Paru dans : Revue historique de Bordeaux, 13, 1966, 19-27.
“La Maison et la Seigneurie de Tiran étaient anciennes et très distinguées dans le Pays Bordelois ; mais le temps apporte tant de changement dans les choses de ce bas monde, que l’une et l’autre y seraient absolument inconnues, s’il n’en étoit fait mention dans les anciens titres”1.
C’est en ces termes que l’abbé Baurein parle des seigneurs et de la seigneurie de Tiran qui n’étaient déjà plus, à l’époque où il écrivait, qu’un souvenir. Or, l’histoire de Tiran et de ses maîtres successifs serait, à n’en juger que par les documents imprimés ou analysés, loin de constituer un sujet négligeable. Mais, plutôt que de nous lancer dans un travail qui serait encore fort incomplet et trop mouvant, nous nous en tiendrons volontairement au problème des origines de la seigneurie. Le premier document concernant Tiran, connu déjà de l’abbé Baurein, se trouve dans un vidimus du 4 septembre 1275, contenant l’hommage fait par Gombaud de Tiran à Édouard, fils du roi d’Angleterre, le 14 juillet 1268. Ce document qui figure dans les Recogniciones Feodorum ne se trouvait pas, par contre, dans le Second Livre noir de la Connétablie d’Aquitaine2. En voici la traduction, sauf les clauses du vidimus :
“Édouard, fils aîné du noble Roi d’Angleterre, à tous ceux à qui ces présentes parviendront, salut. Sachez que, Gombaud de Tiran, damoiseau, constitué personnellement devant nous, a reçu de nous ses alleux francs, ainsi qu’il les déclarait et ci-dessous nommés, en hommage lige et pour le service d’un faucon saur au connétable de Bordeaux, pour lui et ses successeurs, payable à Bordeaux, à titre de reconnaissance, à mouvance de seigneur. Il veut cependant être tenu aux services dus et accoutumés pour les alleux susdits. Le dit Gombaud a, en effet, reçu de nous-même, Tiran et tout ce qu’il y a et doit y avoir, et tout ce que d’autres tiennent de lui en fief dans la paroisse de Saint-Médard-en-Jalles, sauf le village nommé Bosc, tout ce que le seigneur de Tiran a dans la paroisse de Saint-Martin d’Eysines, à raison de la seigneurie de Tiran, sauf le fief appelé La Forêt, tout ce qu’il a dans la paroisse de Saint-Hilaire du Taillan à raison de la même seigneurie, le village de Membisos dans la paroisse de Saint-Vincent de Lacanau et tout ce qui est tenu de lui en fief dans la même paroisse, tout ce qu’il a et doit avoir dans la paroisse de Moulis et toute la dîme d’Avalat dans la paroisse de Saint-Laurent-de-Médoc tant en dîmes qu’en autres choses, et aussi le village de Moraret dans la Paroisse de Saint-Laurent-de-Médoc, et tout ce que le même Gombaud a et doit avoir dans la paroisse de Cussac et de Sainte-Gemme ; lequel hommage de toutes et chacunes choses susdites avons reçu de lui en toutes choses, sauf notre droit et celui d’autrui. En témoignage de quoi, nous avons fait faire ces lettres, à Woodstock, le 14 juillet de l’an du règne du Roi notre seigneur père le cinquante-deuxième.”
Le 6 avril 1274 Gombaud de Tiran devait, ainsi que tous les autres vassaux aquitains à la même époque, renouveler l’hommage de 1268. M. Trabut-Cussac a remarqué que le texte de ce second hommage ne se trouve pas dans les Recogniciones Feodorum, mais seulement dans le Second Livre noir de la Connétablie3. C’est donc une situation inverse de celle du document précédent. Malheureusement, ce second hommage du 6 avril 1274 ne nous est connu qu’à travers les analyses de Gaignières et de Du Cange. Voici d’abord celle de Gaignières : “Gombaud de Tiran, ecuyer, (a reconnu) tenir en hommage franc et pour un autour (auso) ou un épervier (sparuerio) tout ce qu’il a à Tiran, dans la paroisse de Autellan, de Molins, le village de Mebsos paroisse de Lacanau, dans la paroisse de Cussac et de Sainte-Gemme.” Quant à l’analyse de Du Cange elle est encore plus brève : “Gombaud de Tiran, damoiseau, pour lui, tout ce qu’il a à Tiran et dans la paroisse de Saint-Médard-en-Jalles, de Molins, etc.”4.
