Paru dans : Bulletin de la société de Borda, 102, 1977, 55-105.
Parmi les pays qui, du bassin d’Arcachon à l’embouchure actuelle de l’Adour, frangent le littoral landais, le Born a occupé tout au long du Moyen Âge et jusqu’à la fin de l’époque moderne une place originale. Bordé au sud par le Marensin dont il était séparé par le boucau de Contis, s’étendant vers l’ouest jusqu’à la Grande lande de Labouheyre, il appartint, en effet, jusqu’en 1790, au diocèse de Bordeaux dont il constituait avec le Buch voisin, un archiprêtré. Comme pour les autres pays landais, l’histoire de son peuplement reste à faire. Nul doute qu’elle ne soit riche d’enseignements en raison de l’originalité et de l’instabilité du cadre naturel fait de landes, de dunes et d’étangs, mais aussi parce que ce pays, comme ceux qui le prolongent, a été traversé d’abord par une des deux voies romaines reliant Bordeaux à la cité des Tarbelli, puis par un des chemins de Saint-Jacques, celui du littoral.
Si l’on excepte quelques rares documents qui n’intéressent d’ailleurs que la paroisse de Mimizan, ce n’est cependant qu’à partir de la seconde moitié du XIIIe siècle que les sources écrites permettent d’avoir une vue d’ensemble du pays et de ses habitants et d’en esquisser un tableau1[.
À la fin du XIIIe siècle le Born était constitué par un ensemble de onze paroisses dont le noyau se trouvait presque toujours sur la rive orientale ou méridionale des étangs de Cazaux, Parentis et Aureilhan. C’était du nord au sud : Sanguinet (Saint-Sauveur), Biscarrosse (Saint-Martin), Ussera devenue plus tard Gastes (Sainte-Marie), puis, Sainte-Eulalie, Pontenx (Saint-Martin), Saint-Paul de Frontinhan, Aureilhan (Saint-Vincent), Mimizan (Notre-Dame), Mézos (Saint-Jean), Saint-Julien, enfin Aubinhac devenu Lévignac (Saint-Martin)2. En revanche, ni Uza qui n’était à cette époque qu’un château et un bourg, ni Bias connu sous le nom de Mont-Saint-Michel de Bias n’apparaissent en tant que paroisses, du moins sur les listes de l’archevêché.
Il n’est jamais très facile d’appréhender des paysages à partir de documents de nature juridique, soit qu’ils pêchent par laconisme, soit qu’ils se réduisent à des formules. Un examen minutieux de la terminologie utilisée dans les Recogniciones Feodorum de 1274 pour décrire les possessions des déclarants du Born permet néanmoins de se rendre compte que tout n’y est pas convention. Nous avons pu ainsi relever un certain nombre de termes qui suggèrent quels étaient les principaux éléments du paysage de ce pays à la fin du XIIIe siècle. Si on y retrouve, comme partout ailleurs, des terres (terrae), cultes ou non et des maisons (domus), on relève aussi dans la plupart des actes des expressions dont la présence ne relève pas de l’inspiration du copiste. Il s’agit, tout d’abord, du terme de padouen (paduencia) qui sert en général à désigner des terrains communaux en landes ou en forêts et qui, dans le pays de Born, évoque probablement les vastes zones de parcours des troupeaux.
Or, si ces padouens sont attestés de Sanguinet3 et Biscarrosse4 au nord jusqu’à Bias5 et Mézos6, en passant par Parentis7, Pontenx8 et Mimizan9, nous n’avons relevé, qu’une seule fois, à Montaner, des pacages (pascua) et des landes (landa)10. De leur côté, les bois (nemora) ne sont mentionnés qu’à Mimizan11, Parentis12, Saint-Paul13 et Montaner14. Sans doute faut-il y voir la preuve que la plupart des landes et des bois étaient des vacants communautaires. En tout cas, pour les habitants du pays de Born, la notion de droit d’usage l’emportait sur celle de la nature des parcelles à l’exception, bien sûr, de celles qui étaient cultivées ou bâties. C’est sans aucun doute sous cet aspect que doit être aussi retenu le terme de “montanha”15. S’il sert à désigner la forêt de résineux qui recouvrait par endroits le cordon de dunes littoral en particulier à Biscarrosse et Bias, on ne saurait oublier, en effet, qu’il s’agit là d’une forêt usagère pour les habitants des paroisses voisines. En tout cas, grâce à ces quelques mentions, l’existence de boisements en Born à la fin du XIIIe siècle se trouve parfaitement attestée, de même que leur localisation, soit en bordure de certains étangs, soit sur les dunes littorales.
On ne s’étonnera pas, d’autre part, de rencontrer assez fréquemment des mentions d’eaux (aquae) à Sanguinet16, Biscarrosse17, Parentis18, Mimizan19, paroisses qui sont toutes situées en bordure d’étangs, mais aussi dans celle de Mézos20 traversée par le ruisseau d’Onesse. Ces eaux doivent désigner probablement les nombreux petits ruisseaux qui alimentent les étangs plutôt que les étangs eux-mêmes. En effet, celui de Mimizan devenu aujourd’hui l’étang d’Aureilhan est attesté de façon précise vers 1130 (stagnum de Mimizan)21 puis, en même temps que le courant le reliant à l’océan, en 128122. Ruisseaux et courants étaient déjà aménagés, soit pour la meunerie, soit pour la pêche. Des moulins étaient ainsi établis à Biscarrosse23, mais on ne voit pas à quel endroit, ainsi qu’a Mézos24, sans doute sur le ruisseau d’Onesse. C’est autour de l’étang d’Aureilhan qu’ils étaient cependant les plus nombreux : “molas” de Saint-Paul25 installées probablement sur le ruisseau d’Escource, moulin de Sesquas, à Bias26, sur un autre ruisseau alimentant le même étang. Le moulin dont l’emplacement nous est le mieux connu reste celui qu’Édouard Ier autorisa P. Assalhit de Podensac à construire, entre l’étang d’Aureilhan et la mer, avec autant de roues qu’il voudrait27.
Dans ce cadre de dunes parfois boisées, d’étangs, de ruisseaux et de courants, de bosquets et de vastes zones de parcours, comment se présentaient le terroir cultivé et l’habitat ? Bien que ce ne soit pas ici notre propos, nous ne saurions passer sous silence le fait que, depuis le XIIIe siècle certaines modifications ont pu être apportées à l’étendue des terroirs comme aux sites d’habitat, soit à la suite d’une progression des dunes, soit en raison d’un relèvement du niveau des étangs28. C’est au premier de ces phénomènes qu’il faut attribuer l’abandon en 1604 de l’église primitive de Sainte-Eulalie29 et la menace qui a pesé sur Notre-Dame de Mimizan ; quant au second il explique la disparition sous l’eau au début du XIXe siècle de certaines des mottes qui entouraient l’étang d’Aureilhan, ainsi que celle de l’ancienne église de Saint-Paul30 sans oublier les modifications qui ont pu être apportées au tracé des chemins31.
D’après les quelques indices que nous avons pu recueillir l’habitat semble avoir été pour l’essentiel dispersé sans que l’on puisse mesurer exactement la part des hameaux et celle des maisons isolées. En tout cas, les seules mentions d’une petite agglomération concernent, d’une part, la sauveté de Mimizan qualifiée de villa32, de l’autre, le bourg (burgus, vicus) d’Uza33. Ailleurs, en revanche, il est seulement question de paroisses et sur leur territoire de lieux-dits – Meula à Sanguinet34, Auleys à Parentis35, Le Sasterar à Pontenx, Lossa ou La Ossa à Saint-Paul36, Arbenhac à Saint-Julien37, Lacorcia à Gastes38 – ou bien d’“affars”, comme celui de Maubourguet à Pontenx39. Ces lieux dits et ces “affars” doivent certainement correspondre à des quartiers, eux-mêmes regroupant plusieurs “boerie”. La boerie est désignée le plus souvent par le nom d’un tenancier40, beaucoup plus rarement par un toponyme41 et son nom est presque toujours accompagné de la mention d’un “ostau” ou d’une domus qui s’y trouve dessus42. Elle correspondait sans nul doute à la fois à l’unité d’habitat et à celle d’exploitation et abritait probablement la cellule familiale de base du Pays de Born, à la fin du XIIIe siècle.
Sur le plan administratif, judiciaire et financier le pays de Born a constitué depuis la seconde moitié du XIIIe siècle une prévôté ducale, commune avec le pays de Labouheyre43. Il n’est pas impossible, cependant, que jusqu’à la fin du XIIIe siècle, sinon tout le Born, du moins la paroisse de Mimizan, ait possédé des officiers particuliers : ainsi, en 1274, Amanieu du Puch fait hommage pour la viguerie de Mimizan moyennant 300 s. morl. d’esporle à mouvance de seigneur44. À la même époque, G.-R. de Monos déclare qu’il doit payer le cens des biens qu’il tient du roi au viguier de Mimizan, qui est tenu d’en remettre le montant au prévôt de la même localité45. Il y avait donc, à ce moment-là, à Mimizan, un viguier chargé plus spécialement des affaires judiciaires et un prévôt aux fonctions plus générales. Une telle situation ne saurait surprendre, car Mimizan était le seul bourg du Born – mis à part Uza – et il occupait une position médiane. D’autre part, ses habitants bénéficiaient de privilèges judiciaires et financiers : les coutumes46 de Mimizan font d’ailleurs allusion à plusieurs reprises à la cour qui y siège.
Par la suite, il n’est plus jamais question du viguier dont les fonctions étaient cependant héréditaires ; sans nul doute cet office fut-il confondu avec celui de prévôt, le seul d’ailleurs évoqué dans les coutumes de Mimizan47. Il est vraisemblable, d’autre part, que le roi-duc ait assez tôt réuni la prévôté de Born avec celle de Labouheyre, mentionnée dès 125548. En tout cas, en 1287, Pierre Assalhit exerçait les fonctions de prévôt de Labouheyre et de Born49. Par la suite – mais nous sommes à l’époque de la guerre de Guyenne – on retrouve un prévôt de Mimizan, en la personne d’Arnaud Guillaume de Frambardin qui, sinon originaire de Born, y fut du moins possessionné quelques années plus tard50. Avec le retour de la paix on revient, d’ailleurs, à la situation antérieure et c’est Bidau Brana, déjà prévôt de Labouheyre et de Born en 1294, qui va à nouveau exercer ces fonctions en 1309-131051. Si l’on en Juge d’après ce dernier exemple, la prévôté concédée par le roi sous forme d’un accensement par cession directe devait être relativement riche. Lorsque Édouard Ier octroya la prévôté à Bidau Brana, c’était, en effet, afin qu’il pût se rembourser de dix-neuf reconnaissances de dette que le roi-duc avait contractées auprès de lui. Mais, le remboursement tardant à se faire, sans doute parce que le montant des dettes était trop important, le sénéchal d’Aquitaine d’abord, puis Édouard II enlevèrent la baillie à B. Brana, bien qu’il n’eût pas, semble-t-il, démérité. Si, une première fois, il put recouvrer sa charge, par la suite il dut se résigner à n’être plus que l’attornatus du nouveau titulaire, Bertrand Calhau52. C’est à cette occasion que nous apprenons que la prévôté de Labouheyre et Born était estimée valoir 360 livres chipotoises, une somme, qui, comparée à celles que rapportaient les autres prévôtés, situe la nôtre à un rang des plus honorables53.
Représentant du roi-duc dans sa prévôté, le prévôt y exerçait des fonctions judiciaires, administratives et financières et, d’une façon plus générale, veillait à protéger les droits de son maître. Il importe donc de préciser maintenant la nature et l’importance des droits du roi-duc dans le pays de Born.
Une première remarque s’impose en ce qui concerne la propriété du sol : à la fin du XIIIe siècle, le pays de Born était en presque totalité dans la mouvance féodale du roi-duc. C’est en tout cas ce qui ressort de l’ensemble des réponses faites à l’automne 1274 par tous ceux qui vinrent faire hommage au roi-duc. Des vassaux nobles, comme Amanieu de Lesgor, Amanieu du Puch, des ecclésiastiques comme l’abbé de Saint-Sever, des hommes francs comme les représentants de la communauté de Mimizan déclarent de manière parfaitement explicite ne posséder aucun alleu54. Le seul cas d’alleu que nous ayons relevé concerne l’affar de Lacorcia dans la paroisse de Gastes55. Lorsqu’on sait avec quelle minutie sont établis les procès-verbaux des Recogniciones, le silence des autres documents en la matière ne peut être autrement interprété. Cette constatation corrobore celle que nous avions déjà faite, à propos des terres landaises des Albret. Le pays de Born, à la différence du Cernès ou du Bazadais voisins, n’est pas terre d’alleu56. C’est, d’autre part, un pays dans lequel les fiefs paraissent stables, car trois déclarants seulement reconnaissent avoir fait une aliénation57.
Il ne faudrait pas croire, cependant, que si la situation juridique des terres était parfaitement claire, celle des droits qu’y percevait le roi-duc l’ait été toujours autant. À plusieurs reprises au cours du XIIIe siècle ses représentants se sont, en effet, heurtés aux vicomtes de Tartas ; ce furent ensuite les Soler, successeurs des Tartas, qui entrèrent en conflit avec la noblesse de Born. Il faut attendre 1314 pour que, dans un domaine du moins, celui de la justice, les droits respectifs du roi-duc et du plus puissant de ses vassaux en Born soient enfin délimités.
Un des premiers éléments de cette longue affaire fut, sans conteste, la fondation par le roi Richard, sur une terre qui lui appartenait, du castrum d’Uza qu’il peupla de ses propres hommes auxquels il donna de bonnes coutumes58. Cet établissement, dont les débuts nous sont rapportés dans un mémoire adressé vers 1250 par les habitants d’Uza à Henri III, pourrait dater des expéditions que Richard, encore comte de Poitiers, fit en Gascogne, en 1177 et 117959. En 1199, le castrum passa au roi Jean : mais à la suite de la guerre qui l’opposa au roi de France, au vicomte de Béarn et aux barons gascons60, le roi d’Angleterre remit “en commande” l’oppidum d’Uza au vicomte de Tartas, probablement Arnaud Raimond II.
Lors de la remise du castrum, le vicomte avait juré de le tenir selon les us et coutumes qui avaient été concédés, lors du peuplement par le roi Richard. Mais, un an et trois mois plus tard, un soir de la Saint Grégoire, le vicomte fit réunir tous les hommes du castrum devant lui, les fit prisonniers, en molesta et en tua même un certain nombre et les dépouilla de leur biens pour une valeur qu’ils estimèrent à plus de cent mille sous morlans. Il leur fit en outre jurer qu’ils ne porteraient jamais plainte et contraignit certains d’entre eux à faire serment de ne plus se placer à l’avenir sous la main du roi d’Angleterre. Le vicomte alla même jusqu’à procéder à une distribution des mansiones du castrum – sans doute des emplacements à bâtir – entre certains de ses chevaliers : il en donna ainsi 22 à Géraud de Gueirope, qui les échangea ensuite contre d’autres biens avec les Templiers et quatorze autres à Arnaud de Montauser, Bernard de Monon et Pierre de Bielemjean.
Ces événements se produisirent sous le règne du roi Jean, probablement vers 1208-1210, mais les habitants d’Uza ne font pas état des motifs qui poussèrent le vicomte de Tartas à agir de la sorte. Ce qui paraît plus curieux encore c’est le silence des baillis ducaux, face aux plaintes des habitants du castrum. On notera cependant qu’à l’occasion de l’expédition d’Henri III sur le continent en 1242-1243, le vicomte de Tartas, Raymond Arnaud, fils d’Arnaud Raymond II, auquel il succéda vers 1239, se montra un fidèle vassal du roi-duc61. Peut-être est-ce la raison pour laquelle les habitants d’Uza ne purent se faire entendre que par S. de Montfort, lors de sa première expédition en Gascogne, à l’automne 1248 ou plus tard62. Le comte de Leicester, d’abord incrédule, finit par se rendre sur les lieux et chargea son bailli Jean Lopergre de procéder à une enquête auprès d’hommes dignes de foi des diocèses de Bordeaux et de Dax. À la suite de cette enquête, Simon de Montfort fortifia et clôtura le château et le bourg (castrum et vicum) qu’il avait donc, sinon repris, du moins replacés sous la protection ducale et il les repeupla.
