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Pénélope face à la toile,
une femme d’action ?

Pénélope attendant le retour d’Ulysse durant vingt années, telle que la met en scène l’Odyssée d’Homère au VIIIe siècle av. J.-C.1, a longtemps été l’image emblématique de l’épouse passive et vertueuse, comme le rappelle la présentation du colloque. Les recherches de ces dernières années sur les femmes et le genre dans le monde grec antique ont toutefois permis de modifier cette représentation2. Le thème de l’absence est un bon fil directeur pour repérer, dans la vie quotidienne de cette femme dans l’île d’Ithaque, tous les indices qui marquent son statut, et toutes ses tentatives pour prendre en main sa vie et gérer sa maisonnée (oikos). Dans le monde aristocratique de la Grèce archaïque où le mariage – et dans ce cas le re-mariage – semble le seul destin possible pour une femme de bonne naissance, Pénélope louvoie comme les marins de son île, évite les écueils, fait preuve de métis (intelligence et ruse à la fois) face aux prétendants et réussit à maintenir une certaine indépendance. Je partirai du texte de l’Odyssée d’Homère et tenterai de montrer comment une figure moins conventionnelle de Pénélope se tisse aujourd’hui avec pour trame l’histoire des femmes et du genre et pour chaîne une nouvelle lecture de l’épopée3.

Ulysse est maintenant parti d’Ithaque depuis vingt ans : la guerre des Grecs contre les Troyens a duré dix ans, et depuis dix ans Ulysse est sur le chemin du retour et subit le courroux des dieux. Cette absence prolongée a des conséquences graves sur la maison d’Ulysse. Télémaque, le fils d’Ulysse, lors d’une assemblée sur l’agora d’Ithaque, prédit en l’absence de nouvelles de son père la ruine prochaine de sa maison, les prétendants « mangeant » ses biens, l’épopée nomme ainsi les hommes qui prétendent à un mariage avec Pénélope, la femme d’Ulysse et la mère de Télémaque.

« Contre son gré des prétendants s’acharnent sur ma mère ; encore qu’ils soient les propres fils des meilleurs de cette île, ils se garderaient bien de se rendre au palais d’Icare, [le père de Pénélope], qui pourrait, acceptant leurs cadeaux (hedna), la donner à qui lui plairait, selon son gré ! Mais non ! c’est dans notre maison qu’ils font ripaille4 ». Télémaque décrit ensuite la maison d’Ulysse désormais sans défense.

Au cœur de la crise suscitée par l’absence d’Ulysse, se pose donc la question du remariage de Pénélope. Pourquoi ce remariage est-il obligatoire ? Comment Pénélope agit-elle ?

Dans la société homérique, une femme ne peut vivre sans être soumise à une autorité masculine, celle d’un tuteur. Celui-ci est d’abord son père puis son mari, et en cas de mort du mari ou de répudiation, un second époux. La jeune fille ou la femme n’a aucune part dans le choix de l’époux. Le prétendant offre des hedna, des biens, sous forme de troupeaux, d’armes, de chaudrons de bronze, d’objets de prestige, au père de la jeune fille ou de la femme. Et le père donne en contre-don sa fille5. Celle-ci emporte avec elle l’équivalent d’un trousseau, essentiellement des tissus, vêtements, bijoux qui lui sont propres. Le système n’est pas celui de la dot (du père vers le gendre) mais du douaire (du gendre vers le père). L’épouse quitte alors l’oikos (la maisonnée) paternel pour aller vivre dans l’oikos du mari. Ce système est très précisément décrit dans le cas de Pénélope à plusieurs moments du récit.

Dès le chant II de l’Odyssée Télémaque et les prétendants s’accusent de contrevenir à la coutume. Nous avons vu les griefs de Télémaque, de leur côté les prétendants réclament le retour de Pénélope chez son père afin que le processus de la demande en mariage puisse commencer. Ainsi le prétendant Antinoos conseille à Télémaque : « Renvoie ta mère et ordonne lui d’épouser qui lui plaira et qui son père acceptera […] Nous n’irons en effet ni sur nos terres ni ailleurs avant qu’elle ait choisi le Grec qui lui plaira !6 ».

La situation est hors norme et le récit revient plusieurs fois sur cette question du nomos, de la règle et de la coutume à respecter. Quelle est alors l’attitude de Pénélope ? Elle va d’abord essayer d’échapper au moment du choix de l’époux en mettant en place le stratagème du tissage d’une toile. Puis elle va feindre d’accepter le mariage et d’entrer dans le jeu du don et contre don qu’il implique. Enfin elle va inventer un moyen de choisir elle-même son époux en instaurant le concours du tir à l’arc. L’étude attentive de ces trois actions permet de décrire sous un nouveau jour le personnage de Pénélope.

Tisser et détisser une toile

L’Odyssée livre trois fois le récit du tissage et du dé-tissage de la toile par Pénélope. Ces trois versions se ressemblent avec de légères variantes. Le contexte de leur énonciation est toutefois important.

Le premier contexte est celui d’une assemblée sur l’agora (la place publique) d’Ithaque convoquée par Télémaque au chant II de l’Odyssée. À la fin de son discours, Télémaque jette son sceptre à terre et éclate en sanglots. Un prétendant lui répond et dévoile pour la première fois dans l’épopée l’histoire du tissage de la toile.

