UN@ est une plateforme d'édition de livres numériques pour les presses universitaires de Nouvelle-Aquitaine

Le travail des femmes et la famille :
les procuratrices à Montréal au XVIIIe siècle

Au XVIIIe siècle, dans la ville de Montréal qui compte tout au plus 4 000 âmes1, le rythme des ménages est bien souvent dicté par l’absence de l’époux. Que ce soit pour la saison de la traite des fourrures – du printemps à la fin de l’été2 –, pour le commerce avec la France ou pour les nombreuses expéditions militaires qui jalonnent le XVIIIe siècle, les hommes sont souvent à l’extérieur de la ville, laissant les femmes dans l’attente d’un retour incertain, mais aussi avec de nombreuses tâches à remplir. En effet, Montréal, en tant que ville militaire et comme carrefour économique important, est un lieu tout indiqué pour étudier les femmes en absence d’homme en milieu colonial.

Cette absence, qu’elle soit temporaire ou définitive, nous permet de contourner partiellement l’« invisibilité » des femmes mariées dans cette période. Alors que les maris partent pour la guerre ou le commerce, les femmes restent, s’occupant du ménage et des activités économiques. Leur situation est donc différente des veuves, célibataires et femmes séparées de biens ou de corps, car leur indépendance est bien souvent temporaire3. L’historiographie n’a d’ailleurs longtemps abordé que les veuves, car visibles dans les sources après le décès du mari. Ces travaux supposaient que ces femmes en état de viduité devaient être actives au sein du couple du vivant de l’époux, sans toutefois le démontrer concrètement, car les femmes mariées sont particulièrement silencieuses dans les archives. Comme le mentionne Christine Dousset, la « capacité d’une veuve à assumer la direction d’une affaire suppose qu’elle s’est familiarisée au fil des ans avec la réalité du métier et qu’elle a acquis des compétences dans ce domaine4 ». Depuis quelques années, plusieurs historiennes se sont penchées sur les femmes mariées pour démontrer l’étendue de leur capacité d’action, mais aussi les contraintes d’une société patriarcale5. À cet égard, les procurations permettent de lever en partie le silence des sources et de prouver que les femmes étaient actives pendant l’absence du mari, mais surtout qu’elles avaient des compétences qui n’apparaissent pas spontanément avec le veuvage.

C’est sur les femmes qui se voient octroyer une procuration, les procuratrices, que notre étude se penchera. Peu de travaux, hormis ceux de Benoît Grenier et Catherine Ferland, s’emploient à les étudier6. En réalisant une analyse prosopographique des procuratrices à Québec au XVIIIe siècle, ceux-ci démontrent que plusieurs femmes sont bien au fait des affaires de leur mari, prenant ainsi part aux activités économiques du ménage, étant bien plus que de simples « auxiliaires de leurs maris7 ». Ils insistent surtout sur le fait que les affaires familiales doivent continuer, quelles que soient les circonstances, en l’absence des hommes, et que les femmes sont des partenaires de confiance de leur mari, confiance fondée entre autres sur la compétence des épouses. Cette analyse rejoint celles de Nancy Locklin8 et de Bernard Michon et Nicole Dufournaud9, pour qui les procurations témoignent des liens de confiance entre le mari et son épouse. Ces études permettent ainsi de pallier l’effacement des femmes lorsqu’elles sont en présence d’un mari. Il reste cependant plusieurs pistes à explorer. En effet, les femmes utilisent-elles réellement le pouvoir octroyé par leurs maris ? Que révèlent les procurations sur le travail des femmes dans les sociétés préindustrielles ? À cet égard, les procurations représentent un chantier fort prometteur, mais aussi une des rares sources, en absence d’écrits du for privé, pour observer le pouvoir féminin en milieu colonial.

Cette étude se veut une réflexion sur plusieurs éléments entourant les procurations. Nous nous pencherons sur ce que révèlent cet acte notarié au sujet du travail des épouses en l’absence de leur mari, puis sur ce qu’elles révèlent sur leur travail en présence de leur époux. Cette analyse est intégrée à une réflexion sur les étapes des cycles de vie et la culture familiale, car la procuration amène à ne pas seulement étudier le travail des femmes de manière isolée, mais à le réintégrer dans une analyse du couple et de la famille. En effet, l’étude des procuratrices permet de mieux cerner le travail des femmes et de pallier aux silences des sources en présence du mari ; éclairant le rôle qu’elles jouent au quotidien. De ce point de vue, nous tentons plutôt de comprendre ce que l’absence nous dit sur les moments où le mari est présent, plutôt que de voir en quoi le départ du mari représente un moment d’autonomie, comme si les femmes étaient condamnées à jouer des rôles secondaires lorsqu’il y a un homme dans l’entourage.

Cette étude se divise en trois parties : la première est une analyse de notre corpus, la seconde un regard sur l’utilisation des procurations par les épouses et nous terminerons par une étude de cas sur Madeleine Pépin dit Laforce, femme du marchand Charles Tessier.

Un regard sur l’acte de procuration

La procuration est un acte « par lequel celui qui ne peut vacquer lui-même à ses affaires, donne pouvoir à un autre pour lui, comme s’il était lui-même présent, soit qu’il faille lui-même gérer et prendre soin de quelque bien ou de quelque affaire, ou que ce soit pour traiter avec d’autres10 ». Les personnes qui reçoivent une procuration sont appelées procureurs ou procuratrices, terme que l’on retrouve plutôt rarement, comme celui formel et juridique de « mandant ». On retrouve plutôt des termes comme « fondé de pouvoir », « au nom et comme fondé de procuration », « stipulant au nom de » et « se portant fort » pour décrire ceux et celles qui ont reçu une procuration.

Notons aussi que la majorité des procurations n’ont pas été conservées. Il est donc difficile de savoir si une femme est procuratrice ou non, car il est peu souvent mention de l’acte de procuration lors des procès et dans les greffes de notaire. Les procurations qui ont survécu à l’épreuve du temps ne représentent probablement que la pointe de l’iceberg11. De plus, la procuration n’est pas forcément enregistrée devant notaire, elle peut être faite sous seing privé ou de façon orale12. À cet égard, on peut voir la différence entre certaines procurations très détaillées et s’étalant sur plusieurs pages, et d’autres, qui n’ont pas été rédigées devant notaire, faites sur un petit bout de papier par celui qui veut déléguer son pouvoir. La procuration est un acte moins important que d’autres, donc moins conservé et plus propice à avoir été supprimé par le notaire au moment de son expiration13.

