Après la chute de Carthage en 146 a.C. la langue punique1 continua d’être employée en Afrique du Nord tant par la population d’origine phénicienne (depuis longtemps bien mixte) que par les nouveaux états ou groupes tribaux de langue libyque. L’écriture qui prévaut à partir de cette époque pour exprimer cette langue est un développement cursif de l’alphabet phénicien qu’on appelle néopunique. La phase de la langue qui y est représentée est un punique très évolué du point de vue tant phonologique que morphologique. On appelle cette phase de la langue : punique tardif ou néopunique, ce dernier terme étant né à l’origine pour définir un type d’écriture2.
Avec l’établissement du pouvoir de Rome, le latin se superpose et se substitue au punique ; les inscriptions en latin deviennent de plus en plus nombreuses, mais le punique subsiste surtout dans des textes funéraires ou votifs3 et dès la fin du Ier siècle a.C. des inscriptions bilingues commémorant des travaux d’architecture et des actes d’évergétisme apparaissent, surtout en Tripolitaine. Quelques inscriptions trilingues grecques, latines et puniques sont connues aussi. Les études du phénomène du bilinguisme ou trilinguisme an Afrique du Nord sont assez nombreuses4. Toutefois, la nouveauté des derniers travaux dans ce domaine réside dans la comparaison des textes dans le but de dresser un tableau de la société locale et de ses changements et d’essayer de définir les raisons de l’usage d’une langue déterminée ou de plusieurs langues, ce qui documente l’identité ou les identités de ceux qui écrivent, pendant les premiers siècles de la conquête romaine. Tout cela dans le cadre d’une évaluation historique plus nuancée qui ne se réduit pas aux concepts d’échanges bidirectionnels entre cultures, et aux processus appelés romanisation et hellénisation5.
Les inscriptions bilingues et trilingues en Afrique du Nord, en particulier en Tripolitaine, ont été examinées avant tout pour mettre en évidence les rapports entre punique et latin – et aussi grec –, par A. Wilson, qui a dressé des tableaux de diffusion, en plus d’une étude comparée de chaque texte (Wilson 2012). Dans l’analyse des bilingues et trilingues en punique, latin et parfois grec de cette étude, le propos est centré sur le formulaire, l’onomastique et le lexique, avant d’aborder les raisons de la persistance du punique à côté du latin et, enfin sa disparition en tant que langue écrite. L’analyse de Wilson montre comment dans l’espace chronologique d’un peu moins d’un siècle les textes puniques ont été de plus en plus influencés par le latin, dont ils empruntent les formulaires, adoptent certains termes et, dans quelques cas, le système onomastique. D’autre part, F. Briquel Chatonnet a montré comment ces inscriptions publiques édilitaires perpétuent, sous des formes et dans un milieu historique bien différents, une tradition ancienne attestée en Phénicie par les inscriptions commémorant les entreprises royales6.
Tandis que la langue écrite en caractères puniques semble disparaître en Afrique entre la fin du Ier et le début du IIe siècle p.C., elle subsiste dans l’usage parlé jusqu’au Ve siècle au moins, comme l’atteste notamment saint Augustin, qui lui attribue un statut important, en raison surtout de ses ressemblances avec la langue de la Bible. Dans cette période tardive elle est parfois écrite en caractères latins : ce sont les inscriptions latino-puniques, venant de l’intérieur de la Tripolitaine7.
