“Trois aedes militaires dans le désert oriental
d’Égypte”, JRA, 17, 2004, p. 442-462.
La mission archéologique française dans le désert oriental d’Égypte1, dirigée par H. Cuvigny, a fouillé, depuis 1994, une série de postes militaires romains qui jalonnent, soit les routes caravanières entre le Nil et les ports de la mer Rouge2, soit les pistes qui mènent aux carrières. Dans le premier cas, les fortins doivent être considérés comme des relais fortifiés, gardés par l’armée, le plus souvent centrés autour d’un grand puits, encore qu’existent des exceptions à ce modèle architectural. Leur taille moyenne tourne autour de 50 m x 50 m ; leur enceinte, flanquée de tours semi-circulaires, est percée par une porte unique, solidement défendue. La présence des soldats y est attestée par de nombreux ostraca. Dans le second cas, les postes sont destinés à abriter à la fois des militaires et des civils, ces derniers, libres ou non, étant impliqués dans l’exploitation des carrières, sous le contrôle de l’armée et des agents impériaux3.
Édifiés pour remplir des fonctions bien précises, dans un milieu géographique très particulier, ces postes, appelés “praesidia” dans les ostraca, ne répondent évidemment pas aux schémas classiques de l’architecture militaire romaine, notamment à ceux que l’on connaît en Occident. J’ai montré ailleurs qu’ils ne pouvaient pourtant pas être considérés comme totalement “hors normes”, et que leur agencement répondait à des concepts en usage dans l’armée impériale4. Leur état de conservation étant souvent exceptionnel, ils peuvent autoriser d’intéressantes comparaisons avec des camps ou castella des frontières occidentales, où notre connaissance est souvent limitée par l’arasement des vestiges conservés. Je voudrais présenter ici trois cas de probables aedes, dont les installations, bien préservées, peuvent fournir le point de départ d’une réflexion sur l’aspect des chapelles religieuses dans les camps militaires romains.
Qusûr al-Banat
Le fortin de Qusûr al-Banat se trouve à 50 km de Qift (Coptos), à environ 150 mètres au sud de la route moderne qui conduit à Quseir, près du port antique de Myos Hormos (Quseir al-Qadim)5. Le fortin, conservé sur une hauteur maximale de 1,80-1,90 m, se présente sous la forme d’un rectangle de 38,60 m x 31,20 m, aux angles arrondis. Aucune tour d’angle n’est visible, non plus qu’aucune tour intermédiaire, sauf sur la face nord, de part et d’autre de l’unique porte. La courtine, large de 1,45 m, est constituée de blocs irréguliers. Toutes les pièces sont installées sur sa face interne. Il s’agit d’espaces rectangulaires, aux dimensions assez standardisées (4,50-5 m x 3,50-4 m environ), ouverts sur la cour centrale, où aucun puits n’a été mis en évidence (fig. 1-2).
La pièce 12, face à l’entrée, quoique légèrement désaxée, a été entièrement dégagée. Ses dimensions sont d’environ 5,40 x 5,60 m. Elle comporte un dispositif particulier. On pénètre par une porte centrale, large de 1 m, avec des piédroits bien conservés, sans seuil de pierre. Cette porte a été bouchée dans une phase tardive de la vie du fort. Une allée centrale, en terre battue, mais avec des traces d’un enduit de chaux écrasé, probablement tombé des parois, sépare deux banquettes latérales surélevées de 0,50 m, larges d’environ 1,50 m. Au fond de la pièce, le long de la courtine sud, apparaissent les restes d’une autre banquette transverse, ou plus vraisemblablement d’un édicule ; ce dispositif, légèrement surélevé, est séparé des banquettes latérales par les restes d’un muret, au sud-ouest, qui comprend deux niveaux superposés de mortier (fig. 2-3).
Le matériel céramique récolté sur le site indique une date qu’on peut situer vers la fin du IIe siècle ou le début du IIIe 6.
Al-Zarqâ’
Le fortin d’Al-Zarqâ’, le mieux conservé de tous ceux qui jalonnent la route de Myos Hormos, est implanté dans le wâdî Abû Zirân, à 65 km de Qusayr. Il est préservé sur une hauteur de 3 à 5 m par rapport au niveau moyen du fond de la vallée (fig. 4). Son nom antique, Maximianon, est connu par la documentation des ostraca.
S’inscrivant dans un carré régulier (56,37 m x 55,85 m), cantonné d’une tour semi-circulaire à chaque angle, le fort possède une porte unique, ouverte dans le côté nord et flanquée de deux tours également semi-circulaires (fig. 5). Toute la maçonnerie du fort est constituée de dalles de schiste, peu ou pas taillées, liées sommairement avec un mortier de terre, mais assemblées avec soin de façon à réaliser en parement des surfaces régulières. L’épaisseur à la base des courtines, suivant les secteurs, va de 2,45 m à 2,70 m, tandis que la largeur au sommet est plus régulièrement de 1,80 m.
Au centre apparaît un grand puits circulaire, qui s’est effondré sur lui-même, entraînant une partie des constructions. Celles-ci sont adossées à la courtine, à l’exception d’un bloc de bâtiments B, situé immédiatement après l’entrée. À l’opposé de la porte, au centre de la rangée de bâtiments appuyés contre le rempart sud, apparaît une pièce (A) plus vaste que les autres (7 m x 4 m), dont la partie septentrionale a été aspirée par l’effondrement du puits. Au centre, on reconnaît une banquette large de 2,28 m, profonde de 1,85 m, en pierres sèches parementées, avec un blocage de pierres et de sable au centre. À l’ouest, une petite banquette large de 1,50 m est appuyée contre le mur. Entre les deux, une niche a été ménagée dans l’épaisseur du rempart. Dans une première phase, la niche mesurait 1,13 m de large et 0,56 m de profondeur. À la suite de l’effondrement de sa partie est, la profondeur fut diminuée à 0,19 m. On y voit encore une trace d’enduit à la chaux. À l’est, une troisième banquette, large de 1,32 m, est constituée de dalles de schiste posées de chant. Entre les banquettes subsistent les restes d’un sol dallé (fig. 6).
Du point de vue chronologique, le fort, après une première phase attribuable au Ier siècle de notre ère, mais dont les constructions ont été presque totalement emportées par une crue du wadi, semble avoir fonctionné de manière continue entre le règne de Trajan et celui des Sévères7.
Umm Balad
À la différence des deux premiers fortins, qui jalonnent une route caravanière, le poste d’Umm Balad a servi de base pour l’exploitation d’une petite carrière dans le massif du Mons Porphyrites. Le fort, installé sur une terrasse du wadi Umm Balad, est orienté est-ouest, avec son entrée unique à l’est (fig. 7). Le bâtiment affecte la forme d’un rectangle à peu près régulier, malgré un léger désaxement, d’environ 53 x 37 m (fig. 8). Les angles sont légèrement abattus et ne comprennent pas de tour d’angle. Le fort est construit en blocs de pierres locales (grès, schistes, granites) simplement équarris, liés avec un mortier de boue. Dans son état actuel, il présente des élévations encore bien conservées, notamment la courtine sud, préservée jusqu’à hauteur du chemin de ronde, sur une hauteur de 4,10 m. Sa largeur à la base atteint 1,80/1,90 m. La porte unique, située à l’est, est défendue par deux tours en U, de 1,10/1,20 m de rayon à la base. Une clavicule extérieure, en arc de cercle outrepassé, protège l’accès, ménageant un passage de 1,70 m face à la tour sud.
Le plan interne, assez complexe, présente de nombreuses phases de réaménagements, dont l’étude précise est pour l’instant inédite. Pour simplifier, je me limite ici à la phase initiale de la construction. On y observe une série de baraquements adossés au rempart, ainsi que deux blocs inégaux qui occupent l’espace central, de part et d’autre d’une voie qui mène de la porte à une pièce 3, située dans l’axe de la porte, le long de la courtine ouest. Il est vraisemblable que, dans ce premier état, l’agencement des constructions permettait de ménager une sorte de cour centrale.