C’est sans doute peu de temps après que les habitants d’Uza adressèrent à Henri III le mémoire dans lequel ils relatent l’histoire du castrum que nous venons d’évoquer. Ils suppliaient le roi de tenir fermement dans sa main les terres dépendant d’Uza, ainsi que l’avaient fait Richard et Jean – ce qui pour ce dernier semblerait contestable – et de conserver leurs personnes sous sa protection directe ; ils lui demandaient, en outre, de leur concéder des lettres patentes, semblables à celles que leur avait données le roi Richard et qui, selon eux, avaient été brûlées en même temps que la chapelle Sainte-Catherine qui se trouvait dans le castrum incendié par le vicomte de Tartas.
La plupart des faits rapportés dans la requête des habitants d’Uza sont invérifiables, mais il n’y a pas de raison de ne pas les considérer comme assez proches de la réalité. Or, si nous savons de quelle façon les vicomtes de Tartas entrèrent en possession d’Uza, de nombreux points et non des moindres restent dans l’ombre.
Le premier concerne les origines mêmes du castrum. Si, comme, nous l’avons supposé, sa fondation remontait aux campagnes de 1177 ou de 1179, il ne serait pas du tout impossible qu’il ait été édifié sur des terres confisquées par Richard au vicomte Pierre II de Dax, vaincu et tué lors du second siège de la ville en 1177. L’insistance mise par les habitants d’Uza à préciser que le castrum avait été construit sur une terre appartenant à Richard ne constitue pas en soi une preuve du contraire. L’hypothèse est d’autant plus intéressante qu’Arnaud Raimond II de Tartas auquel le roi Jean remit ensuite Uza, avait épousé Navarre, fille et héritière de Pierre II. La concession d’Uza prendrait ainsi l’allure d’une restitution à Navarre63.
II convient de remarquer à ce propos, qu’à la différence des vicomtes de Dax, ceux de Tartas entretinrent avec le roi d’Angleterre des rapports nettement meilleurs : ce fut le cas pour Raimond Robert II, témoin en 1177 et 1179 de concessions de privilèges faites par Richard aux habitants de Dax et de Bayonne64, mais aussi celui de son fils Arnaud Raimond II, du moins au début du règne de Jean sans Terre, comme en témoignent la concession du pont de Saint-Pandelon (25 juillet 1199)65, et l’ordre donné par le roi à ses officiers de ne pas faire de paix avec Gaston VI de Béarn, dans laquelle ne serait pas compris le vicomte de Tartas son adversaire (29 janvier 1200)66. Malgré les gages d’amitié que lui avait donnés son souverain, le vicomte se laissa néanmoins entraîner contre lui, lors de l’expédition d’Alfonse VIII de Castille. La concession d’Uza apparaît ainsi comme un geste de bonne volonté de la part de Jean sans Terre. Si, comme nous l’avons supposé, le territoire sur lequel avait été édifié Uza avait naguère appartenu aux ancêtres de son épouse, le vicomte de Tartas y fut certainement d’autant plus sensible.
Cette hypothèse permet aussi de mieux rendre compte des heurts qui éclateront entre le vicomte et les habitants du castrum, qui se considéraient peut-être encore comme des hommes du roi. Le fait que la concession au vicomte de Tartas ait été faite en commande – probablement sa vie durant – ne pouvait, d’autre part, que les encourager dans une telle attitude. C’est du moins ce qui ressort de leur requête.
Il importe de remarquer, enfin, que tout au long du XIIIe siècle les possessions des Tartas en Born sont toujours considérées comme des dépendances d’Uza et l’on est, dans ces conditions, enclin à penser qu’elles firent partie du lot initial, concédé en même temps qu’Uza à Arnaud Raimond II. L’hypothèse n’est pas contradictoire avec la précédente ; la construction du castrum d’Uza par Richard s’expliquerait ainsi très bien par son désir de mieux tenir en main des terres, jusque-là mal organisées et mal administrées par les vicomtes de Dax.
Il ne s’agit là, nous tenons à le préciser, que d’un essai d’interprétation, dans l’ignorance où nous sommes de la géographie et de l’importance des droits que le duc d’Aquitaine d’une part, certains de ces vassaux comme les Dax ou même les Tartas, de l’autre, détenaient en Born vers 1150. La suite des événements à partir du milieu du XIIIe siècle n’éclaire, allons-nous voir, que très faiblement l’ensemble du problème.
La mainmise de Simon de Montfort sur Uza ne pouvait rester sans provoquer une réaction de Raymond Arnaud de Tartas, car, pour autant que fussent fondées les plaintes des habitants, le comte de Leicester pouvait-il conserver Uza ? On peut d’ailleurs se demander, si, lorsqu’ils rédigèrent leur supplique, les habitants d’Uza ne venaient précisément pas de subir la colère de Raymond Arnaud ; l’allusion à l’incendie de la chapelle Sainte-Catherine est malheureusement trop vague pour qu’on sache s’il faut le rattacher aux événements du début du siècle ou bien à une expédition très récente consécutive à l’intervention de Simon de Montfort. En tout cas, la crainte manifestée par les habitants de voir, une nouvelle fois, leurs libertés supprimées à l’occasion d’un retour d’Uza au vicomte de Tartas est certaine.
On ignore quelle suite immédiate Henri III donna à cette, requête ; surtout, une lacune de près de vingt ans dans la documentation ne permet pas de savoir s’il y eut un lien entre cette affaire et celle qui, peu avant 1269, opposa le prince Édouard au vicomte Pierre, fils de Raymond Arnaud. On notera cependant que le vicomte Pierre jura obéissance au roi-duc le 7 août 1252 et se montra fidèle à Henri III, lors de la venue de celui-ci dans le duché en 1253-125467. Il avait donc repris possession, pour autant que son père en eût été dépossédé, des biens des Tartas en Born ; mais, ils lui furent confisqués, à la suite de violences qu’il avait commises à l’encontre des officiers du roi-duc. Ainsi que le rapporte Gaston VII de Béarn, désigné comme arbitre dans cette affaire, il y avait eu des “forsetz”, qui avaient entraîné des morts dans le camp du Prince. On ne s’étonnera donc pas que le vicomte de Béarn, par sa sentence du 30 octobre 1269, ait condamné Pierre de Tartas à une amende de 6 000 s. morlans. En revanche, le vicomte de Tartas se voyait restituer le “castet d’Uza”, avec ses dépendances et “tota la justidia gran e pauca de Born ab la justidia de Mimizan”, la “montanha et la costa” de Biscarrosse et de Bias, ses “hommes questaus et francaus”, enfin le “pleit vescomtau” et le “frementau”68. Comme on peut le constater, les possessions des Tartas dans le pays de Born au milieu du XIIIe siècle étaient donc considérables et Uza n’en était que le chef-lieu.
Or, quelques allusions contenues dans la sentence arbitrale de Gaston de Béarn, ainsi que dans la lettre que lui avait adressée le prince Édouard, laissent à penser que le vicomte ne s’en satisfaisait pas. Le prince Édouard avait, en effet, exclu de la mission dont il avait chargé le vicomte de Béarn “l’aveu des chevaliers de Born” et Gaston de Béarn avait pris soin de préciser dans sa sentence qu’elle ne concernait pas “l’aveu des chevaliers de Born, qui font l’aveu à notre seigneur”69. Il est donc manifeste que l’hommage des nobles de Born ou, en d’autres termes, leur immédiateté avait constitué probablement, à côté d’un contentieux plus ancien, un des éléments du conflit. Il semblerait que le vicomte de Tartas ait, par le biais de ses pouvoirs de haut justicier, essayé de faire entrer dans sa vassalité des nobles du pays de Born, qui rendaient alors hommage au roi-duc. On ne sait quelle fut l’attitude des intéressés même si on peut supposer, d’après les événements ultérieurs, qu’ils se rangèrent du côté du roi-duc : peut-être furent-ils même à l’origine d’une plainte contre le vicomte, ce qui aurait entraîné une réaction violente de sa part.
En tout cas, en 1274, à l’occasion de la grande enquête organisée dans tout le duché, voit-on plusieurs nobles et hommes libres du Born, la communauté de Mimizan, ainsi que le prieur de cette localité faire hommage au roi-duc et reconnaître qu’ils doivent faire droit devant lui ou son représentant. Il y a de leur part une attitude parfaitement nette, aussi bien en ce qui concerne la directité que sur le plan de la justice. C’est d’ailleurs à cette occasion que nous est révélée l’existence, semble-t-il fort ancienne, d’un viguier et d’un prévôt de Mimizan. Au moins en matière de justice les déclarations de 1274 sont donc contradictoires avec les termes de la sentence de Gaston de Béarn, mais, compte tenu des circonstances, cela ne saurait surprendre outre mesure.
Il est curieux, d’autre part, de ne trouver dans les Recogniciones aucune trace de l’hommage de Pierre de Tartas pour Tartas et le Born alors qu’en septembre 1273 il avait fait hommage et fidélité pour Mauco70. S’agit-il d’une lacune du document ou bien le vicomte s’est-il abstenu volontairement de faire hommage ? Ce ne serait pas après tout impossible car, en 1274, la sentence de Gaston de Béarn n’avait pas encore été exécutée. On ignore si Pierre de Tartas avait bien payé l’amende de 6000 s. morlans, mais il est certain que le prince Édouard, devenu roi entre-temps, avait conservé par devers lui une partie au moins des droits qu’il avait naguère confisqués.
Ce n’est, en effet qu’au cours de l’été 1278, à l’occasion sans doute du passage de Robert Burnell, évêque de Bath et Wells, chancelier d’Angleterre et d’Othon de Grandson, enquêteurs réformateurs envoyés par le roi en Gascogne, que le fils et successeur de Pierre de Tartas, le vicomte Jean se fit attribuer entre autres, preuve qu’il n’avait pu encore en jouir “la possession et la saisine des hommes questaux (du vicomte) qui avaient fait aveu (au roi-duc), ainsi que celles des revenus de la haute et basse justice et des autres droits et devoirs que le duc possédait et dont il jouissait dans le bourg d’Uza et ses dépendances et ailleurs dans tout le Born”71. On remarquera à ce propos, le caractère à la fois très précis – le bourg d’Uza – et très vague – le Born – des termes utilisés. Le roi-duc restitua-t-il au vicomte les droits de justice sur tout le Born ou seulement ceux rattachés au château d’Uza, tels qu’ils furent définis plus tard, dans le cadre de l’accord de 1315, en excluant les autres fiefs mouvant de la couronne ? S’il en était ainsi la restitution de 1278 marquerait un retrait par rapport à la sentence de Gaston de Béarn. Mais, la suite des événements prouve que cette dernière hypothèse est assez peu vraisemblable. Cette rétrocession permit en tout cas au vicomte Jean d’envisager le règlement avec ses cousins del Soler d’un problème de succession resté en suspens depuis plusieurs années.
Le père de Jean, le vicomte Pierre, avait, en effet, en plus de deux frères, dont l’un Raimond Robert devint à son tour vicomte après le décès de Jean, son neveu, une sœur, Esclarmonde, qui avait épousé un grand bourgeois bordelais, par ailleurs seigneur de Belin, Gaillard del Soler (Tableau I). Devenu veuf, celui-ci réclama au nom de ses enfants, Arnaud Raimond et Blanche, une part de la succession de leur aïeul Raimond Arnaud, vicomte de Tartas, père de Pierre et Esclarmonde décédé avant 124872. Ainsi que l’avait déjà fait le prince Édouard en 1269 les parties choisirent une nouvelle fois comme arbitre Gaston de Béarn. Celui-ci, par sa sentence du mois d’août 1278, attribua aux Soler “le château d’Uza, le bourg, ainsi que toute la terre de Born, du Buch au Marensin avec toutes ses dépendances, à savoir la haute et basse justice et tous les droits de nature foncière, à l’exception de l’hommage de Pierre de Bordeaux à prendre ailleurs ou en Born”, mais on ignore au juste en quoi il consistait73. En ce qui concerne l’assiette des droits de justice, le caractère très vague des termes utilisés ne permet pas de savoir quelle en était la réelle extension. D’autre part, il est fait allusion dans ce même document au litige opposant le roi-duc au vicomte de Tartas, preuve que le nouveau vicomte, même après la restitution de l’été 1278, n’avait pas renoncé aux prétentions émises naguère par son père : il s’agissait en particulier de revendications en matière d’aveu, dont on se souvient qu’elles avaient été exclues en 1269 de la mission confiée à Gaston de Béarn et sur lesquelles le roi ne s’était donc pas encore prononcé. En ce qui concerne “les aveux et autres choses” – mais s’agissait-il de droits de justice ? – retenus par le roi-duc dans le “fait” de Born, Gaston de Béarn ne les adjugeait, en effet, aux Soler, que pour autant que ceux-ci seraient admis à faire valoir leurs droits par devant la cour. Dans le cas contraire le vicomte n’était évidemment pas tenu à les céder aux Soler74. On notera au passage combien pour les Soler déjà seigneurs de Belin, une telle concession était intéressante, les deux pays étant proches l’un de l’autre.
Le vicomte de Tartas dut probablement trouver la sentence trop favorable aux Soler et conserver les biens du pays de Born. Comment expliquer autrement qu’au mois de juillet 1280, le vicomte Jean, sans aucun doute à la demande du roi-duc, lui ait remis l’ensemble des droits qui lui avaient été attribués en 1278, droits qu’Édouard Ier devait d’ailleurs immédiatement rétrocéder à Arnaud Raimond del Soler. Il ne fait aucun doute que les Soler, qui avaient retrouvé à Bordeaux une place de tout premier plan – Rostand, un des frères de Gaillard, va être précisément maire en 128675 – sont intervenus auprès du roi-duc afin qu’il oblige leur cousin de Tartas à exécuter la sentence de Gaston de Béarn. Or, cette mesure qui n’était que la liquidation d’un problème successoral et qui laissait de côté une partie des anciens différends entre les Tartas et leur seigneur allait susciter une véritable tempête parmi la noblesse du Pays de Born.
Le 1er mai 1281, en effet, les vassaux d’Édouard Ier, y compris les simples hommes libres, lui firent savoir qu’il ne leur plaisait pas que la haute justice de leurs terres qui, selon eux, avait appartenu ab antiquo au roi et à ses ancêtres, fût transférée à Arnaud Raimond del Soler ou à une autre personne maxime ignobili76. En effet, dans la mesure où ils tenaient leurs terres et leurs fiefs du roi-duc, droit que celui-ci s’était d’ailleurs expressément réservé, ils faisaient valoir qu’ils seraient injustement lésés s’ils devaient obéir au roi et aux siens, en matière de fief, et à un autre ou à d’autres en ce qui concerne la haute justice de leurs terres. Ils le suppliaient donc, dans son intérêt et dans le leur, qu’il voulût bien les écouter ou bien les faire interroger par ses enquêteurs, en lui déclarant que jamais, sinon par la contrainte, ils n’admettraient une telle situation. La plainte fut transmise à Labouheyre, pour être envoyée au connétable de Bordeaux.
Il est manifeste que les nobles ont invoqué à tort le fait que la justice haute de leurs terres ait appartenu de toute antiquité au roi-duc. Si l’acte de rétrocession de 1278 comporte quelque ambiguïté, il n’en est pas de même de la sentence arbitrale de 1269 : c’est bien la justice de tout le pays de Born et même celle de Mimizan qui fut alors restituée à Pierre de Tartas. Dans ces conditions, les appelants du Born pouvaient, tout au plus, faire état du fait que, des années 1265-1269 à 1278, les droits de haute justice ayant été confisqués puis conservés par le roi-duc, celui-ci les avait effectivement exercés. De toute façon le roi-duc, sauf engagement précis de sa part, comme ce fut le cas pour la prévôté d’Entre-Deux-Mers77, était parfaitement libre d’aliéner des droits de caractère régalien. De plus, on ne suit pas très bien les plaignants quand ils invoquent les inconvénients que présentait, selon eux, la séparation entre mouvance directe et exercice du droit de haute justice.
