La Pastorale du berger Célidor et de Florimonde sa bergère appartient au vaste corpus communément nommé « Théâtre de Béziers » ou « Théâtre de Caritats », parce que les pièces étaient représentées au cours des fêtes des Caritats données à Béziers pendant l’Ascension, et plus précisément le jeudi de l’Ascension1. Vingt-quatre des pièces jouées à cette occasion ont été conservées grâce à un imprimeur-libraire local, qui les a publiées entre 1628 et 1657, pour certaines en recueil – trois recueils ont vu le jour en 1628, 1644 et 1657 –, pour d’autres en éditions séparées. C’est le cas de la pièce qui nous intéresse, qui fait l’objet d’une édition isolée en 1629, un an après la publication du premier recueil. Jamais rééditée, l’œuvre fut également créée cette année-là, si l’on en croit son titre complet : Pastorale du berger Célidor et de Florimonde sa bergère. Représentée sur le théâtre des Marchands le jour de l’Ascension 1629. Régulièrement mentionnés dans les titres des pièces, les « marchands » étaient probablement, au même titre que les « praticiens » également évoqués dans certains titres, à l’origine des représentations théâtrales qui constituaient le temps fort des Caritats, et leur rôle consistait sans doute à fournir un financement et proposer une aide technique pour installer les théâtres, scènes fixes ou chariots, sur lesquels étaient jouées les pièces2.
Le prologue ainsi que l’une des premières scènes de la pièce l’inscrivent nettement dans l’actualité, plus précisément dans ce que les historiens appellent la troisième des Guerres de Religion de Louis XIII, marquée par le siège de La Rochelle et la reddition des grandes villes protestantes du Languedoc. Alors que le prologue évoque la venue de Louis XIII en Languedoc – ayant appris la nouvelle, la Muse a quitté le séjour du Parnasse et s’est mise au service du monarque3 –, le « Bravaste Espaignol » fait le récit de ses exploits guerriers contre les « parpailliols » et de la défaite de Soubise à La Rochelle4. Celle-ci a lieu en 1628, l’arrivée du roi en Languedoc au printemps 1629, et la « paix d’Alès » est signée en juin 1629 – probablement après la création de la pièce : c’est donc l’actualité brûlante qu’évoque cette pastorale ou, plus exactement, qui lui fournit son cadre.
Caractéristiques dramatiques et linguistiques
Contrairement à d’autres pièces du Théâtre de Béziers, la Pastorale de Célidor et Florimonde n’est, en effet, pas une pièce d’actualité à proprement parler et relève, si l’on en croit son titre, du genre de la pastorale. Elle présente, dans l’ensemble, une structure que l’on trouve dans une majorité de pastorales et de comédies à composante pastorale du corpus5, où les amours d’un couple de bergers constitué avant le début de la pièce sont, selon la formule d’Étienne Fuzelier, contrariées par « les prétentions d’un étranger, soldat ou grand seigneur6 », ici « le Bravaste espagnol ». La pièce n’est pas divisée en scènes ni, fait plus rare, en actes. En se fondant sur quelques indices typographiques – nom du personnage imprimé dans une police de caractère plus grosse – et surtout sur les entrées et sorties des personnages et les structures dramatiques, on peut néanmoins dégager une intrigue en trois actes ou à tout le moins en trois temps. Le premier est consacré à la présentation des trois protagonistes du nœud amoureux : la bergère Florimonde, le berger Célidor et Bravaste, qui vient traverser leurs amours en s’appuyant sur l’entremetteur Salcissot ; Florimonde témoigne explicitement sa flamme à Célidor et repousse avec fermeté les avances de Bravaste. Le deuxième temps, qui s’ouvre par une déclaration de Bravaste déterminé à obtenir à tout prix l’amour de Florimonde, fait entrer en scène les personnages secondaires, qui prennent en charge l’essentiel du comique de la pièce, à savoir le médecin Potingue et son assistant Arlequin, qui vendent à Bravaste un supposé philtre d’amour, en réalité du vin blanc. Le troisième acte, ou troisième moment de la pièce, commence par une série de chansons, avant de faire entendre les plaintes du berger Célidor dont la bergère est alitée et menace de perdre la vie. Salcissot l’informe du mauvais tour que Potingue et Arlequin ont joué à Bravaste pour lui soutirer de l’argent. Une nouvelle fois confrontée à Bravaste, Florimonde jette le breuvage qu’il lui offre, avant d’être guérie par les baisers de Célidor. Le rival éconduit prend la décision de quitter à jamais la France, non sans avoir retrouvé Potingue.
La Pastorale de Célidor et Florimonde fait assez nettement alterner deux univers, deux types d’intrigues et, élément propre à cette pièce, deux ensembles linguistiques. Le premier rassemble les locuteurs occitanophones, soit le couple des bergers, l’entremetteur Salcissot et le prologue, qui est à la fois forme théâtrale et personnage ; le second est constitué du groupe assez disparate des usagers d’autres langues, soit le castillan, lequel devient un occitan plus ou moins hispanisé chez Bravaste, le français, qui est essentiellement la langue d’Arlequin, et un mélange de latin et de français chez le médecin ou pseudo-médecin Potingue.
