Paru dans : Les Cahiers du Bazadais, 173, 2011, 31-49.
Lorsque je fus informé du tracé probable de l’autoroute Bordeaux-Pau et chargé de recenser les sites archéologiques connus susceptibles de se trouver sur son passage, j’indiquais la ferme du Dron dans la commune de Cudos1. Certes, jamais la moindre découverte n’avait été faite aux alentours, mais la future autoroute devait traverser dans ce secteur des chemins reliant Bazas à la commanderie de “Baulac” sur les bords du Ciron. Le nom du Dron figurait aussi à quatre reprises dans une des reconnaissances faites en 1274 au roi-duc Édouard Ier par un groupe de ses hommes francs habitant la paroisse de Cudos. Il était probable que l’autoroute croiserait un habitat ou un parcellaire ayant appartenu à ces hommes ou à leurs voisins.
Rappel historique
En 1274, nous sommes sous le règne d’Édouard Ier qui a succédé en 1272 à son père, Henri III. En 1254, Henri III avait fait don à son fils de tous ses droits en Gascogne et le prince avait résidé dans son duché en 1254-1255, puis y avait fait de courtes apparitions en 1260-1261 et en 1270. Il avait alors eu le souci de faire rechercher quels étaient les droits qu’il possédait en Gascogne, mais sans que cette initiative eût abouti. Il revenait de Palestine lorsqu’il apprit, en Italie, le décès de son père et, dès son arrivée en Gascogne en septembre 1273, il fit entreprendre, cette fois, un recensement complet de ses droits qui furent consignés dans un recueil appelé Recogniciones feodorum in Aquitania (Reconnaissances des fiefs en Aquitaine)2. Les opérations se déroulèrent de septembre 1273 au mois de mai 1274. C’est ainsi que, le 19 mars 1274, se présentèrent à Bordeaux les procureurs de plusieurs communautés d’hommes francs du roi (homines francales regis) de la prévôté de Bazas. Ces hommes francs qui résidaient dans les paroisses d’Artiguevieille, Tontoulon, Bernos, Pompéjac, Sauros, Taleyson, Escaudes, Maillas et Cudos contribuaient au paiement collectif d’une “queste” de 20 livres annuelles3. Ils n’étaient pas les seuls habitants du diocèse tenanciers du roi-duc ; si les reconnaissances qu’ils font sont au nombre de 73, nous disposons aussi de 137 reconnaissances d’autres tenanciers que nous avons appelés simplement “hommes libres du roi”, résidant, soit dans la prévôté de Bazas, soit en Loutrange et à Bouglon, soit sur la rive gauche de la Garonne4 (fig. 1).
Reconnaissances féodales
Les hommes francs du roi (homines francales), sont des roturiers libres, dépendant directement du roi-duc5, bénéficiant pour leurs personnes et leurs biens d’un statut privilégié. Au nombre de vingt-deux dans la paroisse de Cudos, ils ont délégué l’un d’entre eux, Arnaud de Casa, “manda” de la paroisse, pour faire reconnaissance en leur nom6. Ces reconnaissances au nombre de douze sont faites dans la plupart des cas par un groupe de personnes. Dans la présentation qui suit les numéros (0) renvoient aux articles du procès-verbal au nombre de 14, y compris le protocole initial et le dispositif de l’acte (1)7. Les mentions de sous et deniers8 correspondent au montant de la redevance de chaque déclarant et, dans le cas d’une communauté, à sa répartition entre ses membres ou “parçonniers”. Cette part est, en principe, proportionnelle à l’importance des biens que détient chacun des parçonniers, car, si les parçonniers font une reconnaissance collective, ils ne sont pas pour autant en indivision. Précisons, aussi, ce que recouvre le terme de tenure. La tenure correspond à un bien foncier dont le tenancier ne détient que le droit utile : il en jouit à perpétuité – on parle de bail emphytéotique –, le transmet à ses héritiers, mais il peut aussi le vendre ou l’échanger. Le droit éminent appartient au seigneur, qui, lorsqu’il y a une cession, reçoit un droit (lods et ventes) qui correspond à une taxe de mutation. À changement de tenancier ou de seigneur ou les deux, le tenancier verse une esporle, somme le plus souvent symbolique (2 d.), qui rappelle le droit éminent du seigneur sur la tenure, et, chaque année, un cens ou une agrière (part de grain, de vendange etc.).
Les reconnaissances concernent :
• soit des casals, unités foncières d’un seul tenant avec des dépendances. Le casal porte le même nom que les tenanciers, mais à la suite du mariage d’une “casalère”, à la génération suivante, des parçonniers, porteront des noms différents de celui du casal. Car si une femme ne porte jamais le nom de son époux, celui-ci donne son nom à leurs enfants.
(4) Guillaume (1 s.), Gaillard (6 d.), Jean (1 s.), Raimond (6 d.) et Menaud de Mauros (1 s.) reconnaissent tenir le casal de Mauros et vingt-deux pièces de terre. Total : 4 s.
(8) Bernard de Marted et son épouse (6 s.) et Menaud de Sarciag (1 s.) et leurs parçonniers, Guillaume de Sarciag (1 s.), Marthe (1 s.), Rixend (1 s.), Garcias de Laveyr (1 s.) et Guillaume de la Rivel ou de Larquad (1 s.) reconnaissent tenir le casal de Sarciag et une terre qui en dépend à Bieusebe. Total : 12 s.
(9) Arnaud et Jean de Casa (2 s. 6 d. chacun), le casal de Casa et ses dépendances.
Total : 5 s.
(10) Guillaume de Langlade, le casal de Langlade avec les terres cultivées et incultes qui en dépendent : ne contribue pas à la queste.
(11) Vital et Guillaume de Lartigue, son petit-fils ou son neveu9 (5 s. 6 d. chacun), le casal de Lartigue avec les terres cultivées et incultes en dépendant. Total : 11 s.
(12) Agnès de Lapujade le casal du Lug : 2 s.
• soit un groupe de parcelles :
(2) Guillaume, Géraud et R. de Mauros, quatre pièces de terre : 2 s.
(3) Arnaud Amanieu et Guillaume Arnaud, frères, quatre pièces de terre : 2 s.
(5) Vital de Casa trois pièces : 6 d.
