Les crises migratoires de 2015 et 2016 ont révélé les insuffisances du régime d’asile européen commun et la prise de Kaboul le 15 août 2021 rappelle le caractère imprévisible des crises migratoires ainsi que l’impérative nécessité d’harmoniser les normes pour préserver les droits fondamentaux des personnes au niveau de l’Union européenne, qu’elles demandent l’asile, ou non. Ces crises en ont révélé d’autres : une crise de solidarité entre États membres, désormais divisés sur ces questions1 d’une part, et une crise de confiance entre la Commission et les États membres sur le développement d’une politique commune en matière d’immigration et d’asile2 d’autre part. Le processus d’élaboration des normes en la matière était à l’arrêt depuis 2019 en raison d’une inacceptabilité des États membres à l’égard de l’harmonisation de la politique d’immigration et d’asile. L’élaboration des normes en faveur d’une politique migratoire commune reprend toutefois forme depuis juin 20233.
Le cadre international en matière de demande d’asile est prévu par la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York du 31 janvier 1967, auxquels tous les États membres de l’Union sont parties. Le cadre de l’Union européenne, lui, a été très évolutif. De la suppression des contrôles aux frontières avec les accords de Schengen4, applicables dès 1990, en passant par les Traités de Maastricht en 19935, d’Amsterdam en 19976, jusqu’au Traité de Lisbonne de 2009, les questions d’immigration et d’asile ont connu d’importantes avancées. L’avancée la plus significative était la communautarisation des questions d’asile et d’immigration, en 2004. Cette dernière a été permise par le Traité d’Amsterdam, en matière de procédure d’adoption des décisions européennes en matière d’immigration et d’asile, puisqu’à partir de 2004 (1997-2004 étant le délai de réflexion des États membres pour communautariser ces questions), les normes européennes sont adoptées selon la procédure de codécision – ou procédure législative ordinaire depuis le Traité de Lisbonne – qui suppose que la Commission dispose d’un droit d’initiative exclusif et que le Conseil et le Parlement européen adoptent les décisions à la majorité qualifiée7 – et non plus à l’unanimité, comme auparavant.
La procédure législative ordinaire, ou de codécision, est un processus de négociation entre ces institutions – Parlement et Conseil – aboutissant, par un jeu de compromis acceptables, à un accord, c’est-à-dire à une norme acceptée. En vue de parvenir à cet accord, le Conseil, composé des chefs d’État ou de gouvernement des 27 États membres, et le Parlement, dont les membres sont directement élus par les citoyens européens, examinent les propositions de la Commission et apportent des amendements au texte au cours de deux lectures, c’est-à-dire qu’elles font évoluer le texte selon leurs visions communes, en interne. Soit les institutions parviennent à créer un compromis acceptable qui, dans ce cas, aboutit à un accord, la norme est adoptée et semble ainsi acceptée, soit elles n’y parviennent pas8 et, dans ce cas, au contraire, il n’y a pas d’accord, pas de norme, la recherche d’un compromis acceptable n’ayant pas abouti.
Depuis la mise en place de la procédure législative ordinaire, il a existé un processus permettant la recherche d’une large acceptabilité pour élaborer les normes européennes communes en matière d’immigration et d’asile, aussi bien au sein du Conseil européen que du Parlement. L’élaboration du premier « paquet » asile, en 2003, est révélatrice de cette affirmation et sa refonte, en 2013, a permis de créer des normes communes encore applicables. Toutefois, ces normes ne semblent plus acceptées en l’état : elles sont marquées d’une insuffisante efficacité puisqu’elles sont mal, voire pas appliquées dans les législations internes des États membres, mettant à mal les droits fondamentaux des personnes sur leur territoire – mais également au-delà. Les événements de 2015 et 2016 ont révélé cette manifeste absence d’acceptation de ces normes communes par les États membres.
En 2016, la Commission européenne a proposé une refonte complète de ce régime, à travers sept propositions composant un « paquet asile » plus juste, plus équitable en termes de responsabilités et plus solidaire entre États membres. Cette proposition par « paquet » suppose que tous les actes législatifs en la matière forment un tout indissociable, permettant in fine une application uniforme dans l’Union européenne, en encadrant juridiquement le parcours du demandeur d’asile, de son arrivée jusqu’à son accueil – ou son retour9.
Le processus de développement de la politique migratoire commune était à l’arrêt depuis 2019, faute d’accord entre les co-législateurs de l’Union européenne. En réalité, s’il existe une opposition entre le Parlement européen et le Conseil européen, l’inacceptabilité de la politique migratoire émane plus particulièrement des États membres de l’Union européenne. Les différents partis politiques du Parlement étaient parvenus à trouver un compromis interne sur les derniers textes en discussion10. En revanche, au sein du Conseil, l’affirmation des intérêts de différents groupes d’États membres dans le cadre des processus décisionnels démontre leur incapacité à trouver des compromis acceptables à l’égard de l’ensemble des propositions de la Commission européenne. Les oppositions des pays du Visegrad11 et de l’Italie ont nécessité d’adopter une démarche différente, et les propositions de la Commission devront, une à une, être adoptées individuellement, en commençant par celles qui font l’objet d’un consensus, ou plutôt d’un compromis acceptable entre États membres.
