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Le « béarnais » : un objet aux représentations complexes, polysémiques et contradictoires

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Introduction

En 2005, le département des Pyrénées-Atlantiques lançait le schéma Iniciativa, ou Iniciative d’aménagement linguistique en faveur de l’occitan pour la période 2005-2017. Si ce schéma fut conçu de façon ambitieuse (UBIC 2018 : 14), il n’avait pu aller tout à fait à son terme. Une des raisons de cet échec relatif a été principalement causée par un désaccord sur le nom donné à la langue. Pourtant, les rédacteurs du schéma, conscients des tensions sur le sujet ont forgé un glossonyme censé apaiser les conflits : « béarnais/gascon/occitan » (désormais, également, BGO). Complexe et sans doute critiquable, ce glossonyme devait satisfaire l’ensemble des acteurs du monde béarnais, en permettant à chacun de choisir le nom qu’il donnait à sa langue. La réalité en fut tout autre car le point d’achoppement le plus problématique était en réalité l’occitanité ou non de l’idiome (des idiomes) parlé(s) en Béarn, le béarnais et dans une moindre mesure, le gascon. Si la majorité des locuteurs, une grande partie des linguistes ainsi que l’État semblent s’accorder sur le caractère occitan des expressions linguistiques d’oc employées dans le Département des Pyrénées-Atlantiques, d’autres ne catégorisent pas le béarnais (et le gascon) de cette manière. Pour eux, la langue (puisqu’ici nous parlons de langue) est autonome vis-à-vis de l’occitan, langue dont l’existence est par ailleurs en grande partie rejetée. La complexité de la situation est donc évidente : un même glossonyme, « béarnais », est utilisé pour nommer des représentations linguistiques différentes, et totalement opposées. Ici, en schématisant, il servira à (dé)nommer une variété d’occitan (occitanistes), là, une langue distincte de ce dernier (béarnistes). Ajoutons à cela, une variété de représentations différentes à l’intérieur d’un même groupe (occitanistes ou béarnistes) et nous avons un terrain d’étude particulièrement chargé de contradictions.

Nous proposons donc dans cette étude, une présentation de ce terrain ainsi que des différents points de vue sur cette question. Nous commencerons par une présentation rapide de la situation sociolinguistique du département des Pyrénées-Atlantiques et du Béarn, territoire d’implantation historique du béarnais, à laquelle nous ajouterons un rapide focus historique sur la situation de l’occitan et du béarnais en particulier. Nous effectuerons ensuite un détour vers les notions opératoires en linguistique générale, et en particulier en sémiotique, de nomination, dénomination et désignation (2), qui nous semblent centrales dans un travail tel que le nôtre sur le lien entre le nom englobant d’une langue et le nom de ses variantes, bien que le terme de variante soit rejeté par une partie des locuteurs de l’idiome que nous prenons comme objet, le béarnais. Enfin, à partir d’enquêtes de terrain, nous tenterons de recenser les différentes acceptions et représentations du terme « béarnais » selon les locuteurs, les institutions mais aussi les linguistes (Tabouret-Keller 1997b : 9-11), puis nous nous essaierons à une courte synthèse récapitulative et analytique de l’ensemble du contexte (3).

Situation sociolinguistique

Le département des Pyrénées-Atlantiques et le Béarn

Carte des deux territoires linguistiques des Pyrénées-Atlantiques.
Fig. 1. Carte des deux territoires linguistiques des Pyrénées-Atlantiques1.

Peuplé d’environ 673 000 habitants2, le département des Pyrénées-Atlantiques, situé à l’extrême sud-ouest de la France métropolitaine, est partagé en deux territoires linguistiques, de tailles inégales : à l’ouest, à l’exception d’une petite frange au nord, le territoire linguistique basque français et, dans la partie est, et nord-ouest donc, le territoire linguistique d’oc. Le département possède 546 communes et 404 sont concernées par la (les) langue(s) d’oc (nommée(s) occitan, béarnais ou gascon). La partie oc du département est constituée de deux entités : « une entité aturienne à l’ouest, occupant la rive gauche de l’Adour, et une autre, nommée béarnais […] » (UBIC 2018 : 59). Lors de la dernière enquête sociolinguistique réalisée par le Conseil départemental en 20183, 14 % des habitants du département ont déclaré parler « sans difficulté » ou « suffisamment » la langue occitane (ou béarnaise ou gasconne), ce qui correspondrait à une hausse de deux points par rapport à la précédente enquête menée à l’échelle de la région (Aquitaine) en 20084.

La langue occitane : un objet complexe

Historiquement pratiquée dans la partie sud de la France (à l’exclusion de l’aire basque à l’extrême sud-ouest, de la poche franco-provençale à l’est et de la zone catalane, proche de l’occitan, à l’est de la chaîne pyrénéenne), la langue est également vivante dans le Val d’Aran en Catalogne espagnole (dénommée officiellement « occitan aranais »), dans la continuité de l’aire gasconne, mais aussi en Italie dans les vallées occitanes du Piémont, dans la continuité des aires des variantes vivaro-alpine et provençale. Il faut ajouter à ces aires de pratiques historiques les enclaves linguistiques représentées par la commune de Guardia Piemontese en Calabre, où l’occitan est parlé avec une dénomination particulière (le gardiol) associée à celle d’occitan. À cet étalement géographique a correspondu, historiquement et naturellement, un éclatement dialectal. L’occitan est marqué par le pluridialectalisme, un Mundartbund (Léonard & Gaillard-Corvaglia 2006). Toutes les langues naturelles ont leurs dialectes ou variétés géographiques mais, en Europe occidentale au moins, elles possèdent en général une variété standard qui coiffe ces variétés dialectales. L’occitan fait partie des langues minoritaires qui ne possèdent pas (encore ?) ce standard. Des tentatives de standardisation de la langue, à partir du dialecte central (le languedocien) et en prenant plus ou moins en compte les variations géographiques des autres dialectes ont bien été tentées mais n’ont pas forcément abouti auprès des locuteurs ne se reconnaissant pas dans une variante estimée être artificielle. Domergue Sumien (2006), afin de tenter de résoudre ce problème de la standardisation de cette langue « caractéris[ée] par la concurrence de multiples normes et contre-normes » (ibid. : 57), propose l’idée d’un « occitan larg » (reprenant Patrick Sauzet 1995), un occitan standard mais pluricentrique car déclinable dans les sept principaux dialectes composant la langue5.

