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Les chartriers des Foix-Béarn à la fin du Moyen Âge.
Des inventaires au service du pouvoir et de la mémoire du prince

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Ce qu’il est convenu de nommer, depuis le XIXe siècle, le “Trésor des chartes de Pau” résulte de la sédimentation et de l’intégration de divers chartriers seigneuriaux et princiers qui composent, au bout du compte, les archives et titres des rois de Navarre au tournant des XVe et XVIe siècles. Catherine de Foix et Jean d’Albret sont alors les héritiers de divers “lignages” et domaines, dont les archives se sont progressivement agrégées au fil des alliances et des successions. Nous rappellerons d’abord quelques-uns de ces jalons, de la fin du XIIIe siècle au début du XVIe siècle, pour mettre en perspective la réflexion proposée ensuite sur les relations entre chartriers, inventaires, pouvoir et mémoire au temps des Foix-Béarn, du XIVe siècle au milieu du XVe siècle.

Contextes, chartriers et inventaires : jalons pour une “histoire documentaire des principautés”1 des Foix-Béarn

En 1290, la mort de Gaston VII Moncade, vicomte de Béarn, sonne l’union du comté de Foix et de la vicomté de Béarn, préparée par le mariage de sa fille Marguerite et de Roger-Bernard III, comte de Foix2. S’ouvre l’ère dite des Foix-Béarn qui, au XIVe siècle, fixent leur pouvoir à Orthez, érigée en capitale vicomtale par Gaston VII, au château Moncade, par la suite embelli par Gaston III dit Fébus (1343-1391) et siège d’une vie de cour magnifiée par les Chroniques de Jean Froissart3… Balançant désormais entre mouvances française (en Foix, Terres-Basses d’Albigeois, Lautrec…) et anglaise (en Béarn, Marsan, Gavardan…), Fébus a fait de cette politique une ligne de conduite tout en maintenant le Béarn dans la neutralité et dans une souveraineté de facto4. Au début du XIVe siècle, jouxtant le comté de Foix et sur le versant sud pyrénéen, tenant les cols, les comtes de Foix héritent du contrôle de la coseigneurie d’Andorre, du Donezan, des châtellenies cerdanes, de la vicomté de Castelbon5, tenues du roi d’Aragon et comte de Barcelone ; de l’héritage des Moncade, leur viennent les baronnies de Moncade et de Castelvieil relevant des rois d’Aragon6. Résidant de façon privilégiée en Béarn, Gaston III se rend peu à Foix où il laisse nobles et officiers fuxéens administrer le comté7, mais il séjourne souvent au château de Mazères, situé aux confins du pays de Foix et à proximité de Toulouse. En 1389-1390, il y rencontre Charles VI, pour préparer une succession qui s’annonce épineuse, puis le reçoit avec faste à Mazères8.

À la mort de Fébus, intestat et sans héritier direct légitime, en dépit du traité de Toulouse passé avec le roi mais en vertu d’une clause du testament de Gaston II9, les domaines de Foix-Béarn passent à un petit-cousin, Mathieu vicomte de Castelbon. Ce prince meurt dès 1398, sans enfant malgré son mariage avec Jeanne d’Aragon pour laquelle il a eu le temps de revendiquer la couronne d’Aragon, de déclencher la guerre… et de la perdre, se faisant confisquer nombre de territoires au sud des Pyrénées. En 1398, sa sœur Isabelle de Castelbon, devient comtesse de Foix et vicomtesse de Béarn et avec elle, en prince consort mais rapidement à la manœuvre, le puissant Archambaud de Grailly, captal de Buch. La prise de pouvoir est difficile : la reconnaissance des États de Béarn se négocie, et comme Mathieu, le comte se plie à une tournée d’hommages et de serments, en Foix et en Béarn ; les relations sont encore plus épineuses avec l’Aragon pour solder la guerre de Mathieu, ou auprès de la cour de France en raison des fidélités anglo-gasconnes d’un Grailly, captal de Buch… Ce n’est qu’1401 qu’Archambaud et Isabelle sont pleinement reconnus par le roi de France. À la mort d’Archambaud (1412), son fils Jean Ier devient comte de Foix, mais il ne reçoit le serment des États de Béarn qu’à la mort de sa mère, en 1428. On le sait, ce début du XVe siècle est chaotique, miné par la guerre franco-anglaise et par la guerre civile10. Jean Ier, comme son fils et héritier Gaston IV, naviguent à vue, voire en eau trouble, mais se rangent finalement dans le camp de Charles VII11.

Les Foix-Castelbon ont tenté de s’immiscer dans les jeux ibériques, en particulier grâce à des alliances matrimoniales : mariage de Mathieu avec une infante d’Aragon, un échec cuisant ; Jean [Ier] épouse Jeanne de Navarre, fille de Charles III, héritière du royaume de Navarre, mais la mort prématurée de l’infante déçoit l’accès espéré au trône. Jean Ier se remarie avec Jeanne d’Albret, fille de Charles d’Albret, connétable de France mort à Azincourt12, première union avec les Albret… Leur fils Gaston, futur comte de Foix de 1436 à 1472, épouse Éléonore de Navarre qui à la toute fin de sa vie est reine de Navarre († 1479), transmettant ainsi la couronne à leur petit-fils, François Fébus († 1483), puis à sa sœur Catherine de Foix13, reine de Navarre, mariée en 1484 à Jean d’Albret, fils d’Alain d’Albret et de Françoise de Blois-Bretagne… Couronnés en 1494, Catherine et Jean règnent entre Pampelune et Pau jusqu’en 1512, date à laquelle ils doivent se réfugier en Basse-Navarre et dans leurs domaines français lorsque la Navarre est conquise par le duc d’Albe pour Ferdinand d’Aragon. Pau et Nérac deviennent alors les résidences privilégiées de ces rois de Navarre qui sont toujours comtes de Foix, vicomtes de Béarn, entre autres.

Les archives se sont donc sédimentées et agrégées dans les chartriers au fil des générations, des mariages et des successions, des achats, des échanges, des conquêtes qui ont bénéficié aux Foix-Béarn-Albret-Navarre, induisant d’administrer des domaines épars et composites, de défendre leurs droits par les armes, la diplomatie, le relais des officiers, mais aussi par l’écrit. Ces dépôts ont, à partir du XVe siècle, été largement alimentés par les Albret, dont les biens et les alliances, s’ajoutant à ceux des Foix-Béarn, s’étendaient de leur berceau gascon jusqu’au Val de Loire et à l’Île de France.

À ce jour, le “Trésor des chartes” de Pau est composé de 890 cotes (XIIe-XVIIIe siècle). Dans la seconde moitié du XIXe siècle, son classement a été pensé à partir d’un prestigieux point d’arrivée, la famille royale de Navarre, et selon l’ordre alphabétique des domaines, gommant ainsi la chronologie des différentes “familles”, la sédimentation des chartriers, les classements successifs. Les premières cotes de la Série E sont donc celles des inventaires des archives du château de Pau réalisés pour les rois de Navarre14 mais les Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques conservent une trentaine d’inventaires, inédits et méconnus, épais de quelques dizaines à plusieurs centaines de folios, dressés du début du XVe siècle au XVIIIe siècle15.

Mobilisant leurs archives pour gouverner et répondre à des contextes politiques particuliers – successions, prises de pouvoir, épisodes de crispation, voire de faiblesse, mais aussi de réforme –, les chartriers ont été visités, réorganisés, transférés. Ces mouvements ont laissé des traces documentaires : les inventaires. “Clef du Trésor” (M. Duchein)16, le livre d’archives permet de savoir de quels documents l’on dispose, de s’orienter dans le chartrier pour les trouver : il vise d’abord à un aspect pratique de la mobilisation des archives tout en participant à leur monumentalisation, au même titre que l’installation d’une pièce dédiée (chartrier), de meubles adéquats (coffres, armoires), voire d’un garde des archives17. Les inventaires anciens, longtemps délaissés car jugés obsolètes et moins fiables que ceux des archivistes contemporains, ont bénéficié depuis les années 1990 des renouvellements historiographiques qui ont mis en lumière les pratiques et les cultures de l’écrit. Ils sont désormais étudiés per se depuis une quinzaine d’années pour comprendre l’histoire des pratiques scripturales et des cultures politiques et administratives18.

Les recherches des universitaires et étudiants de l’université de Pau, avec des archivistes19, visent à dépasser une vision figée – l’inventaire vu à un instant T et seulement comme gisement de sources – en tentant plutôt de restituer les dynamiques tissées entre les chartriers et les inventaires, dans l’espace et dans le temps. Chaque chartrier en effet n’est pas un isolat, se pose la question par exemple des transferts/absorptions d’archives liés aux évolutions de l’histoire “familiale”, dynastique, à celle des domaines de ce qui devient l’ensemble des “Foix-Béarn-Albret-Navarre”. Histoire politique et institutionnelle peuvent être ainsi articulées à une histoire documentaire, intégrant les contextes de production et d’usage des inventaires afin de saisir, par exemple, les pratiques et la culture des officiers, les modes de gouvernement par l’écrit qui se diffusent de façon exponentielle à la fin du Moyen Âge, ou les rythmes des campagnes d’inventorisation. La réfection cyclique des inventaires est-elle à lier, comme l’invoquent souvent les mandements comtaux ou les préambules, au désordre des archives (topos ou/et réalité ?)20, ou bien aussi à la question des usages tout autant qu’aux principes qui président à la conception de ces documents ? Ne faut-il pas plutôt envisager des séries/des campagnes d’inventaires, des générations, des types différents d’inventaires ? Enfin, n’oublions pas que les princes font établir des inventaires des titres, mais aussi de meubles, d’objets précieux, de bibliothèques21, cet ensemble composant leur “Trésor”, terme d’ailleurs présent dans le titre calligraphié et dans le préambule de l’inventaire des archives du château de Foix dressé sous la houlette de Michel de Bernis au milieu du XVe siècle :

Repertori e inventari del tresaur et secrets del tres aut, inclit princip et redoptable seignor mossen Gaston, per la gracie de Diu comte de Foix, de Bearn et de Bigorre, etc.Feyt et commensat lo 7 decembre 1445. [Suit le texte du préambule]22

Au sein de chaque domaine, un ou plusieurs châteaux emblématiques abritent le chartrier : le château de Foix en comté de Foix23, celui de Castelbon, en Béarn celui d’Orthez – chartrier cité dans un inventaire de 1533, de même qu’un repertori deu cartulari deu castet d’Orthes contenent inventari deus documens… dressé sur ordre de Jean Ier en 1431, aujourd’hui introuvable24 – puis celui du château de Pau, ceux de Casteljaloux et Nérac en pays d’Albret, de Montignac pour le comté de Périgord et la vicomté de Limoges, de Lectoure pour les terres gasconnes d’Armagnac… Les princes se font au besoin porter des pièces25, transfèrent des documents, des parties de chartriers, voire leur totalité, pour prévenir des menaces ou pour des raisons pratiques : avant même 1512, mais sans doute aussi au moment de l’invasion de la Navarre, la reine, Catherine de Foix fait transporter des archives de Pampelune en Béarn26 ; en 1512, la reine fait également procéder au transfert – ou plutôt au sauvetage et captation – des archives du château de Castelbon avant que le roi d’Aragon ne s’en empare27 ; quelques années plus tard, lorsque les troupes espagnoles menacent Sauveterre-de-Béarn28, le chartrier d’Orthez est mis à l’abri à Pau, devenue capitale dans la seconde moitié du XVe siècle, transfert attesté par le préambule du plus ancien inventaire conservé des archives du donjon de Pau, dressé en 153329 ; aux XVIe et XVIIe siècles, des pans importants de chartriers de divers châteaux des domaines des rois de Navarre sont rapatriés à Pau, au plus près des institutions centrales30. Ainsi, un arrêt du Conseil du roi, pris à Fontainebleau le 8 août 1664, ordonne que les titres d’Albret soient transférés de Nérac à Pau31.