La politique commune d’immigration et d’asile, telle que proposée par la Commission européenne en 2016, semble être vouée à l’échec – l’accord de juin 2023 ne renverse pas réellement les propos suivants –, du fait d’intérêts en présence fondamentalement divergents sur la question de la gestion des flux migratoires, ne permettant pas de faire émerger la moindre acceptabilité. Cette once de pessimisme peut être relativisée : s’il n’existe pas de compromis acceptable, à l’heure actuelle, sur une gestion interne commune, les intérêts en présence au sein de l’arène réunissant les chefs d’État et de gouvernement ne sont pas marqués d’une division absolue. Les intérêts des États membres convergent lorsqu’il s’agit de créer des normes leur permettant de se décharger de leurs responsabilités en termes de gestion des flux migratoires.
En matière d’immigration et d’asile, les États membres déplacent l’objet de leurs compromis au cours des négociations, déplacent le curseur de l’acceptabilité nécessaire à l’élaboration de normes communes. Ils sont ainsi davantage à la recherche d’un compromis acceptable pour l’élaboration d’une politique commune restrictive (I) voire préventive (II).
I. La recherche de l’acceptabilité pour une politique commune restrictive
La recherche de l’acceptabilité pour une politique commune restrictive s’analyse sous deux angles. Les États membres de l’Union européenne ont pu dissimuler l’inacceptabilité de la politique migratoire lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des directives (A). Ils affichent toutefois l’inacceptabilité d’une politique migratoire commune lors de l’élaboration des règlements (B).
A. L’inacceptabilité dissimulée dans l’élaboration et la mise en œuvre des directives
La majeure partie des règles applicables à la procédure « normale » de demande d’asile sont prévues par directives. C’est ainsi le cas de la directive « Qualification »12 de 2011, relative aux normes pour la qualification des ressortissants de pays tiers ou des apatrides en tant que bénéficiaires de la protection internationale, pour un statut uniforme pour les réfugiés ou pour les personnes éligibles à la protection subsidiaire, et pour le contenu de la protection accordée, la directive « Accueil » 13de 2013, établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale, ou encore la directive « Procédures »14, de 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale.
Les directives sont un des moyens de rendre une politique européenne acceptable et c’est tout l’intérêt de l’Union européenne d’en édicter. Les États membres pourront adopter ou maintenir dans leur droit interne des dispositions plus favorables que celles contenues dans les directives préalablement négociées. Les autorités nationales ont le choix de la forme et des moyens pour mettre en œuvre les objectifs de la directive lorsqu’ils procèdent à leur transposition. L’acceptabilité par les États membres s’analyse ainsi dans l’élaboration des directives, et l’inacceptation s’analyse dans l’application de ces directives.
Lors de l’élaboration des directives, les États membres ont négocié les dispositions de telle sorte qu’ils ne soient pas totalement liés à une mise en œuvre pleine et effective du droit d’asile. Par exemple, et c’était l’objet d’une analyse approfondie de la Professeure Marie-Laure Basilien-Gainche, qui souligne que les États membres ont imposé « des formulations vagues leur accordant une large marge de manœuvre d’interprétation, d’appréciation et d’action »15 au cours des négociations de la directive « accueil » – cela valait aussi pour le règlement Dublin III, les formulations vagues « protégeant » les actions fallacieuses des États membres. L’acceptabilité semblait ainsi déjà très relative. Les États membres ont su profiter de la philosophie des directives : la norme adoptée, qui semblait acceptée pendant un temps, laisse place à une sorte de variation de l’acceptabilité permettant, in fine, de faire varier l’application de la norme dans le droit interne. Autrement dit, les États membres ont créé une marge d’appréciation si large – donc acceptable – qu’elle leur permet de faire varier leur acceptation.
Lors de l’application des dispositions des directives, les États membres ont profité de la marge d’appréciation qu’ils avaient eux-mêmes créée. Outre les retards de transposition de la part de certains États membres, dont nous ne pouvons affirmer qu’il s’agisse d’un manque d’acceptabilité16, les applications en droit interne révèlent d’immenses écarts et disparités entre États membres17, par exemple s’agissant des critères de reconnaissance d’un statut ou s’agissant des délais de traitement des demandes et de manière générale des aspects de la procédure de demande d’une protection. Le droit d’asile est considéré comme une compétence régalienne et, malgré l’existence de règles communes, les États ont une approche territoriale et individuelle de ces questions18, renforcée par des idées préconçues qui animent les États membres dans leur confusion entre l’immigration et l’asile, dans leurs amalgames entre l’immigration et la criminalité, voire le terrorisme ou entre l’immigration et les problématiques de sécurité pour in fine, faire preuve d’un véritable manque de volonté politique dans la mise en œuvre d’un régime commun juste et efficace. Ces dernières, qui ont pu faire l’objet d’un compromis acceptable, ne sont dès lors plus acceptées aujourd’hui.