Ces langues autres que l’occitan sont mises à l’honneur dans une séquence polyglotte d’où sont exclus les deux bergers. Occupant la quasi-totalité de « l’acte » le plus long de la pièce, elle concentre l’essentiel de ses effets comiques, dont une partie est intimement liée à l’hybridité et à l’inventivité linguistiques. Elle s’articule autour de deux temps forts : l’entrée en scène du médecin et d’Arlequin ; la confrontation du Bravaste espagnol, du médecin pédant et d’Arlequin. Elle est précédée d’un dialogue entre Bravaste et Salcissot et entrecoupée par un échange entre Salcissot, Potingue et Arlequin destiné à préparer l’arrivée de Bravaste. En voici quelques extraits :
Potin. — Potingus ego sum Magister forma copolla,
Qui bastonne, Esculape, & Hippocrate, holla
Arlequin mon amy quidam ma percute
Nonobstante ma capacitate..
Arleq. — Ego sum Maximus Magister Arlequinus,
Doctissimantisimus rohalilis Medisinus..
Poti. — Arlequin qu’est-ce la..
Arle. — Que veut-il ce coquin,
Tant de discours me fasche..
Poti. — Ha le pauvre Arlequin,
Il faut parler François si ie veux qu’il m’entende :
[…]
Salcis. — Ayssis mon Emperique amay son compagnon,
Diou gard de mal Moussur7..
Poti. — Et à vous mon mignon..
Salcis. — Yeu vous veni averti que de vostre science,
Un certain Espaignol a gude counouyssence,
Et que vous vendra mettre cent escuts à la ma
Que ly donnez quicon afin de lou fa ayma :
Sur tout que vous guardez coussi quel ce dispose,
De li gausa bailla res que pousquesse n’ose,
Del Pervosc del pays serias persecutat,
Per vous metre al croutou liat & garoutat,
La fille es ma parente & de bonne famille8..
Poti. — Berger ne craignez rien du costé de la fille,
Nous sçavons comme il faut diapalemyrepu
Promellancollicis preparare cyrup..
[…]
Brava — Yo faray bien paresse à naqueste journada,
Qu’a oun hombre amourourous di fiels no es nade
Et que l’ingenio des mendres Castillans,
Es un miracle en Francio a lous mas fretillans,
Adios Seignor farfantou9..
Potin. — Adios doun Castillanou.
Arle. — Voicy cest Espaignol.
Poti. — En despit soit fait l’asne.
Brava — « Yo soun bengut querer un brevatge amourous,
Ce teu capassitat me randio tant heurous
Envers une beautat, mouche denaturade,
Et ce demi poudios la rendre ennamourade,
Te donnario la bource en cens eicus dedins10. »
Arle. — Nous en avons bien-là pour farcir les boudins11.
On le voit, la langue de Bravaste est un occitan hispanisé, c’est-à-dire faisant place localement à des marqueurs castillans (« yo », « hombre », « mas », « thoma » …). L’entrée en scène de Potingue et d’Arlequin introduit dans la pièce un mélange de latin et de français, avec un exemple immédiat de transgression des usages puisque, alors que le latin semble réservé au maître, médecin en titre ou supposé tel, Arlequin commence par s’exprimer dans cette langue. Quant à Salcissot, il utilise la langue de référence de la pièce et du corpus, à savoir l’occitan, et plus spécifiquement encore le languedocien. Comme presque toujours dans le Théâtre de Béziers, le fait que les personnages ne parlent pas tous la même langue n’est pas commenté, et ne constitue pas non plus un obstacle à la communication.
Influences italiennes
Si certaines des caractéristiques dramatiques et linguistiques de la Pastorale de Célidor et Florimonde sont communes à l’ensemble du corpus biterrois, d’autres sont propres à cette pièce et plus encore à sa séquence centrale, et manifestent une très probable influence italienne. Tout d’abord, le plan d’ensemble de la pièce pourrait être une variation sur une structure italienne de base, celle dans laquelle un couple d’amoureux est menacé par un prétendant indésirable et finalement disqualifié12. Mais cette structure étant presque systématique dans les pièces du corpus qui ne relèvent pas du type de la pièce d’actualité ou de la pièce allégorique, ce fait n’est sans doute guère significatif. Il n’en va pas de même des éléments propres à la séquence polyglotte et médicale, qui semble fonctionner comme une sorte d’enclave italienne dans l’univers de la pastorale biterroise, enclave assez nettement circonscrite puisqu’elle contient les seules scènes dans lesquelles intervient le pseudo-médecin Potingue. Outre la polyglossie, caractéristique de la commedia dell’arte13, ce sont les personnages, les motifs et les types de discours présents dans cette séquence qui font signe vers le théâtre italien. Un élément est l’emblème du modèle italien : le nom d’Arlequin. Mais il n’est pas seul : Potingue et Bravaste sont, de manière évidente, deux actualisations des tipi fissi les plus identifiables de la tradition italienne, le dottore et le capitano.