Cet acte nous permet d’observer la confiance envers le mandant. Les habitants du XVIIIe siècle avaient bien conscience de la nécessité d’octroyer une procuration à une personne de confiance. Par exemple, dans une lettre écrite de La Rochelle, la veuve Boismory demande d’ici « lanné prochaine votre procuration a quelque personne de confiance » pour recevoir ces biens de la succession de madame Charly qui est décédée14. Cette confiance se voit particulièrement chez les couples où l’homme s’absente. Malgré tout, il faut se garder, à notre avis, de voir en la délégation des pouvoirs du mari à sa femme un empowerment. Il est tentant pour l’historien de considérer la procuration comme un moyen pour les femmes de contourner leur incapacité juridique et d’administrer le patrimoine familial, à l’instar du mythe de la veuve « joyeuse » qui récupère l’administration de ses biens après le décès de son mari15. Voilà un anachronisme qui s’explique par les sources disponibles pour l’historien du XVIIIe siècle québécois, surtout des documents notariés froids et formels, mais aussi par notre vision contemporaine en ce qui a trait aux droits des femmes. Il n’y a pas, dans cette délégation de pouvoir, de symbolique quelconque, la procuration est un acte « banal » employé à grande échelle dans les sociétés préindustrielles. L’épouse qui la reçoit s’inscrit dans cette nécessité de déléguer le pouvoir dans une colonie où l’absence des hommes n’est pas rare.

On peut même se demander si la procuration ne représente pas plutôt un fardeau pour l’épouse, qui perd son partenaire de vie temporairement pour vaquer aux affaires du ménage. De plus, cette procuration conférée par le mari disparait avec son retour, mais il peut aussi l’annuler, exemple par excellence de la suprématie du mari sur son épouse16. Cette incapacité des femmes n’est toutefois pas synonyme d’incompétence : celle-ci sont très impliquées dans le commerce familial, qu’il soit avec les parents ou l’époux. D’ailleurs, il importe d’examiner l’octroi des actes de procuration à grande échelle pour en comprendre les motifs. Cela permet de comprendre les dynamiques familiales, mais aussi la dimension économique des procurations.

Les procurations à Montréal
et le commerce des fourrures

Nous avons choisi d’étudier les procurations de 1740 à 1770 afin d’observer une période de paix et de guerres, mais aussi pour restreindre la taille de notre échantillon. Cette périodisation influence nos résultats, puisque la guerre de Sept Ans (1756-1763) et le changement de régime ralentissent le milieu marchand. Il est probable que cela ait des conséquences sur l’octroi de procurations. Une étude qui porterait uniquement sur cette période trouble serait toutefois nécessaire pour mieux comprendre le rôle des femmes pendant ce conflit.

Ce sont 337 actes que nous avons retracés. Pour une ville d’une taille modeste comme Montréal, il s’agit d’un échantillon considérable qui nous révèle plusieurs éléments sur les procurations. Sur le total des procurations retracées, 76 sont faites du mari à l’épouse, soit environ 20 %, ce qui est similaire au pourcentage observé par Grenier et Ferland à Québec17. Cette donnée, bien qu’éloquente, nous donne cependant un portrait incomplet. En effet, ce pourcentage doit être replacé dans l’ensemble des actes de procuration accordés à Montréal pour la période étudiée.

De ce corpus, il est d’ailleurs possible de tirer plusieurs constats. Par exemple, le fait que si l’épouse est la procuratrice naturelle de la majorité des époux, beaucoup d’hommes mariés choisissent plutôt de confier l’administration de leurs affaires à d’autres hommes au moment de leur départ. De plus, certains hommes donnent plusieurs procurations simultanément, à leur femme et à d’autres hommes. Il convient donc de replacer les procuratrices dans un ensemble plus vaste qui pourrait d’ailleurs nous éclairer plus en détail sur leurs rôles. C’est le cas de Louis de Clignancourt qui accorde la même journée une procuration à son épouse et une à son associé18.

Il faut aussi mentionner l’importance de la famille et intégrer l’étude des procurations au sein de celle-ci. En effet, les relations entre les parents et les enfants, mais aussi les relations adelphiques et avunculaires, sont présentes dans notre corpus, comme le soulignaient Michon et Dufournaud en abordant l’importance de la fratrie dans les procurations19. Cependant, il est plutôt difficile de bien mesurer l’ampleur de ces liens, qu’on ne peut que minorer. Ces procurations, envoyées dans d’autres villes, colonies ou dans la métropole, sont moins propices à être conservées. De plus, les liens familiaux ne sont pas toujours indiqués dans l’acte.

Prenons l’exemple de la famille Legardeur de Repentigny. Le patriarche, Jean-Baptiste Legardeur de Repentigny, a longtemps confié des procurations à sa femme – célèbre femme d’affaires de Nouvelle-France –, Agathe de Saint-Père20. Après le décès de Jean-Baptiste, Agathe va confier des procurations à ses filles, Agathe et Marie-Catherine21. Cette dernière sera aussi la procuratrice de ses neveux alors qu’ils seront absents de la colonie et encore célibataires22 (certains sont aussi mariés, mais leur épouse se trouve alors hors de la colonie). Après leur mariage, les neveux de Marie-Catherine Legardeur confient l’administration de leurs biens à l’auxiliaire naturelle, leur épouse23. Ces dernières, au moment de la cession du Canada, alors qu’elles sont sur le point de quitter la colonie, vont confier une procuration à des membres de leur famille24.

Il ne s’agit ici que d’un exemple qui se base sur une famille et qui mériterait d’être élargi et fait à plus grande échelle. Il n’en demeure pas moins qu’on peut voir l’utilité d’étudier les procurations d’un point de vue vertical (les générations) et horizontal (la fratrie), pour mieux comprendre les périodes de vie, mais aussi les attitudes que génère l’absence en fonction du statut marital ou tout simplement des modalités de celle-ci (objectif de la procuration, lieu où le mandant se trouve, durée du départ, etc.).