« Antinoos prit la parole pour répondre : Ah ! prince fanfaron, âme emportée, que dis-tu là pour nous couvrir de honte et nous attirer des reproches ? Ne t’en prends pas aux prétendants des Achéens mais à ta seule mère, qui montre un peu trop d’astuce (kerdea) ! Voilà déjà trois ans et bientôt cela fera quatre, qu’elle dupe le cœur des Achéens dans leur poitrine ! Elle enflamme chacun, elle promet à tous, elle envoie des messages, ayant tout autre chose en tête. Sache le dernier tour qu’elle nous a joué : elle avait fait dresser un vaste métier dans la salle (megaron), y tissait un voile ample et fin, et nous disait : « Mes jeunes prétendants, certes, je sais qu’Ulysse est mort ; patientez toutefois pour les noces jusqu’à ce que j’aie achevé ce voile, que le fil n’en soit perdu : c’est un linceul pour le héros Laërte afin qu’à l’heure funeste où la cruelle mort viendra l’abattre, il n’y ait nulle femme entre toutes les Achéennes qui me reproche d’avoir laissé nu un mort si riche ! » Ainsi nous parlait-elle et notre âme fière acceptait. C’est ainsi que ses jours passaient à tisser l’ample toile et ses nuits à défaire cet ouvrage sous les torches. Ainsi trois ans durant elle dupa (dolos) les Achéens ; mais lorsque vint la quatrième année, et le printemps, une femme qui savait tout nous renseigna, et nous la prîmes défaisant le brillant voile. Alors il fallut bien finir, mais par contrainte7. »

Le deuxième contexte au chant XIX de l’Odyssée est très différent : dans la grande salle du palais, Ulysse, sous les traits d’un mendiant, et Pénélope dialoguent. Tous deux sont assis devant la cheminée sur des sièges confortables de bois recouverts d’une toison. Pénélope explique à Ulysse la ruse qu’elle a ourdi : « Mais le regret de mon époux fait se fondre mon cœur. [Les prétendants] pressent le mariage (gamos) et moi j’ourdis des ruses (doloi)8. » La description de l’action est alors très proche de celle du chant II mais c’est Pénélope qui raconte sa ruse et non plus un prétendant. Le récit est donc à la première personne : « Je fis dresser un vaste métier… et je leur dis à tous… ».

Le troisième contexte est au chant XXIV la conduite aux Enfers par le dieu Hermès des âmes des prétendants qui ont été massacrés par Ulysse. Là Amphimédon, un des prétendants morts, explique leur histoire. Et il revient sur la ruse de Pénélope. Le récit est très proche de celui que fit Antinoos, mais il se situe à un stade ultérieur, la ruse est reliée au retour d’Ulysse et elle est nettement mise en relation avec la mort voulue des prétendants : « Ulysse absent depuis longtemps, nous briguions son épouse. Elle sans refuser l’odieux mariage ou en finir, méditant d’envoyer sur nous le génie de la mort, entre autres ruses avait inventé celle-ci9 ».

Si le poète ou l’aède répète trois fois cet épisode c’est qu’il a une importance cruciale dans le déroulement de l’histoire. Les trois points de vue permettent d’ailleurs de l’éclairer différemment. Tisser une toile renvoie d’abord au travail des femmes de cette haute époque archaïque (nous sommes au VIIIe siècle av. J.-C. quand l’Odyssée est composée), tâche qui reste la leur sur la longue durée de l’antiquité grecque. Une jeune fille (parthénos) fabrique sur le métier les tissus qu’elle drapera sur son corps le jour des noces, chiton, péplos et voile. Pénélope choisit de tisser non pas un tel vêtement mais une toile qui recouvrira le cadavre de Laërte son beau-père qui est certes âgé, mais pas du tout mourant. C’est une première anomalie. Tisser des habits de noces, signifierait que Pénélope accepte le statut de jeune femme à marier, ce qu’elle refuse.

Les prétendants doivent attendre pour commencer leur compétition, pour obtenir d’épouser Pénélope, que le tissu soit terminé. Et c’est là qu’intervient la ruse de Pénélope : elle va repousser le plus possible la fin de l’ouvrage et ce faisant allonger, augmenter le temps qui la sépare d’un nouveau mariage. Les prétendants acceptent une demande qui peut sembler légitime, mais Pénélope change de registre et passe du temps usuel pris pour un travail domestique au temps qu’elle espère suspendre jusqu’au retour d’Ulysse, le seul qu’elle reconnaisse comme son époux. Pénélope est à la fois une habile tisseuse, ce qui est commun aux femmes de l’épopée, et celle qui sait subvertir le tissage10. Elle détisse la nuit ce qu’elle a tissé le jour. Et le dé-tissage est le symbole de son refus d’un nouveau mariage.