Finalement, les États membres ne sont parvenus à trouver des compromis acceptables que lorsqu’ils consistaient à reconnaître une grande souplesse en termes d’appréciation, d’interprétation et d’application des normes, dans le cadre de l’élaboration des directives.
En 2016, la Commission européenne adopte une autre méthode juridique pour pallier l’inacceptation des normes de l’Union en matière d’immigration et d’asile et pour éviter les défauts d’application. Elle propose de remplacer certaines de ces directives par des règlements, qui peuvent être une solution à l’acceptation transposée en droit interne, mais qui se confrontent, dans leur élaboration, à un manque d’acceptabilité de la part des États membres.
B. L’inacceptabilité affichée dans l’élaboration des règlements
Au moment de la refonte du paquet asile, en 2016, la proposition de la Commission consistait à remplacer deux des directives relatives à la procédure de demande d’asile par des règlements (projet de règlement « Procédure »19, projet de règlement « Qualification »20), à procéder à une refonte de la directive « Accueil »21, et à la création d’un nouveau règlement qui établit un cadre structuré dans l’Union européenne pour la réinstallation22. À la différence des directives, les règlements sont d’applicabilité directe dans les ordres juridiques des différents États membres, ont une force contraignante supplémentaire. C’est notamment dans ce cas de figure que le développement d’une politique commune se confronte à des rapports de force importants entre États membres au sein du Conseil, où les intérêts en présence s’affirment et s’opposent d’autant plus. L’acceptabilité aurait pu être créée au cours des processus décisionnels mais le chemin a été plus sinueux.
Certains États membres ont manifesté leur désaccord, en créant des minorités de blocage23 au cours de l’examen au Conseil européen qui impliquent l’arrêt du dialogue au cours de la procédure législative ordinaire, ou en provoquant le retrait de certains textes lorsque le dialogue est foncièrement impossible24. Cette inacceptabilité s’est particulièrement matérialisée à l’égard de la proposition25 de la Commission européenne de refonte du Règlement Dublin III26, qui fixe des critères hiérarchisés pour déterminer l’État responsable du traitement d’une demande de protection internationale : le pays de première entrée, le lieu de dépôt de la demande d’asile, mais est également prise en compte la situation familiale du demandeur.
Les pays de Visegrad, d’une part, s’opposaient fermement à la mise en place d’un mécanisme de solidarité obligatoire, ne voulant pas se soumettre à un mécanisme de quotas de relocalisation des réfugiés, et les États membres qui composent le groupe Méditerranée27, d’autre part, étaient davantage à la recherche d’un compromis acceptable. Il ne s’agit pas d’une catégorisation absolue, car il peut également se distinguer des sous-groupes, et donc des sous-intérêts dans les rapports de force en présence, tels que les pays de première entrée, qui étaient en première ligne notamment lors des migrations syriennes28, par exemple, qui peuvent partager une vision commune au sein du Conseil du fait de leur position géographique et, finalement, même dans ce « sous-groupe », les États de première ligne ne partagent pas nécessairement la même vision politique des questions d’immigration et d’asile. Les intérêts des États membres étaient trop divergents pour parvenir à trouver un compromis acceptable sur un mécanisme de solidarité basé sur la répartition des demandeurs de protection internationale.
Pour surmonter les difficultés liées à l’acceptabilité par les 27 d’une politique commune, des États membres volontaires, qui partagent une même vision acceptable, ont pu prendre des initiatives informelles, hors cadre institutionnel donc. C’est le cas de la création d’un mécanisme de répartition temporaire des demandeurs d’asile, qui a émergé après une rencontre entre la France, l’Allemagne, l’Italie et Malte, lors d’un mini-sommet organisé à la Valette le 23 septembre 201929. Ce sont des mécanismes de « coopération renforcée » mis en place entre États membres mais qui échappent aux institutions européennes. L’informalité peut présenter l’avantage de renforcer l’acceptabilité des États membres sur la répartition des demandeurs mais par un plus petit nombre. En revanche, elle dépasse les procédures et processus décisionnels et ne permet pas l’implication du Parlement européen, dont les membres sont élus démocratiquement.
Au niveau institutionnel toutefois, le curseur de l’acceptabilité, qui a permis un accord des États membres au sein du Conseil les 8 et 9 juin 202330, a été déplacé sur un mécanisme de solidarité « amélioré » prévu dans un nouveau règlement sur la gestion de l’asile et de la migration. En vertu de ce mécanisme, notamment, au moins 30 000 demandeurs d’asile pourraient être relocalisés chaque année depuis les pays de première entrée vers les pays les moins exposés. Si un État membre refuse la relocalisation, il verserait une compensation financière de 20 000 euros par migrant refusé, soit 600 millions d’euros lorsqu’il refuse les 30 000 demandeurs (au moins)31. Dans l’attente de la position du Parlement en première lecture, l’acceptabilité entre États membres est désormais placée sur la création d’une solidarité financière, à défaut de trouver un compromis sur une pleine solidarité humanitaire. Finalement, l’acceptation de l’inacceptabilité de certains États membres de gérer les flux migratoires pourrait permettre l’émergence d’une politique commune.
