Introduction1
Tournai, petite commune de 70 000 habitants située aujourd’hui en Belgique, non loin de Lille, joue à la fin du Moyen Âge un important rôle artistique, économique, religieux et politique, à la croisée des influences française, flamande et hainuyère (fig. 1). Entre le XIIIe et le XVIe s., diverses autorités civiles et ecclésiastiques se partagent les compétences judiciaires, chacune disposant d’une ou de plusieurs prisons pour l’exercer. Grâce à des sources nombreuses mais inégales ainsi qu’à certains témoins matériels encore en place, il est possible de dresser le tableau du paysage carcéral de Tournai au Moyen Âge et au début de l’époque moderne et d’essayer de comprendre les relations et jeux de pouvoir existant entre les différentes juridictions en présence.
La géographie carcérale tournaisienne
Sur l’ensemble de la période envisagée (v. 1300-1600), on dénombre 22 prisons à Tournai et dans ses abords immédiats. Toutes n’ont pas fonctionné en même temps, pour le compte des mêmes institutions et pour les mêmes types de prisonniers (tableau 1)2.
Dispersion et diversité des prisons communales
Instituée au milieu du XIIe s., la commune de Tournai dispose d’une assez grande indépendance judiciaire jusqu’à 1521 et l’annexion aux Pays-Bas de Charles Quint3. Elle utilise pas moins de dix espaces carcéraux différents jusqu’à la fin du XVIes. Il est probable que l’unique “prison de le ville” jusqu’à la fin du XIIIe s. soit celle du beffroi, signalée dès 1240-1241 et en usage jusqu’au XIXe s. (fig. 2). Le monument actuel a compté jusqu’à six niveaux de prisons, d’une superficie de 18 à 20 m², avec des noms tels que “Solequin” (1395-1399), “Moyen étage” (1392-1525), “Beffroit haut” (1395-1397), prison du “Célier” (1404), “Boursette” (1400-1525) réservée aux prisonniers pour dettes, “Quatre Vents” (1494-1525) ou encore “Gayolle” (1522-1526).
Dès la fin du XIIIe s., on assiste cependant à une inflation des espaces carcéraux communaux, principalement dans des portions désaffectées de la première enceinte communale, telles la porte des Maux (1276-1543) et la porte Ferrain (1280-1541). La prison de la porte Prime, un temps à l’usage exclusif du bailliage de Tournai-Tournaisis (1383), est revendiquée dès 1396 par la commune et en usage jusqu’à sa destruction en 1551. La porte de Marvis est la seule prison communale de la rive droite de l’Escaut ; à la différence des trois autres portes, démolies au milieu du XVIe s., elle reste en fonction de 1319 au XVIIIe s., date à laquelle elle est figurée sur le plan en relief de Tournai (fig. 3).
À ces prisons aménagées de manière opportune par la commune en fonction des bâtiments disponibles s’ajoutent des lieux de détention situés à proximité immédiate des lieux de plaids et du cœur du pouvoir communal, organisé en quatre chambres ou “Consaux”. La grande halle des Consaux, remontant au XIIIe s., abrite les “prisons de la halle [du Conseil]”, parfois distinguées entre “Pippenie” (1365-1566), “Tiens-le-Bien” (1365-1546), et “Chantine” (1399). De manière sporadique, des éléments de la seconde enceinte communale sont affectés à l’usage carcéral : une tour des Arcs des Chauffours, porte d’eau sur l’Escaut (1400), la tour de France (entre 1545-1569, partagée avec le bailli de Tournai-Tournaisis) et la tour Barbet (1552-1565), où sont placés les aliénés, hommes “hébétés d’entendement”. Enfin, on recense un dernier lieu utilisé comme espace carcéral, la prison de la Tannerie, érigée en 1551 et démolie en 1799.
La prison de l’officialité épiscopale, un outil de régulation des mœurs
La juridiction ecclésiastique4 de l’évêque de Tournai s’exerce depuis l’extrême fin du XIIe s. via son officialité. Elle est compétente sur un vaste et riche diocèse qui s’étend jusqu’à la mer du Nord et correspond à une grande partie du comté de Flandre. L’official juge des délits liés aux mœurs et aux sacrements ainsi que ceux commis par les clercs tonsurés dans l’étendue du diocèse5. La “prison le veske” est signalée dès 1271. Elle se trouve au cœur de la ville, dans le palais épiscopal, dans la partie inférieure du bâtiment de l’officialité, un édifice en pierre comprenant trois étages, éclairé de fenêtres à croisées et occupant toute une aile du palais épiscopal. Une tourelle d’escalier dessert les différents étages de prisons, à savoir des “basses prisons” (1448-1528) dans les caves, et au-dessus probablement huit cachots, aux noms évocateurs : “Cartr(i)elle” (1446-1476), “Oubliette” (1446-1511), “Cam(b)rette” (1446-1528), “Sale de Flandre” ou “aula Flandrie” (1447-1476), “Vi(n)gnette” ou “Vinquette” (1447-1530), “Bouverie” ou “Bougherie” (1447-1528), “Le Sale Bastarde” (1528) ainsi qu’un espace tardivement dévolu aux femmes (prisonia mulierum, 1530). Le bâtiment de l’officialité, dans sa forme du XVe s., a subsisté jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.
Les prisons du chapitre cathédral, ancienne justice bicéphale jalouse de ses prérogatives
Organisé au début du IXe s., le chapitre cathédral conserve au bas Moyen Âge, malgré le développement de la commune jurée, un îlot d’immunité au cœur de la ville, clairement délimité par des bornes. Il défend jalousement ses privilèges pour l’ensemble du personnel capitulaire et des églises de la ville. La juridiction est répartie entre le chanoine trésorier, qui a une juridiction territoriale sur cette immunité dans la ville, et le doyen du chapitre, qui étend sa compétence sur le personnel de la cathédrale6. Les deux dignitaires partagent pendant longtemps une minuscule prison capitulaire dénommée “Brunain”, signalée dès 1300. Elle occupe une position unique à Tournai, dans les parties hautes du bras sud du transept roman de la cathédrale Notre-Dame (fig. 4-8).