De ce corpus, on peut donc tirer plusieurs constats, comme l’importance et la notoriété de certains marchands dans le commerce, la diversité des situations en ce qui concerne l’octroi de procuration, mais aussi l’importance de la famille. Il n’en demeure pas moins que l’épouse reste la procuratrice privilégiée par son mari : elle a la compétence, la confiance et aussi le plus grand intérêt dans la gestion des biens. Il reste maintenant à déterminer si ces femmes utilisent cet acte de procuration. Après tout, pourquoi consentir un tel acte, et ainsi débourser des frais pour le notaire, si la procuration n’est même pas utilisée ?

L’administration des biens
en absence d’homme

À bien des égards, on peut considérer l’acte de procuration comme une preuve que les épouses sont impliquées dans le commerce de leur mari et qu’elles administrent les affaires familiales pendant que ceux-ci sont absents. Malgré tout, les procuratrices sont plutôt discrètes, du moins en apparence, en ce qui concerne la signature d’actes devant notaire. Comme le mentionne Benoît Grenier, la majorité des procuratrices sont « inactives » et n’emploient pas le pouvoir délégué par leur mari25.

Dans le contexte montréalais du XVIIIe siècle, de nombreuses femmes jouent un rôle très important dans le commerce des fourrures26, qu’elles soient artisanes ou femmes de marchands, ce qui laisse toutefois peu de traces dans les minutiers des notaires. Ce rôle dans l’économie « informelle » a été souligné par de nombreux historiens et il importe de le garder à l’esprit pour bien comprendre toute l’étendue des actions de l’épouse27. La richesse des procurations est d’ailleurs de faire apparaitre les femmes dans les archives – nous n’aurions aucune trace de nombreuses femmes pour la période préindustrielle québécoise sans elles – mais aussi de nous donner des indications sur les gestes qu’elles vont être appelées à faire. En effet, si on sait que dans les procurations « générales et spéciales », on peut retrouver un nombre phénoménal de clauses, certaines variations d’une procuration à l’autre laissent penser qu’il y a une application des éléments spécifiés dans les actes, du moins en partie. Comme le souligne Josette Brun, la « liberté d’action que ces hommes accordent à leur épouse dans leurs procurations, la formulation de certains actes qui laissent deviner un véritable partenariat entre époux, la présence des femmes devant notaire, seules ou avec leur mari, pour ratifier des actes liés à l’entreprise familiale, suggèrent que la participation de ces femmes mariées est nécessaire au bon fonctionnement de l’entreprise28 ». Par exemple, le marchand voyageur Paul Leduc, dans une procuration à sa femme Marie-Anne Lemoine, lui donne de nombreuses prérogatives, comme percevoir l’argent des différents baux, aller devant les tribunaux si nécessaire et pouvoir contracter des dettes en son nom, des mentions que l’on retrouve dans de nombreuses procurations. Dans une ratification de celle-ci, nous ne savons pas combien de temps après son émission, Leduc mentionne qu’il lui donne les mêmes pouvoirs que la précédente procuration, mais il ajoute qu’il donne aussi le pouvoir à « lad. damlle. procuratrice de faire aud. S. constituant leurs envoys [ou ?] marchandises qui luy serois nécessaire » en lui demandant aussi de s’occuper des castors et pelleteries ou de nommer quelqu’un pour le faire29.

Le fait que Leduc spécifie qu’il accorde ces pouvoirs supplémentaires à sa femme laisse penser qu’elle s’occupe des affaires familiales pendant que son époux est dans les Pays-d’en-Haut, mais aussi que les éléments mentionnés dans les actes de procurations ne sont pas anodins et qu’ils sont vraiment mis en œuvre par les épouses, même si cela n’est pas visible dans les actes notariés. Ainsi, Marie-Anne Lemoine a besoin de l’autorité que procure le document notarié pour ne pas être contestée. Dans ce cas-ci, il s’agit de s’occuper des marchandises à envoyer et recevoir à Montréal, rôle dont on peut supposer qu’elle s’occupa ou qu’elle délégua. On peut aussi penser à la mention dans la procuration concernant la collecte pour les différents baux octroyés par Leduc. En absence d’un autre procureur, il semble logique de supposer que sa femme administre ses biens.

Ces clauses varient d’une procuration à l’autre, même si l’on retrouve toujours de nombreuses formules d’usages. Ainsi, pour la femme de Charles Nolan Lamarque, Marie-Anne Legardeur de Saint-Pierre, il est fait mention de la perception des loyers pour l’administration des terres agricoles et des bestiaux, probablement dans le but qu’on ne puisse remettre en question son autorité sur les fermiers engagés par son mari30. Il s’agit donc ici de considérations surtout méthodologiques pour l’analyse des procurations, qui restent cependant très intéressantes pour tenter de comprendre les actions invisibles des femmes. Il n’en demeure pas moins que plusieurs femmes vont passer devant notaire en l’absence de leur époux.

Des femmes peu présentes devant notaire ?
Les procuratrices et la traite des fourrures

Le commerce des fourrures rend propice – sinon nécessaire – la délégation des pouvoirs du mari envers son épouse, parfois pour des périodes très longues. On peut d’ailleurs observer certaines tendances : au mois de juin on voit une multiplication des engagements de voyageurs, des actes d’associations et un grand nombre de procurations signées avant le départ pour la saison de la traite. Pensons aux trois frères Lefebvre, négociants, qui accordent chacun une procuration à leur épouse, le 7 juin 1753, avant de partir pour les Pays-d’en-Haut. La plupart des marchands prennent cette précaution. Seulement pour le mois de juin 1743, les marchands Charles Tessier31, François Augé32, Jean-Baptiste Jolliet33 et Dominique Gaugé34 accordent des procurations avant leur départ, ainsi que les voyageurs Louis Ducharme35 et Jean Lefebvre36. Il n’est pas anodin que ces hommes aient confié une procuration à leur épouse, sachant que celles-ci sont aussi issues de familles qui ont pratiqué la traite et qu’elles ont donc les compétences pour s’impliquer dans leur commerce. On touche ici à un aspect primordial soulevé par Grenier et Ferland : l’homogamie37. En se mariant avec des femmes issues du même milieu, les commerçants trouvent donc plus qu’une simple épouse, elles sont des partenaires en affaires.