En dépit de l’adjectif qui le suit dans la liste des acteurs (« le Bravaste Espaignol »), le nom et le personnage de Bravaste ne sont, en effet, pas d’origine espagnole mais italienne : le nom est la francisation de bravaccio, ou plutôt la déformation de cette francisation, qui donne bravache, terme employé en français comme en occitan et nom de l’un des deux soldats (le soldat provençal) de La Tasse14 de Benoet du Lac. Mais ce Bravaste est donc espagnol, ce qui n’a rien pour étonner et qui accrédite encore la filiation italienne, puisque le capitano semble faire son entrée sur la scène italienne à l’époque de l’occupation de l’Italie par les troupes de Charles Quint. « Potingue » est quant à lui un substantif français d’origine occitane, ou dont on trouve des versions dans les deux langues (ainsi qu’en espagnol) et qui signifie « drogue » ou « médicament ». Mais « Potingue » n’est que l’une des désignations dont il fait l’objet. Bravaste introduit le personnage en ces termes : « Oun certain Emperique a de medicaments / Que sans doute pourran soulatgea mous tourmé / Per oun filtre amouroux ye me rendray contente15 ». Salcissot lui demandant : « Quien es aquel farfantou », il indique : « Oun Seignior Medico / Que se liame Potingue ». L’identification est complétée par Salcissot : « Yeu vezi que saco, / Aysso sera caucun que se dis Emperique, / Que deu bey ou dema desplega sa boutique16 ». À la scène suivante, alors qu’Arlequin, obéissant aux ordres de son maître, ouvre le coffre qui contient les ingrédients nécessaires à la préparation des potions et autres onguents, un petit échange rend une nouvelle fois compte de la tension entre identité revendiquée et identité réelle ou du moins perçue par les autres, et que souligne la paronomase entre « charlatan » et « Catedran », c’est-à-dire « maître » :
Poti. — A S. Onge j’en fis des miracles notoires,
Dont j’en rapporte icy plusieurs attestatoires.
Arle. — Nous attestons à tous tant au petit qu’au gran,
Que Magister Potinguo est un vray charlatan.
Poti. — A le pendart, & quoy ne sçavez-vous pas lire ?
Celuy qui fit cecy sçavoit fort bien escrire,
Dites-doncque Potingue est un vray Catedran.
Arle. — Catedran, il est vray mon œil estoit errant,
Passons outre, nec non un grand formacoppolle
Capable de regir l’Hippocratique Escolle.17
Si le capitano et le pseudo-médecin témoignent d’une pénétration attestée par ailleurs du théâtre italien en France18, c’est surtout la présence d’un personnage explicitement nommé « Arlequin » – « l’Arlequin » dans la liste des acteurs – et présentant les caractéristiques attachées à ce personnage, qui manifeste de la manière la plus nette, en même temps que la plus singulière, l’influence italienne qui s’est exercée sur la composition de notre pièce. La première particularité du personnage d’Arlequin est, en effet, d’être non pas un type mais un personnage doté d’un ensemble de caractéristiques propres, zanno combinant une dimension aérienne (il est l’acrobate, le danseur) et une dimension très terre-à-terre, marquée par les obscénités, les plaisanteries scatologiques et le goût pour la boisson. Ces éléments se retrouvent dans l’Arlequin biterrois, que l’on voit chanter à plusieurs reprises, s’enfuir en courant lorsqu’il se sait poursuivi par Bravaste, témoigner son attachement à Bacchus19 et, on le verra, manier avec Potingue le comique scatologique. Mais par ailleurs, le personnage fait généralement corps avec les acteurs qui l’incarnent, à Paris notamment, soit Tristano Martinelli à la fin du XVIe siècle, puis Domenico Biancolelli dans la seconde moitié du siècle suivant – et Tommaso Antonio Visentini dit Thomassin à l’époque où Marivaux compose ses pièces pour le Théâtre Italien. C’est d’ailleurs à Paris qu’est né Arlequin, en 1584, lorsque les Martinelli arrivent dans la capitale et s’installent à l’Hôtel de Bourgogne20. À l’époque qui nous intéresse, et en même temps qu’il demeure attaché à son créateur Tristano Martinelli, le personnage donne lieu à des représentations textuelles et iconographiques qui permettent sa diffusion et sa reprise éventuelle par d’autres comédiens, français notamment. Ainsi, la troupe d’Agnan Sarat ou Sirat, farceur et chef de troupe actif à partir des années 1570, avait son Arlequin21, reconnaissable sur les gravures conservées à son costume rapiécé. Aucune gravure ni didascalie ne permet de se figurer le costume que portait l’Arlequin biterrois, mais on peut former l’hypothèse qu’il était vêtu différemment des autres personnages, voire portait véritablement le type de costume avec lequel Tristano avait créé le personnage : dans la scène où il fait son entrée et où il ferraille avec Potingue en s’autoproclamant médecin, il demande à son compère de « respecter [s]on pourpoint22 ». Si les différents éléments que nous avons rappelés peuvent expliquer la présence du personnage à Béziers en 1629, le fait ne semble pas avoir de précédent dans le théâtre imprimé. Pour les spécialistes de l’influence en France de la commedia dell’arte, l’intégration de personnages du théâtre italien dans des pièces destinées à être publiées reste rare pendant les premières décennies du siècle, et si l’on trouve ponctuellement des reprises des types du dottore ou du zanno, il semble que le phénomène ne concerne pas Arlequin23.
Une séquence pseudo-médicale
En sus de la présence de trois des personnages ou types les plus emblématiques du théâtre transalpin, la couleur italienne de la séquence tient à son caractère médical ou plus justement pseudo-médical. Les discours de Potingue et d’Arlequin présentent en effet une grande partie des caractéristiques du rôle du dottore telles qu’elles sont énumérées par Claude Bourqui24 et définies d’abord par Perrucci dans le traité Dell’arte rappresentativa premeditata ed all’improviso (1699). Selon lui, la mise en œuvre du rôle se manifeste par « la dottrina soda, ed erudita, ma accompagnata dalle dicerie lunghissime25 ». Ces tirades interminables ont partie liée avec une tendance du dottore à la logorrhée et au refus de l’échange ainsi qu’à l’emploi du latin, toutes spécialités de jeu du dottore Graziano si l’on en croit les Frutti delle moderne commedie ed avviso a chi le recita (1628) du comédien Pier Maria Cecchini :
Un altra spetie Gratianatoria si è ritrovata, ed’è, che pensando questa di corregere l’uso del parlar rovescio, si è posta a dir latini e sentenze, con tirate, e ponga di memoria in guisa, che non lasciando mai parlare chi seco tratta, confonde e snerva il filo della favola, e lamente di chi ascolta, che non riman campo per intendere, e molto meno per capire l’orditura de’ negozii26.