Les exemples les plus intéressants de bilinguisme ou trilinguisme viennent de la région de Lepcis Magna, qui fut une fondation phénicienne, d’après les auteurs anciens et quelques témoignages archéologiques, mais dont l’essor économique et monumental débute au IIe siècle a.C.8. C’est à partir de cette période que l’on assiste aussi à une éclosion extraordinaire de l’épigraphie en langue punique, qui n’a pas de parallèles en dehors de la Tripolitaine, tant du point de vue de l’écriture employée que de la régularité morphologique et orthographique de la langue dans la plupart des inscriptions. En outre, si d’autres établissements d’Afrique du Nord (surtout Mactar) présentent un nombre plus élevé d’inscriptions tardives (néopuniques), ce n’est que Lepcis qui a livré une typologie de textes honorifiques ou commémorant des constructions, textes qui renvoient à des modèles épigraphiques surtout grecs et latins, n’existant pas ailleurs – jusqu’à présent – dans l’Afrique d’époque romaine9. L’exemple le plus ancien de texte punique de Lepcis (IPT 31 = KAI 119)10 emploie encore une écriture de type punique et remonte à la fin du IIe siècle a.C. environ. Il s’agit d’un texte difficile et encore mal compris, qui est en même temps une dédicace aux dieux “patrons de Lepcis”, Shadrapa et Milk‘ashtart (plus tard identifiés à Liber Pater et Hercule), mais aussi un texte honorifique pour un certain Addirbaal, daté d’après l’année de deux suffètes au noms puniques de Arish et Bodmilqart ; le texte nomme aussi les “grands et le peuple de Lepcis”, qui dans des inscriptions bilingues successives correspondent au latin “ordo et populus”.
Tout d’abord, nous avons un document d’un type différent par rapport à ce que nous connaissons de l’épigraphie phénicienne et punique : dans le cadre d’un formulaire traditionnel (dédicace aux dieux et formule de bénédiction finale), le contenu est en partie nouveau et on peut le comparer à des genres épigraphiques qui se diffusent à la période dite hellénistique dans toute la Méditerranée, comme l’a montré J. Prag11. La formule de datation, qui spécifie que les suffètes sont à Lepcis, ainsi que la mention des assemblées lepcitaines, montrent, en particulier, un souci d’indépendance et d’orgueil local à une période où la ville était politiquement sujette aux rois de Maurétanie. On constate donc, au sein de coutumes communes aux divers états méditerranéens, le soin d’indiquer l’appartenance à une identité spécifique bien enracinée, qui semble fondée certainement sur la langue et sur l’écriture, mais encore et en particulier sur le lieu d’origine, comme le montre également une petite inscription funéraire de Sabratha (IPT 7), elle-aussi encore punique, où l’on tient à montrer l’ascendance tyrienne de la famille du défunt12.
Dans les dernières années du Ier siècle a.C., à l’époque d’Auguste, en même temps que le latin se diffuse, apparaissent les premières inscriptions bilingues qui commémorent l’érection de bâtiments publics grâce aux contributions financières de personnages locaux. Le texte le plus ancien – incomplet à la fin – se réfère à la construction du marché de la part d’un personnage qui s’appelle Hannobal fils de Himilkat Tapapius Rufus, en l’an 8-9 a.C. sur la base de la formule de datation comprenant les charges d’Auguste (IPT 21 = KAI 120)13. Ce qui est à noter ici c’est la correspondance exacte entre le texte latin (IRT 319) et le texte punique14. Le texte en latin, qui est le principal, est gravé sur 31 blocs du mur sud-ouest du marché, tandis que le texte en punique est gravé sur deux blocs constituant la frise d’un des deux édifices circulaires à l’intérieur du marché. Ainsi, comme le remarque J. Crawley Quinn15, le latin était en vue à l’entrée du marché, mais ceux qui circulaient à l’intérieur avaient plus longtemps sous les yeux le texte punique. Celui-ci suit le schéma latin, qui est donc son modèle ; la datation d’après le proconsul semble manquer, mais (suivant le recueil IRT) elle pouvait se trouver dans la lacune du texte (nous n’en connaissons pas la longueur totale). L’intérêt de cette inscription, au-delà des nouvelles conventions orthographiques en punique et tout à fait normales en Tripolitaine, réside à la fois dans la manière suivant laquelle le formulaire et les fonctions romaines ont été transposés en punique et dans le système onomastique adopté par le personnage local qui a conçu le texte.