Comme le souligne Gratien Allaire, ce sont les femmes qui tiennent boutique et s’occupent des affaires pendant l’absence de l’époux dans la majorité des cas38. Cependant, peu d’études se sont employées à étudier le rôle de ces femmes, préférant se concentrer sur les hommes qui partent faire la traite des fourrures. Pourtant, ces femmes jouent un rôle tout aussi important que celui des hommes et elles représentent un angle très prometteur pour comprendre le commerce et le travail des femmes. On peut penser aux familles Lemire, Marsolet, Leduc, Pépin, Giasson, Trottier, Hubert Lacroix, Catin, Cuillerier, Lemoine, etc39. Les femmes de ces familles sont probablement au fait, dès leur jeunesse, des rouages du commerce des fourrures, et elles ont sûrement déjà vu leur mère faire face à l’absence de leur père. Comme le mentionne Louise Dechêne, les « femmes apprennent à tenir les livres, à gérer le commerce en l’absence de leur mari40 ». Les mariages des filles se font – pour la majorité – avec des hommes d’autres familles actives dans la traite ou des milieux marchands. Il est difficile ici de ne pas penser qu’il y a une certaine culture familiale dans plusieurs familles marchandes de Montréal, c’est-à-dire :

une culture spécifique, nourrie des expériences partagées par un ensemble restreint d’individus et qui est reproduite, voire radicalisée, au fil des générations. La culture familiale, transmise par l’observation des comportements de la génération précédente ou des collatéraux ainsi que par l’éducation domestique, médiatise les normes et les modèles et rend de ce fait acceptables ou inacceptables pour l’entité familiale, plus ou moins élargie, une gamme différenciée d’attitudes41.

D’ailleurs, lorsqu’on observe les femmes qui restent célibataires, celles-ci apparaissent dans les sources au moment du décès de leur père, ce qui indique que la famille a été le principal vecteur d’apprentissage pour ces femmes. On peut ainsi trouver à l’aide des banques de données une dizaine de procuratrices ayant visité l’étude d’un notaire pour signer des engagements de voyageurs au nom de leur mari et parfois de ses associés42. Plusieurs femmes signent de tels actes, sans que nous ayons retrouvé une procuration les concernant, ce qui montre qu’on ne peut que minorer le nombre de procuratrices. Par exemple, Anne de Robutel Lanoue apparaît dans plus de 29 actes pour des engagements, obligations, ventes, etc. Elle s’occupe du commerce à Montréal pendant que son mari, Constant le Marchand de Lignery, est en poste à Michillimakinac43. Le fils de Constant, François-Marie, pourra aussi compter sur sa femme, Marie-Thérèse Migeon de la Gauchetière, pour gérer les affaires familiales en son absence. Cette dernière, qui n’est jamais mentionnée comme procuratrice – ce qui est fréquent comme nous pouvons le voir –, signe une dizaine de documents en l’absence de son époux, en plus d’être active dans le commerce des fourrures44. On voit ici la reproduction d’un modèle familial où les femmes s’occupent de l’administration des affaires pendant l’absence de l’époux, ce qu’on peut voir chez de plusieurs familles montréalaises.

Il y a d’autres exemples, comme les sœurs Charlotte et Marie-Josèphe Lemire, qui signent plusieurs engagements et obligations en tant que procuratrices de leur mari. Charlotte sera procuratrice de ses fils une fois veuve et fera de nombreux engagements de voyageur en leur nom, ce qui témoigne de son expertise, mais aussi de l’implication des mères dans le commerce de leurs enfants, à l’instar de Marie-Anne Lemoine, la veuve Giasson45. Il ne s’agit ici que du commerce visible, sachant que certaines femmes s’occupent même de la vente et de l’achat de fournitures avec les marchands de la métropole, comme le souligne Kathryn Young46. Sans ces moments d’absence de l’époux, l’historien saurait bien peu de choses sur ces femmes de marchands. En observant les activités devant le notaire, on voit des femmes qui ont un rôle très important en l’absence du mari, ce qui témoigne de leurs compétences.

Ainsi, il est possible en observant les actes de procurations et les documents notariés subséquents – ceux où l’épouse est mentionnée – d’observer que plusieurs femmes utilisent la procuration accordée par leur époux. Il s’agit surtout de familles liées au commerce des fourrures. Néanmoins, beaucoup de femmes restent silencieuses après la rédaction de la procuration. Malgré tout, pour ces procuratrices inactives, l’acte notarié nous permet de supposer davantage et d’émettre des hypothèses.

Cette question de l’administration des biens laisse toutefois plusieurs interrogations en suspens. Par exemple, la féminité représente-t-elle un handicap dans les négociations et dans l’application du pouvoir délégué par les hommes ? Les travaux de l’historienne Jennifer L. Palmer tendent à démontrer que oui. En abordant le cas de la procuratrice Marie-Magdeleine Regnaud de Beaumont, l’historienne démontre que certaines barrières culturelles devaient limiter l’influence des femmes, mais aussi leur capacité à faire respecter les engagements pris envers elles et leurs époux. Marie-Magdeleine dut user de l’influence d’hommes de son entourage pour avoir une crédibilité afin de mener des affaires, mais aussi « to represent her in situations where her femininity made it difficult to represent herself47 ». On peut penser que c’est aussi le cas pour les femmes de Nouvelle-France. Rares sont les femmes, en situation d’absence, qui soient aussi actives que leurs époux. Elles semblent plutôt « garder le fort », continuer les affaires, sans toutefois avoir une grande initiative en ce qui a trait à la gestion des biens. Malgré tout, on peut voir que ces femmes sont des éléments indispensables au commerce familial, comme en témoigne l’exemple de Madeleine Pépin Laforce.

Le cas de Madeleine Pépin Laforce,
épouse du marchand Charles Tessier

La procuratrice Madeleine Pépin Laforce est un cas très intéressant pour observer l’autonomie féminine, mais aussi pour comprendre le rôle des femmes au sein du couple. Comme le mentionne Grenier à propos des procuratrices, il « y a lieu de pousser davantage l’analyse à l’échelle individuelle puisque la perspective biographique demeure, à notre avis, essentielle pour révéler plus adéquatement ces enjeux de pouvoir et, peut-être, arriver enfin à comprendre comment est vécue cette autonomie féminine48 ».