À Foix, le chartrier comtal demeure au château de Foix jusqu’à la Révolution, installé au sommet de la Tour ronde érigée au XVe siècle32. De nombreux documents ont cependant été apportés à Pau, sans que l’on puisse toujours en saisir la date ou la raison. Ainsi, y sont aujourd’hui conservés deux inventaires du chartrier du château de Foix datés, selon les actuels instruments de recherche, de 1403 et de 144533, et un inventaire des archives du château de Castelbon établi en 140534. Ces transferts ont été une chance : à Foix, le chartrier comtal a été intégralement détruit par un incendie en 180335. Demeurent aujourd’hui aux Archives départementales de l’Ariège deux beaux et précieux inventaires des archives de la Tour ronde dressés en 1760-1761 et un inventaire produit pour l’abbaye de Boulbonne au XVIIIe siècle36, quelques actes rescapés du désastre, des documents qui ont été restitués37 ou redécouverts récemment38, mais c’est à Paris39 ou à Pau que l’on doit consulter la plupart des documents conservés sur la maison de Foix.

On notera qu’à la différence des archives de grandes maisons transférées à Paris, les archives des rois de Navarre sont en majeure partie restées à Pau, conservées jusqu’au XIXe siècle – dans de fort mauvaises conditions matérielles – dans le donjon de brique érigé par Fébus. Au XIXe siècle, elles pérégrinent avec plus ou moins de bonheur de dépôt en dépôt40, réorganisées finalement par Paul Raymond selon le cadre de classement qui prévaut encore aujourd’hui et dont nous avons indiqué les biais41.

Les inventaires de 1403 et 1405, un arsenal pour défendre ses droits et gouverner

Nous nous sommes intéressée au plus ancien inventaire conservé, celui du chartrier du château de Foix, dressé en 1403, ainsi qu’à celui du château de Castelbon (1405)42, tous deux confectionnés sur l’ordre d’Archambaud de Grailly. En tête de chaque registre, son mandement prescrit, pour le chartrier de Foix que foc sercat lo cartulari de Foixs et feyt l’inventari… e fo feit hun armari, et pour celui de Castelbon, que fo sercat et visitat lo cartulari deu castet de Castelbon et feit inventari, le texte indiquant ensuite fo feit I armari43. Le verbe sercar signifie qu’il s’agit de “réviser” les chartriers, preuve qu’ils existent déjà selon une organisation inconnue. Le mandement comtal ordonne qu’à Foix “soient faits II livres d’inventaire d’une même teneur, que l’un demeure dans le chartrier et que l’autre soit en possession de Monseigneur”, l’exemplaire du comte devant être régulièrement mis à jour.

Ce qui paraît nouveau, en 1403 et 1405, est d’associer la réalisation de ces inventaires à la construction d’armoires, de grande dimension, dotées de ferrures et serrures44 : à Foix, l’armari à 5 étagères (solier, soler) compte 15 caissons (caixo, calso, causson), chaque caisson étant subdivisé en 3 caissettes (caixeta) ; à Castelbon, le modèle est le même, mais à 4 soliers (soit 12 caissons, eux-mêmes subdivisés en 3 caissettes chacun)45. Selon une cotation alphabétique classique (simple de a à y, puis doublée), chaque caissette est marquée sur l’avant d’une lettre (senhada en lo cap davant de [lettre]) et porte une courte mention qui définit son contenu, lettre et mention que l’on retrouve dans l’inventaire sous la forme de titres pour la plupart calligraphiés en tête de chaque chapitre. La disposition visuelle de l’armoire et le classement de l’inventaire se répondent donc de façon très pratique pour faciliter le repérage des documents. Aucune armoire antérieure n’est mentionnée, mais sont en revanche listés dans les inventaires, par exemple à Foix, des sacs, des paquets (fardelhs), des caisses et caissettes, une grande huche… ce qui laisse supposer que la commande de l’armoire apporte une organisation et une rationalité nouvelles dans le chartrier.

Mieux, un règlement, très précis pour le chartrier de Foix – moins à Castelbon –, détaille comment procéder lorsque l’on souhaite extraire un document. Il convient d’abord de consulter ce qui est porté sur les caissettes et de se reporter à l’inventaire pour s’assurer de la présence du document recherché. Pour tout acte retiré de l’armoire, il faut noter la date, le nom des témoins présents, l’intitulé du document, la cote de la caissette, idem lorsqu’il est réintégré. Autre cas de figure envisagé : lorsqu’un document est déposé dans le chartrier, il peut être classé dans une caissette existante ou placé dans deux caissettes laissées à disposition pour des dépôts qui ne s’insèreraient pas dans l’existant46. Tout nouveau document intégré doit être inscrit dans l’inventaire qui demeure dans le chartrier mais également dans l’exemplaire du comte47.

Le classement choisi est classique, à Foix comme à Castelbon : géographique, selon les domaines du comte de Foix de part et d’autres des Pyrénées48 ou thématique, par type d’acte ou dossier49. L’inventaire de Foix liste des séries – déjà constituées en “fonds” ? – de documents déjà cotés, de façon continue ou discontinue selon le système classique de lettre simple ou double. Ainsi, identifier les différentes “Lettres des rois de France” est facilité par une cotation continue de a à y puis de aa à yy (dates extrêmes 1274-1383)50… ce qui n’empêche pas que des lettres royales soient également disséminées dans tous les chapitres de l’inventaire, cotées ou non. Autre exemple : la répartition de cotes entre les caissettes “Pamiers” et “De Pamiers” laisse entrevoir l’éclatement, ou le reclassement, d’un fonds numériquement important51.

Si à Castelbon, les éléments manquent pour situer le chartrier dans le château, les indices glanés dans l’inventaire fuxéen et l’observation de plans du château de Foix nous ont permis de conclure que le chartrier et l’armoire sont alors installés au deuxième étage de “la tour carrée du milieu”52. Dotée d’une cheminée, cette salle a été réaménagée au temps d’Aliénor de Comminges, épouse de Gaston II et mère de Gaston III dit Fébus, décorée par des clefs de voûte aux armes de Foix-Béarn et de Comminges. Le trésor de parchemin et de papier est donc conservé au cœur du château comtal, probablement dès avant 1403 mais désormais monumentalisé par l’armoire53. Le chartrier n’est pas encore installé au sommet de la Tour ronde qui, d’après les archéologues, historiens de l’art et documents d’archives est alors, au mieux, en construction54.

Pour cette lourde mission d’inventaire des “écritures” (scripturas) et de réorganisation des chartriers, tant à Foix qu’à Castelbon, le comte mandate un Béarnais, Bertrand Dauga (ou d’Auga), curé de Bonnut, dont on peut supposer qu’il jouissait à la fois de la confiance comtale et d’une expertise pour cette tâche dont il s’est acquitté durant plusieurs années55. À Foix, il a commencé l’inventaire le 30 avril 1403, en présence du châtelain, Noble Manaut de Navailles, et de Guilhem Galhard de Foix, trésorier général du comté, et l’a achevé le 21 septembre suivant, soit en moins de cinq mois56. Une lecture attentive de l’inventaire révèle cependant qu’il intervient à nouveau dans le chartrier en 140757 et surtout en 140958. Après cette date, d’autres officiers prennent le relais, ajoutent des pièces dans l’inventaire et l’armoire, tiennent le registre des entrées et des sorties prévu par le règlement, effectivement appliqué au moins un temps… Certains de ces hommes ont collaboré avec Bertrand Dauga (les a-t-il formés ?). Les plus abondamment cités sont Guilhem Galhard de Foix, trésorier général du comté, Me Johan Sartre, cité comme notaire, mais aussi trésorier du comté, conseiller du comte et reformador de son domaine, Jacmes de Montelha, receveur puis trésorier du comté, Me Vidal Borras, notaire de Foix très souvent sollicité, dont les mentions courent de 1397 à 141759. B. Dauga, les officiers du comte, qu’ils soient praticiens du droit ou hommes de finances, s’emploient à tenir le registre avec soin (titres calligraphiés, mise en page soignée). Ils rédigent de courtes analyses (de quelques mots à un paragraphe), très probablement reprises des mentions dorsales60, inventorient le plus souvent pièce à pièce, mais pas toujours61 ; ils sont attentifs aux termes qui définissent les supports et la nature des documents, la forme des actes, à la présence de sceaux (nombre, type de scellement, couleur de la cire, état du sceau…)62 ; ils signalent les réintégrations de pièces grâce aux feuillets laissés blancs à la fin de chaque chapitre. L’inventaire proprement dit est suivi d’un registre des entrées et des sorties, tenu à partir du folio 9663.

Les ajouts dans l’inventaire et dans les caissettes courent jusqu’en 1429, sous Jean Ier, preuve d’une certaine longévité du système lancé en 1403, mais à un rythme inégal et avec un ralentissement palpable après la mort d’Archambaud survenue en 1412 : on procède de 1 à 3 dépôts de pièces pour les années 1406, 1408, 1410, 1411, 1414, 1416, 1417, 1419, 1427, 142964 mais 5 en 1407, 6 en 1412, 15 en 1409. Derrière ces chiffres bruts, nuançons : si certains ajouts se font à l’unité, ce sont parfois des lots d’actes qui sont restitués et déposés dans l’armoire65. Des oscillations comparables se produisent dans le registre des entrées et des sorties, tenu de 1406 à 141766.

L’armoire met désormais à l’abri au cœur du chartrier les documents sélectionnés parce que “profitables” tandis que ceux jugés “de peu de valeur”, “peu profitables”, “ne valant rien” sont signalés mais ne sont pas décrits. Les pièces inventoriées et conservées dans l’armoire forment une collection, un “trésor des chartes” mais qui, loin d’être fossilisé, est mobilisé par le comte et ses officiers : l’armoire est alimentée jusqu’en 1429, les sorties et entrées de pièces disent l’activité de l’administration comtale. Tous les documents du chartrier de Foix n’intègrent pas pour autant ce meuble : à la fin de l’inventaire, sont listés “hors de l’armoire” des documents épars ou en séries, 7 caissettes cotées selon un système de classement parallèle ou antérieur à celui de 1403, répartis entre le chartrier (y compris dans sa cheminée !) et une chambre basse du château :

Seguen se las scripturas messas fora l’armari
Primerament una caxeta senhada en lo cap davant de a en la qual ha scripturas de Pamias pauc valentz et per so non es feit enventari.
Una caixa senhada en lo cap davant de B en la qual ha scripturas de Pamias pauc valentz et per so non es feit inventari.
Una caixa senhada en lo cap davant de B en la qual libres dels contes dels focs libres dels arrendamentz feitz en los temps passatz en lo comtat de Foix e en Lautragues.
Una caixa senhada en lo cap davant de d en la qual ha proces e autras scripturas pauc valentz. Una caixa senhada en lo cap davant de E en la qual ha cartas e scripturas petit aprofitables.
Una caixa senhada enlo cap davant de f en la qual ha scripturas no rei valens.
Una caixa senhada en lo cap davant de g en la qual ha scripturas no rei valens.
Item fon metudas en una ucha on que ha gran colp de libres de contes e aixi medix scripturas paux valentz quar tot es estat passat del temps de madona Alienor comtessa de Foix en la gran gran (sic) crampa de laius.
Item fo metuda en la chimineya de la toro u es lo dit armari libres de contes et aixi medix scripturas de las mostras feitas en lo temps de la guerra dels reys per lo comte de Foix67.

À Foix comme à Castelbon, ces deux inventaires d’une même génération relèvent d’une conception identique : leur format in-4° est maniable, pratique, ils sont avant tout des registres de travail qui témoignent d’une pratique déjà rodée du maniement des archives (règlement, inventaire, registre des entrées et des sorties). Dans ce tableau, l’absence d’un garde des archives en titre étonne… L’inventaire et l’armoire prévoient l’accroissement des fonds (feuillets laissés blancs et caissettes disponibles). Les notations marginales abondent dans le registre fuxéen, visiblement manié bien après 1403, et encore durant toute la décennie 1410 et même après, et par bien des mains : des manicules attirent l’attention sur tel ou tel acte, différentes mains, désormais identifiées (celles de Johan Sartre, de Vidal Borras, mais aussi de Vidal Sans, notaire de La Bastide-de-Sérou) annotent le registre en ajoutant en marge des noms de lieux ou les mots homenages, hoblias, questas, reformasion68. Ces mentions marginales sont en revanche quasi absentes dans l’inventaire de Castelbon : rapporté à Foix, il s’est probablement fossilisé car déconnecté de la vie du chartrier.