Ce même personnage, Hannobal, fils de Himilkat, Rufus qui s’est chargé de la construction du marché, s’est également occupé de celle du théâtre, en 1-2 p.C. (IPT 24a-b ; IRT 321-322)16. Il a rappelé son rôle dans plusieurs textes : deux inscriptions bilingues sont gravées sur les linteaux de deux entrées qui mènent de l’orchestre aux corridors ouest et est. Le texte latin est gravé au-dessus du punique et contient la datation à travers les charges de l’empereur Auguste. Le même texte, seulement en latin (IRT 323), est gravé sur un bloc identique aux deux autres, mais découvert en remploi17. Dans ces inscriptions le donateur a reçu deux titres qu’il n’avait pas en 8 a.C. puisqu’elles ne sont pas présentes dans les inscriptions du marché et dont l’origine est discutée ; il s’agit, en latin, de “ornator patriae” et de “amator concordiae”, qui seront analysés ci-dessous.
Quelques observations concernent maintenant les charges et magistratures romaines citées dans les deux inscriptions, qui, comme l’a bien indiqué Levi Della Vida dans un article malheureusement difficile à consulter18, sont soit identifiées avec des charges locales perçues comme équivalentes, soit traduites en punique par des expressions nouvelles. Au contraire, le nom de la magistrature d’origine phénicienne de suffète a été reproduit tel quel en latin. Évidemment, le terme sufes était déjà bien connu dans le monde romain, de plus cette charge était dépourvue d’une équivalence dans l’administration romaine. Au contraire, pour les locaux qui écrivaient en phénicien, le problème, aux premiers temps de l’administration romaine, a été certainement de rendre compréhensible aux compatriotes les fonctions étrangères, mais aussi d’employer le plus possible dans la version d’un texte “autre” un vocabulaire soulignant le rang de la langue locale.
Les “traductions puniques” des charges impériales ont été analysées plus d’une fois19. Imperator, était nouveau et sans équivalent punique ; ainsi, il est rendu par un mot libyque MYNKD qui devait désigner un chef avec une autorité exceptionnelle. Le mot, connu en touareg, se trouve dans des inscriptions libyques sous la forme MNKDH ; nous ne savons ni si l’équivalence imperator = MYNKD était régulière en Afrique, ni si MYNKD était déjà employé dans le punique pour désigner une charge de l’administration locale (un chef avec une autorité temporaire ?), car ce mot n’est attesté que dans la présente inscription. A Bitia, en Sardaigne (KAI 170) le terme latin imperator est simplement transcrit en punique, ’MPR‘ṬR, à l’époque de Marc Aurèle, qui a régné entre 161 et 180.
Le consul était connu essentiellement pour ses fonctions militaires, car il est appelé RB MḤNT “chef de l’armée”, dans une inscription de 14 p.C., écrite seulement en punique, venant de Ras el-Haddagia (IPT 76,2) ; le proconsul, Lucius Aelius Lamia, est appelé “le chef qui est au-dessous/à la place du chef de l’armée”, RB TḤT RB MḤNT20. La charge de pontifex maximus est rendue par l’expression ’DR KHNM, non pas le “chef des prêtres” qui serait le RB KHNM, une fonction bien connue en punique, mais littéralement le “grand des prêtres”, suivant une expression qui n’était pas attestée auparavant (Levi Della Vida21 remarque que le mot ’DR pour indiquer le chef d’une fonction est employé dans le cas de l’adaptation en punique de charges étrangères, comme à Gozo, KAI 62 = CIS I, 132, où la fonction qui est généralement interprétée comme équivalente du censor est celle de ’DR ‘RKT “le grand, c’est-à-dire le chef, des dépenses”) et ici ’DR ‘ZRM. = “praefectus sacrorum”, une expression attestée seulement à Lepcis. La tribunicia potestas, inconnue dans l’administration punique, est traduite par l’expression qui signifie “au-dessous de l’autorité des dix ayant autorité” (TḤT MŠLT ‘ŠR HMŠLM). La charge de MŠL, dont la racine veut dire “avoir un pouvoir, gouverner”, était vraisemblablement une charge punique, mais l’expression dans son ensemble est une adaptation à une réalité nouvelle22.