En réalité, ce qui a provoqué la révolte des nobles du Born – et le fait qu’ils n’aient pas semble-t-il protesté dès 1269 ou 1278 le confirme – c’est qu’Ar. Raimond del Soler fut un bourgeois. Si tous les hommes libres, nobles ou roturiers, souscrivent à la pétition, les meneurs paraissent avoir été les petits vassaux. En tout cas, Guillaume de Soa et Lombard d’Escoassa, qui représentent les appelants de 1281 dans le procès qui va suivre, appartenaient à la petite noblesse locale78. La souscription de J. de Grailly ou celle d’Amanieu d’Albret qui n’étaient l’un et l’autre que peu possessionnés en Born et qui entretenaient de bons rapports avec la bourgeoisie bordelaise pourrait surprendre, d’autant qu’Ar. R. del Soler était fils d’une Tartas et époux d’une Castillon. Mais on ne peut pas ne pas tenir compte de la solidarité entre nobles, face à ce que la noblesse pouvait considérer comme “un abus de pouvoir” du roi-duc, non plus que de la préférence toujours accordée à une justice royale sur une justice seigneuriale.
La requête introduite par les nobles de Born devant la cour de Gascogne traîna comme à l’accoutumée. Pour se défendre Ar. R. del Soler prit l’initiative de solliciter une enquête ; en cela il fut, semble-t-il, soutenu par le procureur du roi. Le sénéchal tendant à prononcer sa sentence, sans doute parce qu’il ne voulait pas prendre parti, le roi-duc le rappela à deux reprises à l’ordre en mai et juin 1291, puis une nouvelle fois en 1293, en le priant d’en finir avec cette affaire79. On notera au passage que treize années s’étaient écoulées depuis le début du conflit.
Les événements de 1294 et la guerre franco-anglaise qui s’ensuivit laissèrent le procès en suspens pendant dix ans. On aurait pu penser que Gaillard del Soler, fils et héritier d’Arnaud Raimond, devenu un grand personnage en Bordelais après le retour de l’Aquitaine à Édouard Ier, aurait tout mis en œuvre pour trouver une solution, mais certainement était-il alors préoccupé par des problèmes locaux80. C’est seulement en 1315 que sa sœur et héritière, Yolande, devenue vicomtesse de Fronsac par son mariage avec Raymond de Fronsac, trouva une base d’accord avec le procureur du roi81 : les termes du compromis donnaient indirectement raison aux nobles du pays de Born.
D’après les attendus, le conflit n’aurait plus porté que sur le droit de haute et basse justice du château et du vicus d’Uza et des autres fiefs des Soler en Born, ainsi que sur le droit de naufrage et de baleine sur les côtes de Biscarrosse et de Saint-Julien. Les données du problème n’auraient donc plus été les mêmes qu’en 1281, à moins que, comme cela est probable, par droit de justice du château et du vicus d’Uza, on doive entendre le pays de Born tout entier. Ces termes ne sont d’ailleurs pas très éloignés de ceux qui figurent dans la restitution de 1278.
Au terme de cet accord, le roi-duc reconnaissait à Yolande la justice haute et basse, mère et mixte impère dans le château, le vicus et la vicinalis d’Uza et dans leurs dépendances, ainsi que dans les propriétés, fiefs et arrière-fiefs qu’elle pouvait posséder dans les paroisses de Mézos, Lévignac, Saint-Julien, Aureilhan et Biscarrosse, sur le lieu de Fodias à Bias et sur quatre hommes du voisinage. Ces droits de haute justice étaient les mêmes, quant au contenu, que ceux dont usaient les nobles du Bordelais dans des cas identiques, avec, en plus, la possibilité pour Yolande de faire conduire les prévenus et accusés de ces diverses paroisses jusqu’au château d’Uza. En revanche, sur les hommes, tenanciers, fiefs et arrière-fiefs que Yolande possédait dans les paroisses de Sanguinet, Saint-Paul, Pontenx, Parentis, Vyssera (Gastes) et Sainte-Eulalie, Yolande ne disposait que de la basse justice, la haute restant au roi.
Les Soler ne conservaient donc le droit de haute justice que sur leurs hommes, tenanciers, fiefs et arrière-fiefs et encore seulement dans certaines paroisses, sans doute celles dans lesquelles leurs possessions étaient les plus étendues. La géographie de ces enclaves au sein de terres placées désormais officiellement sous juridiction royale n’est pas, en effet en relation avec le plus ou moins grand éloignement par rapport au château d’Uza. Preuve, d’autre part, de la violence du conflit qui avait opposé les Soler aux petits nobles du Born, Yolande se voyait retirer tout droit de justice sur Guillaume de Soa et sur le seigneur de Frambardin ainsi que sur les membres de leurs familles et leurs héritiers et cela bien que leurs demeures se trouvent sur le fief de Yolande, à moins qu’ils ne commettent un délit sur des terres de la juridiction de la vicomtesse de Fronsac. Il était même prévu que si les intéressés déménageaient dans un autre lieu situé lui aussi dans la mouvance de Yolande, ils conserveraient ce privilège. Cette clause vraiment exceptionnelle s’explique fort bien quand on se souvient que Guillaume de Soa était un des meneurs de l’opposition aux Soler ; parce qu’il était leur vassal pour une partie de ses biens, dont sa résidence, et craignant peut-être une vengeance sous le couvert de la justice d’Uza, il se fit donc octroyer pour sa résidence et ceux qui habitaient avec lui un bénéfice d’exterritorialité itinérant.
L’accord de 1315 établissait de manière indiscutable, s’il ne les élargissait pas, les droits du roi-duc dans le pays de Born, dont il devenait le plus important seigneur haut justicier. Quant à l’aveu des nobles et des hommes libres, un des points de la controverse initiale, ils ne lui étaient plus contestés depuis que les Soler avaient succédé aux Tartas. Notons à ce propos que si les droits de justice ne devaient rapporter au roi-duc que des revenus aussi modestes qu’irréguliers, d’un moindre profit encore étaient ceux qu’il pouvait tirer des hommages nobles, sauf, verrons-nous, parfois la promesse d’un service militaire.
En l’absence de tout compte on ne peut que s’interroger sur la nature et l’importance exacte des autres droits dont jouissait le roi-duc, dans la prévôté à la fin du XIIIe siècle. Deux cependant paraissent bien établis : celui de costage, ainsi que celui de percevoir un cens annuel des hommes francs de Mimizan ; un autre est vraisemblable : le droit de percevoir des redevances pour l’usage de la lande.
Le droit de “costa”, restitué en 1269 aux Tartas, correspond au droit d’épave. Passé sous silence pendant plus d’un demi-siècle il réapparaît dans le cadre de l’accord de 1315 : à cette occasion le roi-duc se fit reconnaître le droit de “naufrage, baleine ou baleines et autres que l’on trouve sur les côtes de Biscarrosse et Saint-Julien”, avec droit de haute justice sur ces objets. Il était précisé que dans les parties du littoral contiguës à des territoires sur lesquels Yolande del Soler exerçait la haute justice, elle pourrait jouir de la basse justice sur les terres découvertes à marée basse. À côté de ces droits, on peut évoquer ceux que le roi-duc n’a cessé d’exercer sur les eaux douces, étangs et courants, au moins sur le territoire de Mimizan : ainsi, en 1254 le prince Édouard concède-t-il à John le Parker ses pêcheries de Mimizan, au devoir de 300 anguilles grosses et de trois douzaines de petites appelées “matraz”82 et, en 1281, devenu roi, il autorise Pierre Assalhit de Podensac à établir un moulin sur le courant83.
Quant aux francales qui, au milieu du XIIIe siècle, se trouvent placés dans la dépendance du roi-duc, auquel ils versent un cens de 15 livres, ils continuent à lui faire hommage et fidélité même lorsque, à la suite du paréage conclu en 1270 entre le prince Édouard et l’abbé de Saint-Sever, celui-ci perçoit désormais le cens84.
Le roi-duc en revanche ne semble pas avoir conservé de droits sur des questaux. Bien qu’en 1269 le vicomte de Tartas ait obtenu restitution de ceux qui faisaient partie de ses possessions en Born, certains d’entre eux peu désireux, semble-t-il, de revenir sous sa tutelle, firent aveu au roi-duc, mais furent contraints en 1278 par les représentants d’Édouard Ier à se soumettre au vicomte Jean. Deux ans plus tard, ils durent être cédés à Gaillard del Soler, puis passèrent à sa fille85.
Le dernier des droits perçu par le roi-duc dans sa prévôté de Labouheyre et Born en cette fin du XIIIe siècle était constitué par l’herbage de la lande86. On ne sait malheureusement pas sur quelle partie de la prévôté était perçue cette redevance, qui devait permettre à ceux qui la payaient d’utiliser librement les terrains de parcours. On peut se demander si, pour le Born du moins, ce droit ne serait pas à rapprocher du “pleit vescomtau”, rétrocédé en 1269 au vicomte de Tartas et dont il n’est plus question par la suite.
L’impression que l’on retire des conflits qui, au cours de plus d’un siècle opposèrent, au gré des circonstances, les vicomtes de Tartas aux habitants d’Uza, puis au roi-duc, puis, les Soler aux nobles du pays de Born, puis à Édouard Ier, est celle d’une confusion certaine. Celle-ci résulte à la fois du nombre des débats successivement en cause et de leur imbrication, mais aussi du fait que les parties oublient, au fil du temps, certaines des données initiales des affaires en cause. Les lacunes, voire les obscurités de la documentation, ne sont pas faites pour aider les choses ; aussi proposerons-nous, en guise de conclusion, un schéma d’interprétation.
Que le roi-duc ait disposé à la fin du XIIe siècle de l’hommage direct de la plupart des nobles du Born, ainsi que d’un domaine utile au moins à Mimizan, la chose ne fait aucun doute. En revanche, la situation avant la construction du castrum d’Uza par le roi Richard des terres qui en dépendirent au XIIIe siècle, telles que nous les connaissons aux termes de l’accord de 1315, reste un mystère. Nous inclinerions, cependant, à voir dans l’initiative de Richard la volonté de prendre en main un vaste ensemble de biens qui, jusque-là, lui échappaient. Cette hypothèse s’accorderait fort bien avec celle d’une confiscation au détriment des Dax, puis d’une cession par le roi Jean, elle rendrait compte aussi des heurts qui éclatèrent entre les Tartas et les habitants d’Uza qui, par leur origine, étaient des hommes du roi. Il semble bien établi, d’autre part, qu’à l’occasion de la remise d’Uza et de ses dépendances aux Tartas, ceux-ci obtinrent ou recouvrèrent un droit de haute justice sur tout le Born, encore que pour Mimizan, il y ait là un point obscur. Le roi-duc en tout cas, si l’on s’en rapporte aux termes de la sentence de 1269, n’aurait donc plus disposé en Born que de l’hommage d’un certain nombre de tenants nobles dont les Tartas, d’hommes libres et de la communauté de Mimizan.
Le conflit, qui éclata d’abord entre les vicomtes et les habitants d’Uza, entraîna à la suite de l’appel des habitants d’Uza et malgré des périodes d’accalmie (en 1242-1243 et 1252-1255), une détérioration des relations entre les Tartas et le roi-duc. Qu’il y ait eu ou non un lien entre cette affaire et celle qui éclata dans les années 1265 ou suivantes, il importe peu. On assiste, en effet à ce moment-là à un fait, semble-t-il, nouveau ; une tentative du vicomte Pierre pour s’emparer de la directité sur l’ensemble des nobles du Born. Ce fut un échec qui ne fut peut-être pas étranger à la renonciation du vicomte à ses droits sur le Born en faveur des Soler. Or, cette cession allait déclencher chez les nobles du Born, qui refusaient de passer sous la justice d’un bourgeois, une véritable révolte. Les circonstances aidant, la guerre de Guyenne en particulier, le roi-duc put, en tirant parti des arguments exposés par les nobles, recouvrer une partie des droits de haute justice. Tel est le schéma que l’on peut proposer des relations entre le roi-duc et ses plus puissants vassaux du pays de Born, au cours de plus d’un siècle. Nous ne dissimulerons pas que certains points demeurent obscurs sinon contradictoires. En tout cas, à partir de 1315 les droits du roi-duc en Born furent parfaitement définis, tellement bien qu’au début du XVIIIe siècle, existaient encore, vestige de l’accord du début du XIVe siècle, les deux juridictions de Born-Mimizan et de Uza-Biscarrosse.
1. Limite d’archiprêtré 2. Limite de diocèse 3. Limite de seigneurie 4. Paroisse
5. Lieu dit 6. Castelnau 7. Sauveté 8. Prieuré
9. Motte 10. Possession d’ordres militaires 11. Possession de l’hôpital de Roncevaux
12. Moulin a. Possession des Artigameira b. Possession des Campet c. Des Cis d. Des Escoassa e. Des Lesgor f. Des Lugaten g. Des Montaneir h. Des Moyssac i. Des Puch j. Des Soler k. Des Soler avec haute justice l. Des Colom m. Présence d’hommes francs n. Fief tenu d’un autre seigneur que le roi o. Alleu
L’examen des droits du roi-duc a permis d’entrevoir quelles étaient les structures juridiques et sociales du Pays de Born. Celles-ci n’ont dans leur ensemble rien de particulièrement original, mais il importe de bien distinguer, d’une part les différents niveaux auxquels s’établissent, sur le plan de la dépendance féodale, les relations entre le roi-duc et les habitants de Born, de l’autre, les diverses catégories juridiques entre lesquelles ces habitants se répartissent, sans oublier, à l’intérieur de chacune d’elles les nuances sociales. Parmi les tenants directs du roi, placés dans son immédiateté, se trouvent des nobles – milites, domicelli – et des bourgeois tenant des fiefs nobles, mais aussi de simples roturiers dont certains, comme ceux qui appartenaient à la communauté de Mimizan, sont qualifiés d’hommes francs (homines francales). Il existe aussi des nobles arrière-vassaux, dont ceux des Tartas puis des Soler, ou encore ceux des Colom, sans oublier, bien sûr, les tenanciers libres ou serviles, liés les uns par des relations uniquement de nature économique, les autres en plus personnelles soit à des détenteurs de fiefs nobles, soit à des hommes francs. Mais il ne semble pas qu’il y ait encore des tenanciers ou des questaux du roi-duc. Comme on a pu le constater aussi à propos de Guillaume de Soa, un noble peut fort bien être, à la fois tenant direct du roi pour certains de ses biens et arrière-vassal pour d’autres87. De même, un homme franc peut avoir des terres prises en censive d’un noble88.
L’opposition manifestée par les nobles du Pays de Born aux Soler révèle, d’autre part, qu’il existait au sein de l’aristocratie locale un sentiment de classe assez vif. Le fait que les nobles du Born aient entraîné des familles de haut lignage, des hommes francs ou des bourgeois fieffés comme les Colom, dans leur lutte contre la concession faite par le roi-duc de la justice haute du Born à la famille del Soler, ne doit pas faire oublier les circonstances dans lesquelles l’affaire fut déclenchée. Ce n’est pas tant, avons-nous vu, parce que le roi n’allait plus détenir la haute justice que les nobles du Born se sont révoltés, mais bien parce que cette justice était passée aux mains d’une famille bourgeoise de maxime ignobiles. Or, cette affaire n’était pas encore terminée, qu’une autre à peu près semblable éclata, à propos cette fois de la prévôté de Labouheyre et de Born.
On se souvient que le roi-duc avait cédé cette prévôté à Bidau Brana, afin qu’il se dédommageât de diverses reconnaissances de dette faites par Édouard Ier en sa faveur. En 1310, Édouard II ayant remplacé B. Brana par Bertrand Calhau, les nobles de Born craignirent qu’il ne s’agît là d’une concession héréditaire et refusèrent de lui obéir ; faisant pression sur Jean de Bretagne, alors représentant du roi-duc, ils lui firent retirer sa charge89. Il fallut que le roi, dont on ignore quelles étaient les véritables intentions, ordonnât au sénéchal de rétablir Bertrand Calhau et donnât aux nobles de Born toutes assurances sur le caractère temporaire de la concession. Il n’est pas douteux que les nobles de Born qui, au moins depuis l’appel de 1281, étaient de fait sous la haute justice du roi, ne voulurent pas, à l’occasion d’une concession héréditaire de la prévôté à laquelle le Born était rattaché, passer une nouvelle fois sous la tutelle d’un intermédiaire, une famille bourgeoise de surcroît et du clan des Soler ! La politique ducale s’accordait décidément mal avec le “conservatisme” de la noblesse du Pays de Born.