Tribulations et incurie des prisons du bailliage royal, de Maire à Tournai
À partir de la fin du XIIe s., la juridiction royale est de plus en plus prégnante à Tournai en la personne de différents baillis de Tournai-Tournaisis. Au XIVe s., la justice royale s’affermit, notamment à travers la pratique des cas royaux ou privilégiés et la création d’un notariat royal ; autant de dispositifs qui mettent sous pression les Consaux tournaisiens. La faiblesse et l’instabilité relatives du bailliage se marquent cependant par les multiples déménagements qu’il a connus et par le fait que les lieux de plaids étaient très souvent distincts des lieux d’emprisonnement. Du XIVe au XVIe s., le bailliage utilise les prisons de Maire, un hameau de Froyennes à l’extérieur de la banlieue de Tournai, dans un tour encore visible au début du XVIIe s. Cependant les baillis empruntent aussi une multitude de lieux de détention à la commune intra muros entre 1383 et 1600 : la porte Prime (1383 -début XVe s. ; 1521-1539), le beffroi (XVe-XVIe s.), la porte Ferrain (1521-1539), la porte des Maux (1529-1542), la tour de France (1542/1543-1576), la prison de la halle des Consaux (1570-1573) et la Tannerie (1563-1573). Les baillis sollicitent aussi l’officialité épiscopale, mais de manière exceptionnelle semble-t-il, en 1533/1534 et 1568, soit en raison du statut douteux des prisonniers (clercs ?), soit pour pallier le manque de prisons disponibles.
Malgré la volonté royale d’aménager ses propres prisons sur la Grand-Place, dans la “maison du roy” acquise en 1540, la construction des prisons ne se réalise, faute de moyens, qu’à partir de 1580 environ. Trois cachots en sont encore visibles au niveau inférieur des caves du n°64 de la Grand-Place.
Les prisons abbatiales, excentrées et spécialisées
Il faut citer pour mémoire l’existence de deux prisons abbatiales, pour lesquelles l’état de la documentation est très lacunaire. Ces deux abbayes – l’abbaye bénédictine de Saint-Martin et celle de l’ordre d’Arrouaise, Saint-Nicolas des Prés, situées aux marges de la ville – n’ont jamais constitué une immunité ecclésiastique dans le territoire urbain, mais elles disposaient de prisons signalées aux XIVe et XVe s. et spécifiquement destinées aux moines et aux convers. Celle de Saint-Martin était localisée, à tout le moins au XVIe s., dans les caves/cellier du monastère, aujourd’hui reconverti en hôtel de ville7 L’emprisonnement était alors considéré comme une mesure extrême, sanctionnant les crimes les plus graves. Le personnel ecclésiastique pouvait, le cas échéant, être attrait devant la juridiction épiscopale, voire bénéficier d’une grâce de la pénitencerie apostolique8.
Des prisons dans un espace lui-même clos et fortement régulé : l’abbé de Saint-Martin Gilles li Muisis était si fier de la discipline en vigueur dans son abbaye durant sa jeunesse (vers 1290) que celle-ci avait la réputation de passer pour une prison (pro carcere) auprès des autres monastères de l’ordre de Saint-Benoît9.
Les prisons du gouverneur au château, bras armé de la monarchie espagnole
Dès la prise de Tournai par Henri VIII en 1513, le monarque anglais instaure un gouvernement militaire permanent dans la cité et construit une citadelle qualifiée de “château” (1515-1518). Charles Quint (1521) poursuit dans cette logique de contrôle des institutions communales. Dans le périmètre du nouveau château apparaissent dès 1527 des “prisons du château”, utilisées pour les soldats et prisonniers de guerre, mais aussi pour les “hérétiques”, ou “rebelles”, jugés par des tribunaux d’exception mis en place à Tournai durant une grande partie du XVIe s. De 1527 à 1573, les deux niveaux intérieurs de la “Grosse tour”, une puissante tour d’artillerie encore visible aujourd’hui, font office de prison. Les autres cachots portent le nom évocateur de “trous” que l’on pourrait rapprocher de celui de “basse fosse”. Leur durée d’utilisation semble extrêmement limitée, correspondant à un afflux soudain de prisonniers : le “trou Myosche” ou “Michez” (1567-1574), la “prison de Bethléem” dans la tour du même nom (1572-1580), le “trou des Traîtres” (1572) et le “trou Dieu” (1572).
Une géographie carcérale opportuniste ?
Avec 22 prisons identifiées sur trois siècles d’utilisation, la géographie carcérale tournaisienne présente une grande diversité, liée au nombre d’acteurs judiciaires en présence. La multiplicité des lieux de détention atteint son paroxysme dans les années 1567-1572, au plus fort de la crise politique et religieuse que connaît Tournai à cette époque. Les prisons ont généralement été aménagées dans des locaux préexistants, qui n’étaient donc pas prévus pour cet usage, particulièrement dans des portes et tours de fortifications10, voire de la cathédrale ou du beffroi, ainsi que dans des caves. L’accessibilité des prisons et leur proximité avec les lieux des tribunaux ne semblent pas être des critères déterminants dans le choix des lieux de détention. Les tribulations des prisons du bailliage ainsi que de ses lieux de plaids, et la multiplicité des lieux à l’usage de la commune illustrent que, dans la pratique, il y a rarement voisinage et adéquation entre ces différents bâtiments. Certes, la cartographie des espaces carcéraux tournaisiens utilisés par la commune et le bailliage révèle une certaine centralité autour du beffroi et de la Grand-Place, sur la rive gauche de l’Escaut, mais sans aucun déterminisme (fig. 9-10). Au XVIe s., cette concentration des prisons dans le cœur économique et politique de la cité va de pair avec l’utilisation de la Grand-Place comme théâtre principal des exécutions publiques.
La dispersion et l’instabilité des prisons royales contraste avec la stabilité des prisons de l’officialité et, dans une certaine mesure, de celle de la prison capitulaire, toutes deux bien implantées dans leurs immunités respectives jusqu’à la fin de l’Ancien régime.