Plus tard, au contraire, les noms des fonctions sont transcrits et nous trouvons celle de aedilis quattuorvir dans l’inscription IPT 30 (KAI 125), écrit en lettres puniques ‘YDLS QW‘ṬRBR ; le deuxième terme écrit quattorbir dans le texte en latin, a été adapté, d’après l’opinion commune, suivant une prononciation latine vulgaire ; cependant, il faut remarquer que le bet devait avoir en punique à cette époque une prononciation spirante, ce qui rend cette interprétation incertaine23.
En ce qui concerne l’onomastique, tous les individus mentionnés ont des noms phéniciens ; mais le donateur a en plus un cognomen latin Rufus – une habitude onomastique qui apparaît en Tripolitaine pour la première fois24 – écrit avec la terminaison du nominatif, comme cela arrive aussi dans les textes postérieurs (IPT 24a, b) du théâtre, dus au même personnage25. Cet Hannobal se qualifie suivant la coutume phénicienne en nommant son père, Hannobal, fils de Himilkat, mais il a en plus (lui ou son père) le nom de Tapapius et, en outre, le cognomen Rufus. Dans le texte latin du théâtre, comme le remarque déjà A. Wilson26, il est appelé Annobal Rufus Himilchonis Tapapi filius , tandis que dans IPT 21 il est Annobal Himilcho (corrigé pour Imilchonis) filius Tapapius Rufus : comme tous les noms sont au nominatif, on peut attribuer Tapapius dans IPT 21 également à Himilkat . La famille Tabahpi est bien connue à Lepcis Magna27 : par exemple dans un texte néopunique, IPT 2328, est nommé un Yatonbal fils de Arish Tabahpi Sabine (YTNB‘L BN ’RŠ ṬBḤPY S‘BYN’ ; date incertaine, vers 60 p.C.)29, suivant le même schéma onomastique de IPT 21 et ce nom de famille est généralement considéré comme d’origine locale. Nous avons donc ici trois niveaux de manifestation d’identité : romaine, punique et locale, ces deux dernières semblant se placer sur le même plan. Et ces trois niveaux persistent dans le courant du Ier siècle p.C., avec la prédominance de l’un ou de l’autre suivant les endroits et les époques, pour des motifs qui ne sont pas toujours clairs. On remarque aussi qu’en peu d’années on passe de la transcription des noms latins au nominatif, à leur adaptation en punique avec la terminaison en alef (c’est-à-dire probablement –e) dans le cas des noms en –us, et en –yod ou –yod-alef pour les noms en –ius. Cette dernière adaptation est attestée pour la première fois dans notre documentation dans IPT 22 (temple de Rome et Auguste)30, entre 14 et 29 p.C., sur la base des données du texte, où le nom de l’empereur en charge, Tiberius, est écrit ṬBRY, tandis que les noms des membres de sa famille, ainsi que le terme Augustus (Tiberius Augustus = ṬBRY ‘WGSṬS) gardent la terminaison du nominatif et dérivent peut-être d’un modèle écrit.
L’orthographe en -’ et en -Y(’)31 des noms latins, comme je l’ai déjà remarqué32, correspond aux règles orthographiques suivies pour indiquer les pronoms suffixes de la troisième personne du singulier après une terminaison en voyelle –a, ou après une terminaison en –i ou en voyelle longue : cela montre que, quel que soit le cas du nom latin adapté, il a été inséré dans le système orthographique du punique. Il en va de même pour les noms communs : le latin podium est écrit en caractères néopuniques p’dy ; le latin denarius ou denarii est écrit dn‘ry’ ; ces exemples sont des cas où les noms empruntés ne sont certainement pas au vocatif; ce n’est donc qu’une supposition fondée sur les orthographes latines en –e de noms propres en –us dans les inscriptions latino-puniques ou latines venant de régions de culture punique. C’est une orthographe qui a fait conclure que l’adaptation en punique des noms propres latins s’est faite d’après ce cas.