La catégorie à laquelle appartiennent les documents de 1268 et de 1274 n’est pas la même. Le premier est, en effet, la création d’un fief de reprise, le second un simple hommage. Quant à l’acte du 4 septembre 1275 ce n’est qu’une confirmation sous forme de vidimus de l’hommage de 1268. M. Trabut-Cussac signale encore un renouvellement de l’hommage le 10 janvier 12765. Par l’étude comparée de ces documents, il est facile de préciser la situation et l’évolution de la seigneurie de Tiran à la fin du XIIIe siècle. Mais, avant d’aborder ce problème d’ordre juridique, il se pose une question d’ordre géographique, celle de l’identification et de la localisation de la seigneurie.
L’acte de 1268 situe le siège de la seigneurie de Tiran dans la paroisse de Saint-Médard-en-Jalles. C’est dans cette commune que l’a aussi localisée M. Trabut-Cussac6. Si l’on examine, en effet, la carte éditée à la fin du siècle dernier par les soins du Conseil général7 ou une récente carte topographique8, on constate qu’il existe au nord-ouest de la route allant du bourg de Saint-Médard-en-Jalles au hameau de Germignan, un lieu-dit Tiran-Cursol à proximité de la commune du Taillan. Les recherches que nous avons faites sur les anciens et nouveaux plans cadastraux nous ont permis de retrouver ce toponyme ainsi qu’un autre plus au sud Tiran-Biron. On relève encore sur l’ancien cadastre la présence d’une maison au lieu-dit Tiran-Cursol. L’étude des lieux n’apporte aucun élément nouveau car on n’y trouve que des champs et friche et l’emplacement d’une maison aujourd’hui détruite. C’est, sans doute, de cet édifice dont parle E. Cuillon en 18679. Il déclare à ce sujet : “Il ne reste en cette ancienne maison que quelques caves que l’on qualifie de souterrains. L’habitation nouvelle n’offre rien de remarquable sous le point de vue archéologique”. La localisation exacte de la seigneurie de Tiran serait ainsi restée difficile sans le secours de cartes et de croquis anciens. Sur la carte de Cassini, au sud du précédent lieu de Tiran, on trouve, en effet, un autre toponyme identique, non loin de la Jalle, sur la rive gauche, presque face au manoir et aux moulins du Thil, situés dans une ancienne île de la Jalle. D’après les signes conventionnels utilisés sur cette carte il semblerait même qu’il y ait eu un hameau à cet endroit et un terroir cultivé aux alentours. Cette constatation s’est trouvée confirmée à la suite de recherches faites dans la collection de plans conservés aux Archives départementales. Nous y avons retrouvé, en effet, un plan de 1778 intitulé : “Plan d’une partie de la paroisse de Saint-Médard dans lequel se trouve le village et tenement du Tiran”10. À l’endroit signalé par la carte de Cassini, se trouve effectivement un village, Tiran, entouré de trois côtés de bois, mais auquel font suite vers le nord des labours et des vignes s’étendant jusqu’au chemin allant de Saint-Médard à Germignan. Or, non loin de ce chemin, est indiquée une maison avec la mention : “Nouvelle masure bâtie par M. Cursol.” Ceci nous explique, comme on ne l’eût pas espéré, le toponyme actuel de Tiran-Cursol, le seul qui nous reste sur les cartes du XIXe et du XXe siècles, et nous confirme l’existence, jusqu’au XVIIIe siècle d’un village de Tiran légèrement plus au sud. Comme pour la maison et les terres de M. Cursol il n’en reste plus rien sinon des friches et des bois.
Ces résultats négatifs, s’ils prouvent l’abandon de l’ancien terroir de Tiran, ne changent rien à la localisation que nous avons établie du village. Faut-il cependant aller jusqu’à situer à cet endroit précis, le siège de la seigneurie au XIIIe siècle ? Certains renseignements fournis par des documents légèrement postérieurs nous amènent à penser le contraire. Dans le testament, encore inédit, fait en 1337 par Aude, fille de Gombaud de Tiran, celle-ci laisse à son petit-fils Raymond Guilhem de Caupène en part privilégiée : “La grande et la petite motte et la chapelle et les moulins de Tiran, avec la terre et les lieux dans lesquels ils sont, qui s’étendent du “pas” de la Jalle jusqu’aux “Caussirons”, et se trouvent entre la Jalle vieille d’un part, et les bois qui sont autour de la motte d’autre”11.