La complexité de la langue occitane vient donc, entre autres, de son état dialectalisé, dans le sens où une variété commune ou aucun de ces dialectes ne paraît clairement dominer les autres. De par ce fait, cette complexité n’est pas uniquement linguistique mais vient aussi (et surtout ?) des représentations dont les dialectes sont investis au sein de la population. Ces représentations se cristallisent en grande partie, semble-t-il, dans la (dé)nomination de ces variétés linguistiques. La charge sémantique et les investissements psychologique et symbolique liés à ces appellations – ainsi que, notons-le déjà, un rejet du glossonyme même d’occitan chez certains – ajoutent à cette complexité une dimension nouvelle que nous proposons d’examiner ici à travers le béarnais, idiome6 pratiqué dans le département des Pyrénées-Atlantiques et au cœur d’une controverse quant à son statut, sa (dé)nomination et ce qu’il représente pour ses locuteurs et pour l’État français.

Le béarnais

Le glossonyme « béarnais » semble apparaître pour la première fois, dans une forme écrite (« lengadge bearnes »), en 1556 lors d’une requête des États du Béarn au Roi et à la Reine de Navarre (Lafitte 2005 : 36). Puis, c’est dans la traduction des Psaumes de David par Arnaud de Salette en 1583 que le terme est pour la première fois revendiqué dans une écriture littéraire (« rima bernesa », « lengoa Bernesa ») (ibid.). À partir de là, le glossonyme n’a jamais cessé d’être utilisé, par les locuteurs et par différents mouvements linguistiques et littéraires. Nous pouvons citer entre autres, pour ce qui est de l’époque contemporaine, le Dictionnaire du béarnais et du gascon de Simin Palay (1974 [1932-1934]) ou la Grammaire béarnaise d’André Hourcade (1984).

Nous l’avons déjà évoqué en introduction, l’idiome béarnais, auquel il faut ajouter le gascon, est au cœur d’un débat, parfois tendu, au moins verbalement, sur le sujet de son appartenance ou non à l’ensemble occitan, création politique et artificielle pour les uns (Bourdieu 1982 : 140), évidence linguistique, dialectologique et meilleur moyen de résister à la substitution pour les autres (Sumien 2006 : 33). Sans entrer dans les détails de ces divergences d’appréciation, on exposera en continuant certains des arguments employés par les deux courants. Il ne fait aucun doute, pour tous, que béarnais et gascon sont deux idiomes génétiquement (très) proches, bien que des représentations contradictoires et parfois surprenantes puissent être entendues à ce sujet (voir partie 3). Les deux idiomes participent de la même réalité (socio)linguistique, la distinction est géographique et dialectale, le béarnais étant alors la variante de gascon parlée dans le Béarn. Cela semble faire consensus :

« Nous estimons […] qu’il n’y a pas lieu d’ériger le béarnais en langue distincte du gascon » (CPG 2006 : 90)

« […] toutes les études linguistiques et proprement dialectologiques constatent que l’entité historique béarnaise ou Béarn ne coïncide pas avec un territoire linguistique délimité par des isoglosses discriminantes ou regroupées en un faisceau. En effet, ce territoire est traversé par des isoglosses ou recouvert par des aires linguistiques qui contribuent à l’inclure pleinement au sein du dialecte gascon » (UBIC 2018 : 59).

Le point d’achoppement, nous l’avons déjà évoqué, se trouve dans l’occitanité ou non du gascon (et donc du béarnais). Pour les occitanistes, cela ne fait aucun doute, bien que tous reconnaissent un particularisme pyrénéen au dialecte : « le gascon constitue, dans l’ensemble occitano-roman, une entité ethnique et linguistique tout à fait originale, au moins autant, sinon davantage, que le catalan » (Bec 1995 [1963] : 44). L’originalité du gascon viendrait donc d’un substrat aquitain, issu de la même famille que le basque, supplanté par le latin populaire, mais toujours sous-jacent. Pour les gasconnistes et béarnistes7 (dorénavant béarnistes, le sujet de cette étude se concentrant sur le béarnais), ce particularisme à substrat aquitain, en soi remarquable certes, mais qui n’est pas un cas unique en dialectologie8, est la preuve que le gascon est l’une des langues d’oc, au même titre que le provençal ou, voire, le catalan, par exemple. Les béarnistes soutiennent ainsi l’idée qu’il existe, non pas une langue d’oc, mais des langues d’oc, reprenant ici certains linguistes (par exemple, Blanchet 1992 : 43). La langue occitane n’existe donc pas. La partie méridionale de la France est, de ce fait, recouverte de plusieurs langues de même parenté génétique. Les représentations investies par le glossonyme entrent alors en opposition frontale avec celle des occitanistes et « […] doit être relié au fait que les Béarnais ont entretenu une autoconscience de groupe s’appuyant, pour la période contemporaine, sur le souvenir d’avoir été une communauté historique autonome jusqu’à la Révolution française » (UBIC 2018 : 60). La problématique du nom de la langue, ou de la variété, prend alors tout son sens dans un contexte comme celui du Béarn. Elle se complexifie car les représentations des uns se heurtent parfois violemment à celles des autres et posent la question, centrale en linguistique, de la notion même de langue. C’est pourquoi, avant de traiter des représentations du nom de l’idiome « béarnais », il nous semble avantageux de bien cerner les contours de la problématique sous-jacente de la dénomination des langues.

Désignation, nomination ou dénomination des langues ?

Propos liminaire

Il n’est pas question ici d’intervenir dans le débat vivace sur les notions de désignation, de nomination et de dénomination, ni même d’apporter une contribution quelconque à ce dernier sur la définition de ces termes. Notre but est plutôt celui d’entretenir la réflexion sur les problématiques de dénomination/nomination et de catégorisation dans notre discipline de prédilection, la sociolinguistique. Nous avions déjà pointé du doigt les manquements dénominatifs de cette dernière lorsqu’il s’agissait de nommer/dénommer les notions servant à catégoriser les langues issues de l’immigration (l’utilisation de la désignation est ici bien pratique)9 (Pascaud 2014 : 113-285). Constatant une grande variété de désignations/nominations/dénominations, le point de départ de notre réflexion était que, si les chercheurs, les sociolinguistes, utilisaient différents syntagmes pour désigner/nommer/dénommer ces catégories de langues, c’est qu’il devait y avoir des sens distincts à ces constructions, la synonymie parfaite n’existant pas (Depecker 2002 : 131-132 ; Baylon et Mignot 2005 : 106-109). Autrement dit, s’il y a codage différent pour désigner a priori le même objet, « cela suggère un supplément de sens » (Wald 1997 : 71). Après différents tests de substitution, il s’est avéré en réalité que non. L’utilisation différenciée de ces expressions est très souvent stylistique (éviter les répétitions) ou arbitraire (affirmation issue de différents témoignages oraux de chercheurs). De ce fatras ne pouvait naître une dénomination solide pouvant servir à la catégorisation, objectif final de notre travail. Nous l’avions regretté et avions proposé, maladroitement sans doute avec le recul, une typologie des catégories censée régler le problème10. Mais, cette typologie, bien qu’opérationnelle et claire, nous semble-t-il, était en réalité vouée à l’échec dès le départ. La catégorisation doit d’abord passer par l’étape de la dénomination, étape qui ne peut pas faire l’économie de l’usage et des représentations des locuteurs. La question était cependant posée.