Plusieurs chercheuses ont vu également dans cet acte du dé-tissage le reflet d’une pratique intellectuelle : le tissage est à la fois réel et métaphorique11. Le tissage est en effet chez les Grecs une métaphore de la pensée, de l’intelligence, que l’on attribue normalement aux hommes12. Ici le texte de l’Odyssée dit que Pénélope a tissé sa ruse, ou tramé sa ruse, telle est la traduction habituelle du vers 137 du chant XIX : ego de dolous tolupeuo13. Cette ruse est au départ même de la fabrication de la toile. Comme le rappelle Nicole Loraux, « dans ce tissage qui ne cesse de s’annuler, s’est pour Pénélope réfugié tout le sens de la vie et sans fin elle tisse/détisse pour qu’il ne puisse être question de mariage14 ». L’activité de tisseuse de Pénélope n’est pas à mettre au compte de l’attitude d’une bonne épouse. En tissant sa toile et en la détissant, Pénélope se crée un espace de liberté où elle peut conserver la mémoire d’Ulysse, et dans lequel elle tente d’arrêter le temps. La ruse offre trois ans de répit à Pénélope nous dit le texte15. Et c’est une trahison de femme qui va faire échouer la ruse, trahison d’une servante (selon les prétendants) ou des servantes (selon Pénélope). Une servante proche de Pénélope la dénonce, les prétendants la surprennent sur le fait en train de détisser la toile, et ils l’accablent de reproches. Il lui faut terminer l’ouvrage sous la contrainte16.

La ruse révèle l’intelligence, souvent mentionnée dans l’épopée, de Pénélope. La ruse est une qualité de l’esprit extrêmement prisée chez Homère, elle porte le nom de métis, soit l’intelligence rusée17. L’épopée l’attribue à de nombreux héros, au premier rang desquels Ulysse qui est dit polumétis, à des divinités comme Athéna et à des créatures divines comme Circé et Calypso, les nymphes qui retiennent Ulysse auprès d’elles. La métis permet de faire face à l’imprévu, de se sortir de situations délicates, de vaincre des adversaires plus puissants. Il est intéressant de constater qu’une mortelle puisse en être pourvue.

L’intelligence (noemata) de Pénélope a en fait plusieurs facettes. C’est à la fois la noblesse des pensées (phroneousa thumon) et cette astuce (kerdea : sages desseins, ruses) « dont on ne pourra trouver l’égale chez aucune des femmes aux belles boucles de jadis, ni Tyro, ni Alcmène, ni Mycènes18. » Pénélope est désignée par un qualificatif particulier : periphrôn ou ekhephrôn : « celle qui a du sens », et même « la plus sensée ». Periphrôn est souvent traduit par « sage ». Mais cette sagesse n’est pas la sophrosuné qui dénote la tempérance. Cette sagesse est la qualité que la Grèce reconnaît aux Sept Sages !

La ruse de la toile étant découverte, Pénélope est obligée d’agir en raison de plusieurs contraintes à la fois familiales et économiques, ses parents la pressent de se remarier, Télémaque est devenu adulte et il doit jouir de l’oikos paternel, les prétendants dévorent les biens d’Ulysse19. Elle fait face à un dilemme qu’elle définit de façon claire et rationnelle : « ainsi mon cœur hésite, divisé entre deux pensées. Resterai-je auprès de mon fils pour tout sauvegarder, mon avoir, mes servantes, ma grande et haute demeure, respectant le lit de l’époux et l’opinion du peuple ? Ou suivrai-je déjà l’un de ces Achéens qui me recherchent, le plus noble et le plus généreux ?20 ». Pénélope va agir conformément à la demande que lui a faite Ulysse à son départ : « Je ne sais si un dieu me ramènera ou si je mourrai devant Troie. Toi, prend bien soin de tout. Souviens-toi de mon père et de ma mère en ce palais comme aujourd’hui et davantage encore en mon absence. Enfin quand tu verras la barbe pousser à ton fils, quitte notre maison puis épouse qui tu voudras. Ainsi me parla-t-il et voilà que tout s’accomplit21 ». Ce n’est pas un choix personnel – Pénélope ne cesse de dire que ce mariage lui déplaît : « la nuit est proche où se consommeront d’odieuses noces pour moi, pour la maudite dessaisie de son bonheur22 » – mais un choix qui permet à Télémaque de prendre possession de l’oikos paternel et au-delà d’avoir un statut dans la société aristocratique. L’action de Pénélope a des conséquences politiques, en acceptant de se remarier, elle abandonne le pouvoir que lui conférait la gestion de la maison d’Ulysse, elle laisse l’oikos d’Ulysse à Télémaque.

Subvertir les règles du mariage

Au chant XVIII de l’Odyssée, dans le palais d’Ulysse, le soir, Athéna suggère à Pénélope de se montrer aux prétendants, pour stimuler leur désir et pour se rendre plus précieuse aux yeux de son mari et de son fils. Pénélope d’abord refuse de se laver et de se parer. Mais Athéna l’endort et pendant son sommeil elle « l’orne de tous les dons les plus admirables du ciel23 ». Pénélope descend alors dans la salle de banquet avec deux servantes et reste sur le seuil. Elle s’adresse à Télémaque et le réprimande pour avoir laissé traiter honteusement un hôte : elle a entendu dire qu’un mendiant (qui est en fait Ulysse) avait été maltraité par les prétendants. Télémaque tente de se trouver des excuses. Eurymaque, un prétendant, célèbre la beauté de Pénélope. Pénélope déclare alors que sa beauté ne lui sert à rien depuis que son époux est parti et qu’elle souhaite son retour. Puis elle rappelle qu’Ulysse lui a demandé de se remarier quand Télémaque aurait atteint l’âge adulte. Et elle se plaint de la situation actuelle : les prétendants dilapident les biens du palais. Elle précise : « les prétendants avaient autrefois d’autres façons. Ceux qui veulent briguer une femme de bien, la fille d’un homme riche, et rivalisent pour l’avoir, doivent eux-mêmes amener les bœufs, les brebis grasses pour traiter ses parents et lui offrir des dons (dora) splendides. Mais ils ne mangent pas impunément le bien d’autrui !24 ». Ulysse qui assiste à la scène sous les traits d’un vagabond se réjouit de cette demande.