Le curseur de l’acceptabilité, ou l’objet du compromis, se déplace par ailleurs vers la prévention de la gestion des flux migratoires, sur laquelle les États membres parviennent à lier leurs intérêts – en dépit des droits fondamentaux des personnes.
II. La recherche de l’acceptabilité pour une politique commune préventive
En matière d’immigration et d’asile, la gestion des flux migratoires tend à être opérée à leur origine32, où les États membres « normalisent l’exception »33 dans un objectif de prévention : ils parviennent à faire converger leurs intérêts sur la question de la gestion des flux aux frontières extérieures de l’Union européenne (A), voire sur l’externalisation totale de la gestion des flux migratoires (B).
A. L’acceptabilité d’une politique migratoire aux frontières
Il existe des pratiques différenciées des États membres consistant à renvoyer systématiquement les demandeurs d’asile aux frontières34, renvois parfois opérés de manière violente et arbitraire, ou à l’issue d’une démarche de dissuasion des demandeurs d’obtenir gain de cause quant à la qualification qui correspond à leur situation (la recherche de soi-disant « faux réfugiés ») ; les propos suivants concernent davantage l’interception des étrangers aux frontières mêmes des États membres de l’Union.
Ce sont notamment les pays de Visegrad, rejoints par l’Italie, qui prônent cette politique, par l’affirmation d’une volonté de lutte contre l’immigration clandestine, de développement d’une politique de retour plus rapide des migrants dits irréguliers et des demandeurs dont la demande d’asile a été rejetée. Les pays du groupe Méditerranée trouvent également leur compte dans cette politique de renforcement des frontières extérieures, même si l’affirmation de leurs intérêts est plus timide. Cela étant, au niveau interne, par exemple, le Président Emmanuel Macron, dans une allocution présidentielle en date du 17 août 2021 sur la question de la situation en Afghanistan et des flux migratoires à venir, laissait penser à cette même volonté de politique migratoire dite sécuritaire35. Le projet de loi – en cours de discussion – « pour contrôler l’immigration et améliorer l’intégration » déposé le 1er février 2023 au Sénat ne contient d’ailleurs pas moins de dispositions orientées en ce sens, visant à renforcer les contrôles aux frontières et à diminuer les mesures protectrices des étrangers36.
Au niveau de l’Union, pour répondre de manière urgente aux crises migratoires, la création des « Hotspots »37, en 2015 et 2016 en Grèce et en Italie38, répondait à cette volonté de traiter les demandes aux frontières de l’Union européenne. Il s’agissait de centres dans lesquels les agents de l’EASO39 et FRONTEX, apportaient leur aide pour « l’enregistrement, l’identification, la prise d’empreintes digitales et le recueil de témoignages, ainsi que pour les opérations de retour »40. Ces « hotspots » sont progressivement devenus des camps de rétention fermés, surpeuplés41, où les migrants sont devenus victimes de traitements inhumains et dégradants ou de renvois systématiques vers la Turquie lorsque leur demande d’asile avait été refusée. Si le dispositif des hotspots apparaît inacceptable sur le plan humain, les États membres, de leur côté, ont considéré qu’il s’agissait d’un « véritable succès dans l’histoire de la solidarité »42.
En 2018, les discussions ont davantage porté sur les « centres contrôlés »43, défendus par la France, notamment. Ce dispositif consiste à placer des demandeurs dans des centres fermés dans les pays de première entrée, après les avoir interceptés dans les eaux territoriales d’un État membre en vue de les transférer, s’ils obtiennent un statut de réfugié, dans un État membre volontaire. En complément de ces centres contrôlés, devaient être prévues des « plateformes régionales de débarquement », qui permettent de déplacer ces centres dans des pays tiers, et non forcément aux bordures des pays de première entrée. Ces plateformes consistent à intercepter les migrants dans les eaux internationales et à les « rediriger » dans des pays dits « sûrs » d’Afrique du Nord. Cela étant, « [L]es pays de la rive Sud de la Méditerranée […] ne souhaitent pas se voir imposer l’installation de telles plateformes […] attendant surtout un soutien pour renforcer leurs capacités visant à empêcher les départs »44. Les pays d’Afrique du Nord ont purement et simplement rejeté, en 2019, d’être « une terre de stockage »45.