Tentatives de définition

À la lumière de ce qui vient d’être exposé, il semble alors indispensable de faire un retour sur ces termes et processus qui font passer une expression de la désignation à la dénomination, en passant par l’étape de la nomination, processus qui enclenche, in fine, celui de la catégorisation. Ce n’est pas chose aisée que de se laisser tenter par la réalisation de définitions brèves et claires de ces trois termes car :

« dans la langue courante comme dans les emplois savants, il n’y a pas de discrimination nette entre désignation, appellation11 et dénomination12. Les dictionnaires de langue les donnent pour synonymes et ceux de spécialité attestent l’absence de définitions établies, ou de fréquentes interversions entre celles proposées » (Siblot 2001 : 5).

Néanmoins, il nous semble que, pour mieux appréhender les questions relatives aux noms des langues, ces considérations sont indispensables à réaliser au préalable. N’oublions pas, pour reprendre une nouvelle fois Andrée Tabouret-Keller, que les langues sont nommées/dénommées par trois entités : les locuteurs, les institutions et les linguistes (1997b : 9-11), celles-ci investissant les langues de représentations. Le Trésor de la Langue Française informatisé (désormais TLFi)13 définit ces trois termes de la façon suivante, auxquels nous avons pris la liberté de joindre les définitions de « lexicalisation » et de « catégorisation », à notre avis solidaire des trois premiers14 :

DésignationReprésentation d’une réalité par un signe linguistique.
NominationOpération consistant à donner un nouveau nom à une chose.
DénominationAction d’attribuer un nom.
LexicalisationProcessus par lequel une suite de morphèmes ou un syntagme devient une unité lexicale autonome.
CatégorisationOpération consistant simultanément à séparer les éléments linguistiques divers et à les ordonner selon des catégories grammaticales ou lexicales.
Tableau 1. Définitions (TLFi).

Les définitions présentées ici, insuffisantes, en particulier pour la dénomination, ont malgré tout l’avantage de représenter déjà ce qui semble être un processus logique. Nous pouvons tout à fait voir, à travers les cinq termes, un cheminement qui conduit une expression de sa désignation par le locuteur jusqu’à sa catégorisation dans l’espace mental de ce dernier. Ce processus mérite donc une attention, d’autant plus que l’opération qui, nous semble-t-il, est centrale dans celui-ci, la dénomination, est très succinctement définie dans le dictionnaire.

La désignation nous paraît bien être le point de départ. Confronté à un nouvel objet, le locuteur choisit une expression afin de désigner, de renvoyer à cette chose. La désignation ne présuppose pas que l’objet ait déjà été désigné, qu’il soit partie prenante d’un accord préalable dans la communauté linguistique pour être désigné ainsi. Nous faisons usage de désignations pour parler de tel ou tel objet dans notre discours. Elles sont individuelles et utilisent la plupart du temps des dénominations déjà existantes : « La désignation est une référence discursive individuelle à des éléments de notre expérience représentés par des dénominations qui n’a pas vocation à être lexicalisée » (Frath 2015 : 43)15.

Vient ensuite la nomination. Le TLFi la définit comme l’opération consistant à donner un nouveau nom à une chose. Ce n’est pas aussi simple (choisir un signe linguistique quelconque pour nommer un nouvel élément de notre expérience) et cela serait oublier l’adéquation entre le signe et l’objet du signe. Un processus est ici aussi en cours : « les nominations font usage de dénominations existantes […] pour tenter de cerner et construire en discours de nouveaux objets qui apparaissent dans notre expérience collective » (ibid. : 36). La nomination est ainsi « […] une tentative pour donner un nom à un nouvel objet de notre expérience collective. Elle se caractérise d’emblée par une visée dénominative qui se réalisera ou non selon les circonstances et la forme linguistique qui la constitue » (ibid. : 43-44). Le processus est clairement visible dans ces deux premières définitions, bien que ce dernier puisse tout à fait être interrompu à tout moment. La plupart des désignations n’ont aucune tendance à devenir plus que ce qu’elles ne sont, ce qui semble tout de même être moins prégnant dans les nominations qui, si le processus n’aboutit pas toujours, ont malgré tout cette disposition à devenir des dénominations par la suite.

La dénomination est plus complexe à définir. Elle est le résultat d’une opération collective de la part de la communauté linguistique. Elle marque la lexicalisation d’une nomination et vient d’un accord, d’une négociation par les locuteurs. La relation entre l’objet et le signe de l’objet est établie au préalable et se rapproche du principe de coopération conversationnelle (cooperative principle) de Grice (1975), se distinguant en cela de la désignation :

« Les deux types de relations ne se laissent cependant pas confondre, parce que la relation de dénomination exige, contrairement à la seule relation de désignation, que la relation X (expression linguistique) à x (choses) ait été instaurée au préalable. Il n’y a en effet relation de dénomination entre X et x que si et seulement s’il y a eu un acte de dénomination préalable, c’est-à-dire l’instauration d’un lien référentiel ou d’une fixation référentielle, qui peut être le résultat d’un acte de dénomination effectif ou seulement celui d’une habitude associative, entre l’élément x et l’expression linguistique X. Une telle exigence n’est nullement requise pour la relation de désignation. Si je ne puis appeler une chose par son nom que si la chose a été au préalable nommée ainsi, je puis désigner, référer à, renvoyer à une chose par une expression sans que cette chose ait été désignée auparavant ainsi » (Kleiber 2001 : 24).

La dénomination marque ainsi la fin du processus partant de la désignation et de la nomination. Elle en est le résultat et permet in fine de différencier les choses du monde. La dénomination de l’objet est lexicalisée et devient dorénavant un concept sous lequel tous les objets partageant des traits similaires tombent.