Prisons et Juridictions : voisinage, collaborations, concurrences
La question des fonctions et de l’utilisation des prisons tournaisiennes dépasse largement l’approche développée ici, qui se concentre sur les relations entre les différents protagonistes. L’enfermement de prisonniers est un des rouages de la mécanique judiciaire médiévale, qui dépend d’une multitude de facteurs : statut et ressources des prisonniers, type et lieu du délit, identité de l’autorité judiciaire usant de coutumes spécifiques et pratiquant, ou non, l’enfermement comme peine. L’étude du personnel affecté aux prisons (“touriers”, “cépiers”), à l’arrestation ou au transfert des prisonniers mériterait également des développements complémentaires.
Collaborations : emprunts de prison et transferts de prisonniers
La proximité relative des différentes prisons tournaisiennes, accentuée au XVIe s. par le transfert des prisons du bailliage vers le centre-ville, pose la question du voisinage de ces multiples lieux de détention. Avec 22 lieux différents identifiés sur toute la période étudiée, la ville de Tournai et sa proche banlieue semblent afficher une réelle diversité carcérale et surtout une grande variabilité au regard d’autres villes de plus grande importance pour lesquelles on dispose de tels recensements11. Ce paysage éclaté reflète l’enchevêtrement des juridictions tant civiles qu’ecclésiastiques, situation qui n’est en rien spécifique à Tournai. La plupart des villes médiévales connaissent une situation seigneuriale complexe, à laquelle s’ajoutent parfois des immunités ecclésiastiques, un siège épiscopal – l’évêque pouvant lui-même être seigneur de tout ou partie de la ville – et la présence d’un tribunal royal, voire d’un parlement régional. En fonction de l’évolution de la croissance urbaine et des juridictions en présence, les prisons se multiplient dans le courant du XIIIe s., chacune manifestant les prétentions des différents seigneurs locaux à occuper le sol urbain.
En général, les différentes institutions judiciaires collaborent ensemble, chacune prenant garde de ne pas empiéter sur le territoire de l’autre ou sur ses prérogatives, évitant de bousculer l’ordre établi et la tradition12. Cette collaboration se marque principalement par le partage ou l’emprunt des espaces carcéraux. En fonction des contraintes et des besoins (encombrement des prisons, travaux, manque de personnel), de l’état de santé ou du statut des prisonniers ne pouvant être délocalisés (clercs, bourgeois), tel ou tel tribunal peut solliciter l’enfermement d’un prévenu dans une prison située en dehors de sa juridiction ; les frais de détention sont alors à sa charge. Ces situations se répètent durant toute la période, mais avec des différences sensibles entre les différents interlocuteurs (tableau 1). Le bailli délaisse très fréquemment les bâtiments de Maire au profit de prisons de la commune (6 cas), mais aussi de l’évêque (1 cas). Il utilise une tour de la seconde enceinte qu’il partage avec la commune (tour de France) et n’aménage des locaux propres au centre-ville que dans les années 1580. L’évêque (2 cas) et la commune (1 cas), qui bénéficient d’infrastructures en nombre suffisant, recourent beaucoup moins à l’emprunt externe et peuvent déplacer les détenus, au besoin, d’une prison à l’autre13. Le gouverneur, le chapitre cathédral et les abbayes semblent conserver une certaine indépendance juridictionnelle (fig. 10).
Dans ce paysage carcéral, la situation particulière du bailliage royal témoigne tout à la fois de la jeunesse de l’institution, de la faiblesse des ressources domaniales, de l’insécurité et de l’état des bâtiments de Maire, mais aussi des résistances de la commune, qui refuse d’abandonner aux officiers du bailliage la moindre parcelle de juridiction permanente au sein de la ville. Aussi voit-on en 1416, en temps de guerre, – mais ces situations se répètent durant tout le XVe s. – le bailli mendier auprès des Consaux afin qu’ils lui prestent lieu et place convenable et prisons pour le Roy nostre dit seigneur, dedens ladite ville, pour tenir lesdis plais durant ledit empeschement jusques à leur bon plaisir.14 Malgré la mise sous tutelle de la ville par Henri VIII, puis par Charles Quint en 1521, le bailliage a bien du mal à posséder et entretenir des prisons permanentes avant la fin du XVIe s.
Les autres exemples de collaboration entre institutions judiciaires portent sur le transfert de prisonniers. Cette “mobilité carcérale”, qui ne repose cependant pas sur le bon vouloir des geôliers15, s’observe durant toute la période et intervient dans différents cas. L’arrestation abusive d’un prévenu par une institution se rendant compte de sa méprise après un examen plus approfondi du statut de la personne, du lieu ou du type de délit, est bien attestée16. Des problèmes de sécurité, des travaux, ou le manque de place dans la prison nécessitent d’autres transferts. Enfin, on pointe la distance importante entre le lieu du délit et la prison tournaisienne compétente, particulièrement dans le cas de l’officialité qui couvre tout le diocèse17.
Concurrences
Les litiges relatifs aux emprisonnements sont nombreux. Ils peuvent cependant donner une image trompeuse du fonctionnement normal des institutions, en laissant penser qu’elles seraient perpétuellement en conflit. Les exemples glanés au hasard des recherches permettent de faire trois constats. Tout d’abord, les conflits se rapportent la plupart du temps aux privilèges généraux de juridiction, aux lieux des arrestations ou au statut des prisonniers, et non aux prisons ou au droit à l’emprisonnement. Ce droit d’emprisonner n’est jamais contesté dès lors qu’il est associé à une autorité judiciaire reconnue, laquelle peut donc organiser, aménager ou mettre en réseau ses prisons comme elle le souhaite, ce à quoi aucune juridiction extérieure ne peut s’opposer. Cet aménagement n’est possible que dans l’emprise territoriale d’une juridiction donnée. Cette question du droit du sol est le talon d’Achille de la juridiction royale
Ensuite, la législation locale ne se préoccupe quasiment pas de réguler les relations de pouvoir autour de la question de l’emprisonnement, à la différence d’autres aspects en lien avec la justice d’une manière générale ou avec le fonctionnement interne des prisons (tarification, enregistrement des prisonniers, droits et devoirs des geôliers par exemple). Le cadre normatif ne fournit donc que peu d’éléments susceptibles de désamorcer les difficultés potentielles entre différents acteurs18; et de fait, la documentation pratique atteste de nombreuses situations de microtensions.