Une telle perspective permet de donner un éclairage nouveau sur le rôle des femmes dans le ménage, mais surtout de combler les lacunes d’une analyse quantitative et prosopographique qui peine à prendre en compte toute la subtilité des actes notariés et le silence des sources (comme la non-mention des procuratrices). Le cas de Madeleine Pépin dit Laforce est éloquent, puisqu’il nous éclaire sur les rôles des femmes seules, mais aussi sur des éléments méthodologiques à prendre en considération pour l’ensemble des procuratrices.

Madeleine Pépin dit Laforce se marie en 1719 avec Jean-Baptiste Gobelin Cinq-Mars, un orfèvre, et occupe un emplacement dans leur maison où elle tient boutique49. Après le décès de son mari – à une date inconnue –, elle convole en secondes noces en 1727 avec Charles Tessier, un marchand voyageur. Ce dernier voyage constamment entre les Pays-d’en-Haut et Montréal. Dans les années 1730 et 1740, elle reçoit cinq procurations de son mari, mais il est probable que plusieurs autres ne nous soient pas parvenues. Elle se voit déléguer l’administration des biens à Montréal à chaque fois au mois de mai ou juin avant le départ de son mari pour la traite des fourrures50. C’est donc dire que chaque printemps marquait le début d’une période de solitude pour Madeleine, mais pour l’historien il s’agit d’une fenêtre d’opportunité qui nous permet de voir le rôle des femmes dans le ménage et leurs compétences.

On peut en effet observer que, dès le départ Charles Tessier pour la traite, Madeleine apparait devant notaire, mais aussi devant les tribunaux. Parfois, c’est quelques jours seulement après le départ de son mari, ce qui laisse penser qu’il ne s’agit pas d’actions spontanées, mais plutôt d’éléments planifiés avant le départ de son époux51. Cela nous amène à nous questionner sur la part d’action ou « d’improvisation » des femmes pendant que leur époux est absent. Malgré tout, cela témoigne de la participation constante, en présence de Charles, de Madeleine aux affaires familiales. Elle sait qui a des dettes envers son mari et elle n’hésitera pas en entamer des procédures judiciaires pour percevoir l’argent, alors que son époux est dans l’impossibilité de le faire52. En ce qui a trait aux actes notariés, il n’est que rarement mention d’elle comme étant procuratrice. On le devine en observant la chronologie, ce qui témoigne encore une fois des difficultés d’étudier l’action des procuratrices, et de l’importance des études de cas53.

Son cas est intéressant, car elle est présente à de nombreuses reprises devant les tribunaux et devant notaire pour représenter son mari. À l’instar de plusieurs, elle signera des engagements de voyageurs – quatre en 1739 et trois en 1744 – et recevra des obligations. L’acte le plus intéressant est celui où elle forme une société, en juin 1744, avec Charlotte Lemire et Marie-Anne Miré de l’Argenterie tant en leur nom qu’au nom de leurs époux54. Elles apportent chacune pour 12 000 livres de marchandises. Cette association témoigne de l’activité de ces femmes qui étaient loin d’être de simples figurantes dans le commerce de leur mari55.

Veuvage et remariage :
une autonomie disparue ?

Après la mort de son second mari, Madeleine Pépin et Henri Catin, époux de Suzanne Tessier, la belle-fille de Madeleine, s’occupent de clore la succession en nommant un procureur, pour s’assurer que tout se fasse dans l’harmonie. Elle achète aussi des marchandises à sa belle-fille, avec qui elle va habiter à partir de 1748 jusqu’à son troisième mariage. En effet, après trois ans de viduité, elle se remariera avec le célibataire Philippe Leduc, 56 ans, ancien associé de Charles Tessier. On voit ici l’homogamie sociale : Madeleine, bien qu’âgée de 52 ans, représente une union avantageuse pour un commerçant, car elle a les connaissances et le capital pour aider Leduc dans son commerce.

Ainsi, à l’âge de 52 ans, Madeleine se retrouve mariée avec un autre marchand. Par contre, de son mariage jusqu’à son décès en 1768, on ne voit plus Madeleine apparaitre dans les sources. Il n’est mention d’elle qu’à quelques reprises, pour une procuration à un notable et un testament commun, qu’elle signe avec son troisième époux. Est-ce dire qu’elle ne prend plus part à aucun commerce ou qu’elle est devenue trop âgée, comme Suzanne Gousse en émet l’hypothèse56 ? Probablement ni l’un ni l’autre. En fait, Philippe Leduc, contrairement à Charles Tessier, ne s’absentera pas pendant son mariage avec Madeleine. Au cours de cette période, il se présentera devant notaire plus d’une trentaine de fois pour des obligations, actes de vente, engagements de voyageur et différents baux. Il y a un effacement de l’épouse en présence de son mari, et ce, de manière générale, peu importe le statut ou la richesse de la femme en question. Pourtant, il est logique de penser qu’elle soit demeurée activement impliquée dans le commerce de son mari, comme elle l’était dans celui de son précédent époux. Cet exemple montre l’utilité d’étudier les procuratrices pour comprendre le rôle économique et les compétences des femmes pendant la période préindustrielle.

L’absence est donc une des clés pour comprendre le travail des femmes. Suzanne Gousse soulignait avec justesse le fait que de nombreuses femmes semblent très actives à Montréal, contrairement aux femmes observées à Québec par Josette Brun57. On peut penser que c’est l’absence des hommes pour la traite des fourrures qui nous donne cette impression. Cela permet de dévoiler ce que les femmes font en présence de leur époux. L’étude des procuratrices est donc probablement plus riche pour comprendre les activités et compétences quotidiennes des femmes qu’une autonomie ou agentivité qui seraient uniquement temporaire, le temps d’une saison ou de quelques années.

Conclusion

De cette étude, nous avons tenté de démontrer comment l’absence des hommes – abordé à l’aide des procuratrices – permet d’observer le rôle des femmes dans le commerce familial. Cela permet aussi d’aborder le travail autrement qu’avec les catégories sexuées habituelles en recentrant l’analyse sur le couple. L’absence du mari ne représente donc probablement pas un moment d’autonomie pour les femmes, comme tentent de le démontrer plusieurs études, mais plutôt un moment propice pour observer les diverses tâches qu’elles accomplissent au sein du ménage, en présence ou en absence de l’époux. On peut ainsi supposer quelles sont les tâches de celles-ci en présence de leur époux. C’est donc dire que les femmes sont actives et travaillent en présence d’homme, même si les sources laissent penser le contraire. Le contexte économique montréalais et la forte présence de femmes de la bourgeoisie et de la noblesse viennent-ils biaiser notre analyse? Peut-être, néanmoins, une telle approche permet d’accorder une plus grande importance aux femmes au sein du couple et d’éviter de restreindre l’étude du travail des femmes aux veuves et célibataires. Il faut cependant porter une attention minutieuse aux documents et reconstruire des parcours de vie. Celui de Madeleine Pépin dit Laforce nous permet de voir toute l’implication qu’une femme pouvait avoir dans le commerce familial.