Les deux premières limites dans le sens longitudinal sont assez faciles à préciser. Le terme “pas” doit être sans doute interprété par passage, traversée, peut-être gué. Quant au terme “Caussirons” on peut le rapprocher de “causino”, “causeno” en toulousain et “causeo” en gascon, que l’on traduit généralement par : lieu d’où l’on extrait la pierre à chaux. Or, sur le plan du XVIIIe siècle, on trouve des fours à chaux indiqués au village de Tiran et, de nos jours, il existe encore l’emplacement de nombreuses carrières sur la rive gauche de la Jalle face au moulin du Thil. Ces éléments nous permettent de localiser le siège de la seigneurie en bordure immédiate de la Jalle, d’un point situé en amont à un gué, à un autre en aval, à peu près à hauteur du château et des moulins du Thil. Il reste à préciser sur quelle rive de la Jalle actuelle, car celle-ci a dans ce secteur de nombreux bras, et celui qui servait de confront au XIIIe siècle avait déjà le nom de Jalle vieille. Si l’on se réfère au plan que Léo Drouyn a reproduit dans la Guienne militaire12 et qui date du XVIIIe siècle, la Jalle ancienne se trouvait, à cette époque, sur la rive droite du courant actuel. Sans doute en était-il de même au XIIIe siècle et c’est donc plutôt sur cette rive qu’il faut rechercher le site des mottes de Tiran. Quant aux bois qui servent de confront opposé ils devaient se trouver plus vers le nord en bordure de la rive gauche de la Jalle actuelle.
Une étude sur le terrain n’apporte malheureusement aucune précision, car il n’existe plus le long de la Jalle la moindre trace de motte ou de fortification. Les recherches effectuées au siècle dernier par Durand et Léo Drouyn nous apportent cependant des renseignements précieux. Le premier en 184013, le second quelques années plus tard, ont décrit un ensemble fortifié qui se situait à un kilomètre environ du bourg de Saint-Médard, à 400 mètres en amont du Thil, à l’endroit où la Jalle fait un brusque coude. Il y avait là, à l’emplacement de l’isthme de la rivière, deux mottes, l’une de 37 mètres de long sur 27 mètres de large et 8 à 10 mètres de haut, de forme ovale, et une autre, ayant plutôt l’allure d’une enceinte, de 36 mètres sur 30 mètres, toutes deux entourées d’un fossé. Au sud, se trouvait une basse-cour limitée par un autre fossé. L’ensemble était désigné sous le nom de Poujau-de-la-Chapelle et se trouvait dans une île, car une vieille Jalle recoupait l’isthme au XVIIIe siècle. Cette minutieuse étude s’éclaire par la description du siège de la seigneurie de Tiran contenue dans le testament d’Aude de Tiran. Tout d’abord, le nom de Poujau-de-la-Chapelle ; assez curieux pour une forteresse, s’explique par la présence d’une chapelle placée sous le vocable de Saint-Sauveur et dont il est plusieurs fois question dans le testament de 1337. Peut-être a-t-elle été détruite ou abandonnée dès le XVe siècle.
On retrouve aussi les deux mottes d’inégale importance, bordées au sud par la vieille Jalle, et au nord par des marais et des bois, en bordure desquels coule la Jalle actuelle. Léo Drouyn remarque d’ailleurs que dans ce secteur la Jalle a dû souvent changer de lit jusqu’à sa fixation actuelle et cela expliquerait qu’elle n’ait pas servi de confront au XIVe siècle mais qu’on lui ait préféré des bois14. Si toutes ces concordances paraissent acceptables, il reste cependant à préciser l’emplacement des moulins mentionnés dans l’acte de 1337. Sur les plans et cartes du XVIIIe siècle, les deux seuls moulins qui apparaissent sont ceux du Thil, dont un existe encore15. Nous pensons pour plusieurs raisons, qu’il faut les identifier avec ceux de Tiran. En premier lieu, nous n’avons relevé aucune mention de la seigneurie du Thil avant 139516 et les seigneurs du Thil connus au XVe siècle portent le nom de seigneurs du Thil et de Tiran. Les moulins du Thil se trouvent, d’autre part, face aux carrières qui, nous l’avons vu, sont vraisemblablement un des confronts de 1337. Enfin, il paraît peu vraisemblable que deux sièges de seigneuries aient pu coexister à 200 mètres de distance au plus, celle qui sépare le site des mottes des moulins et du manoir du Thil. Celui-ci aurait ainsi succédé au Poujau-de-la-Chapelle comme siège de la seigneurie.
Rien d’essentiel ne paraît donc s’opposer à la localisation que nous proposons de la seigneurie du Tiran et à son identification avec le Poujau-de-la-Chapelle. Malheureusement il ne reste plus rien des fortifications. Dès 189717, E. Piganeau notait qu’on les avait rasées et on n’y voit plus aujourd’hui qu’une plantation de peupliers. On apprécie mieux ainsi l’œuvre de Léo Drouyn, irremplaçable à certains égards.