La pièce 3 présente des dimensions notables (environ 12 m x 10,5 m), avec une légère saillie par rapport à la façade du bloc occidental de pièces (fig. 9). Elle possède une entrée principale, dans l’axe de la rue, avec un seuil surélevé formé par un monolithe de grès, auquel on accède par une marche constituée de blocs de pierre maçonnés. Le mur du fond est occupé par trois niches rectangulaires surélevées (0,85 m), ménagées dans une maçonnerie qui vient doubler le rempart. On y observe encore des traces de peinture effectuée avec un lait de chaux blanc sur un enduit de boue séchée. La niche centrale a révélé la présence d’un brûle encens ainsi qu’une tête masculine, vue de trois-quarts. Cette tête, réalisée en terre crue, était probablement accrochée sur un support de bois, si l’on en croit l’empreinte demi-ronde qui subsiste au revers. La tête est revêtue de peinture ocre, figurant la peau ; l’œil est indiqué par une incrustation de faïence bleue (fig. 10). La partie centrale de la pièce 3 est occupée par une grande citerne d’environ 10 m x 11 m x 2,10 m, construite en pierres maçonnées et enduite avec un mortier hydraulique.
L’étude précise du matériel d’Umm Balad est en cours. Nous savons d’ores et déjà, par comparaison avec le matériel céramique des autres fortins, que l’occupation se situe dans la première moitié du IIe siècle de notre ère. Même si cette chronologie devait s’étendre vers le bas, en raison des nombreuses modifications que le poste a connues, cela ne changerait pas grand-chose à la datation de la fondation du poste, qu’on peut situer, provisoirement, vers la fin du Ier siècle de notre ère.
J’identifie chacune de ces trois pièces comme l’aedes8 du fortin dont elle dépend, mais il importe, bien entendu, de justifier cette interprétation.
La fouille de Maximianon/Al-Zarqâ’ a mis en évidence la présence, face à l’entrée, et dans le tiers avant de la cour centrale, d’un bâtiment (B) composé de deux petites pièces en enfilade. Si la première ne livre pas de dispositif caractéristique, la seconde a révélé deux banquettes latérales aménagées dans une phase secondaire, ainsi qu’un fragment de décor stuqué appartenant vraisemblablement à un chapiteau. Nous sommes donc probablement en présence d’un bâtiment administratif. La ruine de la partie méridionale de la pièce ne permet malheureusement pas de connaître le dispositif du fond. Cet exemple n’est pas unique : on trouve en effet, sur la route de Myos Hormos, d’autres bâtiments dans une position identique face à l’entrée : c’est le cas à Hamrâ’, mais aussi sans doute à Krokodilô/Al-Muwayh, bien que le bâtiment soit ici très ruiné9. Sur la piste de Bérénice, le cas se rencontre aussi à Abû Qurayya (Iovis) et probablement à Didymoi/Khashm Al-Menih.
Ce petit bâtiment peut-il être considéré comme l’aedes du fort ? Pourraient plaider en faveur de cette hypothèse l’exemple comparable d’un fortin du limes Tripolitanus, Tisavar (fig. 11). Le croquis levé en 1900 par le lieutenant Gombeaud10 montre un poste de 36 m x 27 m, aux angles arrondis, sans tours externes, avec des casernements adossés au rempart. Ce plan est très proche de celui de Qusûr al-Banât, dont il constitue un bon parallèle, y compris d’un point de vue chronologique, puisque Tisavar a probablement été construit sous Commode11. Mais la grande différence avec Qusûr al-Banât réside dans la présence d’un bâtiment au centre de la cour, où une inscription, dédiée à Iupiter Optimus Maximus et à la Victoire, indique clairement que nous sommes ici en présence de l’aedes12. On pourrait aussi invoquer, en Égypte même, le petit temple du Mons Claudianus13, situé face à l’entrée, dans le tiers arrière du fort ou, mieux encore, l’aedes d’Abû Sha‘r, transformée ultérieurement en église14.
D’un autre côté, le fortin de Maximianon comporte, le long du mur sud, opposé à l’entrée, et dans l’axe de celle-ci, une pièce (A) nettement plus large que les autres (7 m), et dont la profondeur n’est pas complètement connue, en raison de l’aspiration des architectures dans le puits central. La pièce, on l’a vu, est munie de deux banquettes latérales ainsi que d’une embase de pierre installée contre le mur de fond, dans l’axe de l’accès. Une niche est ménagée près de cette embase dans le rempart. Ce dispositif doit être confronté avec celui de Qusûr al-Banât. Dans ce fortin, en effet, la pièce 12, face à l’entrée, comprend, elle aussi, des banquettes latérales, peut-être disposées sur deux niveaux et, probablement, une banquette surélevée, en forme de base, ou un petit édicule, près du fond. Les deux dispositifs, quoique légèrement différents dans le détail, sont comparables entre eux.
R. Fellmann a montré depuis longtemps que, dans nombre de camps ou castella militaires de l’Antiquité tardive, l’aedes devait être localisée face à l’entrée, à l’extrémité d’un axe monumental qui part de la porte15, et l’on pourrait citer plusieurs cas de ce type, notamment celui de Qasr Qârûn (Dionysias fig. 12a)16. Le poste de Qasr Bashîr, fort du limes Arabicus, bien daté de Dioclétien, présente un schéma voisin (fig. 12b)17. Mentionnons de même le fortin bavarois “In der Harlach” (IIIe siècle), dont la chapelle offre la forme d’une abside au milieu de la rangée de baraquements opposée à l’entrée (fig. 13a)18. Ce dispositif qui place l’aedes en face de la porte, le long du rempart, n’est sans doute pas seulement la conséquence d’une sacralisation particulière de la chapelle, à l’extrémité d’un axe processionnel, comme on l’a affirmé pour les camps et castella de l’Antiquité tardive19. Bien que l’explication reste sans doute valable dans un certain nombre de cas, elle n’est sans doute pas la seule, et j’ai suggéré que ce type de plan était essentiellement lié, dans les fortins les plus petits, à des nécessités architecturales, car la présence d’un “bâtiment central” est quasiment impossible dans l’espace interne, nécessairement exigu, des postes les plus modestes20. On trouverait d’ailleurs, sur les frontières occidentales, des parallèles anciens à ce dispositif dans les très petits édifices militaires de Hanau-Neuwirtshaus21 ou de Welzheim-Röttelsee (fig. 13b)22.
Un autre bon exemple de ce déplacement de l’aedes contre le mur de fond du fortin, face à la porte, dans un contexte très voisin de celui d’Umm Balad, nous est fourni par le camp des carrières de Chemtou, en Tunisie23 (fig. 14). La datation initiale de ce poste de 75 m x 59 m n’est pas réellement assurée : F. Rakob la situe après 154, mais elle pourrait remonter à une époque antérieure, si l’on en croit la mention de matériel du Ier siècle dans les niveaux profonds. On est certain que le fortin était occupé dans la seconde moitié du IIe siècle, puis au IIIe.
La fouille (encore inachevée) de cet édifice a révélé, dans un premier état, l’existence de banquettes latérales dans l’aedes. Dans un second temps, attribué par F. Rakob à l’époque sévérienne, une réfection semble avoir supprimé les banquettes latérales et les avoir remplacées par une sorte de podium, adossé au mur de fond de la cella (fig. 15). La destination exacte de cet ensemble est, il est vrai, controversée, d’autant qu’elle a sensiblement évolué au cours du temps et qu’on y constate des agrandissements successifs. Doit-on voir dans la chapelle que nous évoquons une véritable aedes signorum, ou un sanctuaire civil édifié dans le praetorium d’un procuratorchargé des carrières, sans caractère militaire spécifique ? Tant que la fouille de l’ensemble de Chemtou n’aura pas été menée à son terme, et qu’on ignorera la place exacte des soldats au sein de ce complexe, l’hésitation subsistera pour certains. Mustapha Khanoussi a toutefois insisté, avec d’excellents arguments, sur la présence de l’armée dans le “camp” de Chemtou, et l’interpénétration des milieux civils et militaires doit être soulignée, ici comme au Mons Claudianus24.