Pour terminer, Pierre Frath (2015 : 34-35) attire notre attention sur les deux types de dénominations que nous pouvons rencontrer : les dénominations logicistes et les dénominations conceptuelles. Les premières « représentent des objets réels au sein d’une ontologie réaliste et logiciste des choses du monde ». Le but est de parvenir à la connaissance, à la vérité. Les secondes « entend[ent] décrire le monde tel qu’il est, avec des ontologies conceptuelles, qui s’intéressent aux représentations que nous en avons » et permettent donc les « erreurs » liées à des représentations du monde différentes selon la croyance ou l’environnement psycho-sociologique. Cette dichotomie dans la conception des dénominations ouvre un champ de possible pertinent pour le sujet qui est le nôtre ici : les représentations plurielles du glossonyme « béarnais » en acceptant d’emblée que la dénomination de l’idiome puisse être investie de différentes manières mais tout de même rester dénominative, conceptuelle et donc, catégorielle.

Nomination ou dénomination des langues ?

La dénomination, qui a déjà fait l’objet de travaux en sociolinguistique mais, à notre connaissance sûrement très partielle, n’est que très peu utilisée dans les analyses sur les noms des langues. Nous pouvons citer néanmoins quelques articles, entre autres, où l’emploi du terme peut aider à sa compréhension :

  • Jean-Michel Eloy (1997) définit le terme et cherche à comprendre ce qu’il peut cerner lorsque l’on parle de langues et met en évidence le processus, décrit plus haut, au cœur de sa discussion.
  • Patrick Sériot (1997) se sert du terme pour illustrer le cas du macédonien et la controverse sur son nom et ses représentations.
  • Cécile Canut (2000) utilise le terme mais les termes de dénomination et de nomination semblent se confondre dans sa démonstration.
  • Émilie Aussant (2009), dans la présentation du numéro 31 de la revue Histoire, Épistémologie, Langage, consacré à la nomination des langues dans l’histoire et lié à un projet de recherche sur le même thème, utilise le terme dans une perspective historique bienvenue en mettant en avant un aspect fondamental de la dénomination : la différenciation des objets du monde les uns des autres, à travers la diversité linguistique.
  • Patrick Sériot (2019a), à nouveau, voit, à juste titre, « un malaise dans la dénomination » des langues « dans ce monde où les représentations prennent parfois le pas sur les référents » (p. 13).

En réalité, la plupart des études traitant du sujet des noms de langues préfèrent employer le terme de nomination (cf. le titre des deux volumes édités par Andrée Tabouret-Keller en 1997a : Le nom des langues. Les enjeux de la nomination). C’est a priori logique. La grande majorité des articles se consacre à cette étape : qui a donné le (les) nom(s) ?, à quel moment ?, dans quelles circonstances ?, pourquoi ?, qu’a-t-on voulu investir avec ce nom ?, etc. Les travaux se focalisent donc en premier lieu sur l’opération qui consiste à donner un nouveau nom à un objet de notre monde. Les questions de motivation du signe par rapport à l’objet sont ainsi au centre des réflexions. Nous pouvons alors regretter que la fixation de cet objet dans les représentations des locuteurs de ces langues, mais aussi depuis l’extérieur, ne soit que peu mise en avant, car c’est ici que la dénomination entre en jeu. Malgré tout, sans être nommé, et encore moins défini, le processus a été étudié à plusieurs reprises. Le cas de la langue ukrainienne, par exemple, est une belle illustration d’un processus de dénomination à travers le temps (Moser & Wakoulenko 2019).

La nomination des langues est ainsi vue comme une « prise de position [et] un mode d’intervention dans les affaires humaines » (Tabouret-Keller 1997a : 6) : « le nom est une prise de possession, un instrument de pouvoir et du pouvoir, le nom de la langue est un drapeau, un symbole non seulement politique mais de socialité, un instrument de manipulation, un “mille-feuille de significations”16 » (ibid. : 11). Nous acceptons ces différents constats sans réserve, à l’exception, pourtant, de l’omission, peut-être volontaire ici, de la prise en compte des représentations et du processus d’acceptation du glossonyme par la communauté locutrice. Nommer une langue, c’est certes « faire exister » et « instituer socialement » (Canut 2000 : 2-3) mais ce n’est pas tout à fait « catégoriser » (ibid. : 8). La dernière opération ne peut pas se réaliser sans dénomination. La nomination comme la dénomination permet certes de différencier les choses du monde, mais c’est la lexicalisation en œuvre dans la dénomination qui ouvre la voie à la catégorisation. L’affaire de la dénomination est celle de la communauté des locuteurs. Il faut que la nomination se lexicalise dans la langue, et non plus dans le discours, pour que la dénomination s’opère. La nomination est candidate à cette opération, elle fait exister et permet d’instituer mais son rôle s’arrête là. Nous voyons le nom des langues comme un processus, calqué sur celui de la dénomination présentée plus haut. Les « donneurs de nom » proposent et la communauté linguistique accepte ou non ce nom. Néanmoins, l’opération est complexe avec les langues. Les noms de langues fluctuent beaucoup (ibid. : 10), au moins autant que les représentations qui leur sont accolées, la délimitation des langues est alors elle aussi fluctuante (ibid.). La dénomination logiciste, présentée plus haut, est ainsi problématique car elle rejette l’idée que les objets du monde ne soient pas cernables, donc nommables puis catégorisables. La dénomination conceptuelle est alors utile pour le nom des langues car elle permet de décrire le monde avec nos représentations propres et de le catégoriser ainsi. Cependant, ce type de dénomination déstabilise « la valeur des connaissances » (Frath 2015 : 34). La maxime : « qu’importe le nom, pourvu qu’on ait le concept » (ibid.) ouvre certes la voie aux dénominations conceptuelles, « représentationnelles », mais ne permet pas de lever le flou pouvant se cacher derrière un glossonyme aux multiples représentations comme peut l’être « béarnais » en l’occurrence, pour lequel la problématique est quelque peu inverse, mais pas unique non plus. À titre de comparaison, nous pouvons renvoyer à l’étude de Patrick Sériot sur le glossonyme « moldave » (2019b).

Recensement des acceptions du terme béarnais

Nature et méthode de récolte des données

Les données qui serviront à illustrer notre propos sont de trois types, bien que nous ne nous interdisions pas de prendre appui secondairement sur d’autres documents (travaux universitaires ou sites internet associatifs, par exemple). Le premier document de référence que nous allons exploiter sera le rapport d’étude (Re)prendre l’initiative que nous avons co-rédigé avec François Pouthier et Alain Viaut (UBIC 2018). Commandée par le Conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques, cette étude évaluative et prospective de la politique linguistique du département mise en place durant la période 2005-2017 balaie l’ensemble des actions réalisées en faveur de la langue béarnaise/gasconne/occitane, ce glossonyme ayant été conçu justement afin de pouvoir accompagner une telle politique dans le département sans froisser les différents acteurs de la langue et leurs représentations de cette dernière. Les chapitres sur le nom de la langue et sur l’enseignement de cette dernière, qui ne peut s’afficher qu’« occitan » ou « occitan-langue d’oc » dans les pratiques officielles qui relèvent de ce cadre, seront particulièrement mis en avant. À ce rapport, s’ajoute une centaine d’entretiens réalisés en amont auprès de l’ensemble des acteurs de la langue : élus, techniciens départementaux, associatifs et enseignants. Les différentes conceptions sur lesquelles nous reviendrons par la suite de cette partie ont été entendues lors de ces entretiens17.