En 53-54 p.C., c’est encore un membre de l’élite locale qui s’occupe de la restauration du forum, qu’il commémore dans deux inscriptions bilingues gravées sur deux stèles (IPT 26 = KAI 124 ; IRT 338)33. Le texte le plus important est en latin, inscrit à l’origine en lettres de bronze, tandis que le punique est simplement gravé au-dessous. Comme dans les inscriptions antérieures, le texte punique ne mentionne pas la date d’après l’empereur et les fonctionnaires romains, comme cela est exprimé dans le texte latin ; il emploie un formulaire emprunté au latin, mais en partie indépendant, avec, encore une fois, le souci de rendre en punique des expressions et institutions romaines : il s’agit en particulier de l’institution de l’adoption34. Enfin, encore en 92 p.C., alors que Lepcis avait obtenu le droit de cité, un Tiberius Claudius Sestius de la tribu Quirina, donc un personnage local devenu romain, portant les mêmes noms que son père, fait graver en latin et en punique, sur trois faces d’un autel octogonal l’inscription qui commémore ses travaux dans l’aire du théâtre et l’honneur reçu de revêtir le latus clavus (IPT 27 = KAI 126; IRT 318 et 347)35. Ici le formulaire est calqué sur le latin, mais le mot technique latus clavus est traduit en punique par un terme qui doit signifier “vêtement” (ṢP’T).
Certains titres honorifiques du personnage ne sont pas latins, mais n’ont jusqu’à présent aucun parallèle en phénicien, quoique déjà en partie employés pour Hannobal Rufus. Il est intéressant de les reprendre. Hannobal Rufus revêt certaines fonctions, mais en plus il a les titres de MYŠQL ’RṢ et de MḤB D‘T HTMT (IPT 24 = IRT 322), en latin “ornator patriae” et “amator concordiae”. Dans IPT 27 = IRT 318 (fragmentaire) et 347, Tiberius Claudius Sestius est MḤB ’RṢ, “amator patriae”, MḤB BN’ ‘M, en latin “amator civium”, MYŠQL ’RṢ, “ornator patriae”, MŠLK BN’ ‘M, sans équivalent en latin, probablement “celui qui sauve les citoyens” ; enfin MḤB D‘T HTMT, “amator concordiae”. Sauf dans le cas discuté de “amator concordiae”, les titres sont équivalents dans les deux langues : il s’agit de calques. Cela pose le problème d’un côté de la signification de MḤB D‘T HTMT, qui est interprété généralement comme “celui qui aime la connaissance complète/parfaite” ou “la connaissance de la perfection” par rapport à “amator concordiae” et, de l’autre, de l’origine de ces titres, que les commentateurs des textes latins attribuent en général au punique.
En ce qui concerne MḤB D‘T HTMT, tandis que MḤB est un participe actif de la forme yifil de ’ḤB, “aimer” et ne pose pas de problème, D‘T serait un substantif féminin rattaché à YD‘ “connaître” “savoir”, une étymologie qui rend difficile la correspondance de ce mot avec “concordia”. C’est pourquoi, A. Ambros et M. Jursa ont proposé que D‘T, dérive d’une racine diffèrente, *wd‘, bien attestée en arabe, dont les dérivés ont plusieurs significations, à partir de “to be at rest, in peace”, jusqu’ à “to make peace, to bring about a reconciliation”36. Les considérations de Ambros et Jursa paraissent convaincantes et donneraient une explication satisfaisante à la signification de “concordia” du substantif D‘T. Ainsi, toutes les expressions puniques et latines auraient une correspondance précise. Seule l’appellation de MŠLK BN’ ‘M, elle aussi inconnue ailleurs en punique, n’a pas de parallèle latin, peut-être seulement par oubli. Elle pourrait correspondre en effet à une expression latine du type “servator civium”, qui, à ma connaissance, n’est cependant pas attestée37.