Antinoos, l’un des prétendants, acquiesce et les Achéens envoient tous des hérauts pour chercher dans leurs demeures des cadeaux (dora) pour Pénélope. Ce ne sont pas les bœufs et les brebis destinés aux parents, mais des bijoux et des tissus de prix : voile, collier, pendants d’oreille, carcan… « Chacun des Achéens apportait une autre merveille25 ». Pénélope remonte alors dans sa chambre et ses servantes emportent les cadeaux.

Cette scène rappelle l’existence de deux types de dons dans le mariage homérique : les hedna destinés aux parents de la fille et les dora destinés à la jeune femme26. Le contre don est bien sûr la future épouse. Or dans cette scène les prétendants n’apportent que les dora et il n’est plus question des hedna. Comment comprendre cette entorse à la coutume ? L’injonction d’Antinoos : « Accepte donc les dons que tous les Achéens voudront faire apporter ici : il n’est pas bien de toujours refuser27 », rappelle la force contraignante du don. Pénélope en acceptant ces cadeaux s’engagerait à se marier. Mais les dora sont ensuite le bien propre de l’épouse, ces cadeaux la suivent dans sa nouvelle maisonnée et lui restent attachés. Ils vont s’ajouter aux cadeaux que lui fait son père quand elle quitte la maison paternelle. Le texte en mettant l’accent sur les cadeaux faits à la jeune femme, donne l’impression que ce n’est plus le père de Pénélope, Icare, qui va décider du choix du futur époux, mais Pénélope elle-même, qui reçoit là le prix de sa propre valeur. On peut se demander si un glissement ne s’est pas opéré de la valeur de la fille d’Icare à la valeur de Pénélope en personne, comme le propos du prétendant Eurymaque le laisse entendre : « Fille d’Icare, ô sage Pénélope, si tous les Achéens de l’Argos d’Iasos te voyaient, des prétendants bien plus nombreux dans vos demeures mangeraient dès l’aurore : tu surpasses toute femme pour la beauté, la taille et l’harmonie de tes pensées28 ». Tout ceci sous les yeux d’Ulysse/mendiant qui se réjouit.

L’hypothèse d’une subversion des règles du mariage homérique marquée par l’oubli des hedna au profit des dora est bien dans la logique du récit de l’épopée, puisque l’étape suivante montre Pénélope décidant de la manière dont se fera le choix de son époux en imposant le concours à l’arc.

Choisir son époux

Faire subir une épreuve à des prétendants et choisir le gagnant comme époux est un thème classique dans les histoires racontées par les Grecs. Ici le choix de l’épreuve a été précédé d’un rêve : Pénélope a vu un aigle fondre sur vingt oies et leur briser la nuque. Puis l’aigle lui a expliqué qu’il était son époux revenu pour faire subir aux prétendants un sort infâme. Pénélope refuse de croire au songe bien qu’Ulysse, sous les traits du mendiant, l’invite à le faire. Et elle invente cette épreuve : « je vais proposer une épreuve, celle des haches que ce héros naguère en son palais alignait, douze en tout comme des étais de carène. Et, debout, assez loin, il les traversait de sa flèche ! Voilà l’épreuve que j’imposerai aux prétendants : celui qui le plus aisément tendra l’arc et d’un seul trait traversera les douze haches, j’accepte de le suivre et de quitter cette maison de ma jeunesse, cette belle maison pleine de biens, dont je pense me souvenir toujours jusque dans mes songes29 ».

Le vainqueur du concours instauré par Pénélope deviendra son époux. Le mendiant lui conseille de ne pas reporter le concours car Ulysse, prédit-il, arrivera avant que l’arc ne soit tendu. C’est donc Pénélope qui fournit les moyens et l’occasion de massacrer les prétendants30. Elle est l’inventrice du plan de vengeance, elle le met en place, Ulysse en étant l’exécutant. C’est bien l’intelligence rusée, la métis de Pénélope qui se révèle dans la décision d’organiser le concours : soit le concours révélera l’identité de son mari, soit plus vraisemblablement personne ne pourra bander l’arc et Pénélope ne sera tenue d’épouser aucun des concurrents. Le choix de l’épreuve de l’arc est le point d’aboutissement du cheminement qui a conduit Pénélope du statut de femme subissant un sort qui semblait se jouer en dehors d’elle à celui d’une femme d’action, dans les limites bien sûr permises par l’imaginaire de la société grecque archaïque. Pénélope n’est pas cet être d’intuitions qui agirait de façon velléitaire et ne maîtriserait pas ses actes comme bien des études la présentent.