Un autre exemple, sensiblement plus tardif, peut aussi être comparé à celui de Qusûr al-Banât. À Lajjûn, en Jordanie, la fouille a mis au jour l’aedes, reconstruite après le tremblement de terre de 36325 : il s’agit d’une pièce assez vaste de 10,30 m x 9,20 m, dans laquelle apparaît au centre, face à la porte, une petite abside, à laquelle on accède par quelques marches. Nul doute que les signan’étaient disposés au centre de l’abside, ce que la découverte de feuilles d’or, à cet endroit, pourrait corroborer26. Le long des murs latéraux apparaissent des banquettes installées sur des arcades (fig. 16a).
Ce même système de podium adossé aux murs de l’aedes trouve probablement des parallèles dans les aménagements reconnus à Novae, en Bulgarie : T. Sarnowski y a en effet observé, sur l’arrière de la chapelle, huit dalles de pierre, dans lesquelles étaient creusées des cavités rectangulaires, probablement destinées à accueillir une banquette de bois adossée aux murs de la cella. Un tel meuble devait supporter les signa. En outre, un ensemble symétrique de piédestaux accueillait sans doute des autels ou des statues27. On connaît des dispositifs comparables à Castell Collen, Caerleon (fig. 16b), Chesterholm/Vindolanda, Risingham et Aalen28.
Le cas d’Umm Balad paraît à première vue quelque peu différent. Considérant la position, face à l’entrée, et à l’extrémité de la voie centrale du fortin, de la pièce 3 ; considérant aussi la taille, nettement supérieure, de cette pièce ; considérant enfin ses aménagements internes – trois niches inscrites dans le rempart – et les découvertes qui y ont été effectuées, on peut aisément reconnaître à cet endroit l’aedes du fortin. La présence d’une grande citerne ne manque toutefois pas d’intriguer car elle est tout à fait inhabituelle en ce lieu. On observera, malgré tout, que cette citerne était probablement recouverte par un plancher de bois, comme en témoigne l’existence d’un emmarchement interne ; elle n’était donc pas directement visible depuis l’intérieur de la pièce, seule la margelle dépassait. L’eau était amenée depuis une petite vasque maçonnée, près de l’entrée, à l’extérieur de la pièce. Des corvées d’eau permettaient son alimentation. La fouille n’a pas permis de déterminer si la citerne existait dès la fondation du fortin, ou s’il s’agit d’un aménagement secondaire.
Il n’existe, à notre connaissance, qu’un seul parallèle à cette situation paradoxale, dans un milieu géographique au demeurant très semblable à celui d’Umm Balad : c’est celui de Messad/Castellum Dimmidi, fondé en 198 par des soldats de la IIIe Augusta et de la IIIeGallica, en Numidie29. On y trouve en effet, dans la cave, sous le bâtiment central considéré par G. C. Picard comme le “sacellum” du camp, un puits (fig. 17-18). Bien que les détails de la fouille de Messad soient très mal connus, on ne peut s’empêcher de penser que les deux situations sont assez comparables. Il est vrai que l’interprétation de ces fouilles anciennes de Dimmidi mériterait un réexamen direct, sur le terrain, impossible aujourd’hui.
Si le lecteur me suit dans ces interprétations, nous nous trouvons, dans ces trois cas, devant des aedes, et celles-ci figurent parmi les mieux conservées du monde romain. Mais, si les dispositifs “immobiliers” sont bien préservés, les aménagements “mobiliers” doivent être restitués, ce qui ne va pas sans peine ni sans discussion. Observons, au passage, que le cas d’Umm Balad, qui ménage des niches dans la paroi arrière du fort, est différent du cas d’Al-Zarqâ’, dont la niche est petite, mais qui dispose en revanche de trois banquettes, disposées en U. À Qusûr al-Banât les banquettes existent aussi, celle du fond pouvant avoir supporté un édicule. Il est vrai que le rempart est moins bien préservé en élévation qu’à Umm Balad et Al-Zarqâ’, et on ne peut avoir de certitude. En tout état de cause les différents cas doivent être dissociés les uns des autres. Enfin, nous ne devons pas oublier que d’éventuels dispositifs de bois peuvent aujourd’hui nous échapper complétement.
Depuis l’étude fondamentale de A. von Domaszewski, on a pris l’habitude de considérer, sans doute un peu rapidement, que les aedes accueillaient systématiquement, non seulement les enseignes militaires, mais aussi des statues divines (dei et divi) et des statues de l’empereur régnant30. Cette hypothèse reposait, dans l’esprit du savant allemand, sur plusieurs témoignages littéraires, bien connus et souvent cités. Il s’agit tout d’abord d’un passage de Suétone (Caligula, 14), dans lequel on voit le roi des Parthes traverser l’Euphrate, aller jusqu’au camp romain, et rendre hommage aux aigles, aux enseignes et aux portraits des Césars (“aquilas et signa Romana Caesarumque imagines adoravit”). Rien ne dit pourtant que ces “imagines” se trouvaient dans les Principia, encore moins dans la chapelle aux enseignes. Comme dans les cérémonies d’hommage représentées sur la colonne trajane (par exemple la scène LXXV), l’affaire a pu se dérouler à l’extérieur du camp. De même, un passage de Tacite relatif à l’avènement d’Othon (Hist., 1.36) montre le nouvel empereur s’installant, dans le camp des prétoriens, sur le tribunal où était dressée, peu de temps auparavant, la statue en or de Galba. Othon se laisse alors entourer par les étendards militaires (“in suggestu, in quo paulo ante aurea Galbae statua fuerat, medium inter signa Othonem vexillis circumdarent”). Mais rien n’indique que la statue de Galba était dressée dans l’aedes et que le dispositif ainsi décrit reproduit à l’identique l’installation d’une chapelle militaire. Les reliefs antoniniens de l’arc de Constantin montrent en effet plusieurs scènes, dans lesquelles on observe un dispositif comparable à celui que décrit Tacite, à l’occasion d’une adlocutio, de la présentation de prisonniers, de la reddition d’un chef barbare ou de la nomination d’un roi indigène31. De même, lorsque les soldats de Germanie inférieure lapident les imagines de Galba, aucun indice ne permet d’affirmer que celles-ci étaient situées dans la chapelle32. L’interprétation d’A. von Domaszewski, longtemps considérée comme indubitable, a donc été sérieusement contestée depuis quelques années, notamment par T. Sarnowski33, O. Stoll34 ou M. Reuter35. Ceux-ci, après un examen méthodique des sources archéologiques, ont observé que les statues impériales de grande taille n’apparaissaient pratiquement jamais dans les aedes principiorum, mais dans la cour, la basilique, ou les pièces annexes des principia.
Cette enquête, dont les conclusions semblent incontestables pour les frontières européennes, mériterait d’être élargie à l’Afrique. Elle paraît malheureusement impossible pour l’Orient, où les camps du principat sont rarement identifiés, et presque jamais fouillés. Un exemple contraire vient pourtant la relativiser : c’est celui de la caserne des Vigiles, à Ostie, où les fouilles de R Lanciani avaient mis en évidence, dans ce qu’il faut considérer comme un véritable Caesareum, une série de bases de statues, conservées in situ sur le podium (fig. 19)36. La disposition des bases suppose sans doute des modifications progressives dans l’agencement actuel, car la plus récente est installée au centre. De gauche à droite on observe, en effet, une dédicace à Marc-Aurèle César, datée de 140-144 (CIL XIV, 4366 ; une à Marc-Aurèle empereur, datée de 162 (CIL XIV, 4368) ; une inscription de 195 à Septime Sévère (CIL XIV, 4380) ; une autre à Lucius Verus (CIL XIV, 4376), datée de 162 ; la dernière, qui est aussi la plus ancienne (138), est dédiée à Antonin (CIL XIV, 4357). Le caractère particulier du corps des Vigiles37, la localisation de la caserne ont généralement conduit les commentateurs à laisser de côté ce cas particulier, quelque peu dérangeant, d’autant qu’un graffito (CIL XIV, 4526 d ) appelle principia le bâtiment38.