Dans la séquence qui nous intéresse, et où Potingue est présent en continu, il s’exprime à trois reprises par des tirades : seul avec Arlequin, il l’interroge sur ses connaissances médicales dans une réplique qui s’étend sur dix vers (« Sais-tu des minéraux extraire le vrai sel…27 ») ; face à Salcissot, qui annonce l’arrivée de Bravaste, il développe sur dix-huit vers une anecdote destinée à démontrer l’efficacité thérapeutique des excréments et qui a pour protagoniste Esculape ; enfin il vante devant Bravaste les vertus de la potion qu’il a préparée pour lui, et cet éloge occupe dix vers. Potingue se pose en outre en maître de la parole, notamment face à Arlequin, qu’il cherche à contraindre – en vain – au silence dans la première scène, alors que ce dernier veut s’imposer comme maître en médecine, comme l’indique sa première réplique.
À l’exception de la première, ces tirades ou longues répliques font place à quelques mots latins ainsi qu’à des termes empruntés au grec ou évoquant cette langue. L’entrée en scène, déjà citée, des deux personnages, donne d’emblée la couleur linguistique de l’ensemble. Si certains termes devaient être intelligibles même pour le public populaire (les auto-désignations en miroir « Potingus ego sum Magister… » et « Ego sum Maximus Magister Arlequinus28 »), d’autres éléments sont plus obscurs et constituent le plus souvent un mélange de termes attestés et de néologismes, assimilables dans leur fonctionnement et l’effet qu’ils sont censés produire au sabir dont usera Molière dans la cérémonie turque du Bourgeois gentilhomme – davantage qu’au latin macaronique du Malade imaginaire. Il en va ainsi de la spécialité de Potingue, évoquée à plusieurs reprises dans l’ensemble de la séquence, et sous des graphies diverses : la « forma copolla » ou « formacoppolle » ou encore « forma copolliquo »29. Non attesté en latin classique semble-t-il, copolla pourrait être une francisation de l’italien cupola, diminutif de cupa et renvoyant aux coupes et plus largement aux récipients dans lesquels le pseudo-médecin prépare ses onguents. Mais le terme fait aussi penser au latin copula, « lien, chaîne », à son composé copulatio et à ses résonances sexuelles. Ainsi, la spécialité de Potingue, à qui Bravaste demandera un philtre d’amour, est sans doute à la fois la préparation d’onguents et la formation de couples… L’autoprésentation d’Arlequin recèle aussi une part d’invention. Il se présente en effet comme « Doctissimantisimus rohalilis Medisinus30 », combinant l’expression du plus haut degré, l’évocation de la nécromancie et l’altération probable du syntagme « regalis medicus », soit « médecin du roi ». Le jeu se poursuit, sous cette forme-là, c’est-à-dire en alternance avec des échanges en français qui font progresser le dialogue, l’invention linguistique et l’effet d’obscurité qu’elle produit étant assez nettement circonscrits. Elle se manifeste notamment dans deux autres passages :
Poti. — Confecton oppiatton salomonis naguiere,
C’est pour l’opiladure.
Arle. — A qui en veut donc ça.
Oppiatium per lopiladoura de la bourça.
[…]
Poti. — Berger ne craignez rien du costé de la fille,
Nous sçavons comme il faut diapalemyrepu
Promellancollicis preparare cyrup.31
Avant l’entrée en scène de Salcissot et de Bravaste, les deux compères s’apprêtent à confectionner une potion, qu’ils nomment « oppiaton salomonis », soit « opiate de Salomon » et à laquelle est attribuée une vertu : l’« opiladure » ou « opiladoura ». Non attesté en latin classique, le substantif dérive du verbe oppilo, soit « obstruer », et joue avec la forme française « opilation », qui signifie « obstruction » d’un organe, et notamment de la rate. La réponse plaisante d’Arlequin assortit le terme d’une dimension grivoise… à moins qu’elle ne renvoie au profit qu’il espère faire. Quant à la deuxième réplique de Potingue, elle contient des néologismes probablement fondés sur l’agglutination de formes grecques, en l’occurrence les termes mirepsia (« préparation, onguent ») et diappallo pro (« lutter contre »)32.