(6) Raimond de Casa, deux pièces : 3 d.
(7) Arnaud de Casa, deux pièces : 3 d.
• soit ils déclarent ne rien tenir du roi-duc comme Vital et Fort de Larmal, frères : 2 s. (13), ainsi que Garcias et Jean de Larmal, deux autres frères : 2 s. (14).
Statut des hommes francs
Quelle que soit la nature de leurs possessions tous ces hommes, sauf les Larmal, sont des francales ou hommes francs du roi. À la différence de ce qui se produit dans la tenure “classique” où le tenancier fait une reconnaissance personnelle, les hommes francs de Cudos doivent verser collectivement une somme de trente sous, qui constitue leur contribution à la redevance globale de 20 livres dont est redevable chaque année l’ensemble des hommes francs du Bazadais. Le total déclaré par les francs de Cudos atteint 43 s., dépassant largement le montant théorique de leur participation. Quant à Guillaume de Langlade, il est seulement tenu de fournir pour les besoins du roi un homme franc à Sauviac et un autre à Artiguevieille, “comme les autres francs de Cudos”, disposition que l’on ne retrouve pas dans les autres reconnaissances (10). La nature de ces besoins n’est pas précisée et il ne saurait s’agir du service d’ost puisque Guillaume de Langlade le doit au prévôt de Bazas ou à son représentant, sauf s’il est requis pour d’autres affaires. Ces hommes doivent, en plus, le service d’ost (service militaire local à caractère en principe défensif) et celui de procuration, c’est-à-dire l’accueil (le couvert) deux fois par an du prévôt du roi en Bazadais et de sa suite ainsi que le serment de fidélité.
Les Larmal (13, 14) ne tenant rien du roi, doivent seulement quatre sous pour la protection qu’il leur accorde. On ne saurait les considérer comme des hommes francs car le statut d’homme franc est attaché à la possession de biens réputés appartenir à la terre franche et à la participation au paiement de la “queste”. Ainsi, certains membres de la famille de Casa sont des francales : Arnaud et Jean de Casa pour un casal et ses dépendances (9) et Arnaud – est-ce le même ? – pour deux pièces de terre (7), Vital (5) pour trois pièces de terre, Raymond (6) pour trois pièces. Mais ni Pierre de Casa (8-2), ni Dijon de Casa (6-2) dont les biens apparaissent en confronts ne sont des hommes francs.
Il est constant que des hommes francs tiennent aussi des terres en dehors des terres de la franchise. Ainsi, Arnaud de Casa (7) reconnaît tenir au titre de la franchise deux parcelles de terre dont une se trouve “au-dessous de son casal”, c’est-à-dire du noyau de son exploitation, mais il précise que la maison dans laquelle il habite se trouve sur ce casal et non en terre de franchise. De même, Bernard de Marted tient d’un autre seigneur que le roi sa vigne de Bieusebe (8-2). De son côté, Guillaume de Langlade excepte de sa reconnaissance les terres “qui dépendent d’autres seigneurs” (10). Quant aux membres de la famille de Larmal, ils tiennent leurs biens d’autres seigneurs que du roi-duc (13, 14).
Notons, enfin, que Doat del Albarede (de l’Aubarède), homme franc de la paroisse de Bernos, doit pour lui et ses parçonniers 2 s. bordelais pour la terre qu’il tient en fief du roi-duc à Cudos, au lieu appelé Al Lug qui est le nom du casal d’Agnès de Lapujade (12)10.
Les hommes francs résident en principe sur les terres de la franchise. On dit alors qu’ils sont “chasés”. C’est le cas des Mauros qui détiennent un casal (2) ou seulement des parcelles dispersées (4), mais l’un d’entre eux, Jean, ne l’est pas. Pour les autres hommes francs, sauf Arnaud de Casa (7), rien n’est précisé ; sans doute est-ce un oubli du rédacteur, car les hommes francs détenteurs d’un casal y résident forcément et y ont leur résidence. Mais pour ceux qui ne détiennent dans la terre de franchise qu’un petit nombre de parcelles, leur résidence peut se trouver en dehors (7).
Les autres tenanciers et les autres seigneurs de la paroisse
Les hommes francs de Cudos côtoyaient d’autres hommes, dont les tenures entouraient les leurs et qui constituaient parfois, comme chez eux, de petites communautés. Les unes et les autres sont désignées par la formule homines de,“les hommes de”. Les hommes de Casa (2-1, 4-17,19 ; 4-21), ceux de Mauros (4-20) ou Marcos (8-2), sont sans doute les francales que nous venons de rencontrer qui tiennent les casals du même nom, mais il est aussi question des hommes du Dron (homines del Dron) (2-3 ; 4-10,11), des hommes d’Arriol (2-4 ; 4-21) ou d’Arrios (8-2), des hommes d’Alerera, peut-être les mêmes (8) qui ne sont pas des francales.
Les hommes du Dron apparaissent à trois reprises dans les confronts de pièces de terre reconnues par plusieurs Mauros (2) : l’une située Al Piczat confronte, la terre des hommes du Dron (terrarum homines del Dron) (2-3). À deux autres occasions, leurs terres servent de limites à des pièces de terre dans la dépendance du casal de Mauros (4) : une pièce confronte de tous côtés la terre des hommes du Dron (terram hominum del Dron) et celle de Cabanag (4-10), et 20 règes et une pièce de terre se trouvent entre la terre des hommes du Dron de tous côtés et celle de R. del Dron (4-11). Notons enfin que le casal de Mauros (4) s’étend jusqu’au ruisseau du Dron (quod durat usque ad rivum del Dron) (2-1). Les hommes d’Arriol tiennent de leur côté une terre près de Viestube (2-4 ; 4-21), ceux d’Alerera, sans doute les mêmes, à proximité du casal de Sarciag (8-1).
D’autres communautés se laissent deviner comme celle des Cabanac, dont nous connaissons plusieurs membres : Jean (2-2,3) ; Pierre Guillaume (2-2, 3 ; 4-8, 12, 14, 15, 21 ; 5-2, 3), Arnaud (2-2, 3 ; 4-14,18, 19, 20), Guillaume (2-2, 8 ; 9 ; 4-13), mais aucun d’entre eux ne possède de terre franche. D’autres fois, il s’agit de tenanciers isolés comme Jean de Buscos (3-1,2), Pierre Arnaud Dupuy (3-3), Arnaud de Claus (3-3, 4), Widot de La Taste (4-4) ou Raymond Duprat (4-7).