L’approche biographique des procuratrices donne une vision linéaire de la vie des femmes, alors que, bien souvent, seule la période de viduité était étudiée, faute de sources produite durant le mariage. On voit ainsi que pour Madeleine l’absence d’homme marquait le début d’une période d’activités devant notaires et en justice. Elle jouait un rôle crucial dans les affaires de son mari Charles Tessier. Elle permettait de s’assurer que les engagements pris à l’égard de celui-ci soient respectés, que les engagés soient embauchés au cours de certaines années, sans compter toutes les actions qui ne sont pas visibles dans les archives. C’est grâce à l’absence que nous pouvons observer ces éléments. Lors de son troisième mariage, elle s’efface des archives, non parce qu’elle est devenue oisive, mais bien parce que son troisième mari est plus présent. D’autres études sur les procuratrices, croisées à une plus grande variété de sources, comme les livres de compte, nous permettraient probablement de comprendre encore plus finement les multiples tâches dont s’occupaient les femmes pendant la période préindustrielle.


Bibliographie

  • Allaire G., « Officiers et marchands : les sociétés de commerce des fourrures, 1715-1760 », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 40, n° 3, 1987, p. 427.
  • Brun J., « Les femmes d’affaires en Nouvelle-France au 18e siècle : le cas de l’Île Royale », Acadiensis, vol. 27, n° 1, 1997.
  • Charpentier E. et Grenier B., « Introduction », dans Charpentier E. et Grenier B., Femmes face à l’absence, Bretagne et Québec (XVIIe-XVIIIe siècles), Québec, CIEQ, 2015, p. 1-2 [en ligne] https://images.cieq.ca/CIEQ_WEB/multimedia/978-2-921926-54-6.pdf.
  • Dechêne L., « La croissance de Montréal au XVIIIe siècle », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 27, n° 2, 1973, p. 164.
  • Dechêne L., Habitants et marchands de Montréal au XVIIe siècle, Montréal, Boréal, 1988 [1974], p. 217-228.
  • Dolan C., « L’An de deuil et le remariage des veuves. Loi et tradition au XVIe siècle à Aix-en-Provence », dans Pellegrin N. et Winn C.H. (dir.), Veufs, veuves et veuvage dans la France d’Ancien Régime, Paris, H. Champion, 2003.
  • Dousset C., « Commerce et travail des femmes à l’époque moderne en France », Les Cahiers de Framespa, n° 2, 2006, [en ligne] https://journals.openedition.org/framespa/57.
  • Doyon-Ferland M., « SAINT-PÈRE, AGATHE DE », dans Dictionnaire biographique du Canada, Québec et Toronto, Université Laval et University of Toronto, vol. 3, 2003, [en ligne] http://www.biographi.ca/fr/bio/saint_pere_agathe_de_3F.html.
  • Dufournaud N. et Michon B., « Les femmes et le commerce maritime à Nantes (1660-1740) : un rôle largement méconnu », Clio. Histoire‚ femmes et sociétés, n° 23, 2006, p. 311-330 [en ligne] https://journals.openedition.org/clio/1926.
  • Ferrière C.-J. de, La science parfaite des notaires ou moyen de faire un parfait notaire, contenant les ordonnances, les arrest et reglemens rendus touchant la fonction des notaires, Paris, 1692.
  • Fortin J., Le célibat féminin à Québec et Montréal au XVIIIe siècle : travail, famille et sociabilité, mémoire de maîtrise (histoire), Université de Sherbrooke, 2016.
  • Gousse S., Les couturières en Nouvelle-France. Leur contribution socioéconomique à une société coloniale d’Ancien Régime, mémoire de maîtrise (histoire), Université de Montréal, 2009.
  • Grenier B., « “Sans exceptions ni réserve quelconques”. Absence des hommes et pouvoir des femmes à Québec au XVIIIe siècle », dans Charpentier E. et Grenier B., Femmes face à l’absence, Bretagne et Québec (XVIIe-XVIIIe siècles), Québec, CIEQ, 2015.
  • Grenier B. et Ferland C., « “Quelque longue que soit l’absence” : procurations et pouvoir féminin à Québec au XVIIIe siècle », Clio. Femmes, Genre, Histoire, vol. 1, n° 37, 2013, p. 197-225 [en ligne] https://journals.openedition.org/clio/11053.
  • Locklin N., « Legal accommodations for married women on their own in Eighteenth-Century France », dans Charpentier E. et Grenier B., Femmes face à l’absence, Bretagne et Québec (XVIIe-XVIIIe siècles), Québec, CIEQ, 2015, p. 40-41.
  • Maitte C., « Le travail invisible dans les familles artisanales (XVIIe-XVIIIe siècle) », Mélanges de l’École française de Rome Italie et Méditerranée modernes et contemporaines, vol. 128, n° 1, 2016 [en ligne] http://mefrim.revues.org/2436 ; DOI : 10.4000/mefrim.2436.
  • Noel J., Along a River. The First French-Canadian Women, Toronto, University of Toronto Press, 2013.
  • Palmer J. L., « Women and Contracts in the Age of Transatlantic Commerce », dans Hafter D. M. et Kushner N., Women and Work in Eighteenth-Century France, Baton Rouge, Louisiana State University Press, 2015.
  • Poisson J.-C., « Introduction à une sociologie statistique des actes de procuration : les actes de confiance », dans Poisson J.-C., Notaires et société. Travaux d’histoire et de sociologie notariales, Paris, Economica, 1985, p. 589-592.
  • Ruggiu F.-J., « Histoire de la parenté ou anthropologie historique de la parenté ? Autour de Kinship in Europe », Annales de démographie historique, n° 119, 2010, p. 223-256.
  • Young K., « “Sauf les périls et fortunes de la mer”: Merchant Women in New France and the French Transatlantic Trade », Canadian Historical Review, vol. 77, no 3, 1996, p. 388-407.