Comme l’ont montré les études récentes de l’Odyssée il y a peut-être plus. Le fait que Pénélope joue un rôle actif est fondamental pour la poétique même de l’Odyssée, comme Ulysse est un conteur hors pair, Pénélope est une tisserande hors pair. Or l’image du tissage convient bien pour décrire le travail du poète épique. Pénélope tisse une tromperie sous la forme du linceul de Laërte et fabrique des « pelotes de ruses ». Pénélope et Ulysse sont des figures du poète œuvrant en coulisses.

L’action de Pénélope ne se limite pas à la sphère du mariage31. En l’absence d’Ulysse, Pénélope exerce dans l’épopée la fonction de souverain de substitution : elle condamne les prétendants, les empêche de se quereller, conserve et renouvelle les richesses de la maison, accueille les visiteurs et les interroge, use de l’hospitalité, elle accomplit les rituels dus aux dieux, bref elle connaît tous les codes et toutes les manières d’agir de la société homérique. Il serait trop long de le voir en détail. Je vais m’arrêter sur un dernier trait qui caractérise l’action de Pénélope : son souci de mémoire, une valeur qui est au cœur des sociétés archaïques.

Le souci de mémoire

Au début de l’Odyssée le peuple d’Ithaque ne croit plus au retour d’Ulysse. Les prétendants et Télémaque tiennent Ulysse pour mort. Toute l’épopée tourne autour des deux thèmes de l’absence et de la présence. L’absence devient réelle quand la mémoire fléchit. Et le rôle de Pénélope est de maintenir vivante la mémoire d’Ulysse. L’épisode de l’aède royal, Phémios, le montre clairement. Au chant I de l’Odyssée, lors d’un festin des prétendants à Ithaque, Phémios chante :

Pour eux chantait le très glorieux aède et tous l’écoutaient en silence. Il chantait le retour (nostos) des Grecs, le retour d’Ilion que Pallas Athéné avait endeuillé. Ce chant sacré, du haut de son étage l’entendit l’enfant d’Icare, la très sage (periphrôn) Pénélope ; la reine descendit le grand degré de sa demeure, non point seule, car deux suivantes l’escortaient. Et quand la noble (kednè : sage, digne d’égards) femme fut devant les prétendants, elle resta debout dans l’entrée de la forte salle en ramenant ses voiles brillants (lipara kredemna : sorte de mantille ou bandelette, brillante ou splendide) sur ses joues. Ses fidèles suivantes se tenaient à côté d’elle. Alors, entre ses pleurs elle dit au divin aède : « Parmi les thèmes dont l’aède enchante les mortels, Phémios, tu sais d’autres exploits des hommes ou des dieux : chante leur-en un, cependant qu’ils boivent leur vin en silence ; et interromps donc ce triste chant qui chaque fois m’use le cœur dans la poitrine, car une intolérable peine (alaston penthos) m’a frappée. Je pleure une si noble tête, et ne puis oublier le héros (aner) dont le renom (kléos) emplit l’Hellade et l’Argolide32.

Phémios veut chanter l’histoire du retour des héros de la guerre de Troie. Or dans ce chant l’aède raconte un retour douloureux des héros, voire une mort sans gloire en raison de la malédiction d’Athéna qui les frappe. C’est ce qu’attendent les prétendants et Télémaque aussi, or accepter le chant de Phémios c’est accepter la mort possible du roi, du père, d’Ulysse. Un tel chant est impensable pour Pénélope. Pour elle le destin d’Ulysse n’est pas accompli, et la mémoire d’Ulysse s’associe au kléos, au renom, non à la mort sans gloire.

Ithaque est une société qui est en train de perdre la mémoire et le plus grand danger pour Ulysse est l’oubli dans sa propre maison. Pénélope s’obstine à faire vivre la mémoire d’Ulysse. C’est de plus cette mémoire qui rend son absence supportable aux yeux de Pénélope. L’action mémorielle de Pénélope est le pivot du poème, c’est elle qui va permettre à Ulysse de retrouver sa place33.

Mais la mémoire joue aussi un rôle à l’intérieur du couple que forme Ulysse et Pénélope, comme en témoigne le fameux épisode du lit qui est la mise à l’épreuve d’Ulysse par Pénélope34. Au chant XXIII, Euryclée, la nourrice d’Ulysse, vient chercher Pénélope dans sa chambre, elle lui dit qu’Ulysse est de retour et qu’il a massacré les prétendants. Pénélope refuse de la croire. Mais finalement elle accepte de descendre pour voir : « mon fils, les prétendants tués et celui qui les a tués35 ». Pénélope soumet alors Ulysse qui a retrouvé son allure de roi à une ultime épreuve. Elle demande aux servantes de dresser le lit d’Ulysse dans une pièce voisine, or ce lit ne peut être mobile36. Ulysse est en plein désarroi : le lit qu’il a fabriqué ne peut être déplacé, car il l’a bâti autour d’un tronc d’olivier. Pour le déplacer il faudrait couper les racines de l’arbre. Il en décrit en détail la fabrication et alors Pénélope est convaincue qu’il s’agit bien de son époux.