Les tours de veille mentionnés dans les P.Dura laissent aussi supposer la présence d’images impériales dans les aedes. Les “signa” que mentionnent ces textes font évidemment référence aux enseignes militaires mais aussi à des portraits du souverain régnant. On rencontre en effet des expressions comme excubant ad signa d n Alexandri Aug39, excubant ad signa domini n imp40, excubant ad signa d n imp Marci Antoni Gordiani pii felicis invicti Augusti41 qui ne laissent guère de doute à ce sujet. De même, une inscription d’Aquincum (CIL III, 3526 = ILS 2355) évoque l’excubitorium ad tutelam signor(um) e(t) imagin(um) sacrar(um)42.
Mais s’agit-il, dans ces cas-là, de statues de grande taille, en pierre ou en bronze, ou simplement de petites rondes bosses, hypothèse que privilégient des auteurs comme T. Sarnowski ou O. Stoll ? Les témoignages archéologiques qui permettent d’en décider sont peu nombreux. Les fouilles ont révélé, à la Saalburg, une petite statue de Marc-Aurèle43, et, à Novae, une tête demi-grandeur de Caracalla44. Rappelons aussi que, par définition, les enseignes sont portables. On connaît notamment une aquila conservée dans une cage, qu’une stèle d’aquilifer découverte à Apamée a révélée45, en parfaite conformité avec un passage bien connu de Dion Cassius (40.18)46. De même, la colonne trajane, celle de Marc-Aurèle ou les bas-reliefs de l’Arc de Constantin, pour nous limiter à ces exemples, révèlent la présence de portraits, probablement augustes, portés au bout d’une haste par un imaginifer47. La célèbre phalère de Niederbieber, ornée d’une effigie impériale, provient d’un tel signum métallique de la cohors VII Raetorum equitata48. On doit aussi songer qu’il existait sans doute des tableaux peints, comme ceux que révèlent les vignettes de la Notitia Dignitatum. Ces dernières montrent, dans les insignes du prétoire des grands officiers de l’Antiquité Tardive, un autel-reposoir, en forme de table, sur laquelle sont posés un ou plusieurs portraits du souverain, parfois encadrés de candélabres49. On connaît aussi une peinture sur bois de Septime Sévère et de sa famille dans les collections prussiennes de Berlin50. La destination de ce tondo a été très discutée : les uns y voient une œuvre officielle destinée à orner un édifice public51, et, pourquoi pas, une chapelle militaire52. D’autres, au contraire, veulent y reconnaître une production populaire, comme on en trouvait fréquemment dans les maisons, les boutiques, les rues53, ce qu’atteste un texte bien connu de Fronton (Ep., 4.12).
L’existence, dans les chapelles militaires, de grandes statues des Augustes, est toutefois attestée par la découverte, dans l’aedes de Chemtou, d’un marbre figurant sans doute Marc-Aurèle cuirassé54. Est-ce à de telles effigies impériales que fait allusion l’expression “lorictitis” qui désigne l’endroit où était conservée l’épargne des soldats, selon le P. Berlin 686655 ? R. Davies le pensait56, arguant du fait que la seule expression administrative comparable résidait dans la fonction procuratorienne d’a loricata, généralement tenue par un affranchi. Le titre vient du fait que les dépôts impériaux de métaux précieux étaient placés à côté de la statue cuirassée de Jules César57. Or on sait que, dans les camps, les dépôts militaires étaient conservés à l’intérieur de l’arca, sous la chapelle.
On ne saurait, dans cet exposé des sources, oublier ce monument unique qu’est la chapelle impériale du camp tétrarchique de Louqsor, dont le programme décoratif a été magistralement reconstitué par J. Deckers58. On reconnaît en effet, dans l’abside, restructurée pour devenir l’aedes du camp de la IIIa Diocletiana, la figuration en pied, plus grande que nature, des quatre empereurs, sous l’aigle jovienne. La majesté de cette théophanie est accentuée par les processions et les scènes auliques qui ornent les autres panneaux, ainsi que par la présence du ciborium qui précède l’abside (fig. 20-21). Réétudiant l’ensemble de ces architectures, j’avais autrefois, suivant en cela une suggestion de J. Deckers, proposé de placer un trône vide sous ce baldaquin59. Je crois, en effet, que la présence d’une statue impériale ou d’un groupe statuaire des Tétrarques ne s’impose pas, puisque les peintures de l’abside remplissent déjà cette fonction de représentation du monarque. J’avais aussi rejeté l’hypothèse d’un autel. Cette solution ne repose pas sur une documentation assurée, et l’enquête épigraphique menée par M. Reuter montre bien, en Occident du moins, la rareté des autels attestés dans l’aedes même. Encore s’agit-il toujours d’arae votives et non sacrificielles, ce qui n’est pas sans importance pour comprendre l’organisation intérieure de ces chapelles et des cérémonies qui pouvaient éventuellement s’y dérouler60. En tout état de cause, l’incertitude subsiste, et l’on ne peut manquer de se demander si cette argumentation reste valable pour les camps de l’Antiquité tardive.
Les peintures de Louqsor viennent nous rappeler opportunément qu’une évolution dans l’agencement des sanctuaires militaires a sans doute eu lieu entre la période du Principat et la fin du IIIe siècle. Le programme iconographique du camp tétrarchique installé autour du vieux temple pharaonique semble en effet montrer que c’est désormais la majesté impériale, placée en position centrale, qui a pris le pas sur celle, plus traditionnelle, des dieux militaires et des signa de l’unité. Comme l’avait déjà bien compris J. Deckers, les différents attributs des empereurs (en particulier le nimbe) assimilent désormais ces derniers au monde divin, faisant d’eux des objets de culte61. Nous éprouvons toutefois une réelle difficulté à saisir les étapes de cette évolution religieuse, par manque de sources nombreuses, précises et bien datées.
Dans ce contexte, la peinture, souvent reproduite, mais très controversée, du sacrifice effectué par le tribun Iulius Terentius, dans le temple des dieux palmyréniens à Dura-Europos, pourrait fournir un jalon intéressant (fig. 22). Découverte dès 1920 par J.H. Breasted, sa première description soigneuse en a été donnée par F. Cumont, qui l’a vue dans un état de fraîcheur meilleur que ses successeurs62. Toutefois, la conservation assez médiocre de certaines parties est telle que des interprétations très différentes en ont été données63.
Au milieu du tableau se dresse un autel (thymiaterion), d’où s’élèvent des flammes. Le sacrifiant, debout à droite, est vêtu d’une tunique blanche, recouverte par un manteau, blanc lui aussi. Sa tête est nue. L’inscription qui l’accompagne (IVL.TEREN/TIVS.TRIB) le désigne comme un officier, ce qui explique la présence d’un glaive, accroché à un baudrier rouge qui barre sa poitrine. Le tribun tient en outre un volumen dans la main gauche. Derrière lui paraît la troupe qui l’accompagne. Les soldats sont vêtus comme l’officier, à ceci près que leur manteau est brun ; ils élèvent la main droite, paume en avant, en signe d’adoration. L’un des quatre personnages derrière le tribun est désigné comme prêtre par une inscription (θέμης / Μοκίμ / ἱερέυς). Il tient de la main gauche une fleur, ou un bouquet de brindilles. On a généralement reconnu dans cette figure un desservant, qui accompagne le tribun dans son sacrifice. D’autres “techniciens” de la religion sont d’ailleurs attestés dans l’armée romaine64. À gauche de l’autel, un porte-enseigne, vêtu de la même manière que les soldats, tient un vexillum. Comme le faisait remarquer F. Cumont, ces militaires, inermes (à l’exception du glaive), sont vêtus de la tunique blanche, ordinaire pour les jours de fête.
En bas, à gauche, sont figurées les deux Tychai de Palmyre et de Dura-Europos, identifiées chacune par un dipinto. Au-dessus apparaissent trois divinités nimbées, juchées sur un socle, ce qui indique qu’il s’agit de statues. Toutes les trois sont cuirassées et vêtues du paludamentum, porté sur une tunique. Elles lèvent le bras droit, qui retient une lance, piquée dans le socle. Les deux divinités latérales tiennent en outre, dans la main gauche, un bouclier rond65. Celle de droite, au moins, semble casquée.
