Romeo Castellucci, né en 1960, à Cesena, est un metteur en scène italien qui, après des études à l’Académie des Beaux-Arts de Bologne, en scénographie et en peinture, crée la Socìetas Raffaello Sanzio1 en 1981 avec sa sœur Claudia, sa femme Chiara Guidi et le frère de celle-ci, Paolo Guidi. À propos de leur travail, Claudia Castellucci déclare : « Notre théâtre est obscène au sens étymologique du terme, il doit ébranler physiquement le spectateur. […] La tragédie hellénique dissimulait les épisodes les plus horribles derrière un voile. La tragédie romaine, elle, montrait tout. C’est ce que nous faisons. »2
En plus d’ébranler les spectateur·rice·s, plusieurs spectacles de la Socìetas, notamment ceux mis en scène par Romeo Castellucci, provoque le scandale et de vives critiques. Ce fut le cas de Sul concetto di volto ne figlio di Dio, Sur le concept du visage du fils de Dieu créé en 2011 où un acteur joue un père incontinent : une matière marron s’écoule de la couche qui constitue son seul costume, son fils le lave, la scène est répétée à plusieurs reprises. Puis des enfants souillent de jets d’encre un tableau d’Antonello di Messina représentant le visage du Christ projeté sur un écran en fond de scène3. Des groupes activistes de catholiques intégristes ont ainsi interrompu plusieurs représentations.
Dans deux de ses créations précédentes, L’Orestea (una commedia organica?) en 1995 et Giulio Cesare en 1997, il emploie des acteur·rice·s aux physiques atypiques comme deux actrices et un acteur anorexiques, un acteur sans bras ou encore un autre laryngectomisé. Ces corps qui ont pu choquer une partie du public et de la critique sont de ceux que l’on ne montre pas habituellement sur les scènes de théâtre.
Pippo Delbono, metteur en scène également italien, est né à Varazze en 1959. Après sa rencontre avec l’acteur exilé argentin Pepe Robledo, ils suivent tous les deux une formation à l’Odin Teatret, fondé par le grand pédagogue Eugenio Barba4, puis ils fondent la Compagnia Pippo Delbono en 19875. Pippo Delbono réalise également plusieurs films et est l’auteur de plusieurs ouvrages, notamment sur le jeu de l’acteur·rice6. Il y décrit sa façon très particulière de faire travailler ses acteur·rice·s, son fameux training qu’il élabore à partir de son expérience à l’Odin Teatret et des traditions orientales. Pippo Delbono et Pepe Robledo travaillent aussi avec Pina Bausch en 1987, la chorégraphe allemande influencera ainsi leur esthétique. Pippo Delbono a à son actif une vingtaine de spectacles qui ne cessent de saisir les publics, des spectacles qui eux aussi divisent et suscitent des réactions vives.
En effet, depuis la création de la compagnie et au fur et à mesure des rencontres, la troupe s’agrandit et accueille en son sein plusieurs acteurs aux corps qui font partie de ceux dont la présence sur scène reste exceptionnelle, comme Gianluca Ballarè atteint du syndrome de Down, Bobò que Pippo Delbono fait sortir de l’hôpital psychiatrique où il a passé plus de quarante-cinq années car il était sourd, muet et microcéphale, ou Nelson Larriccia, un ancien sans domicile fixe au corps très maigre rencontré dans les rues de Naples.
Ces corps sont « ob-scènes », au sens de ce qui doit rester hors de la scène. Et ils le sont doublement puisqu’hors des scènes, ils sont invisibilisés, discriminés et peu considérés. Les faire apparaître sur les scènes choquent les spectateur·rice·s, sans doute parce qu’il·elle·s n’ont même pas l’habitude d’y prêter attention dans leur vie quotidienne. Les mettre ainsi en lumière, n’est-ce pas révéler et « dénoncer un état du monde, un état culturel et social encore enlisé dans des tabous »7 ? Ces corps qui doivent rester hors de la scène de théâtre, mais qui sont aussi hors scène/ob-scènes hors de la scène, c’est-à-dire hors des théâtres, sont présentés sans faux semblants, dans leur matérialité brute, parfois même nus.
