L’emploi du temps
Concernant l’emploi du temps des détenus, le docteur Isidore Sarraméa ne fait pas de réflexion particulière : « Le temps nous paraît distribué avec une sage économie ; chaque jour offre 8 heures de sommeil, 9 heures de travail, et une heure et demi de classe ; la prière, les repas, et la récréation occupent le reste. » Nous trouverons le détail de l’emploi du temps que quelques années plus tard dans le règlement intérieur rédigé le 18 octobre 1849 par l’abbé Buchou avec une partie annexe consacrée à Saint-Louis.
Soit 10h de travail en atelier (9h d’après le docteur Sarraméa en 1842), 1h30 de classe, 1h30 d’instruction religieuse, un peu plus d’une heure pour les repas et une heure seulement de récréation. Notons que le mercredi et le samedi à 15h a lieu le lavage général des pieds. Le dimanche et les jours de fêtes (art. 54), la distribution du temps est différente ; seul le règlement intérieur en témoigne :
En 1840, le catéchisme avait lieu tous les jours après la classe et deux fois tous les dimanches1. L’aumônier exigeait des enfants la récitation du catéchisme et leur attention respectueuse pendant l’instruction, mais devait s’abstenir de punir les enfants qui le mécontentaient et transmettre ses plaintes au directeur (art. 10). Les ecclésiastiques qui dirigeaient l’établissement avaient coutume d’entendre les enfants en confession, ce qui n’était pas du goût du ministre de l’Intérieur. Le règlement général du 31 mars 1864 excluait cette « prescription de haute moralité2 » dont l’abbé Buchou ne paraît pas avoir compris la signification.
Le silence est de rigueur, hors le temps des récréations (art. 57), du moins c’est ce qui écrit dans le règlement. Henri Gaillac cite dans son ouvrage un écrit du marquis de La Rochefoucault Liancourt, à propos de l’œuvre de l’abbé Dupuch :
on a adopté ce mode dans un de nos pénitenciers à Bordeaux, où, pour empêcher les enfants de parler, on a soin de les faire chanter. On les force à rester même pendant les récréations dans un mutisme complet ; puis pour ne pas leur laisser entièrement perdre l’usage de la voix, on a disposé qu’à toutes les heures au moment où l’horloge sonne, ils entonnent en chœur, à gorge déployée, un cantique ; et comme dit de Boisthïbault, ils s’en donnent alors à cœur joie. Le médecin dit qu’on a institué ces chants pour contrebalancer les mauvais effets du silence ; je le conçois : c’est là, en effet, un tourment très nuisible au physique, et sans avantage au moral. […] les médecins et les administrateurs les plus distingués […] ont reconnu qu’il produit la débilitation du système digestif, la disposition à I’idiotisme et l’engourdissement de l’intelligence. Si cela est vrai, il y a supplice physique et moral ; on rend malade, mais aussi on rend idiot, et les médecins ne sont pas les seuls qui attestent la barbarie de cette loi3.
On permet seulement les paroles échangées dans les ateliers pour le besoin du travail, en présence du maître. Pendant les récréations, les jeux qui demandent du mouvement sont encouragés, mais les jeux de mains et les luttes sont interdits (art. 65). Défense est faite de se promener à deux ou àplusieurs, des idées de désordre pourraient naître de ces réunions. Ils peuvent entourer un surveillant pour entretenir une conversation générale avec lui. Un premier signal fait cesser les jeux, une minute plus tard, un deuxième signal fait revenir le silence (art. 67) et tous se mettent en file.
Chaque matin à 7h30, les enfants se lavaient les mains et le visage et le dimanche et fêtes, ils y donnaient plus de soins. Or, une salle pré-installée à cet effet n’est pas citée. Du reste, on imagine aisément l’inutilité d’une telle pièce pour un lavage si sommaire. Le lavage général des pieds avait lieu chaque mercredi et samedi, alors que pendant la saison convenable il était fait fréquemment usage des bains (art. 40). En fait une salle de bains ne fut installée4 à Saint jean qu’en 1857 en réponse aux dispositions que devait prendre le directeur pour améliorer la situation du pénitencier. Une date aussi tardive et le contexte des sollicitations incessantes de l’Administration à ce sujet montrent à quel point l’ecclésiastique n’attache pas énormément d’importance aux soins de propreté. Devant les remontrances des autorités, l’abbé fit installer des baignoires à Saint Louis. En 1869, la colonie en comptait 87, nombre qui, selon l’abbé Buchou, était largement suffisant pour baigner tous les détenus en une semaine5. À l’évidence, les dispositions prises dans la maison de correction concernant l’hygiène corporelle ou vestimentaire sont assez faibles. On les considérait comme une perte de temps, d’argent et surtout comme une préoccupation négligeable. Le docteur Isidore Sarraméa ne semble pas avoir porté son attention sur l’hygiène corporelle des enfants, au contraire de l’Administration qui ne ménagea pas les critiques, ainsi que les rappels à la bonne marche des dispositions pour la santé des détenus.