Une question se pose à laquelle nous ne sommes pas en mesure de répondre : quels étaient les seigneurs des tenures qui n’appartenaient pas aux terres de la franchise, détenues par des hommes francs ou d’autres tenanciers ? S’il s’était agi du roi-duc, les reconnaissances se trouveraient dans les Recogniciones. Il est logique, c’est la règle, que pour les confronts on indique le nom du tenancier et non celui du seigneur, mais, parfois, ce n’est pas toujours le cas, en particulier lorsque ces seigneurs ne possèdent qu’un nombre limité de tenures. Apparaissent ainsi : la terre appartenant au sanctuaire de l’église, celle de Cudos (3-2) ; à Saint-Jean (8-1), probablement le chapitre de Saint-Jean-Baptiste de Bazas qui détient un casal à Langlade (10-1) ; à l’Hôpital de Baulade ou de “Baulac” (2-4) ; à Amanieu de Mosiac, un damoiseau (8-1) ; à Raimond Marques, possessionné aussi à Artiguevieille11 un des sept citoyens de Bazas qui, le 30 mars 1274, reconnaissent les obligations auxquelles sont tenus les bourgeois de Bazas envers le roi12.
Parmi les seigneurs possédant des biens dans la paroisse de Cudos, nous connaissons aussi Géraud de Mota, un damoiseau, coseigneur de Castelnau de Mesmes, possessionné aussi à Maillas, Giscos, Lartigue, Goualade, Lerm, Bernos et Roquetaillade13.
Identification des lieux (fig. 2-4)
Tous les hommes que nous venons d’évoquer, qu’ils soient ou non francs, sont établis dans la partie sud-ouest de la paroisse de Cudos, à la limite de celle de Bernos, sur la pente du plateau qui descend vers le cours du Ciron. Ce versant est découpé en lobes arrondis par les trois branches d’un ruisseau qui se jette dans le Ciron. Celle de l’ouest, dite ruisseau de Pessan, orientée nord-sud et censée aujourd’hui être l’affluent du Ciron, au XIIIe siècle et encore au XIXe siècle, se nommait le Dron (4-1) (fig. 5). Celle du centre, le ruisseau de Lespin, s’appelait au XIXe siècle le Martinet et se jetait alors dans le Ciron : on y reconnaît le nom du ruisseau de la Marthele (8-1). Celle de l’est, le ruisseau de la Grange, s’appelait au XIXe siècle le ruisseau d’Ariol : celui-ci n’est pas cité dans la reconnaissance, mais on connaît les hommes d’Ariol ou d’Arios qui portent le nom du lieu-dit Ariol, devenu Ariole. Un ruisseau d’Artiga qui devait couler à proximité du casal du même nom (11)tout comme les simples mentions “le ruisseau” (4-7, 7-1) restent à identifier.
Les casals sont au nombre de sept : ceux de Mauros (4), Sarciag (8), Casa (9), les deux casals de Langlade (10), ceux de Lartigue (11) et du Lug (12).
Le casal deu Lug (12), proche d’une terre d’Auzinham, qui rappelle celle d’Auzinhe, correspond probablement à la ferme du Luc, dans Bernos, mais à proximité de la limite de Cudos, à 750 m au nord-ouest du Dron.
La localisation du casal de Sarciag ne s’impose pas de la même façon (8). Il est proche du ruisseau de la Marthele (le Martinet) dont il est néanmoins séparé par des terres qui appartiennent à d’autres seigneurs que le roi-duc (terre d’Amanieu de Mosiac, du chapitre de Saint-Jean et de Raymond Marquès). On se trouve manifestement à la périphérie des terres du roi-duc dont dépendent les autres terres et casals.
Trois autres casals se trouvent dans ce cas, les deux casals de Langlade (10, 11) et celui de Casa (9). Le casal de Casa se trouve entre celui del Anglade et un chemin public. Celui de Langlade entre un autre casal de Langlade, appartenant celui-ci au chapitre Saint-Jean et le casal de Casa. Au moins huit représentants de la famille de Casa apparaissent dans les reconnaissances dont Arnaud et Jean qui détiennent le casal du même nom. Mais Vital (5) Raymond (6) et Arnaud (7) font des reconnaissances pour leurs terres dans la platea de Cabanag et à Auriebad. Il est probable que le casal de Casa n’était pas très éloigné du lieu de Cabanac et par conséquent celui de Langlade aussi.
Le lieu-dit le Dron se trouve à 1 km du Ciron, à 250 m de la limite de la paroisse de Cudos et de celle de Bernos et à 300 m environ du cours du ruisseau sur sa rive droite, qu’il domine d’une vingtaine de mètres. Le Dron prend ses sources à 1 300 m au nord, À la Houn de la Peyre et à Pessan : il porte d’ailleurs, aujourd’hui, le nom de ruisseau de Pessan. Il existait un second lieu-dit Le Dron, aujourd’hui disparu, indiqué sur le plan cadastral de 1831, à 250 m au sud de la ferme d’aujourd’hui, porté aussi sur la carte d’état-major, sous le nom de Petit-Dron pour le distinguer du Grand-Dron. C’est entre les deux lieux-dits le Dron qu’a été implantée l’autoroute.
Cabanac correspond à une ferme située à 500 m au nord-est du Dron, sur la rive opposée du ruisseau du Dron, sur le rebord du plateau (102 m) ; Cabanac apparaît comme un lieu-dit (4-13) ainsi que sous la forme platea de Cabanac (4-14, 6-1), peut-être allusion au plateau qui s’étend vers l’est. Il est aussi question d’un chemin de Cabanac (4-13). Mais les terres de cinq Cabanac, Jean, Arnaud, Guillaume, Pierre Guillaume sont citées en confront de possessions des Mauros (2-1, 2, 3, 4 ; 4-8, 10, 13 14, 19, 21).