Cette noblesse – à laquelle nous rattacherons deux grandes familles bourgeoises détentrices de fiefs considérables, les Colom et les Soler – nous est surtout connue grâce aux Recogniciones de 1274 et à la pétition de 1281, qui permettent de dresser un répertoire des familles tenant des fiefs nobles du roi-duc, à la fin du XIIIe siècle. On peut noter, cependant, que si les noms de sept des dix vassaux qui font hommage en 1274 ou ceux de leurs successeurs figurent dans la liste de 1281, trois autres n’y réapparaissent pas. Or, il est certain que leurs familles n’avaient pas entre-temps disparu, car on en retrouve des représentants tout au long du XIVe siècle. On relève d’autre part, dans la liste de 1281, les noms de quatorze nobles qui ne figurent pas dans les Recogniciones dont on mesure, au passage, le caractère très incomplet. On ne saurait, en effet, voir dans ces nobles des arrière-vassaux, car il est dit expressément qu’ils tiennent leurs terres du roi-duc. On arrive ainsi à un ensemble de vingt-quatre familles et encore plus de vassaux, tenant vers 1275 des fiefs nobles du roi, soit une moyenne de deux par paroisse pour l’ensemble du Pays de Born90.
Les hommages qu’ils prêtent ne diffèrent pas de ceux que l’on rencontre dans les autres parties du duché. Ainsi, en 1274, chaque vassal déclare tenir du roi-duc divers biens pour lesquels il verse une esporle, dont le caractère parfois pittoresque est essentiellement récognitif : Pierre de Montaner remet ainsi une lance pour l’ensemble de ses biens91, Gaillard de Lugaten en fait de même pour ses fiefs de Biscarrosse et Mézos92, ainsi qu’Amanieu du Puch pour la motte de Mirapeis93[93] ; quant à Amanieu de Lesgor, il doit apporter une lance ainsi que trois chandelles ardentes chacune du poids d’une livre placées, on ne sait trop comment, à la pointe de la lance94. Il peut arriver cependant que l’esporle soit en argent : Ispan d’Artigameira doit ainsi verser cinq sous pour son fief de Parentis95 et cinq autres avec Gaillard de Lugaten, Ispan de Sis et Vital d’Artigameira pour les biens qu’ils ont en indivis96. Ce n’est qu’après cet aveu que les nobles font, en principe, serment de fidélité et hommage97.
En échange de leurs fiefs les nobles du Born – à moins qu’ils n’y soient tenus par la coutume orale – n’étaient redevables de rien au roi-duc, sinon parfois du service militaire : Gaillard de Lugalen et ses parçonniers doivent un homme à pied d’ost pour leurs biens de Mimizan98 et P. de Montaner, un écuyer à cheval99, mais ils sont apparemment les seuls dans ce cas. Cela non plus n’a rien d’exceptionnel en Aquitaine.
Si l’on considère leur origine géographique, on peut distinguer deux groupes de détenteurs de fiefs nobles : le premier comprend neuf familles qui ne résident pas dans le Pays de Born et dont la plus grande partie du patrimoine se trouve ailleurs dans le duché. Leurs représentants à la fin du XIIIe siècle sont Jean de Grilly, Amanieu VII d’Albret, Garcie Arnaud, vicomte de Maremne, Gaillard de La Mote en Buch, G. B. et G. Furt d’Ornon, Hugues de Noaillan. Vivien de Saint-Martin, sans oublier Yolande del Soler et J. Colom. Sept de ces familles sont bordelaises et résident, soit dans la capitale du duché comme les Grilly, les Colom ou les Soler, soit en Cernès comme les Ornon et les Noaillan, soit en Buch, comme les La Mote ; trois landaises : les Maremne, les Saint-Martin et les Albret, encore que pour ceux-ci il soit difficile de les situer avec précision. La grande proportion de familles originaires du sud-est du Bordelais pourrait surprendre, mais on ne doit pas oublier que le pays de Born, pour être inséré au cœur des Landes, n’en appartenait pas moins au diocèse de Bordeaux.
Bien que nous ne connaissions que dans quatre cas les possessions de ces familles en Born, il se dégage de leur examen une impression contradictoire. Pour les Albret et les La Mote, qui n’étaient possessionnés respectivement qu’à Pontenx100 et Sanguinet et Biscarrosse101, leur patrimoine en Born devait se réduire à quelques tenures. En revanche, les Soler étaient sans aucun doute les plus importants seigneurs fonciers de tout le pays et il n’est qu’une seule paroisse, celle de Mimizan, dans laquelle ils ne sont pas présents102. Les possessions des Soler présentaient d’ailleurs deux autres caractères : dans toutes les paroisses les Soler étaient bas justiciers sur toutes leurs terres et dans cinq ils exerçaient, en outre, la haute justice ; d’autre part, tous leurs biens en Born dépendaient du château d’Uza, le seul château du Pays de Born sans doute digne de ce nom à la fin du XIIIe siècle103. Les Colom, de leur côté, possédaient dans les quatre paroisses de Mézos, Pontenx, Biscarrosse et Saint-Julien soixante-trois tenanciers et questaux, un moulin à Sintrosse, une nasse sur l’étang de Mimizan, enfin une maison noble et une pièce de terre à Aureilhan104. Ce n’était d’ailleurs là qu’une partie d’un ensemble foncier beaucoup plus vaste qui s’étendait aussi sur le pays de Brassenx. S’il n’est pas certain que les Colom soient originaires des Landes, il est probable en tout cas qu’ils avaient contracté des alliances dans cette région.
Les quinze autres familles se répartissent en deux groupes. Pour cinq d’entre elles, Ossoa ou Soa, Losinhan, Binhelas, Montquer, pour lesquelles nous n’avons retrouvé aucune trace, ni dans les Recogniciones, ni dans les Rôles Gascons, nous nous garderons de faire la moindre hypothèse en ce qui concerne leur origine géographique, bien qu’il y ait de fortes chances pour qu’elles soient landaises105. En revanche, les dix autres familles peuvent être considérées comme “indigènes” même si certaines d’entre elles, comme les Campet ou les Escoassa, ont pu venir s’établir à la suite d’alliances106. En plus des deux précédentes, il s’agit des familles d’Artigameira, de Lugaten, de Cis, de Hon, de Lesgor, de Montaner, de Moyssac et de Puch. À deux exceptions près107, toutes ont l’ensemble de leurs possessions situé en Born. Pour quatre d’entre elles, nous connaissons même de manière précise le lieu de leur résidence : il s’agit des Escoassa qui possèdent une maison (domus) à Sanguinet108, des Hon dont l’un des représentants, Pierre, reçut en 1255 l’autorisation de construire une maison (domus) à Saint-Paul109, des du Puch qui tenaient la motte de Mirapeis à Sainte-Eulalie110, enfin des Montaner qui possédaient la motte et la maison de Montaner111. Il est intéressant de noter que deux de ces nobles ont déclaré tenir une motte et que, sur l’une d’entre elles ou à proximité, Pierre de Montaner avait établi sa demeure. C’est là une indication précieuse sur l’habitat noble dans cette partie des Landes à la fin du XIIIe siècle.
| 1 ARTIGAMEIRA | Ispan d’ Vital d’ | (n° 691) | ||||
| 2 | BINHELAS | Raim. Arn. de | damoiseau | |||
| 3 CAMPET | Arn. Am. de | chevalier | (n° 692) | CAMPET | Arn. Am. de | chevalier |
| 4 CIS | Ispan de | (n° 691) | CIS | Arn. de seigneur de Bessanat | chevalier | |
| CIS | Am. de | damoiseau | ||||
| 5 ESCOASSA | Lombard d’ | damoiseau | (n° 693) | ESCOTISSA | Lombard d’ | damoiseau |
| 6 | GRILLY | Jean de | chevalier | |||
| 7 | HOY | Garcie Arn. de | damoiseau | |||
| 8 | LEBRET | Am. de | chevalier | |||
| 9 LESGOR | Am. de | damoiseau | (n° 682) | LESGOR | Am. de | damoiseau |
| 10 | LOSINHAN | Raim. de | damoiseau | |||
| 11 LUGATEN | Gaillard de | (n° 691) | LUGATEN | Agnès épse. de Gaill. de | damoiseau | |
| 12 | MAREMNE | Garc. Arn. | vicomte de | |||
| 13 MONTANEIR | Pierre de | damoiseau | (n° 694) | MONTANIER | Pierre de | – |
| – | Bern. Arn. de | |||||
| – | Bernot de | |||||
| 14 | MONTQUER | Arn. de | – | |||
| 15 MOYSAC | Seynoron de | chevalier | (n° 685) | MOYSSAS | Roland de | |
| MOTA | Gaillard de | – | ||||
| 16 | NOALHAN | Huguet de | ||||
| 17 | ORNON | Guill. Bern. d’ | chevalier | |||
| 18 | ORNON | Guill. Furt d’ | damoiseau | |||
| 19 | OSSOA | Guill. d’ | – | |||
| 20 PUCH | Aman. du | chevalier | (n° 688) | |||
| 21 | SAINT MARTIN | Vivien de | chevalier | |||
| 22 | TEY | Petronille deu |
Il n’existe pas à ce jour d’inventaire des mottes des pays landais. Mais avec une perspicacité qui l’honore, l’abbé A. Départ avait, à la fin du siècle dernier, signalé l’existence autour de l’étang d’Aureilhan, de mottes, dont certaines pourraient correspondre à celles qui nous sont connues par les textes. Les mottes dites Tucs de Houns, situées en bordure de l’étang d’Aureilhan, dans la commune actuelle de Saint-Paul, seraient-elles la forteresse primitive de la famille de Hon, ou bien faut-il y voir la maison forte dont Henri III autorisa la construction à Pierre de Hon en 1255 ?112 Même s’il y eut dans les pays landais, en raison de leur relatif isolement géographique, un décalage dans l’adoption des techniques nouvelles de construction, on ne saurait oublier combien sont fortes les contraintes du milieu sur le plan des matériaux. Nous ne nous risquerons donc pas à faire un choix entre les deux hypothèses. Les Tucs de Houns ne sont pas les seules mottes bordant l’étang d’Aureilhan. On en compte au moins quatre autres, dont deux jumelles : il s’agit tout d’abord dans la commune d’Aureilhan, sur la bordure méridionale de l’étang et donc au sud-ouest des précédentes de la motte de Castelnau et de celle de Lanty, distantes l’une de l’autre d’environ cinq cents mètres113. À la fin du XIXe siècle on pouvait en distinguer deux autres dans la paroisse de Saint-Paul, à l’est de l’étang, mais presque recouvertes par les eaux114. Il existe, enfin, au nord de l’étang cette fois, dans la paroisse de Sainte-Eulalie, au lieu-dit Laguirosse, d’autres mottes jumelles, qui étaient connues au siècle dernier sous le nom de Tucs du Castet115.
Peut-on identifier l’un ou l’autre de ces ensembles avec les résidences de certains des nobles qui firent hommage en 1274 et plus précisément avec les mottes de Montaner et de Mirapeis ? Celle de Mirapeis, située dans la paroisse de Saint-Eulalie et possession d’Amanieu du Puch, pourrait bien correspondre aux Tucs du Castet. Nous avons, d’autre part, relevé à propos de l’hommage de S. de Moyssac, l’existence d’un fief du Castet établi en partie dans la paroisse d’Aureilhan. L’une des deux mottes de Castelnau et de Lanty, sinon les deux, en dépendaient peut-être, mais on ne saurait l’affirmer. Le cas des Tucs de Houns mis à part, on reste donc dans le domaine des hypothèses et pour la motte de Montaner son identification est demeurée jusqu’à ce jour un rébus116. De toute façon, la présence de ces nombreuses mottes autour de l’étang d’Aureilhan prouve l’importance de cette région, au moins dès le XIe siècle, sinon auparavant ; elle témoigne aussi de l’ancienneté de l’aristocratie locale d’où est probablement issue la noblesse du XIIIe siècle117.
En raison du caractère laconique du contenu des hommages il est, par ailleurs, difficile d’apprécier la fortune foncière de ces petits seigneurs. Il n’y a rien à tirer d’une formule du type “tout ce qu’il a”118 et on n’est guère plus avancé avec les mentions de terres119, de maisons ou de bories120. En revanche, les homines121 dont il est question dans plusieurs hommages, sont certainement des questaux. Notons aussi la présence de padouens122 ou de pascua123, parfois celle de landes124, de bois125 ou de montagnes126. Les eaux127 associées à des “molas”, paroisse de Saint-Paul128, des “molinars”, paroisse de Parentis129 ou encore à des nasses comme à Mimizan130 apparaissent dans ces mêmes hommages. Notons, enfin, la présence de dîmes souvent dispersées dans plusieurs paroisses et tenues du roi-duc ou de l’archevêque de Bordeaux131. On ne saurait à partir d’aussi maigres renseignements tirer la moindre conclusion sur la composition des patrimoines encore moins sur leur importance.
Sur le plan géographique, la dispersion que nous avons déjà notée à propos des patrimoines des Colom et des Soler est assez fréquente : les possessions de S. de Moyssac sont aussi réparties dans six paroisses, de Gastes à Aureilhan en passant par Parentis, Pontenx, Sainte-Eulalie et Saint-Paul132, celles de Gaillard de Lugaten dans cinq situées d’une extrémité à l’autre du pays : Biscarrosse, Gastes, Parentis et Mézos plus Lüe en dehors des limites du Born133 ; celles de Lombard d’Ecoassa à Sanguinet, Parentis et Gastes, dans le nord du pays134. Par contre certains seigneurs ont, semble-t-il, tous leurs biens dans une seule paroisse : Arn. Am. de Campet à Parentis135, Am. de Lesgor à Saint-Michel de Bias136 et Arn. du Puch viguier de Mimizan à Sainte-Eulalie137. Il convient de toute façon d’écarter l’image d’une seigneurie dont la modestie aurait pour corollaire le regroupement. La dispersion, lorsqu’elle se produit, peut d’ailleurs s’expliquer, aussi bien par adjonction au patrimoine de biens d’origine matrimoniale que par l’exiguïté des terroirs cultivés. En revanche, elle ne s’accompagne pas, pour une seigneurie donnée, d’un phénomène de morcellement dans le cadre de chaque paroisse ; ainsi, les possessions de Lombard d’Escoassa, à Gastes et Parentis, se trouvent respectivement à Lacorcia et Auleys et seulement dans ces lieux dits, celles de S. de Moyssac au Sasterar, à Pontenx et à Ossa, à Saint-Paul.
On ne saurait, enfin, donner une image complète de la noblesse du Born sans évoquer les arrière-vassaux nobles du roi-duc, même si certains d’entre eux comme les Bordeaux, qui faisaient à l’origine hommage au vicomte de Tartas, étaient passés – du moins leurs successeurs, les Grilly – dans l’immédiateté ducale. En effet, certains vassaux directs du roi-duc avaient une partie de leurs biens dans la mouvance des Tartas-Soler : c’était le cas de Guillaume de Soa et du seigneur de Frambardin, pour les terres sur lesquelles se trouvaient leurs résidences138 ; de même Arn. Am. de Campet excepte de l’hommage au roi-duc l’affar de Mauborguet, dans la paroisse de Parentis, qu’il déclare tenir du vicomte de Tartas139. Mais nous ne savons rien de plus sur les fiefs et arrière-fiefs que les Tartas, puis les Soler, possédaient en Born et qui correspondent peut-être aux “cavalerias”, auxquelles il est fait allusion dans la sentence de 1269140. Les Colom de leur côté, détenaient dans la paroisse de Saint-Julien, où ils ne possédaient pourtant pas de tenures, la maison de La Casa, dont ils recevaient l’hommage d’Amanieu deu Forian, moyennant une lance de fer doré et une paire de gants à mouvance de seigneur141. Comparée aux dizaines de tenures possédées par ailleurs par les Colom dans les paroisses voisines, cette mention isolée laisserait penser qu’en dehors des domaines des Soler les arrière-vassaux n’étaient pas nombreux en Born.