Le dimanche, pas d’atelier ! On imagine sans peine que les détenus devaient attendre avec impatience un jour comme celui-là. Les deux activités de la journée les plus importantes sont d’une part deux fois par mois les relations avec le monde extérieur, avec la visite des parents et des membres de la Société de patronage pour les récompenses et d’autre part, la soumission aux devoirs religieux. On s’aperçoit que l’instruction primaire est confondue avec le catéchisme à 11h. Les enfants de culte protestant sont envoyés à la colonie de Sainte Foy. Le règlement général prévoit les changements des chemises et des mouchoirs, régulièrement tous les dimanches, ainsi que les serviettes de bain.
Lors de l’enquête du docteur Levieux6 en 1858, devant ces emplois du temps surchargés, les enquêteurs incitèrent à ce que l’on rajoute une demi-heure de récréation le soir et le matin. L’interdiction de l’emploi dans les usines et manufactures d’enfants de moins de 8 ans et la limitation à 12h par jour du travail des enfants de 8 à 12 ans ayant été législativement entérinées le 22 mars 1841 – mais il faudra des années avant que ces dispositions ne soient effectives – on peut même considérer que les enfants emprisonnés à Bordeaux sont privilégiés avec leurs 10h de travail. Nous n’avons aucune indication qui permet de dire si ces emplois du temps étaient scrupuleusement respectés. Par contre, le docteur Isidore Sarraméa confirme que sont intégralement suivies les recommandations de Charles Lucas : le travail est organisé avec le silence comme règle de discipline, mais il ajoute « autant que faire se peut », avec salaire comme prime d’encouragement, avec masse de réserve7 comme principe de prévoyance, avec enseignement d’une profession comme but d’utilité individuelle et sociale et enfin avec une « interruption hygiéniquement calculée » de manière à ne pas produire une fatigue nuisible à la santé d’individus encore jeunes [368].
Cinq ateliers, confiés à des maîtres recommandables par leur savoir et leur moralité offrent aux détenus l’avantage d’apprendre un état : serrurier, tourneur, vannier, cordonnier et tailleur8. Le produit du travail est réparti de façon à ce que le détenu en obtienne les 2/3 dont une portion est mise en réserve et le reste à sa disposition pour des objets utiles. [368]
Au travail se joint l’instruction, moyen indispensable de tirer les détenus de leur ignorance, souvent cause de leurs fautes puisque… d’après ce que nous avons remarqué sur 20 jeunes condamnés on en trouve 19 qui ne savent ni lire ni écrire : nous en avons vu même qui ne savaient pas faire le signe de croix. Comment serait-il possible, je le demande, que des êtres si profondément ignorants pussent être raisonnablement condamnés à l’isolement complet, pour être eux-mêmes leurs éducateurs ? [369]
Pour se rendre d’un lieu à un autre les détenus marchent en silence à la file indienne et saluent de la main militairement le surveillant ou le maître qu’ils rencontrent (art. 58) ; défense est faite aux jeunes détenus de se promener à deux ou plusieurs ensembles (art. 66) ; la promenade consiste dans une « course » à la campagne sur une grande route pendant deux ou trois heures sans s’arrêter nulle part (art. 68).
Quant à l’instruction religieuse, « frein le plus puissant de tous les mauvais penchants, elle est prodiguée avec la plus grande sollicitude. L’accomplissement des devoirs religieux se fait avec la plus complète liberté et sans qu’il soit exercé sur les détenus la moindre contrainte… » [369].
Les punitions
Le docteur Isidore Sarraméa est partisan de la séquence récompense-punition mais prend position contre les excès des punitions. Il définit la pédagogie de la maison de correction comme « une subordination par la douceur » :
Admettant des récompenses comme moyen indispensable de discipline, nous croyons aussi à la nécessité des punitions… ces punitions doivent être maintenues dans de certaines limites que les administrateurs des prisons ne sauraient franchir sans se rendre coupable d’injustice. Loin de nous les châtiments corporels qui révoltent et aigrissent l’âme plutôt que de la disposer au repentir ! Loin de nous le système de l’isolement complet qui est contraire aux lois divines et humaines et qui traite l’homme comme une bête féroce !
