Paru dans : Les Cahiers du Bazadais, 181, 2013, 5-25.
La vente des seigneuries de Cazeneuve et Castelnau-de-Cernès a débuté en 1583, au moment où Henri de Navarre, confronté à de graves problèmes financiers est obligé de se dessaisir d’une partie de son patrimoine. Mais ce n’est qu’au mois de janvier 1599 que le roi de France céda définitivement les deux seigneuries à l’un de ses proches du parti protestant, M. Raymond de Viçose.
L’objet de la vente
La seigneurie de Cazeneuve
C‘est le 14 août 1250, à l’occasion de l’hommage prêté par Amanieu VI d’Albret (1240-1270) à Gaston VII de Béarn (1229-1290) qu’il est, pour la première fois, fait mention du château de Cazeneuve “dans l’honneur du château de Bazas”. Le 4 décembre 1253, dans le cadre de l’accord conclu entre Henri III (1216-1272) et Amanieu VI, le roi-duc exigea que le château lui fût remis pendant deux ans, en garantie de la fidélité du sire d’Albret. Nous ignorons à quelle date et dans quelles circonstances les Albret s’établirent sur les bords du Ciron et s’ils furent à l’origine du premier château, dont il nous reste une motte à la confluence du Ciron et du ruisseau de Honburens et la profonde coupure visible dans la cour du château. C’est entre 1250 et 1350 que le site connut une profonde transformation lorsque Amanieu VII (1294-1326), le sire “bâtisseur”, fit édifier un “château” dont l’assiette, à la différence des châteaux clémentins, utilisait au mieux les éléments naturels défensifs du site. À proximité du château naquit un bourg ; celui-ci fut ensuite entouré d’une enceinte précédée de fossés et devint la “ville” de Cazeneuve.
Voici comment la seigneurie est décrite en 1599 : “ladite baronnie de Cazenave consistant en l’enceinte des murailles d’une ville et chasteau, masures et tours, de Lagau, La Travete, preds du Lucbernet et ez parroisses dudit Cazenave, Preyssac, [Vicsos] Insos, Giscos et Cazalis en pareatge pour les cens et ranthes avec la commanderie de (blanc), confrontant avec les terres de la baronnie de Capcieux, la rivière de Ciron et prévosté de Bazas1.”
Cette description peut être complétée par le dénombrement fait au roi par M. de Viçose, le 18 juillet 1600, peu de temps après qu’il eut fait acquisition de la seigneurie2 : “Un vieux enceinte et cloture de ville ou autrement château, tours, flancs, guérites, fossés et deux autres masures ruinées et inhabitées depuis les guerres des Anglais nommés la Trave et La Travette, dans les paroisses de Préchac, Insos et Cazalis en paréage avec le commandeur de Cours et le pred de Lucbernet et hameaux et villages de Giscosset et rentes séparées en diverses paroisses de la prévosté de Bazas, dans les lieux de Bernos, Cudos, Giscos, Goualade, Castillon et sur le moulin appelé du Bartos appartenant au sieur de Gasq de Beaulieu et ailleurs, payables et portables audit château de Cazeneuve ; ladite baronnie confrontant avec celle de Captieux, en tirant du haut des ponts Arrondeaux et de Cabanne vers ceux de Mourissat et les preds de Lucbernet et descendant après vers les ponts Arrondeaux, le long de la grave et ruisseau de Bagerant jusqu’à la rivière du Ciron, du coté de Sore, vis à vis dudit Bourideys et Saint Siphorien, puis à ladite baronnie de Castelnau, Villandraut et Uzeste et à ladite prévosté de Bazas.”

Au moment de la vente, la seigneurie, composée des paroisses de Préchac, Insos et Cazalis, n’a pas connu de modification importante depuis le XIIIe siècle. Ses limites sont aisément identifiables : au nord, le cours du Ciron la sépare de la prévôté de Bazas et d’Uzeste ; à l’est, la grave et le ruisseau de Bageran, affluent de rive gauche du Ciron, sert de limite avec la baronnie de Captieux, passée aux mains des Albret à la suite du mariage de Jean II d’Albret et de Catherine de Foix, reine de Navarre (1484) ; au sud, la seigneurie de Sore ; à l’ouest la seigneurie est contiguë à celle de Castelnau-de-Cernès à hauteur de Bourideys et Saint-Léger (et non Saint-Symphorien) puis à celle de Villandraut3.
Au XVIIIe siècle, la paroisse de Préchac s’étendait encore sur la rive droite du Ciron sur une partie de la commune actuelle d’Uzeste : les hameaux de Lespiet, Luos, Coupet, Jeanhoy, Lagarbaste, Peyrehourtic en dépendaient. Si, à cette époque, ces quartiers dépendaient de la juridiction d’Uzeste, il n’est pas sûr qu’il en fût toujours ainsi puisque le château d’Illon, situé paroisse d’Uzeste, était dans la mouvance de Cazeneuve4.
La configuration de la paroisse de Cazalis était particulière. Probablement à la fin du XIIe siècle, les Albret avaient contribué à la fondation d’une commanderie d’Hospitaliers en leur faisant don d’une partie du territoire de la paroisse de Préchac. Sur ce territoire, les Hospitaliers avaient reçu la totalité de la seigneurie, mais, en 1461, Charles II d’Albret s’en fit restituer la moitié dans le cadre d’un paréage dont il est question dans l’acte de vente. En 1600, c’est le commandeur de Cours qui est coseigneur de Cazalis5.

Au XVIIIe siècle, d’après la carte de Belleyme, la paroisse de Cazalis constituait une enclave à l’intérieur de la paroisse de Préchac6. Elle avait la forme d’un carré de 3 km de côté, s’appuyant au sud au Douc, au nord atteignant le quartier du Paou, laissant à l’ouest le quartier de Souis, s’arrêtant à l’est à celui de Péchon, mais laissant Bouriche dans Préchac. Il s’agit sans aucun doute des limites de la sauveté, attestée en 1241, mais plus ancienne.
Lucbernet est mentionné dans trois documents datés de 1273 et 1289, relatifs à l’acquisition par Amanieu VI d’Albret de l’affar de Bordessoules dans la paroisse de Luxey7. Le pré de Lucbernet correspond à des zones de pâturage situées de part et d’autre du ruisseau de la grave de Lucpaille, suffisamment importantes pour être citées dans le contrat de vente. La paroisse de Préchac débordait alors sur le territoire de la commune actuelle de Callen (Landes) dont elle englobait le quartier de Lucbernet. Lors du tracé de la limite départementale, le Pred de Lucbernet fut divisé en deux, la partie nord attribuée à la Gironde, la partie sud (commune de Callen) aux Landes.