Cette assez longue étude ne doit pas nous faire oublier que Tiran n’était que le centre d’une seigneurie beaucoup plus vaste et aux éléments très dispersés. Reportées sur une carte, on constate que les paroisses dans lesquelles se trouvent les biens de Gombaud de Tiran sont toutes situées dans le haut Médoc et, pour la plus grande partie, dans l’ancien archiprêtré de Moulis18. D’abord Tiran et d’autres lieux paroisse de Saint-Médard19, dont le village de Bosc, pour lequel il ne prête pas hommage et qui est encore un quartier situé à la limite sud-est de la commune ; ensuite, des biens à Saint-Martin d’Eysines sauf le fief de la Forêt, qui est un quartier situé au sud de la même commune et pour lequel Gombaud ne prête pas hommage ; enfin des biens paroisses de Saint-Hilaire-du-Taillan20. Il y a là un groupement sur le terrain qui se traduit dans l’acte d’hommage par le fait que tous ces biens sont dans le même dominium. On relève ensuite un second groupe de biens, sensiblement plus au nord, paroisse de Moulis21 et paroisses de Cussac et Sainte-Gemme22, cette dernière étant actuellement un lieu-dit de la commune de Cussac. Les deux autres localités où Gombaud est possessionné sont plus isolées. Il s’agit, d’abord, de Saint-Laurent23, où il perçoit la dîme d’Avalat et possède le village de Moraret que nous n’avons pu localiser et de Saint-Vincent-de-Lacanau24 où il possède, entre autres, le village de Membusos ou Mebsos, peut-être le lieu actuel de Mejos entre Saumos et Lacanau.
Nous savons peu de choses sur la nature des biens de Gombaud de Tiran, mais il est certain que, mise à part la dîme d’Avalat, il ne s’agit que de biens fonciers. Si d’autre part l’hommage de 1274 est, comme nous l’avons dit, sans aucune originalité juridique, l’acte de 1268 présente, par contre, un intérêt pour l’étude des alleux et des rapports féodo-vassaliques. La transformation d’un alleu en fief de reprise, à laquelle nous y assistons n’a rien d’exceptionnel en Bordelais au XIIIe siècle, comme le montrent plusieurs exemples des Recogniciones Feodorum. Le document qui nous intéresse n’en soulève pas moins plusieurs problèmes. Signalons en premier lieu que les alleux de Gombaud de Tiran se trouvent dans une zone où, d’après M. R. Boutruche, cette catégorie de biens est assez répandue25. Ce qui est exceptionnel, par contre, et mérite d’être souligné, c’est que Gombaud de Tiran ne soit sans doute qu’un alleutier, comme le prouve la comparaison des actes de 1268 et 1274, et qu’il possède des biens à travers tout le haut Médoc. En ce qui concerne la nature de ces alleux il est certain qu’il s’agit d’alleux seigneuries. On sait, en effet, que le métayage et le fermage étaient inexistants ou presque en Bordelais à cette époque, et que le manque de main-d’œuvre et les circonstances économiques allant contre le maintien des réserves, les alleutiers mettaient leurs terres en valeur par le mécanisme de la censive. Il devait en être ainsi dans le cas de Gombaud de Tiran. Il est probable cependant qu’il avait inféodé certaines de ses terres à des personnes ayant elles-mêmes des tenanciers. C’est, du moins, de cette façon que nous interprétons l’expression “ce que d’autres tiennent de lui en fief paroisse de Saint-Médard et Lacanau”.
Il existe d’ailleurs, dans l’acte de 1268 un autre point méritant quelque éclaircissement. Gombaud ne prête pas en effet hommage pour le village de Bosc et le fief de La Forêt. Il est possible qu’il rendait déjà un hommage pour ces deux biens ce qui ne ferait plus de lui un alleutier exclusif. Dans le cas contraire, plus vraisemblable peut-être, il faut voir, comme précédemment dans le village des terres dépendant directement de Gombaud de Tiran et dans le fief, un bien inféodé à une personne ayant elle-même des tenanciers. Quelle que soit la bonne hypothèse, il est cependant curieux de constater que ces biens laissés en dehors de la reprise de 1268 sont des zones boisées, sans doute défrichées de fraîche date. Peut-être faut-il y chercher la cause de leur traitement particulier.