Notes

  1. Dechêne L., « La croissance de Montréal au XVIIIe siècle », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 27, n° 2, 1973, p. 164.
  2. Dechêne L., Habitants et marchands de Montréal au XVIIe siècle, Montréal, Boréal, 1988 [1974], p. 217-228.
  3. Charpentier E. et Grenier B., « Introduction », dans Charpentier E. et Grenier B., Femmes face à l’absence, Bretagne et Québec (XVIIe-XVIIIe siècles), Québec, CIEQ, 2015, p. 1-2 [en ligne] https://images.cieq.ca/CIEQ_WEB/multimedia/978-2-921926-54-6.pdf.
  4. Dousset C., « Commerce et travail des femmes à l’époque moderne en France », Les Cahiers de Framespa, n° 2, 2006 [en ligne] https://journals.openedition.org/framespa/57 ; Brun J., « Les femmes d’affaires en Nouvelle-France au 18e siècle : le cas de l’Île Royale », Acadiensis, vol. 27, n° 1, 1997.
  5. C’est d’ailleurs dans cette optique que le recueil Femmes face à l’absence a été écrit. Charpentier E. et Grenier B., op. cit.
  6. Grenier B. et Ferland C., « “Quelque longue que soit l’absence” : procurations et pouvoir féminin à Québec au XVIIIe siècle. », Clio. Femmes, Genre, Histoire, vol. 1, n° 37, 2013, p. 197-225 [en ligne] https://journals.openedition.org/clio/11053.
  7. Ibid., p. 223.
  8. Locklin N., « Legal accommodations for married women on their own in Eighteenth-Century France », dans Charpentier E. et Grenier B., op. cit., p. 40-41.
  9. Dufournaud N. et Michon B., « Les femmes et le commerce maritime à Nantes (1660-1740) : un rôle largement méconnu », Clio. Histoire‚ femmes et sociétés, n°23, 2006, p. 311-330 [en ligne] https://journals.openedition.org/clio/1926.
  10. De Ferrière C.-J., La science parfaite des notaires ou moyen de faire un parfait notaire, contenant les ordonnances, les arrest et reglemens rendus touchant la fonction des notaires, Paris, 1692, p. 423.
  11. Notre étude ne fait qu’un léger survol de tous les éléments à prendre en considération en ce qui a trait à la procuration. Pour plus de détails, voir Grenier B. et Ferland C., art. cit., p. 201-202.
  12. Grenier B., « “Sans exceptions ni réserve quelconques”. Absence des hommes et pouvoir des femmes à Québec au XVIIIe siècle », dans Charpentier E. et Grenier B., op. cit., p. 35.
  13. Poisson J.-C., « Introduction à une sociologie statistique des actes de procuration : les actes de confiance », dans Poisson J.-C., Notaires et société. Travaux d’histoire et de sociologie notariales, Paris, Economica, 1985, p. 589-592.
  14. Bibliothèques et Archives Canada, Fonds de la famille de Ramezay, lettre de la veuve Boismory à madame de Bellot, à Québec, 28 février 1759.
  15. C. Dolan souligne cet anachronisme alors que le décès du mari représente bien plus une épreuve pénible qu’une quelconque émancipation. Dolan C., « L’An de deuil et le remariage des veuves. Loi et tradition au XVIe siècle à Aix-en-Provence », dans Pellegrin N. et Winn C.H. (dir.), Veufs, veuves et veuvage dans la France d’Ancien Régime, Paris, H. Champion, 2003, p. 68.
  16. Palmer J. L., « Women and Contracts in the Age of Transatlantic Commerce », dans Hafter D. M. et Kushner N., Women and Work in Eighteenth-Century France, Baton Rouge, Louisiana State University Press, 2015, p. 136.
  17. Les procuratrices représentaient environs 20 % de leur corpus, Grenier B. et Ferland C., art. cit., p. 203.
  18. BAnQ-Q, greffe du notaire Louis-Christophe Danré de Blanzy, procuration de Louis-Mathieu Damour de Clignancourt, écuyer, de la ville de Montréal, rue St Paul, à Pierre Leneveu dit Lanorey, 13 juin 1743 et procuration de Louis-Mathieu Damour de Clignancourt, écuyer, à Madeleine Desprez, son épouse, de la ville de Montréal, 13 juin 1743.
  19. Dufournaud N. et Michon B., loc. cit.
  20. Doyon-Ferland M., « SAINT-PÈRE, AGATHE DE », dans Dictionnaire biographique du Canada, Québec et Toronto, Université Laval et University of Toronto, vol. 3, 2003, [en ligne] http://www.biographi.ca/fr/bio/saint_pere_agathe_de_3F.html.
  21. Nous n’avons cependant aucune procuration avant 1745, malgré que Marie-Catherine soit mentionnée comme procuratrice à plusieurs reprises. BAnQ-Q, greffe du notaire Danré de Blanzy, procuration de Agathe St-Père à Marie-Catherine Legardeur de Repentigny, 21 octobre 1745.
  22. BAnQ-Q, greffe du notaire J-H Bouron, procuration de Daniel Legardeur de Repentigny à Marie-Catherine Legardeur de Repentigny, 14 mai 1749 ; greffe du notaire J.-H. Bouron, procuration de Pierre Legardeur de Repentigny à Marie-Catherine Legardeur de Repentigny, 30 juin 1750 ; greffe du notaire Danré de Blanzy, procuration de Louis Legardeur de Repentigny à Marie-Catherine Legardeur de Repentigny, 9 août 1749.
  23. BAnQ-Q, greffe du notaire Jean-Antoine Saillant de Collégien, procuration de Louis Legardeur de Repentigny à Marie-Madeleine-Régis Chaussegros de Lery, 30 avril 1750.
  24. BAnQ-Q, greffe du notaire Simon Sanguinet, procuration de Marie-Madeleine-Régisse Chaussegros de Lery, épouse actuelle de Louis Legardeur de Repentigny, à Joseph-Gaspard Chaussegros de Lery, son frère, 9 juin 1766.
  25. Grenier B., « Sans exceptions ni réserve quelconques… », art. cit., p. 35.
  26. Voir les travaux de J. Noel, dont Along a River. The First French-Canadian Women, Toronto, University of Toronto Press, 2013. Plus précisément le chapitre 3.