Le rattachement à Cazeneuve de biens forains dispersés dans des paroisses du Bazadais plus ou moins éloignées, avait été opéré dès le début du XIVe siècle8. Giscosset est un hameau situé au sud de la paroisse de Giscos, suffisamment important pour avoir fait l’objet d’un procès-verbal9. Les autres fiefs se trouvaient dans la prévôté de Bazas : à Cudos, il s’agissait du fief de Badet. C’est probablement dans cette paroisse qu’était situé le moulin de M. de Gascq, aujourd’hui moulin de Paillès, sur le Bartos. Nous ignorons en quel lieu se trouvaient les biens enclavés dans les paroisses de Bernos, Goualade et le lieu de Castillon.

Au moment où eut lieu la vente de la seigneurie, le roi de Navarre possédait aussi en indivision quatre moulins à eau, deux situés sur le Ciron et deux sur les ruisseaux de Ladirade et Lacal. Nous n’avons pu identifier que celui de Lacal, situé sur le ruisseau de la Citadelle, dans la paroisse de Préchac10.
Le roi détenait aussi, soit au titre du duché d’Albret, soit de celui de la vicomté de Marsan “130 journeaux de terre, lande et taillis au lieu appelé La Hasère de Captieux, confrontant d’un côté aux padouens et vacants de Cazeneuve, d’Insos et au Ciron, près le moulin de Galenpede, prenant en droite ligne depuis ledit moulin jusqu’aux pignadas d’Insos et Goua appelés de Castets, selon les bornes qui ont été posées et ce au devoir d’un couple de chiens courants11.” Nous pensons qu’il s’agit de la Garenne de Lucmau située dans la confluence du ruisseau de Bageran et du Ciron.
Il existait aussi à Cazeneuve, une capitainerie que tenait et possédait Jean de Lasserre, capitaine de ces terres.Nous évoquerons dans une prochaine notice consacrée aux hommages de Cazeneuve et à la Tour de Lusignan, La Trave (Lagau) et La Travette, deux maisons fortes en ruine, situées en bordure du Ciron. Fiefs détenus aux XIVe siècle par les Preissac, elles étaient intégrées en 1599 dans la réserve seigneuriale12.
La seigneurie de Castelnau-de-Cernès
La seigneurie de Castelnau-de-Cernès faisait suite à celle de Cazeneuve sur la rive gauche du Ciron. Comme celle de Cazeneuve elle entra dans le patrimoine des Albret dès la première moitié du XIIIe siècle, sinon plus tôt. En 1274, Bernard Ez IV (1270-1280) fit hommage à Édouard Ier pour Castelnau-de-Cernès avec tous ses droits, dépendances, détroit et juridiction sauf l’affar de Burunha. En 1599, le lieu de Castetnau consistait “en un vieux enceint de chasteau et de mazures ruinées, moulins, foretz et bois, de Taberton et Brostous, pred du pont Jean, et en maison dans le lieu de Saint Syphorien, et en l’estendue des hameaux et paroisses de St Legier, St Syphorian, Borideuix, Le Tuzan, Osten, Joue, Aurigne, Triscos et Balizac, ensemble la paroisse de Maure en paréage pour les cens et ranthes aveq l’abbé de Cagnote, confrontant lesdites parroisses au territoire de Sore, Belin, Budos, Villandraud, Noaillan et Preyssac.”
Le dénombrement du 18 juillet 1600 est plus explicite : “ledit lieu de Castelnau consistant en un vieux château et des masures ruinées, moulins, forets et bois, de Tavarton et brosteys, près du Pont-Jouan, maison dans le lieu de Saint-Symphorien et en l’étendue des hameaux et paroisses de Saint-Léger, Saint Siphorien, Bourideys, le Tuzan, Ostens, Joué, Aurigne, Triscos et Balizac, ensemble la paroisse de Mano en pareage pour les cens et rentes avec l’abbé de Cagnotte et qu’elle confronte :
- “au midy, avec la baronnie de Sore, le long de la grave qui vient du pred de Lucbernet passant entre les Comps (endroits bas du terrain) où sont les limites de Bourideys ;
- (au sud) “cotoyant les paroisses de Saint-Siphorien, Le Tuzan et Mano, laissant vers le nord les brousteys ou bois taillis de Castelnau” ;
- (à l’est) “tirant au Pont Jouan du côté du nord avec le seigneur de Villandraut près du moulin dudit lieu assis sur le ruisseau du Ballion” ;
- (à l’ouest) “du couchant avec les terres de Belhade (et au nord) St-Magne, le ruisseau du moulin de Paillas demeurant du côté des paroisses d’Hostens et Joué, le ruisseau faisant la séparation”. Le moulin de Paillas se trouve sur le ruisseau du même nom qui sert en partie de limite entre Hostens et Saint-Magne ;
- (au nord) “et aussi la baronnie de Budos, la grave et ruisseau ou riou du Terme entre deux, à prendre depuis le lieu de Bernadet et le pas de la Cadène jusqu’à la rivière du Ciron13.” Le lieu de Bernadet se trouve au nord de Balizac, en bordure du ruisseau de Tursan, séparant Balizac de Landiras ; le pas de la Cadène correspond à la tête de la grave ou riou du Terme qui fait séparation jusqu’au Ciron entre la baronnie de Budos au nord et “la métairie noble de Font de Baquey et Cailhemadet, paroisse de Léogeats”, métairie achetée par R. de Viçose au baron de Budos, probablement en 1601. De Bernadet au Ciron la limite est bien rectiligne entre Landiras et Budos au nord et Balizac et Léogeats au sud. Mais, ni la partie de la paroisse de Léogeats située sur la rive gauche du Ciron, ni de celle de Noaillan, au sud, n’ont jamais fait partie de la seigneurie de Castelnau-de-Cernès. On ne saurait donc prendre à la lettre la définition des limites dans ce secteur.
Le château de Castelnau-de-Cernès fut, du XIIIe au XVe siècle, le principal point d’appui des Albret dans les Landes, mais il fut probablement abandonné lorsque prit fin le conflit Franco-Anglais, au milieu du XVe siècle. Bâti sur la rive gauche de la Hure dans la paroisse de Saint-Léger, ce château fut une véritable forteresse, dotée d’une triple enceinte et d’une tour-maîtresse de trois étages et trente mètres de haut. Comme celui de Cazeneuve, le château bénéficia de l’attention d’Amanieu VII qui fit probablement construire les deux dernières enceintes. Les ruines que l’on peut encore voir aujourd’hui donnent une idée de son importance passée14.