Croyons bien que la subordination obtenue par la douceur est de beaucoup préférable à celle qu’amène l’intimidation : la crainte des châtiments fait des hommes hypocrites, la persuasion seule fait des hommes vertueux. C’est dans ces pensées toutes de charité que les punitions sont appliquées au pénitencier Saint-Jean. Se faire craindre sans se faire haïr, se faire aimer sans se relâcher d’une sévérité nécessaire, telle est la règle de la discipline qui a produit jusqu’à ce jour d’heureux résultats. Tout cependant n’est pas succès : le vice solitaire, fléau de la jeunesse, exerce sa funeste influence et ses tristes effets, empreints sur les traits de ceux qui s’y livrent, font rechercher chaque jour les moyens d’y remédier. L’établissement des dortoirs a produit déjà de bons résultats, et secondé puissamment le sentiment religieux. [370]
Enfin, le docteur Sarraméa nous donne un des rares aperçus existant dans les sources sur le bilan de la prise en charge des enfants détenus dans le pénitencier :
Depuis sa fondation jusqu’à ce jour le pénitencier Saint-Jean a reçu 229 enfants. Sur ce nombre 9 sont morts : sept phtisiques, un scrofuleux, et le dernier par suite d’une méningite.
97 sont sortis libérés : 15 d’entre eux seulement connaissent suffisamment un état pour gagner leur subsistance.
Sur les 82 enfants sortis sans profession un grand nombre n’avait passé que quelques semaines ou quelques mois dans le pénitencier, temps insuffisant pour devenir ouvrier.
Les autres s’étaient trouvés dans les commencements alors que l’organisation n’était pas encore complète et qu’il était difficile d’inspirer le goût de travail sérieux à des enfants accoutumés à l’oisiveté… aujourd’hui que les ateliers sont organisés les résultats sont bien différents.
L’avis du Conseil général en 1848
Dix ans après sa création, à la séance du Conseil général du 1er décembre 1848, le rapporteur de la Commission fait une description précise des locaux et des aménagements qui ont été réalisés ou en cours dans la maison d’éducation correctionnelle qui est en même temps, une maison d’arrêt et de justice pour les jeunes prévenus et condamnés du département.
Les divers ateliers, ceux des cordonniers et des serruriers particulièrement, ont été agrandis par la démolition de murs intérieurs qui en empêchaient le développement. La partie de maison où sont les dortoirs et les cellules a été complètement réparée ; toutes les séparations intérieures ont disparu et, entre deux dortoirs à chaque étage, bien aérés et dans des conditions satisfaisantes, on a construit un bel escalier en pierre jusqu’au troisième étage qui entretient dans toute la maison une ventilation suffisante et qui rend très facile la surveillance de jour et denuit du palier ; les dortoirs sont fermés par des portes vitrées. Le quartier des cellules, au second, à droite, est entièrement neuf moyennant un surhaussement des bâtiments on a pu les construire égales, commodes, aérées ; dans un seul corridor on en compte trente, toutes plafonnées et établies sur des planchers entièrement neufs. Au troisième, vis-à-vis du corridor des cellules plus spécialement occupées par les enfants en correction paternelle, a été installée une infirmerie. Cette infirmerie est plafonnée et dans de bonnes conditions de propreté, de commodité et de ventilation. La dépense de ces constructions et de ces réparations s’est élevée à près de 10000 francs. Toutes ces réparations, toutes cesconstructions dans une aile de bâtiments de 65 à 70 mètres de longueur, ont eu pour objet principal de rendre plus facile la surveillance des jeunes détenus et de détruire la vermine qui s’était incrustée dans les lambris et planchers d’une vieille maison et qu’aucun soin n’avait pu jusque-là détruire9.
II restait à améliorer l’aile de bâtiments donnant sur la rue Lalande, où se trouvent la chapelle, la conciergerie et les appartements du Directeur et du Sous-directeur. Le mur extérieur n’étant pas à l’alignement fixé par la ville, il y aura nécessité de le reconstruire entièrement. De nouvelles dispositions intérieures deviendront indispensables pour ajouter au préau, déjà trop petit. La chapelle humide, salpêtrée, sombre à cause de son enfoncement au-dessous du sol serait exhaussée et agrandie. La dépense, pourrait atteindre 15 000 francs. Si le gouvernement accordait un secours de 10 000 francs, le directeur entreprendrait à ses risques, pour le surplus de la dépense, cette réparation importante. Il serait heureux, en commençant immédiatement, de procurer quelque ouvrage à des ouvriers (détenus) qui seraient sans travail.