Le fait que les possessions des Cabanac soient parfois contiguës à celles des hommes du Dron, mais aussi à celles des Mauros autorise à situer à proximité le casal de Mauros (4). D’ailleurs, ce casal s’étend, d’un côté jusqu’au ruisseau du Dron (rivum del Dron), remonte par La Geteyre jusqu’à la terre d’Ausinhe, puis redescend par la terre de Marques. En plus du casal, les parçonniers Mauros tiennent seize parcelles de terre. L’une se trouve, on l’a vu, entre celle des hommes du Dron (homines del Dron) et celle de Cabanag ; une autre petite parcelle de 20 règes est entourée de tous côtés par les terres des hommes du Dron. Nous situons ce casal en bordure du Dron.
Les possessions des hommes francs de Cudos – casals et parcelles isolées – sont donc situées, pour l’essentiel, sur les deux rives du bassin du Dron, du Lug à Cabanac et dans celui du Martinet qui lui est contigu vers l’est.
On pourrait s’étonner qu’un aussi petit nombre de toponymes ait pu être identifié alors qu’on dénombre sept casals et trente noms de lieux-dits. Cela n’a rien d’exceptionnel et se vérifie pour des périodes beaucoup plus récentes. Rien n’est plus fugitif que le toponyme dont la mémoire n’est vraiment conservée qu’à partir du moment où elle est transcrite sur un plan ou une carte. On remarquera les diverses manières d’identifier une parcelle. Tantôt la pièce de terre porte un nom : Le Fius (2-1), La Compre (2-2), La Boirie, Al Piczat (2-4) tantôt le lieu-dit est indiqué : Al Noguer Domenga (2-1). Mais, le plus souvent, le déclarant indique seulement le lieu-dit : À la Sale (3-3), À la Coste (3-4), À Buscos (3-1), À Pradihei (4-2), À Lespiaub (4-3), À la Plasse (4-5), À Camalhou (4-8), À Cabanag (4-13), À Encal (4-22), À la Forcade de Claus (5-2), À Auriebad (6-2), 7-1) ; la terre de Viestube (2-5), une pièce de terre À Biesube (4-21), de la terre À Vielsilve (5-1), À Bieusebe (8-2) ou encore : la terre d’Auzinhe (4-1), d’Auzinhou (4-2), d’Auzinham (12), une pièce de terre dans le pré d’Auzinhou (4-4). Mais il y a parfois confusion entre le nom d’une pièce, Al Piczat (2-4) et un lieu-dit, Al Pizat (4-20). On notera, au passage, les différentes graphies d’un même lieu-dit : même si le scribe qui enregistra la déclaration d’Arnaud de Casa connaissait le gascon, il n’écrivait que ce qu’il croyait entendre et, par la suite, au gré des copies faite par des scribes qui ne comprenaient pas cette langue, les erreurs de lecture étaient courantes. La parcelle peut être aussi identifiée de plusieurs manières : nom des tenanciers eux-mêmes : terre des hommes de Casa (2-2, 3 ; 4-17, 10) de Mauros (2-3), du Dron (2-4, 4-10, 4-11) ou de tenanciers qui possèdent les parcelles contiguës, ou, plus rarement, celui des seigneurs.
À la recherche des structures foncières
Du point de vue de l’histoire de l’occupation du sol, les reconnaissances présentent un grand intérêt. Elles font en effet apparaître un paysage parfaitement structuré associant des casals et des pièces de terre autour de certains lieux-dits. Ce qui est remarquable c’est la présence, côte à côte, de ces deux structures foncières. Les casals correspondent aux strates les plus anciennes de l’occupation du sol, mais les plus récents comme celui de Lartigua, qui se trouve d’ailleurs entouré de landes (11), ne datent probablement que du XIIe siècle. Il s’agit d’ensembles probablement d’un seul tenant à l’origine, parfaitement circonscrits, comme l’illustrent les exemples des casals de Mauros (4) et de Sarciag (8), parfois contigus les uns aux autres comme ceux de Casa et de Langlade. L’expression “casal et ses dépendances” suggère qu’à proximité du noyau ancien du casal avaient été ajoutées plusieurs parcelles provenant de défrichements. Ces parcelles de terre regroupées en certains lieux-dits appelés parfois platea comme celles de Cabanag (4-14, 6-1) ou de Aurebat (4-17, 18, 19, 5-1) correspondent à une étape plus récente de la mise en valeur du sol. Elles peuvent être un des éléments d’un casal possédé parfois par une seule personne, comme c’est le cas pour Arnaud de Casa (7). Mais il peut aussi s’agir, on l’a vu, de biens propres de certains membres de communautés possédant un casal. Enfin, il n’est pas impossible que des formules comme “terre des hommes” se rapportent, dans le cas des hommes du Dron ou d’Arrios, à des communautés possédant non pas un casal d’un seul tenant, mais un casal que nous qualifierions de casal de seconde génération, constitué uniquement de parcelles plus ou moins dispersées. Nous avons rencontré ailleurs, à des époques plus récentes des structures de ce type.
Le nombre des confronts des “pièces” de terre, de deux à quatre, suggère un parcellaire de forme géométrique, mesuré en estiroûs (4-5, 2-2, 5-2) ou en règes 8 (2-2), 10 (4-13, 14), 20 (4-3, 11). La rège équivaut à un billon séparé de son voisin par un sillon, ce qui permet la culture éventuelle d’une céréale d’hiver (froment ou seigle) sur le billon et d’une céréale d’été comme le mil, cultivée dans la caule. Selon Simin Palay, l’estiroû était, dans l’est du Béarn et en Bigorre, le sillon sur lequel on se guidait pour labourer en ligne : on traçait un estiroû par cinq sillons. Il est difficile d’estimer les superficies mesurées en règes et estiroûs de cinq règes, car leur longueur n’est jamais précisée14.
Les pièces de terre sont, pour l’essentiel, destinées à la culture des céréales, mais la vigne est présente (3-3), parfois dans les dépendances d’un casal (8-2 Sarciag). Les arbres fruitiers restaient rares au point d’identifier un lieu-dit : le poirier de Bazed (Al Perei de Bazed), le sorbier de Cabanag (Al Sorbei de Cabanag) (4-12), un noyer (Al Noguer Domenge) (2-1) Il est aussi fait mention du pré d’Auzinhou, sans doute en bordure du Dron (4-4). S’il est question de landes et de terrains de parcours (padouen) (11), proches du casal de Lartiga, on doit souligner l’absence de bois dans les confronts. Ceux-ci ne devaient pas manquer dans les casals, mais occupaient les terres les plus “fortes”, résistant aux défricheurs beaucoup plus attirés par les zones de colluvions.