Ce sont ces divinités qui donnent son sens à la scène, mais encore faut-il les identifier, ce qui a suscité d’amples débats, compte tenu de l’état de conservation des détails. On avait d’abord reconnu des empereurs, au moment de la découverte. Puis une “triade palmyrénienne”, composée de Yahribol, Aglibol et Malakbêl66. H. Seyrig penchait, lui aussi, pour des divinités orientales, croyant reconnaître au-dessus de l’épaule de la statue de gauche un croissant de lune, très peu évident sur les reproductions, mais il se refusait à identifier une très problématique “triade de Bêl”, les dieux n’étant pas pourvus, selon lui, de leurs attributs caractéristiques67. Plus récemment, on a proposé de reconnaître le dieu militaire Arsu dans la divinité de droite, en raison de ses attributs, d’autant qu’un graffite postérieur, trouvé dans les parages de la fresque, mentionne Iarhibol, Aglibol et Resu (Arsu)68. D’une manière générale, les commentateurs ont suivi l’opinion de F. Cumont et de H. Seyrig, selon lesquels on était en présence de divinités indigènes.
T. Pekary est pourtant revenu à la première interprétation, en la modifiant69. Arguant du fait que, depuis 165, il ne pouvait plus y avoir de sanctuaire palmyrénien dans cette partie de Dura, devenue camp militaire romain70, l’auteur considère que les fresques du “temple des dieux palmyréniens”, recouvertes de graffiti, à l’exception de la scène du tribun Iulius Terentius, n’avaient plus d’usage cultuel au début du IIIe siècle. Il existe d’ailleurs un large écart chronologique entre cette dernière scène, bien datée par les inscriptions des personnages, et les autres, dont le style paraît très différent. Le fameux Feriale Duranum, daté de 223-227, montre bien que seuls les cultes romains étaient alors pratiqués dans le camp, tout particulièrement celui des empereurs, morts ou vivants71. Rappelant au passage les marques d’honneurs accordés aux empereurs, notamment l’offrande de l’encens, T. Pekary considère que les statues, vêtues d’une cuirasse dorée, à la romaine, et du paludamentum, ne peuvent représenter des divinités palmyréniennes, mais qu’il faut y reconnaître des empereurs nimbés, comme c’est déjà le cas sur certaines monnaies antonines72. La présence d’un globe dans la main de la statue de gauche (et peut-être de celle du centre ?) s’accorde elle-aussi parfaitement avec la représentation impériale. Compte tenu de la datation de la peinture, assurée par les inscriptions qui accompagnent les principaux personnages de la scène, T. Pekary propose d’identifier Pupien, Balbin et Gordien III. Nous aurions donc à Dura la représentation d’une scène réelle de sacrifice, ayant eu lieu très probablement dans les principia, devant les statues impériales.
Cette interprétation n’a pas été suivie par les commentateurs ultérieurs. T. Sarnowski, O. Stoll et M. Reuter considèrent, chacun de leur côté, que l’absence de statues impériales dans les aedes est prouvée par les enquêtes qu’ils ont menées73. Sans remettre en cause cette conclusion, essentiellement fondée sur l’observation des frontières occidentales, antérieurement au milieu du IIIe siècle, il nous semble possible d’admettre qu’une évolution a pu avoir lieu, notamment en Orient, à partir de l’époque aurélienne ou sévérienne. La décoration du sanctuaire tétrarchique de Louqsor tend à le prouver, et les peintures de Dura-Europos, si l’interprétation de T. Pekary, que je fais mienne, est correcte, pourraient constituer un bon jalon chronologique dans cette évolution du culte impérial au sein des camps militaires. On notera avec intérêt que l’une des deux seules statues impériales répertoriées par T. Sarnowski à l’intérieur de l’aedes provient de Novae et qu’elle représente justement… Caracalla74. Le papyrus (Fink, RMRP 70 = P. Berlin 6866) qui fait allusion aux lorictitis est daté de 19275 ; ceux de Dura, qui mentionnent la garde près des signa domini nostri et des sacra imag sont des années 230. Toujours pour l’époque sévérienne, Hérodien (4.5.4) signale dans les camps la présence d’un νεώς pour les σημεῖα καὶ ἀγάλματα τοῦ στρατοπέδου, les enseignes et les statues. À Chemtou, la statue cuirassée retrouvée dans l’aedes pourrait même être antérieure et remonter à l’époque aurélienne, tout comme celle de la Saalburg (supra).
On doit observer, à ce propos, que le passage dans lequel Tertullien (De corona, 12.3), toujours au début du IIIe siècle, évoque la fête du 3 janvier en l’honneur de l’Empereur régnant, mentionne le sacrifice d’un bœuf noir, à la fois dans les Principia et dans le sanctuaire, nommé ici Capitolium76 : ecce annua votorum nuncupatio quid videtur, prima in principiis, secunda in capitoliis (Eh bien ! Que te semble de la profession annuelle des vœux, la première dans les principia, la seconde dans les Capitoles ?”). Il n’y a en effet guère de doute que la cérémonie se déroule en milieu militaire et non dans un Capitole “civil” : elle est d’ailleurs corroborée par le Feriale Duranum, 1.2-4, qui mentionne le sacrifice d’un bœuf noir. Le parallélisme de l’expression “Capitolium”, employée par Tertullien, avec l’inscription quasi contemporaine des principia d’Aalen est au demeurant frappant77. On notera avec intérêt, à ce propos, que les fouilles de Novae ont mis en évidence la présence d’une sorte de tabernacle creusé dans le sol, à gauche de l’escalier d’accès à l’aedes : ce réceptacle était rempli de cendres et d’ossements brûlés, manifestement issus des sacrifices78.
Mentionnons, pour finir, un ostracon inédit de Didymoi, dans lequel sont demandées des palmes devant servir à couronner τὰπρινκίπια τῶν κυρίων79 : on voit, par cet exemple, daté au plus tôt du dernier quart du IIe siècle, mais peut-être sévérien, combien le culte impérial finit alors par envahir toute la vie religieuse du camp, ce dont témoigne bien, au demeurant, le calendrier de Dura-Europos
Revenons, pour conclure, sur les fortins du désert oriental qui ont servi de point de départ à cette étude. La documentation de fouille n’autorise aucune restitution certaine ; seules les réflexions précédentes permettent, par analogie, de proposer quelques hypothèses.
La présence de banquettes, à Qusûr al-Banât comme à Al-Zarqâ’ s’inscrit, on l’a vu, dans une petite série architecturale, dont nous connaissons plusieurs exemples, depuis l’époque du Principat80 jusqu’au milieu du IVe siècle, puisque c’est vers cette époque (après 362, selon les fouilleurs) qu’est reconstruite l’aedes de Lejjûn, avec ses arcades supportant des banquettes. Compte tenu de la chronologie des deux fortins égyptiens, dont la durée d’occupation s’étend sans doute jusque vers la fin du IIe siècle, voire le tout début du troisième, on restituera au moins la présence, sur la banquette du fond, d’une enseigne. Si l’on considère que les garnisons de ces petits postes étaient assez souvent composées d’effectifs mixtes, provenant de plusieurs unités81, on songera de préférence à un vexillum. Sur les banquettes latérales, l’existence d’autels et/ou de statues doit être envisagée, mais on ne saurait décider s’il pouvait s’agir de représentations des divers dii militares seulement ou aussi de l’empereur régnant, sous une forme impossible à déterminer en l’état actuel du dossier : statuette ou portrait peint ?
On peut supposer que la petite niche murale d’Al-Zarqâ’, facile à fermer, pouvait abriter des objets de culte : pour chaque cérémonie, il fallait en effet disposer d’une boîte à encens, de couteaux, de lampes, de vases pour les libations… Un bon parallèle à cette situation pourrait être fourni par l’exemple de Louqsor : la peinture des Tétrarques, en effet, ne descend pas jusqu’au pied de l’abside ; on observe en revanche l’existence, de chaque côté, au ras inférieur de la niche, et à 50 centimètres au-dessus, de deux trous carrés creusés dans la pierre, ainsi que d’une rainure qui les relie (fig. 21). Il devait y avoir là un cadre de bois, ménageant une sorte de tabernacle82.