Toutefois, ces expressions ne sont connues ni en phénicien, ni en punique, si ce n’est dans les exemples cités ici. De rares exemples d’inscriptions latines de Tripolitaine contiennent les titres d’ “amator patriae”, “amator civium” et “ornator /ornatrix patriae”38. L’origine de ces appellations honorifiques, sans doute passées du milieu phénicien au latin, me semble pourtant à chercher ailleurs, dans l’est hellénistique de langue grecque. Quelques comparaisons peuvent déjà être trouvées dans les appellations des Ptolémées. L’épiclèse de Ptolémée II, Philadelphe, est rendue à Idalion en phénicien par PLDLP (KAI 40,2), dans une formule de datation sur la base de la Canéphore d’Arsinoé39. Plus tard, l’inscription phénicienne dite de Ma‘soub (KAI 18) est datée de l’an 27 de Ptolémée Évergète, dont l’appellatif est rendu en phénicien par l’expression P‘L N‘M, “celui qui fait du bien”. Il semble donc que dans l’orient de la période hellénistique des titres honorifiques réservés d’abord en particulier aux successeurs d’Alexandre aient été adoptés par des souverains locaux, ainsi que par de grands personnages. Nous en avons quelques exemples dans le cas des rois nabatéens, qui s’expriment en araméen, mais dont la familiarité avec le monde de langue grecque est attesté par un certain nombre d’inscriptions bilingues40. En premier, le roi Arétas III se fait appeler en grec Philhellène sur les monnaies qu’il fait battre à Damas (environ 84-72 a.C.) ; des souverains successifs ont des titres araméens qui semblent pouvoir être mis en rapport tant avec les appellations des Ptolémées, qu’avec les titres des membres de l’élite de Lepcis. Arétas IV (9-8 a.C.-40-41 p.C.) prend le titre de “celui qui aime son peuple” (RḤM ‘M’) ; Rabbel II (70-106 p.C.), le denier roi de Nabatène, a le titre de “celui qui a fait vivre et sauvé son peuple” (DY ’ḤYY WŠYZB ‘MH). Le roi qui “fait vivre son peuple” est un concept bien connu qui se trouve dans les inscriptions phéniciennes déjà depuis la fin du VIIIe siècle a.C. (Karatepe, KAI 26)41 : il semble donc que ce genre de titres se soit affirmé en grec à une époque tardive (hellénistique), mais dérive d’idéologies répandues au Proche-Orient. Ainsi l’emploi de ces titres à Lepcis renvoie à cette culture hellénistique sur laquelle s’est en quelque sorte greffée la culture romaine.
À côté du punique et du latin, le grec est parfois employé ; généralement il l’est par des personnages ayant une profession spécifique, en l’occurrence les médecins, comme l’a bien montré Adams. Deux inscriptions funéraires subsistent, malheureusement très endommagées (IPT 12 et 13 ; IRT 655 = CIL VIII, 16 et p. 2289, IGRR I, 938 ; IRT 654 = CIL VIII, 15, IGRR I, 937). La deuxième est l’épitaphe du médecin Klōdios ; la première celui de sa mère, au nom bien phénicien de Berekit (en grec Byrichth). C’est peut-être un personnage d’origine étrangère ou mixte, qui tient, en employant une langue comme le grec, liée à la science médicale, à montrer son prestige et son autorité.
Au contraire, nous ne savons pas pour quelle raison un bâtiment de culte a été dédié en latin, punique et grec (IPT16 ; IRT 481 ; SEG IX, 802)42. Ce qui reste du texte punique n’est pas compréhensible. Encore une fois on trouve la transcription de Augustus et l’expression “divi filius” rendue par BN ’LM, fils du dieu.
On peut conclure rapidement que la situation épigraphique de Lepcis au Ier siècle p.C. montre une diffusion du latin très importante, accompagnée, dans les monuments les plus importants, d’un bon nombre de textes bilingues, qui adoptent de plus en plus dans un laps de temps bref les formulaires et l’onomastique latines. Le grec persiste comme langue de prestige, employé dans des circonstances spécifiques, par des professionnels, en particulier des médecins. Mais le punique, en dehors des bilingues, est employé fréquemment en particulier dans des textes quotidiens, comme les inscriptions sur urnes funéraires, certainement pendant plus d’un siècle ; il apparaît tant comme une langue de culture, avec des traditions bien établies et des écoles qui, sur la base du latin (et peut-être auparavant du grec), créent un système orthographique nouveau et régulier, et adaptent les formules et les termes latins à leur propre système linguistique et institutionnel, tant comme la langue, voire l’écriture, quotidienne de la population locale, quelle que soit son appartenance ethnique. En effet, les fermiers et agriculteurs de l’intérieur, dont l’onomastique est entièrement libyque, emploient pour leurs inscriptions funéraires (par ex. IPT 77-79) la langue et l’écriture d’origine phénicienne et manifestent éventuellement leur identité “ethnique” en citant leur tribu d’appartenance.