Le deuxième document, que nous avons déjà mentionné aussi, sera l’enquête sociolinguistique réalisée en parallèle du rapport d’étude précédemment présenté : Enquête sur la présence, les pratiques et la perception de la langue béarnaise/gasconne/occitane sur le territoire des Pyrénées-Atlantiques (Département des Pyrénées-Atlantiques, 2018). Plusieurs questions de l’enquête portent sur le nom de la langue et sur les représentations que les locuteurs ont des différents glossonymes auxquels elles peuvent être appliquées.

Enfin, une troisième source sera exploitée : une micro-enquête de terrain, réalisée avec Alain Viaut au printemps 2019, auprès de quatre acteurs et militants de la langue dans le Béarn et recouvrant autant que possible les sensibilités déjà rencontrées lors de la réalisation de l’étude (Re)prendre l’initiative. Les quatre acteurs interviewés sont membres d’institutions, d’organismes ou d’associations reconnus en Béarn : le Département des Pyrénées-Atlantiques (informateur que nous nommerons désormais B1), l’Ostau Bearnés (Maison de la culture béarnaise) (B2), l’Institut Biarnes e Gascoun (Institut Béarnais et Gascon) (B3) et Lo congrès permanent de la lengua occitana (Le congrès permanent de la langue occitane) (B4). Ces affiliations de nos informateurs confèrent à nos échanges une pertinence quant à leur connaissance sur le nom de l’idiome et ses représentations mais aussi à propos du débat, passé et actuel, lié à ces considérations. Cette enquête réalisée sous une forme mixte (entretien semi-directif, discussion libre et commentaires de schémas18) a été construite afin d’obtenir principalement trois types d’informations : conception globale de l’occitan, conception globale du béarnais et articulation entre les deux glossonymes/idiomes à l’aide de schémas, que nous avions préalablement élaborés ensemble, Alain Viaut et moi-même, représentant les différentes articulations possibles entre occitan, gascon et béarnais (une partie de ces schémas sera utilisée plus bas).

Les représentations occitanistes

Les occitanistes entendent généralement le béarnais comme une variante territoriale de l’occitan pratiquée dans le Béarn. Tous n’ont pas cette représentation très typologique, très linguistique, de leur idiome mais les enquêtes de terrain ainsi que l’enquête sociolinguistique du Département des Pyrénées-Atlantiques mettent cette acception assez nettement en évidence. Majoritaires, selon cette même enquête, ils sont conscients de pratiquer une variante locale d’un ensemble plus grand, tout en revendiquant leurs particularismes et leur attachement à cet idiome. Ainsi, 53 % des enquêtés nomment spontanément l’idiome qu’ils pratiquent « béarnais » et 73 % de ces derniers acceptent le glossonyme occitan sans problème. Cette acceptation a aussi été observée et évoquée par Cinthy Arenas (2003 : §§ 1-10) lors de son enquête auprès d’habitants du Béarn dans laquelle elle met en évidence la préférence pour le glossonyme « béarnais » (environ 3/4 de l’échantillon, si l’on prend en compte des variantes de celui-ci19) tout en ne l’opposant pas à celui d’occitan dans la perception que s’en font les Béarnais eux-mêmes. Mais les représentations liées à la langue sont toujours très complexes et, chez les occitanistes, nous avons pu rencontrer malgré tout quatre acceptions différentes du glossonyme « béarnais ». Ces quatre conceptions, parfois fines, ne sont pas incompatibles, à l’exception peut-être de la deuxième qui questionne l’existence même du béarnais, puisque toutes quatre considèrent la langue occitane et son caractère englobant pour le béarnais. Néanmoins, des distinctions peuvent se faire ressentir. Par exemple, l’opposition langue/dialecte (ou variété/variante) semble opératoire dans le discours de nos informateurs, tous plus ou moins spécialistes de la langue ou informés des approches proprement linguistiques, et cette complexité dans la catégorisation de l’idiome ajoute une nouvelle complexité lorsque l’on s’intéresse aux représentations investies par le nom même de « béarnais ».

Conception n° 1 : béarnais = variété locale de gascon,
lui-même dialecte occitan

La première conception est une vision que nous pourrions qualifier de typologique. Elle est celle que la plupart des linguistes proposent pour décrire le béarnais dans l’ensemble occitan. Le béarnais est ainsi entendu comme étant une variante locale de gascon, lui-même variante territoriale et partie prenante de l’ensemble composant la langue occitane :

(1) « La langue occitane est une, même s’il y a des spécificités locales très forte » (B4, entretien mené le 26/04/2019).

Eu égard à cette conception, il serait possible de modéliser le rapport entre l’occitan et le béarnais ainsi (les lignes pleines représentant les langues, les pointillés les dialectes ou les variantes) :

Modélisation de la conception n° 1 (occitanistes).
Fig. 2. Modélisation de la conception n° 1 (occitanistes).

Conception n° 2 : béarnais = dialecte de la langue gasconne, compris dans l’ensemble occitan ?

Très certainement la perception la plus minoritaire dans le Béarn, cette conception du béarnais est le plus souvent celle des non-Béarnais de naissance (sans pour autant être totalement représentative de cette catégorie d’habitants). Elle se rapproche de la conception n° 1 car elle classe le béarnais comme un dialecte du gascon (tout en questionnant, malgré tout, l’existence même du béarnais). Néanmoins, le gascon est ici catégorisé comme une langue, au même titre que le languedocien, par exemple, ces deux entités langues appartenant à la langue occitane. L’extrait présenté ici est, de plus, très critique envers les défenseurs du béarnais, entendu comme langue :

(2) « Il y a une distinction réelle entre le languedocien et le gascon [qui sont] deux langues dans une même entité […]. Mais dans le monde occitan, seulement une langue, l’occitan. Quant à la langue béarnaise, elle n’existe pas. Au mieux, un dialecte. 95 % des habitants ne se posent pas ces questions et la majorité des 5 % restant ne comprennent pas le pourquoi et le comment » (A1, entretien mené le 05/07/2017).

