie, en position médiane, la cité universitaire de Boutonnet dans son parc. Avant le dernier plan, correspondant aux vastes espaces boisés du parc zoologique du Lunaret et au bois de Montmaur, s’offrent, encadrés par les deux grands axes nord-sud (route de Ganges et route de Mende), les hôpitaux Saint-Éloi (1890) et Guy-de-Chauliac (1970), puis le campus des sciences et celui des lettres, tout juste achevé.
  8. On traitera entre autres d’aménagement (réinvestissement urbain, opération nouvelle), d’urbanisme universitaire (le modèle du campus), de pôle d’excellence, etc.
  9. Dans ce texte, le référentiel universitaire pourra bien souvent désigner tout entier l’enseignement supérieur, alors que dans les faits celui-ci ne s’y réduit pas.
  10. Catherine Compain-Gajac (dir.) Les campus universitaires : architecture et urbanisme, histoire et sociologie, état des lieux et perspectives, Perpignan, Presses universitaires de Perpignan, 2014. [https://doi.org/10.4000/books.pupvd.7297]
  11. Luc Gomel, « Un Service des collections à l’Université Montpellier 2. La constitution d’un service spécifique dédié à la conservation des collections : un début de solution pour le sauvetage du patrimoine scientifique universitaire ? », In Situ, 17, 2011. [https://doi.org/10.4000/insitu.9522]. Rosa Plana-Mallart, Géraldine Mallet, « Le projet de rénovation et de valorisation du Musée des moulages et les collections d’Art et d’Archéologie de l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 », In Situ, 17, 2011. [https://doi.org/10.4000/insitu.880]. Marion Lagrange (dir.), Université & histoire de l’art : objets de mémoire, 1870-1970, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017.Hélène Palouzié, « La protection monument historique : connaissance et reconnaissance des collections de l’Université de Montpellier », In Situ, 17, 2011. [https://doi.org/10.4000/insitu.940].
  12. Jean-Paul Legros, « De l’école régionale d’agriculture de Montpellier à Montpellier-Sup-agro et Agropolis », Pour, 200, 2009/1, p. 71-78. [https://10.3917/pour.200.0071].
  13. Eléonore Marantz, « René Egger ou la réinvention de l’architecture universitaire (1947-1973) » dans Catherine Compain-Gajac (dir.) Les campus universitaires : architecture et urbanisme, histoire et sociologie, état des lieux et perspectives, Perpignan, Presses universitaires de Perpignan, 2014. [https://doi.org/10.4000/books.pupvd.7363].
  14. Cf. Le campus de la faculté des Lettres et Sciences humaines de Montpellier : une création architecturale et artistique des années 1960. DRAC Occitanie, collection Duo, 2012. (pdf disponible sur https://www.culture.gouv.fr/).Yvon Comte, « Architectes et plasticiens dans la conception et la réalisation du campus de la faculté des Lettres et Sciences humaines de Montpellier », In Situ, 32, 2017. [https://doi.org/10.4000/insitu.14748].
  15. Les entretiens réalisés dans le cadre de l’étude urbaine commandée par la ville de Montpellier en 2008 et dans le cadre du concours U&U lancé par le PRES en 2010, ont montré toute la réticence des établissements à s’ouvrir à la ville. Il était en effet question à ce moment-là d’imaginer mêler les tissus, notamment dans cette partie nord marquée par la figure de l’enclave. Les logiques d’aménagement fonctionnent donc à plein régime depuis plus de 50 ans : du centre historique aux limites nord de la commune de Montpellier avec Agropolis, le développement universitaire se poursuit encore aujourd’hui sans pour autant avoir amélioré l’ensemble urbain dans lequel il inscrit sa dynamique. Seule l’arrivée de la première ligne de tramway, et désormais de la cinquième (route de Mende), permet d’intervenir hors de l’université (sur l’espace public), mais à son bénéfice. L’immixtion directe de la ville dans l’université reste une perspective peu réaliste.
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Pessac
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EAN html : 9791030011395
ISBN html : 979-10-300-1139-5
ISBN pdf : 979-10-300-1140-1
Volume : 32
ISSN : 2741-1818
Posté le 18/06/2025
16 p.
Code CLIL : 3669; 3076;
licence CC by SA

Comment citer

Viala, Laurent, « Les figures patrimoniales de la ville universitaire à Montpellier. De la valorisation d’un héritage immobilier à la recherche d’une nouvelle modernité culturelle », in : Mansion-Prud’homme, Nina, Schoonbaert, Sylvain, dir., Villes et universités. Quels patrimoines pour quels avenirs partagés ?, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, collection PrimaLun@ 32, 2025, 77-94, [en ligne] https://una-editions.fr/les-figures-patrimoniales-de-la-ville-universitaire-a-montpellier [consulté le 20/06/2025].
Illustration de couverture • Maquette d’étude du quartier de l’Esplanade (mai 1959). C.-G. Stoskopf architecte (avec intégration du projet de R. Hummel pour le campus) (Archives d’Alsace-Site de Strasbourg, fonds Stoskopf, 60J62).
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