Pénélope d’une certaine manière use de ruse envers Ulysse comme elle l’a fait vis-à-vis des prétendants en détissant sa toile. Mais il y a plus. Elle a rappelé auparavant qu’Ulysse et elle se reconnaîtraient à des signes cachés : « si vraiment c’est Ulysse rentré chez lui, nous nous reconnaîtrons l’un l’autre sans difficulté, car il est entre nous certains signes cachés que nous sommes seuls à connaître37 ». Le lit est un de ces signes, il est un souvenir commun, un pan de mémoire privée, qui permet de renouer le fil de la vie commune. C’est au sens propre un sumbolon. Pénélope est celle qui préserve la mémoire publique, celle qui va rendre à Ulysse son statut de roi, et elle est aussi la détentrice de la mémoire privée, celle qui va redonner à Ulysse sa place d’époux. Recueillir et transmettre la mémoire est une valeur suprême dans l’épopée, elle explique que Pénélope soit aussi digne de kléos, de renom, à l’égal d’un héros épique.

Le kléos, le renom, de Pénélope

Au chant XXIV le dieu Hermès conduit aux Enfers les âmes des prétendants. Elles retrouvent les âmes des héros morts à Troie pendant la guerre et depuis. Dans ce contexte l’âme d’Agamemnon fait l’éloge de Pénélope et lui attribue le kléos, le renom, la gloire.

Heureux fils de Laërte, industrieux Ulysse, tu acquis avec ton épouse une grande valeur (arété) ! Quelle belle intelligence (agathai phrenes) avait la parfaite (amumon) Pénélope, fille d’Icare ! Comme elle se souvint d’Ulysse époux de sa jeunesse ! Ainsi le renom (kléos) de sa valeur (arété) ne s’éteindra jamais, et les dieux souffleront aux hommes de gracieux (charis) chants pour Pénélope, une femme sensée ! (echephrôn)38.

Suivant la traduction adoptée, ces quelques vers ont un sens différent. Victor Bérard attribuait quant à lui la valeur (arété) à Ulysse et non à Pénélope39. Que le kléos (le renom) soit associé à une figure féminine dans l’épopée homérique peut paraître déconcertant40. Le kléos ne s’attache pas dans l’Odyssée à la belle mort héroïque comme dans l’Iliade. Mais il est indissociable de cette œuvre de mémoire qui pétrit toute l’élaboration du chant épique, qui est la raison d’être de l’épopée. C’est avoir préservé la mémoire, le non oubli, qui qualifie le personnage de Pénélope à être digne du kléos et donc à être chanté dans les siècles futurs41.

L’épopée attribuée à Homère est composée pour une société où les mondes masculins et féminins sont bien distincts dans leur fonction et leur rôle. Mais tout en recourant à un langage qui sépare de façon rigide les hommes et les femmes, l’Odyssée bien souvent remet en cause cette séparation. C’est le cas pour le couple Ulysse/Pénélope. La mètis n’est pas dépendante du sexe. L’excellence, la valeur (arété) que l’on soit homme/mari ou femme/épouse est de même nature, le kléos, le renom, peut être attribué à une femme. Or le kléos, le renom, est le but ultime de la société homérique, le poète et l’épopée en sont les passeurs.

Conclusion

Pénélope face à l’absence ne donne pas l’image d’une épouse fragile et passive qui serait un personnage secondaire de l’épopée. Elle a lutté pendant vingt ans. Pour sauvegarder le royaume, dans l’attente d’Ulysse et secondairement pour le transmettre à Télémaque. Pour ne pas revenir dans la famille de son père Icare et être donnée en mariage contre des hedna splendides au fils d’une grande famille. Pour choisir son époux. Et surtout pour lutter contre l’oubli qui défait les sociétés et pour conserver la mémoire d’Ulysse à la fois comme roi d’Ithaque, comme propriétaire d’un oikos et comme époux. Ce faisant Pénélope a peut-être aussi décidé de son destin, mais l’épopée ne lui donne pas la parole sur ce point. Le poème se contente de lui promettre le renom (kléos) de sa valeur (arété) parmi les hommes futurs, ce sont les termes mêmes employés pour dire la gloire des héros du monde homérique, Achille et Ulysse en particulier.