Les reconnaissances ne nous éclairent que sur la nature des parcelles qui se trouvent en dehors du cadre du casal. Elles apportent, tout d’abord, la preuve que le bassin du Martinet et du Dron était en cette fin du XIIIe siècle largement mis en valeur. Aujourd’hui, si le versant de rive gauche du Dron (Cabanac, Bourepan) est toujours découvert, tout le versant de rive droite encore largement cultivé sur la carte de Belleyme ou celle d’état major (fig. 2, 3) est aujourd’hui boisé. Il en est de même de la zone de confluence des ruisseaux du Dron et du Martinet : la ferme de Cocu de Bas est aujourd’hui réduite à une clairière. Ce reboisement date pour une large part, de la fin du XIXe siècle ou du XXe siècle. On ne peut que regretter à cet égard la disparition de l’état de sections du plan cadastral ancien de la commune de Cudos. Mais la carte de Belleyme, le plan cadastral de 1831, la carte du Conseil général reprenant celle d’état-major, nous éclairent au moins sur la densité de l’habitat. Par rapport à la ferme du Dron, on note la présence en 1831 de trois fermes : le Dron ou le Petit-Dron, à 250 m à l’ouest ; Cante-Coucut à 500 ouest-nord-ouest ; Coutréou, à 250 m au nord-ouest, ces deux dernières à la limite des communes de Cudos et Bernos. En fait, chacune de ces quatre fermes est située à 250 m de sa voisine et le parcellaire qui entoure celles de Cante-coucut et Coutreou atteste de la présence de petits champs de 45 m de côté.
Cet état est l’aboutissement d‘un processus de défrichement, largement réalisé à la fin du XIIIe siècle, probablement interrompu et peut-être en régression de 1348 à 1450, repris largement à l’époque moderne.
Tous ces casals, terres ou pièces, sont reliés par des chemins qui servent souvent de limites. Leur présence témoigne d’un paysage agricole “fini”, car le chemin ne permet pas seulement aux hommes et aux bêtes de circuler ; par sa stabilité il est un élément essentiel de la structuration du parcellaire qui s’appuie à lui. Ces chemins sont désignés par différents termes qui correspondent probablement à leur importance.
En premier lieu, les chemins publics : la via publica à Encal (4-22) et au casal de Casa (9), la via communis au casal del Lug (12) ; puis la simple via le chemin : ceux de la Gleyzera (2-1), de l’Église (3-2), probablement le même, de la Fontaine et de l’Église (3-4), le chemin vieux de Camalhou (4-9) un lieu-dit (4-8) proche de Cabanac, le chemin à La Forcade de Claus (5-2). Le terme de carreria, carreria de Cabanac (4-13), encore utilisé dans le gascon moderne, est équivalent de celui de via.
Aucun chemin n’apparaît sur la carte de Belleyme. Il convient donc de se reporter au tableau d’assemblage du plan cadastral de 1831 et aux feuilles concernant le secteur du Dron pour tenter de retrouver le tracé d’anciens chemins. Deux concernent le bassin du Dron (fig. 4).
Il s’agit, d’abord, du chemin appelé “de Grignols à Beaulac”. Venant de Beaulac, il se dirige vers Pitèque, traverse le ruisseau du Dron en contrebas de Cocu-de-Bas, franchit le Martinet et se dirige vers La Pla, passe au sud de Lagrave, traverse le ruisseau d’Arriol (aujourd’hui de la Grange), passe au nord d’Ariole, puis au sud de Branna. Il devient alors sur une certaine distance la route actuelle de Cudos à Artiguevieille (CD 932 E7), puis il recoupe la route de Bazas à Lerm (D 12). Il continuait vers l’est par Bouchoc, Fondeville, Lagrave, Minjoudic et arrivait à Marions pour rejoindre l’ancienne route de Bazas à Casteljaloux.
On peut suivre le second chemin reliant Beaulac à Cudos depuis le lieu de Luret dans Bernos, en bordure de la RN 524. Se dirigeant vers le nord-est, il passe entre la maison et la grange de Baquey, dans Bernos, sert ensuite de limite entre Bernos et Cudos. Profondément encaissé, encadré par de forts talus, il est encore parfaitement identifiable (fig. 6). Après avoir franchi le Dron, il se dirige vers le lieu-dit Piroye puis celui de Galhuc (aujourd’hui Benquet), à l’ouest du bourg de Cudos. Les casals et les terres que nous révèlent les reconnaissances des hommes francs de Cudos étaient encadrées à l’est et à l’ouest par ces deux chemins dont l’ancienneté ne saurait être mise en doute, car ils aboutissent à Beaulac, où se trouvait un hôpital qui commandait le passage du Ciron. De Beaulac, par la commanderie de Bessaut, on gagnait Mont-de-Marsan, puis Saint-Sever. Nous sommes là sur l’un des “chemins de Saint-Jacques”, c’est-à-dire d’un chemin utilisé aussi par les pèlerins allant à Saint-Jacques.
Conclusion
Les reconnaissances faites en 1274 par les hommes francs du roi sont d’un intérêt exceptionnel pour notre connaissance du Bazadais à la fin du XIIIe siècle. On ne saurait, cependant, se dissimuler les limites de l’information qu’elles nous offrent : elles ne concernent qu’une modeste partie de la paroisse de Cudos, le bassin moyen du Dron et du Martinet ; sur le plan seigneurial elles ne nous font connaître que les terres situées dans la mouvance directe du roi-duc ; des hommes francs du roi, nous savons qu’ils font leurs reconnaissances de manière personnelle et le plus souvent collective ; nous connaissons le montant de la redevance due au roi-duc et sa répartition à l’intérieur de ces groupes.