À Umm Balad, le dispositif devait être très différent : les niches, beaucoup plus grandes, sont enduites en blanc dans la partie inférieure, seule préservée. Mais la découverte d’une tête en terre crue, très certainement accrochée à un support de bois, laisse supposer, en élévation, la présence d’un décor “stuqué” et peint. On ne peut évidemment en restituer l’iconographie, mais sa nature religieuse ne fait guère de doute, compte tenu du contexte. Il est en outre probable que l’enseigne de l’unité prenait place, là aussi, dans la niche centrale, qui n’était évidemment pas fermée.
Reste un problème général, un peu irritant, car je ne lui trouve pas de solution véritablement satisfaisante, celui du genius loci83. Différents postes militaires que nous avons fouillés dans le désert oriental ont en effet livré le témoignage de proscynèmes mentionnés dans les ostraca trouvés sur place. Selon A. Bülow-Jacobsen, qui a dressé la liste des divinités honorées, on rencontre Apollo, Athéna, les Dioscures, Pan, Philotera, Sarapis, la Tychè Simiou, sur la route de Myos Hormos, à quoi il faudrait sans doute ajouter au moins Aphrodite pour la route de Bérénice84. Ces cultes, assez souvent mentionnés dans des lettres envoyées depuis les fortins, ne sont pas aisés à localiser avec certitude. Il semble qu’on puisse identifier avec une bonne vraisemblance Sarapis à Maximianon/Al-Zarqâ’85, Athéna à Persou (wadi Hammâmât), la Tychè Simiou à Simiou/Bir Sayyâla, Aphrodite à Aphroditè, les Dioscures à Didymoi/Khashm al-Menih. Dans un certain nombre de cas, on observe une concordance entre le toponyme et la divinité honorée localement, mais ce n’est pas systématique.
Où ces dieux étaient-ils honorés ? Dans un cas seulement (Umm Balad), un temple extérieur a été découvert, mais on ne sait pas s’il était dédié au genius loci. La situation, dans cette zone de carrières, est identique, de ce point de vue, à celle du Mons Claudianus86. Près des fortins qui jalonnent la route de Myos Hormos ou celle de Bérénice, on ne connaît pas de sanctuaire externe87. Il paraît donc assez vraisemblable qu’on ait rendu hommage aux dieux du désert dans les praesidia eux-mêmes.
Il est naturellement tentant de localiser leurs sanctuaires dans les aedes que nous avons décrites. La question des divinités locales avait été abordée par A. von Domaszewski, avant d’être reprise par E. Birley88. Ce dernier mentionne en effet la présence de deux plaques d’argent dédiées à Cocidius, dieu topique, dans la chapelle de l’ “outpost fort” de Bewcastle (RIB 986-987). On rencontre un cas semblable à Brough-on-Noe, mais il s’agit cette fois d’un autel (RIB 282). Rien ne s’oppose donc, a priori, à ce que les proscynèmes mentionnés dans les ostraca des praesidia du désert oriental aient pu être effectués dans les aedes militaires.
L’hypothèse, malheureusement, ne s’impose pas complétement. L’enquête de T. Sarnowski montre en effet la présence de divinités locales en d’autres endroits des camps, notamment dans les armamentaria, à Slaveni89. De même, à Aïn Schkour, en Tingitane, la dédicace au génie du lieu (CIL VIII, 21820 = IAMlat 821) est-elle faite à l’occasion de la construction du praetorium, comme l’a montré R. Rebuffat90. À Bu Ngem, l’inscription au génie de Gholaia a été trouvée elle aussi dans le praetorium91.
On est naturellement dans un cas architectural différent avec les très petits praesidia du désert oriental d’Égypte, où les bâtiments officiels étaient peu nombreux et peu développés. Il en est un, toutefois, qui échappe, pour l’instant, à l’identification. Comme on l’a vu plus haut, plusieurs postes (Al-Zarqâ’, Khashm el-Menih/Didymoi, El-Mwayh/Krokodilo, Al-Hamrâ’) comprennent, entre la porte d’accès et le puits central, un petit bâtiment, presque toujours si ruiné qu’on ne peut rien dire de son architecture. Le seul qui ait pu être fouillé (Al-Zarqâ’) a révélé deux pièces successives. La seconde comprenait elle aussi des banquettes latérales, mais tout le fond avait été aspiré par l’effondrement du puits sur lui-même, de sorte qu’on ne peut proposer aucune conclusion assurée92. S’agissait-il d’un autre temple ? D’un bâtiment administratif ? De cette série d’interrogations, retenons que le culte du genius loci se faisait probablement à l’intérieur des praesidia, et que l’aedes militaire, adossée au mur qui faisait face à l’unique porte, pouvait sans doute l’abriter. Mais d’autres solutions restent possibles.
Toute cette réflexion comporte, à n’en pas douter, une part importante de spéculations, que je ne cherche nullement à dissimuler. On sait trop peu de choses sur l’aménagement interne des aedes militaires et sur les cérémonies qu’on pouvait y pratiquer pour avoir des certitudes. Les informations – très limitées et fragmentaires – que fournissent ces trois petits fortins égyptiens paraissent toutefois parfaitement compatibles avec les non moins maigres informations que livrent les fouilles de camps plus vastes, en Europe. Elles pourront, je l’espère, nourrir la réflexion des spécialistes.
La chronologie avancée en 2004, immédiatement après la fouille, a été révisée dans la monographie consacrée au site d’Umm Balad. L’occupation du site commence en effet vers 89-91, s’interrompt probablement du début du règne de Trajan jusqu’à l’année 146, date à laquelle l’exploitation des carrières reprend pour une période sans doute brève. Le site est ensuite abandonné jusqu’au règne de Septime Sévère ; il est réoccupé pour quelques années au début du IIIe siècle. À cette époque, le sanctuaire initial est remplacé par un autre, localisé dans un endroit différent du praesidium, avec un plan semblable à celui de Qusûr al-Banat. On verra désormais J.-P. Brun (éd.), E. Botte, D. Cardon, H. Cuvigny, H. Granger-Taylor, M. Leguilloux, M. Reddé, Domitianè-Kainè Latomia (Umm Balad). Le praesidium et les carrières, FIFAO, Le Caire, à paraître.
L’hypothèse d’un aménagement secondaire formulée dans cet article de 2004, paraît, à la réflexion, très improbable.
Notes
- La mission est financée par le Ministère des Affaires étrangères, avec l’aide de l’IFAO.
- Voir désormais H. Cuvigny (éd.), La route de Coptos à Myos Hormos. L’armée romaine dans le désert oriental d’Égypte, FIFAO 48, 2003.
- C’est notamment le cas du Mons Claudianus. Voir D.P.S. Peacock, V.A. Maxfield, Mons Claudianus. Survey and Excavation I. Topography & quarries, Le Caire 1997 (FIFAO 37) ; II. Excavations : part 1, Le Caire 2001 (FIFAO 43) ; Mons Claudianus. Ostraca Graeca et Latina I (O. Claud. 1 à 190), Le Caire, 1992 (DFIFAO 29) ; II (O. Claud. 191 à 416), Le Caire 1997 (DFIFAO 32) ; III. H. Cuvigny, Les reçus pour avances à la familia (O. Claud. 417 à 631), Le Caire 2000 (DFIFAO 38). Voir aussi les réflexions critiques de V.A. Maxfield, “The eastern desert forts and the army in Egypt during the principate”, Archaeological research in Roman Egypt. The Proccedings of the seventies Classical Colloquium of the Department of Greek and Roman Antiquities, British Museum, held on 1-4 December, 1993, éd. D.M. Bailey, JRA Suppl. Ser. 19, 1996, p. 9-19.
- M. Reddé, “Les fortins du désert Oriental d’Égypte et l’architecture militaire romaine”, in : Cuvigny 2002 (note 2), p. 235-253.
- Sur ces identifications, voir Cuvigny 2003 (note 2).
- Voir Cuvigny 2003 (note 2), I, p. 77 et 196-202.
- Cuvigny 2003 (note 2), p. 112-126 et 196-202.