Pas plus qu’Arlequin, Potingue n’est, cependant, un dottore à proprement parler. D’abord, structurellement, le dottore est généralement un rival (malheureux) de l’amoureux, ce qui n’est pas le cas ici, où le personnage est un adjuvant du rival, ou plus justement un faux adjuvant, le philtre amoureux étant en réalité du vin blanc et se trouvant rejeté par la bergère, ce qui fait en réalité de Potingue et d’Arlequin des adjuvants de Célidor bien plus que de Bravaste. Surtout, Potingue est, on l’a vu, moins un médecin qu’un charlatan, dont la pratique thérapeutique ou au moins le discours se situent davantage du côté de l’alchimie et de la magie que de la médecine traditionnelle. Dès lors, le modèle du dottore se combine avec d’autres, présents ou non dans le théâtre italien, à savoir le nécromancien ou le magicien d’une part, le bonimenteur d’autre part. Le premier constitue le personnage éponyme d’une comédie de l’Arioste, Il Negromante, composé en 1535 et dont la version définitive date de 1551, traduite par Jean de La Taille vers 1562 et publiée en 1573. Le second33 se distingue à la fois des dottori de la commedia dell’arte et du personnage de la pièce de l’Arioste et se rattache à une tradition plus directement accessible aux auteurs biterrois que le théâtre italien, en l’occurrence les dialogues tabariniques, avec lesquels le rapprochement paraît d’autant plus envisageable que Potingue fait presque toujours couple avec Arlequin. En outre, les dialogues tabariniques attestent, en même temps qu’ils la donnent localement en représentation et s’en moquent, d’une interpénétration de la médecine et du théâtre sur les tréteaux parisiens, particulièrement dans les années 1610-1620 avec le duo que forment Tabarin et Mondor, de leurs vrais noms Jean Salomon et Philippe Girard. Or non seulement le dialogue d’entrée en scène de Potingue et d’Arlequin n’est pas sans rapport avec ceux du valet Tabarin et de son maître, mais la production tabarinique joue un rôle important dans l’acclimatation des types et des situations du théâtre professionnel italien en France. Dans la première moitié des années 1620 à Paris, elle fait précisément l’objet d’une publication intense et d’une diffusion apparemment exceptionnelle. Les premières éditions du Recueil général des rencontres et questions tabariniques et de l’Inventaire universel des œuvres de Tabarin datent de 1622 ; elles seront régulièrement augmentées de farces nouvelles, à la manière de celle que Jacques Scherer publie sous le titre du Voyage aux Indes34 et dans laquelle se trouve précisément un « capitaine Rodomont », amoureux d’une Isabelle, fille de celui qui remplit, dans la pièce, la fonction de Magnifico ou de Pantalone, et dont la langue est constituée d’un mélange de langues méditerranéennes, parmi lesquelles l’occitan. Mais ce sont moins les farces que les questions tabariniques, celles que pose Tabarin à son maître Mondor, et dont certaines portent sur la médecine, qui peuvent constituer l’horizon des échanges entre Arlequin et Potingue. La dimension scatologique, évidemment présente dans la comédie italienne, est explicite dans l’ensemble de ces dialogues, comme l’atteste le début de cet échange :
TAB. — Mon Maistre.
Le M. — Qu’y a il Tabarin.
TAB. — Un petit mot, s’il vous plaist, J’ai entendu dire que vous sçaviez parfaitement ce que c’estoit de la merde saine.
Le M. — Medecine gros asne.
TAB. — Et que vous aviez une entiere cognoissance d’icelle.
Le M. — A la verité, depuis ma jeunesse je m’y suis tousjours employé, jugeant que c’estoit une science autant utile aux hommes que necessaire à leur entretien particulier […].
TAB. — Il ne vous falloit point arrester tout le temps de vostre jeunesse à cela, puis que vous n’en avez effleuré qu’une partie : si vous avez envie de flaire l’essence de la merde saine, il ne falloit que venir frapper à ma porte de derriere.35
Aux sources italiennes s’ajoutent, ici comme ailleurs, des souvenirs de Rabelais, et notamment l’assimilation du médecin à un scatophile, voire un scatophage36, élément également présent dans notre séquence polyglotte et qui trouve son origine dans une pratique réelle – l’examen des excréments des patients contribuait, dans la médecine antique comme dans la médecine moderne, à établir le diagnostic – et dans un passage du Ploutos d’Aristophane qui nomme Esculape « scatophage » ou « mange-merde »37.
Enfin, il n’est peut-être pas incongru de compter au nombre des sources possibles de la séquence, ou tout au moins des ouvrages avec lesquels elle dialogue, des textes au statut intermédiaire, mi-fictionnels mi-savants, comme ceux qui purent être inspirés par L’Erbolato de L’Arioste, rédigé dans les années 1530 et publié en 1545. Son éditeur, Jacopo Coppa, est considéré comme l’un des médecins « charlatans » les plus célèbres de l’époque. Le statut de ce texte qui se présente comme le discours public d’un médecin empirique demeure à ce jour énigmatique : s’agissait-il d’un texte à lire, d’un texte à jouer ou à réciter, et dans ce cas, était-il destiné à L’Arioste lui-même ou à un bonimenteur38 ?
