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Swatting

Swatting

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Le swatting est un canular téléphonique anonyme et malveillant qui consiste à appeler les forces de police pour signaler un crime ou un acte de terrorisme imaginaire, dans le but de dépêcher une unité d’intervention sur les lieux.

Même si d’autres secteurs peuvent être concernés (journalisme, politique, etc.), cette pratique survient régulièrement dans le milieu concurrentiel du jeu vidéo. En effet, lors de streams (captation et diffusion en direct du contenu d’une partie de jeu vidéo en solo ou multijoueur), les joueurs utilisent des caméras qui les filment. Ainsi l’objectif du swatting vise à assister à l’arrestation de la personne ciblée par les forces d’intervention pendant que la session est diffusée en temps réel sur le net.

Pour réaliser ce canular téléphonique, l’auteur des faits doit collecter des données personnelles sur la personne visée pour arriver à usurper son identité, notamment en falsifiant techniquement le « numéro d’identification de l’appelant » (caller ID spoofing) et afficher auprès des services d’urgence, non pas le numéro réel de l’émetteur, mais celui de la victime ou d’une autre ligne d’appel.

nuage de mots-clés autour de la thématique "circonstances"
  • Canular téléphonique malveillant
  • Livrer des pizzas

Le swatting ne se limite plus aujourd’hui à envoyer les forces de l’ordre au domicile d’une personnalité ou d’un joueur en ligne. C’est pire, il profite du contexte actuel pour revenir en force et provoquer de fausses alertes attentat.
– une victime

De manière anecdotique, l’une des techniques utilisées par les swatters pour vérifier l’adresse de la victime ciblée consiste à lui faire livrer des pizzas alors qu’elle diffuse du contenu en direct et de s’assurer en temps réel du retentissement de la sonnette d’entrée.

En 2002, Delroy Paulhus et Kevin Williams, chercheurs auprès de l’université de la Colombie-Britannique (Canada), ont proposé le modèle théorique de la « triade noire » arguant que le narcissisme, la psychopathie et le machiavélisme forment la base de tous comportements nuisibles, ce qui peut aisément être retrouvé dans les traits de personnalité du swatter :

  • le narcissisme : qui peut se traduire par un fort besoin d’attention et d’admiration notamment par la démonstration d’une habileté technique pour se valoriser auprès de ses pairs (les réactions positives de la communauté des joueurs renarcissisent l’auteur des faits) ;
  • la psychopathie (ou manque d’empathie) : qui peut se traduire par une certaine froideur au regard du plaisir auditif ou visuel éprouvé à observer en direct l’inquiétude des victimes lors de l’intervention des forces de l’ordre, puis la déconvenue des policiers lors de la découverte de la supercherie ;
  • le machiavélisme (ou tendance à manipuler les autres) : qui peut se traduire par l’expression perfide et cynique d’une vengeance dans un environnement extrêmement concurrentiel où la manifestation d’une telle inimitié ne saurait être tolérée hors ligne.

Si le terme swatting fait directement référence aux SWAT (acronyme de « Special Weapons And Tactics »), ces unités d’intervention spécialisées appartenant aux forces de police américaines qui sont dépêchées lors de prises d’otages, d’opérations anti-terroristes, etc., la pratique même fait pourtant écho aux activités de piratage de standard téléphonique plus communément connues sous le nom de phreaking.

Dès les années 1950, plusieurs étudiants américains, identifiés comme des phreakers ou phreaks (contraction de deux mots anglais « phone » pour téléphone et « freak » désignant une personne en marge de la société), ont commencé à s’intéresser à l’exploration et la manipulation des canaux de télécommunication.

Mais le mythe fondateur semble remonter aux années 1960 lorsque John Draper s’est amusé à détourner un sifflet offert en guise de jouet dans les boîtes de céréales Captain Crunch pour pirater certaines fonctions de la compagnie téléphonique Bell. En effet, le son émis par le sifflet reproduisait la même tonalité à 2 600 Hz qu’utilisait le central téléphonique pour ses appels longue distance, faisant croire au système que la communication était terminée, ce qui lui permettait ainsi de téléphoner gratuitement en suivant.