Enfin, si l’on analyse les différents cas de conflits entre protagonistes tournaisiens, on observe que tous sont concernés – à l’exception des abbayes – et de manière croisée, avec une chronologie des litiges qui va du milieu du XIIIe s. aux alentours de 1500, mais rarement au-delà, ce qui laisse penser à une certaine normalisation des relations au XVIe s. Pour autant, ceci ne signifie pas que la situation des prisons du bailliage s’améliore fondamentalement car l’indigence de l’institution provinciale la contraint à vivre au crochet de la commune jusqu’à la fin du XVIe s.
Les tensions portent essentiellement sur les arrestations abusives et les tentatives de restitution de prisonniers, particulièrement nombreuses du XIIIe au XVe s.19. En 1275 par exemple, la commune se plaint à l’évêque du cas d’un bourgeois détenu illégalement en l’officialité en le “prison le veske” : si vos prions que tout maintenant nos faites délivrer no borgois !20
Les difficultés concernent aussi les transferts de détenus par une juridiction donnée, contrainte de traverser un territoire étranger (évêque, chapitre), aux XIIIe-XVe s.21. On recense également des conflits internes au chapitre cathédral, entre le doyen et le trésorier, pour l’usage de la prison Brunain aux XIVe et XVe s. : le bailli du trésorier doit solliciter du chapitre l’obtention de la clé s’il souhaite en avoir l’usage ; cette subtilité est rappelée en 1403. Bailli de l’évêque et official peuvent également s’affronter au sujet de clercs arrêtés dans les seigneuries épiscopales22.
Les tensions sont vives entre la commune et le bailliage du fait de la présence permanente des officiers royaux dans la région depuis le XIVe s. Cette concurrence se marque, d’une part, dans le développement du tabellionnage royal (notariat), institué en 1367 à Tournai et qui a considérablement augmenté les emprisonnements pour dettes dans les geôles royales et, d’autre part, dans la mise à disposition de locaux à Tournai appartenant à la commune pour les officiers royaux, non sans résistance de la ville. Ce dernier cas est sans doute celui où la question des prisons apparaît la plus sensible et il mérite que l’on s’y attarde. La mise à disposition de locaux à Tournai pour les officiers royaux est en effet une des clauses de l’acte de création du bailliage royal de Tournai-Tournaisis en 1383, injonction particulièrement dégradante pour l’autonomie communale23. L’usage des prisons de la porte Prime à cette fin fait l’objet de litiges persistants: en 1396, la comptabilité communale relate un conflit entre le bailli et la commune au sujet de leur utilisation. L’année suivante, un garde de par le roy nostre sire des prisons de le porte Prime est signalé24. En 1399, le litige est toujours pendant au Parlement de Paris. À la même époque cependant, les officiers royaux empruntent les prisons du beffroi25. À son tour en 1403, c’est la commune qui s’oppose à l’emprisonnement de deux Tournaisiens dans les prisons du bailliage à Maire ; l’affaire est également portée devant le Parlement de Paris26. En 1408, le bailli demande à la commune la restitution de Jean Deleville, mais le suspect reste dans les prisons de la ville27.
Le XVe s. est émaillé de tentatives du bailliage pour obtenir un local définitif dans le centre de Tournai. En 1451, lorsque les franchises des bourgeois de Tournai sont publiées aux “bretèques”28, il est bien précisé :
que se aucuns bourgois de ladite ville encouroit en aucunes amendes vers le Roy, nostre sire, faites ou à faire, il ne poroit estre mis ne emprisonné en aultres prisons que ès prisons de ladite ville, èsquelz ilz seront gardés et emprisonnéz pour et ou nom du Roy, nostredit sire, et de là ne sera aucunement transportés29.
Ce privilège de bourgeoisie a-t-il été respecté par les officiers royaux ? En tous les cas, il accentue la pratique de l’“emprunt par défaut” des prisons communales par la justice du roi. Cette situation désavantageuse et inconfortable de la juridiction royale, loin des intentions de l’acte fondateur de 1383, est rappelée en 1456 lors du Traité de Saint-Porçain30.
Ce bref tour d’horizon des litiges concernant l’emprisonnement à Tournai révèle donc des conflits à différents niveaux de pouvoir. La question de l’emprisonnement reste secondaire par rapport à celles de la juridiction territoriale et personnelle des différents acteurs. Elle doit donc être relativisée et être remise dans le contexte d’un paysage juridique éclaté, diversifié et extrêmement concurrentiel. En tant que telle, la prison n’apparaît pas comme un critère fondamental de distinction sur le plan juridique : tous les hauts justiciers peuvent en disposer à leur guise, selon leurs moyens et leurs besoins, et peuvent engager un “cépier”. Les différends entre juridictions portent davantage sur l’acte d’arrestation du suspect et sur le lieu de cet exploit. Pour autant, on note des spécificités tournaisiennes. Au sein du chapitre cathédral à la justice bicéphale, le trésorier et le doyen se disputent l’usage d’une prison unique au XIVe s. Surtout on observe une vive opposition entre la commune et le bailliage aux XIVe et XVe s., où le développement de l’institution provinciale se cristallise à propos de l’usage de la prison communale.