Le recyclage des sources savantes
En dépit de son allure bouffonne, la séquence mobilise en outre des références savantes à proprement parler, empruntées à la médecine traditionnelle ou d’orientation alchimique et sur lesquelles il n’est pas inutile de s’arrêter pour mieux cerner les effets et l’intention possibles de l’ensemble39. Le discours de Potingue, tout d’abord, se place sous une triple autorité : celle d’Hippocrate (« Que je desploye ici la source Hippocratique »), évidemment attendue, mais aussi celle de Fernel (« As-tu bien comme moy commanté le Fernel ») et de Paracelse, évoqué explicitement par la formule « le Palladion de l’art Paracelsique »40, soit très probablement le Palladium spagyricum de Pierre-Jean Fabre, médecin paracelsien de Castelnaudary, paru en 1624. Avec le traité de Fabre et la référence à Fernel (1506-1558), médecin français qui s’intéressa aux théories de Paracelse mais pour les contester, ce sont donc des traditions différentes, et même opposées, qui sont convoquées par l’auteur biterrois par l’intermédiaire de son personnage. Mais les pratiques décrites renvoient davantage à l’alchimie et à la médecine paracelsique qu’à la médecine traditionnelle, comme l’indique l’énumération de la première tirade :
Sçais tu bien calsiner, tirer les quintessences
Cognoy tu bien du talc les secrettes puissances,
As-tu du benjoin treuvé les qualitez,
As-tu du balsamon sceu les proprietez,
Sçais-tu de l’ambre gris la valeur & les forces,
Cognois-tu la vertu des herbes, des escorces,
Fleurs, feuilles, gomes, fruits, bois, racines, & trons,
Mille choses encor’ qu’icy nous obmettrons.28
Sont ici évoqués l’art de la calcination, qui permet d’extraire la cinquième essence, ou quintessence des substances brûlées, le talc des philosophes, pierre blanche obtenue par des opérations alchimiques, le « balsamon » qui renvoie peut-être au « baume universel », médicament alchimique qui est censé agir sur les trois règnes de la nature, végétal, minéral et animal, et les vertus des herbes et des plantes, dont Paracelse et ses disciples recherchaient les « signatures » qui permettaient d’associer analogiquement par la forme extérieure, signe de la vertu intérieure, une plante à une maladie. Les autres tirades de Potingue font globalement référence à une pharmacopée plus traditionnelle. Il en va ainsi du « catholicon » (« enticatollicon »), considéré comme un remède universel, de l’« opiatum salomonis » (opiate de Salomon) déjà évoqué, autre remède universel composé d’un mélange de graines et de divers produits, de la « pancration » (« De meo panceracio forma copolliquo »), nom d’une plante médicinale confondue avec la chicorée et de l’opération qui consiste à obstruer un conduit ou « oppilation ». Les vertus de la « pancration » sont ainsi présentées : « Onguent miraculeux pour guerir la colique, / La ratte, la matrice, & les pallecouleur, / Et pour faire venir aux pucelles les fleurs41 » (c’est-à-dire les règles).
La deuxième tirade contient une anecdote aussi savoureuse qu’étonnante, et qui fournit sans doute une des clefs de lecture essentielles de la séquence :
Esculape le grand Dieu de la Medecine,
Descendit une fois dans la terre crastine :
Là où se ressentant de son ventre pressé,
Après qu’à la Romaine il se fut retroussé
Eut plié les genoux, se fut mis en posture,
Pour rendre son hommage au droit de la nature,
Au pied d’un arbre vieux qu’on nomme capistron,
Comme qui plante un terme, il fit un gros estron :
Et par un grand bon-heur la matiere fecalle,
Ce mella toute avec la gome antidotalle,
Que de cest arbre espais l’escorce distilloit,
D’où ce fit cest onguent qui tout autre excelloit,
Nommé pancration forma cacopolique […]42
Le « Dieu de la médecine » est mis en scène dans une activité particulièrement triviale… mais la logique irrévérencieuse est elle-même en partie retournée, puisque les selles du grand homme sont à l’origine d’un remède particulièrement puissant. Ce n’est pas le seul exemple, dans le passage, d’un tel comique scatologique43 et d’une dégradation plaisante de la profession de médecin par collusion avec le bas corporel. Il n’est pas insignifiant, toutefois, que cette évocation des vertus thérapeutiques des excréments, entendus au sens large de déchets et de l’ensemble des productions du corps, et non exclusivement des selles, trouve des échos dans la médecine paracelsiste comme dans la médecine traditionnelle.
Que penser, en définitive, de la manière dont la séquence recycle des éléments de savoir médical ? Peut-on considérer que l’auteur anonyme a cherché à concilier médecine traditionnelle et théories inspirées de Paracelse, notamment celles de Pierre-Jean Fabre, particulièrement connu en Languedoc, voire à défendre ce courant hétérodoxe44 ? Ce serait sans doute lui prêter des intentions qui le dépassent ou dont il n’a cure : l’auteur biterrois, comme plus tard Molière dans ses comédies médicales, recherche probablement avant tout l’efficacité dramatique et, ici, l’efficacité comique. Le réemploi de formules issues de traités savants, la référence aux autorités antiques et modernes attendues sur le sujet ne peuvent, selon nous, être interprétés autrement que comme parodie, d’autant qu’ils vont de pair avec une invention verbale et un travail de sape fondé sur la mobilisation presque continue du bas corporel, qui sont autant de moyens de toucher l’auditoire, de le faire rire et de désacraliser en souriant la parole d’autorité et le discours savant.
Très probablement issue de la rencontre entre plusieurs modèles et traditions, au nombre desquels la commedia dell’arte et ses intermédiaires français d’une part, le savoir médical d’autre part, la séquence polyglotte et pseudo-médicale de la Pastorale du berger Célidor et de Florimonde sa bergère recèle encore quelques mystères, le plus tenace étant sans doute celui de la présence d’un Arlequin à cette date et en ce lieu. Elle n’en forme pas moins, à sa manière et à son échelle, un maillon entre Rabelais et Molière, avec lesquels son auteur partage goût pour l’invention verbale, approche irrévérencieuse de la médecine et comique scatologique.
Notes
- Pour une présentation plus complète du corpus et de ses conditions de représentation, voir Philippe Gardy, « Le “Théâtre de Béziers” ou “Teatre de Caritats” : état des connaissances, problèmes et perspectives de recherche », dans Carmen Alén Garabato (dir.), Béziers ville occitane ?, Perpignan, Presses universitaires de Perpignan, 2007, p. 69-90 et la Présentation générale du premier volume de l’édition du Théâtre de Béziers. Pièces historiées représentées au jour de l’Ascension (1628-1657). Tome 1 – 1628, éd. B. Louvat, Paris, Classiques Garnier, p. 9-89.