Depuis cette époque, les pratiques de phreaking n’ont eu de cesse de se renouveler permettant tout autant de détourner des lignes, d’écouter des conversations téléphoniques, de passer des appels gratuits, de renvoyer des appels vers des numéros surtaxés, de bloquer l’activité téléphonique d’une entreprise, etc.

Illustration d'un swatting chez un streamer.
Message d'un streamer sur X (anciennement Twitter) partagant sont expérience de swatting.
Captures d’écran de victimes.

Le swatting est passible de poursuites aujourd’hui en France au regard de :

  • l’article 434-26 du Code pénal qui est le « fait de dénoncer mensongèrement à l’autorité judiciaire ou administrative des faits constitutifs d’un crime ou d’un délit qui ont exposé les autorités judiciaires à d’inutiles recherches », prévoit six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende ;
  • l’article 322-14 du Code pénal, qui est le « fait de communiquer ou de divulguer une fausse information dans le but de faire croire qu’une destruction, une dégradation ou une détérioration dangereuse pour les personnes va être ou a été commise », prévoit deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende ;
  • l’article 226-10 du Code pénal, qui porte sur la « dénonciation de faits » que l’on sait totalement ou partiellement inexacts, auprès d’un officier de justice ou de police administrative ou judiciaire, prévoit cinq ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende ;
  • l’article 226-4-1 du Code pénal, qui porte sur « l’usurpation de l’identité d’un tiers ou usage de données permettant de l’identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d’autrui ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération » prévoit un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende.

Quelques références scientifiques :

  • Bernstein Laura-Kate, Investigating and prosecuting “swatting” crimes, Cyber Misbehavior, vol. 64, n° 3, 2016, p. 51-56.
  • Brumfield Eric, Chapter 284. Deterring and paying for prank 911 calls that generate a SWAT Team Response, McGeorge Law Review, vol. 45, n° 3, 2014, p. 585-594.
  • Enzweiler Matthew, Swatting Political Discourse: A Domestic Terrorism Threat, Notre Dame Law Review, vol. 90, n° 5, 2015.
  • Estano Nicolas, Nouvelles technologies et cyberharcèlement : l’exemple du swatting, Criminologie, vol. 52, n° 2, 2019, p. 13‑32, [https://doi.org/10.7202/1065854ar].
  • Jaffe Elizabeth M., Swatting: The New Cyberbullying frontier after Elonis V. United States, Drake Law Review, vol. 64, n° 2, 2016, p. 455-483.
  • Lipson Ashley, Brain Robert, Videogame Law: Cases, Statutes, Forms, Problems & Materials, Carolina Academic Press, 2016, 968 pages.
  • Marion Nancy E., Twede Jason, Cybercrime : An Encyclopedia of Digital Crime, Santa Barbara, Colorado, ABC-CLIO, 2020, 520 pages.
  • Paulhus Delroy L., Williams Kevin M., The Dark Triad of personality: Narcissism, Machiavellianism, and psychopathy, Journal of Research in Personality, vol. 36, n° 6, 2002, p. 556-563, [https://doi.org/10.1016/S0092-6566(02)00505-6].
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Chapitre de livre
Pessac
EAN html : 9791030008425
ISBN html : 979-10-300-0842-5
ISBN pdf : 979-10-300-0843-2
Volume : 1
ISSN : en cours
6 p.
licence CC by SA

Comment citer

Dulaurans, Marlène, « Swatting », in : Dulaurans, Marlène, Violences en ligne : décrypter les mécanismes du cyberharcèlement, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, collection V@demecum 1, 2024, 201-206 [en ligne] https://una-editions.fr/swatting/ [consulté le 15/07/2024].
10.46608/vademecum1.9791030008425.36
couverture de l'ouvrage Violences en ligne de la collection V@demecum
Illustration de couverture • Design Roman Vinçon et Nicolas Ruault
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