À côté des nobles il convient de ranger sans aucun doute, les représentants du clergé ; indépendamment de leurs fonctions et des privilèges qui y étaient attachés, certains occupaient, grâce à leurs revenus, une place de tout premier plan dans les sociétés rurales.
Ce devait être en Born le cas du prieur de Mimizan qui, en tant que représentant de l’abbé de Saint-Sever, reconnaissait tenir du roi-duc, en plus du site du prieuré (sita) et des possessions qui y étaient rattachées à Mimizan même, la moitié de la dîme de Mimizan et de celle du Mont-Saint-Michel de Bias, au devoir de 5 sous d’esporle à mouvance de seigneur et d’un sergent pour l’ost142. Ce prieuré, comme ceux de Sainte-Eulalie et de Saint-Michel de Bias, était une possession de l’abbaye de Saint-Sever, mais on ignore si le prieur de Mimizan l’était aussi des deux autres143. L’origine de ces trois maisons remontait à la donation faite à la fin du Xe siècle à l’abbaye de Saint-Sever par le duc Guillaume Sanche des églises de Sainte-Marie de Mimizan et Sainte-Eulalie, et confirmée par ses fils Bernard Guillaume (vers 997-1009) et Sanche Guillaume (vers 1009-1032)144. C’est à cette dernière occasion qu’il est fait état, en plus de celle de l’église de Mimizan de la donation d’un vilain et de la frangitas du manse que tenait un clerc nommé Fort145.
Cette frangitas, dont on ignore en quoi elle consistait, fut-elle à l’origine de la sauveté de Mimizan ? Ce n’est pas impossible, mais on ne saurait en dire davantage. En tout cas, à la fin du XIIIe siècle, le prieur n’exerçait aucun droit sur les habitants de la sauveté entourant le prieuré ; ils étaient, en effet considérés comme des hommes francs du roi146. Cette situation devait se maintenir au lendemain du contrat de paréage conclu, en 1270, entre le prince Édouard et l’abbé de Saint-Sever, au terme duquel le prince faisait don à l’abbé des quinze livres de cens ainsi que des devoirs, gages et seigneuries que les habitants de Mimizan lui versaient à la Saint-Jean147. On ne saurait, en effet, voir dans cette disposition un quelconque signe de dépendance des habitants de Mimizan à l’égard de l’abbé ou de son représentant. Si, en 1270, les Mimizanais s’engagent à payer désormais les 15 livres à l’abbé, en 1274148, ils font hommage au roi-duc auquel ils reconnaissent devoir le cens annuel149 et, dans la version connue des coutumes de Mimizan qui datent de la première moitié du XIVe siècle, il est dit de manière explicite que c’est au nom de “nostres seigneur le roi d’Angleterre et duc de Guyenne” et en vertu du paréage que les habitants ont coutume de verser le cens à l’abbé150.
Le paréage de 1270 n’a donc eu pour les habitants aucune conséquence juridique : seul le cens a changé de destinataire.
D’autre part, contrairement à ce qu’aurait pu laisser croire la donation de 982-1009, l’abbé de Saint-Sever s’était vu contester par l’archevêque de Bordeaux le droit de présentation sur l’église de Mimizan : l’archevêque prétendait, en effet, que la moitié de l’église lui appartenait ; l’autre, disait-il, ayant été seule donnée par ses prédécesseurs au prieur. À la suite d’un accord conclu en 1122 il fut convenu que les chapelains désignés par l’abbé et les moines de Saint-Sever seraient présentés à l’archevêque pour confirmation et qu’ils participeraient aux synodes diocésains, en acquittant à Pâques le cens de trois sous151. D’autre part, à l’occasion de la visite de l’archevêque, le prieur était tenu de lui verser deux repas de cens152.
Le service de l’église était donc parfaitement distinct de celui du prieuré. Il allait ainsi se poser un problème, celui du logement du chapelain, qui ne fut définitivement réglé qu’eu 1288, lorsque, à la demande de Vital d’Arrast, alors chapelain de Mimizan, Édouard Ier fit don d’une place située à côté de l’église, appelée placea regalis, afin que le chapelain et ses successeurs pussent y construire une demeure et en jouir librement aussi longtemps qu’ils seraient chargés du service de la paroisse ; en revanche, il leur était interdit, sous peine de confiscation, d’utiliser cet emplacement à quelque autre destination que ce soit153.
On sait en définitive peu de choses sur la nature et l’importance des biens du prieuré à la fin du XIIIe siècle. Au milieu du siècle suivant ses revenus étaient taxés par l’archevêché sur la base de 120 livres, ce qui équivalait à trois fois les revenus du curé de Parentis, le plus aisé des chapelains du pays154. Une partie de ces revenus provenait de la moitié des dîmes de Mimizan et Bias, parmi ou à côté desquelles figuraient peut-être celles de deux nasses cédées, l’une entre 1130 et 1136 par le duc Guillaume X, l’autre, plus tard, par Pierre de Bordeaux, fils de Guillaume Prévôt155. L’autre moitié des dîmes était inféodée à plusieurs habitants de Mimizan, qui en détenaient les trois quarts du roi-duc et le reste de l’abbé de Saint-Sever156. Aux termes de l’accord intervenu en 1122 entre l’archevêque de Bordeaux et l’abbé de Saint-Sever, le prieur de Mimizan devait pour cette part verser chaque année la somme de 30 sous à l’archevêque157. Le reste des revenus du prieuré devait être constitué par d’autres dîmes, telle que celle qu’il percevait sur cinq casals à Sorrèle, ainsi que par des cens158.
Ce que nous savons des autres représentants du clergé en Born et de leurs possessions se réduit à quelques mentions. Hospitaliers et peut-être aussi Templiers y détenaient probablement, dès cette époque, les droits qui relevaient au XVIIIe siècle de la commanderie de Bordeaux et qui se trouvaient répartis dans plusieurs paroisses : dans le quartier de Poms à Parentis, celui de Leich à Saint-Paul, celui de Jessis à Sainte-Eulalie, celui du Burgau à Pontenx et enfin, à Contis, dans Notre-Dame de Lit en Marensin159. Il ne reste malheureusement aucun document antérieur à 1300 qui puisse nous renseigner sur l’importance et la géographie de ces biens à la fin du XIIIe siècle160. Rappelons seulement qu’à la suite de la reprise en main du castrum d’Uza par le vicomte de Tartas, un de ses chevaliers, qui avait reçu un certain nombre de terrains à bâtir dans le bourg, en avait fait don aux Templiers dans le cadre d’un échange, mais on n’en entend plus parler par la suite161. On se souvient aussi de l’enquête faite, peu avant 1269, par Gaston VII de Béarn, pour s’informer des droits du vicomte de Tartas en Born : or, à cette occasion, il prit soin d’interroger les Templiers et les Hospitaliers du pays de Born, preuve de l’ancienneté de leurs établissements dans la région162. Ce sont les seuls témoignages sur les ordres militaires que nous ayons pu recueillir pour le XIIIe siècle.
Les Recogniciones nous font, en revanche, connaître l’origine des droits que l’Hôpital de Roncevaux puis l’évêque de Bayonne possédèrent jusqu’à la fin du XVIIIe siècle à Arbenhac dans Saint-Julien : il s’agit d’un don fait par Amanieu du Puch, viguier de Mimizan, peu de temps avant 1274, moyennant le paiement par l’Hôpital de Roncevaux d’une esporle d’un capellus de Pampelune au roi-duc163. Nous ne saurions terminer cette brève évocation du clergé et de ses possessions sans mentionner les onze chapelains du pays de Born ; mais ce n’est que vers le milieu du XIVe siècle que l’on commence à avoir quelques renseignements sur eux164.
À un niveau inférieur de l’échelle sociale se trouvent les hommes libres non nobles, mais tenants directs du roi-duc. L’imprécision des documents ne permet pas de savoir s’ils constituent un ensemble homogène. Le groupe le plus important est, en tout cas, celui des hommes francs (homines francales), membres de la communauté de Mimizan165. Arnaud de Lasperon ainsi que Pierre, Bernard et Vital de Las Hodias, qui détiennent des terras francales doivent aussi en faire partie166. En revanche, même, verrons-nous, s’il est probable qu’ils s’y rattachent eux aussi, nous ignorons la qualité des membres de la famille du Hasar possessionnés à Bias167 ou encore celle de Guillaume Raimond de Monos et de ses parçonniers qui détiennent la “joglaria” de Mimizan168. S’il existe, entre ces divers tenants directs du roi, des différences sur le plan des personnes, elles doivent être minimes et résulter de l’appartenance ou non à la communauté de Mimizan. En revanche, leurs tenures présentent entre elles un certain nombre de points communs qui permet de les distinguer des fiefs nobles.
Leurs détenteurs peuvent prêter, comme les possesseurs de fiefs nobles du Born, hommage et fidélité169 ; cependant alors que pour les fiefs nobles le vassal, qu’il soit ou non noble paie seulement une esporle à mouvance de seigneur ou de vassal, les hommes libres, en revanche, versent pour leur tenure comme ils le feraient pour une censive, un cens annuel : 14 d. bord. pour les possessions des Hasar à Bias170, 5 sous pour chacune des maisons détenues par les Lasperon et les Las Hodias dans cette même paroisse171, mais 300 sous morlans pour l’ensemble des biens de la communauté de Mimizan172. Il peut arriver aussi que le cens soit en nature, comme celui que versent à l’Assomption G. R. de Monos et ses parçonniers : un épervier dressé ou 10 livres de cire173.
Un second trait de ces tenures est constitué par le caractère collectif de la reconnaissance : il peut s’agir de personnes appartenant à la même famille comme c’est le cas pour les Hasar174, ou bien ayant des liens de parenté comme les Lasperon et les frères de Las Hodias175 ou même d’une communauté plus vaste comme celle des hommes francs de Mimizan176.
En ce qui concerne la nature, l’importance et la géographie des biens qui les constituent, il convient de faire deux remarques : notons tout d’abord qu’il s’agit toujours d’ensembles relativement vastes. Pour les hommes de Mimizan, la tenure correspond à la “ville” avec tout ce qui s’y trouve, mais aussi avec des dépendances au dehors ; les Hasar reconnaissent de leur côté détenir deux boeries et un moliar177, les Monos des hommes en nombre indéterminé, ce qui implique l’existence de plusieurs exploitations178. En plus des boeries et des moulins, on relève aussi la présence de vignes et de padouens, de nasses179, de dîmes180 et même de droits qui ne sont pas de nature foncière : ainsi, le droit de costage dont jouissent les hommes de Mimizan181 ou encore celui de percevoir une marmite par chariot ainsi que le quart des sommes données aux jongleurs pour les détenteurs de la jonglerie de Mimizan182. Notons, enfin, que toutes ces possessions se trouvent situées, soit dans la paroisse de Mimizan, soit dans son annexe de Bias. Cela ne résulte certainement pas d’un hasard et, même si à la fin du XIIIe siècle, tous les hommes libres tenants directs du roi-duc en Born n’appartiennent pas à la communauté de Mimizan, il y a de fortes chances pour que leur présence soit à mettre en relation avec l’existence de la sauveté. Pour les francales de Mimizan, en tout cas, la chose ne semble faire aucun doute.
C’est, avons-nous vu, entre 1009 et 1032, à l’occasion de la confirmation par le duc Guillaume Sanche de la donation de l’église de Mimizan à l’abbaye de Saint-Sever, qu’il est pour la première fois question de la frangitas d’un manse que tenait un clerc du nom de Fort183. On ne saurait affirmer qu’il s’agit là de l’acte de fondation de la sauveté, mais celle-ci ne saurait être postérieure au tout début du XIIe siècle184 et il est certain, par ailleurs, que son existence doit être rattachée à celle du prieuré. Ce n’est cependant qu’à la fin du XIIIe siècle, en 1270, qu’il est pour la première fois question de la salvitas de Mimizan, qui appartenait alors au roi-duc185. Il se serait donc produit au cours du XIIe siècle, sinon plus tard, un changement dans la situation de la sauveté, dont les habitants auraient alors échappé à la tutelle du prieur ; mais on ignore tout des circonstances dans lesquelles cette mutation se produisit et qui en fut le bénéficiaire. Les habitants passèrent-ils d’emblée sous la protection du roi-duc ou bien furent-ils auparavant sujets du vicomte de Dax ? Cette question est étroitement liée aux vicissitudes de l’histoire du Pays de Born au XIIe et au début du XIIIe siècle ; or nous l’avons vu, nous sommes dans ce domaine, réduits à de fragiles hypothèses. On pourrait, certes, rappeler qu’en 1269 Gaston VII de Béarn avait ordonné la restitution au vicomte de Tartas de ses hommes “francaus”, en même temps que de la justice de Mimizan. Pourquoi, dans ces conditions, ne pas voir dans ces “francaus” les hommes qui, en 1274, font hommage au roi-duc ? L’hypothèse est séduisante, mais elle se heurte à plusieurs objections. Si, en 1130-1136, il est seulement question du populus de Mimizan186, en 1255, Henri III s’adresse aux “hommes de Mimizan qui paient quinze livres de cens”187 qui l’ont aidé sur le plan financier. D’autre part, en 1270, donc un an après la sentence de Gaston de Béarn, le Prince concluait avec l’abbé de Saint-Sever un contrat de paréage, dans lequel la cession des droits du roi-duc – au moins en ce qui concerne le cens – constituait un des articles essentiels. La chose eût-elle été possible si, au même moment, ces droits avaient dû faire retour au vicomte de Tartas ? Certainement pas. Il est donc probable que le lien qui unissait les hommes francs de Mimizan au roi-duc remontait fort loin. Il n’est pas inutile, à ce propos de rappeler l’ancienneté et la permanence des droits du roi-duc sur Mimizan, depuis la donation à l’abbaye de Saint-Sever à la fin du Xe siècle jusqu’à l’hommage du prieur en 1274. S’il n’est pas impossible, après tout, que les droits du roi-duc sur Mimizan aient été concernés par les conflits qui opposèrent Henri III puis Édouard Ier aux vicomtes de Tartas, ils restèrent ou revinrent vite entre ses mains. Ceci dit, le problème de l’origine des hommes francs de Mimizan, aussi bien d’ailleurs que celle des autres hommes libres tenants directs, reste entier. Et que penser des “francaus” du vicomte de Tartas dont on ne connaît que l’existence ?188
À la fin du XIIIe siècle les hommes francs de Mimizan constituaient en tout cas une communauté bien organisée, puisque c’est en son nom qu’en 1274, trois de ses représentants firent hommage au roi-duc189. D’autre part, en 1288, Édouard Ier cédait aux “bourgeois et habitants de sa ville de Mimizan” la montagne de Bias, au devoir d’une lance d’esporle à seigneur mouvant190. La communauté disposait alors de bons usages et de bonnes coutumes, qui ne nous sont connus que par une version de la fin du XIVe siècle, mais qui sont beaucoup plus anciens191.
Indépendamment des articles écrits, les coutumes comportaient une partie orale, à laquelle il est fait allusion dans le dernier article. On ne peut que le regretter, car de nombreux aspects de la vie de la communauté nous échappent ainsi. On ignore, en particulier, de quelle manière on en devenait membre : l’entrée était-elle liée à la résidence à l’intérieur des croix ou à l’achat de biens dans ces mêmes limites ? Le privilège de sauveté était certes précisé dans les coutumes et le représentant du roi ne pouvait rien à l’encontre de quiconque était venu y chercher refuge192 ; mais nous sommes ici en présence d’un cas limite.