Ainsi, et malgré des esthétiques très différentes, Romeo Castellucci et Pippo Delbono ont comme point commun de présenter sur scène des corps non normés, atypiques, des corps qui percutent la sensibilité des spectateur·rice·s tant il est inhabituel de les exhiber sur les scènes de théâtre et tant ils sont très invisibilisés dans nos sociétés. Des corps obscènes parce que ces metteurs en scène montrent ce qui d’ordinaire reste confiné dans des espaces privés et est relégué aux marges de la société.
Un autre point commun rassemble les deux metteurs en scène : nés tous les deux à la même époque, ils font souvent référence d’une façon ou d’une autre à Pier Paolo Pasolini, figure centrale de l’Italie des années 1960 et 1970. Pasolini fut lui aussi constamment taxé d’obscénité, dans sa vie privée mais aussi à cause de ses œuvres, notamment cinématographiques et romanesques. Dans un premier temps, nous reviendrons sur les procès qu’il eut à affronter pour ensuite examiner, dans un second temps, de quelle façon nos deux metteurs en scène italiens contemporains ont suscité eux aussi à plusieurs reprises le scandale pour ce qu’on pourrait nommer des formes d’obscénité, notamment à cause des corps de leurs acteur·rice·s et, pour Romeo Castellucci, de scènes qui ont pu être assimilées au blasphème. En effet, s’il est rare de nos jours de renvoyer des artistes devant les tribunaux pour leurs créations, les attaques virulentes contre certains de leurs spectacles ne sont pas sans rappeler les procès attentés à Pasolini. Pourtant, les deux metteurs en scène italiens ne peuvent pas être taxés de pornographie et n’ont pas un engagement politique public et une notoriété qui peuvent expliquer les procès attentés à Pasolini. Ici, ce ne sont plus des actes sexuels entre deux ou plusieurs personnes qui sont critiqués, mais le simple fait de présenter des personnes qui ne sont habituellement pas présent·e·s sur les scènes.
Comment peut-on expliquer les réactions provoquées par la monstration d’acteur·rice·s aux corps hors des normes établies ? La « panique morale » qui enserre nos sociétés, pour reprendre le titre d’un ouvrage du philosophe Ruwen Ogien8, n’atteindrait-elle pas là les scènes de théâtre ?
Pier Paolo Pasolini et ses procès
Pier Paolo Pasolini fut donc conduit à de nombreuses reprises devant les tribunaux, plus d’une trentaine de fois, le plus souvent pour blasphème et/ou obscénité. Nous prendrons un exemple dans sa production cinématographique afin d’examiner les raisons pour lesquelles il fut assigné en justice.
L’exemple le plus emblématique est ainsi son film Théorème9 (1968) qui a été à la fois encensé, il reçut plusieurs prix (le prix d’interprétation pour Laura Betti à la 29e Mostra de Venise et, plus surprenant, le prix de l’Office Catholique International du Cinéma qui lui fut finalement retiré10), mais qui subit aussi les déchainements de nombreux journalistes et d’une partie de l’Église catholique. Nous sommes en 1968 et les critiques portent en partie sur l’aspect idéologique et politique du film11. Une autre partie des critiques émanent de la sphère religieuse, même si certains membres du clergé défendent le film. Ainsi, l’assimilation à un Dieu d’un beau jeune homme qui perturbe l’ensemble des membres d’une famille bourgeoise, du père aux enfants, en passant par la bonne, en leur faisant l’amour, choqua jusqu’au Vatican12.
Au-delà de l’aspect blasphématoire qui fut reproché à Pasolini, la question du corps et du nu masculin est centrale. Selon Otello Lupacchini qui relate la polémique dans un article de Il fatto quotidiano :
Dans tous les cas, Teorema fut un choc : on y trouve un mixte d’Éros et de Religiosité. Pour la première fois, un nu masculin intégral, celui de Terence Stamp, était montré à l’écran, dans un film qui se défendait de faire de la pornographie : Pier Paolo Pasolini entendait exprimer la sacralité du corps. Le scandale que ce nu a provoqué, en somme, était là pour montrer à quel point la vue de ce qui se donne pour authentique était insoutenable […].