Ces registres sont d’abord utiles aux officiers du comte mais aussi au prince, en possession d’un exemplaire de l’inventaire. Les documents mobilisables peuvent être brandis comme autant de preuves des droits, privilèges et pouvoirs des comtes de Foix, au-delà des circonstances, des successions difficiles, en 1391, de 1398 à 1401 par exemple. Les ajouts démontrent que l’on se fait restituer des actes détenus par des officiers, des particuliers ou des communautés69. Des actes sont envoyés, en original ou en copie authentifiées, au comte70, à ses officiers ou plus loin, pour alimenter des procès en cours, avec la cour du sénéchal ou du juge des appeaux de Toulouse, avec les capitouls au sujet des leudes du comté71… Les documents sont parfois extraits une journée72 mais quittent parfois le dépôt plusieurs mois73.

Du point de vue princier, les difficultés de l’accession au pouvoir d’Archambaud et d’Isabelle, leur reconnaissance par le roi de France en 1401, ont pu jouer dans l’ordre du comte d’inventorier le chartrier de Foix en 140374. La prise de contrôle des archives, par l’inventaire, leur permet de construire leur pouvoir en prenant la mesure du domaine et des droits d’un comté dans lequel ils ne résident guère. Ils disposent par exemple de nombre de documents, en original ou copie, prouvant la légitimité à régner des Foix-Castelbon (le testament de Gaston II est maintes fois mobilisé), mais aussi les actes touchant aux limitations du comté, bornages et points de fiscalité. Se dessine ainsi la nette volonté de connaître leurs terres, les communautés dominées, leurs droits, devoirs et privilèges, pour administrer plus efficacement, de définir leur pouvoir vis-à-vis du roi mais aussi de l’évêque de Pamiers, des abbayes et couvents, des nobles fuxéens (inventaire des hommages, des fiefs), des communautés et des vallées… Les comtes de Foix mettent aussi en avant l’étendue de leurs pouvoirs dans leur principauté : l’inventaire récapitule les privilèges reçus des rois de France, ainsi que les cas habituellement réservés à la justice royale, mais que les comtes de Foix peuvent juger, la fausse-monnaie, l’hérésie, le port illicite d’armes…

À la toute fin du registre, Bertrand Dauga se couvre mais, ce faisant, met en lumière l’articulation entre l’activité du chartrier de Foix et le poids des contextes, de la fin de règne de Fébus jusqu’à la succession des Foix-Castelbon-Grailly. Il prend en effet soin de lister “les chartes et autres écritures qui ont été retirées dudit chartrier mais n’ont pas été retournées, comme cela est plus clairement contenu dans un livre qui a été mis dans l’armoire, selon ce que moi Bertrand Dauga j’ai pu recueillir avec difficulté. Cependant s’il en manque, on pourra le voir et le corriger”75. Suit l’énumération de documents retirés du chartrier entre février 1371 et 1402. Pour le règne de Gaston III, il s’agit surtout de pièces financières touchant à l’administration du comté de Foix – que Fébus a pu se faire porter là où il résidait–, ou d’actes liés aux négociations avec le duc d’Anjou, avec le roi Charles VI à la veille du traité de Toulouse : ainsi en 1389, 27 pièces et une lettre royale sont envoyées au roi à Carcassonne, “et on ne sait ce qu’il en est advenu”. Sous Mathieu, en 1396 et 1397, il s’agit de droits reconnus par le roi au comte, mais aussi d’ “un rôle fermé à clé qui a été porté en Béarn à Monseigneur”, ou encore d’extraire le testament de Gaston II qui a justifié la succession à Mathieu, mais aussi “la clause de substitution de Mathieu”. De 1399 à 1402, sous Isabelle et Archambaud, les pièces extraites, touchent sans surprise à la succession, mais aussi aux limitations, droits et assignations dans le comté…

Dans le même temps, Isabelle et Archambaud s’emploient à liquider les litiges hérités du conflit déclenché par Mathieu qui avait conduit en 1397 à la confiscation de la vicomté de Castelbon et de possessions au sud des Pyrénées. Ils obtiennent la restitution de ces domaines en 1400, hormis Castelvieil de Rosanes, Martorell et quelques places. Le roi d’Aragon reçoit l’hommage de leur fils aîné, Jean, envoyé dans l’ambassade fuxéenne. En 1402, à l’occasion de son prometteur mariage navarrais, Jean est fait vicomte de Castelbon, titre désormais de l’héritier de Foix-Béarn. Il ne se rend dans la vicomté qu’en 1406, mais elle est administrée, dès sa restitution, par le béarnais Arnaud de Sainte-Colome. Entre temps, le chartrier a été visité et révisé par Bertrand Dauga, accueilli par Arnaud de Sainte-Colome qu’il cite dans la quittance de ses frais de mission en 140576. Le jeune vicomte et ses officiers peuvent compter sur des archives mises en ordre, (re)prise de pouvoir et contrôle du chartrier vont de pair.

Far memoria : la “chronique” et l’inventaire de Michel de Bernis (1445)

Au milieu du XVe siècle, surgit un tout autre inventaire des archives du château de Foix, un registre monumental, in-folio, de plus de 400 folios, aujourd’hui conservé à Pau77. Copié avec soin, sa mise en page aérée laisse admirer les titres calligraphiés de gros module, les initiales à cadelures ou ornées de festons, de filigranes, de points, voire de motifs zoomorphes, le tout tracé à l’encre noire. Lourd et difficile à manier, sa forme révèle qu’il s’agit d’un registre de prestige, rendu plus fameux encore par le texte en prose et en vers qui couvre ses vingt-six premiers folios : la “chronique” des comtes de Foix, rédigée en oc par Michel de Bernis, notaire de Foix au service des comtes Jean Ier et Gaston IV, remarquablement éditée par Hélène Biu78. En publiant un texte désormais scientifiquement établi sur l’original, l’auteure a étudié la langue et l’écriture de Michel de Bernis, mêlant prose et vers, ses modèles et influences ; elle a distingué ce que cette œuvre doit à l’Épître composée par Honoré Bovet pour Gaston III, retraçant la succession des comtes de Foix, et ce qui est de la plume de Michel de Bernis. D’après H. Biu, le texte d’Honoré Bovet, mêlant prose et poésie, courait jusqu’à la bataille de Launac (1362), Michel de Bernis l’aurait repris et adapté, puis poursuivi pour narrer l’histoire des comtes de Foix jusqu’en 1444, date à laquelle se termine son texte.

Le registre s’ouvre par le titre que nous avons cité plus haut, suivi d’un préambule. Michel de Bernis y précise ce qu’est ce volume pour lui – un “Livre appelé Répertoire et inventaire du trésor et des secrets du très haut, illustre et redoutable seigneur, Monseigneur Gaston, par la grâce de Dieu comte de Foix…”–, indique qu’il s’est mis à rédiger cet inventaire le 7 décembre 1445, sur l’ordre d’Éléonore de Navarre, épouse et lieutenante générale de Gaston IV, transmis au trésorier du comté de Foix :

Aquest es lo libre appellat Repertori et inventari del tresaur et secrets del tres aut, inclit princip et redoptable seignour mossen Gaston, per la gracie de Diu comte de Foix, de Bearn et de Bigorre, viscomte de Marsá, de Gavardá, de Castelbon, de Lautrec, de Villamur, et seignour de Andorrá, feyt et commensat l’an de la Incarnation de Nostre Seignour mil quoatte cens quoarante et cincq, lo sept jour deu més de desembre, per my, Miquel de Vernis, notari de Foix et procuraire deldit mossur lo comte, per mandament et ordonnance de tres aute, inclitá, et de royal geniture, madame Leonor, enfante de Navarre, moilher deldit mossen lo comte, comtesse et viscontesse dels comtats et viscomtats susdits, et sa loctenente generalle en toutes sas terres et dominations, com esta ferm en une clause entre las austres contengude en sas lettres trameses el thesaurer dejus nomat, en lasquals es contengut lo mandament que loudit inventary se [fol. 3v] reformés per my, Miquel de Vernis, de laquoal lettre et clause la thenour s’ensecq…79

Il insère ensuite le mandement de la comtesse, donné à Nay le 6 août 1445, qui prend acte d’une lettre du Trésorier du comté de Foix, Arnaud Esquerrier, faisant état d’un cartulari qui disets es malement desordenat et seré besoing que fousse reformat et mettut en bonne ordi. La comtesse enjoint que meste Miquel lo reformi et mette en acquet ordi quy serà necessari. Michel de Bernis a donc pour mission de remettre en ordre le chartrier de Foix, sans doute s’est-il mis à la tâche dès l’été 1445 pour commencer à rédiger son “livre” début décembre 1445… À cette date, le chartrier est installé dans la Tour ronde : en atteste une notation dans l’inventaire où l’on voit le notaire faire la navette entre les caisses de la tor redonda et celles de la tor cayrada del mieg (la tour carrée du milieu)80. Les archives sont désormais gardées en lieu sûr au sommet de la tour ronde qui surplombe la ville de Foix avec ostentation, matérialisant l’autorité comtale. À la suite de la copie du mandement comtal, Michel de Bernis entame son texte par ses mots :

Et per entrament et honnorable commensament del present libre, ad eternal memoria dels comtes antiqs de Foix, et per saber qui foc lo prumer comte de Foix, et successivement, touts lous ausres entro lo jour present, lodit mestre Miquel de Vernis n’a volgut far memoria avans que procesis aldit inventari. Et tout prumerament, qui foc le prumer comte de Foix81

Lorsqu’il désigne son œuvre, Michel de Bernis n’use pas du terme de chronique mais de celui de gesta82. Ce chapeau historiographique, ce panégyrique dont l’objectif est de far memoria, formule maintes fois réitérée dans le registre, met donc en perspective les pièces sélectionnées et inventoriées, qui à leur tour forment les preuves de ce que contient la geste des comtes de Foix. Les deux parties de ce volumineux registre se répondent, forment un ensemble cohérent.

A. Dufau de Maluquer a retracé son cheminement aux XVIe et XVIIe siècles, dit “Livre blanc” et toujours identifié par son titre singulier, “Répertoire et inventaire…”, de Foix à Pau, via Nérac au XVIIe siècle83. L’histoire de ce manuscrit prouve qu’il est resté confidentiel, y compris la “chronique” de Michel de Bernis pourtant si précieuse, alors que celles d’Arnaud Esquerrier ou de Miègeville, pourtant moins fiables, se sont diffusées84.

Cet effacement est dû à notre avis à sa nature même : ce registre imposant, de prestige, est d’abord destiné au prince, pour son usage ou pour être montré à des hôtes de marque, et non pour être manié ou diffusé. Malgré son titre, il ne vise pas et n’a pas servi à travailler dans le chartrier, il ne contient d’ailleurs aucun règlement des archives, il donne moins de détails pratiques pour repérer les documents85, il est fort peu annoté. H. Biu a souligné avec justesse que Michel de Bernis a pris l’initiative de l’écriture de sa “chronique” (elle ne lui aurait pas été commandée), outrepassant sa mission et faisant œuvre originale. En embrassant l’ensemble du manuscrit (“chronique” et inventaire), on saisit que cet inventaire relève d’un nouvel esprit. Autant qu’un inventaire qui donne accès à un chartrier-arsenal à mobiliser pour gouverner, il offre une présentation critique des archives des comtes de Foix, désormais abritées dans la Tour ronde et pièces justificatives de la chronique, un mémorial mis en scène dans la pierre et sur le papier, à la gloire des comtes. La chronique et l’inventaire renferment le récit, les preuves et la mémoire du pouvoir et du prestige de la Maison de Foix.