« Le bon directeur » a obtenu, en conséquence, un bail de vingt-cinq ans, pour un prix réduit de location, se chargeant de toutes les améliorations locatives qu’il jugerait convenable à l’établissement ; de plus, il s’est réservé, aussi bien qu’à ceux qui lui succéderont, de renouveler le bail ou de rendre les lieux ce qu’ils seront à l’époque où il voudrait le quitter. Puis enfin reste une autre garantie : c’est que la maison ayant été donnée par le gouvernement à une communauté pour une bonne œuvre, celle-ci n’a pas la faculté de la vendre.
Après cela, on aurait un pénitencier industriel, en ville, au milieu d’un quartier habité par la classe ouvrière, dans des conditions convenables pour cent cinquante à cent soixante-dix enfants nombre qu’il ne faut pas dépasser, d’après l’avis de M. le directeur, pour les jeunes détenus destinés à l’industrie, tous les autres étant avec plus d’avantages affectés aux travaux agricoles. Or, pour ces derniers, on a le bel établissement de Saint-Louis, à 5 kilomètres de distance, sur la grande route de Toulouse, qui contient aisément 200 enfants détenus. Si les circonstances ont contribué à séparer ainsi le pénitencier agricole du pénitencier industriel, l’expérience qu’a acquise M. le directeur lui a démontré l’utilité de cette séparation absolue et à distance. Avec la tendance qu’ont les enfants de la campagne à vouloir apprendre un état, il croit qu’il serait plus difficile de les retenir et de les attacher aux travaux des champs, pour peu qu’ils vissent leurs camarades pratiquer une industrie quelconque. Quelques-uns ont forcé M. le directeur, par leur mauvaise conduite à la colonie, de les réintégrer au pénitencier de Bordeaux, et il a acquis la certitude que c’était, de leur part, l’intention secrète d’apprendre un état qui les aurait excités aux désordres dont ils s’étaient rendus coupable. D’un autre côté, on ne peut sans inconvénient élever dans les travaux agricoles les jeunes détenus dont les parents se livrent aux travaux de l’industrie et qui sont domiciliés dans une ville. On n’obtiendra jamais, quoi qu’on fasse ce que l’on voudrait quelquefois, de les détacher de leurs familles, de les fixer loin d’elles dans la vie morale des champs. Un sentiment naturel qu’on ne peut pas condamner les attirera, tôt ou tard, au milieu des leurs. Or, quels dangers pour ces jeunes libérés de dix-huit à vingt ans si, à cet âge, ils ne pouvaient au moyen d’un état assurer leur existence !
Toutes ces considérations nous font approuver ce qui existe avec tant d’avantage dans le pénitencier de Bordeaux, la séparation totale des enfants détenus qu’on élève dans l’industrie, de ceux qu’on élève dans l’habitude des travaux agricoles. Nous approuvons, par conséquent, le projet de réparations que se propose M. le directeur pour un nombre limité de 160 à 170 jeunes détenus et votre Commission vous propose d’émettre le vœu que le Gouvernement s’empresse de lui venir en aide dans l’exécution de ses plans. Ce vœu serait un témoignage de tout votre intérêt pour un si utile établissement10.
Nous notons donc l’avis très favorable du Conseil général à l’égard du pénitencier et de son directeur l’abbé Buchou. Un membre du Conseil s’étonne que les recettes prévues provenant du travail des détenus ne soient plus que de 400 francs pour 1849 alors qu’elles étaient de 1 800 francs en 1848. Le préfet répond que les causes de cette différence tiennent à la prévision de la suspension des travaux dans les prisons. Un autre membre estime que, dans le pénitencier, les métiers de luxe sont trop nombreux ainsi que les fabricants de tapis. Il désirerait que les professions enseignées aux jeunes détenus soient des professions utiles qu’ils pourraient exercer en tous lieux, au village comme à la ville. Cette objection est combattue par un autre membre qui pense que l’industrie des tapis que MM. Laroque frères ont importé à Bordeaux avec un si grand succès, mérite d’être encouragée et aidée par tous les moyens possibles et M. l’abbé Buchou a donc eu une pensée à la fois sage et patriotique en créant pour cette industrie, désormais indigène, une pépinière d’ouvriers habiles et nombreux.
