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Le terme de parure recouvre l’ensemble des objets servant à orner un individu. Pouvant être porté à même le corps ou sur un vêtement, ce mobilier possède une charge symbolique forte qui va bien au-delà de sa simple fonction utilitaire. Par le biais de sa parure, un individu communique sur son statut social, son rang économique ou son appartenance à un groupe, que ce soit par sa culture ou par ses croyances. Les parures sont donc parties prenantes d’un système social organisé, parfois complexe. Elles témoignent de cette organisation tout autant qu’elles l’alimentent. Le rôle social, culturel et symbolique joué par cette catégorie de mobilier est primordial lorsqu’il devient le matériel d’étude de l’archéologue. Par le prisme de cette science, l’analyse des parures constitue alors une clé de lecture des sociétés passées à laquelle s’ajoute une dimension éminemment chronologique, donnée fondamentale pour retracer la trame évolutive des populations qui nous précèdent. Dès lors il convient de s’accorder sur ce que l’on entend par le terme de parure. Pour certains, il renvoie aux seuls objets ornementaux et se rapproche de ce que l’on nomme plus communément des bijoux. Toutefois, cette signification paraît trop restrictive et ne tient pas compte d’objets fonctionnels investis d’une valeur symbolique forte qui endossent à la fois le rôle d’ornement et d’objet utilitaire. Ainsi, au cours de cette étude, on considérera le terme de parure au sens large, c’est-à-dire que l’on retiendra comme tels tous les objets dont le caractère ornemental tient une place prépondérante et se superpose à leur nature fonctionnelle. L’analyse portera alors à la fois sur les parures ornementales (bracelets, brassards, anneaux de jambes, torques, anneaux, perles, bagues, boucles d’oreilles et pendeloques), les parures vestimentaires (fibules, épingles, agrafes ou boucles de ceinture et boutons) et n’oubliera pas certaines catégories possiblement associables à de la parure, comme les parures pectorales et les “cônes launaciens”.

La conduite de quelques travaux préliminaires consacrés à la parure datée du Premier âge du Fer découverte Aquitaine avait fait émerger plusieurs constats. Tout d’abord, les connaissances sur les parures régionales du Premier âge du Fer sont tributaires de conceptions et de théories scientifiques vieilles de près de 40 ans. Depuis, de nouvelles découvertes de terrain et des modèles interprétatifs récents ont rendu obsolètes un bon nombre des idées que l’on rencontre dans les synthèses régionales portant sur ce mobilier. Ensuite, les synthèses régionales actuelles ne rendent pas compte de la vaste répartition de certains types de parures entre le sud-ouest de la France et le nord-ouest. Enfin, on observe une inadéquation entre cette vaste répartition et les outils dont on dispose puisque les travaux précédents étaient très régionalisés, empêchant alors leur utilisation pour le mobilier mis au jour en France et en Espagne : les anciennes typologies pouvant contraindre, ou du moins rendre peu aisée l’obtention d’une vision globale des évolutions du mobilier de parure découvert de chaque côté des Pyrénées.

Fort de ces premiers résultats, des pistes de réflexions nouvelles ont émergé, englobant tout à la fois des questions chronologiques, spatiales et culturelles : à partir de quand des parures identiques se rencontrent-elles sur des sites a prioriculturellement différents du sud-ouest de la France au nord-ouest de l’Espagne ? Quels phénomènes se cachent derrière cette répartition singulière ? Dans quelles proportions s’expriment-ils et quelle est leur emprise territoriale ? Quelle est leur place au sein des ambiances chrono-culturelles environnantes et déjà reconnues par ailleurs ?

Dans ces conditions, ce travail s’intéresse plus spécifiquement à la parure datée du Premier âge du Fer et ses marges, soit un intervalle de temps de quatre siècles compris entre 800 et 400 a.C. Ce choix s’explique par le constat d’une relative méconnaissance des objets de cette période comparativement à ceux qui circulaient au Second âge du Fer et qui leur sont directement postérieurs. Le cadre géographique étudié est centré sur une aire située entre la Charente et le Limousin au nord et les limites septentrionales de la Meseta espagnole au sud. Le choix de cet espace découle des résultats préliminaires qui avaient révélé la distribution de parures identiques de chaque côté des Pyrénées.

Dès lors, afin de cerner au mieux les évolutions des sociétés protohistoriques régionales, ce travail se focalisera sur plusieurs points.

Le premier est la constitution d’un catalogue complet des objets de parure, comprenant les données des fouilles anciennes et récentes. Il est apparu en effet que les parures de la zone d’étude avaient pu souffrir d’une relative négligence de la part des protohistoriens régionaux et qu’une partie d’entre elles étaient au mieux mal documentées, au pire tout simplement mises de côté. À ce titre, le dépouillement de la bibliographie d’origine et l’étude de 21 collections conservées dans les musées ou dépôts archéologiques de France et d’Espagne a permis d’inventorier 4843 parures, soit un corpus bien plus riche qu’il n’y paraissait de prime abord.

Le second concerne la chronologie. Les données récentes offrent l’opportunité de préciser les datations des parures, parfois très flottantes, disponibles jusqu’à présent. Leur réévaluation nécessite la création de nouvelles typologies. Cette étape de la recherche sollicite la datation des divers ensembles archéologiquement fiables dont sont issues les parures dans la mesure où les données de terrain récentes autorisent un découpage plus fin des types canoniques identifiés jusqu’alors.

Enfin le dernier point majeur de cette étude est d’engager des réflexions à plusieurs échelles. Macro-spatiale tout d’abord, par l’analyse de la répartition des types de parures qui rend compte de l’emprise territoriale des faciès et de leurs dynamiques évolutives. Micro-spatiale ensuite, par l’identification d’assemblages de parures dans les dépôts funéraires afin d’aborder la notion de “costume funéraire” et sa syntaxe.

Toutes ces pistes de réflexions vont permettre de rediscuter de la trame générale connue pour le Premier âge du Fer du quart sud-ouest de la France et du nord-ouest de l’Espagne.

ISBN html : 978-2-35613-401-1
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EAN html : 9782356134011
ISBN html : 978-2-35613-401-1
ISBN pdf : 978-2-35613-402-8
ISSN : 2741-1508
1058 p.
Code CLIL : 4117
licence CC by SA

Comment citer

Constantin, Thibaud, “Introduction”, in : Constantin, Thibaud, Cultures transpyrénéennes. Les parures du sud-ouest de la France et du nord-ouest de l’Espagne au Premier âge du Fer (VIIIe-Ve s. a.C.), Pessac, Ausonius Éditions, collection DAN@ 7, 2023, 13-14, [en ligne] https://una-editions.fr/cultures-pyreneennes-introduction [consulté le 18/02/23]
doi.org/10.46608/dana7.9782356134011.2
Illustration de couverture • Photos et montage : T. Constantin. Provenance des objets : fibule (Biganos, Les Gaillards - Tumulus T) ; agrafe de ceinture (Barbaste, Cablanc – sépulture) ; torque (Mios, Pujaut - Tumulus G, entre sép. 2 et 3) ; rouelle et anneaux (Pau, Cami Salié - sép. 1).
Pasture Payolle Pyrénées (©Pixabay).
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