La seigneurie était composée des paroisses de Saint-Léger, Saint-Symphorien, Hostens, Le Tuzan, Bourideys, Origne et Balizac ainsi que de celles de Joué et Triscos. Joué est aujourd’hui un quartier situé à l’est de l’ancienne paroisse de Mons, devenue Belin puis Belin-Béliet Triscos est le plus gros quartier de la commune de Balizac. Louchats était à l’époque un quartier d’Hostens. Bourideys, bien qu’appartenant au diocèse de Bazas, se trouve dans la juridiction de Castelnau-de-Cernès qui est bordelaise (fig. 7). Il n’est pas fait mention de la paroisse de Saint-Martin-de-Got, car elle appartient depuis 1306, à la seigneurie haute justicière de Villandraut.

Par contre, s’agissant de la paroisse de Mano, le paréage avec l’abbé de Cagnotte ne concerne que les cens et rentes, c’est-à-dire la seigneurie foncière. L’abbaye bénédictine de Cagnotte, fondée aux environs de 1120, est située en Chalosse, à l’extrémité orientale du pays d’Orthe15. C’est probablement grâce à une donation qu’elle acquit des droits sur la paroisse de Mano, la plus septentrionale du diocèse de Dax, une création de date tardive16.

Le seigneur possédait à Saint-Symphorien une maison “couverte de tuile creux ou étoit cy-devant le parquet de la justice” précise le dénombrement. C’est en raison de l’état du délabrement du château que le siège de la justice avait été transféré à Saint-Symphorien, mais il semble avoir été une nouvelle fois déplacé.
L’acte cite aussi les moulins ; dans le dénombrement il est fait état de “deux moulins tenus noblement, l’un appelé le moulin du Château – rattaché à l’enceinte extérieure du château – sur le ruisseau de la Hure, l’autre appelé la Molle – le moulin de la Moulette – sur le Riou Blanc17.”


Le passage de l’acte de vente “foretz et bois de Taberton et Brotjous, pred du pont Jean” qui devient dans le dénombrement “forêts et bois de Tabarton et brosteys près du Pont-Jouan” pose un problème d’interprétation. L’affar de Taverton est mentionné avec celui de Boos dans le testament d’Amanieu VI (1270)18. Le lieu de Tabarton correspondait au XIXe siècle à un quartier situé à l’est du bourg du Tuzan, associant bois de feuillus, pins et champs (fig. 12). Il existe aussi, au sud de ce quartier, un lieu et quartier de Brouhiton qui fait songer à Brotjous qui serait peut-être le même que Boos. Nous nous sommes aussi demandé s’il ne fallait pas dissocier du lieu de Tavarton “foretz et bois” ou seulement “forets”, En effet dans le dénombrement est citée la “garenne appelée à Toulouse qui s’étend jusqu’au lieu de Saint-Symphorien” ; le moulin de la Toulouse se trouve sur la Hure entre Saint-Symphorien et Saint-Léger. Cette garenne pourrait être une de ces forêts.
Le pred du Pont Jean correspondrait alors à une zone de prairie comme celle du pred de Lucbernet à Préchac. Nous avons vu que, selon le dénombrement, la limite de la seigneurie de Castelnau “tire au pont Jouan, du côté du nord avec le seigneur de Villandraut, près le moulin dudit lieu assis sur le ruisseau de Baillon” : il s’agit de la limite entre Villandraut et Saint-Léger qui va du lieu de Privaillet, au sud, au moulin sur le Ballion au nord. On pourrait ainsi localiser le lieu-dit Pont Jean ou Pont Jouan, à la fois zone de pâturage et point de départ d’une limite. Par contre, si l’on s’en tient au texte du dénombrement, Taverton ne correspondrait qu’à des forêts et des bois et à des broussailles situées à proximité du pont Jouan qui auraient bénéficié d’une mention particulière, ce qui n’est pas vraisemblable. On est manifestement en présence d’une erreur de transcription.
En 1601, R. de Viçoze acheta “du sieur Bernard de Cazalis et Marguerite Seguin, sa femme, le fief noble de Balizac consistant en un château flanqué de quatre tours, donjon, fossés, pont-levis, grange, vignes, jardin, verger et quatre métairies nobles ses environs, nommées Lasbordes, Lancre, de Cabirot et de Landehaute, avec diverses rentes dans les paroisses de Balizac, Origne, Joué, Hostens, St Siphorien et un moulin banal sur le ruisseau appelé Laurigne, dépendant du château de Balizac”19.
En 1274, Géraud de Budos avait fait reconnaissance au roi-duc pour ce qu’il tenait dans la paroisse de Balizac20. Le terme de château, utilisé en 1601, est ambigu. Compte tenu de la présence de tours, de fossés et d’un pont-levis, il ne s’agirait pas d’une simple maison forte. Cependant, l’absence de toute mention concernant des droits de justice nous incline à penser que Balizac n’était pas un “château” au sens juridique du terme. Cet édifice dont nous ignorons l’identité du constructeur a aujourd’hui disparu : il se trouvait au sud-est du bourg, proche du lieu de Pinot. En 1417, à une époque où cette région était sous contrôle anglo-gascon, Jeanne d’Armagnac, dame de Lesparre et de Balizac, céda cette seigneurie au roi Henri V de Lancastre ; F. de Montferrand l’aurait reçue en même temps que Castelnau-de-Cernès en 1436-1437. À l’issue de la guerre de Cent Ans les Albret entrèrent en possession de la seigneurie de Castelnau-de-Cernès.
Les deux seigneuries étaient “sises au duché d’Albret et dependentes d’icelluy ressort de Castelgelous et diocèses de Bordelois et Bazadois.” La vente à Raimond de Viçose ne modifia pas leur situation : elles continuèrent à faire partie intégrante du duché d’Albret fondé en duché-paierie en 1554 et à relever de la sénéchaussée de Casteljaloux.
La cession portait sur les deux seigneuries avec “leurs appartenances et dépendences, en tout droit de justice haute, moyenne et basse, droit de baronnie et chastelenie, fiefs, hommages, droits de patronage si aucun en y a, sens, ranthes, droits de guets, guarde et de pourvoir aux offices services, corvées et toutes actions pures, recindantes et recissoires, généralement tout ce qui est contenu dans le dénombrement et recognoissances desdites baronnies, terres et seigneuries.”
