Les dieux enfants ont occupé une place importante dans la religion pharaonique, car ils véhiculent une série de concepts liés à leur âge : force de renouvellement, image de la conception cyclique du temps, et traduction de la vigueur de la jeunesse. Dès l’époque amarnienne, Ched, “le Sauveur”, dont le front est orné d’une tête de gazelle, protège contre les bêtes malfaisantes, une prérogative que reprendra l’Horus juvénile debout sur les crocodiles, à partir de la XXIe dynastie. Avec le début du Ier millénaire, le panthéon s’enrichit d’une série de dieux jeunes, comme Khonsou l’enfant, puis Harpocrate, dont le nom est attesté sur une stèle de la XXIe dynastie, et l’image sur une autre stèle de la XXIIe dynastie. Parmi ces dieux-enfants, Harpocrate devint le plus populaire et son impact se poursuivit à l’époque gréco-romaine.
Il faut néanmoins souligner que les dieux caractérisés comme des enfants, mais dépourvus d’attributs réellement distinctifs1, ne sont pas systématiquement à identifier à Harpocrate ; il est notamment nécessaire de prendre en compte le lieu de leur apparition. Il reste vrai qu’Harpocrate connut une carrière exceptionnelle, notamment en raison du succès du mythe osirien. En outre, selon l’auteur, Harpocrate serait un produit de la théologie thébaine (et non coptite, comme le pensait D. Meeks), ce qui fait de lui “le taureau de sa mère” (kamoutef), Isis, devenant ainsi garant des cycles naturels et de la permanence de l’institution royale. Quant au thème de l’allaitement d’Horus par Isis, appelé à une grande vogue, il semble seulement remonter, sur le plan iconographique, à une stèle de la XXIIIe dynastie, alors que l’idée est déjà exprimée dans les Textes des Pyramides.