- J’utilise ici l’expression d’aedes, en rappelant qu’il n’existait probablement pas de terme technique fixe pour désigner la chapelle où étaient conservés les signa ; voir sur ce point G. Alföldy, “Die Inschriften aus den Principia des Alenkastells Aalen (Vorbericht)”, Studien zu den Militärgrenzen Roms III, Forsch. u. Berichte in Baden-Württemberg 20, 1986, p. 69-73 ; id., “Die Inschriften aus den Principia des Alenkastells Aalen”, Fundber. Baden-Württemberg 14, 1989, p. 293-338 ; M. Reuter, “Zur Inschriftenausstattung römischer Auxiliarstabsgebäude in den nordwestlichen Provinzen Britannien, Germanien, Raetien und Noricum”, Saalburg Jb. 48, l995, p. 26-51. On trouve en effet des expressions très diverses :
– domus signorum (Stace, Thébaïde 10, 176).
– νεώς dans l’expression ἔς τε τὸν νεὼν, ἔνθα τὰ σημεῖα και ἀγάλματα τοῦ στρατοπέδου προσκυνεῖται (Hérodien, 4.4, 5).
– aedes aqui[lae (R. Fink, RMRP, Princeton, 1971, n°53, b, 15 = P. Mich 455a verso 14).
– aedes principiorum (AE 1962, 258) : Reculver (époque sévérienne).
– [aedes] pri[ncip]io[rum] (J. Kolendo, Archeologia, 30, 1979, p. 217 sqq. fig. 84-85 ; Archeologia, 32, 1981, p. 132 sqq. fig. 68) : Novae (époque sévérienne ?). Voir désormais J. Kolendo et V. Božilova (éd.), Inscriptions grecques et latines de Novae (Mésie supérieure), Ausonius Mémoires 1, Bordeaux, 1957, n°58, 127, 131 : dans cet ouvrage, les trois fragments sont séparés, bien qu’ils appartiennent à la même inscription. La restitution, incertaine, est due à T. Sarnowski.
– Capitolium (G. Alföldy, art. cit. Limeskongress, p. 71 ; art. cit. FbBW p. 306-311) : Aalen (époque sévérienne).
– Caesareum (?) dans l’expression ἐν τοῖς πρινκιπίοις καὶ ἐν τῷ Καισαρείῳ (U. Wilcken, Chrestomathie der Papyrusurkunde, 1912, n°41. Mais le sens est controversé. - Cuvigny 2003 (note 2), p. 82 et 128.
- L. Gombeaud, “Fouilles du castellum d’El Haguef”, BCTH, 1901, p. 81-94.
- CIL VIII, 22770. L’inscription, datée de Commode, est probablement l’inscription de fondation. On ne peut toutefois en être certain.
- CIL VIII 22760. Voir P. Gauckler, “Note sur des fouilles exécutées dans le Sahara tunisien”, CRAI, 1900, p. 541-547.
- Peacock, Maxfield 1997, op. cit. p. 49-50 et fig. 2.24.
- S.E. Sidebotham, “Preliminary Report on the 1990-1991 Seasons of Fieldwork at Abu Sha’ar (Red Sea coast)”, JARCE, 31, 1994, p. 133-158, p. 136-141.
- R. Fellmann, “Le camp de Dioclétien à Palmyre et l’architecture militaire du Bas-Empire”, Mélanges d’histoire ancienne et d’archéologie offerts à Paul Collart, Lausanne, 1976, Cahiers d’Archéologie Romande, 5) p. 173-191 ; id., “Der Diokletianspalast von Split im Rahmen der spätrömischen Architektur,” Antike Welt 1979.2, p. 47-55 ; M. Reddé, “Dioclétien et les fortifications militaires de l’Antiquité tardive. Quelques considérations de méthode”, AnTard, 3, 1995, p. 91-124.
- J.-M. Carrié, “Les castra Dionysiados et l’évolution de l’architecture militaire romaine tardive”, MEFRA, 86, 1974, p. 819-850.
- V. A. Clark, “The Roman castellum of Qasr Bshir”, in : S. T. Parker (éd.), The Roman Frontier in Central Jordan, Oxford, 1987, BAR Int. Ser. 340, p. 457-495.
- G. Ulbert, T. Fischer, Der Limes in Bayern, Stuttgart, 1983, p. 431.
- J.-M. Carrié, “Les Castra Dionysiados et l’évolution de l’architecture militaire romaine tardive”, MEFRA, 86, 1974, pp. 819-850 ; Fellmann 1976 ; 1979 (note 12).
- Reddé 1995 (note 15).
- Die Römer in Hessen, Stuttgart, 1982, p. 337-340.
- Die Römer in Baden-Württemberg, Stuttgart 19863, p. 617-619.
- F. Rakob (éd.), Simitthus, II, Der Tempelberg und das römische Lager, Mayence, 1994, sc. p. 56-65, avec une contribution de M. Khanoussi, p. 245-247.
- Voir la contribution de Mustapha Khanoussi citée supra n. 23 et “Nouveaux documents sur la présence militaire dans la colonie julienne augustéenne de Simitthus (Chemtou, Tunisie)”, CRAI, 1991, p. 825-839.
- A. E. Haeckl, “The principia of el-Lejjun”, in : Parker 1987 (note 14), p. 203-260.
- Cf. S.T. Parker, The 1985 season of the limes Arabicus project, BASOR Suppl. 25, 1987 p. 131-174.
- T. Sarnowski, “Das Fahnenheiligtum des Legionslagers Novae”, Sudia Aegaea et Balcanica in honorem Lodovicae Press, Varsovie, 1992, p. 221-233.
- Castell Collen : V.E. Nash-Williams, The Roman Frontier in Wales2, Cardiff, 1969, p. 159 ; Caerleon : Arch. Cambrensis 119, 1970, p. 14, fig. 2 ; Chesterholm : E. Birley et al., Arch. Aeliana 4, 13, 1936, p. 229, fig. 1,3) ; Risingham : I. A. Richmond, Northumberland County History 15, 1940, p. 110, fig. 29 ; Aalen : D. Planck, Aalener Jahrbuch 1984, p. 22, fig. 12 : “Interessanterweise konnten an der Innenseite der Apsis Abdrücke einer Steinbank nachgewiesen werden (abb. 12), die offenbar das gesamte Halbrund ausgefüllt hat und möglicherweise als Sockel für eine Sitzbank oder zur Austellung von Götterbildern gedient hatte”.
- G. C. Picard, Castellum Dimmidi, Paris, 1947.
- A. von Domaszewski, Die Religion des römischen Heeres, Westdeutschezeitschrift für Geschichte und Kunst, 14, 1895, p. 1-128.
- Voir G.M. Koeppel, “Die historischen Reliefs der römischen Kaiserzeit IV. Stadtrömische Denkmäler unbekannter Bauzugehörigkeit aus hadrianischer bis konstantinischer Zeit”, BJ, 186, 1986, p. 1-90, cat. 27-30.
- Tacite, Histoires, 1.55.
- T. Sarnowski, “Zur Statuenausstattung römischer Stabsgebäude. Neue Funde aus den Principia des Legionslagers Novae”, BJ, 189, 1989, p. 97-120.
- O. Stoll, Die Skulpturenausstattung römischer Anlagen an Rhein und Donau. Der Obergermanische Limes, St. Katharinen, 1992 ; id., “Zu einigen Fragmenten von Bronzestatuen vom Kästrich in Mainz”, Mainzer Arch. Zeitschrift, 2, 1995, p. 1-23 = MAVORS XIII, 2001, p. 137-166.
- Reuter 1995 (note 8).
- NS 1889, p. 72-83.
- Voir désormais R. Sablayrolles, Libertinus miles. Les cohortes de Vigiles, Coll. EFR 224, Rome, 1996.
- Ainsi Sarnowski 1989 (note 33).
- P. Dura 82, I, 6 ; I, 17.
- P. Dura 88.
- P. Dura 89, I, 1-3 ; I, 8-9. Cf. O. Stoll, “Die Fahnenwache in der römischen Armee”, MAVORS XIII, 2001, p. 47-118.
- Voir aussi à ce propos l’expression de Tertullien, De corona, 11.3 : Et excubabit pro templis quibus renuntiavit ?
- L. Jacobi, Das Römerkastell Saalburg, 1897, p. 94.