Cette description, reprise dans le dénombrement du 18 juillet 1600, s’éclaire à la lumière de la transaction entre Marguerite de Viçose, épouse de François Caumont de la Force et les habitants de la seigneurie de Cazeneuve et des paroisses de Saint-Léger, Saint-Symphorien, Bourideys, Balizac et Hostens21.
Les droits du seigneur
Le seigneur de Cazeneuve et Castelnau-de-Cernès exerce par ses représentants la justice seigneuriale, reçoit les hommages des détenteurs de fiefs, nomme aux offices : il s’agit de la nomination des officiers de la seigneurie. Il possède le droit de patronage : présentation à la cure d’une paroisse ; perçoit cens et rente : ce sont les redevances en argent ou en nature que paient les tenanciers pour les biens tenus de lui. Les tenanciers lui doivent des corvées : il s’agit de charrois avec des attelages de bœufs dont le nombre et les itinéraires sont précisés. Le seigneur possède aussi un droit de guet et garde : obligation faite aux tenanciers de venir aux châteaux en temps de guerre ou autre nécessité. Les tenanciers sont enfin obligés d’aller moudre au moulin du seigneur22.
La vente
Henri de Bourbon-Vendôme avait hérité, en 1572, de sa mère Jeanne d’Albret, reine de Navarre, princesse de Béarn, duchesse d’Albret. Le 1er août 1589, il succède sur le trône de France à Henri III, son beau-frère.
Lorsque, en 1599, il se dessaisit définitivement des seigneuries de Cazeneuve et Castelnau-de-Cernès, c’est au terme de trois ventes partielles qui ont débuté en 1583.
I. 1583
Depuis le mois d’octobre 1582 Henri de Navarre se trouve à Nérac. Il va y séjourner, mis à part quelques voyages en Béarn, à Tonneins ou à Casteljaloux jusqu’à la mi-juin 158323.C’est à ce moment-là “pour subvenir à l’urgente nécessité de ses affaires”, en d’autres termes à ses besoins d’argent, qu’il vend à pacte de rachat à M. Guilhem de Ranse, sieur de Plaisance24, les baronnies, terres et seigneuries de Castelnau de Sarnès et de Casenave situées au duché d’Albret, pour le prix de “6333 écus un tiers”. Le contrat est passé chez maître Nicolas Brassay, notaire en la ville de Nérac, en 1583, le quantième et le mois ne sont pas précisés car ils n’étaient pas connus de l’auteur de l’acte de la vente à M. de Viçose25[25]. La vente à réméré ou à pacte de rachat permet au vendeur de faire face à des difficultés financières, en espérant qu’il pourra rembourser l’acheteur au terme convenu. M. de Ranse et ses héritiers ont joui des deux seigneuries pendant dix ans, jusqu’en 1594.
II. 1595
En 1589, avant de mourir, Henri III a reconnu comme son successeur le roi de Navarre qui devient Henri IV. Il reste au roi à conquérir son royaume et ses sujets. Converti au catholicisme le 25 juillet 1593, il est sacré à Chartres le 27 février 1594 et échappe à un assassinat le 27 décembre. 1595 est une année difficile pour le roi qui déclare la guerre à l’Espagne. Les Espagnols attaquent en Picardie, débarquent en Bretagne. Ses amis protestants, choqués de sa conversion au catholicisme, ne le soutiennent pas, mais il est reconnu par le pape le 18 septembre.
Le 18 novembre 1595, M. Raymond de Viçose, conseiller et intendant des finances du roi en Guyenne, avec “sa permission” probablement faut-il entendre “à sa demande”, rembourse aux héritiers de M. de Ranse la somme de 6 333 écus un tiers. Sans doute le roi, dans l’incapacité de rembourser les héritiers de Ranse et ne souhaitant pas qu’ils deviennent seigneurs de Cazeneuve, agit par personne interposée. M. R. de Viçose leur est subrogé par la chambre des comptes de Nérac, le 18 novembre 1595, avec prorogation pour dix années du terme de rachat à réméré. On notera que le contrat était venu à échéance au plus tard en décembre 1593 et que deux ans se sont écoulés sans que M. de Ranse ou ses héritiers n’aient fait valoir leurs droits ; quant au roi, il eut en ces années-là, bien d’autres préoccupations26.
Raymond de Viçose appartient à une famille montalbanaise. Le premier représentant connu est un médecin portugais, Michel de Vissoze, venu de Paris, qui s’installe à Montauban où il épouse la fille d’un marchand et y fait souche. Il décède vers 1560. Raymond est l’un de ses quatre enfants. Après des études de droit, il entame une carrière au service du roi de Navarre comme secrétaire de la chambre de Navarre, signant en finances à partir de 1577. À la différence de ses deux frères – l’un Jean demeure à Montauban, un second Jean est au service du duc d’Alençon –, Raymond est aux côtés du roi de Navarre : secrétaire spécialisé dans les affaires touchant aux finances, bon négociateur, il est présent aux batailles de Coutras (20 octobre 1587) et d’Ivry (1590). Sa famille portera d’ailleurs sur ses armes un panache blanc.
Après l’avènement d’Henri IV (1589), Raymond reste en Guyenne comme intendant des finances, attaché au maréchal de Matignon et continue à exercer auprès de lui les fonctions qui étaient les siennes depuis 1577. Le 8 mai 1595, à ce titre, il prend rang et séance au bureau des finances de Guyenne et s’installe définitivement à Bordeaux. Mais il est aussi chargé de surveiller le gouverneur et de rendre compte de l’esprit public de la province, une double tâche qu’il exerce aussi dans d’autres gouvernements, dans le cadre d’inspections générales. Le rachat de la vente faite à M. de Ranse doit être mis en relation avec l’installation de M. de Viçose à Bordeaux et les importantes fonctions qu’il exerce pour le compte du roi27.
III.
Le 7 septembre 1596, le roi est à Montceaux – Montceaux-lès-Meaux (Seine-et-Marne) – dont il en a acheté le château qu’il a offert à Gabrielle d’Estrées, devenue marquise de Montceaux. Il y avait séjourné à plusieurs reprises en juillet et en août28.