Au XVIe s., la documentation reste silencieuse sur d’éventuels litiges. Ainsi les conflits concernant les prisons épiscopales semblent cesser pratiquement avec la prise de Tournai par Charles Quint. Faut-il comprendre que la juridiction de l’évêque est alors pleinement reconnue dans sa spécificité ? La prudence est de mise car ce constat va à contrecourant de l’historiographie qui insiste sur le fait que le tribunal de l’officialité est soumis à rude épreuve à partir de la fin du XVe s. La concurrence des tribunaux civils en plein développement cause en effet un regain de conflits de juridictions : à partir de 1521, toute entrave à la justice ecclésiastique est portée par les avocats de l’évêque devant le Conseil de Flandre à Gand ou le Grand Conseil de Malines31. À défaut d’archives épiscopales tournaisiennes – en grande partie disparues pour le XVIe s. –, il faudrait se tourner vers ces tribunaux supérieurs pour mesurer l’évolution des rapports de force impliquant l’officialité tournaisienne.
L’absence apparente de litiges au XVIe s. concerne également le bailliage royal. La caroline de 1522 met un coup d’arrêt aux ambitions autonomistes de la commune ; les institutions provinciales peuvent désormais beaucoup plus facilement siéger en ville et y implanter leurs prisons. Dans le même temps, l’indigence domaniale perpétue la pratique de l’emprunt des prisons et empêche la construction de prisons spécifiques avant la fin du siècle. Il faudrait ici aussi poursuivre l’enquête pour mesurer à sa juste valeur cette atonie apparente de la commune face à la juridiction provinciale.
Conclusion : les prisons tournaisiennes, un enjeu symbolique de pouvoir ?
Les prisons peuvent faire l’objet de multiples approches ; elles ont ici été traitées sous les angles croisés de leur matérialité, de leur localisation et des relations de pouvoirs entre les autorités en place.
L’inventaire des prisons tournaisiennes médiévales – avec les réserves qui s’imposent –, montre une multiplication des espaces carcéraux à partir de la fin du XIIIe s., qui culmine au milieu du XVIe s., et des conditions de détention assez disparates et improvisées, avec de fréquents déménagements. Le cas particulier du bailliage royal de Tournai-Tournaisis, dans sa quête désespérée de trouver un pied à terre en ville face aux velléités autonomistes de la commune, s’avère assez intéressant sous l’angle des jeux de pouvoirs. L’exemple tournaisien affiche clairement les limites de la centralisation avant 1521, mais également après cette date, car la faiblesse des moyens humains et matériels ne permet pas à la juridiction provinciale d’opérer une véritable mainmise sur les autorités locales. Les nouvelles prisons du château participent cependant de l’affirmation du pouvoir central, renforçant le contrôle des populations et le maintien de la paix sociale. Pour le reste, les prisons fonctionnent largement en réseau.
Dernière interrogation : au-delà de la perception et du vécu des “usagers” des prisons, les acteurs judiciaires inscrivent-ils ces espaces dans une symbolique du pouvoir ? La réponse est en grande partie négative : au bas Moyen Âge, l’affichage des prétentions seigneuriales ne passe pas prioritairement par les prisons, qui sont des lieux généralement aménagés tardivement dans des bâtiments préexistants sans qu’on n’y retrouve de marquage spécifique. Placées si possible au cœur de la ville, à proximité des lieux de plaids, les prisons demeurent dispersées sur toute la période et aucune géographie judiciaire fixe ne se dégage. Elles se différencient des autres bâtiments et lieux judiciaires aux enjeux de communication et d’exemplarité plus évidents, comme les salles de plaids, souvent ornées de portraits ou de scènes édifiantes et d’armoiries sur la façade, les bretèques, et bien sûr les lieux patibulaires où sont prononcées et surtout exécutées publiquement les peines.
Il n’en demeure pas moins que les prisons sont bel et bien le maillon d’un système répressif. Les rituels publics des arrestations et de l’entrée de prison, du transfert des prisonniers d’une geôle à l’autre ou vers le tribunal, et enfin de la sortie, en présence de sergents et d’officiers porteurs des insignes de leurs fonctions, constituent des moments particuliers dans la vie de la cité, où se manifeste le bon fonctionnement de la justice.
Les prisons ont également un rôle dans la réputation de la juridiction. Comme le signale un compte du bailliage de Tournai-Tournaisis de 1567-1568, la fuite des prisonniers […] tourneroit au grand regret et scandale de justice32. Pour une justice se voulant exemplaire, ces dysfonctionnements portent atteinte à l’honneur de la juridiction incapable de remplir son office. La rigueur avec laquelle sont traités les “cépiers” négligents est assez révélatrice de cette portée symbolique.
Le décor de la prison du chapitre cathédral est également significatif de cette importance symbolique : le local est situé dans un endroit de la cathédrale insolite et peu accessible, coincé entre la tour Brunain et la chapelle de la Madeleine, non loin de la porte Mantile, un des accès latéraux de l’édifice (fig. 4). Or, les sculptures romanes des piédroits de ce portail, remontant à la première moitié du XIIe s.33, illustrent une variation d’un des thèmes iconographiques les plus répandus au Moyen Âge, une psychomachie ou le combat des vices et des vertus, inspirée du poète latin Prudence (IVe s.). Le portail de Tournai ne représente pas le thème complet composé de sept couples, mais se limite à figurer Humilité/Orgueil et Chasteté/Luxure. Ce choix iconographique particulier pose question. La présence de la prison capitulaire à quelques mètres peut-elle apporter un élément de réponse ? Les éléments sculptés seraient-ils une sorte de mise en garde adressée aux fidèles entrant dans la cathédrale ? On connaît l’importance des portails d’églises comme portes d’entrée vers la maison de Dieu, frontières avec le siècle frappé du péché.34 Plus prosaïquement, l’existence d’un très large escalier dans la tour Brunain et la proximité de la prison avec le portail devaient faciliter la gestion de ce lieu de détention (fig. 5), éloignant aussi du culte d’éventuels “scandales” causés par les prisonniers. Au milieu du XVIIIe s., un chanoine de la cathédrale faisait remarquer que les condamnations de malfaiteurs étaient auparavant prononcées depuis la tribune, au-dessus de la porte du Capitole, l’autre accès latéral de la cathédrale vers le beffroi, de sorte que les deux portails jouaient un rôle en matière de juridiction capitulaire : Ainsi les criminels passent d’une porte à l’autre : ils sont prisonniers à celle de vers l’Escaut et sont punis à celle de vers le belfroid35. Jusqu’aux travaux de restauration du transept roman, cet axe de circulation nord-sud était très prisé par les Tournaisiens qui n’hésitaient pas à “couper” et à traverser l’édifice pour rejoindre le haut de la ville ; la situation médiévale devait être sensiblement identique, ce qui peut laisser penser à une mise en scène assez élaborée des lieux de justice, de détention et/ou d’exécution.