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  • Katz M. A., Penelope’s Renown, Meaning and Indeterminacy in the Odyssey, Princeton, Princeton University Press, 1991.
  • Leduc C., « Comment la donner en mariage ? », dans Duby G. et Perrot M., Histoire des femmes en Occident, t. 1, sous la direction de Schmitt Pantel P., Paris, Plon, 1991, p. 260-316.
  • Loraux N., « Pénélope-analyse », préface, dans Papadopoulou-Belmehdi I., Le Chant de Pénélope, Paris, Belin, 1994.
  • Nagy G., La Poésie en acte. Homère et autres chants, traduction de l’anglais par Jean Bouffartigue, Paris, Belin, 2000.
  • Papadopoulou-Belmehdi I., Le Chant de Pénélope, Paris, Belin, 1994.
  • Saïd S., Homer and the Odyssey, Oxford, 2011.
  • Scheid J. et Svenbro J., Le Métier de Zeus. Mythe du tissage et du tissu dans le monde gréco-romain, Paris, La Découverte, 1994.
  • Scheid-Tissinier E., Les Usages du don chez Homère, Nancy, Presses universitaires de Nancy, 1994.
  • Scheid-Tissinier E., « Eurykléia, une vie, un nom », Pallas, 99/2015, p. 21-30.
  • Scheid-Tissinier E., Les Origines de la cité grecque, Paris, A. Colin, 2017.
  • Schmitt Pantel P., Aithra et Pandora, Femmes, Genre et Cité dans la Grèce antique, L’Harmattan, Paris, 2009.
  • Sebillotte Cuchet V., Artémise. Une femme capitaine de vaisseaux dans l’Antiquité grecque, Fayard, Paris, 2022.
  • Vernant J.-P., « Au miroir de Pénélope », dans Frontisi-Ducroux F. et Vernant J.-P., Dans l’œil du miroir, Paris, Odile Jacob, 1997, p. 251-285.
  • Wagner-Hasel B., Der Stoff der Gaben, Francfort, Campus, 2000.
  • Winkler J.-J., « Les mille ruses de Pénélope (et celles d’Homère) », dans Désir et Contraintes en Grèce ancienne, Paris, Epel, 2005, p. 241-304, Traduction de The Constraints of Desire, The Anthropology of Sex and Gender in Ancient Greece, New York, Routledge, 1990.