Le roi, pour “témoigner le soing et particulière affection que comme bon roy et maitre il porte aux enfants de feu Jacques Vallier, sieur Dupin, de son vivant conseiller, secrétaire de ses commandements en l’Estat de Navarre et intendant de ses finances de France”, a souhaité intervenir en leur faveur. Il se préoccupe en particulier de l’avenir de Susane Vallier, fille de Jacques et de Susane d’Auteville. C’est ainsi qu’il “commande expressément” à Raymond de Viçose de la “rechercher en mariage”, entendons par là de l’épouser. C’était pour le roi le moyen de remercier Jacques Vallier des “bons, grands et fidelles services” qu’il lui avait rendus jusqu’à l’heure de son trépas. Le sieur de Viçose n’avait pas d’autre choix que de répondre favorablement à ce que l’on peut considérer sinon comme un ordre, du moins comme une ferme invitation. Ne voulant pas doter personnellement la jeune Susane, mais souhaitant probablement adoucir la contrainte qu’il imposait à M. de Viçose, le roi va l’indemniser pécuniairement. “En contemplation de ce mariage” et pour remercier M. de Viçose des “longs, fidelles et signalés services qu’il a reçus de lui depuis vingt ans, tant au-dedans qu’au dehors du royaume et des affaires importantes auxquelles il avait été commis et employé au péril de sa vie” (allusion aux batailles d’Arques et d’Ivry), le roi lui accorde un don de 8 000 écus sol (au soleil) sur les deux seigneuries29. Le 7 septembre 1596, par lettres patentes délivrées à Monceaux, il lui assigne cette somme sur la plus-value des baronnies, terres et seigneuries de Castelnau de Sarnès et de Casenaue. S’ajoutant à celle de 6 333 écus un tiers, elle était destinée à l’acquisition de ces seigneuries par M. de Viçose, sous la réserve que le mariage prévu ait bien lieu.
Par les mêmes lettres de septembre 1596, le roi accorde à M. de Viçose 2 000 écus sol pour les réparations “utiles et nécessaires” faites aux maisons, moulins, granges, et parquet de justice des seigneuries. C’est bien la preuve que de Viçose s’était comporté en véritable seigneur. Vérification de ces lettres est faite par la chambre des comptes de Nérac le 1er juillet 1597. À cette occasion, les conseillers demandent que soit conclu un nouveau contrat à pacte de rachat et réméré, ce dont le souverain fut informé, mais nous ignorons si ce contrat fut conclu. Quoi qu’il en soit, Me François de la Corrège, conseiller du roi et réformateur de son domaine au duché d’Albret, fut commis par les conseillers de la Chambre des comptes pour mettre de nouveau M. de Viçose en possession des deux seigneuries. Le conseiller se rendit sur les lieux et effectua la prise de possession en faveur de M. de Viçose et de ses héritiers et ayants droit jusqu’à ce qu’il soit remboursé des 6 333 écus payés à M. de Ransé, des 8 000 écus reçus en “considération et contemplation de mariage” et des 2 000 écus pour les réparations et améliorations faites par lui. À l’occasion de la visite à Cazeneuve qu’il fit en présence de Me Anthoine Castaing, procureur général fiscal du duché, M. de Lacorrège estima que ces réparations avaient été faites “en bon père de famille” et que, sans elles, les revenus des seigneuries provenant pour l’essentiel des moulins auraient été considérablement amoindris. Il estima que les sommes ainsi engagées étaient bien supérieures à 2 000 écus. Il est clair que le château de Cazeneuve et probablement les moulins étaient en fort mauvais état. Les choses en étaient là lorsque se produisit un événement dont on peut penser qu’il n’était pas totalement imprévu.
IV.
Nous sommes en 1598. Cette année-là fut un tournant sur le plan politique et religieux. Vainqueur des Espagnols en Bretagne et Picardie, le roi conclut avec eux la paix de Vervins (2 mai), après la promulgation de l’Édit de Nantes (13 avril). Il donne aussi en apanage à César, le fils légitimé qu’il avait eu de Gabrielle d’Estrées, le comté de Vendôme dont il avait hérité au décès de son père, Antoine, en 1562.
Le 14 janvier 1599, le roi vend à M. de Viçose les deux seigneuries. Il se trouve alors à Paris depuis la fin du mois de décembre et songe à épouser Gabrielle d’Estrées qui attend un enfant.
Le roi avait été informé qu’il était nécessaire de rembourser “plusieurs grandes sommes de deniers” dont il était obligé envers plusieurs personnes. Il fallait “prévenir les saisies susceptibles d’être faites sur le domaine du duché d’Albret et des autres terres ressortissantes de la Chambre des comptes de Nérac et Pau et donc éviter les aliénations dommageables et préjudiciables aux intérêts du roi”. Celui-ci avait déjà mis en vente tout son “domaine particulier et héréditaire” ressortissant en ses chambres des comtés de Vendôme et la Fère pour “faire cesser le cours des renthes et intérêts” qui menaçaient tout son domaine30. On peut, cependant douter de cette décision puisque César venait de recevoir ces comtés en apanage. Il faut y voir plutôt un argument invoqué pour justifier l’aliénation des deux seigneuries.
Les conseillers du roi lui avaient représenté qu’il n’y avait pas désormais de meilleure solution que de vendre, à perpétuité cette fois, la plus-value des baronnies, terres et seigneuries de Castelnau de Sarnès et de Casenaue à Raymond de Viçose. Ils estimaient en effet “qu’en considération de leur engagement à M. de Viçose, ces seigneuries étaient désormais inutiles”. “Le remboursement des sommes dues à M. de Viçose ne pouvait de toute façon être réalisé que par des ventes plus dommageables et préjudiciables.”
Le roi prit alors avis de plusieurs membres de son entourage appartenant tous à la “maison de Navarre” : deux membres de son conseil d’État et privé, M. Duplessy-Mornay, surintendant de sa maison et finance de Navarre, et Geoffroy de Calignon, chancelier de Navarre ; Jean de Lombardière, conseiller et secrétaire d’État en la maison de Navarre ; Pau de Goic conseiller, trésorier, receveur général en sa maison et ancien domaine de Navarre ; Antoine de Loménie, secrétaire du cabinet de sa majesté, conseiller de son conseil d’État de Navarre ; Michel Ecard, Jean de Vosques, Pierre de Gaxot du Pont, Auguste Galard, maître des requêtes, Joseph de la Ruffie, conseiller en ses conseils d’État et privé de France.