Les jeunes libérés
En l’absence de données locales, aucun compte rendu n’existant sur l’activité de la Société de patronage bordelaise – pourtant existante – nous citons l’analyse faite par Paul Bucquet qui permet de se faire une idée sur la situation des jeunes libérés :
Pendant l’année 1851, 1 228 jeunes détenus ont été libérés ou graciés en France. Pour 1 054 d’entre eux, 323 avaient appris un métier agricole, 601 un métier industriel et 130 étaient restés inoccupés. 552 étaient entrés complètement illettrés dans l’établissement correctionnel ; 407 ont appris à lire ou écrire ou l’une de ces deux choses, 361 se sont perfectionnés ou ont fait des progrès sensibles, 286 n’ont rien appris ou n’ont fait aucun progrès.
460 ont fait preuve d’une bonne conduite et n’ont point encouru de punition, 360 ont eu une conduite légère et dissipée, 234 ont été constamment punis.
À sa sortie des établissements privés, le jeune libéré reçoit des vêtements et un trousseau dont la valeur et la composition varient selon le temps passé dans l’établissement ; son pécule lui est remis et, lorsqu’il n’en a pas, on lui donne quelque argent à titre de secours de route.
C’est dans ces conditions que les libérés rentrent dans leur famille.
Le total des masses ou pécule gagné pendant le séjour à l’établissement correctionnel et remis à la sortie, a été de 13,766 francs 12 c. pour 334 libérés. La plus forte masse a été donnée par l’établissement de Bordeaux, elle était de 342 francs 03 c.11 Les moins fortes variaient de 10 c. à 3 francs. 720 libérés [sur 1 054] sont donc sortis sans pécule.
Quelques Directeurs de colonies agricoles, et principalement ceux de Mettray et du Val-d’Yèvre, Bordeaux, Toulouse, Petit-Quevilly, etc., veillent avec une louable sollicitude au placement de leurs jeunes libérés et étendent encore sur eux, après leur sortie du pénitencier, leur tutélaire patronage12.
Paul Bucquet conclut que « la statistique que nous avons dressée indique d’ailleurs, assez clairement, combien les jeunes détenus, à leur sortie de nos établissements correctionnels, peuvent encore avoir besoin de l’assistance morale et du dévouement charitable des sociétés de patronage. » Et c’est encore lui qui nous apprend que :
La société de patronage de Bordeaux se compose de 60 membres ; chacun d’eux est chargé de la surveillance morale et, plus tard, du placement en apprentissage de 3 jeunes détenus. Il y a, tous les quinze jours, réunion des patrons pour entendre la lecture des notes du pénitencier et des renseignements reçus sur les pupilles libérés.
La société bordelaise en a patronné 63 libérés pendant l’année 1851. Sur ce nombre, 19 ont laissé le patronage sans nouvelles ; 31 en ont donné de satisfaisantes ; 10 inspiraient des inquiétudes pour la dissipation de leur vie et le danger de leurs relations ; 2 avaient récidivé13.
Quant à la durée de l’incarcération, elle est des plus variables. Selon Paul Bucquet, elle « varie beaucoup : la plus longue détention a été de 9 ans, la plus courte d’un mois. »
Notes
- Y269 : Lettre de Fayet au préfet, Bordeaux, le 9 mars 1840.
- Y261 : Lettre du ministre de l’Intérieur au préfet, Paris, le 8 décembre 1864.
- Gaillac Henri, Les Maisons de correction 1830-1945, Paris, Cujas, 1991, p. 46.
- Y261 : Lettre du préfet au ministre de l’Intérieur, Bordeaux, le 2 décembre 1857.
- Y206 : lettre de Buchou au préfet, Bordeaux, le 29 octobre 1869.
- Levieux J.-B. Charles, né le 23 février 1818, docteur en médecine (Paris 1841), se fixe à Bordeaux en 1842. Membre et secrétaire général du Conseil d’hygiène publique et de salubrité de la Gironde en 1849 et en 1853 vice-président. Membre de la Commission des logements insalubres de 1850 à 1857. Médecin de l’hospice des incurables et des vieillards de 1853 à 1856. Médecin de l’hôpital Saint-André de 1856 à 1862. Professeur de clinique médicale (chargé de cours) à l’école préparatoire de médecine en remplacement de Gintrac père. Membre de la société de médecine et de chirurgie de Bordeaux depuis 1850, médaille d’or choléra en 1854.
- L’argent que le détenu gagnait pour son travail était « mis en réserve » et donné le jour de sa libération.
- Les plus petits ou ceux qui n’ont que très peu de temps à passer dans la maison sont étoupiers.
- ADG, rapport du Conseil général, séance du 1er décembre 1848, p. 220.
- Ibid.
- C’est moi qui souligne.
- Bucquet Paul, op. cit., p.40.
- Ibid., p. 43.