Les négociations menées dans le cadre de l’élaboration du règlement « Procédures » sont significatives de cette volonté de renforcer les frontières. À la suite de la proposition de refonte du régime d’asile européen commun, les négociations entre États membres ont notamment porté sur l’article 41 relatif aux procédures aux frontières. Parmi les dispositions débattues, par exemple, d’un délai de quatre semaines proposé en 201646, délai légal au terme duquel le ressortissant d’un pays tiers voit sa demande acceptée si elle n’a pas été traitée et est ainsi autorisé à entrer sur le territoire, le délai est passé à douze semaines47 dans le cadre de la proposition modifiée du règlement « Procédures » du 23 septembre 202048 et selon l’accord trouvé entre États membres les 8 et 9 juin 202349, pour diminuer le nombre de « passe-droits »50. Par ailleurs, les États membres ont trouvé un compromis acceptable sur la mise en place d’une procédure accélérée aux frontières applicable aux migrants qui ont peu de chances d’obtenir le statut de réfugié lorsqu’ils proviennent d’un pays tiers pour lequel le taux de reconnaissance de ce statut est faible – c’est-à-dire un pays avec un nombre total de décisions en matière d’asile inférieur à 20 %51.
Pour défendre cette position, les États membres prônent un traitement plus rapide, plus sûr et plus efficace des situations des migrants, mettant l’accent sur une solidarité renforcée entre États membres52. Il s’agit finalement d’une inacceptabilité telle que l’objectif sous-jacent est de limiter, autant que possible, l’accès des demandeurs au territoire de l’Union, en créant des espaces dits d’« accueil » aux frontières53, en y opérant un filtrage, en vue d’orienter plus efficacement les bénéficiaires d’une protection internationale, ou les autres, de les relocaliser, ou de mieux procéder à leur retour dans le cas contraire. L’acceptabilité des États membres se matérialise ainsi sur les consensus trouvés sur le renforcement des frontières de l’Union européenne souhaitées infranchissables54. Ils parviennent à une convergence d’intérêts sur ce point pour parvenir à l’acceptabilité et, de fait, la solidarité recherchée tend à se positionner, géographiquement, aux frontières de l’Union.
Si l’acceptabilité des États membres se positionne sur la recherche du maintien des demandeurs aux frontières, ils la poussent par ailleurs à son paroxysme en fondant des compromis sur l’externalisation de la politique migratoire.
B. L’acceptabilité d’une politique migratoire externalisée
Les États membres pratiquent de manière croissante le traitement externalisé des demandes d’asile, dans le sens de la sous-traitance, c’est-à-dire qu’ils demandent à des pays tiers de gérer les flux migratoires et ce, en contrepartie d’une aide financière. Cette pratique relève certes de l’acceptabilité commune d’une gestion des flux migratoires par un État tiers, mais elle démontre surtout l’inacceptabilité de la politique migratoire commune par les États membres et d’une lutte contre les flux au sein même de l’Union55. Par ailleurs, les fonds consacrés à la gestion des flux migratoires permettent de subventionner quelques gouvernements autoritaires56, chargés de contrôler les migrations sur place.
Le plan d’action conclu entre l’Union européenne et la Turquie le 15 octobre 201557 et l’accord conclu lors de la réunion du Conseil européen du 18 mars 201658, consistaient à procéder à une coopération avec les autorités turques afin qu’ils accueillent les migrants qui ne demandent pas l’asile, mais également les demandeurs d’asile dont la demande a été déclarée infondée ou irrecevable, conformément à la directive de 2013 sur les procédures d’asile59. C’est d’ailleurs vers la Turquie que ces demandeurs étaient systématiquement renvoyés après avoir passé quelque temps dans des hotspots. Dans ce cas de figure, en 2016, les flux migratoires provenant de Syrie ont été stoppés en Turquie en contrepartie d’un financement de l’Union à hauteur de 6 milliards d’euros. La coopération UE-Afghanistan qui prenait ses marques en octobre 201660 en matière de lutte contre la migration illégale poursuivait la même logique, en conditionnant les aides au développement de l’Union européenne à l’Afghanistan à une coopération migratoire et au renforcement de la préparation contre les nouvelles arrivées d’afghans sur le territoire de l’Union61.
Les États membres eux-mêmes s’engagent dans la conclusion d’accords avec des États hors-UE sans nécessairement s’assurer des garanties nécessaires au respect des droits des personnes62, tel que le Danemark qui envisageait la sous-traitance des procédures des demandeurs d’asile au Rwanda – ce qui a d’ailleurs été abandonné dans la mesure où les États membres de l’Union poursuivent en 2023 leurs négociations pour parvenir à englober l’acceptabilité du plus grand nombre.
En somme, qu’il s’agisse des États membres dits pays du Visegrad, ou des États membres du groupe Méditerranée, quand bien même leurs intérêts sont manifestement divergents et ne permettent pas de développer une politique commune acceptable, en tout cas telle que souhaitée par la Commission et le Parlement européen, ils partagent toutefois la même réalité : l’inacceptabilité de la politique d’immigration et d’asile européenne, à tel point que nous pouvons sérieusement nous interroger sur l’aspect éthique et moral de la stratégie qu’adoptent les États membres de l’Union européenne. Le curseur de l’acceptabilité des États membres de l’Union européenne se déplace, peu à peu – si ce n’est déjà fait pour certains – vers une gestion externalisée des flux migratoires. À l’issue de négociations entre eux, ou avec les États tiers, les États membres parviennent à se décharger de leurs responsabilités au sein même de la norme et, dans cette démarche, il y aura bien moins de divergences d’intérêts et bien plus d’acceptabilité à se débarrasser de ce qu’on ne veut pas voir ou pas gérer.