Ce dessein peut être rapproché de la carrière de Michel de Bernis au service des comtes de Foix86. Fils de Pierre de Bernis, créé notaire de Foix par Fébus en 1381 et encore actif en 1401 après avoir traversé quelques démêlés judiciaires en 139187, Michel de Bernis apparaît pour la première fois dans l’inventaire dressé en 1403, ce qui interrogeait sur sa longévité… En réalité, la plus ancienne preuve de son intervention dans ce registre date du 12 avril 1417 :

L’an mil IIIIC et XVII lo XII jorn de abril foc treyta del present cartulari una Bulla del papa et del caixot senhat de ff per translatar aquela per mi Vidal Borras notari de Foix, present lo noble Pey de Noalhas castela de Foix et Jacme de Montelha thesorer et Me Miquel del Bernis88.

Il apparaît ensuite une seconde fois, cité au bas du dernier folio si abîmé et problématique, notation restée fameuse :

Lo trebalh de Me Miquel del Bernis notari de Foix, lo qual scrivet lo present libre, foc taxat per lo venerable discret Me Johan Sartre, conselher de notre senhor lo comte de Foix et refformador de son domayne et patremoni, a oeyt franxs de moneda corrent en guilhems. Sartre [signature autographe de J. Sartre]89.

On le constate, ce paiement n’est pas daté… À partir de quelle date Michel de Bernis intervient-il dans le chartrier comtal ? On ne peut remonter pour l’heure avant 1417. Quand a-t-il “écrit le livre” de l’inventaire lancé en 1403, poursuivi dans la décennie suivante ? Peut-être bien après 1403, autour de 141790 ? Peut-on envisager que ce registre E 391 soit plutôt une mise au net copiée par Michel de Bernis, ce qui expliquerait le caractère soigné, bien que simple, de ce document ?

On le retrouve en 1420 : le 5 février, le juge mage du comté de Foix demande à Michel de Bernis, notarius ville et totius comitatus Fuxi, de délivrer aux syndics des monastères du Mas d’Azil et de Combelongue une expédition du serment prêté en 1398 par Isabelle et Archambaud aux États du pays. En 1423, il est cité comme notaire des consuls de Foix dans une supplique qu’ils adressent à Jeanne d’Albret, épouse du comte Jean Ier91. Il intervient surtout en 1427, dans l’inventaire partiel du chartrier de Foix retrouvé récemment92. Intitulé, c’est instructif, Inventarium munimentorum cartulari comitalis castri Fuxi, composé de cinq cahiers enserrés dans un parchemin recyclé en guise de couverture, ce document s’ouvre par l’ordre de Jean Ier d’inventorier le chartrier en grand désordre93 mais dont les titres sont utiles pour traiter des affaires et de la réformation du comté. Le châtelain doit laisser entrer et travailler dans le chartrier Vidal Sans, notaire de La Bastide-de-Sérou94, et Michel de Bernis, notaire de Foix, les clés leur sont remises par le châtelain et le trésorier… L’inventaire alors réalisé, copié de l’écriture ronde et de gros module de Vidal Sans, concerne surtout des questions de limitation du comté, mais aussi des actes royaux. Alternent inventaire et actes copiés in extenso, des rapports préparés en vue de la réformation. On retiendra ici que le notaire Michel de Bernis aide Vidal Sans, un notaire et officier très actif : sous les ordres de Johan Sartre, réformateur général du comté, il mène dès 1419 des enquêtes de réformation dans la châtellenie de La Bastide-de-Sérou, puis est nommé réformateur du domaine comtal en 142595.

Michel de Bernis poursuit son ascension dans un service toujours plus proche et plus expert du comte de Foix. En atteste le mémoire qu’il rédige en 1446 à l’intention de Gaston IV pour justifier de l’emploi de la titulature “par la grâce de Dieu”, en tant que notaire de Foix mais désormais aussi procureur du comte, titres qu’il reprend dans le préambule de sa “chronique”96. La passe d’armes est connue : au moment du Voyage de Tartas (1442), lors d’un séjour à Toulouse, Charles VII fait citer les comtes de Foix et d’Armagnac. Gaston IV doit prêter hommage et répondre à une liste de remontrances royales, parmi lesquelles, l’usage du titre de “comte par la grâce de Dieu”. L’affaire traîne en longueur et Gaston IV écrit le 15 mai 1446 au trésorier Arnaud Esquerrier et à Michel de Bernis, alors lancé dans la remise en ordre du chartrier et la rédaction de l’inventaire. Il doit trouver dans les archives les preuves de la légitimité de ce titre et les lui envoyer au plus vite. Dès la Pentecôte, les deux hommes sont à l’œuvre dans le chartrier. Michel de Bernis rédige un long mémoire, publié par H. Courteault, qui énumère les pièces qui attestent des droits du comte, depuis le XIIIe siècle, documents à l’appui (copies jointes). Quel fut l’épilogue ? Fermeté royale et soumission de Gaston IV, ou statu quo, le comte de Foix paraissant à la cour et continuant à user de ce titre97 ?

Notaire déjà investi dans des opérations d’inventaire (1403/1429, 1427), aux côtés de réformateurs du domaine (Johan Sartre, Vidal Sans), Michel de Bernis rédige le mémoire justifiant du droit de Gaston IV à s’intituler “comte par la grâce de Dieu” tout en s’attelant à la remise en ordre du chartrier, à la rédaction de son inventaire (et chronique ?). Cette trajectoire, ces expériences et contexte éclairent l’esprit dans lequel il a travaillé à ce “Répertoire et inventaire”. Quelles réflexions et pistes peut-on esquisser98 ?

Michel de Bernis a supervisé cette mise au net, ornée et très soignée. Il l’a semble-t-il annotée, donnant la consigne au scribe de laisser des feuillets blancs, ou l’a corrigée çà et là99. Michel de Bernis voulait-il compléter le texte ? On peut le supposer puisque dans la “chronique”, des vers annoncés n’ont pas été copiés100, et que dans l’inventaire, diverses notations font allusion à la longueur du travail101. La tâche a-t-elle été accomplie ? On s’interroge face aux très nombreux feuillets blancs, aux titres de chapitres qui ont été inscrits mais sans aucun inventaire reporté102 ; remarquons également que le décor se fait plus simple au fur et à mesure que l’on feuillette le registre… Michel de Bernis semble cependant considérer que son inventaire se substitue désormais aux précédents. En témoigne cette intéressante notation portée au dernier folio du registre, à la fin d’une liste de documents très divers103 abrités dans “l’archibanc où est écrit sur le côté, ‘Écritures vieilles et antiques’” : Dos libres antiqs dels repertoris del cartulari presents cassatz et annulatz per el present libre104.

Michel de Bernis intervient à plusieurs reprises, à la première personne, laisse entrevoir son travail et son investissement personnel, dans le préambule, la chronique rimée, mais aussi dans l’inventaire105. Ayant commencé, par sa gesta à “faire mémoire avant que de procéder au dit inventaire”, “pour l’éternelle mémoire des anciens comtes de Foix”106, et après avoir laissé six feuillets blancs, il entame l’inventaire, non pas par le chapitre Foix (1403) mais par celui de Donesan107 – ordre qu’il a voulu, voir ci-dessous – précédé d’un préambule dans lequel il expose ses objectifs et sa méthode de travail :

[E 392, fol. XXXIII/26r]

ASSI DEIUS en lo present libre, me platz metre las terras e senhorias deldit mossenhor lo comte. Et aquelas designar, termenar et confrontar al milhor que he saubut, ab las rendas et emolumentz en cascuna senhoria. Et apres cascuna senhoria per orde pausar totz los documentz aixi cum deius clarament se pot vezer. Et primer he volgut metre la terra de Doneza. Et apres lo comtat de Foix et las autras terras daquest pays.
                                                  DONEZA
LA TERRA DE DONEZA appartinent aldit mossen. Gaston comte de Foix per antiq titol, se confronta am lo comtat de Foix…etc. [description des confronts]

Nombre de chapitres géographiques de l’inventaire suivent ce schéma : Michel de Bernis commence par exposer les limites et confronts de telle ou telle seigneurie, “du mieux qu’il le sait”, puis les droits et revenus qu’elle procure au comte, documents inventoriés à l’appui. Cette méthode se double parfois d’une présentation historique, par exemple pour le comté de Foix, qui suit Donesan :

[E 392, fol. LVIII/46bis]

              LO COMTAT DE FOIX DEL QUAL VOLI DIR
son comensament et pausar en lo present libre per eternal memoria
CONOGUDA CAUSA ES ET [CERTA]108 QUE LO COMTAT
de Foix ab antiq era del ressort et fieu del comte de Tholosa. Et lo comte de Foix lo tenia en fieu deldit comte de Tholosa et li en fazia homenatge, aixi cum dejos se monstrara per los titols et cartas de homenatges.
LAS limitacios del comtat de Foix expressadas en romans en la manera que es contengut en la carta la qual deios sera feyta mencio.
EMPERO apres hun temps foc transportat en lo homenatge de sent Loys rey de France, lo qual comtat de Foix apres per los offices reyals foc limitat et termenat aixi … [la description se poursuit, puis l’inventaire des titres qui prouvent ses dires]

Montaillou et Prades, Lordat, entre d’autres, bénéficient d’un semblable prologue historique, mais la plupart des titres sont introduits par l’exposé des limites territoriales et de ce que “Monseigneur le comte a” (en général, “le château et la ville…”, tels revenus) avant d’inventorier les actes.

Les pièces inventoriées sont sélectionnées pour ce qu’elles apportent (ce qui n’est pas neuf, cf. 1403) mais ici font l’objet d’une présentation critique. Cette conception induit des analyses souvent bien plus détaillées que dans l’inventaire de 1403. Par exemple, si l’inventaire précédent (1403) listait les sceaux, leur nombre, couleur, état (rompu, perdu…), l’inventaire de Michel de Bernis prend la peine de les décrire de façon approfondie109. Autre originalité : Michel de Bernis procède selon le classique classement géographique ou thématique, mais ouvre également des “dossiers”, soit à part, soit au sein de chapitres110. Enfin et surtout, nombre de documents sont copiés in extenso, ce qui tend à faire de ce registre un document balançant entre inventaire-chronique et inventaire-cartulaire. Parmi ces documents copiés in extenso, citons par exemple les comptes et les montres des guerres de Gascogne de 1298-1299 et de 1336-1337, qu’il a probablement trouvés dans la cheminée du chartrier de la tour carrée du Milieu111

Enfin, Michel de Bernis exerce son sens critique sur les documents qu’il inventorie, et ce faisant, fait déjà œuvre d’historien. Citons un exemple significatif : un acte sur la fondation de l’abbaye de Lézat. Dans l’inventaire de 1403, il est le seul détaillé à ce point, daté de 842 (le plus ancien acte inventorié) mais est une forgerie au regard de ses incohérences :

Item translat de carta antiqua feita lan VIIIC XLII e comensa ‘Creatoris cunctarum creaturarum’ contenen que en lo temps de Gobert senhorian de tota Guiayna de Galles et de tota Franse et aixi medix regen l’emperi et Ramon comte de Tholosa procurari et Ugo papa estan tota la gleyza orrentau era aixi perturbada que en tot lo comtat de Tholosa atart s’atrobava, de fora los fortz, maysos ni homis qui y habitassan, quar totz los homis et femnas qui y eran atrobatz eran mortz per I vescomte que se apelava Benedict lo qual era de gran linhatge et a tot jorn s’efforsava asosmete totz sos vesis et parentz. E en aixi que par I jorn cum et agos batalha ab sous enemicx, foc tot pesseiat per sos enemix. E armauco de luy I filh que s’aperava Atho, lo quoau ago victoria de sos enemix ab la ajuda de dius deu comte de Tholosa, los quoaus vedens que no poden aver enfans, van se encoventar, que fessan sengles monestiers ab tertz conventz, et aixi ac fen lo dit Atho que ediffica lo monestier de Lesat, et lo comte de Tholosa que ediffica lo monestier de Sent Pey de Curte prope la Garone112, et en apres lo dit Atho prenco l’abit. (E 391, fol.26)

Michel de Bernis l’inventorie mais se montre circonspect :

Item una carta del fundament del monastier de Lezat en la qual se lieg que era fundat l’an de la incarnacio hoeyt cens quaranta e dos o a l’enviro, en lo qual an la present carta foc dada a la terra, regnant Dagobert rey, la qual gleysa fundec segon se lieg en la present hun vescomte appelat Atho. Empero non diz don era lodit vescomte.(E 392, fol. 185)

Si Michel de Bernis est dubitatif et n’en fait pas état dans sa gesta, Arnaud Esquerier en revanche, qui a travaillé à la remise en ordre du chartrier avec lui, l’incorpore dans sa chronique, en résumant l’acte qu’il dit avoir vu dans le chartrier de Foix, avec quelques variantes par rapport aux analyses des inventaires113.