Dans leur presque totalité cependant, les biens de Gombaud de Tiran s’intègrent en 1268 dans le système des rapports féodo-vassaliques. Nous ignorons les motifs d’une telle transformation, car si le roi-duc a pu y trouver des avantages, Gombaud ne reçoît, par contre, apparemment aucune indemnité précise, comme cela arrive parfois lors de la création d’un fief de reprise. Au contraire, outre l’hommage d’un autour à mouvance de seigneur, Gombaud s’engage à remplir les services dus par les alleux. Depuis les travaux de M. R. Boutruche, nous savons que les alleutiers relevaient en justice du roi et étaient tenus à certains devoirs, en particulier dans le domaine militaire. Les coutumes de Bordeaux et de Bazas et les déclarations faites en 1274 sont formelles là-dessus. Mais ce qui est curieux, c’est que l’intégration dans le mécanisme des liens féodo-vassaliques des biens de Gombaud de Tiran n’entraîne pas de facto pour celui-ci, qui passe de l’état d’alleutier à celui de vassal, l’abolition des devoirs dus pour les anciens alleux. Il semble d’ailleurs qu’il n’y ait pas eu pour Gombaud de Tiran obligation de remplir désormais les devoirs dûs normalement par les vassaux. Peut-être faut-il voir là le résultat d’un accord entre le roi-duc qui gagne un vassal et Gombaud qui recueille les avantages de sa nouvelle condition, sans en être tenu à toutes les charges. Nous aurions là une sorte d’indemnité déguisée.
Quoiqu’il en soit, la chose ne paraît pas avoir été jusqu’ici remarquée. C’est dans ces conditions, qu’à la fin du XIIIe siècle les seigneurs et la seigneurie de Tiran s’intègrent dans l’histoire de notre région. Dès 1272, Gombaud entrait d’ailleurs en conflit avec le roi-duc et le nombre des actes d’hommage que nous avons signalés est sans doute en rapport avec cette affaire. Il est probable qu’elle a eu son origine dans des interprétations divergentes données à l’acte de 1268, mais rien ne permet encore de l’affirmer. Comme l’a d’ailleurs montré M. Trabut-Cussac les péripéties de la lutte furent nombreuses et ce n’est qu’en 1291 qu’elles semblent avoir pris fin.
Notes
- Baurein, Variétés Bordelaises, éd. 1876, t. II, p. 142.
- Arch. hist. Gironde, t. III, p. 16, n° 67, et t. V, p. 334-335, n° 345 ; C. Bémont, Recueil d’actes relatifs à l’administration des rois d’Angleterre en Guyenne au treizième siècle, p. 24-25. J.-P. Trabut-Cussac, Le livre des hommages d’Aquitaine, Bordeaux, 1959, p. XX, n° 35. Il existe des variantes importantes entre le texte des Arch. hist. Gir. et celui de C. Bémont. C’est celui-ci que nous avons retenu.
- J.-P. Trabut-Cussac, op. cit., p. XXIV, n° 227.
- Id., p. 31-32, n° 227.
- J.-P. Trabut-Cussac, “Les Procès de Tiran”, dans Rev. hist. de Bordeaux, 1963, p. 122, n° 6.
- Id., p. 172.
- Arch. dép. Gironde.
- Carte d’état-major : Bordeaux.
- E. Guillon, Les châteaux historiques et viticoles de la Gironde, Bordeaux, 1867, t. II, p. 93.
- Arch . dép. Gironde, II Z 518.
- Arch. dép. Basses-Pyrénées, E 151 : “E plus a dat e leyssat la medissa dona testayris a n’Aramon Guilhem senhor de Caupena… la mota gran, e la patita, e la capera, e los molins de Tiran, ab la terra e ab los locs en que son, que duran e tenen en lonc deu pas de Jala entro au Canssirons, e son entra la jala velha d’una part, e los bosc que son a l’entorn de la mota d’autra.”
- L. Drouyn, La Guienne militaire, t. I, p. XLIII.
- Compte rendu des travaux de la com. des Mon. hist., année 1849-1850. Rapport de M. Durand, p. 5 et planche.
- Drouyn, op. cit., p. XLIII-XLIV.
- Drouyn, op. cit., p. XLIII-XLIV.
- Baurein, op. cit., t. II, p. 143.
- E. Piganeau, “Essai de répertoire archéologique”, dans Société arch. de Bordeaux, t. XXII, p. 6-7.
- Dom. R. Biron, Précis d’histoire religieuse des anciens diocèses de Bordeaux et de Bazas, p. 55 et suiv.
- Cant. de Blanquefort., Gironde.
- R. Biron, op. cit., p. 55.
- Cant. de Castelnau, Gironde.
- Id.
- Ch.-lieu de canton.
- Cant. de Castelnau.
- R. Boutruche, L’alleu en Bordelais et en Bazadais du onzième au dix-huitième siècle, Rodez, 1947, p. 21, 39, 99, et cartes.