Ouvrages
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Rapports
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SÉNAT, Rapp. d’inf. n° 62, sur le suivi des conclusions de la commission d’enquête sur Schengen, 19 oct. 2018, 85 p.
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Notes
- La politique migratoire n’a pas toujours été inacceptable, notamment lorsqu’il était question de l’intégration des « migrants économiques », atout au développement économique des États membres dans les années 1990.
- TFUE, art. 78.
- Le 8 juin 2023, les États membres ont trouvé un compromis sur deux propositions de règlements : une proposition de règlement relatif à la gestion de l’asile et de la migration et une proposition de règlement instituant une procédure commune en matière de protection internationale. Cet accord a été qualifié d’« historique » (FOX, 2021 ; ALIPOUR, NOYAN, 2023).
- Qui ont permis de révéler une affirmation de la souveraineté nationale des États membres en la matière, ces derniers cherchant sans cesse à contourner les mécanismes et à prôner l’incompétence de la Communauté en la matière.
- Le Traité de Maastricht de 1993 créé un cadre institutionnel unique, sur une structure en 3 piliers correspondant à des procédures décisionnelles différentes. Les questions d’asile et d’immigration font ainsi partie du 3e pilier relatif à la « Justice et [aux] Affaires intérieures » et relèvent de la coopération intergouvernementale.
- Le Traité d’Amsterdam de 1997 « communautarise » les questions d’asile et d’immigration, en les faisant « entrer » dans le premier pilier – après un délai de 5 ans permettant la réflexion des États membres sur une compétence qui était jusque-là régalienne (parallèlement, le conseil européen de Tampere, en Finlande, en 1999, a permis de dégager un accord sur le développement d’un régime d’asile européen commun. Le programme de La Haye marque la deuxième phase, en ce qu’il permet de finaliser le régime, et le programme de Stockholm de 2009 en poursuit la mise en œuvre) – qui correspond aux compétences communautaires.
- Ces dernières étant soumises au contrôle de la Cour de justice de l’Union européenne.
- Une commission de conciliation peut être réunie et une troisième lecture peut être organisée.
- Il semblerait bien inacceptable, pour les migrants, cette fois, qu’ils soient traités d’une manière fondamentalement différente d’un État à un autre selon les garanties que l’État souhaite lui accorder et ce, quelle que soit l’étape concernée de son parcours migratoire.
- « Le Parlement européen a montré sa capacité à proposer des solutions de compromis alors que les États membres apparaissent profondément divisés. […] Au terme d’un an et demi de discussion, de centaines de réunions, de vingt-deux tours de négociation, cinq groupes parlementaires, le PPE, les S&D, l’ADLE, les Verts/ALE et la Gauche unitaire, soit les deux tiers des membres du Parlement européen, représentant 118 partis politiques européens, ont accompli l’exploit historique d’aboutir à une position commune, alors que, lors du dernier Conseil, 28 ministres n’ont pas su se mettre d’accord sur un texte » (Audition de Cécilia Wikström, députée européenne et rapporteure du projet de règlement « Dublin IV », 26 juin 2018, in ASSEMBLÉE NATIONALE, 2019, p. 47).
- Hongrie, Slovaquie, Pologne et Tchéquie – l’Autriche ayant rejoint leur position récemment.
- Dir. 2011/95/UE du PE et du Cons., 13 déc. 2011, JOUE L 337, 20 déc. 2011.
- Dir. 2013/33/UE du PE et du Cons., 26 juin 2013, JOUE L 180, 29 juin 2013.
- Dir. 2013/32/UE du PE et du Cons., 26 juin 2013, JOUE L 180, 29 juin 2013.
- Poursuivant : « Les États ne peuvent pas placer une personne en rétention au seul motif qu’elle demande une protection internationale. Certes. Mais la multiplicité des motifs rédigés de manière floue non seulement aligne la situation des demandeurs d’asile sur celle des ressortissants de pays tiers, mais encore et surtout banalise la privation de liberté qui limite l’accès du demandeur d’asile à l’assistance juridique nécessaire pour solliciter la protection internationale et faire valoir ses droits » (BASILIEN-GAINCHE, 2014).
- En 2016, la Commission a adressé des lettres de mise en demeure avant d’engager une procédure d’infraction à l’encontre de certains États membres pour non-transposition de ces directives : la France, l’Allemagne, l’Estonie, la Slovénie, l’Italie ou encore la Grèce, avaient en effet pris du retard dans la transposition dans leur droit interne des directives relatives aux procédures d’asile et aux conditions d’accueil (voir en ce sens, BERTAUD, 2016).