Épilogue. Fils tendus entre les inventaires du XVe siècle : réformation et mémoire glorifiée

Les campagnes de (re)mise en ordre du chartrier couplées à la rédaction d’inventaires (1403/1429 et 1405, 1445, dans une moindre mesure 1427) ont produit deux générations de registres relevant de différentes conceptions. Ces opérations ont cependant en commun la prise de contrôle des archives dans des contextes particuliers et cruciaux : en 1403 et 1405, il s’agit de connaître les domaines et d’asseoir le pouvoir princier lors de la pleine accession ou récupération du pouvoir ; en 1445, Gaston IV, puissance montante dans le Midi, défend ses droits contre l’offensive de la majesté royale. Autre fil tendu entre ces inventaires, la grande œuvre des comtes de Foix en ce XVe siècle : la réformation de leur domaine, qu’il convient de relire aujourd’hui en la replaçant dans le vaste mouvement d’enquêtes lancées par le roi ou les princes, sujet d’une historiographie récente114. Dans le comté de Foix, mais aussi dans les autres territoires des Foix-Béarn, la réformation vise à connaître et à récupérer des droits et revenus, ce qui relève du domaine du comte. Ainsi, per lo bon regiment et govern del pais et de tota la cauza publica, Jean Ier ordonne que sia feita reparacio et refformacio de tot nostre domayne115. La réformation du comté de Foix est surtout connue dans les années 1440 mais la documentation laisse entrevoir qu’elle a été portée par plusieurs générations de comtes. Citée pour Gaston III dit Fébus, sous forme d’enquêtes fiscales, elle est lancée de façon plus ample dans les années 1412-1416, relancée vigoureusement par Jean Ier en 1425. Elle est encore sur le métier sous Gaston IV qui ordonne en 1444 que soit achevée ladite refformation qu’es mot laboriose, longue et somptuose… et toujours en cours dans les années 1450116. Les ordonnances comtales nomment des réformateurs, certains pour enquêter dans une partie du domaine, d’autres comme “réformateurs généraux”, parmi lesquels Johan Sartre117, et surtout, Vidal Sans, cheville ouvrière de la réformation des années 1420 à 1450118. Ces commissaires et réformateurs sont assistés de notaires, parmi lesquels, Michel de Bernis, aux côtés de Vidal Sans en 1427, dans les années 1430, et encore en 1455119.

Dans ce cadre, on saisit tout l’enjeu de la connaissance et du contrôle étroit des archives, celles accumulées et mises en ordre, auxquelles s’adosser, mais aussi celles que l’on se fait restituer et que l’on accroît : les ordonnances comtales prescrivent tel un leitmotiv de déposer les documents, les livres de comptes annuels des bayles et trésoriers, dans nostre cartulari de Foix ou nostre cartulari deu castet de Foix120. De même, comprend-on l’usage de l’inventaire dressé en 1403, puis mis à jour, qui fourmille d’annotations marginales, le plus souvent de la main de Vidal Sans. Ce registre a manifestement servi de document de travail (voire étalon ?) à la réformation du comté, il porte les stigmates du labeur tenace des officiers comtaux. L’inventaire partiel de 1427 semble encore plus directement lié à la volonté de Jean Ier de donner un tour volontariste à la réformation : voisinent dans ces cahiers des documents inventoriés en ce sens et des rapports préparatoires. Au milieu du XVe siècle, le monumental “Répertoire et inventaire” de Michel de Bernis dresse un tableau et un bilan de l’action entreprise depuis plusieurs décennies en couchant sur le papier, de façon soignée et ordonnée, les bornes, limites, droits et privilèges du comte de Foix au sein de son domaine, hic et nunc mais aussi en les inscrivant dans la longue et glorieuse histoire de ses prédécesseurs. La concomitance de la justification des droits de Gaston IV à se dire “comte par la grâce de Dieu”, dont le notaire retrouve les preuves dans un chartrier et une mémoire mobilisés, et le début de la rédaction de l’inventaire, a probablement aimanté cette volonté.

Far memoria, formule qui émaille la gesta et l’inventaire de Michel de Bernis, peut désigner tout autant la capacité du notaire à remémorer, que le réceptacle de ces souvenirs (le chartrier, le registre, la gesta), l’autorité des écrits qui lient passé, présent et avenir121 pour transmettre à la postérité l’histoire et la mémoire des comtes de Foix. Les documents devenus archives, preuves de la gesta comtale et du bon gouvernement, permettent de se réapproprier, de fixer et de perpétuer la mémoire territoriale, administrative, politique, dynastique des comtes de Foix. Ce projet commande un tri des archives, une mémoire sélective, entre documents profitables ou non, entre ce que l’on choisit de remémorer et ce que l’on tait.

L’inventaire opère une sélection de documents et forge, comme la gesta, le glorieux lignage des comtes de Foix. Il restitue, tout en les fabriquant, le prestige et l’ancienneté de la lignée : les ruptures généalogiques sont gommées pour mettre en lumière une généalogie politique qui invente (au sens d’invenire) la chaîne des légitimités et des droits à la succession. Se forge ainsi un “lignage” idéal, adossé à des archives, bien choisies, érigées comme autant de preuves122. Ce processus est engagé dans l’inventaire du début du XVe siècle : il sélectionne et décrit certaines pièces, tandis que d’autres restent dans le silence, il fournit les matériaux (les “sources”, et donc leurs biais)123 de l’histoire et de la mémoire des comtes de Foix, avec le souci de la profondeur chronologique124.

Ce faisant, les archives sont manipulées pour mettre en lumière la gloire comtale. Par exemple, le lien entre les comtes de Foix et le sacré, à travers l’inventaire de pièces qui lient les comtes aux abbayes de Saint-Volusien, de Boulbonne, du Mas d’Azil, de Lézat, y compris de façon forgée. Cette sacralité ancrée en Foix rejaillit sur l’aura du lignage125 et il ne faut probablement pas sous-estimer la facette spirituelle de la memoria126. Les succès des comtes sont rendus présents par les parchemins conservés dans le chartrier, soigneusement inventoriés car ces documents sont profitables, et célébrés dans la gesta. Ainsi, les pièces inventoriées en 1403, en 1445, sur les relations entre le roi de France et Roger Bernard III à la fin du XIIIe siècle consignent les rémissions, les confirmations de privilèges, plutôt que les heures difficiles de la mise au pas du comté par le roi. La manipulation est également manifeste autour de la mémoire de deux comtesses qui ont généré bien des difficultés… La première est Jeanne d’Artois, princesse capétienne mariée à Gaston Ier. Elle est emprisonnée par son fils Gaston II et placée en résidence surveillée, durant une vingtaine d’années, soi-disant pour conduite scandaleuse, motif qui signale une sale affaire politique et familiale dont on ne connaît pas les ressorts. Dans l’inventaire de 1403, un chapitre et une caissette sont ouverts à son nom mais la section reste quasi vide ou très vague : les documents ne semblent pas manquer mais le seul décrit/retenu concerne l’accord avec son fils…127. En 1445, le registre de Michel de Bernis prévoit un chapitre De madona Johana d’Artoys comtessa de Foix. Il est un peu plus copieux et détaillé (cinq actes ou lots d’actes sont analysés précisément), mais le notaire conclut sur l’inutilité d’inventorier ce que renferme la caissette (Item autras letras et documentz y ha en la dita caixa que non poden portar utilitat que fera longua prolixitat de recitar empero tot se trobara a la caixa de la dita ma dona Johana d’Artois) et laisse tomber au passage un jugement sans appel sur la soi-disant mauvaise conduite de cette comtesse (Troba se per articles que la dita madona Johana era dissoluta et prodigabla et de mal estruc regiment per la qual causa foc feyt so dessus), lu dans les documents qu’il a parcouru et qui sera repris ensuite à l’envi dans l’historiographie128. Quant à Agnès de Navarre, malheureuse épouse de Gaston III, chassée d’Orthez en 1362, réfugiée jusqu’à sa mort (1397) à Pampelune, auprès de son frère Charles II et de son neveu Charles III, elle est quasi effacée des inventaires de 1403 et de 1445. Si son mariage est mentionné, pour ce qu’il a apporté en rentes concédées par le roi, moins d’une dizaine de mentions la concernent… alors qu’elles abondent à Pampelune (plus de deux cents) : traces de son train de vie à la cour de Navarre mais aussi, à partir de la mort de son époux (1391), démarches et procès qui ont visé à lui faire restituer ce dont elle avait été spoliée129.

Les documents devenus archives, les chartriers qui les abritent et les inventaires qui les décrivent, sont des instruments de/du pouvoir princier. Si le chartrier de Foix a vraisemblablement été organisé bien avant les premiers inventaires conservés, un tournant s’opère au début du XVe siècle, son contrôle devient une préoccupation récurrente, pour ne pas dire constante. Sans qu’il y ait un garde des archives en titre, des hommes (clerc, officiers, notaires : Bertrand Dauga, Johan Sartre, Vidal Sans, Michel de Bernis, Arnaud Esquerrier…) mettent leurs compétences, leur expertise, et leur dévouement, au service du comte de Foix. On les aperçoit tour à tour sur le terrain (enquêtes et missions), dans le chartrier (maniement des archives, rédaction d’inventaires, de règlements des archives), la plume à la main pour défendre et glorifier le prince (rédaction de rapports, d’une gesta, d’une chronique). Les archives comtales, désormais inventoriées (donc sélectionnées), sont gardées comme un trésor, de l’armoire de la tour du Milieu au chartrier de la Tour ronde. Ainsi monumentalisées, elles sont mobilisées (arsenal) dans des contextes particuliers. Les inventaires témoignent alors de la façon dont les fonds ont été transmis, recomposés, mais aussi de ce qui a présidé à leur commande, ce qui les rend par essence caducs en quelques décennies. Les archives composent aussi un mémorial, une collection de documents (un “trésor des chartes”, en voie de fossilisation au milieu du XVe siècle ?). Dans le monumental registre de Michel de Bernis, elles fondent et garantissent le “bon gouvernement”, a fortiori dans le cadre de la réformation du comté, tout en étant le creuset de la mémoire (une certaine mémoire) et de l’histoire glorieuse des comtes, ou plutôt désormais de la Maison, de Foix.