  27. Maitte C., « Le travail invisible dans les familles artisanales (XVIIe-XVIIIe siècle) », Mélanges de l’École française de Rome Italie et Méditerranée modernes et contemporaines, vol. 128, n° 1, 2016 [en ligne] http://mefrim.revues.org/2436 ; DOI : 10.4000/mefrim.2436.
  28. Brun J., art. cit.
  29. BAnQ-Q, greffe du notaire Jean-Baptiste Adhémar dit Saint-Martin, ratification de procuration par Paul Leduc à Marie-Anne Lemoine, 23 juin 1742.
  30. BAnQ-Q, greffe du notaire François Lepailleur de Laferté, procuration de Charles Nolan dit Lamarque, marchand bourgeois, à Marianne Legardeur de St Pierre, son épouse, 14 mai 1737.
  31. BAnQ-Q, greffe du notaire Louis-Christophe Danré de Blanzy, procuration de Charles Texier, marchand bourgeois, à Madeleine Pepin dit Laforce, son épouse, de la ville de Montréal, 25 juin 1743.
  32. BAnQ-Q, greffe du notaire Adhémar de Saint-Martin, procuration de François Augé, marchand voyageur et négociant, à Charlotte Lemire dit Marsollet, son épouse, de la ville de Montréal, 25 juin 1743.
  33. BAnQ-Q, greffe du notaire Adhémar de Saint-Martin, procuration de Jean-Baptiste Joliette, marchand voyageur, à Josèphe Watsin, son épouse, 25 juin 1743.
  34. BAnQ-Q, greffe du notaire Louis-Christophe Danré de Blanzy, procuration de Dominique Gaudé, marchand, à Marie-Anne Cullerier, son épouse, de Lachine, 9 juin 1743.
  35. Ibid., procuration de Louis Ducharme, voyageur dans les Pays d’en Haut, à Jeanne Piont, son épouse, de la ville de Montréal, rue St Paul, 25 juin 1743.
  36. Ibid., procuration de Jean Lefebvre, voyageur dans les Pays d’en Haut, à Marie-Anne Paran, son épouse, 3 juin 1743.
  37. Grenier B. et Ferland C., art. cit., p. 221.
  38. Allaire G., « Officiers et marchands : les sociétés de commerce des fourrures, 1715-1760 », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 40, n° 3, 1987, p. 427.
  39. Il est plutôt difficile de baliser le groupe des personnes qui prennent part au commerce des fourrures. Nous utilisons l’étude de Suzanne Gousse sur les couturières de Montréal au XVIIIe siècle, l’outil de recherche Parchemin et le Dictionnaire biographique du Canada pour juger si les familles sont actives dans la traite.
  40. Dechêne L., Habitants et marchands…, op.cit., p. 391.
  41. Ruggiu F.-J., « Histoire de la parenté ou anthropologie historique de la parenté ? Autour de Kinship in Europe », Annales de démographie historique, n° 119, 2010, p. 223-256.
  42. Les actes ont été retracés à l’aide de la banque de données Archiv-Histo, Parchemin : banque de données notariales du Québec (1635-1789).
  43. Ibid.
  44. Ibid.
  45. Fortin J., Le célibat féminin à Québec et Montréal au XVIIIe siècle : travail, famille et sociabilité, mémoire de maîtrise (histoire), Université de Sherbrooke, 2016, p. 61.
  46. Young K., « “Sauf les périls et fortunes de la mer”: Merchant Women in New France and the French Transatlantic Trade », Canadian Historical Review, vol. 77, no 3, 1996, p. 388-407.
  47. Palmer J. L., art. cit.., p. 137.
  48. Grenier B., « Sans exceptions ni réserve quelconques… », art. cit., p. 37.
  49. Gousse S., Les couturières en Nouvelle-France. Leur contribution socioéconomique à une société coloniale d’Ancien Régime, mémoire de maîtrise (histoire), université de Montréal, 2009, p. 82.
  50. BAnQ-Q, greffe du notaire Jean-Christophe Raimbault de Piedmond, procuration de Charles Tessier à Madeleine Pépin dit Laforce, 10 mai 1732 ; greffe du notaire C-R. Gaudron de Chevremont, 27 mai 1733 ; greffe du notaire François Lepailleur de Laferté, 29 mai 1738 ; greffe du notaire Louis-Christophe Danré de Blanzy, 25 mai 1743 ; ibid., 14 mai 1745.
  51. Elle représente son mari pour une affaire de dette, en 1738, alors que celui-ci n’est parti que depuis quelques jours. BAnQ-Q, Fonds juridiction royale de Montréal, procès entre Dominique Janson dit Lapalme, à titre de cessionnaire de son père Pierre Janson, demandeur, et Charles Tessier, représenté par son épouse Madeleine Pépin dit Laforce, défendeur, pour dettes, 23 juin 1738-26 juin 1738.
  52. Cette question est d’ailleurs soulevée par Michon et Dufournaud, art. cit.
  53. Grenier B., « Sans exceptions ni réserve quelconques… », art. cit., p. 37.
  54. Gousse S., op.cit., p. 103.
  55. Ibid.
  56. Ibid.
  57. Ibid., p. 104.
Rechercher
Pessac
Livre
EAN html : 9782858926374
ISBN html : 978-2-85892-637-4
ISBN pdf : 978-2-85892-638-1
ISSN : 2741-1818
Posté le 23/11/2022
13 p.
Code CLIL : 3377; 3111
licence CC by SA

Comment citer

Fortin, Jonathan, « Le travail des femmes et la famille : les procuratrices à Montréal au XVIIIe siècle », in : Charpentier, Emmanuelle, Grenier, Benoît, dir., Le temps suspendu. Une histoire des femmes mariées par-delà les silences et l’absence, Pessac, MSHA, collection PrimaLun@ 12, 2022, 259-271 [en ligne] https://una-editions.fr/le-travail-des-femmes-et-la-famille/ [consulté le 23/11/2022].
10.46608/primaluna12.9782858926374.19
Illustration de couverture • Détail de Het uitzeilen van een aantal Oost-Indiëvaarders, huile sur toile, Hendrick Cornelis Vroom, 1600, Rijksmuseum (wikipedia).
Retour en haut
Aller au contenu principal