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Notes
- Par “punique” on entend la langue unitaire (du moins d’après les documents écrits) qui prévaut dans l’Occident phénicien à la suite de l’affirmation politique de Carthage en Méditerranée centrale et occidentale, v. Amadasi Guzzo 2014 (et bibliographie).
- Sur la langue néopunique ou punique tardif v. Sznycer 1999, Amadasi Guzzo 1999. Sur la terminologie, Sznycer 1978.
- Sur la diffusion des textes en latin v. Zucca 1996.
- Par ex. Amadasi Guzzo 1987, Sznycer 1996 et 2002-2003.
- En particulier Adams 2003, Wilson 2012, Rovai 2015. Sur le concept de croisement de cultures en Afrique du Nord, en particulier de romanisation, les discussions ont été nombreuses, surtout après le travail de Benabou 1976 ; v. en particulier, Crawley Quinn 2003, en général Mattingly 2011 ; dernièrement les ouvrages d’ensemble de Lassère 2015, Mugnai-Nikolaus-Ray, éd. 2016. Sur la Tripolitaine en particulier, Mattingly 1995.
- Briquel Chatonnet 2018, 127-129.
- Kerr 2010. Sur la période tardive de l’emploi du punique et sur les questions identitaires qui se posent surtout en Afrique du Nord après la troisième guerre punique, v. Campus 2012.
- V. la belle synthèse de Di Vita-Évrard 2005.
- Sur la “culture” de Lepcis à l’époque romaine v. par ex. Crawley-Quinn 2010. Il faut rappeler que des inscriptions “de construction” ou commémorant les hauts faits de souverains ou grands personnages, utilisant des formules différentes, existent depuis la diffusion de l’alphabet consonantique, v. Wilson 2012.
- V. aussi Wilson 2012, 272-274. Le texte a été étudié à nouveau par Röllig 1996 et Garbini 2002, sans que toutes les difficultés qu’il pose aient été pourtant résolues. La numérotation des inscriptions dans IPT, souvent critiquée, parce que différente de celle des Tripolitane attribuée aux textes dans les publications de G. Levi Della Vida, n’a pas été ma “malencontreuse idée” (Sznycer 2002-2003, note 10), mais avait été établie par ce savant lui-même, dont l’intention était de réaliser un recueil organisé de manière semblable à l’IRT. On lui doit la nouvelle numérotation, que j’ai reproduite telle-quelle après en avoir discuté ensemble ; j’ai exécuté les contrôles sur les textes (et je me suis pour la première fois “familiarisée” avec l’écriture néopunique) et je me suis procuré les photos grâce à Antonino Di Vita, d’après les indications de mon grand-père. Nous avons ensemble rédigé les listes des inscriptions, en excluant, suivant sa volonté, les latino-puniques “trop difficiles” pour moi ; de mon initiative, j’ai ajouté entre parenthèses les numéros des publications de Levi Della Vida.
- Prag 2013, 339-340.
- Dernièrement Amadasi Guzzo 2013, 109-110.
- Jongeling 2008, Lebdah N 13.
- Wilson 2012, 274-278.
- Crawley Quinn 2010, 52 et Wilson 2012, 278.
- Jongeling 2008, Labdah N. 16 ; Wilson 2012, 278-281.
- Ensuite replacé “above the street door of the East dressing room” (IRT 323).
- Levi Della Vida, 1971. V. aussi Bertinelli Angeli 1970.
- En particulier, dernièrement, Wilson 2012.