Enfin, le dernier indice de la symbolique associée aux prisons tournaisiennes est donné par un épisode de la répression politique et religieuse du milieu du XVIe s. Après les destructions causées par les iconoclastes dans les édifices religieux de la ville (août 1566), Tournai est en état d’insurrection. Les prisons débordent d’émeutiers et les geôliers ont bien du mal à empêcher les évasions, en particulier de la tour de France, utilisée principalement par la juridiction du bailliage. Les prisonniers – calvinistes essentiellement – sont alors transférés dans les prisons de l’évêque et du château jugées plus sûres. Pour effectuer les travaux dans la tour de France, les maîtres d’œuvre utilisent cyniquement le bois que les calvinistes prévoyaient d’employer pour la construction de leur temple36. Simple opportunité ou véritable symbolique anti-calviniste ? Sans doute un peu des deux.
Ces quelques exemples isolés nuancent donc le postulat de départ : si les prisons tournaisiennes ne sont pas premières dans la démonstration des pouvoirs locaux et si les peines carcérales sont encore largement réservées aux juridictions ecclésiastiques, la détention manifeste une domination d’autant plus mal vécue par la population qu’elle affecte prioritairement les couches les plus défavorisées ou, au XVIe s., les partisans de la Réforme. Le début de la période moderne voit aussi émerger d’autres formes de contraintes en matière criminelle, avec la mise en place d’un arsenal pénal plus répressif et l’usage fréquent de la torture lors des phases d’emprisonnement. Tout ceci concourt à faire du XVIe s. un temps fort de la répression judiciaire. En ce sens, le paysage carcéral de Tournai à la fin du Moyen Âge, où se concentre une multitude d’acteurs judiciaires qui souhaitent afficher clairement leurs prétentions seigneuriales, est l’aboutissement de plusieurs siècles de spécialisation institutionnelle et d’une certaine évolution des rapports de force locaux se traduisant par un contrôle croissant des populations urbaines, dominant les corps et les esprits.
Sources éditées •••
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Notes •••
- Je remercie chaleureusement Pierre Dehove, Laurent Deléhouzée, Monique Mailliard-Luypaert,
Jacques Pycke et Monique Vleeschouwers-Van Melkebeek pour toutes les informations communiquées. - Le catalogue des prisons de Tournai avec toutes les références utiles est l’objet de deux publications : Mariage 2021a et 2021b. Le deuxième article fait le point sur les sources existantes.
- Voir particulièrement Hocquet 1905 et Mariage coord. 2009, 483-494 (article de Ph. Guignet).
- À distinguer de la juridiction ratione territoriaede l’évêque de Tournai, exercée par un bailli général laïc, au titre de seigneur hautain de toute une série de localités du Tournaisis et au-delà (Wez, Helchin, Honnevain, Lezennes, Wazemmes, etc. Voir Mariage 2015, 274-275). Les prisons associées à ces justices locales sont assez mal connues mais elles ne semblent pas avoir été centralisées dans un bâtiment commun et unique à Tournai.
- Vleeschouwers-Van Melkebeek, 1985 et 2016, passim.
- Warichez 1934, 31.
- L’abbaye a été en grande partie reconstruite au XVIIIe s. et incendiée en 1940 ; le cachot abbatial, équipé de latrines, se trouvait dans une longue salle voutée à colonnes, espace encore conservé aujourd’hui et improprement appelé « crypte romane » de l’hôtel de ville (Mariage 2021b, inv. 8).
- Lusset 2011, 162. Le cas bien documenté et rocambolesque du chanoine récidiviste Simon Lourdiel, échappé à trois reprises des prisons de l’abbaye de Saint-Nicolas des Prés en 1451, est relaté par Lusset 2017, 309-310.
- D’Haenens 1959, 155-156, 174-176, 183-184 ; Heullant-Donat et al, dir. 2015, 27.
- Situation commune à d’autres villes françaises : plus de la moitié des geôles des XIIIe-XIVe s. sont implantées dans des tours de châteaux ou d’enceintes urbaines (Telliez 2011, 170).
- La ville de Tournai compte entre 25000 et 40000 habitants du XIIIe au XVIe s., banlieue comprise. La ville de Paris comptabilise, environ à la même période (1200-1500), 24 lieux de détention différents intra muroset hors prisons abbatiales. Toutes les prisons tournaisiennes n’ont pas fonctionné en même temps et les neuf prisons « actives » que compte Tournai à la fin du XVe s. (beffroi, Brunain, officialité épiscopale, porte des Maux, porte Ferrain, porte Prime, porte de Marvis, halle, Maire) sont à comparer aux 23 prisons partagées alors par les quelques 150000 habitants de Paris (voir l’article de Julie Claustre et Pierre Brochard dans le présent volume). Toutes proportions gardées, le paysage carcéral tournaisien semble donc plus éclaté mais surtout beaucoup plus variable qu’à Paris, le XVIe s. voyant émerger neuf nouveaux lieux de détention, dont cinq à l’usage du seul gouverneur (Grosse tour, tour de France, tour Barbet, Tannerie, trou Myosche, Bethléem, trou des Traîtres, trou Dieu, prisons du Roi).
- Ce constat découle des dépouillements effectués dans les archives comptables et judiciaires tournaisiennes. Exemples de bonne collaboration : en 1360, les prévôts de la ville acceptent qu’une femme coupable de vol dans une église de Tournai soit conduite dans la prison de la cathédrale (Pycke 2012, 392-393, n° 316), En 1438, les délégués de l’évêque Chevrot réclament une prison et l’aide du bras séculier ; les Consaux acceptent de prêter la prison de la porte des Maux (de la Grange 1893, 58).