De cette longue liste trois noms méritent d’être détachés. Il s’agit d’abord de Philippe Duplessy-Mornay (1549-1623). Originaire du Poitou, c’était un des plus éminents théologiens du parti protestant, d’une immense culture, ennemi du chanoine Jérôme Géraud Dupuy, l’auteur de la Chronique de Bazas[31]31. En 1576, il se rapprocha d’Henri de Navarre dont il devint le conseiller, l’ambassadeur et l’auteur de bien des textes signés du roi. Il a contribué au rapprochement d’Henri de Navarre et d’Henri III en 1589 et fut un des négociateurs de l’édit de Nantes (1598). Il termina sa vie comme gouverneur de Saumur.
Geoffroy de Calignon (1550-1606), originaire du Dauphiné, fut successivement secrétaire de Lesdiguière, puis secrétaire et chancelier d’Henri de Navarre qui le chargea de nombreuses et importantes missions diplomatiques et politiques. Il était, selon Agrippa d’Aubigné, “un des plus rares esprits de son temps”32.
Antoine de Loménie était d’origine limousine. Son père ayant été victime de la Saint-Barthélemy, il bénéficia de la protection d’Henri de Navarre et fit ses premières armes dans l’administration de ses domaines en devenant secrétaire ordinaire en 1584, puis secrétaire des finances en 1590, enfin secrétaire d’État de Navarre en 1598. Au début du règne, il servit d’intermédiaire dans les négociations entre le roi et les Ligueurs. Il fit partie de l’entourage proche du roi. En 1595, le roi lui avait confié une ambassade extraordinaire auprès de la reine Élisabeth. Secrétaire du cabinet du roi, puis premier commis de Martin Ruzé, secrétaire d’État de la Maison du roi, il lui succéda à son décès en 1613 et resta secrétaire jusqu’à sa mort, en 163833.
Les gens de la chambre des comptes de Nérac dressèrent l’état des revenus des seigneuries qui fut adressé au conseil de Navarre34. II fut alors procédé à la vente aux conditions suivantes :
“Le roi cède perpétuellement le droit de rachat et plus-value des baronnies, terres et seigneuries de Castetnau de Sarnès et de Cazenave, sises au duché d’Albret et en dépendant, du ressort de Casteljaloux et diocèses de Bordelais et Bazadais, leurs appartenances et dépendances.”
La cession est faite pour le prix de 13 666 écus 2/3 faisant, avec la somme de 16 333 écus 1/3 (vente de 1595), la somme de 30 000 écus sol valant 90 000 livres tournoises, soit 3 livres l’écu. M. de Viçose devait payer les 13 666 écus 2/3 à P. de Gou, trésorier et receveur général de la maison du roi et ancien domaine de Navarre, à savoir 3 000 écus comptants et le restant, soit 6 666 écus 2/3 dans les quatre mois, sous peine de tous dépens, dommages et intérêts dont l’état devait être établi. Cette somme devait être employée au paiement des créanciers et autres affaires plus pressées.
M. de Viçose était tenu et s’était obligé de rembourser le capitaine de Cazeneuve de la valeur de la capitainerie en ayant égard aux gages attribués à la capitainerie, la valeur du remboursement étant incluse dans le prix de la vente.
Le roi s’était de son côté engagé à faire délivrer à M. de Viçose par ses gens de la chambre des comptes et garde du trésor de Nérac, “les originaux des livres terriers, reconnaissances, documents, papiers et enseignements concernant les deux seigneuries, servant à la conservation et levée des droits, devoirs et revenus qui se trouvent dans la chambre des comptes et trésor de Nérac.” L’acquéreur devait en donner décharge au pied d’un inventaire qui lui sera donné par les officiers de cette chambre35.
La vente ne serait définitive que dans un délai de six mois, au cas où il se trouverait un enchérisseur offrant une somme supérieure à 30 000 écus. Dans ce cas, le roi était tenu de rembourser à M. de Viçose 30 600 écus, plus ce qu’il aurait payé pour la capitainerie.
La vente fut faite par-devant Claude d’Eriges ou de Reges et Pierre de Briquet ou Brignot, notaires du roi en son Châtelet de Paris. L’acte fut publié sous forme de lettres faites et passées par “sa majesté” au château du Louvre et par les seigneurs de son conseil de Navarre, en la maison du Chapeau rouge, sise rue Saint-Honoré, paroisse Saint-Eustache, le 14 janvier 1599. À la relation des notaires, Jacques d’Aumont, baron de Chappes, seigneur de Dun le Palleteau et Corps, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi et garde de la prévôté de Paris fit apposer le sceau de la prévôté, le 12 février 1599. Le roi signa la minute du contrat ainsi que les seigneurs de son conseil d’État de Navarre.
25 janvier 1599 : Le sieur Pau Legous, trésorier et receveur général de la maison du roy et ancien domaine de Navarre, donne quittance à M. de Viçose d’une somme de 666 écus deux tiers. Il restait à payer treize mille écus : M. de Viçose s’en est-il acquitté ? Dans les comptes des années 1494-1495, Castelnau et Cazeneuve figurent pour un revenu de 1 000 livres tournois dont décharge est donnée au receveur, montant égal à celui du bordereau36. Compte tenu des dons que lui avait faits le roi (8 000 + 2 000 écus) et en admettant que M. de Viçose ait bien payé les 13 000 écus dont il était encore redevable, le montant de l’achat s’élevait à 20 000 écus faisant à 3 livres l’écu 60 000 l. Le rapport n’aurait donc été que de 1,66 %, mais un siècle sépare les deux données.
Gabrielle d’Estrées meurt le 8 et 9 avril à Paris. En décembre, le roi obtient l’annulation de son mariage avec Marguerite de Valois. Le 17 décembre 1600, il épouse Marie de Médicis.
Raymond de Viçose s’est installé définitivement en Guyenne. Il fait l’acquisition d’une maison à Bordeaux dans le quartier des Chartreux. Il remet ainsi à l’ingénieur hollandais Conrad Gauzen l’argent nécessaire au financement de l’assèchement des marais de Bordeaux et Bruges à partir de 1604. Il est aussi chargé de la distribution annuelle du subside accordé par le roi aux protestants pour leurs affaires secrètes et à ce titre il est envoyé en mission. De Suzanne fille de Jacques Vallier, sieur Dupin qu’il avait épousée, fin 1596 ou début 1597 il eut quatre enfants dont Henri, héritier de Cazeneuve et Castelnau qui épousa Marie de Fabas. Il décède en 1619.
On lui doit la reconstruction de Cazeneuve. Depuis 1599 le château n’a fait l’objet d’aucune vente.