- Voir Présentation générale du Théâtre de Béziers, p. 18-20.
- « Mays quand [la Muse] a sauput que nostre grand Monarque, / […] Vennio per terrassa la mutino arrogance, / Daquel esprit factieus des revoltax de France, / […] Elle a voulgut moustra que la fon de Pegase, / Ny son cristal lusent, sa frescou ny sa gase / Nou pas pougut retenné un esprit enflamat, / De veny fa la court al Rey pus renoumat, / Pus iuste & pus vaillent que sio dessus la terre » (Mais quand [la Muse] a su que notre grand monarque / […] Venait pour terrasser la mutine arrogance / Des esprits factieux des révoltés de France, / […] Elle a voulu montrer que ni la fontaine de Pégase, / Ni son cristal luisant, ni sa fraîcheur ni son voile / N’ont pu empêcher un esprit enflammé, / De venir faire sa cour au roi le plus renommé, / Le plus juste et le plus vaillant qui soit sur la terre.), Pastorale du berger Celidor et de Florimonde sa bergere. Representee sur le theatre des Marchands le jour de l’Ascension, Béziers, Jean Martel, 1629, p. 3 (textes occitans traduits par Jean-François Courouau et Bénédicte Louvat).
- « Despoys qu’el Rey de Francia après moucho enbassade / Me mandet despousiar la troupo ramassade / Qu’a naquestou pays nomou lous parpailliols : / Como lou plus vaillent de tout lous Espaigniols, / Yo soul mas couratjous que Mars ny que Bellone / Estrellieri Soubise a la rive d’Ollone : / Yo fouy lou condouttor del grand combat naval / Yo de la diguo ay fachy l’obre y lou traval » (Depuis que le roi de France après mouche ambassade / Me manda de réduire à néant la troupe rassemblée / Que dans ce pays l’on nomme les parpaillots : / En tant que le plus vaillant de tous les Espagnols, / Le seul qui soit mas courageous que Mars et que Bellone / J’ai étrillé Soubise sur la rive d’Ollone : / J’ai conduit le grand combat naval / J’ai fait l’œuvre et le travail de la digue), ibid., p. 5-6.
- Sur cet ensemble de pièces, voir Bénédicte Louvat-Molozay, « Formes, modèles et invariants du corpus pastoral dans le Théâtre de Béziers : quelques hypothèses », dans Jean-François Courouau, François Pic, Claire Torreilles (dir.), Amb un fil d’amistat. Mélanges de littérature occitane offerts à Philippe Gardy, Toulouse, CELO, 2014, p. 679-696.
- Étienne Fuzelier, « Le théâtre en langue d’oc au XVIIe siècle », dans Yves Giraud (dir.), La Vie théâtrale dans les provinces du Midi, Tübingen/Paris, Gunter Narr Verlag/Jean-Michel Place, 1976, p. 103.
- « Voici mon empirique avec son compagnon / Dieu vous garde du mal Monsieur ».
- « Je viens vous avertir que de votre science, / Un certain Espagnol a eu connaissance, / Et qu’il viendra vous mettre cent écus dans la main / Afin que vous lui donniez quelque chose qui puisse le faire aimer : / Surtout, gardez-vous bien, quelle que soit la manière dont il est disposé, / De lui donner rien qu’il ne puisse oser (?) / Vous seriez pourchassé par le prévôt du pays, / Pour vous mettre au cachot lié et garroté, / La fille est ma parente et de bonne famille ».
- « Je ferai bien paraître aujourd’hui / Qu’à un homme amoureux rien n’est impossible / Et que le génie du moindre Castillan, / Semble un miracle au plus éveillé des Français. / Bonjour Seigneur charlatan ».
- « Je suis venu chercher un breuvage amoureux, / Si ton talent me rendait tant heureux / Envers une beauté très dénaturée / Et si de moi tu pouvais la rendre amoureuse, / Je te donnerais la bourse avec cent écus dedans ».
- Pastorale de Celidor et Florimonde sa bergere, p. 12-15.
- Je remercie Claude Bourqui pour cette suggestion.
- Comme le rappelle Claude Bourqui (La Commedia dell’arte, Paris, Armand Colin, 2011, p. 61) : « chaque masque possède, au sein de son langage, une coloration dialectale affirmée, selon l’origine géographique qui lui était attribuée : vénitien pour Pantalone, bergamasque pour les zanni, napolitain pour Pulcinella, bolonais pour le Dottore, toscan pour les amoureux, castillan pour le Capitano ». Sur cette question, voir notamment Gianfranco Folena, Il linguaggio del caos. Studi sur plurilinguismo rinascimentale [1983], Turin, Bollati Boringhieri, 1991 et Jean-François Lattarico, « Les monstres du langage. Le laboratoire plurilingue de la commedia dell’arte à la comédie ridiculosa (XVIe-XVIIe siècles) », Littératures classiques, n°87, 2015, p. 33-47.
- La Tasse. Comedie propre pour estre exhibée au temps de Caresme-prenant, publiée sous le pseudonyme du Comte d’Aulbe (sans lieu ni date) à la fin du XVIe siècle, et éditée par Paul-Lacroix Jacob dans le Recueil de pièces rares et facétieuses, Paris, Albert Barraud, 1873, t. III, p. 5-161.