- Quelques exemples de transferts internes au sein des prisons de la commune : en raison de maladie/blessure (1399 : porte Ferrain > Tiens-le-Bien > Pipenie), de travaux aux prisons (1494 : Boursette > Quatre Vents), pour méprise quant à la nature du délit (1451 : beffroi > porte des Maux) ou pour motif indéterminé (1396 : Porte des Maux > Pipenie) (Bruxelles, Archives générales du Royaume, CC 39938, fol. 15r ; Gachard 1846, 156 ; Hennebert 1858, 92, 190-191).
- Vandenbroeck, éd. 1861, 130.
- Un des motifs de la condamnation en 1571 de Vincent de Haymasure, cépier du beffroi, est d’avoir transporté un des détenus d’une prison à l’autre sans le congé du bailliage (Bruxelles, Archives générales du Royaume, CC 46001).
- En 1300, l’official de Tournai condamne un clerc du diocèse de Thérouanne, coupable du vol d’un ciboire dans le chœur de la cathédrale, à une prison perpétuelle [et au jeûne] au pain de douleur et à l’eau de tristesse ; le prisonnier est mis dans les prisons du chapitre (Voisin 1866, 290-291). En 1355, transfert d’un détenu suspecté de certains malefisses, des prisons de Maire vers celle du chapitre cathédral à Lamain (Tournai, Archives de la cathédrale, Cartulaire F, fol. 108). En 1377, saisie dans la juridiction épiscopale de Wez de Hannequin Regnault par le lieutenant du bailli de Vermandois, et mise en prison à Maire. Le bailli de l’évêque réclame et obtient la restitution du délinquant à la juridiction épiscopale (Pycke & Vleeschouwers 2010, 231, n° 669). En 1416, un criminel est arrêté et enfermé dans les prisons de la ville. Le bailli demande que le prisonnier lui soit délivré, attendu qu’il s’agit ici de crime de lèse-majesté. Cette demande est reconnue fondée et le prisonnier est remis entre les mains du bailli, mais l’évêque fait réclamer le prévenu comme clerc. Le bailli répond qu’avant de prendre une décision, il est de son devoir d’interroger l’accusé qui est finalement entendu par le bailli et quatre délégués des Consaux (Vandenbroeck 1861, 126). En 1422, le bailli a fait emprisonner Jacques de Vatennes, qui se prétend clerc, mais ne montre aucune trace de tonsure. Projet de translation aux prisons de l’évêque (Vandenbroeck 1861, 252-253). En 1470 et 1471, transferts de prêtres du beffroi vers la prison épiscopale (Vleeschouwers-Van Melkebeek 1995, vol. 2, n° 7319, 7770, 8910, 8945). En 1511, un prêtre emprisonné à Maire est amené à l’officialité ; la même année, le cépier du beffroi est rémunéré 23 lb pour la garde et nourriture de Pierre le Page, d’abord détenu prisonnier par les prévôts et jurés, puis, à la suite d’un arrêt du Parlement de Paris, restitué à l’officialité (Vleeschouwers-Van Melkebeek 2016, 18829 et 18834). En 1527, Jaspart Bernard, chargé de fausses doctrines de Martin Luther, est gardé durant 183 jours dans les prisons de la ville sur la caisse du bailliage, puis rendu à la cour spirituelle de Tournai (A.D. Nord, B2344). Un dernier exemple très tardif montre la pérennité de ces pratiques de transfert : en 1752, une mendiante, prise en flagrant délit de vol dans la cathédrale, est emprisonnée immédiatement es prisons de ladite trésorie. Quelques jours après son arrestation, on la retrouve cependant dans la tour de Marvis, prison communale. En 1736 et 1744, la même avait déjà été placée en la tour Marvis par les prévôts et jurés comme imbecille d’esprit. Dans le cadre de ce procès, la ville propose l’enfermement dans la tour des Innocens ; la cour féodale du trésorier capitulaire abonde dans ce sens et propose de livrer la prisonnière à la ville (Tournai, Archives de la cathédrale, Fonds de la Trésorerie, 11, fol. 294 v-295 v).
- Les comptes du scelleur de l’officialité tournaisienne (XVe-XVe s.) mentionnent les importants frais liés au transfert de prisonniers, souvent des clercs ou des personnes suspectées de crimes de mœurs, arrêtés par une justice locale parfois très éloignée de Tournai, puis amenés dans les prisons de l’officialité (Vleeschouwers-Van Melkebeek 1995 et 2016, passim).
- Sur cette question de la règlementation : Heullant-Donat, dir. et al. 2015. La coutume de la ville, homologuée en 1552, ne mentionne que le cas des prisonniers détenteurs du previlege de clericature, normalement rendus à la juridiction ecclésiastique (Verriest, éd. 1923, 1 et ss.). Les juridictions royales sont à peine mieux servies avec les commentaires généraux du jurisconsulte Jean Bouteiller, actif au sein du bailliage de Tournai-Tournaisis à la fin du XIVe s. et grand pourfendeur des libertés communales (Charondas le Caron, éd. 1603, 710-713). Les coutumes de bailliage royal, mises par écrit en 1550, précisent que la prise de corps puis la détention dedens ladicte ville de Tournay ou au pooir d’icelle [de] tous homicides et delincquans ayant commis les homicides et delictz es termes desdicts bailliaiges […] est du ressort des officiers du bailliage de Tournai-Tournaisis. Ceux-ci peuvent donc faire emprisonner es prisons de l’empereur audict Tournay […] sans que les prevostz et jurez de la ville de Tournay les puissent en empescher. La structure provinciale a donc intégré dans son ADN la possibilité d’empiéter sur la juridiction communale par prévention, ce que les coutumes de la ville de Tournai se gardent bien de relever (Van Dievoet, éd. 2006, 45). Les importantes ordonnances promulguées par Philippe II en juillet 1570 et qui entendent régler l’administration de la justice criminelle au sein du bailliage sont assez généralistes. Elles valent pour l’ensemble des Pays-Bas et sont édictées dans un contexte particulièrement troublé. On y fait notamment état du bon usage de la prison, de l’enregistrement obligatoire des prisonniers, de la nourriture des détenus, du contrôle des geôliers. Les visées centralisatrices des juridictions provinciales se traduisent dans la circonscription stricte des privilèges de cléricature et de l’immunité des lieux saints, ainsi que la généralisation du “flagrant délit” comme motif de prévention de la justice du souverain (Tournai, Archives de l’État, Conseil provincial de Tournai-Tournaisis, 10, fol. 14 r-34r).