Nous ignorons, par contre, en quoi consistait le patrimoine de chacun de ces hommes francs. Tous devaient probablement posséder d’autres terres en dehors de celles tenues du roi-duc dans le cadre de la franchise. Il est vraisemblable que si les anciens grand casals avaient conservé leur identité sur le plan seigneurial, ils avaient donné naissance à plusieurs exploitations. Une partie était d’origine “casalère” et l’autre issue de défrichements à l’intérieur et au dehors de la terre de franchise. N’oublions pas enfin que les exploitations des hommes francs étaient étroitement imbriquées au sein de celles situées hors de la terre de franchise – nous pensons en particulier à celle des hommes du Dron.
En général, les reconnaissances énumèrent les différents éléments qui composent la tenure : maisons, dépendances, jardins, parcs à bestiaux, nature des parcelles ; or, tel n’est pas le cas de celles faites par les hommes francs de Cudos. Nous espérions donc que la fouille du site du Dron-Pitecq nous apporterait des informations sur l’habitat et le parcellaire au XIIIe siècle. Mais, si elle a révélé une occupation diffuse entre la Protohistoire et l’Antiquité et une activité agricole et artisanale au cours du haut Moyen Âge (IVe-VIIe siècles), toutes inédites, seules quatre structures bâties dont la finalité n’a pu être identifiée et des vestiges de parcellaire peuvent être datés des XIe-XIVe siècles.
L’impression qui ressort est celle d’une occupation ancienne, légère et discontinue du site. Cette fouille prouve aussi que les sites d’habitat se trouvent plus en hauteur sur les flancs du vallon (Cabanac). L’ancienneté de l’occupation nous ramène aux origines des casals et à celle des hommes francs, un double problème que seule une étude d’ensemble et approfondie des communautés franches serait susceptible d’éclairer.
Annexe. Pièce justificative : traduction de la reconnaissance n° 24815
Item, le même jour, Arnaud de Casa, procureur des hommes de la paroisse Saint Jean de Cudos (Cuscis), à savoir : Menaud de Sarciag (8), Bernard Marted (8), Jean de Casa (9), Garcie de Langlade, Guillaume de Rival (8), Vital de Lartigua (del Artigua) (11), Guillaume de Lartigua (11), Guillaume de Maures (2, 4), Rixend de Sarciag (8), Guillamon de Langlade (10), Agnès de Lapujade (12), Marquesie de Sarciag pour Marthe sa mère (8), Guillaume de Mauros (2), Arnaud Amanieu et Guillaume, fils (de son) frère (3), Vital de Casa (5), Raymond de Casa (6), Guillaume de Mauros (2), Jean de Mauros (4), Géraud de Mauros (2) et Raymond de Mauros (2, 4)16, comme procureur donné et constitué ainsi qu’il l’affirma et comme cela apparaissait par un instrument public qu’il présenta, reçu par Bernard de Rotura, tabellion, et souscrit par Guillaume Lana, juré, ainsi que cela apparaît être contenu dans le dit instrument, sous serment, reconnut spontanément et concéda que tous les susdits, dont lui-même est procureur, sont hommes francs (homines francales) du seigneur roi d’Angleterre et duc d’Aquitaine, et tiennent de lui en fief immédiat les terres et tènements ci-dessous énumérés. Pour cela ils doivent à lui-même ou à son représentant 30 sous bordelais, des 20 livres que tous les hommes francs du Bazadais doivent lui payer chaque année à la fête de Saint-Michel ou dans l’octave à l’exception du seigneur Guillamot de Langlade qui ne doit rien payer car il est “manda” de la paroisse.
Ces hommes doivent aussi au seigneur roi l’ost et une double procuration par an à son prévôt de Bazas, accompagné de ses sergents et ils doivent lui jurer fidélité et le roi de même.
(2) Guillaume de Mauros, Géraud de Mauros et R. de Mauros tiennent du seigneur roi en fief immédiat :
1. la terre appelée Le Sius17 qui se trouve au lieu appelé Al Noguer Domenga, entre la terre de Jean de Cabanac, d’une part, et (la terre) des hommes de Casa, de l’autre, et entre la terre d’Arnaud de Cabanac et le chemin (via) appelé La Gleyzera, de l’autre ; 2. (item)18 la terre de La Compre, qui se trouve entre ledit chemin, la terre de Jean de Cabanac, celle de Pierre Guillaume de Cabanac, et celle d’Arnaud de Cabanac ; 3. (item)19 la terre de La Boirie qui se trouve entre la terre de Casa, celle de W. de Cabanac et celle des hommes de Mauros ; 4. item, la terre appelée Al Piczat qui se trouve entre la terre de Pierre Guillaume de Cabanac et celle des hommes de Dron, et entre la terre d’Arnaud de Cabanac et le chemin (via) appelé À Viestube ; 5. item, la terre de Viestube, située entre la terre de l’hôpital de Baulade et celle des hommes d’Arriol et la terre de Pierre de Casa.
Et pour ces fiefs ils doivent payer, pour leur part des 30 s., deux sous par an au terme et aux personnes susdites, l’ost, leur part des procurations et le serment, comme il est dit ci-dessus. Et ils sont chasés (casati) sous le roi dans leurs fiefs susdits.
(3) Lesdits Arnaud Amanieu et Guillaume Amanieu, frères, tiennent de la même façon20.
1. une pièce de terre À Buscos, située entre la terre de Garcie de Larmal et de Jean (de Larmal) et la terre de Donat de Buscos ; 2. item, la terre qui se trouve entre la terre dudit Donat de Buscos, le chemin de l’église et la terre du sanctuaire de l’église ; 3. item, À La Sale, une pièce de terre située entre les vignes dudit Garcie et de Jean de Larcmal, et entre la terre de Pierre Arnaud Dupuy et celle d’Arnaud de Claus ; 4. item, À La Coste, une terre située entre le chemin de la Fontaine et de l’Eglise, la terre de Raimond de Sarcias et celle d’Arnaud de Claus.
Et pour ces fiefs ils doivent, pour leur part des 30 sous, payer 2 s. par an au terme et aux personnes susdits et lesdits devoirs d’ost, les procurations et serment.