- KAI 118 ; Jongeling 2008, Breviglieri N 1.
- Levi Della Vida 1971.
- Hannobal a en outre les fonctions de ZBḤ, littéralement “sacrificateur”, qui correspond au latin “flamen” et de ’DR ‘ZRM, peu clair en punique, en latin “praefectus sacrorum” (v. déjà plus haut). Ces fonctions sont discutées par Wilson 2012, 276-277, avec citations de Bertinelli Angeli. V. aussi Levi Della Vida 1971, 467-469. Deux personnages, flamines de l’empereur, ont des fonctions qui apparaissent seulement dans le texte punique et qui restent peu claires, v. en détail IPT, p. 51-52.
- PPG3 § 38 a. Elle se base sur l’orthographe latine (mais aussi la transcription QW‘ṬRBR et non, éventuellement, QW‘ṬWRBR).
- Sur l’onomastique en Tripolitaine Amadasi Guzzo 1986 et 2002-2003.
- Mais l’orthographe est légèrement différente : RWPS dans le texte du marché et R’PS dans ceux du théâtre.
- Wilson 2012, 280.
- Liste dans IRT, p. 251.
- KAI 123 : Jongeling 2008, Labdah N. 15.
- Yatonba‘l de IPT 23 est le même personnage que [It]hymbal Arinis f(ilius) Sabinus Tap[apius] de IRT 341, datée de 61-62. Un S‘BYN’ TBḤ[PY], probablement le même individu était nommé sur un fragment de siège IPT 28.
- KAI 122 ; Jongeling 2008, Labdah N. 14 ; v. Wilson 2012, 282-284.
- Alef est employé parfois pour marquer la voyelle finale après le -i- (même procédé dans l’orthographe des pronoms suffixes, se prononçant /-iu/, masc. et /-ia/, fém.), comme dans le cas de dn‘ry’.
- Amadasi Guzzo 1995 (avec l’état de la question et la bibliographie) ; avec réaffirmation de l’adoption des noms au vocatif, Adams 2003, 218-219.
- Jongeling 2008, Labdah N 18 ; Wilson 2012, 287-289. D’après IRT 338 les stèles étaient quatre à l’origine. Une seule est complète, la deuxième est fragmentaire ; des deux autres subsistaient les fragments des plinthes.
- Le latin “testamento adoptatus”, qui désigne Ba‘lyaton Commodus, exécuteur final des travaux rappelés, est rendu en punique par la phrase suivante : “(Ba‘lyaton Commodus) qui est entré en qualité de fils de Macer, fils de Gaius, grâce à l’écriture des affaires de la famille de Gaius, fils de Hanno …”. Les mêmes personnages et les mêmes ouvrages sont commémorés dans IRT 615. Certainement l’adoption existait déjà dans le monde phénicien, mais le vocabulaire employé ici n’a aucun parallèle connu dans cette aire linguistique.
- Jongeling 2008, Labdah N 19 ; Wilson 2012, 297-299.
- Ambros-Jursa 2006, surtout 263-264 ; précédemment Krahmalkov 2000, s.v. traduit d‘t par “friendship”.
- V. pour l’interprétation, IPT, p. 68 ; Bertinelli Angeli 1970, 51. Noms propres avec la racine šlk, Benz 1972, 416-417.
- IRT, p. 80 “these are translations of Punic titles … and are paralleled at Sabratha (95) and Gigthis (CIL VIII, 22743), 81, 263, 264”.
- L’inscription est datée de l’an 31 de Tolémée, qui est l’an 57 de l’ère de Kition (255 a.C.) ; suit l’expression “étant Canéphore d’Arsinoé Philadelphe” (KNPRS ’RN’S PLDLP).
- Classiques sont encore, pour la langue, Cantineau 1930-1932 ; en outre Starcky 1966. Nombreux sont les ouvrages sur Pétra : pour les monuments et les textes v. dernièrement Nehmé 2012. Bonne synthèse d’ensemble : Roche 2009.
- Amadasi Guzzo 1984.
- Wilson 2012, 284-286.