Notes
Dans le courant des années 70, M. Emmanuel de Sabran nous avait ouvert les archives de Cazeneuve, à l’occasion des recherches que nous avions entreprises sur l’habitat castral en Bazadais (“Les Castelnaux du Bazadais”, Géographie historique du village et de la maison rurale. Actes du colloque tenu à Bazas les 19-21 octobre 1978, sous la direction de Charles Higounet. Éditions du CNRS, 1979). Nous avions, à cette occasion, dépouillé des documents dont l’intérêt dépassait le cadre de ces recherches, en particulier une copie de la vente des seigneuries de Cazeneuve et Castelnau-de-Cernès par Henri IV. Grâce à d’autres documents déjà publiés, provenant de ces mêmes archives, nous avons pu nous faire une idée précise de ce qu’étaient ces deux seigneuries à l’aube du XVIIe siècle. Nous tenons à remercier M. Elzéar de Sabran qui nous a communiqué les deux vues du château de Cazeneuve qui illustrent cet article.
- Archives de Cazeneuve. Copie de l’acte de vente.
- Lalanne (F.), Paysage et habitat dans trois communes du sud du Bazadais (XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles), dans La Grande Lande. Géographie historique. Actes du Colloque du Teich, 19 au 20 octobre 1985, Presses universitaires de Bordeaux, 1995, pièce justificative n° 1, p. 136-140.
- Le Cap de la Grave se trouve à l’angle sud-est de la commune de Cazalis, au contact avec celle de Captieux (borne du Cap de La Grave) (fig. 5). Nous n‘avons pu identifier les lieux dits Ponts Arrondeaux, Cabanne, Mourissat.
- Delage de Luguet (E.), La mobilité géographique de la population à Uzeste et dans les pays du Ciron du XVIIIe siècle, dans Les Cahiers du Bazadais, n° 22, mai 1972, p. 19 et suiv., cartes p. 20, 22.
- Cette commanderie était située dans la commune de Cours-les-Bains (canton de Grignols). Dans la levée du don gratuit sur le clergé du diocèse de Bazas (1523-1537) (Archives historiques de la Gironde, t. XXVIII, 1893, p. 307 et suiv.) figure “Casalis de Sainct-Jean de Roddes : 10 l.” (p. 311). Sur la liste des décimes levés en 1523, le recteur de Cazalis est imposé pour 14 l. (livres) t. (tournois). On le retrouve sur la liste des décimes levés en 1528-1529 pour la rançon de François Ier et de ses fils (p. 329). Il est encore imposé pour 14 livres, aux côtés de ceux de Preyssac (42 l.) et d’Insos (7 l. 10 sous t.) (p. 340), ce qui nous donne une idée précise de l’importance de chacune de ces paroisses.
- Plusieurs quartiers et hameaux qui appartiennent aujourd’hui à la commune de Cazalis dépendaient alors de la paroisse de Préchac : il s’agit de l’Extrême, Chon, Peybon, Biarnais (Le Bearnois), Maniou au nord, La Grave et Caplanne à l’est, Souis à l’ouest, et le nord du quartier de Lucbernet au sud. Ils ont été inclus dans Cazalis lors de la création de cette commune en 1857.
- Reconnaissance de Bernard d’Auloède au roi-duc de ce qu’il tient dans l’affar (2 avril 1273) ; vente à Édouard Ier de la moitié de l’affar (7 août 1273) ; cession par le roi-duc à Amanieu VI de tous les droits qu’il avait sur l’affar (24 août 1289). Le second document précise : “in quau Lucpaille et Lucbernet le dit B. aue la maitat ab l’ospitau de Cazalis”. (voir fig. 6) J. B. Marquette, “Le réseau paroissial de la Haute-Lande au début du XIVe siècle”, La Grande Lande. Histoire naturelle et géographie historique. Actes du colloque de Sabres, 27-29 novembre 1981, sous la direction de A. Klingebiel et J. B. Marquette, p. 551-62, n. 208-210. Par affar il faut entendre domaine d’un point de vue territorial. L’affar de Bordessoules s’étendait sur la majeure partie de la paroisse de Luxey.
- Marquette (J. B.) Les Albret. L’Ascension d’un lignage gascon (XIe siècle-1360), Ausonius Scripta mediævalia 18, 2010, p. 316-322.
- “Pour le village et fief de Giscosset, un P. V. contenant l’estendue et limite fait par les officiers des baronnies de Cazeneuve et Castelnau, en présence de Jérémie Ducastaing, procureur de Casteljaloux, le 28 mars 1605. Signé Ducastaing, Lucbernet, Dartigolles, Dubern et Dartialh. Et pour les rentes enclavées en la prévosté de Bazas, plusieurs anciens comptes et lièves extraits du Trésor de Nérac et reconnaissances de ceux de Badet en Cudos et du Sr. de Gasq, passées chez Monereau, notaire à Bazas.” Nous n’avons pu identifier le lieu de Castillon. (Lalanne (F.), art. cité, p. j. n° 1, p. 136-140).
- Lalanne (F.), art. cité, p. j. n° 1, p. 138. R. de Viçose avait procédé, avant la vente de la seigneurie, au rachat de la moitié de ces moulins détenue par des particuliers : le 11 juillet 1598 à un sieur Martinia de Bazas (Dutoya, notaire à Bazas) puis, le 25 juillet 1599, au sieur Léglise de Casteljaloux (Ricaud, notaire à Casteljaloux). Le dernier rachat n’eut lieu qu’en 1607.
- Lalanne (F.), art. cité, p. j. n° 1, p. 140.
- Article à venir : Les vassaux du sire d’Albret dans les seigneuries de Cazeneuve et Castelnau-de-Cernès au début du XIVe siècle.
- Lalanne (F.), art. cité, p. j. n° 1, p. 140-141.
- Les Albret, p. 322-326.
- Landes et Chalosse sous la direction de S. Lerat, Pau, t. I, 1983 : Marquette (J. B.), “L’essor monastique (XIe–XIIe siècle)”, p. 188-190.
- Marquette (J. B.), La géographie ecclésiastique du diocèse de Dax d’après le Livre rouge et son évolution du XIIe au XVIIIe siècle, dans L’Église et la société dans le diocèse de Dax aux XIe et XIIe siècles. Journées d’étude sur le Livre rouge de la cathédrale de Dax, Dax 1er mai 2003, Amis des églises anciennes des Landes. Comité d’études sur l’histoire et l’art dans les Landes, 2004, p. 91-154. La paroisse de Mano n’existait pas à la fin du XIIe siècle. En 1527, c’était une annexe de Biganon (p. 135).
- Les Albret, p. 466.