(4) Encore dans la prévôté de Bazas. Guillaume, Gaillard, Jean et Raymond de Mauros susdits et Menaud de Mauros tiennent de la même façon :
1. le casal (casale) de Mauros qui s’étend jusqu’au ruisseau du Dron (quod durat usque ad rivum del Dron) et à la terre du Puy et remonte par La Geteyre jusqu’à la terre d’Auzinhe et descend par la terre de Marques ; 2. item, de la terre À Pradihei, entre la terre d’Auzinhou, qui flanque la terre d’Agnès de Lapujade ; 3. item, 20 règes de terre à Lespiaub ; 4. item, une pièce de terre dans le pré d’Auzinhou, qui touche la terre de Widot de La Taste ; 5. item, 3 estiroûns de terre À La Plasse ; 6. item, une pièce de terre Al Perei de Bazed ; 7. item, une autre pièce de terre À Camalhou, entre la terre de Jean de Casa et qui s’étend de la terre de Raymond Duprat jusqu’au ruisseau ; 8. item, 17 règes de terre au même endroit, À Camalhou, entre la terre de Pierre Guillaume de Cabenac et celle de Guillaume de Cabanag ; 9. item, une pièce de terre À Absioguerreu, située entre le chemin (via) vieux de Camalhou et la terre dudit Guillaume de Cabanag ; 10. item, une autre pièce de terre qui de tous les côtés confronte la terre des hommes du Dron (terram hominum del Dron) et la terre de Cabanag ; 11. item, 20 règes de terre et une autre pièce de terre entre la terre desdits hommes du Dron de tous les côtés et de R. del Dron ; 12. item, une pièce de terre Al Sorbei de Cabanag, entre la terre de Pierre Guillaume de Cabanag et la terre de Guillaume ; 13. item, 10 règes de terre À Cabanag, entre le chemin (carreria) de Cabanag et la terre d’Arnaud de Cabanag ; 14. item, in platea de Cabanag, 10 règes de terre, entre la terre dudit Pierre Guillaume et celle d’Arnaud de la Case ; 15. item, une autre pièce de terre au même endroit, entre la terre dudit Pierre Guillaume ; 16. item, au même endroit, une pièce de terre qui se trouve entre la terre de Pierre de Case et celle de Guillaume de Mauros ; 17. item, in platea de Aurebat, une pièce de terre entre la terre des hommes de Case ; 18. item, au même endroit, une pièce de terre, entre la terre d’Arnaud de Cabanac et la terre de Vital de Casa ; 19. item, au même endroit, une autre pièce de terre entre la terre dudit Arnaud et la terre des hommes de Case ; 20. item, Al Pizat, une pièce de terre entre la terre dudit Arnaud de Cabonag et la terre des hommes de Mauros ; 21. item, À Biesube, une autre pièce de terre entre la terre des hommes d’Arriol et celle de Pierre Guillaume de Cabenag et celle des hommes de Casa ; 22. item, à Encal, 10 règes de terre attenantes au chemin public.
Et pour ces fiefs lesdits feudataires doivent payer pour leur part desdits 30 sous, 4 sous par an audit terme et aux personnes susdites, à savoir ledit Guillaume 12 d., Menaud 12 d., Jean 12 d., Gaillard 6 d. et Raymond 6 d. Tous sont chasés dans lesdits fiefs, sauf Jean. Ils doivent aussi les devoirs susdits : ost, procurations et serment.
(5) Vital de Casa tient de la même façon :
1. trois estiroûs de terre À Vielsilve, entre la terre de Marcos et la terre de Jean de Casa et celle d’Arnaud de Casa ; 2. item, il tient À La Forcade de Claus, 17 règes de terre entre la terre de Pierre Guillaume de Cabanac et le chemin ; 3. item, 17 autres règes de terre entre la terre de Pierre Guillaume et de Jean de Casa.
Et il doit payer pour sa part desdits 30 sous, 6 deniers par an, audit terme et aux personnes susdites et les autres devoirs d’ost, procurations et serment.
(6) Raymond de Casa tient de la même façon :
1. dans la platea de Cabanag, 17 règes de terre entre la terre de Jean de Casa et de Vital de Casa ; 2. item, il tient À Auriebad, 15 règes de terre entre la terre dudit Arnaud, procureur et celle de Dujon de Casa.
et il doit pour cela, pour sa part desdits 30 s., payer 3 d. par an audit terme et aux personnes susdites et les autres devoirs d’ost, procurations et serment.
(7) Encore d’autres cens dans la prévôté de Bazas.
Arnaud de Casa tient de la même façon :
1. À Auriebad, 5 règes de terre entre les terres de Raymond et Vital de Casa et le ruisseau ; 2. item, il tient au-dessous de son casal trois estiroûs de terre et 8 règes ; cependant, la maison dans laquelle il habite ne se trouve pas dans les trois estiroûs ni dans les 8 règes.
Et il doit pour cela, pour sa part des dits 30 s., payer 3 d. par an audit terme et aux personne susdites et les autres devoirs d’ost, procurations et serment.
(8) Lesdits Bernard de Marted et Menaud de Sarciag avec leurs parçonniers, à savoir Guillaume de Sarciag, Marthe, Rixend et Garcia de Laveyr et Guillaume de la Rivel tiennent de la même façon :
1. le casal de Sarciag avec les terres cultivées et incultes qui en dépendent, qui se trouve entre le ruisseau de La Marthede, dont il est séparé par quelques terres, la terre d’Amanieu de Mosiac, damoiseau, celle des hommes d’Alerera et celle de Saint-Jean et de Raimond Marques ; 2. item, il tient À Bieuseube la terre qui est entre la terre de Pierre de Casa et celle des hommes d’Arrios et celle des hommes de Marcos ; cette terre fait partie des dépendances dudit casal, à l’exception de la vigne que le susdit Bernard de Marted tient d’un autre seigneur.
Et ils doivent pour ces biens, pour leur part desdits 30 s., payer chaque année 12 s. au terme et aux personnes susdites, à savoir : Bernard de Marted en son nom et en celui de son épouse 6 s., W. de Sarciag 12 d., Menaud 12 d., Marthe 12 d., Rixend 12 d., Garcias de Laveyr 12 d. et Guillaume de Larquad 12 d. Ils doivent aussi les autres devoirs d’ost, procurations et serment.
(9) Le même Arnaud de Casa et Jean de Casa tiennent de la même façon le casal de Casa avec ses dépendances, qui est situé entre le casal de Langlade (del Anglade) et le chemin public.