La modélisation de cette perception est différente de la conception n° 1, le gascon n’étant plus un dialecte mais une langue et l’existence du béarnais étant posée. De plus, nous avons choisi de représenter le languedocien comme une langue à côté du gascon comme l’informateur nous l’a décrit. Les autres entités de l’ensemble occitan ne sont pas représentées par manque d’informations, l’informateur ne les ayant pas mentionnées :

Modélisation de la conception n° 2 (occitanistes).
Fig. 3. Modélisation de la conception n° 2 (occitanistes)..

Conception n° 3 : béarnais = langue dans la langue gasconne, comprise dans l’ensemble occitan

Une troisième conception a pu être décelée lors de nos enquêtes et observations. Similaire aux deux premières, elle se distingue dans la catégorisation des trois idiomes concernés par notre terrain. En effet, une grande partie, peut-être même majoritaire, de nos informateurs considère le béarnais comme une langue comprise dans un ensemble plus grand, le gascon, catégorisé lui aussi comme une langue. Enfin, ces deux langues appartiennent à un troisième ensemble, l’occitan, catégorisé lui aussi comme étant une langue :

(3) « Il n’y a pas de honte à l’appeler occitan même si ici on dit que c’est du béarnais, parce que le béarnais est le nom que l’on donne à la langue en Béarn mais c’est du gascon et le gascon est occitan » (A2, entretien mené le 27/10/2017).

(4) « La langue que nous défendons est le béarnais, c’est-à-dire la langue d’Oc ou l’occitan ou la langue occitane du Béarn » (Règlement Intérieur de l’Ostau Bearnés, I, 1°, récupéré lors de l’entretien de B2 le 18/04/2019).

La modélisation de cette perception pourrait ainsi être la suivante :

Modélisation de la conception n° 3 (occitanistes).
Fig. 4. Modélisation de la conception n° 3 (occitanistes).

Conception n° 4 : béarnais = occitan

Une dernière conception, chez les occitanistes, investit le terme béarnais comme étant un synonyme d’occitan dans le contexte béarnais. Celle-ci, finalement très proche en termes de représentations par rapport à la précédente, mérite tout de même que l’on s’y attarde car elle met les deux dénominations de « béarnais » et d’« occitan » au même niveau hiérarchique, ce qui n’était pas vraiment le cas ci-dessus. Cette synonymie entre les deux glossonymes sous-entend sans aucune contestation que le béarnais fait partie de l’ensemble occitan, les personnes utilisant cette acception du terme ayant conscience que leur idiome fait partie d’un ensemble linguistique plus grand mais préfèrant utiliser le terme béarnais pour parler de ce tout. Cette conception ne s’embarrasse pas de « dialectologie » : « béarnais » et « occitan » sont synonymes, dans le contexte béarnais. La prise en compte du contexte est importante ici de la part des personnes qui investissent l’idiome ainsi. Ils ont tout à fait conscience que cette représentation n’est plus correcte s’ils sortent du territoire béarnais. En réalité, cette dénomination « béarnais » subsume celle d’occitan dans les représentations. Cette perception est encouragée par le département des Pyrénées-Atlantiques, dans une certaine volonté d’apaisement entre les différents acteurs de l’idiome sur le territoire. L’appellation « béarnais/gascon/occitan » (« BGO ») met les trois glossonymes au même niveau hiérarchique et permet ainsi à chacun d’investir l’idiome comme il le souhaite :

(5) « Notre département, fort des différentes entités culturelles qui le composent, mène une politique linguistique déterminée en faveur de ses deux langues régionales : le basque et le béarnais/gascon/occitan » (site internet du Département des Pyrénées-Atlantiques20).

(6) « Chacun l’appelle comme il veut, la langue » (B1, entretien mené le 18/04/2019).

Nous pourrions donc la modéliser comme suit :

Modélisation de la conception n° 4 (occitanistes).
Fig. 5. Modélisation de la conception n° 4 (occitanistes).

Le béarnais, langue autonome

Nous avons observé une autre conception, que nous avons déjà évoquée plus haut (p. 79), du terme « béarnais » lors de nos enquêtes. Cette dernière, du fait de nos informateurs qui se catégorisent comme « béarnistes » en opposition avec « occitanistes » (la plupart des occitanistes béarnais se qualifient aussi de béarnistes !21), est issue de nos rencontres avec les membres de l’Institut Béarnais et Gascon (ou avec des sympathisants n’étant pas forcément membres de l’association), que ce soit lors de l’évaluation d’« Iniciativa » ou lors de notre micro-enquête de terrain. Représentant un cas limite avec la problématique de l’ouvrage présent, elle mérite néanmoins une attention particulière du fait de son impact sur les représentations précédemment exposées, se servant du même glossonyme mais l’investissant d’une tout autre représentation. Pas toujours très claire dans la bouche même de ses défenseurs (ainsi que dans leurs écrits sur leurs différents sites internet22) en ayant quelques variantes dont nous exposerons les modélisations ci-dessous, cette conception s’oppose frontalement à celle des occitanistes en promouvant le béarnais et le gascon (pris comme un même ensemble) en tant que langue distincte de l’occitan. Soutenus par des travaux universitaires (Lafitte 2005 ; Blanchet 2012), les représentants du courant béarniste et gascon se placent d’entrée de jeu dans une autre représentation linguistique, individuant le béarnais (avec le gascon, qui sont deux entités formant une seule et même langue) et le détachant de la langue occitane des occitanistes. L’occitan, comme langue qui coifferait l’ensemble des variétés linguistiques d’oc est donc ici rejeté :

(7) « À proprement parler, l’Occitanie est le Languedoc, et l’occitan le languedocien. […] Non, le béarnais et le gascon ne forment pas un dialecte occitan » (site internet de l’Institut Béarnais et Gascon)23.

Le béarnais est ainsi investi du statut de langue, et il entretient une relation particulière avec le gascon auquel il est en même temps lié. L’occitan est nommé languedocien, dialecte central de la langue occitane pour la plupart des linguistes occitanistes. Selon nos informateurs, c’est de cette position centrale de la variante (langue pour ces derniers) languedocienne que viendrait la construction et l’unité fictives de la langue occitane. Ces langues donc – béarnais, gascon, languedocien, provençal, etc. – forment un ensemble nommé langues d’oc (au pluriel), à l’instar de la catégorisation, abusive pour certains mais pertinente pour d’autres (Sibille 2010 ; Calvet 2016) de « langues d’oïl » pour la partie septentrionale de la France, dont Bernard Cerquiglini se fit l’écho dans son Rapport remis au Ministre de l’Éducation Nationale, de la Recherche et de la Technologie et à la Ministre de la Culture et de la Communication en avril 1999 lors des débats liés au projet de ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires du Conseil de l’Europe (1992).