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Notes

  1. Nieus 2016, 15, formule reprise à Castelnuovo 2007.
  2. Bidot-Germa 2010, 2019. Nous remercions D. Bidot-Germa pour la relecture attentive de ce texte.
  3. Fasseur 2009.
  4. Tucoo-Chala 1960, 1961 a, Pailhès 2007.
  5. La vicomté de Castelbon est soustraite à cet ensemble en 1315, elle est concédée au frère cadet de Gaston Ier, reste “indépendante” de 1315 à 1391. Miret y Sans 1900.
  6. Sur la politique “catalane”, Baudon de Mony 1896, Miret y Sans 1900, Tucoo-Chala 1961b, Bidot-Germa 2017.
  7. Dans ce volume, voir la contribution de C. Pailhès, et Pailhès 2007, 2022.
  8. Tucoo-Chala 1960, 1991 ; Pailhès 2007 ; Lamazou-Duplan 2014.
  9. Le testament de Gaston II prévoyait qu’en cas d’extinction de sa lignée, lui succèderaient son frère, Roger Bernard de Castelbon et ses descendants.
  10. Archambaud, l’un des fils d’Archambaud et d’Isabelle tombe aux côtés de Jean sans Peur à Montereau…
  11. Le temps des Foix-Castelbon, de Mathieu à Jean Ier, est détaillé dans Flourac 1884. Cette période, coincée entre le principat de Fébus et celui de Gaston IV, mérite un réexamen, lancé par des mémoires de Master de l’université de Pau, par exemple Bergamo 2021 (en vue d’une édition), Pereira 2022, Souquet 2022 (en vue de poursuite en doctorat). Sur Gaston IV et Charles VII : Courteault 1895, Contamine 2017, Pailhès 2022.
  12. Courroux 2019.
  13. Le fils de Gaston IV et d’Éléonore, Gaston, Prince de Viane, meurt lors d’une joute en 1470. Sa veuve, Madeleine de France, sœur de Louis XI, exerce la régence pour ses deux enfants.
  14. Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques, désormais AD 64 : AD 64 E1, inventaire daté par P. Raymond de 1609, mais les études de Philippe Chareyre ont démontré qu’il a été réalisé en 1584, avec des ajouts en 1609 ; puis les inventaires suivants : AD 64 E2 à E9 (1686-1689).
  15. S’y ajoutent des inventaires qui sont dispersés dans différentes liasses (i.e. non identifiés dans la rubrique “inventaires” en tête de chaque domaine) et ceux conservés ailleurs qu’à Pau (à Foix, Périgueux, Montauban, Paris…).
  16. Duchein 1992.
  17. Voir par exemple, Jones 2016 (Bretagne), Pécout 2016 (Provence).
  18. Sur ces renouvellements historiographiques, nous renvoyons à : Anheim & Poncet, dir. 2004, Anheim & Chastang, coord. 2009, Contamine & Vissière, dir. 2009, Guyotjeannin 2002, Guyotjeannin & Potin 2004, Kosto & Winroth, éd. 2002, Morsel 2000, 2004a, 2004b, 2004c, 2008, Rosa & Head 2015. Plus récemment, au riche volume sur les archives princières, Hélary et al., éd. 2016, en particulier, “cartulaires, inventaires, mentions dorsales” dans Nieus 2016, 15-21 ; pour des études de cas d’inventaires, à : Jones 2016, Chenard 2016, Lemonde 2016, Pécout 2016. Nous nous permettons également de renvoyer aux études publiées dans Lamazou-Duplan, dir. 2021a, et à nos réflexions (Lamazou-Duplan 2019b, 149-150, 2021b, 89-90).
  19. Mouvement initié par le mémoire de Master d’une étudiante désormais archiviste aux AD 64, sur une partie de l’inventaire de M. de Bernis (1445, AD 64 E 392) : Goustans 2008 et 2010.
  20. Jones 2016.
  21. Comparaison entre inventaires de titres, de meubles et objets précieux à la cour des rois de Navarre au XVIe siècle, Goulet & Pébay-Clottes 2021. Sur les bibliothèques, Plantey 2016.
  22. AD 64 E 392, fol. 2v-3, éd. Biu 2002, Lamazou-Duplan 2019b, 163-164. Voir infra.
  23. Le château comtal de Foix demeure toujours le siège du chartrier en pays de Foix, alors même que les Foix-Béarn y viennent peu, résidant plutôt à Mazères lorsqu’ils se rendent dans le comté. On cerne bien ici la prééminence symbolique du château de Foix, berceau dynastique et politique des comtes des Foix.
  24. Le chartrier d’Orthez est mentionné à plusieurs reprises dans l’inventaire des archives du château de Pau en 1533, de même, y est listé l’inventaire du chartrier orthézien, aujourd’hui disparu, AD 64, 1J290, fol. 17v : Plus ung libe scriut en paper cubert de coer negre intitulat Aquest es lo repertori deu cartulari deu castet d’Orthes contenent inventari deus documens stans en lodit castet d’Orthes en l’an mil IIIIc XXXI, feyt de mandament de mossen Johan conte de Foix per maeste Bertran de Casterar, secretari deudit senhor.
  25. Voir infra.
  26. Goulet & Herreros Lopetegui, 2012.
  27. Lamazou-Duplan 2019b, 160, 164-165, édition du mandement royal (Bibl. de Catalunya, Perg.78, Reg.4734) : Catherine ordonne aux consuls de Castelbon d’extraire 917 pièces du chartrier du château, transportées au château de Foix dans 5 caisses de bois ; elle promet de les restituer lorsque la paix sera revenue, entre temps, elle peut les mobiliser pour défendre ses droits contre Ferdinand d’Aragon…
  28. En 1515 ou/et en 1523 ?
  29. AD 64, 1J 290, fol. 1-1v, 1533, Adot 2017, Lamazou-Duplan 2019b, 165-166 (édition du préambule). Le chartrier d’Orthez n’est pas totalement déserté : l’inventaire de 1533 précise que des documents y sont encore déposés mais le dépôt principal se trouve désormais au donjon de Pau.
  30. Les recherches sur les archives et la production écrite des rois de Navarre de la Renaissance ont bénéficié du doctorat d’A. Adot 2017 (étude des 2 inventaires du XVIe siècle, AD 64 1J290 et E1) et du programme ANR AcRoNavarre (2017-2022) porté par Philippe Chareyre à l’université de Pau.
  31. Dufau de Maluquer, éd. 1897-1898, 249, repris dans Biu, éd. 2002. Parmi ces documents, l’inventaire dressé à Foix par Michel de Bernis au milieu du XVe siècle (AD 64 E392, voir infra). A. Dufau de Maluquer prouve qu’il a transité par Nérac avant de parvenir à Pau.
  32. De récents réaménagements muséographiques du château de Foix proposent une évocation de la salle des archives au sommet de la Tour ronde. Accompagnant cette installation, C. Pailhès a publié “la longue histoire des archives du château de Foix”. Elle y reprend nos premières analyses pour le Moyen Âge et étend l’étude aux temps modernes et contemporains grâce à son érudite connaissance des inventaires modernes de la Tour ronde (AD 09 E6 et E7, mis en ligne) et de la documentation des XVIe-XIXe siècles sur le destin des archives de Foix. Pailhès 2020.
  33. Respectivement AD 64, E 391 (1403), 121 ff., papier et AD 64, E 392 (1445), voir infra.
  34. AD 64, E 393 (1405), 41 ff. papier.
  35. Sur cet incendie, Pailhès 2020.
  36. AD 09, inventaires de la Tour ronde, E 6 (comté de Foix) et E 7 (Lieux d’Espagne), E 8 (improprement dit “Cartulaire de Boulbonne”, il s’agit en réalité d’un inventaire d’archives pour cette abbaye). Détails des campagnes menées dans le chartrier de Foix du XVIe au XVIIIe siècle, Pailhès 2020.
  37. Ainsi onze pièces provenant du chartrier fuxéen ont été restituées par l’abbaye de Solesmes (désormais AD 09, 1J 520). Nos premières observations ont démontré que les mentions dorsales de ces documents, d’une main du XIVe siècle, sont reprises mot pour mot dans l’inventaire de 1403 (AD 64 E 391), un exemple (avec photographies) dans Lamazou-Duplan 2019a, 270-271.
  38. AD 09 36J 659, un inventaire partiel du chartrier de Foix, daté de 1427, a été trouvé par C. Pailhès lors du classement du fonds Mauléon-Belissen. Cet inventaire, bien que partiel, est un jalon intermédiaire entre les inventaires de 1403 et de 1445. Première approche, Lamazou-Duplan 2019a, 267.
  39. Sous le règne de Louis XIV, des titres sont extraits du château de Foix et envoyés à Paris. G. Brunel a lancé une enquête sur ces pièces aujourd’hui conservées aux Archives nationales. Les informations qu’il nous a transmises, nous l’en remercions, confirment que les mentions dorsales portées sur les documents correspondent à celles des analyses de l’inventaire de 1403 (AD 64, E 391). Enquête à poursuivre.
  40. Marin 1987. Marie Vielmas mène à l’heure actuelle des recherches sur les premiers inventaires du XIXe siècle, qui ont précédé ceux de P. Raymond (mémoire de Master sous notre direction).
  41. Raymond (1867-1873).
  42. AD 64, E 391, 1403, 121 feuillets, in-4° et AD 64 E 393, 1405, 41 feuillets, in-4°. Ces deux registres inédits ont été transcrits, le premier par V. Lamazou-Duplan, le second par Jean-Pierre Barraqué, décédé prématurément. Nous avons poursuivi son travail. Nous préparons une édition de ces deux registres. Lancement de ces recherches décrit dans Lamazou-Duplan & collab. 2015. Nous en avons présenté différentes facettes dans : Lamazou-Duplan 2019a (Chantier d’Histoire 2018, présentation des inventaires, premières observations à partir de dossiers thématiques) ; Lamazou-Duplan 2019b a porté plus particulièrement sur l’inventaire de Castelbon et le contexte catalan (documents édités : mandements qui ont lancé la réalisation des 3 inventaires du XVe siècle, règlements des archives à Foix et à Castelbon, quittance des frais de mission à Castelbon de Bertrand Dauga, actes sur le transfert des archives de Castelbon à Foix en 1512, préambules des inventaires de 1445, 1533) ; Lamazou-Duplan 2021c s’est attaché à l’étude de la matérialité des archives décrites dans l’inventaire de 1403 (E 391), à l’organisation et à la reconstitution de l’armoire du chartrier de Foix (comparée à celle de Castelbon).
  43. Édités dans Lamazou-Duplan 2019b, traduits dans Lamazou-Duplan 2021c.
  44. Cf. quittance de B. Dauga pour ses frais de mission et d’inventaire à Castelbon, paiement de la confection de l’armoire de Castelbon, 3 septembre 1405 (AD 64, E 423), publiée dans Lamazou-Duplan 2019b, 163.
  45. Détails dans Lamazou-Duplan 2021c.
  46. À Foix, cette possibilité a été saisie : le 13 décembre 1412, J. Sartre, conseiller du comte, dépose dans le chartrier un lot de pièces en ouvrant un nouveau chapitre dans l’inventaire, intitulé Del Carlar del comte. Il a placé les actes dans une caissette no senhada, où l’on a écrit Scripturas de Carlar (AD 64, E391, fol.90).
  47. AD 64, E391, fol.1 et E393, fol. 1v. Publiés dans Lamazou-Duplan 2019b, 161-163, celui de Foix a été traduit, Lamazou-Duplan 2019a, 264-265.
  48. Par ex. à Foix, cotes et titres géographiques (inventaire et caissettes) : a Foix ; b Pamiers ; c De Pamiers ; f Mas d’Azil et Combelongue ; g Lézat, Saint-Ybars ; Mazères, Boulbonne ; j Savardun, Montaut, Sainte-Gabelle, Belpug, Escossa ; k Montagut, Montbrun ; l Sabarthès, Vicdessos, La Valh ; m Donezan, So, Evol, Quérigut ; n Andorre ; o Castelbon, Empurias ; t comte de Toulouse ; v Béarn, Navailles, Andoins, Bigorre ; y Lautrec, Albigeois ; aa Mirepeix, Grailly ; bb Cardona ; dd Trencavel ; ee Urgel.