- L’institut Jacques Delors « note par exemple que les taux de reconnaissance moyens des demandes de protection internationale allaient en 2015 de 13 % en Lettonie à 91 % en Bulgarie, ce qui explique les accusations de “loterie de l’asile” adressées au système d’asile européen » (GUYOT, 2018).
- Par exemple, certains États proposent un hébergement à tous les demandeurs d’asile, d’autres mettent en place des centres de rétention pendant le délai de traitement d’une demande d’asile (ASSEMBLÉE NATIONALE, 2019, p. 24).
- COM(2016) 467 final, 13 juill. 2016.
- COM(2016) 466 final, 13 juill. 2016.
- Il existe une trop grande disparité des systèmes de protection sociale et d’organisations administratives pour proposer un règlement dans ce cas bien précis (COM(2016) 465 final, 13 juill. 2016).
- COM(2016) 468 final, 13 juill. 2016.
- Déjà, en 2004, il y avait eu des blocages du Conseil sur les directives relatives à la définition du réfugié et aux procédures d’examen des demandes d’asile. Les États membres avaient posé un véto en matière d’immigration légale lorsqu’était demandé de « communautariser » la question. V. en ce sens : Résolution du Parlement européen sur la politique européenne d’immigration, 25 sept. 2006, pt. 13 : « se réjouit de la décision du Conseil permettant la codécision et le vote à la majorité qualifiée dans les domaines de l’asile et de la lutte contre l’immigration illégale et appelle les États membres à lever leur veto national, notamment dans le domaine de l’immigration légale, par l’adoption urgente de la clause passerelle prévue à l’article 67 TCE ».
- Tel que le projet de règlement définissant une liste des pays d’origine sûrs, les discussions sur cette liste s’étant finalement poursuivies dans le cadre du règlement « Procédures ».
- Il en existe d’autres, comme par exemple, la refonte du règlement Eurodac (Règl. (UE) n° 604/2013 du PE et du Cons., 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (refonte), en vue de surveiller les mouvements secondaires mais également de lutter contre les migrations irrégulières, ou encore la proposition de règlement portant création d’une Agence de l’Union européenne pour l’asile (COM(2016) 271 final, 4 mai 2016) en vue d’assurer le bon fonctionnement du REAC.
- COM(2016), 270 final, 4 mai 2016.
- Qui ont par ailleurs créé l’« Euromed 7 », qui est un groupe informel composé de la France, de l’Italie, de l’Espagne de la Grèce, du Portugal, de Chypre et de Malte.
- L’Italie, l’Espagne, la Grèce, avaient la charge du traitement des demandes d’asile des personnes fuyant leur pays, ils ont vécu une charge importante qui a eu pour conséquence une réticence à l’égard du système de Dublin.
- ASSEMBLÉE NATIONALE, 2019, p. 32.
- Hormis la Hongrie et la Pologne.
- Proposition règl. 2020/0279(COD), 13 juin 2023, art. 7 quater : « 1. Chaque année, sur la base du rapport visé à l’article 7 bis, la Commission
adopte une recommandation relative à la réserve de solidarité et recensant les mesures
de la boîte à outils permanente de l’UE qu’il convient de prendre pour faire face
à la situation migratoire au cours de l’année à venir d’une manière équilibrée et
efficace qui tienne compte des besoins des États membres soumis à une pression migratoire.
2. La recommandation indique les nombres annuels de relocalisations et de contributions financières [directes] au niveau de l’Union, qui s’élèvent au moins à :
a) 30 000 pour les relocalisations ;
b) 600 000 millions d’euros pour les contributions financières directes. […] ». - « Plus les politiques migratoires générales sont restrictives, plus elles portent atteinte aux obligations internationales contractées par les États, car ces mesures agissent de plus en plus en amont du parcours migratoire, jusqu’à la source même des flux » (VIANNA, 2016, p. 19).
- BASILIEN-GAINCHE, 2019.
- UNHCR, « Le HCR prévient que le droit d’asile est mis en péril en Europe ; exhorte à faire cesser les renvois aux frontières et la violence contre les réfugiés », Communiqué de presse, 28 janv. 2021, URL : https://www.unhcr.org/fr/actualites/news-releases/le-hcr-previent-que-le-droit-dasile-est-mis-en-peril-en-europe-exhorte
- « Nous devons anticiper et nous protéger contre des flux migratoires irréguliers importants ».
- Le titre II, mais surtout le titre III pour le contrôle aux frontières (Texte n° 304 (2022-2023) de MM. Gérald DARMANIN, ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Éric DUPONT-MORETTI, garde des Sceaux, ministre la justice et Olivier DUSSOPT, ministre du Travail, du plein-emploi et de l’insertion, 1er févr. 2023).
- Zones d’urgence mises en place dans les pays de première entrée lorsque ces derniers sont exposés à une pression migratoire forte, dans lesquels les agents de différentes agences européennes aidaient au traitement de la demande d’asile, puis filtraient : soit en orientant vers la demande d’asile, soit en orientant vers le retour du demandeur.