Modélisation 
de la conception n° 5.1 
(béarnistes)
Fig. 6. Modélisation de la conception n° 5.1 (béarnistes)24.

Selon d’autres témoignages recueillis, très proches, l’ensemble coiffant ces langues est plutôt directement celui des langues romanes ou latines, la catégorisation « oc », posant problème en termes de représentations par sa proximité avec « occitan » (modélisation n° 5.2.) :

(8) « L’occitan n’existe pas » (B3, entretien mené le 18 avril 2019).

Modélisation de la conception n° 5.2 (béarnistes).
Fig. 7. Modélisation de la conception n° 5.2 (béarnistes).

Enfin, une dernière conception, double en réalité, extrapolée à partir des propos de nos informateurs béarnistes, vient de la difficile catégorisation du béarnais et du gascon. De toute évidence, il y a rejet total de l’idée de subordination linguistique dans les représentations. Néanmoins, la relation entre le béarnais et le gascon n’est pas toujours claire : deux entités pour une même langue ou variante géographique (béarnais) à l’intérieur de la langue (gascon) (modélisation 5.3. [langues d’oc] et 5.4. [langues romanes]) ?

Modélisation de la conception n° 5.3 (béarnistes).
Fig. 8. Modélisation de la conception n° 5.3 (béarnistes).
Modélisation de la conception n° 5.4 (béarnistes).
Fig. 9. Modélisation de la conception n° 5.4 (béarnistes).

Cette difficulté dans la catégorisation, et donc dans la dénomination, a notamment été reprise sur la page d’accueil du Facebook de l’Institut Béarnais et Gascon25, où les termes de langue et de variante ne semblent pas contradictoires :

Copie d’écran de la page d’accueil Facebook de l’Institut Béarnais et Gascon (copie réalisée le 29/04/2019).
Fig. 10. Copie d’écran de la page d’accueil Facebook de l’Institut Béarnais
et Gascon (copie réalisée le 29/04/2019).

Peut-on parler de dénomination pour le béarnais ?

Patrick Sériot évoquait un certain « malaise dans la dénomination » regrettant « ce monde où les représentations prennent parfois le pas sur les référents » (2019a : 13). La réflexion colle parfaitement au cas que nous avons essayé de présenter ici. Le béarnais est investi d’une pluralité de représentations, pour certaines totalement contradictoires entre elles. Pourtant simple en ce qui concerne l’appartenance à l’ensemble occitan, l’affaire est beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît chez les occitanistes. Les représentations de l’idiome et sa catégorisation ne sont pas limpides : langue, dialecte, variante ? Si elles sont malgré tout proches les unes des autres, elles ne font pas tout à fait référence à un même objet. La question de la valeur dénominative du terme « béarnais »  se pose alors. À l’opposé, de prime abord, cela semble plus rationnel, en ce qui concerne la dénomination, chez les béarnistes. Mais, une fois de plus, les discours peuvent être confus et des dissonances se faire entendre, celles-ci étant peut-être le fait d’une méconnaissance des approches proprement linguistiques. En conséquence, ce manque de clarté et ces dissonances (involontaires ?) participent à la confusion, et la dénomination du terme est ici aussi problématique puisque différente d’un informateur à l’autre.

Si nous essayons de synthétiser tout cela, nous pouvons dire que, pour une partie de la population (représenté ici par l’Institut Béarnais et Gascon), le béarnais est investi sociolinguistiquement comme une langue à part entière, « un autre tout » pour reprendre une fois de plus Patrick Sériot (2019a : 14). Le sociolinguiste ne trouvera rien à redire à cet état de fait. Néanmoins, une prise de recul semble nécessaire dans toute analyse sur les représentations. Et, de toute évidence, le gascon, indissociable du béarnais pour cette même population, fait partie de l’ensemble occitan pour d’autres locuteurs (les occitanistes) ainsi que pour l’État, en particulier dans l’Éducation nationale. Même si ces conditions ne sont pas suffisantes pour rejeter en bloc la catégorisation de l’IBG, cette dernière ouvre tout de même la réflexion sur les critères non linguistiques pouvant entrer en jeu dans la dénomination. Par conséquent, une partie de la population, minoritaire au regard des enquêtes statistiques et de nos enquêtes de terrain, est-elle suffisante pour catégoriser un idiome comme une langue ? Le rapprochement réalisé avec le catalan et son autonomie par rapport à l’occitan et au castillan (Blanchet 2012 : 22) peut ainsi sembler abusif. La démonstration est convaincante mais le béarnais n’est pas dans une situation sociolinguistique similaire, ne disposant ni d’un socle de locuteurs suffisant, ni d’une entité politico-administrative assez puissante pour le porter (comme cela aurait peut-être pu être le cas par le passé). Ainsi, la question de la dénomination, ou non, du béarnais renvoie finalement à la problématique de la catégorisation de l’idiome : langue (individuation et autonomisation), dialecte (subordination) ou variante (co-existence) ? La dénomination conceptuelle proposée par Pierre Frath (2015 : 34-35) pourrait régler le problème mais semble, du fait de la difficulté à catégoriser les idiomes (linguistiquement, sociolinguistiquement, politiquement…), incompatible avec la question du nom des langues/idiomes. Le sujet sera laissé en suspens ici. Cependant, à l’image de Cinthy Arenas, nous nous permettrons de nous reporter à une petite réflexion à propos des locuteurs de l’idiome, souvent coincés malgré eux au milieu des différents camps qui s’opposent ici car : « ce sont eux qui (…) feront vivre ou disparaître [la langue] » (2003 : 79).

Conclusion

Parler de dialectes ou de variantes pour l’occitan est toujours complexe. Pour les occitanistes, la langue est pluricentrique. Elle est composée de plusieurs entités, autonomes, qui une fois regroupées composent l’occitan. Cette conception de la langue cristallise des oppositions qui préfèrent entendre ces variétés comme des langues autonomes, à l’instar de ce que nous venons de développer à propos du béarnais. Cette problématique, qui n’est pas propre au Béarn – le cas de la langue moldave illustre aussi cela (dialecte du roumain ?, langue autonome ?) (Sériot 2019b) – pose la question de la valeur dénominative du terme même de « béarnais », instable et lié à des représentations, parfois totalement contradictoires. Si les sémioticiens s’accordent pour dire qu’une dénomination est le fruit d’un processus, dans le cas béarnais, celui-ci, au pire, n’a pas abouti, au mieux est encore en phase de stabilisation. En même temps, il soulève la question de la catégorisation, concomitant à celui de la dénomination. Ce problème aussi n’est pas réglé.