Notes

  1. L’Odyssée est l’un des deux poèmes attribués à Homère. Son thème est le retour d’Ulysse depuis Troie où il a participé à la guerre (voir L’Iliade) jusqu’à son île d’Ithaque. Si on s’accorde aujourd’hui à reconnaître que la poésie homérique est le fruit d’une longue tradition orale, le moment où les poèmes ont été mis par écrit fait toujours l’objet de débats. Voir Nagy G., La Poésie en acte. Homère et autres chants, traduction de l’anglais par Jean Bouffartigue, Paris, Belin, 2000.
  2. Saïd S., Homer and the Odyssey, Oxford, 2011. Au chapitre 9 : « Women in the Odyssey », S. Saïd fait un rappel des publications sur ce thème et en particulier sur Pénélope p. 276-314. Beate Wagner-H., « Penelopes Wohnzimmer. Polemische Anmerkungen zu Mary Beards, Frauen und Macht », Historische Anthropologie, 26, 2018, p. 414-421. Pour une mise au point sur l’histoire des femmes, le genre, l’histoire mixte pour l’antiquité grecque voir Sebillotte Cuchet V., Artémise, Fayard, Paris, 2022.
  3. Winkler J.-J., « Les mille ruses de Pénélope (et celles d’Homère) », dans Désir et Contraintes en Grèce ancienne, Paris, Epel, 2005, p. 241-304, a indiqué la voie. Traduction de The Constraints of Desire, The Anthropology of Sex and Gender in Ancient Greece, New York, Routledge, 1990.
  4. Odyssée, II, vers 50 sq. Sauf indication contraire la traduction est celle de P. Jaccottet dans : Homère, L’Odyssée, Paris, F. Maspero, 1982.
  5. Leduc C., « Comment la donner en mariage ? », dans G. Duby et M. Perrot, Histoire des femmes en Occident, t. 1, sous la direction de Schmitt Pantel P., Paris, Plon, 1991, p. 260-316. Scheid-Tissinier E., Les Usages du don chez Homère, Nancy, 1994 et Scheid-Tissinier E., Les Origines de la cité grecque, Paris, A. Colin, 2017.
  6. Odyssée, II, vers 113-114 et vers 127-128.
  7. Odyssée, II, vers 84-110.
  8. Odyssée, XIX, vers 136-137.
  9. Odyssée, XXIV, vers 125-128.
  10. Frontisi-Ducroux F., Ouvrages de dames. Ariane, Hélène, Pénélope…, Paris, Seuil, 2009.
  11. Katz M. A., Penelope’s Renown, Meaning and Indeterminacy in the Odyssey, Princeton, Princeton University Press, 1991 ; Papadopoulou-Belmehdi I., Le Chant de Pénélope, Paris, Belin, 1994 ; Doherty L., Siren Songs: Gender, Audience and Narrators in the Odyssey, Ann Arbor, 1995.
  12. Scheid J. et Svenbro J., Le Métier de Zeus. Mythe du tissage et du tissu dans le monde gréco-romain, Paris, La Découverte, 1994.
  13. Odyssée, XIX, 137. Traduit par Bérard V. en : « Moi, j’entasse les ruses » dans Homère, Odyssée, Les Belles Lettres, Collection des Universités de France, et par Jaccottet P. : « Et moi j’ourdis des ruses ». Selon F. Frontisi-Ducroux, op. cit., p. 90, Pénélope a en fait « enroulé » sa ruse. Le terme grec est tolupeuein action qui désigne le fait d’enrouler : à un stade précédant le tissage et même le filage, on enroule les touffes de laine en gros cordons autour de la quenouille.
  14. Loraux N., « Pénélope-analyse », préface au livre de I. Papadopoulou-Belmehdi, op. cit, p. 12.
  15. Odyssée, II, vers 106 et XXIV, vers 141 : « Ainsi trois ans durant elle dupa (dolos) les Achéens » ; Odyssée, XIX, vers 151 : « ainsi trois ans durant je sus duper les Achéens ».
  16. Odyssée, II, vers 110 et XXIV, vers 146.
  17. Voir Detienne M. et Vernant J.-P., Les Ruses de l’intelligence, la métis chez les Grecs, Paris, Flammarion, 1974.
  18. Odyssée, II, vers 118-120.
  19. Odyssée, XIX, vers 157-161 : « Maintenant je ne puis ni fuir ces noces, ni trouver une autre ruse. Instamment mes parents me pressent de me marier, mon fils s’irrite à voir ses biens mangés, il se rend compte, c’est déjà un homme fort capable de prendre soin de sa maison, si Zeus lui donne chance ».
  20. Odyssée, XIX, vers 524-529.
  21. Odyssée, XVIII, vers 265-271.
  22. Odyssée, XVIII, vers 272-273.
  23. Odyssée, XVIII, vers 191.
  24. Odyssée, XVIII, vers 275-280.
  25. Odyssée, XVIII, vers 301.
  26. Scheid-Tissinier E., Les Usages du don chez Homère, Nancy, Presses universitaires de Nancy, 1994 et Wagner-Hasel B., Der Stoff der Gaben, Francfort, Campus, 2000.
  27. Odyssée, XVIII, vers 86-87.
  28. Odyssée, XVIII, vers 245-249.
  29. Odyssée, XIX, vers 572-581.
  30. Winkler J.-J., op. cit., p. 241-304.
  31. Foley H., « Penelope as Moral Agent », dans B. Cohen (dir.), The Distaff Side, New York, Oxford University Press, 1995.
  32. Odyssée, I, vers 325-344.
  33. Je suis ici l’hypothèse de Papadopoulou-Belmehdi I., op. cit., Paris, Belin, 1994.
  34. Odyssée, XXIII, vers 181 : « Ainsi elle s’exprima pour mettre son mari à l’épreuve ».
  35. Odyssée, XXIII, vers 83-84.
  36. Odyssée, XXIII, vers 174-185 : « Malheureux ce n’est point indifférence ni hauteur, ni dépit de ma part : je sais ce que tu fus quand tu quittas Ithaque sur la barque aux longues rames. Mais allons Euryclée ! Dresse le lit solide qu’il avait fait lui-même, hors de la forte chambre ! Quand vous l’aurez porté dehors, garnissez-le de toisons, de manteaux, et de draps chatoyants ». Elle parlait ainsi pour l’éprouver. Ulysse alors, en gémissant, dit à sa fidèle compagne : « Femme, ce mot que tu as dit m’a meurtri l’âme. Qui donc a déplacé mon lit ? ».
  37. Odyssée, XXIII, vers 107-110.
  38. Odyssée, XXIV, vers 191-199, traduction Jaccottet P. modifiée.
  39. Ibid., traduction de Bérard V. : « Heureux fils de Laërte, Ulysse aux mille ruses. C’est ta grande valeur qui te rendit ta femme ; mais quelle honnêteté parfaite dans l’esprit de la fille d’Icare, en cette Pénélope qui jamais n’oublia l’époux de sa jeunesse ! son renom de vertu ne périra jamais et les dieux dicteront à la terre de beaux chants pour vanter la sage Pénélope ! ».
  40. Toutefois deux femmes dans l’Odyssée portent des noms en rapport avec le kléos : Eurykléia la nourrice d’Ulysse, et Antikléia la mère d’Ulysse, voir Scheid-Tissinier E., « Eurykléia, une vie, un nom », Pallas, 99/2015, p. 21-30. Sur le kléos des femmes, voir l’ensemble du dossier « Laisser son nom : femmes et actes de mémoire dans les sociétés anciennes », Pallas, 99/2015, p. 9-131.
  41. Vernant J.-P., « Au miroir de Pénélope », dans Frontisi-Ducroux F. et Vernant J.-P., Dans l’œil du miroir, Paris, Odile Jacob, 1997, p. 251-285 : c’est au miroir des yeux de Pénélope qu’Ulysse reconquiert son identité héroïque et retrouve sa place d’époux, de père et de roi. La figure de Pénélope a au cours des siècles suscité des interprétations multiples liées au contexte historique et plus particulièrement au regard porté sur le statut des femmes. Relire l’Odyssée aujourd’hui n’échappe pas à cette contingence.
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Pessac
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EAN html : 9782858926374
ISBN html : 978-2-85892-637-4
ISBN pdf : 978-2-85892-638-1
ISSN : 2741-1818
Posté le 23/11/2022
10 p.
Code CLIL : 3377; 3111
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Comment citer

Schmitt Pantel, Pauline, « Pénélope face à la toile, une femme d’action ? », in : Charpentier, Emmanuelle, Grenier, Benoît, dir., Le temps suspendu. Une histoire des femmes mariées par-delà les silences et l’absence, Pessac, MSHA, collection PrimaLun@ 12, 2022, 31-40 [en ligne] https://una-editions.fr/penelope-face-a-la-toile/ [consulté le 23/11/2022].
10.46608/primaluna12.9782858926374.2
Illustration de couverture • Détail de Het uitzeilen van een aantal Oost-Indiëvaarders, huile sur toile, Hendrick Cornelis Vroom, 1600, Rijksmuseum (wikipedia).
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