- 1251 : litige entre l’évêque et la commune au sujet notamment de l’extraction illégale de prisonniers d’Orcq, juridiction épiscopale (Pycke 2012, n°102, 131). 1271 : le Parlement de Paris condamne la commune à ressaisir l’évêque d’un prisonnier qu’ils avaient violemment arraché de la prison épiscopale (A.N., X1A 1= Olim, I, fol. 187v). Avant 1385 : emprisonnement dans les geôles royales à Tournai de Henri Pourret, saisi à Barges, juridiction de l’évêque, pour port d’armes prohibé ; Henri est restitué à l’évêque (Pycke & Vleeschouwers 2010, 237, n°679). 1395 : l’évêque réclame la restitution par la ville de trois usuriers, détenus dans les prisons de la ville, sous prétexte que ces prisonniers étaient clercs ; les Consaux refusent et sont résolus à soutenir un procès contre l’official si nécessaire (Vandenbroeck 1861, 24). 1411 : emprisonnement dans les prisons du beffroi de Jean de la Quiesce, clerc du diocèse de Cambrai, à l’encontre de la juridiction de l’official de l’évêque (Pycke et Vleeschouwers 2010, 248, n° 713). En 1421, le bailli de Tournai réclame un détenu placé dans la porte des Maux pour le mener à Maire, ce que refuse la ville (Vandenbroeck 1861, 219-222).
- Verriest 1923, n°42, 166-167.
- En 1290, Philippe le Bel mande au bailli de Vermandois de suivre un arrêt du parlement consacrant le droit de l’évêque de mener ses prisonniers à travers la ville (Vleeschouwers-Van Melkebeek 1983, 185, n°5). En 1355, le roi de France autorise le chapitre cathédral à faire transporter des délinquants dans les limites du diocèse, depuis des lieux dépourvus de prison (le chapitre n’a pas toujours de prison dans ses petites juridictions), vers les lieux qui en sont pourvus, en passant, le cas échéant, par des territoires non soumis à leur juridiction (Pycke 2012, 380-382, n° 308). En 1391, le roi Charles VI termine un différend entre l’évêque et le magistrat de Tournai, consacrant le droit de l’évêque à transporter ses prisonniers de sa maison épiscopale à travers la ville (Vleeschouwers-Van Melkebeek 1983, 184, n° 4).
- 1414 : restitution d’un clerc emprisonné par le bailli de l’évêque à Wazemmes, vers la prison de l’officialité à Tournai (Vleeschouwers-Van Melkebeek 1983, 206, n° 150).
- 20 juin 1383 ; Item que nous aurions et notre dit bailly la porte Prime en laditte ville pour y faire ses prisons et si laditte porte ne suffisoit le dit bailly et ses sergents se pouroient aider des prisons de laditte ville pour y mettre et tenir nos dits prisonniers […] et y seroit ordonné de par nous un tourier (Tournai, Archives de l’État, Conseil provincial de Tournai-Tournaisis, 10, fol. 1-4 ; Pycke, éd. 2012, 458-462, n° 353).
- En 1396, le bailli de Tournai-Tournaisis s’estoit efforchiez d’entrer de fait en le porte Prime et d’avoir la possession des prisons d’icelle porte (Hennebert, éd. 1858, 88-89 et 115).
- En 1398, un sergent royal arrête un certain Piérart Rigaut en ville, sans licence de la commune, sans pouvoir prouver d’un cas de péril imminent, et le met dans la prison communale du beffroi ; la commune s’oppose ensuite à ce que bailli de Tournai-Tournaisis remette la main sur le détenu afin de le mener à Maire pour le juger ; il s’ensuit un procès en parlement (Vandenbroeck, éd. 1861, 325). En 1399, les prévôts et jurés s’adressent au lieutenant du bailli de Tournai-Tournaisis afin qu’ils peuissent user comme de leurs prisonniers (Hennebert, éd. 1855, 185).
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- Les bretèches/bretèques, dispositif commun à de nombreuses villes des anciens Pays-Bas, prenaient souvent la forme de balcons ou tribunes ; elles étaient destinées au “cri” et à la publication des ordonnances urbaines. Celles de Tournai se trouvaient sur la Grand-Place (Cauchies 2011).
- Gachard, éd. 1846, 163.
- À cette occasion, le roi de France règle certaines difficultés juridictionnelles existant entre le bailliage et le magistrat de Tournai. Une des plaintes des officiers du bailliage concerne le fait que ceux de la ville empeschent aussy à nostre dit bailly tenir son siege en la noeuve halle de devant le belfroy, quy pour ce faire y fut ediffié de nos deniers, et à mettre nos prisonniers en la porte Primee (sic), semblablement en autre prisons en nostre dite ville sinon par emprunt (acte du 3 février 1456 n. st., ratifié par le Parlement de Paris le 4 mars 1456 n. st. Tournai, Archives de l’État, Conseil provincial de Tournai-Tournaisis, 1, fol. 363 r°-374 r).
- Vleeschouwers-Van Melkebeek, éd. 2016, vol. 1, 63. Voir supra par rapport à l’ordonnance criminelle de 1570.
- A.D. Nord, B 13085, fol. 87r-89v.
- Delehouzée 2015 ; Duperroy & Desmet, dir. 2015.
- Leclercq-Marx & Pion 2015.
- Pycke 2017, 100.
- Hocquet 1905, 170.