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Notes

  1. La carte a été conçue pour l’enquête sociolinguistique de 2018 commandée par le département des Pyrénées-Atlantiques (cf. infra, note 4). C’est pourquoi elle mentionne également les communes de la Communauté d’Agglomération Pays Basque concernées par l’enquête car en partie occitanophones.
  2. Source : INSEE.
  3. Enquête sur la présence, les pratiques et la perception de la langue béarnaise/gasconne/occitane sur le territoire des Pyrénées-Atlantiques, Département des Pyrénées-Atlantiques, 2018.
  4.    Étude sociolinguistique « présence, pratiques et perceptions de la langue occitane », Région Aquitaine, 2008.
  5. Gascon, limousin, auvergnat, vivaro-alpin, provençal général, niçois et languedocien.
  6. Nous préférons utiliser, à partir de maintenant, le terme d’idiome (comme a pu le faire, entre autres, Natalia Bichurina (2013) pour l’albanais d’Ukraine) pour désigner le béarnais, le terme étant neutre et ne supposant pas de rapport de hiérarchisation (langue, dialecte, variante) entre les formes linguistiques.
  7. Nous utilisons ici le terme « béarnistes » par facilité. Il est évident, les témoignages le prouvent aisément, que l’on peut se considérer Occitan et Béarnais. Les deux qualificatifs ne sont pas forcément contradictoires.
  8. « La participation, par ailleurs, des usages linguistiques de la zone d’oc du département des Pyrénées-Atlantiques à l’ensemble occitan est a priori de même nature que celle du reste du domaine gascon et, au-delà d’ailleurs, des autres variantes dialectales » (UBIC 2018 : 59).
  9. Nous sommes ici face à des noms communs (« langue d’immigration » ou « langues des migrants » par exemple). Les dénominations d’idiomes (« le français », « l’occitan », « le béarnais ») sont des « noms propres » (voir Tabouret-Keller 1997 : 11-15 et Eloy 1997 : 82-83). Pour faire (très) simple, pour que les noms communs deviennent des « noms propres » candidats à la nomination puis à la dénomination, il faut que ces derniers se lexicalisent et entrent dans le répertoire commun des locuteurs en instaurant un lien référentiel ou une fixation référentielle entre l’objet x et l’expression linguistique X (Kleiber 2001 : 24) (cf. la partie « Tentatives de définitions »).
  10. La typologie que nous avions proposée dans notre thèse est présentée et décrite dans le chapitre 5 (« Essai de taxinomie des notions désignant les langues parlées par les migrants ») de la partie II de cette dernière (Pascaud 2014 : 259-291).
  11. Nous ne convoquerons pas « appellation » dans notre réflexion présentée ici car « le terme n’est pas répertorié dans le vocabulaire métalinguistique » (Siblot 2001 : 6).
  12. Italiques dans le texte.
  13. http://atilf.atilf.fr/tlf.htm (consulté le 25/02/2020).
  14. Les définitions données ici ne reprennent que les usages des termes en linguistique, si une section y est consacrée. Les autres parties des définitions traitant du sens général, s’il existe, des termes ne sont pas citées. Si la définition ne comporte pas de section proprement linguistique, le sens général est repris.
  15. En italiques dans le texte.
  16. Andrée Tabouret-Keller reprend ici une expression d’Yves Le Berre et Jean Le Dû dans un article du même ouvrage.
  17. Les informateurs issus des enquêtes réalisées durant l’évaluation du schéma « Iniciativa » et que nous prendrons comme témoin seront référencés de la manière suivante : A1, A2, etc. selon l’ordre chronologique dans lequel ils apparaîtront.
  18. Nous avions laissé la possibilité de couper l’enregistrement à la convenance des informateurs, chose qui se sera réalisée à chaque entretien, preuve en est de la crispation autour de la langue dans le territoire.
  19. « La langue béarnaise », « le patois béarnais », « le patois béarnais populaire », « le pur patois béarnais » auxquels on peut ajouter, dans une moindre mesure, « l’occitan-béarnais gascon », « l’occitan et le béarnais », « l’occitan ou le béarnais ».
  20. http://www.le64.fr/culturesport/culture/langues-regionales/developper-lusage-et-la-transmission-de-la-langue-bearnaisegasconneoccitane.html (consulté le 25/02/2020).
  21. « Le mot “béarnais” ne doit pas être laissé aux béarnistes » (B4).
  22. https://www.institut-bearnaisgascon.com/ (consulté le 25/02/2020). https://www.facebook.com/ibg.secretariat/ (consulté le 25/02/2020).
  23. https://www.institut-bearnaisgascon.com/bearn-et-gascogne/loccitanisme-et-loccitan/ (consulté le 25/02/2020).
  24. Pour des raisons de clarté, seul le provençal, à titre d’exemple, est ajouté à la liste des langues d’oc dans la modélisation. Il en ira de même pour les autres modélisations à venir.
  25. L’Institut Béarnais et Gascon a en réalité repris une page du site internet de l’Agence d’attractivité et de Développement Touristiques Béarn Pays basque (bearn-pyrenees.tourisme64.com, consulté le 29/04/2019).
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EAN html : 9791030008395
ISBN html : 979-10-300-0839-5
ISBN pdf : 979-10-300-0840-1
ISSN : 3000-3563
20 p.
Code CLIL : 3153
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Comment citer

Pascaud, Antoine, « Le  “béarnais” : un objet aux représentations complexes, polysémiques et contradictoires », in : Moskvitcheva, Svetlana, Viaut, Alain, éd., Les noms des variantes de langue minoritaire. Études de cas en France et en Russie, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux , collection Diglossi@ 2, 2024, 75-97 [en ligne] https://una-editions.fr/le-bearnais-un-objet-aux-representations-complexes [consulté le 15/04/2024].

http://dx.doi.org/10.46608/diglossia2.9791030008395.5
Illustration de couverture • L'illustration de la première de couverture a été réalisée par Ekaterina Kaeta (École académique des Beaux-Arts de Moscou - Département de Création graphique). Deux textes y apparaissent en arrière-plan : à gauche, un extrait d'une poésie en mordve de Čislav Žuravlev (1935-2018), recopié manuellement par l'illustratrice à partir de Žuravlev Č. (2000), Večkemanʹ teše [Étoile d’amour] (tome 2, Sarans, Tipografiâ Krasnyj Oktâbrʹ, p. 139), et, à droite, un extrait d'un poème inédit en occitan de l'écrivain Bernard Manciet (1923-2005), avec l'aimable autorisation de sa famille.
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