Et Il doit pour sa part des dits 30 s. payer pour cela chaque année 5 s. au dit terme et aux personne susdites, à savoir : Arnaud 2 s. 6 d. et Jean 2 s. 6 d. Ils doivent aussi les autres devoirs d’ost, procurations et serment.
(10) Guillaume de Langlade (del Anglade) tient de la même façon le casal de Langlade (del Anglade) qui est situé entre un autre casal de Langlade qui est tenu et se trouve dans la mouvance de Saint-Jean et le casal de Jean de Casa. Pour ce casal et les autres terres cultivées et incultes qui en dépendent, excepté celles qui dépendent d’autres seigneurs, il doit fournir pour les affaires du roi ou de son représentant un homme franc à Sauviac et un autre à Artiguevieille comme les autres francs de Cudos (Cuzos). Il doit l’ost à moins que le prévôt de Bazas ou son représentant ne le requière pour une autre mission. Il doit sa part des procurations et le serment de fidélité comme cela a été dit déjà pour les autres.
(11) Vital de Lartigue (de Artiga) et Guillaume son neveu (ou petit-fils) tiennent de la même façon le casal del Artigue avec les terres cultivées et incultes qui en dépendent qui se trouve entre le ruisseau de Artiga, le padouen, et le chemin commun dont il est séparé par une lande. Et ils doivent pour leur part desdits 30 s. payer pour cela chaque année 11 s. par moitié audit terme et aux personnes susdites ; ils doivent aussi les autres devoirs d’ost, de procurations et de serment.
(12) Agnès de La Pujade tient de la même façon le casal du Lug (deu Lug) qui se trouve entre la terre d’Auzinham et le chemin commun. Et elle doit pour sa part desdits 30 s. payer pour cela chaque année 2 s. audit terme et aux personnes susdites et les autres devoirs d’ost, de procurations et de serment.
(13) Vital de Larmal et Fort de Larmal, frères, ne tiennent rien du roi ; cependant, ils doivent payer chaque année audit terme et aux personnes susdites au titre du droit de protection (cabernio et amparativo) 2 s. monnaie bordelaise. Pour cela le roi doit les défendre de toute injure de sa part ou de ceux qui voudraient leur faire des injures, les molester ou leur porter tort. Ils n’ont pas d’autres devoirs.
(14) Encore des cens dans la prévôté de Bazas. Garcias de Larmal et Jean de Larmal, frères, ne tiennent rien du roi ; cependant, ils doivent payer chaque année 2 s., ainsi qu’il vient d’être dit.
Et le susdit Arnaud de Casa tant pour lui que pour les autres, au nom de sa procuration, reconnut que toutes les personnes susdites étaient franches (francales) dudit seigneur roi d’Angleterre et tenaient de lui les fiefs susdits moyennant les devoirs susdits qu’ils avaient coutume de faire et de payer à lui ou à son représentant ainsi qu’il est dit ci-dessus.
Notes
- Cudos, cne du canton de Bazas, arr. de Langon, Gironde.
- Ces reconnaissances se trouvent dans Recueil d’Actes relatifs à l’administration des rois d’Angleterre en Guyenne au XIIIe siècle (Recogniciones feodorum in Aquitania), transcrits et publiés par Charles Bémont, Paris, imprimerie nationale, 1914.
- Recogniciones, no 244 (Sauviac, Artiguevieille, Sauros), 246 (Bernos), 247 (Pompéjac, Taleyson, Escaudes, Bernos), 248 (Cudos) 249, 250 (Maillas), 251 (Bernos). Taleyson, Bernos, cne de Bernos-Beaulac ; Artiguevieille, cne de Cudos ; Sauros, cne de Birac ; Bernos-Beaulac, Cudos, Sauviac, Gajac, cant. de Bazas ; Pompéjac, cant. de Villandraut ; Escaudes, cant. de Captieux, Gironde ; Maillas cant. de Roquefort, Landes.
- J. B. Marquette, Hommes libres et hommes francs du roi en Bordelais et Bazadais au XIIIe siècle, in Sociétés et groupes sociaux en Aquitaine et en Angleterre. Actes du colloque franco-britannique tenu à Bordeaux du 27 au 30 septembre 1976, Bordeaux, 1979.
- Expression désignant le roi d’Angleterre, duc d’Aquitaine.
- Le “manda” est le représentant de la communauté paroissiale. Nous n’en connaissons pas d’autres pour cette paroisse.
- Des références du type (8-2) renvoient à l’article 8, deuxième élément de cet article, tel qu’il figure à la transcription intégrale de l’acte (cf. in fine, Annexe).
- Une livre (l.) = 20 sous (s.) = 240 deniers (d.).
- Cette incertitude réside dans l’ambivalence du terme latin nepos.
- Recogniciones…, (RF), n° 246 (16). Il doit 3 s. et 3 d. pour tout ce qu’il a, qu’il tient en fief immédiat du roi et ces 3 s., 3 d. font partie des 50 s. (que doivent les hommes francs de Bernos).
- RF,n° 244 (p. 77 col. 2).
- RF, n° 291.
- RF, n° 296.
- Simin Palay, Dictionnaire du Béarnais et du Gascon modernes, Pau t. I, 1932. L’abbé Vincent Foix, Dictionnaire-Gascon Français, édition Paule Bétérous, Bordeaux, 2003, signale dans la région d’Aire le verbe estiroûa = tracer des estiroûs. Félix Arnaudin et Bernard Vigneau n’ont pas recensé ce mot qui n’était plus utilisé en Bazadais au XXe siècle.
- Les numéros (0) indiqués à la suite des noms renvoient aux articles.
- Les hommes francs dont les noms suivent ne sont pas cités dans l’acte de procuration, mais apparaissent dans les reconnaissances : Gaillard de Mauros (4), Menaud de Mauros (4) ; Arnaud de Casa (7) ; Guillaume de Sarciag (8) Garcie de Veerr. (8) ; Arnaud de Casa (9) ; Vital de Larmal et Fort de Larmal (13) ; Garcias de Larmal et Jean de Larmal, frères (14).
- Selon nous, erreur de transcription. Il faut lire Fiu (Le fief)
- Erreur de transcription. Il faut lire “item” et non “entre”.
- Erreur de transcription. Il faut lire “item” et non “entre”.
- Au début de l’acte Guillaume Amanieu est dit “fils du frère” (filius fratris).