À la tête de la communauté se trouvaient des personnes que la coutume qualifie de “jurés ou depputés”193 : nous en connaissons trois, à l’occasion de l’hommage de 1274194. En revanche en 1359, lors du partage des biens du monastère de Saint-Sever, il est fait état de “jurats et consuls”195 ; on ne sait s’il faut voir dans cette dénomination nouvelle une erreur de terminologie de la part d’un moine mal informé ou une véritable évolution des institutions. Ces jurés et députés étaient probablement dépositaires du sceau de la communauté196 et c’est sur leur initiative que, le cas échéant, de nouveaux établissements étaient décidés197. C’est de leur compétence que devaient relever aussi les mesures de police concernant la vente des poissons ou celle du vin ou du blé198.
Les privilèges généraux dont bénéficiaient les membres de la communauté étaient de deux sortes : les uns, d’ordre judiciaire et militaire, avaient un caractère personnel, les autres concernaient les biens des habitants.
Sur le plan judiciaire, les articles de la coutume protégeaient les habitants de plaintes abusives et les inculpés, des emprisonnements préventifs, sauf pour affaire criminelle, ou bien de leur transfert hors de Mimizan avant tout jugement. Ils donnaient aussi au condamné la possibilité de faire appel de la cour de Mimizan à celle de Bordeaux199.
En ce qui concerne le service militaire, la coutume précisait que les habitants de Mimizan ne devaient faire en aucune façon ost ni chevauchée, ni aller hors du dex et des limites du territoire200. Elles précisaient même que ce service n’avait été jamais rendu. Le privilège était certainement fort ancien, mais il ne paraît pas avoir été toujours respecté. Ainsi, en 1273, à l’occasion d’un nouveau conflit qui l’opposait à Gaston VII de Béarn, Édouard Ier se fit octroyer 200 livres angevines des bourgeois et de la communauté de Mimizan, qui prétendaient ne pas devoir le service d’ost. Certes, le 15 décembre, il les assurait que cette contribution resterait exceptionnelle, si comme ils le prétendaient, leurs coutumes les exemptaient effectivement de ce service ; il n’empêche que le roi-duc en prenait à son aise avec les “libertés” locales201. Notons aussi que les coutumes spécifiaient que le roi-duc ne pouvait rien demander à un habitant qui pût mettre sa vie en danger202.
À ces privilèges qui touchaient aux personnes s’en ajoutaient d’autres concernant les biens et droits d’usage. Il s’agit tout d’abord de la possibilité pour les habitants de vendre ou d’acheter des maisons, terres, rentes ou autres biens-fonds sans payer de taxe de mutation203. D’autre part, moyennant le paiement collectif des 15 livres annuelles, les membres de la communauté étaient exonérés de toute redevance de caractère foncier, corvée et autres subsides à l’égard du roi-duc204[. Le roi-duc n’hésitait pas cependant à faire éventuellement appel à la “générosité” de ses hommes francs, comme ce fut le cas en 1255205.
Il se pose d’ailleurs, un problème assez délicat en ce qui concerne la situation géographique des biens intéressés par le cens de 15 livres. D’après l’hommage de 1274, les hommes de Mimizan reconnaissaient tenir “la ville de Mimizan, à savoir maisons, terres cultes et incultes, vignes et autres biens appartenant à la dite ville dedans et dehors (intus et extra) appartenant aux dits hommes, avec les padouens, eaux, nasses et caste qu’ils y possèdent”206. Quant à la coutume, elle cite “nos personnes, toutes nos terres, hostels, maysons et toutes nos autres causes, montaignes, bascatges, landes et rivières en nostre coste de la mer et les eaulx courans et non courans, estangs et toutes choses venaisons (?), qui sont dedans les limites, en eaulx et en terres”207. Ainsi qu’on peut le constater, ces déclarations ne brillent pas par leur clarté. Deux faits paraissent en tout cas bien établis : d’une part, les seuls biens concernés par la franchise sont ceux possédés par les membres de la communauté, de l’autre, ces biens sont situés, soit au-dedans, soit au dehors de la ville de Mimizan, dont ils constituent des dépendances bien délimitées par ailleurs.
Le premier problème qui se pose est celui de la définition de la ville. Lors du paréage de 1270, il est question tantôt de la “saubetad et de la villa”, tantôt de la “saubetad de la villa”208. De la ville seule il en est fait mention, en plus de l’aveu de 1274209, dans la concession royale de 1288, octroyée “aux bourgeois et habitants de la ville”210, ainsi que dans un article des coutumes qui se rapporte aux “négoces de la ville et gens de Mimizan”211. En revanche, le terme de sauveté n’apparaît jamais seul et nous n’avons relevé qu’une mention des croix dans l’article des coutumes relatif au droit de sauveté dont ne peuvent bénéficier que ceux ayant commis un délit “fors des decs et limites de Mimizan”212. Compte tenu de ces diverses données, nous inclinerions à identifier la ville au sens juridique avec la sauveté même si, du point de vue territorial la sauveté délimitée par les croix était beaucoup plus vaste que la ville, considérée sous l’angle de l’habitat : la ville de Mimizan devait à cet égard se réduire à un petit groupe de maisons aux alentours du prieuré.
Il est bien évident que toutes les terres et vignes et, à plus forte raison les montagnes, landes, bois et padouens, aussi bien que les eaux courantes et nasses, n’étaient pas situés à l’intérieur de la ville-sauveté. Mais pour être extra villam, jusqu’où, s’étendaient-ils ? Ici intervient, nous semble-t-il, la notion de dex et limites, c’est-à-dire celle de détroit ou juridiction, évoqués dans les coutumes, aussi bien à propos du droit de sauveté que du service militaire ou du “cot” sur le vin et le grain, qui est établi “en ladite ville, decs et limites d’icelle”213. Ces limites devaient englober la paroisse de Mimizan – plus vaste que la sauveté et peut-être une partie de celle de Saint-Michel de Bias, dans laquelle la communauté possédait depuis 1288, la montagne du même nom que lui avait rétrocédée le roi-duc214.
Il convient de noter cependant, que la communauté, en tant que telle, que ce soit à l’intérieur de la ville-sauveté ou dans le dex, n’était pas seule maîtresse du sol. Le roi-duc lui-même, le prieur de Mimizan, mais aussi des nobles tels les Cis, les Ligauten ou les Artigameira, des hommes libres tenants directs comme les Monos ou les Lasperon y possédaient aussi des biens en propre dont des tenures aux mains de questaux et des droits d’usage215. La situation devait être identique en ce qui concerne les droits d’usage sur les eaux, qu’il s’agisse de l’étang ou du courant. Si les membres de la communauté pouvaient disposer de nasses, ils n’étaient pas les seuls : le roi-duc en personne, la famille de Bordeaux, dont les Grilly étaient les héritiers, en possédaient aussi216 et le roi-duc s’était semble-t-il, réservé le droit de concéder la construction de moulins, comme en témoigne l’autorisation donnée, en 1281, à P. Assalhit de Podensac d’en établir un sur le courant217.
Les droits de la communauté dépassaient enfin, dans un domaine précis, les limites du dex. Il s’agissait du droit de costage, auquel sont consacrés plusieurs articles des coutumes218. Ce droit qui appartenait, à l’origine, aux vicomtes de Tartas était définitivement revenu au roi-duc, en 1315. Mais il est assez difficile d’admettre que les habitants de Mimizan n’aient pu en jouir auparavant ; sans doute la part revenant désormais au roi-duc était-elle celle qui naguère appartenait au vicomte. Les habitants de Mimizan avaient, en effet, la possibilité de s’emparer de toute épave trouvée le long des côtes du Born, du soleil levant au soleil couchant, en réservant cependant, le tiers de la découverte au roi, sous réserve, bien sûr, qu’il n’y eût pas de réclamation venant d’un sujet du roi. Mais cette disposition générale et avantageuse pour l’inventeur était très sensiblement corrigée sinon modifiée par les sept articles suivants. D’une façon générale, quand l’objet trouvé était de peu de valeur – une robe, un tonneau vide, une corde, une pièce de bois, une pièce de tissu commencée, une épave de navire brisée – l’inventeur le conservait pour lui ; mais s’il s’agissait de pièces de drap ou d’un tonneau de vin, le seigneur se les réservait, l’inventeur ayant seulement la possibilité de se tailler une robe dans le premier cas, de conserver le tonneau vide ou de recevoir cinq sous et de boire raisonnablement dans le second ! Enfin, en ce qui concerne les dauphins, créacs et autres poissons, l’inventeur les conservait pour lui, sauf pour les baleines219. Le tiers des droits revenait à l’œuvre de l’église de Mimizan, mais on ignore si cette disposition concernait l’ensemble des articles ou seulement celui se rapportant aux poissons et cétacés. Cette réglementation est d’une façon générale beaucoup plus simple que celle de la Maremne, la mieux connue de toute la côte landaise qui, dans l’ensemble, paraît plus avantageuse pour les habitants, du moins en ce qui concerne les épaves abandonnées220.
Nobles, membres du clergé, hommes libres tenants directs constituaient à des degrés divers les notables du pays de Born en cette fin du XIIIe siècle. Même en tenant compte de la communauté de Mimizan, ils étaient certainement loin de représenter la majorité de la population qui, pour l’essentiel, devait être constituée de tenanciers libres et de questaux, la distinction entre les deux n’étant pas toujours facile.
Parfois les questaux sont désignés sous le nom de questales et, dans ce cas, aucun doute n’est possible : ainsi, en 1269, à l’occasion de la restitution des biens au vicomte de Tartas, est-il question des hommes “questaus et francaus”221 ; de même en 1280 Édouard Ier reçoit-il du vicomte de Tartas la saisine des homines questales qui lui avaient fait aveu222. Bien que le terme soit plus imprécis, ce sont sans aucun doute des questaux qui sont désignés sous le vocable homines dans le conflit qui, en 1291, opposa Senheron de Mauriet au bailli de Born223 ou encore dans les aveux faits par P. Montaner ou Lombard d’Escoassa224. Ces homines se retrouvent sous la rubrique “homes et homias” dans le contrat de la vente faite par Amanieu d’Albret, seigneur de Langoiran, à son cousin Bernard Aiz, des biens des Colom en Born : il y est ainsi question des “homes, homias questauxs” et d’“affeuatz”225. Si l’opposition entre questaux et tenanciers libres est dans cette formule parfaitement claire, il n’en est plus de même malheureusement dans le détail donné pour chacune des paroisses de Mézos, Saint-Julien, Pontenx et Biscarrosse. Sous la rubrique “bens et causas” ou bien “homes, homias, bens et causas”, on relève, en effet, tantôt des noms de personnes tels que “P. de Sorbets, B. de Sorbets…” tantôt la formule “ostau et borie de…”. On ne saurait en conclure que les premiers cités étaient tous des questaux même si cela est vraisemblable et que les autres étaient des tenanciers libres. Nous inclinerions d’ailleurs à penser que la plupart des personnes citées étaient des questaux : dans une même famille certains des représentants sont, en effet, présentés sous leur seul nom et d’autres avec la mention “ostau et boria”. Tel est le cas par exemple des Santrossa de la paroisse de Pontenx, dont sept représentants sont mentionnés par leur seul nom, et deux autres, en tant que détenteurs d’une “boria”. D’autre part, il est intéressant de noter qu’il existait encore au XVIIIe siècle et que l’on retrouve encore de nos jours des toponymes qui étaient au milieu du XIVe siècle des patronymes portés par des questaux ou des tenanciers des Colom : ainsi Santrossa et Capas situés respectivement dans les communes de Pontenx et de Mézos et Hilh – pour Filh – dans celle de Biscarrosse ; mais il serait hasardeux de vouloir en tirer des conclusions sur la géographie du peuplement et encore moins en ce qui concerne sa densité.
Parmi les tenanciers du Born, une communauté devait occuper encore une place privilégiée à la fin du XIIIe siècle : il s’agit de celle constituée par les habitants d’Uza. On se souvient que le castrum d’Uza avait été fondé et peuplé par Richard Cœur de Lion, puis concédé au vicomte de Tartas qui s’en était pris aux habitants. À nouveau fortifié, clos et repeuplé par Simon de Montfort, il était une nouvelle fois repassé aux mains des Tartas, puis des Soler. Bien qu’il soit sans doute contemporain du château, le bourg n’est attesté pour la première fois qu’à l’occasion de la requête adressée par les habitants à Henri III (castrum et vicus) vers 1250, puis, lors de la sentence arbitrale de Gaston de Béarn en faveur des Soler (“lo castet de Uzar ab lo borg”) en 1278, enfin, au moment de la cession à Édouard Ier par le vicomte de Tartas en 1281 (burgus de Huzar)226.
Si l’on en croit les déclarations faites vers le milieu du XIIIe siècle par les habitants, le roi Richard aurait concédé à leurs ancêtres des coutumes dont ils demandèrent alors confirmation. Malgré les vicissitudes que put connaître le bourg tout au long du XIIIe siècle, il n’est pas du tout impossible que ces coutumes aient été encore en vigueur vers 1300. C’est en tout cas ce que laisse supposer un passage de l’accord conclu en 1315, entre le roi-duc et Yolande del Soler. En effet, il y est explicitement question du vicus (le bourg) et de la vicinalis d’Uza. Or par vicinalis il faut sans doute entendre le territoire, à l’intérieur duquel on peut jouir du droit de bourgeoisie. Seule la charte de coutume aurait pu nous indiquer en quoi il consistait et de quelle façon on pouvait en bénéficier. Les nouveaux venus devaient recevoir un emplacement à bâtir, une de ces mansiones auxquelles il est fait allusion dans la requête des habitants à Henri III. Mais que faut-il voir au juste dans les probi homines qui s’adressent à lui ? S’agit-il, de simples bourgeois d’Uza ou bien, d’administrateurs délégués par la communauté ? Si l’on se réfère aux documents concernant les regions voisines, la première hypothèse serait la plus vraisemblable. Il est bien regrettable que l’on n’en sache pas davantage sur le castelnau d’Uza, car il constitue un exemple unique, dans cette partie de la lande, de castelnau royal et il eût été du plus grand intérêt de pouvoir comparer les avantages respectifs des francales de Mimizan et des probi homines d’Uza. Au terme de cette évocation, une question se pose : les structures sociales du Pays de Born, à la fin du XIIIe siècle, étaient-elles identiques à celles des pays voisins ou bien en différaient-elles et en quoi ? Le problème n’est ni simple ni gratuit, car le Pays de Born, pays bordelais sur le plan administratif, religieux et coutumier, n’en était pas moins par son milieu naturel et sa situation une terre landaise. Pour savoir ce qui fut déterminant, du milieu ou des hommes, dans l’organisation sociale du pays au cours des XIIe et XIIIe siècles, il faudrait pouvoir se référer aux régions voisines, au Bordelais et au Bazadais d’une part, au Marsan, à la Chalosse et aux autres pays landais, ceux de la Grande lande et du littoral, de l’autre. Malheureusement si l’on possède quelque lueur sur la société du Bordelais, il n’en est pas de même pour l’ensemble des pays landais. Il vaut mieux, dans ces conditions, renoncer pour l’instant à une étude comparative qui ne pourrait déboucher que sur des conclusions fragiles et peut-être erronées.
Notes
- Ces sources sont constituées par : Dom P. du Buisson, Historiae monasterii S. Severii, 1876, 2 vol. ; Ch. Bémont, Recueil d’actes relatifs à l’administration des rois d’Angleterre en Guyenne au XIIIesiècle. Recogniciones feodorum in Aquitania, Paris, 1914 ; Rôles gascons, t. I (1244-1254), publ. par Fr. Michel, 1885 ; t. I Suppl., 1254-1255 ; t. II (1273-1290), t. III (1290-1307) 1896, 1906 ; publ. par Ch. Bémont ; t. IV (1307-1317), 1962, publ. par Y. Renouard. Les coutumes de Mimizan ont été publiées dans Compte rendu des Travaux de la Commission des Monuments et Documents historiques de la Gironde (CRCMH), 1851, p. 45-56 (il s’agit d’une confirmation, faite en 1463 des coutumes de Mimizan, ainsi que de trois actes datant de 1273, 1288 et 1365 concernant Mimizan) ; documents du Trésor des chartes d’Albret, conservés aux Arch. dép. des Pyrénées-Atlantiques. – La principale étude consacrée au Pays de Born ne concerne en fait que Mimizan et ses environs. Il s’agit de l’article de l’abbé A. Départ, Mimizan. Notice historique, dans Bull. Soc. Borda, 1883-1886.