  49. Par ex. à Foix, cotes et titres thématiques (inventaire et caissettes) : d Hommages ; e Subside et transport du comté ; p Testaments et mariages ; q Fausse-monnaie et hérésie ; r Port illicite d’armes ; s Moulines ; cc Lettres des rois de France ; ff Bulles pontificales et diverses écritures ; gg Écritures antiques ; hh Jeanne d’Artois ; jj Écritures diverses peu profitables ; kk Lettres royales valant peu. Sans cote, tout en haut de l’armoire, Registres, livres, procès. 12 caissettes sont laissées vides.
  50. De façon signifiante, est rassemblée dans cette rubrique et caissette la documentation qui court depuis la mise au pas par le roi de France du comté de Foix, à la fin du XIIIe siècle, jusqu’au principat de Gaston III. On remarque d’ailleurs que l’inventaire liste plutôt des actes de pardons, d’entrée en bonne grâce… Beaucoup d’actes concernent le principat de Gaston II.
  51. Détails dans Lamazou-Duplan 2021c.
  52. Indices dans AD 64 E 391, fol.2 et fol. 89. Pasquier 1900, Lamazou-Duplan 2021c.
  53. La graphie des mentions dorsales portées sur les originaux conservés (et retrouvées mot pour mot dans l’inventaire) est datée du XIVe siècle. L’inventaire liste de nombreux documents du temps de Gaston II et d’Aliénor de Comminges, de Gaston III dit Fébus. Couplés au réaménagement de cette pièce, ces éléments autorisent l’hypothèse d’une organisation du chartrier par Aliénor ou par son fils Gaston III.
  54. Il est aujourd’hui prouvé que la Tour ronde est construite dans le premier tiers ou au milieu du XVe siècle, et non sous Fébus, Pasquier 1900, Guillot 2005-2006, 2013, Lamazou-Duplan 2021c, 130-131.
  55. Venant du Béarn (est-il intervenu dans les chartriers béarnais ?) pour inventorier les chartriers de Foix et de Castelbon, Bertrand Dauga ferait donc figure de “maître ès inventaires”, comme le fut Maître Quentin au XIIIe siècle, expert en cartulaires, dont J.-F. Nieus a suivi la tournée et les travaux, Nieus 2012. Notons que B. Dauga est chargé d’inventorier des actes parfois rédigés dans des langues qui ne lui sont pas familières (variantes de la langue d’oc, autres idiomes à Castelbon). 
  56. AD 64, E391 fol.1v. La brièveté de la mission corrobore l’idée d’une réorganisation du chartrier, et non sa fondation.
  57. Il ajoute 4 documents en 1407, en un seul dépôt (non daté précisément) ; le 18 juillet 1407, il extraie une caissette de documents, retournés le 30 septembre suivant et reclassés entre les caissettes de Foix et de Pamiers (E 391, fol 109).
  58. Il note dans l’inventaire qu’il ajoute dans l’armoire, dans la caissette de Foix, 20 documents le 10 février 1409 (n.st.) ; dans la caissette de Pamiers, 11 documents, le 12 février 1409 (n.st.) ; dans la caissette Castelbon et Empurias, 2 documents le 16 février 1409 (n.st ;) ; le même jour, 1 livre, 12 pièces et 3 chartes dans la caissette Testaments et mariages des comtes. Il n’est plus mentionné de façon datée après 1409.
  59. Sur ces hommes, détails dans Lamazou-Duplan 2021c, 136 et n. 43 à 46.
  60. Vérifié et confirmé par des documents conservés en original à Pau ou à Foix (à Paris, enquête de G. Brunel) et rapprochés de l’inventaire. Exemple dans Lamazou-Duplan 2019a, 270-271.
  61. Ce qui ne permet pas de savoir exactement combien de documents sont inventoriés, au mieux peut-on dénombrer 1311 item ou articles. La plupart correspondent à un document mais certains rassemblent des lots de pièces.
  62. Lamazou-Duplan 2021c.
  63. Le registre AD 64, E 391 se compose ainsi : fol. 1, règlement des archives ; fol.1v note sur la durée du travail de B. Dauga : fol. 2 titre Foix, ouvert par la copie du mandement comtal ; l’inventaire court jusqu’au fol. 89 ; fol.90, en 1412, dépôt de documents et création d’une caissette Scripturas de Carlar. Les feuillets 91 à 95 sont blancs. Du folio 96r à 109v, registre d’entrées et de sorties (dates extrêmes des mouvements : 1406-1417). Feuillets 110 à 119, blancs. Les feuillets 120-121, plus abîmés, portent une liste établie par B. Dauga (s.d.) qui énumère des documents qu’il n’a pas retrouvés mais dont il connaît l’existence, puis d’autres entrées et sorties. Le registre E 391 pose des problèmes codicologiques impossibles à résoudre, sauf à le démonter. Relié au XIXe siècle, les feuillets sont rognés (disparition de la foliotation médiévale), certains pourraient être inversés, d’autres sont découpés et remontés, en particulier les fol.120-121 (au fol.121, une main contemporaine a noté “134 et dernier”…). Il pourrait donc s’agir d’un registre factice : les parties du “registre” (inventaire jusqu’aux fol.89-90 – registre des entrées et des sorties, à partir du fol. 96 – fol. 120-121) étaient-elles reliées ensemble à l’origine ? Un seul et même filigrane est cependant utilisé pour l’ensemble du registre (un A majuscule surmonté d’une croix, attesté à Lautrec en 1407 d’après Briquet et Memory of Paper).
  64. Les deux ultimes ajouts : AD 64, E391, fol. 44, 15 octobre 1427, actes déposés dans la caissette Castelbon et Empurias ; fol.76, 20 mai 1429, ajout dans la caissette Urgel.
  65. Par exemple, 7 documents versés en 1407 dans la caissette des Hommages ; 20 le 10 février 1409 (n.st) dans celle de Foix ; 11 actes le 12 février 1409 (n.st.), dans celle de Pamiers ; 6 en 1429 pour Urgel).
  66. AD 64, E 391, fol. 96 à 109v : 1 mouvement de pièce(s) en 1408, 1410, 1414, 1416 ; 2 en 1406, 1417 ; 3 en 1411 ; 5 en 1407 ; 6 en 1412 ; et 15 en 1409.
  67. AD 64, E 391, fol. 89. À notre avis, le redoublement de gran n’est pas une erreur de copie mais désigne la longue salle basse entre les deux tours carrées du château de Foix, Lamazou-Duplan 2021c.
  68. Voir plus loin.
  69. Exemples. AD 64, E391, fol. 12v, 12 février 1408, caissette c Pamiers : B. Dauga dépose dans le chartrier des documents obtenus de J. Sartre ou de V. Borras ; fol.96, 23 avril 1408 : Berdot Danos, notaire de Daumasan, sur mandement du comte et en présence de Manaud de Navailles, châtelain de Foix, et de Vidal Borras, lieutenant du juge dans le comté, repose dans le chartrier et la caisse de Foix, une charte de paix entre les comtes de Foix et d’Armagnac, reçue par Me Raymond de la Biela, notaire ; fol. 98, 26 avril 1412, on repose dans le chartrier 2 instruments venant de Boulbonne et une copie…
  70. Par ex., AD 64, E 391, fol. 97 (1409), 120v (1397).
  71. Ibid., fol. 98 (procès devant le juge des appeaux de Toulouse, affaire de la leude, 1412),108v (sur mandement du juge mage), fol. 109, (sur mandement du sénéchal et juge du comté de Foix, procès sur les leudes avec les capitouls de Toulouse), 109v (sur mandement du juge du comte de Foix, pièces à porter à Pamiers)…
  72. Par ex., AD 64, E 391, fol.98 : le 25 juin 1412, le trésorier J. de Montelha “fait retirer le premier hommage du comté de Foix au roi de France”, pièce restituée dès le lendemain, “enclus dans l’autre hommage dernièrement fait au roi par Monseigneur Archambaud, que Dieu aide”, en présence du châtelain de Foix.
  73. Par ex., du 11 février au 10 juillet 1411, sortie de pièces concernant la cession et transport des châteaux de So et de Quier (AD 64, E391, fol. 96).
  74. Dans quelle mesure la personnalité et l’expérience d’Archambaud de Grailly ont-elles joué ? A-t-il importé à Foix (et à Castelbon) des pratiques (inventaire, armoire) déjà rodées ailleurs ?
  75. AD 64, E 391, fol. 120-121v.
  76. Sur la vicomté de Castelbon, Lamazou-Duplan 2019b, 158-160.
  77. AD 64, E392, 344/437 ff., papier. Sa foliotation est problématique du fait de la disparition de la foliotation médiévale sur nombre de feuillets (rognés dans la partie supérieure lors d’une reliure à l’époque moderne ou au XIXe siècle) et de la présence d’un triple système de foliotation, selon que l’on comptabilise ou non les feuillets blancs. Sont portées : une foliotation en chiffres romains, avec des erreurs çà et là (diverses mains médiévales et modernes, jusqu’au fol. 433), une autre en chiffres arabes (à l’encre, moderne, jusqu’au fol. 344) ; à la marge intérieure et inférieure, au crayon et à peine visible, la numérotation systématique effectuée récemment lors de la restauration de la reliure, jusqu’au fol. 437.
  78. Biu, éd. 2002. Cette œuvre avait été publiée en 1841 par J.A.C Buchon, de façon défectueuse, sur la copie Doat, estropiant le patronyme de Michel de Bernis (Miguel del Verms), rectifié par Courteault 1894.
  79. Biu, éd. 2002,417-418.
  80. AD 64, E392, fol. 45. À la presque fin du chapitre Donesan (qui ouvre l’inventaire (fol. 26-46), et non Foix comme en 1403), il précise : Apres asso dessus cresen que non y agues plus documens de la dita terra de Doneza quar eran estatz visitatz diligentment totz los caixas de la tor redonda, ou no si trobec sino so dessus. Empero apres encara revisitat a la tor cayrada del mieg, se son trobatz los documens qui sieguen fazens al partit de Doneza. Est-ce le signe que le chartrier installé dans tour du milieu y est resté pour partie ? Ou que l’installation de celui de la Tour ronde est en cours ?
  81. Biu, éd. 2002, 418.
  82. Ibid., 396-398.
  83. Dufau de Maluquer, éd. 1897-1898, 249-266. Repris par Biu, éd. 2002, 386-388.
  84. Analyse détaillée dans Biu, éd. 2002, 386-388, 408-410.
  85. Il indique cependant des cotes, précise (en général en fin de chapitre) la caisse où “l’on trouvera” tel ensemble documentaire, mais l’on ne sait pas, par exemple, si l’ordre de l’inventaire correspond à celui d’un meuble, d’une pièce.
  86. Voir l’article pionnier de Courteault 1894.
  87. Dufau de Maluquer, éd. 1898-1899, 207-210.
  88. AD 64, E 391, fol.109v.
  89. Ibid., fol. 121v.
  90. Notons une coïncidence : Vidal Borras, notaire de Foix très actif dans le registre E 391, n’y apparaît plus après 1417… Michel de Bernis l’aurait-il remplacé ?
  91. Dufau de Maluquer, éd. 1898-1899, 210-212.
  92. Voir n. 38. AD 09, 36J 659, 74 ff. dont certains blancs.
  93. Dominus Johannes Dei gratia Fuxi comes… quod suum cartularium comitale castri Fuxi cessabat esse ordinatum, dispositum, sed quia erat pro una parte imperfecte repertoriatum et pro alia eius parte nullatenus inventoriatum existebat… AD 09, 36J 659, fol.1v, 17 octobre 1427.
  94. Notaire de cette localité en 1415, Dufau de Maluquer, éd. 1897-1898, 231, n.6.
  95. Ibid., 228, 231, n.6, et 231-234, ordonnance de Jean Ier nommant les châtelains de La Bastide-de-Sérou et de Camarade, et Vidal Sans, réformateurs généraux du comté de Foix, 9 avril 1425.