- Sarnowski 1989 (note 33), p. 116 et Archeologia, 30, 1979, p. 119 sqq.
- O. Stoll, “Der Adler im “Käfig”. Zu einer Aquilifer-Grabstele aus Apamea in Syrien”, Arch. Korrespondenzblatt, 21, 4, 1991, p. 535-538 = MAVORS XIII, 2001, p. 13-16.
- ἔστι δὲ νεὼς μικρὸς, καὶ ἐν αὐτῷ ἀετὸς χρυσοῦς ἐνίδρυται.
- Les recherches, sur ce point, reposent toujours sur l’étude ancienne d’A. von Domaszewski, Die Fahnen im römischen Heere, Vienne, 1885. Voir toutefois l’enquête iconographique récemment menée par O. Stoll, art. cit., Anhang, p. 18-46. C’est sans doute à de telles “imagines” que fait allusion Flavius Josèphe (BJ, 2, 169-174 et 184). Leur introduction dans Jérusalem provoque la colère des Juifs.
- Cf. E. Künzl dans Kaiser Augustus und die verlorene Republik, Ausstellung, Berlin, 1988, n°390. Voir aussi H.G. Horn (éd.), Die Römer in Nordrhein-Westfalen, Stuttgart, 1987, fig. 62. L’objet est conservé au musée de Bonn sous le n° d’inventaire 77.0131. Il est généralement considéré comme datable de la fin du Ier siècle.
- Sur la présence de ces candélabres et le culte du cierge dans les aedes militaires, voir M. Reddé, “De l’Ara Cerei à l’Ecclesia Mater”, Mélanges offerts à N. Duval, Paris, 1995, p. 55-62.
- Staatliche Museen, Stiftung Preussischer Kulturbesitz, Antikenmuseum inv. 31329. Le diamètre du tondo est de 30,5 cm.
- Par exemple T. Kraus, Das römische Weltreich. Propyläen zur Kunstgeschichte, Berlin, 1967, n°156 ; H. Heinen, “Herrscherkult im römischen Ägypten und damnatio memoriae Getas”, RM, 98, 1991, p. 281.
- D. Baatz, Limeskastell Saalburg. Ein Führer durch das römische Kastell und seine Geschichte, 16e éd., 2000.
- M. Nowicka, “Le tondo de Septime Sévère et les techniques de peinture des portraits antiques”, Archeologia, 45, 1994, p. 99-102.
- Rakob 1994 (note 23), p. 62.
- R. Marichal, L’occupation romaine de la basse Égypte : le statut des auxilia, Paris, 1945.
- R.W. Davies, “A Note on lorictitis”, BJ, 168, 1968, p. 161-165.
- H.-G. Pflaum, Les carrières procuratoriennes équestres sous le Haut-Empire romain, Paris, 1960-1961, p. 157.
- Voir J. Deckers, “Die Wandmalerei im Kaiserkultraum von Luxor”, JDAI, 94, 1979, p. 600-652.
- M. Reddé, in : Mohamed el-Saghir, J.-C. Golvin, M. Reddé, El-Sayyed Hegazy, G. Wagner, Le camp romain de Louqsor, MIFAO 83, Le Caire, 1986, p. 30.
- RIB 1733 (?) : autel votif à la disciplina ; RIB 990 : autel votif à la disciplina ; RIB 1262 : autel votif au génie de l’empereur et aux signa de la cohorte ; RIB 282 : autel (votif ?) à Mars. Ajoutons deux autels de Dimmidi, dédiés à Jupiter (G.-C. Picard, Castellum Dimmidi, Paris, 1947, p. 147). Le grand autel CIL III, 7591, qui mentionne l’ensemble des dii militares (Domaszewski 1885 (note 47) n°14) a été trouvé remployé hors du camp. Sa position d’origine n’est pas connue, même si l’on peut supposer légitimement qu’elle se trouvait dans les Principia.
- Voir notamment sur tous ces points l’ouvrage fondamental d’A. Alföldi, Die monarchische Repräsentation im römischen Kaiserreiche, Darmstadt, 1970.
- F. Cumont, Fouilles de Doura-Europos (1922-1923), BAH IX, 1926, p. 89-114.
- On verra, en dernier lieu, L. Dirven, Palmyrenes in Dura-Europos. A Study of religious interaction in Roman Syria, Leyde, 1999, qui ne reprend pourtant pas toute la bibliographie sur la question.
- Voir par exemple, pour la IIIe légion Auguste, les haruspices mentionnés en CIL VIII, 2809 ; 2567, 20 ; 2586, 58 ; AE 1917-1918, 57. Ces références m’ont été signalées par Y. Le Bohec, que je remercie.
- Pour d’autres commentateurs, telle L. Dirven, la statue de gauche tient un globe.
- Telle est l’interprétation finale de Cumont 1926 (note 62), p. 102.
- H. Seyrig, Syria, 13, 1932, p. 194, suivi notamment par Dirven 1999 (note 63), p. 340.
- Dirven 1999 (note 63), p. 341. La localisation exacte du graffite n’est pas claire.
- T. Pekary, “Das Opfer vor dem Kaiserbild”, BJ, 186, 1986, p. 91-103.
- La plupart des commentateurs admet en effet qu’il n’existe pas de sanctuaire indigène dans les camps romains.
- R.O. Fink, A.S. Hoey, W.F. Snyder, The Feriale Duranum, YCS, 1940.
- Cf. Alföldi 1970 (note 61), p. 257 sqq., sc. 262.
- Dirven 1999 (note 63) ignore l’article de T. Pekary.
- Voir aussi P. Dyczek, J. Kolendo, T. Sarnowski, Novae, 40 years of Excavations, Varsovie 2001, p. 34.
- Cf. R.O. Fink, Synteleia Vincenzo Arangio-Ruiz, 1964, p. 233.
- Supra n. 6.
- Supra n. 6.
- Sarnowski 1992 (note 27), p. 226.
- H. Cuvigny (éd.), Didymoi. Une garnison romaine dans le désert Oriental d’Égypte. Vol. 1. Les fouilles et le matériel, FIFAO 67/1, Institut français d’archéologie orientale, Le Caire, 2011, n°31.
- Supra n. 24
- Cuvigny 2002 (note 2).
- Reddé 1986 (note 59), p. 17.
- Je remercie H. Cuvigny d’avoir attiré mon attention sur ce point et d’avoir bien voulu relire l’ensemble de cet article.
- A. Bülow-Jacobsen, “Toponyms and proskynemata”, in : Cuvigny 2002 (note 2), p. 399-426.
- O.Faw. 18, O.Max. 65
- Voir J.-M. Carrié, L“e temple de Sérapis”, in : D.P.S. Peacock, V.A. Maxfield, Survey and Excavation. Mons Claudianus. II. Excavations : part 1, Le Caire 2001 (FIFAO 43), p. 129-155.
- Une exception toutefois : à Fawakhir, première station à la sortie orientale du wadi Hammâmât, est connu un temple daté de Ptolémée III (B. Porter, R.L. Moss, Topographical bibliography of ancient Egyptian Hieroglyphic texts, reliefs and paintings. VII. Nubia, The deserts and outside Egypt, 1952, p. 337. La station militaire romaine n’a pas été retrouvée.
- E. Birley, “The Religion of the Roman Army : 1895-1977”, ANRW II, XVI, 2, 1978, p. 1506-1541 = MAVORS IV, p. 397-432.
- Latomus 22, 1963, p. 242, cité par Sarnowski 1992 (note 27), tab. 4.
- R. Rebuffat, “Inscriptions militaires au génie du lieu d’Ain Schkour et de Sidi Moussa Bou Fri”, BAM, 10, 1976, p. 151-160.
- Ibid. et R. Rebuffat, “L’arrivée des Romains à Bu Ngem (Notes et documents V)”, Libya Antiqua, IX-X, 1972-1973, p. 121-134. Nous laissons ici de côté le cas des inscriptions trouvées à l’extérieur des camps, comme à Tisavar ; cf. Rebuffat 1976 (note 90).
- J.-P. Brun, M. Reddé, “L’architecture des praesidia et la genèse des dépotoirs”, in : Cuvigny 2002 (note 2), p. 73-185.