- Dans Arch. hist. Gironde, t. XVIV, p. 5.
- Recogniciones feodorum…, n° 693. Nous utiliserons désormais l’abréviation RF pour désigner cet ouvrage.
- RF, n° 691.
- RF, n° 695.
- RF, n° 691.
- RF, n° 685.
- Ibid.
- RF, n° 690, 691.
- RF, n° 694. Dans cet acte il n’est pas question de padouens, mais on ne sait de quelle façon il convient d’interpréter les termes pascua et landa ; désignent-ils uniquement des padouens ou bien supposent-ils une appropriation par le seigneur de Montaner ? À partir d’un document isolé, il est difficile de faire un choix entre ces deux hypothèses.
- RF, n° 691.
- RF, n° 685.
- RF, n° 685.
- RF, n° 694.
- RF, n° 417, 691. Voir abbé A. Départ, art. cit., 1886, p. 202-203.
- RF, n° 693.
- RF, n° 691.
- RF, n° 685.
- RF, n° 691.
- RF, n° 691.
- Dom du Buisson, ouvr. cité, t. II, p. 198 ; Abbé A. Départ, art. cité, 1884, p. 190.
- RG, t. II, n° 495 ; Abbé A. Départ, art. cité, 1886, p. 207-208, d’après AHG, t. VII, p. 35.
- RF, n° 691, 495.
- RF, n° 691.
- RF, n° 685.
- RF, n° 681.
- Voir n. 22.
- Une étude d’ensemble de ces phénomènes à l’époque historique serait souhaitable, car ils conditionnent, pour une part, les recherches sur l’occupation du sol dans cette région.
- v
- Ibid., p. 146-148.
- On peut se reporter à l’étude récente de Cl. Richir, Tracé de la voie romaine de Lamothe à Biscarrosse, dans Bull. Soc. Borda, 1975, p. 273-287, suivi d’une abondante bibliographie.
- Voir plus bas.
- Voir plus bas.
- RF, n° 687.
- RF, n° 693.
- RF, n° 685.
- RF, n° 688.
- RF, n° 690, 691, 693, voir n. 54.
- RF, n° 692.
- Par exemple : boeria de Guillelmo Bos (RF, n° 691).
- Ibid. : boeria Marsiemale.
- On peut évoquer ici les multiples exemples contenus dans le contrat de vente par Amanieu d’Albret, seigneur de Langoiran, à Bernard Aiz d’Albret, des biens des Colom en Born : “ostau e borie de Giraud de Capas ; ostau e borie Bernard deu Luc” (Arch. dép. Pyr.-Atl., E 225) ou encore celui contenu dans l’hommage des Hasar : boeria Marsiemale et domo sita desuper (RF, n° 681).
- Les prévôtés, à l’origine simples postes militaires, puis territoires définis dont la gestion administrative, financière et judiciaire, était confiée à un prévôt ou bailli furent développées par Henri III à l’occasion du voyage qu’il fit en Aquitaine (1254-1255). Voir J.-P. Trabut-Cussac, L’administration anglaise en Gascogne sous Henry III et Édouard Ier de 1254 à 1307, Paris, 1972, p. 195, 196.
- RF, n° 688. Le montant de cette somme est identique à celui du cens annuel que les hommes francs de Mimizan versaient au roi-duc, puis à l’abbé de Saint-Sever.
- RF, n° 683.
- Art. 1, 18, 20, 22.
- Art. 21.
- J.-P. Trabut-Cussac, ouvr. cité, p. 353.
- Ibid., p. 347, 353. En 1281, Édouard Ier l’avait autorisé à construire un moulin sur le courant de Mimizan (Voir ante, n. 22).
- Ibid., p. 360. Voir AHG, t. XLV, p. 183.
- Ibid., p. 354. En 1311, il est plusieurs fois question d’une baillie de Labouheyre, Born et Mimizan (Voir RG, t. IV, n° 470, 471, 499). – B. Brana est qualifié en 1305 de “seigneur de la mote de Villeneuve de par sa femme”. Il s’agit de la motte de Villenave en Brassenx (cant. de Tartas, Landes). Voir J. P. Trabut-Cussac, ouvr. cité, p. 127, n. 94.
- Sur toute cette affaire voir RG, t. III, n° 4995 et t. IV, n° 146, 221, 424, 470, 471, 473, 499, 501.
- Le château et la prévôté de La Réole sont en 1287, accensés 400 l. bord., la prévôté de La Linde 350 l. pér. (Voir J. P. Trabut-Cussac, ouvr. cité, p. 201-202).
- RF, n° 682, 688, 695, 686, 690.
- RF, n° 690, 691. Les détenteurs en sont R. Brun et Gaillard de Lugaten et ses parçonniers de Mimizan qui déclarent aussi détenir en alleu le bois de Casa à Lugaten, paroisse de Luë (cant. de Sabres, Landes). La paroisse dans laquelle se trouve l’affar de Lacorcia n’est pas indiquée, mais nous savons par ailleurs qu’il s’agit d’un lieu-dit de la paroisse d’Ussera ou Gastes (Voir RF, n° 693). R. Boutruche (Une société provinciale en lutte contre le régime féodal. L’alleu en Bordelais et en Bazadais du XIe au XVIIIe siècle, Rodez, 1947) n’a pas signalé cet alleu.
- J. B. Marquette, Les Albret. L’ascension d’un lignage gascon, (1240-1360), 1972, ex. dactyl., p. 531-532.
- Il s’agit : du prieur de Mimizan, qui déclare n’avoir rien aliéné mais qui a cru comprendre que ses prédécesseurs ne s’étaient pas comportés de même et s’efforce de recouvrer ces biens, à ses yeux abusivement aliénés (RF, n° 685) ; de certains membres de la communauté de Mimizan (RF, n° 690) ; enfin, d’Amanieu du Puch, qui a donné à l’Hôpital de Ronceveaux sa terre d’Arbenhac à Saint-Julien, mais la terre reste dans la mouvance du roi-duc (RF, n° 688). Cette stabilité est d’ailleurs générale en Aquitaine.
- Shirley, Royal Letters, t. II, London, 1866, n° CCCCXII, p. 57-59. Tout l’exposé qui suit est tiré de cette requête.
- A. Richard, Histoire des comtes de Poitou, 1903, t. II, p. 188, 196.
- Allusion probablement au ralliement du vicomte de Tartas à Alfonse VIII de Castille, en 1204. Voir Bordeaux sous les rois d’Angleterre sous la direction de Y. Renouard, 1965, p. 25 (Histoire de Bordeaux). Voir tableau I.
- Les relations entre le roi-duc et le vicomte de Tartas sont attestées par divers documents : Patent Rolls of the reign of Henry III, ann. 1225-1232, p. 503 (1232) ; RG, t. I, n° 159, 596, 819 (1242). On remarquera cependant qu’il s’agit là de notifications ou de convocations de caractère général ; on ne saurait, dans ces conditions, les interpréter comme des témoignages de la bonne qualité des rapports existants entre le roi et le vicomte.
- Ch. Bémont, Simon de Montfort comte de Leicester, son gouvernement en Gascogne, dans Revue historique, t. IV, 1877, p. 2 et suiv. Simon de Montfort a été particulièrement actif en Gascogne en 1249 et en 1251. En septembre 1248, le roi-duc reconnaissait devoir à Raimond Arnaud, vicomte de Tartas, 14 marcs sterlings pour son alliance et la remise de ses châteaux à son sénéchal, à l’occasion de la guerre contre le vicomte de Béarn. Le contenu de cet acte pourrait sembler contradictoire avec l’attitude de Simon de Montfort à l’égard du vicomte de Tartas, mais il se rapporte à des événements antérieurs à la venue de Simon de Montfort en Gascogne (Shirley, Royal Letters, t. 1, p. 380 : Pat. Rolls, 1247-1258, p. 26).
- L’abbé A. Départ (art. cité, 1888, p. 197-198) affirme que Pierre de Tartas était possessionné en Born du chef de son épouse – il aurait dû dire de son aïeule.
- F. Abadie, Histoire de la commune de Dax, 1898, p. 15 ; A. Richard, ouvr. cité, t. II, p. 196 ; A. Richard, ouvr. cité, t. II, p. 351.
- Ibid., p. 368.
- RF, n° 417. S’y trouvent la lettre du Prince Édouard au vicomte de Béarn et le prononcé de la sentence. L’abbé A. Départ (art. cité, 1886, p. 197-198) déclare que c’est à la suite du refus du vicomte Pierre de payer certaines redevances, que le roi avait le droit de lever sur la vicomté de Dax, que le conflit éclata ; mais, nous ignorons sur quelles sources il s’appuie. Le même auteur prétend aussi que la sentence de Gaston de Béarn est de 1279, erreur qui doit provenir de J.-J. Monlezun (Histoire de la Gascogne, t. II, p. 410) et par cet auteur de P. de MARCA (Histoire de Béarn, 2e éd., t. II, p. 422), il fait allusion à un compromis passé à Windsor en 1271, qui n’est probablement qu’une confirmation de la sentence de 1269. Il interprète par ailleurs ce document de façon erronée : “avec la justice de Mimizan” devient “à la réserve de”, le “pleit vescomtau” est traduit par “à titre de vicomté”.
- Voir Ch. Bémont, Simon de Montfort, p. 48 ; RG, t. I, n° 2187, 2539, 3041, 3540, 3548, 3559, 4510.
- “Pleit” est peut-être synonyme de “espleit” (esplectum) et, dans ce cas, aurait un sens proche de celui de padouen (Voir RF, p. 238) ; le “frementau” était une redevance en grain, peut-être semblable à la rente en froment que versaient dans la Maremne voisine, tous les tenants directs du seigneur (Voir RF, p. 332).
- Exceptis dum taxat advocacionibus militum de Borno qui de nobis se advocant (lettre) ; “saups e exceptatz los auoamentz deus cauoirs de Born” (Sentence).
- RF, n° 141. Pour l’ensemble des hommages de 1274. Voir plus loin.
- L’acte de concession des commissaires royaux n’a pas été retrouvé. Le passage cité est extrait de la cession que le roi-duc fit de ces droits à Ar. R. del Soler, après que Jean de Tartas, fils du vicomte Pierre, les lui eût remis (juillet 1280) (voir RG, t. II, n° 404 et infra). En ce qui concerne la mission du chancelier et d’Othon de Grandson, voir J. P. Trabut-Cussac, ouvr. cité, p. 56-57. Leur séjour en Gascogne se situe entre mai et fin septembre 1278.
- Voir tableau I. En 1273, Gaillard avait fait hommage, conjointement avec le vicomte de Tartas, pour Mauco (RF, n° 142).
- Arch. dép. Pyr.-Atlantiques, E 225. Ce document étant en assez mauvais état nous n’avons pu en faire qu’une transcription incomplète. La part cédée aux Soler comprenant “lo casted d’Uza, ab lo borg e tota la terra dels Borns aichi cum s’es dega ab l’affar d’Arras [……] la terra de Marensin [in jus] enbert Buhs, ab totz lors apertenementz e ab totas las rendes e les ichides d’aquera medissa terra, sian cavalerias, homes […..] asses, erbadges, pastenx, forestz, molins, moliars, aigues, justizia alta e bassa e generalment tot quant qu’el vedzcomps de Tartas […..] auer ni tener deu ni per lui en lo casted sober deit, ni en la terra sobrer deita, exceptad especialment l’omenadge d’en P. de Bordel, lo quals sia del vedzcompte elquel pusca prener en Born, al loc on l’a acostumat a prener en [.. ] anament o en altra loc, si al medis vedscomta e al deit en P. de Bordel pladz”.
- Voir Bordeaux sous les rois d’Angleterre, sous la direction de Y. Renouard, p. 19.
“Apres dihs e pronunciet plus l’auantdeitz senhor en Gastons fora deu corament de l’auantdeita pena que a cobrar los auoaments et les altres causas aretengudas per lo rei d’Anglaterra en lo feit de Born, lo deit vescoms ajudia an Galhard eau Arnaud Ramon soberditz jusca tant qu’el medeiss en Gaillard en Arnaud Ramon o l’uns de lor sian arecebud en cort o en altra maneira empero, si les causas soberdeitas nos cobrauan, lo vedzcomps n’ols es tengudz d’are”. (Arch, dép. Pyr.-Atl., E 225). - Bordeaux sous les rois d’Angleterre sous la direction de Y. Renouard, p. 79.
- RG, t. II, n° 494.
- Voir AHG, t. III, p. 130.
- RG, t. III, n° 1925.
- RG, t. III, n° 1869, 1925, 2085. Dans ce dernier acte il est précisé que l’enquête porte “super justiciatu aliquorum hominum et terrarum de Bornio”.
- Bordeaux sous les rois d’Angleterre, p. 351-352.
- RG, t. IV, n° 1330. D’après une enquête effectuée en 1310, quarante années auparavant, le futur Édouard ler se serait trouvé en personne dans le bourg et château d’Uza comme dans son bien propre (Voir G.-P. Cuttino et J.-P. Trabut-Cussac, Gascon Register A (series of 1318-1319), London, 1975, t. I, p. 265). Cette mention pose des problèmes insolubles car, en 1270, le prince Édouard ne se trouvait pas en Aquitaine : il n’y vint en effet qu’en 1260-1261 (Voir J.-P. Trabut-Cussac, ouvr. cité, p. 22), en 1273 (ibid., p. 42) et en 1286-1289 (J.-P. Trabut-Cussac, Itinéraire d’Édouard le en France, 1286-1289, dans The Bulletin of the Instilute of historical Research, vol. XXV,1952). Il n’est pas impossible qu’à la fin de l’automne 1261, en septembre 1273 ou en juin 1287, il soit passé par Uza, mais en 1261, on ignore tout des rapports que l’administration anglaise entretenait avec le vicomte de Tartas ; en 1273 Édouard Ier avait d’autres préoccupations et, en 1287, on se trouve au moment du procès entre les nobles de Born et Gaillard del Soler. Rien n’indique que le roi-duc soit alors revenu sur son intention d’autoriser les Soler à succéder aux Tartas en Born. L’évocation des événements du XIIIe siècle et leur interprétation par les enquêteurs qui font de la présence du roi-duc à Uza un argument pour justifier ses droits sur ce castrum s’expliquent fort bien par le climat qui régnait dans le duché, au lendemain de la guerre de Guyenne, au cours de laquelle, s’étaient multipliées les usurpations. Les conclusions des enquêteurs n’en sont pas moins fort intéressantes : elles expliquent certainement comment, à la suite d’un procès commencé en 1281 entre les Soler et les nobles de Born, Édouard II réussit en 1315 à recouvrer ou à acquérir des droits que son père avait abandonnés aux Soler.
- J.-P. Trabut-Cussac, Un rôle de lettres patentes émanées du Prince Édouard pendant son premier séjour en Gascogne dans Rec. Trav. offert à Clo. Brunel, 1955, t. II, p. 606, n° 53.
- RG, t. II, n° 495 ; AHG, t. VII, p. 351 ; Abbé Départ, art. cité, 1886, p. 267-268.
- Nous reviendrons sur ces hommes francs dans le cadre de l’étude sur la société.
- Id.
- RG, t. IV, n° 470, 499.
- Si pour Guillaume d’Ossoa (ou de Soa), nous ignorons la nature des biens qu’il tenait du roi-duc, car son nom ne figure pas dans les Recogniciones, en revanche Arn. Amanieu de Campet excepte de l’hommage l’affar de Mauborguet qu’il tient du vicomte de Tartas (RF, n° 692).
- Ainsi Arn. de Lasperon et P. Bernard et Vital de Las Hodias exceptent de l’hommage certaines terres qu’ils tiennent de ceux d’Artigameira (RF, n° 695).
- RG, t. IV, n° 470, 471, 499, 501.
- Voir tableau II.
- RF, n° 694.
- RF, n° 691.
- RF, n° 688.
- RF, n° 691.
- RF, n° 691.
- Parfois, le procès-verbal omet de faire état de cette prestation. C’est le cas pour P. de Montaner (RF, n° 694) et Gaillard de Lugaten et ses consorts (RF, n° 691).