- Les Albret, p. 317, 555.
- Lalanne (F.) art. cité, p. j. n° 1, p. 139. La fin de cette description “ci-devant – il s’agirait du moulin – placé au lieu de Capdebern et à présent remué près l’église d’Origne” est incompréhensible.
- Recueil d’actes relatifs à l’administration des rois d’Angleterre en Guyenne au XIIIe siècle. Recogniciones feodorum in Aquitania, édit. C. Bémont, Collection de documents inédits, Paris, 1914, n° 235.
- Il n’est pas fait mention de ceux d’Origne ni de ceux du Tuzan. Lalanne (F.), art. cité, p. j. n° 5, p. 146-150.
- Les tenanciers des deux seigneuries étaient encore au XIVe siècle des questaux, c’est-à-dire des serfs dont la condition et les charges auxquelles ils étaient assujettis ont évolué au XVe et XVIe siècle pour aboutir au statut de tenanciers libres. Cette situation que l’on retrouve dans les seigneuries landaises des Albret (Sore, Labrit) était radicalement différente de celle que l’on trouvait dans les seigneuries dépendant du roi-duc (Labouheyre, Sabres, Brassenx (Morcenx), Maremne, Marensin, Gosse et Seignanx) ou chez les hommes francs du Bazadais. L’histoire de cette émancipation reste à faire. Il ne faut pas confondre, non plus, les tenanciers du seigneur de Cazeneuve et de Castelnau avec les métayers exploitant des métairies appartenant soit au seigneur, soit à des tenanciers. Enfin, les seigneurs qui tenaient de celui de Cazeneuve ou de Castelnau des “fiefs nobles” ne devaient qu’un hommage. Nous les étudierons dans un prochain article.
- Cuignet (J.-C.), L’itinéraire d’Henry IV, Héraclès, 1997, p. 74-77. Au mois de juillet et jusqu’à la mi-août il est à Bazas ou aux environs, à Langon, Roquetaillade, Castets.C’est essentiellement à Pau et Mont-de-Marsan qu’il réside le reste de l’année.
- En 1538 Jean de Cassagnet seigneur de Plaisance avait été condamné à mort et à la confiscation de ses biens dont 2/3 au profit du roi de Navarre. En 1554, Antoine de Bourbon et Jeanne d’Albret avaient vendu leur droit de confiscation sur la seigneurie de Plaisance pour 2 950 livres et fait don de la justice haute et basse à G. de Ranse, leur secrétaire ordinaire. Suite à un appel d’Anne de Cassanet, fille de Jean, Guillaume de Ranse ne conserva que la moitié des droits seigneuriaux cédés en 1554. Mais il était aussi seigneur de Laperche et de Lacour. Il devait fréquenter la cour de Nérac et être un des proches du roi. Originaire de Sauveterre du Béarn, il s’était marié en secondes noces, le 23 septembre 1564, avec Antoinette des Escuyers de Gandillac dont la famille possédait en Agenais, dans la juridiction de Tombebœuf, le repaire de Bélissac. L’une de ses petites–filles, Marguerite de Sevin épousa Jacob de Secondat, seigneur de Montesquieu dont descend l’auteur de L’Esprit des Lois. (J. Dubois, “Guillaume de Ranse”, Revue de l’Agenais, 1912, p. 177-179). Nous tenons à exprimer nos vifs remerciements à M. Philippe de Loze qui nous a signalé l’article de J. Dubois et communiqué des informations inédites sur Guillaume de Ranse.
- Dans le dénombrement du 18 juillet 1600, il est fait mention des “contrats d’engagement de 1581 et 1583 passés entre le roy et feu M. Guillaume de Rancé, portant vente à pacte de rachat de 10 ans des baronnies de Castelnau et Cazeneuve”. Nous n’avons aucune information sur le contrat de 1581.
- Alors qu’il avait rallié le camp des catholiques, Guillaume de Ranse fut tué dans les rues d’Agen par le sénéchal d’Agenais, le 5 janvier 1591. La succession qui s’en suivit fut à l’origine du retard dans le règlement de cette vente (J. Dubois, art. cité p. 180).
- Gilbert (N.), Une famille protestante de Montauban. Les Viçose (XVIe-XVIIe siècle), École nationale des Chartes, Position des thèses, 1989, p. 79-84.
- Cuignet (J.-C.), op. cit., p. 102. La date du 7 juillet n’est pas documentée. Elle l’est par cet acte.
- L’écu est une monnaie d’or émise pour la première fois en 1346, sous le règne de Philippe VI, c’est l’écu à la chaise, suivi en 1385, sous Charles VI, par l’écu à la couronne. Celui-ci tire son nom de l’écu de France qui occupe le droit de la monnaie et qui est sommé d’une couronne. Le premier écu au soleil a été émis, sous Louis XI, en 1473. Il diffère du précédent par la présence, au droit, d’un soleil stylisé au-dessus de la couronne.
- Les Bourbon-Vendôme étaient aussi seigneurs de La Fère dans l’Aisne, suite au mariage de François (1477-1495) avec Marie de Luxembourg.
- Dans l’introduction de la Chronique, J. G. Dupuy rappelle qu’il fut longtemps empêché de la rédiger par les obligations liées à ses fonctions canoniales et par son engagement dans la controverse qui l’opposa à Philippe de Mornay (Archives historiques de la Gironde, t. XV, p. 3) : “Il convient d’ajouter les attaques ininterrompues de Philippe de Mornay, ennemi juré de l’église catholique, aux tentatives duquel j’ai fait face et qui m’ont épuisé durant quatre ou cinq ans.” Le chanoine Dupuy ne publia pas moins de cinq ouvrages contre le théologien protestant, entre 1598 et 1601.
- Histoire universelle, t. VI (1579-1585), éd. André Thierry, Droz, 1992 p. 137.
- Figliuzzi (C.), Antoine et Auguste de Loménie, secrétaires d’État de la Maison du roi sous Henri IV et Louis XIII, carrière politique et ascension sociale. École des chartes, “thèses”, 2012.
- Ces états n’ont pas été retrouvés.
- La remise de ces documents eut lieu effectivement au cours des années suivantes. Paradoxalement ils ne nous sont connus que par une copie – le document sur lequel nous nous sommes appuyé – de la copie officielle ou vidimus, réalisée à Nérac au moment de la remise des originaux à M. R. de Viçose, et conservée à Nérac jusqu’à la Révolution. Cette copie comme les originaux ont disparu.
- Arch. Dép. 64, E 89, fol. 62 r°.