  96. Il n’est jamais dit/ne se dit jamais “archiviste” ou “notaire-archiviste”, titres dont il est souvent affublé. Un acte du Registre de la réformation de 1446-1447 indique qu’il est domicilié dans un ostal du consulat d’En Gros à Foix et qu’il dispose de biens à Foix et à Montgailhard ; il est encore vivant en 1454, taxé pour 25 livres et 2 deniers dans un livre de taille de Foix, comme contribuable du consulat d’En Gros, ces biens sont estimés dans un cadastre du XVe siècle, Dufau de Maluquer, éd. 1898-1899. 212-215.
  97. Courteault 1894, repris dans Biu 2002. Contamine 2017, 260-261, 275-276 ; Pailhès 2022,479-485.
  98. H. Courteault appelait déjà de ses vœux la publication de ce registre. Si la chronique est désormais éditée, l’inventaire est progressivement transcrit en vue d’une édition.
  99. Dufau de Maluquer, éd. 1897-1898, 251, repris par Biu, éd. 2002, 387 qui relève des corrections d’une autre main que celle du copiste dans la chronique rimée. Dans l’inventaire, mentions telles que Corregit intro assi ; et aixi ben en seguen. Leixatz hi IIIItre foelhas en blanc (fin du cahier sur Lordat), Leixatz hi VI fulhas en blanc (baronnie de Château-Verdun), Corregit ; leixat VI fulhas en blanc (Tarascon).
  100. À la toute fin de la “chronique”, Michel de Bernis annonce des vers sur Gaston IV : Per eternal memoria, me platz assi dejus algus verssas metrificatz pausatz per lod. Mossen Gaston, XVII comte de Foixs, mais le folio est resté blanc, Biu éd. 2002, 461.
  101. AD 64, E392, fol. 160v, le 14 janvier 1447 (n.st.), la mise en ordre du chartrier et l’inventaire se poursuivent : L’an mil IIIIc XL e sieys, lo XIIII jorn de jenier, lo discret mestre Arnaud Esquerrier, thessaurer del comtat de Foix, metec en lo present cartulari los documentz que s’en sieguen… Au fol. 179v : Item l’an mil IIIIc XLVI lo XIIII jorn de jenier, lo discret mestre Arnaud Esquerrier, thesaurer del comtat de Foix, portec en lo present cartulari lo proces feyt sus la recuperation dels decimes de Villamur, treyts dels archius del rey de Tholosa, et los que y falhen, lo qual proces es estat metut al caixo de Villamur.
  102. Titres calligraphiés mais suivis de folios blancs : Illicita portacio d’armes et de conoyssensa de falsas monedas (fol. 324), Molinas (fol. 326)…
  103. Sont listées des pièces plus ou moins récentes (par ex. sur la réformation, des livres de comptes de trésorier…) mais aussi des documents cités dans l’inventaire en 1403, tel l’inventaire des fourrures et joyaux d’Aliénor de Comminges (en 1403, on signalait qu’il venait d’être intégré, E391, fol. 81).
  104. Référence aux inventaires de 1403/1429 (Foix, E391) et de 1405 (Castelbon, E393) ? À l’inventaire de Foix (E391) et à un autre ?
  105. Par ex., un dossier rassemble des documents sur la guerre de Mathieu et ses conséquences, et il conclut : Et per so los ditz documentz, hieu Miquel de Bernis he registratz en lo present libre. Et se trobaran totz liatz en la caixa de Cardona et de Urgel (fol. 278). Dans le titre “Carcassone et Béziers”, après avoir inventorié deux chartes, il ajoute : Item lodit mestre Miquel de Bernis continuan la presenta obra, et troban hun caysson en lodit cartulari on abia escriut de part de dessus ‘Scripturas diversas pauc profeytablas’ [nom d’une caissette de l’armoire de 1403], empero lodit de Bernis volguec fer son degut, visitec lodit caysson, on trobet so dessus explicat, per so qui appar esser antic, et lo comte de Carcassona, abesque eran senhors de Foix et dels locs dessus expressatz. Item trobec lodit de Bernis plus avant en lodit caysson hun transcriut de una carta feyta en l’an mil LXII, regnant lo rey Henric de Fransa, on se monstra et se lieg que lo comte de Carcassona era senhor de Foix et de trops autres locxs, aixi cum deius es declarat, dels quals Rogier comte fec partiment et division a sos filhs Ramon et Bernat en la maniera que sensiec : [suivent des analyses détaillées, des actes copiés].
  106. Traduction de la citation originale que nous donnons plus haut (et n. 81).
  107. Le plan de l’inventaire (et du chartrier réagencé ?) diffère de celui de 1403. Sans entrer ici dans les détails, citons les premiers chapitres de l’inventaire dit de 1445 : Donesan, Comté de Foix, Mérenx, Ax, Montaillou et Prades, Lordat, Château-Verdun, Tarascon, Quier, Miglos… Les titres de Foix et de Pamiers sont inventoriés bien plus loin, alors qu’ils ouvraient l’inventaire de 1403. Voir n. 48 & 49, Lamazou-Duplan 2021c (restitution de l’armoire en 1403).
  108. Corrigé à l’interligne supérieur, en tout petit module : certa.
  109. Sont par exemple décrits par le menu le sceau du comte de Toulouse, celui des Moncade…
  110. Exemples : sous le titre des Homenatges dels inclitz et egregis senhors comtes de Foix feytz al illustre senhor rey de France o a sos loctinentz, un dossier, entre autres, Sus la loctinensa de Lengadoc ; plus loin : dans le chapitre Mazères, un dossier intitulé Forma pariatgii de Maseriis primi, nourri par des copies in extenso. Autre ex. : Asso es lo feyt de la guerre e accion sus la succession del realme d’Aragon… (guerre de Mathieu au nom de sa femme, Jeanne, fille de Jean Ier d’Aragon, contre Martin roi d’Aragon, voir n. 105), actes copiés in extenso…etc.
  111. Cf. supra les documents mis fora l’armari, dont : Item fo metuda en la chimineya de la toro u es lo dit armari libres de contes et aixi medix scripturas de las mostras feitas en lo temps de la guerra dels reys per lo comte de Foix (E 391, fol.89). La copie de ces montres court des folios 328 à 337 du registre E392, elles ont été transcrites lors du chantier d’histoire 2018, Lamazou-Duplan 2021a. La teneur de ces documents n’a pas été utilisée par M. du Bernis dans sa gesta, l’histoire des principats concernés ayant été probablement reprise d’Honoré Bovet.
  112. Saint-Pierre la Court, ou Mas-Grenier.
  113. Esquerrier et al., éd. 1895, 4-6 : Et per apres se troba en Io cartulary de Foix un transcript de carta antigua, feyta l’an de Nostre Seignor DCCCXLII : ‘creatoris cunctarum’, contenen que, al temps de Dagobert, rey de Fransa, seignorian touta Guyana, Galia, et ainsy meteys regin l’empery, et Ramon, comte de Tolosa, seignorian, Hugo papa estan, touta la gleisa oriental [era aixi] perturbada que, en tot lo Comtat de Tolosa, à tard se trobava, fora los forts, maisous, homes que y habitessan. Car touts los homes et las fennas cran morts per un vescomte, que se apelava Benaduc ; loqual era de gran linatge et toutjorn s’efforsava de soubsmettre touts sous vezis et parens. Ainsy cum, un jorn, aqueste batalhava ab sos ennemics, foc tout pessejat per sos ennemics, et revenguec de lu un fil, que se appelava Ato, loqual aguec victoria de sos ennemics ab l’adjuda del Comte de Tolosa. Losquals, vejen que non podian aver enfans, se van inventar, que fessan sengles monastiers ab dos convens ; et ainsy ac fen. Lodit Ato ediffiquec lo monastier de Lezat, et Io comte de Tolosa ediffiquec le monastier de Sant-Pey de Rasa, prop de la Garona. Et apres lodit Ato prenguec l’abit.
  114. Par exemple, Gauvard, dir. 2008, Pécout, dir. 2010, Dejoux 2014.
  115. Ordonnance s.d., Courteault, éd. 1897-1898, 102-105.
  116. Les ordonnances comtales (1416, 1425, 1444) dans Courteault, éd. 1897-1898, 88-114, Dufau de Maluquer, éd. 1897-1898, 226-248 ; synthèse dans Pailhès 2022, 681-682.
  117. Dans le paiement non daté de Michel de Bernis, la notation autographe de J. Sartre précise qu’il est conselher de notre senhor lo comte de Foix et refformador de son domayne et patremoni (E391, fol. 121v). Il est ainsi nommé dans l’ordonnance de Jean Ier en 1416, Dufau de Maluquer, éd. 1897-1898, 227-231.
  118. Après des missions à La Bastide-de-Sérou dont il est le notaire, Vidal Sans est réformateur général en 1425 (v. plus haut), il l’est toujours pour le comté de Foix et Donesan en 1444, en 1447, 1448, 1450. Il vit encore en 1459 et sert toujours le comte, Courteault, éd. 1897-1898,113-114, Dufau de Maluquer, éd. 1897-1898, 228, 231-244.
  119. Courteault, éd. 1897-1898, 105 ; Dufau de Maluquer, éd. 1897-1898, 236.
  120. Voir en particulier Courteault, éd. 1897-1898, 102-105.
  121. Morsel 2000.
  122. J. Morsel a mis en évidence l’effet sociogénétique des archives, l’effet de lignage, pour les aristocraties germaniques, Morsel 2004c.
  123. Morsel 2004a, 2004b.
  124. À peu près à la même époque, en 1418, une chronique, aujourd’hui perdue, De l’Escut de l’hostal de Foix et de Béarn, est dédiée à Jean Ier (citée dans un inventaire des livres du château de Pau du début du XVIe siècle) ; son auteur, Arnaud de Labat, cordelier de Morlaàs, était le confesseur d’Archambaud et d’Isabelle.
  125. Nous rejoignons C. Pailhès sur ce point, Pailhès 2014 et 2022. Nous avons vu que l’acte de fondation de Lézat (842), forgerie évidente, est pourtant le seul détaillé en 1403 et passe à la postérité chez Esquerrier.
  126. Actes entre les comtes de Foix et Boulbonne, nécropole comtale, inventoriés en 1403 et 1445.
  127. AD 64, E391, fol.83 : hh de madona Johana d’Artes. En lo medix calso fo metuda una caixeta senhada en lo cap davant de hh et dessus que ha scriut scripturas de madona Johanna d’Artes e de Ramon Ysalguier. Primerament cartas letras del rey e autres scripturas contenen lacort feit enter madona Johana dartes comtessa de foix et mossen gasto comte de foix son filh i per so quar no portan autre frut no es feit autre inventari. Gran copia de instrumentz contenens obligansas feitas entre Ramon Ysalguier e las pagas feitas e las quitansas. Lamazou-Duplan 2019a
  128. AD 64, E392, fol.212-213. Premières observations, Lamazou-Duplan 2019a. Au XVIIIe siècle, l’affaire est depuis longtemps refroidie : l’inventaire de la Tour ronde (AD 09 E6) livre davantage de documents.
  129. Lamazou-Duplan 2013.
ISBN html : 978-2-35613-543-8
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EAN html : 9782356135438
ISBN html : 978-2-35613-543-8
ISBN pdf : 978-2-35613-545-2
ISSN : 2741-1818
23 p.
Code CLIL : 3385
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Comment citer

Lamazou-Duplan, Véronique, “Les chartriers des Foix-Béarn à la fin du Moyen Âge. Des inventaires au service du pouvoir et de la mémoire du prince”, in : Bidot-Germa, Dominique, Courroux, Pierre, Lamazou-Duplan, Véronique, dir., Gouverner et administrer les principautés des Alpes aux Pyrénées (XIIIe-début XVIe siècle), Pessac, Ausonius éditions, collection PrimaLun@ 20, 2023, 249-272 [en ligne] https://una-editions.fr/les-chartriers-des-foix-bearn-a-la-fin-du-moyen-age [consulté le 22/12/2023].
doi.org/10.46608/primaluna20.9782356135438.17
Illustration de couverture • Édouard III accorde la Guyenne à son fils Édouard de Woodstock, dit le Prince noir, 1362 (British Library, Londres, ms. latin Cotton Nero D. VI fo 31, fin du XIVe siècle).
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