- RF, n° 682.
- RF, n° 691.
- RF, n° 694.
- RF, n° 560.
- RF, n° 687. Les autres possessions de Gaillard de La Mote se trouvent en Buch à La Mote, Biganos, Le Teich, Gujan ainsi qu’à Saugnac et Onesse.
- Voir précéd. RG, t. IV, n° 1330.
- En ce qui concerne le château d’Uza, Voir J. Gardelles, Les châteaux du Moyen Âge dans le Sud-Ouest de la France, 1972, p. 230.
- Arch. dép. Pyr.-Atl. E 225.
- Voir tableau II.
- On songe à Saint-Martin de Campet (cant. de Mont-de-Marsan) et à Escource (cant. de Sabres). Pour L. D’Escoassa la chose est certaine puisqu’il doit reconnaissance au nom de Pin son épouse (RF, n° 693).
- Il s’agit de Gaillard de Lugaten et de ses parçonniers, des Cis et des Artigameyra qui possèdent en alleu le bois de Casa à Lugaten, paroisse de Luë (RF, n° 691) et de S. de Moyssac possessionné en Bordelais à Semens, près de Saint-Macaire (RF, n° 685).
- Mais à raison de l’épouse de Lombard (RF, n° 693).
- “…domum in loco quam habet apud Sanctum Paulinum in Borno cum tali fortalicia in qua secure valeat commorare” (RG, Suppl. t. I, n° 4752).
- “…motam de Mirapeis” (RF, n° 688).
- “…domum et motam de Montazerio” (RF, n° 694).
- Thore dans sa Promenade sur le golfe de Gascogne, 1810, p. 37, a, le premier, signalé le Tuc du Houns “débris d’un vieux château bâti sur un mamelon”. Il précise qu’une vingtaine d’années auparavant ce monticule était éloigné de l’étang, mais que, depuis, il est devenu un îlot de 90 à 100 toises de tour qui s’élève à 1 à 5 mètres au-dessus des plus hautes eaux. L’abbé A. Départ précise qu’il s’agit de deux mottes orientées nord-sud, séparées l’une de l’autre par un fossé colmaté. Si, à son époque, on reconnaissait encore les fossés, les deux ouvrages ne s’élevaient plus, selon lui, que de 2 ou 3 mètres au-dessus des eaux (art. cité, 1884, p. 147). F. Arnaudin a, lui aussi, évoqué le “tuc de Houns” qui formait, selon lui, un “îlot de cent pas de pourtour, situé à la pointe nord-est de l’étang d’Aureilhan” (Choses de l’ancienne Grande lande, 1re série, p. 47). Cette forteresse est aussi mentionnée dans J. Gardelles : Les châteaux du Moyen Âge dans le Sud-Ouest de la France, 1972, p. 217. L’auteur hésite à la situer dans Saint-Paul ou Sainte-Eulalie. Les tucs qui existent toujours se trouvent dans la commune de Saint-Paul. Il ne nous a pas été possible de nous en approcher en raison de l’eau et de la végétation qui les entourent.
- Selon l’abbé A. Départ (art. cité, 1884, p. 217) ces deux mottes étaient situées à 1 km de celles de Houns. Elles consistaient, chacune, en une motte d’argile, haute de 5 ou 6 mètres au-dessus du sol environnant et entourée d’un fossé, dont les terres avaient servi à former la butte. Leur diamètre au sommet était de 12 ou 15 mètres. Nous avons pu, grâce à l’obligeance de M. Fourcade, maire d’Aureilhan qui en est le propriétaire actuel, examiner ces deux mottes. L’une, celle de Castelnau, située à proximité du domicile de M. Fourcade, est constituée d’un monticule circulaire (D : 36 m) au sommet aplati, haut de trois mètres environ, entouré d’une sorte de plate-forme annulaire large de 10 mètres, le tout circonscrit par un fossé de 6 mètres de large. L’autre, celle de Lanty, est un ensemble beaucoup plus considérable : il s’agit d’une motte circulaire tronconique, haute de 6 mètres environ et dont le diamètre doit atteindre 70 mètres ; elle est entourée d’un fossé de 10 mètres de large encore rempli d’eau.
- D’après l’abbé A. Départ (art. cité, 1884, p. 147), ces deux mottes étaient situées à 500 mètres au nord-ouest du tuc de Houns et à 400 m à l’ouest de l’église de Saint-Paul le vieux, située elle-même dans la plaine du quartier de Loubeyre, souvent submergée par les eaux au cours de l’hiver. Elles étaient semblables à celles du Tuc de Houns, mais presque arrasées et leurs fossés remplis de vase. On y aurait trouvé des briques à rebord et d’autres débris de maçonnerie (Id., p. 146-148). L’abbé A. Départ n’est pas toujours très clair à propos de ces mottes qu’il situe d’abord dans Sainte-Eulalie (p. 146). Il faut dire aussi que, plus loin, il place Aureilhan au nord de l’étang ! (p. 147).
- Ces indications sont celles fournies par l’abbé A. Départ (art. cité, 1884, p. 148) qui situe ces mottes à 500 mètres des précédentes – non identifiées – dans une prairie. Nous avons retrouvé à Laguirosse, mais à l’orée d’un bois, deux monticules de forme quadrangulaire (22 x 8 m et 22 x 40 m) hauts de deux à quatre mètres entourés de fossés communs, mais tellement bouleversés par des emprunts de terre qu’il est impossible de retrouver leur configuration primitive.
- J. Gardelles (Ouvr. cité, p. 180) situe cette motte dans le canton de Parentis.
- Il y a probablement d’autres mottes dans le pays de Born. F. Arnaudin (ouvr. cité, p. 47) a signalé ainsi le Castel Sarrazin à Pontenx.
- RF, n° 682, 692, 693, 685.
- RF, n° 682, 685, 693.
- RF, n° 685, 691.
- RF, n° 682, 685, 691, 693, 694.
- RF, n° 685, 691, 693.
- RF, n° 694.
- RF, n° 694.
- RF, n° 685, 693, 691, 694.
- RF, n° 691.
- RF, n° 691, 693, 694.
- RF, n° 685.
- RF, n° 691.
- RF, n° 691.
- Pour le roi-duc voir RF, n° 691. Les dîmes tenues de l’archevêque ne sont attestées que depuis le milieu du XIVe siècle, mais il est pratiquement certain qu’elles n’avaient pas changé de main depuis les années 1270. Parmi les possesseurs de dîmes, on relève les noms des Artigameyra à Aureilhan, des Cis à Saint-Paul, Sainte-Eulalie et Pontenx, des Escoassa à Saint-Paul, des du Puch à Sainte-Eulalie, des Frambardin ou Fontbardin à Aureilhan. Toutes ces familles nous sont connues par ailleurs. En revanche, les Gui à Parentis ainsi que les Pontenx à Saint-Julien n’apparaissent pas dans les documents du XIIIe siècle (voir Arch. hist. Gironde, t. XXI, p. 551, 619 ; t. XXII, p. 97-99).
- RF, n° 685.
- RF, n° 691.
- RF, n° 693.
- RF, n° 692.
- RF, n° 682.
- RF, n° 688.
- Voir précéd. RG, t. IV, n° 1330.
- RG, n° 692. Lombard d’Escoassa excepte aussi de l’hommage ce qu’il tient à Meula dans Sanguinet, sans préciser quel en est le seigneur (RF, n° 693).
- Voir n° 73.
- Arch. dép. Pyr.-Atl., E 227.
- RF, n° 686.
- L’abbé de Saint-Sever fait hommage au roi pour les trois prieurés (RF, n° 70), mais le prieur de Mimizan est le seul qui apparaisse dans les Recogniciones.
- Dom du Buisson, ouvr. cité, t. II, p. 127, 139, 146 ; Abbé A. Départ, art. cité, 1884, p. 149-151. Il n’est jamais question de Bias dans ces actes.
- Ibid. t. II, p. 146 : “Ecclesiam S. Mariae de Mimisan cum uno villano et cum frangitate mansi quod tenebat clericus nomine Fortis : item, aliam ecclesiam S. Eulaliae de Borno”. Dom du Buisson a ajouté en note “frangitale, franchitate, salvitate : dicitur etenim alibi salvitas mimizanensis”. Bien que ces actes soient des faux, confectionnés vers la fin du XIe siècle, ils ont dû être copiés sur des actes sincères.
- Nous reviendrons sur cette question à propos de l’étude de cette communauté.
- Le texte du contrat de paréage est reproduit dans Dom du Buisson, ouvr. cité, t. I, p. 234-254. Le passage concernant Mimizan se trouve p. 248-249.
- RF, n° 471.
- RF, n° 690.
- Art. 2.
- Ce cens était effectivement payé au XIIIe siècle (voir AHG, t. XLIV, 5).
- Sur ce conflit qui opposa Arnaud Géraud de Cabanac, arch. de Bordeaux (1103-1131) à Raymond d’Arboucave, 6e abbé de Saint-Sever, on peut se reporter à Dom du Buisson, ouvr. cité, t. I, p. 203-205 et à Abbé A. Départ, art. cité, 1884, p. 185-188.
- RG, t. II, n° 1104.
- AHG, t. XXII, p. 8.
- Dom du Buisson, ouvr. cité, t. II, p. 198-199 ; Abbé A. Départ, art. cité, 1884, p. 190-193. En fait, Guillaume X avait donné la dîme d’une nasse qui ne lui appartenait pas. Guillaume Prévôt, qui était prisonnier lorsque le duc avait fait la donation, y consentit par la suite moyennant le versement par l’abbé d’une somme de 60 s. morl. et d’un cheval. L’abbé A. Départ avait traduit Petrus de Burdegala, filius Guillelmi praepositi, par Pierre de Bordeaux, fils dudit Guillaume et s’interrogeait – il y avait de quoi – sur l’existence de celui qui aurait été le frère d’Aliénor ! En réalité Pierre de Bordeaux, fils de Guillaume Prévôt, appartenait à la famille de Bordeaux ; il nous est connu par ailleurs par le cartulaire de Saint-Seurin (édit. J.-A. Brutails, n° LXXXVll). Voir Bordeaux pendant Le haut Moyen âge sous la direction de Ch. Higounet, p. 60 (Histoire de Bordeaux). C’est le premier témoignage que nous ayons sur les possessions des Bordeaux en Born, auxquelles il est fait par la suite allusion lors du partage entre les Tartas et les Soler (n° 68). Ainsi s’explique la présence des Grilly parmi les nobles de Born en 1281.
- RF, n° 691.
- Voir n° 152.
- Dom du Buisson, ouvr. cité, t. II, p. 195-196.
- Voir Abbé A. Départ, Les commanderies dans le département des Landes, Dax, 1894.
- Les documents concernant les commanderies du pays de Born sont conservés aux Arch. dép. de la Haute-Garonne, Inv. Malte 41. Ils sont peu nombreux, même pour l’époque moderne : 9 pièces (H Malte, Bordeaux 20) et deux registres (H Malte 925 et 957).
- Voir n° 58.
- RF, n° 417.
- RF, n° 688.
- À travers les comptes de l’archevêché de Bordeaux (voir AHG, t. XXI, XXII).
- Les représentants en sont R. Brun, Gaillard Lala, Raimond de La Masta (RF, n° 690).
- RF, n° 695.
- RF, n° 681.
- RF, n ° 683.
- C’est le cas pour les Lasperon et les Las Hodias (RF, n° 695) ou les hommes francs de Mimizan (n° 690), mais d’autres ne prêtent que l’hommage (n° 683). Dans un autre procès-verbal, il n’est fait état ni de l’hommage, ni de la fidélité (n° 681). On relève tout au long des Recogniciones et pas seulement pour les simples hommes libres une très grande variété dans les formules. Seule une étude systématique permettrait de savoir – et encore – s’il s’agit d’omissions de la part des copistes ou bien de différences véritables dans les termes mêmes des déclarations.
- RF, n° 681.
- RF, n° 695.
- RF, n° 690.
- RF, n° 683. À la rubrique esperverius, Ch. Bémont (Recogniciones, p. 38), précise que cet épervier précède les autres à la chasse et leur sert de guide.
- RF, n° 681.
- RF, n° 695. G. R. de Monos se contente de préciser : “cum suis parciariis” (RF, n° 683).
- RF, n° 690. On notera cependant que ce phénomène de reconnaissance collective se rencontre aussi fréquemment dans les hommages nobles.
- RF, n° 681.
- RF, n° 683.
- RF, n° 681, 683, 690, 695.
- AHG, t. XXI, XXII.
- RF, n° 690.
- “Item tenet ab eo quod de qualibet barrosta sive curru ollarum debet habere unam ollam. Item tenet joglariam de Memisano et quartam partem deveriorum que dantur ibidem joculatoribus” (RF, n° 683).
- Voir n° 145.
- Voir Ch. Higounet, Les chemins de Saint-Jacques et les sauvetés de Gascogne, dans Annales du Midi, t. LXIII, 1951.
- Voir n° 147.
- Dom du Buisson, ouvr. cité, t. Il, p. 198.
- RG, t. I Suppl. n° 4397.
- Nous aurons l’occasion de revenir sur ce problème dans le cadre d’une étude générale sur les hommes francs du roi dans le Bordelais, le Bazadais et les Landes.
- RF, n° 690.
- CRCMH, 1851, p. 49-50 : AHG, t. LIII, p. 4 ; voir Abbé A. Départ, art. cité, 1886, p. 202 et J.-P. Trabut-Cussac, Actes gascons dispersés émanant d’Édouard Ier d’Angleterre pendant son séjour en France (1286-1289), danS Bull. phil. et hist., (année 1962), 1965, p. 112, n° 49.
- CRCMH, 1851, p. 50 ; Abbé A. Départ, art. cité, 1886, p. 188-191. Henri III s’adressant en 1255 aux hommes de Mimizan évoque les bonos usus et bonas consuetudines observatas et approbutas in ipsa terra. (Voir n° 179).
- Art. 21.
- Art. 12.
- Voir n° 165.
- Dom du Buisson, ouvr. cité, t. I, p. 289 ; “de consulibus et juratis villae de Mimizan”.
- “Et nous avons nostre scel du comung de Mimizan” (art. 18).
- Art. 11.
- Art. 11, 13 (nomination “d’appréciateurs” sur les marchands de poisson) ; art. 23 (interdiction de faire entrer du vin dans la ville aussi longtemps qu’il y a du vin de la ville ou d’un habitant de celle-ci) ; art. 24 (possibilité d’interdire la sortie des blés du dex et des limites de Mimizan).
- Art. 1 (plaintes) ; 16 (emprisonnement) ; 14 (transfert) ; 16, 20, 22 (appels ; le contenu de ces articles n’est pas toujours très clair en raison de transcriptions fautives).
- Art. 2.
- CRCMH, 1851, p. 49 ; voir Abbé A. Départ, art. cité, 1886, p. 196-197.
- Art. 15.
- Art. 17.
- Art. 2.
- RG, t. I, Suppl., n° 4397. Il s’agit d’un fouage général levé à l’occasion de la chevalerie du prince Édouard.
- RF, n° 690.
- Art. 2.
- Dom du Buisson, op. cit., t. I, p. 24.
- RF, n° 690.
- CRCMH, 1851, p. 51 et Abbé A. Départ, art. cité, p. 202.
- Art. 12.
- Art. 21.
- Art. 2, 23, 24.
- Voir n° 190.
- Voir la concession par le roi-duc d’un emplacement pour y construire un presbytère (n° 153), l’hommage du prieur (n° 142) et les reconnaissances des Recogniciones, n° 683 et 691.
- Voir n° 139.
- Voir n° 83.
- Il s’agit des art. 3 à 10.
- Art. 10.
- Les coutumes de la Maremne ont été publiées par le baron d’Olce dans le Bull. Soc. Borda, 1882, p. 279-289 et 1883, p. 57-64, 107-112, 231-247 ; voir J.-B. Marquette, Les Albret, 4e partie, p. 607-608.
- RF, 417.
- RG, t. II, n° 404.
- RG, t. III, n° 1921.
- RF, n° 693, 694.
- Arch. dép. Pyr.-Atl., E 227.
- N° 58, 71, 73.