- « Un certain empirique a des médicaments / Qui pourront certainement soulager mon tourment / Grâce à un philtre d’amour, je serai satisfait ».
- Pastorale du berger Celidor et de Florimonde sa bergere, p. 11 (« S. Quel est ce charlatan ? / B. Un seigneur médecin / Qui se nomme Potingue. / S. Je vois ce que c’est. / Ce sera quelqu’un qui se dit empirique, / Qui doit plier boutique aujourd’hui ou demain »).
- Ibid., p. 13-14.
- Le théâtre italien est connu en France depuis la fin du XVIe siècle et l’est de trois manières : par la traduction de commedie erudite ; par la présence régulière de troupes italiennes dans certaines des grandes villes du royaume et à la Cour de France ; enfin par l’activité éditoriale des comédiens italiens et de leurs soutiens français, qui diffusent un modèle et fixent certains éléments d’une pratique théâtrale originale. Sur ces éléments, voir notamment Raymond Lebègue, « Premières infiltrations de la commedia dell’arte dans le théâtre français », CAIEF, 1963, p. 165-176.
- On le voit ainsi interpréter une chanson en l’honneur de Bacchus à la fin de la séquence qui nous intéresse : « … Tout plein de joye / Je me noye / Dans Bacus / Avec mes cent escus », Pastorale du berger Celidor et de Florimonde sa bergere, p. 17.
- Voir Siro Ferrone, Vies et aventures de Tristano Martinelli, acteur, Montpellier, L’Entretemps, 2008.
- Voir Muriel Barbier et Olivier Halévy (dir.), Pathelin, Cléopâtre, Arlequin. Le théâtre dans la France de la Renaissance, catalogue de l’exposition du Château-Musée d’Écouen, Gourcuff-Gradenido, 2018, p. 163.
- Pastorale du berger Celidor et de Florimonde sa bergere, p. 13.
- Pietro Toldo, « La comédie française de la Renaissance », Revue d’histoire littéraire de la France, n°4, 1900, p. 280-281 et Raymond Lebègue, « Premières infiltrations de la commedia dell’arte dans le théâtre français », p. 170-176. En 1635 cependant, Scudéry intègre un personnage nommé « Harlequin » dans la première partie de sa Comédie des comédiens (Paris, Augustin Courbé, 1635), la fonction du personnage semblant essentiellement circonscrite à l’annonce en ville du spectacle à venir.
- Sur le site Molière 21 : URL : http://moliere.huma-num.fr/base.php?Tirade_de_docteur (consulté le 2 novembre 2020). Les deux citations qui suivent sont extraites de cette fiche.
- « un savoir solide et érudit, mais accompagné de divagations interminables » (trad. Claude Bourqui).
- « Il existe une autre espèce de Gratiano [i.e. de Dottore], qui se caractérise par le jeu de scène suivant : dans l’intention de corriger un abus de langage, le personnage se met à déclamer des citations latines et des proverbes, dans d’interminables tirades qu’il puise à bien plaire dans sa mémoire. Ainsi, en ne laissant jamais parler son interlocuteur, il fait perdre de vue et distend le fil de l’intrigue, ce qui provoque les lamentations du public, pour qui il devient impossible d’entendre et encore moins de comprendre le déroulement de l’histoire racontée par la pièce »,trad. Claude Bourqui, dans citation italienne Vito Pandolfi, La commedia dell’arte, Firenze, Sansoni, 1958, t. IV, p. 98.
- Pastorale de Celidor et de Florimonde sa bergere, p. 12.
- Ibid.
- Ibid., p. 12 et 14.
- Loc. cit.
- Ibid., p. 13 et 14.
- Les propositions d’interprétation de ces différents passages sont le fruit d’échanges avec Bénédicte Chachuat, Fabrice Chassot, Romain Lancrey-Javal et Florent Libral. Qu’ils en soient ici remerciés.
- Sur le personnage du bonimenteur ou du charlatan au théâtre, voir l’ouvrage récent de Beya Dhraëif, Éric Négrel, Jennifer Ruimi (dir.), Théâtre et charlatans dans l’Europe moderne, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2018.
- Dans Théâtre du XVIIe siècle, éd. jacques Scherer, Paris, Gallimard, 1975, t. I, p. 239-244.
- « Question I. Qui sont les meilleurs Medecins et comme on cognoist les maladies », dans Recueil general des Œuvres et Fantaisies de Tabarin…, Paris, Antoine de Sommaville, 1623, p. 1-3.
- Pantagruel, III, 34.
- Aristophane, Théâtre, trad. Eugène Talbot, t. II, Paris, Alphonse Lemerre, 1897, p. 471.
- Voir Ariane Bayle, Romans à l’encan. De l’art du boniment dans la littérature au XVIe siècle, Genève, Droz, 2009, p. 166-167.
- Les informations très précises et plusieurs des formules qui nourrissent ce développement m’ont été fournies par Florent Libral. Qu’il reçoive ici toute ma gratitude.
- Pastorale de Celidor et de Florimonde sa bergere, p. 12 et 13.
- Ibid., p. 15-16.
- Ibid., p. 14-15.
- Voir le dernier échange entre Potingue et Arlequin : « Poti. Je m’en vas en cest ordre à la chaire perceée, / Preparer de pommade à nettoyer les dans. // Arle. Elle est bonne au dehors mais meilleure au dedans », ibid., p. 17.
- C’est l’une des hypothèses de lecture de Florent Libral.