- 5 en Grèce, 4 en Italie.
- Le bureau européen d’appui en matière d’asile, remplacé par l’Agence de l’Union européenne pour l’asile (AUEA). Le règlement relatif à l’Agence de l’Union européenne pour l’asile a finalement été adopté en décembre 2021 (Règl. (UE) 2021/2303 du PE et du Cons., 15 déc. 2021, relatif à l’Agence de l’Union européenne pour l’asile et abrogeant le règlement (UE) n° 439/2010, JOUE L 468, 30 déc. 2021).
- ASSEMBLÉE NATIONALE, 2019, Annexe 3.
- UNHCR, « Le HCR redéfinit son rôle en Grèce après l’entrée en vigueur de l’accord UE-Turquie », Points de presse, 22 mars 2016, URL : https://www.unhcr.org/fr/actualites/briefing-notes/le-hcr-redefinit-son-role-en-grece-apres-lentree-en-vigueur-de-laccord-ue
- ICARD, 2017, p. 23.
- Qui consistent à placer des demandeurs dans des centres dans les pays de première entrée, après les avoir interceptés dans les eaux territoriales d’un État membre en vue de les transférer, s’ils obtiennent un statut de réfugié, dans un État membre volontaire.
- SÉNAT, 2018, p. 29.
- BISIAUX, p. 27.
- Proposition règl. n°COM(2016) 467 final, 13 juill. 2016, art. 41.
- Mais dans quelles conditions ?
- Proposition modifiée COM(2020) 611 final, 23 sept. 2020, art. 41.
- Proposition modifiée règl. n° 2016/0224(COD), 13 juin 2023, art. 40 quinquies.
- De plus, à l’issue de ce délai, des exceptions s’appliquent pour renverser le principe selon lequel le terme du délai permet au demandeur d’entrer sur le territoire, dans le cadre de la future directive « Retour ».
- Proposition modifiée règl. n° 2016/0224(COD), 13 juin 2023, art. 40, i).
- C’était bien le compromis trouvé en 2023 lié au mécanisme de solidarité vu plus haut.
- Les négociations entre États membres ont également largement porté sur la question de savoir si la procédure à la frontière devait être facultative ou obligatoire : « Les États membres qui, lors des négociations, étaient sceptiques quant à l’obligation d’appliquer la procédure à la frontière ont attiré l’attention sur certains problèmes inhérents à une application systématique de telles procédures, tels que la difficulté à déterminer rapidement, dans le cadre de la procédure à la frontière, si un demandeur remplit les conditions pour que sa demande soit examinée, et la nécessité de garder, entre-temps, le demandeur à la frontière ; les procédures de recours trop longues, avec comme conséquence que le délai prescrit pour l’achèvement de la procédure à la frontière expire avant qu’une décision ne puisse être prise au sujet de la demande ; la nécessité d’investissements et de ressources considérables (infrastructures, personnel et équipement) ; et le faible intérêt d’appliquer la procédure à la frontière en l’absence de toute perspective de retour du candidat écarté » (Proposition modifiée règl. n°COM(2020) 611 final, 23 sept. 2020). Cette dernière est optionnelle, la France le prévoit par exemple dans son dispositif de la « zone d’attente » qui permet de maintenir un migrant à la frontière dès son arrivée.
- La Professeure Marie-Laure Basilien-Gainche qualifie par ailleurs la sécurisation de l’espace européen d’« extra territorialisation » des frontières, en détaillant notamment les mécanismes de « virtualisation des frontières » en sus des mécanismes de sous-traitance (BASILIEN-GAINCHE, 2014).
- Sans parler des États membres qui adoptent des mesures allant dans ce sens, tels que le Danemark qui a adopté une loi en date du 3 juin 2021, consistant vraisemblablement à externaliser les demandes d’asile hors de l’Union européenne, par exemple au Rwanda. Le projet avec le Rwanda a toutefois été suspendu début 2023.
- Tels que « le Tchad, le Niger, la Biélorussie, la Libye ou le Soudan » (BARBIERE, 2018).
- Le plan d’action commun UE-Turquie (« EU-Turkey joint action plan »), 15 oct. 2015.
- Déclaration UE-Turquie, 18 mars 2016, URL : https://www.consilium.europa.eu/fr/meetings/european-council/2016/03/17-18/
- SÉNAT, 2016.
- Action conjointe pour le futur sur les questions migratoires UE-Afghanistan (« Joint Way Forward on migration issues between Afghanistan and the UE »), 2 oct. 2016.
- B9-0418/2021, 27 juill. 2021.
- Si les États membres doivent assurer un suivi de la situation dans l’État tiers en matière de garantie des droits humains, par exemple en s’assurant de l’absence de traitements inhumains ou dégradants, de l’accès à une procédure d’asile effective, ou de la garantie d’un non-refoulement des demandeurs, ils ne semblent pas s’en préoccuper davantage.