Il reprend ensuite une partie de la critique qui parut dans le quotidien du service d’information du Vatican, le 13 septembre 1968 :
Le jugement du journal Osservatore romano sur Teorema, publié le 13 septembre 1968 était tranchant : “la métaphore bouleversante par laquelle on a voulu représenter le problème de la rencontre avec une réalité qui voudrait symboliser une transcendance est minée dans ses fondements par la conscience freudienne et marxiste […]. L’hôte mystérieux n’est pas la figure d’un être qui libère et affranchit l’homme de ses tourments existentiels, de ses limites et de ses impuretés, mais c’est presque un démon”13.
C’est finalement un avocat romain, Enrico Bianionti, qui
porte plainte contre le film, exigeant la destruction du négatif ainsi que la saisie des copies destinées à l’exportation. Sa requête va même plus loin puisqu’il demandait ni plus ni moins l’arrestation de Pasolini et de son producteur… Il les accuse en effet d’obscénité, invoquant “différentes scènes de rapprochement charnel dont certaines sont particulièrement lascives et libidineuses, ainsi que les descriptions des rapports homosexuels entre un invité et un membre de la famille qui l’accueille”14.
Le procès s’ouvre le 26 octobre 1968 pour « délit de publication obscène ». Pasolini sera acquitté et le Président du Tribunal déclara : « Le bouleversement que m’a causé Théorème n’est nullement sexuel, il est essentiellement idéologique et mystique. Comme il s’agit incontestablement d’une œuvre d’art, elle ne peut pas être suspecte d’obscénité. »15 Pour le Président du Tribunal, une œuvre d’art ne pourrait donc pas être jugée avec les mêmes critères qui pourrait s’appliquer à des faits qui auraient lieu dans la réalité.
Le débat est vaste et il ne s’agit pas de le développer ici. Deux éléments de cette polémique permettent cependant de faire le lien avec Romeo Castellucci et Pippo Delbono. Le rapport à la religion tout d’abord, puisque Romeo Castellucci, comme Pasolini, y fait très souvent référence dans ses spectacles et que lui aussi a été à plusieurs reprises accusé par des groupes intégristes d’attaquer la religion. À cela, Romeo Castellucci répond :
La montée des intégrismes me surprend en tant qu’artiste, mais surtout comme citoyen. J’ai vécu l’expérience des intégrismes catholiques par rapport à la pièce Sur le concept du visage du Fils de Dieu, alors que je croyais être proche de la sensibilité catholique et loin du blasphème. N’oublions pas que le Christ a été crucifié parce qu’il a été jugé blasphémateur. Il ne faut jamais tomber dans la simplification, elle mène à la violence. Dieu est, par définition, “celui qui manque”. C’est celui qui a laissé sa place à la création parce qu’il est absent, il n’est pas là, il nous ignore.
Il poursuit en faisant référence à Pasolini :
Le lien entre l’art et la religion s’est perdu en Occident au XIXe siècle : quand l’Église, comme l’a expliqué le cinéaste et poète Pier Paolo Pasolini, a trop versé dans la communication, le spectacle. Quand elle a perdu l’esprit. Le religieux occidental est alors devenu stéréotypé, consolatoire. Aujourd’hui, la religion a perdu sa capacité de poser des questions, et l’art a pris sa place16.
L’art se serait donc substitué à la religion dans sa capacité à poser des questions et Castellucci réintègre la religion dans ses spectacles par l’intermédiaire d’images y faisant référence plus ou moins explicitement afin de recréer des liens entre art et religion.
La focalisation sur les corps constitue le deuxième élément qui lie Pasolini aux deux metteurs en scène italiens. Romeo Castellucci et Pippo Delbono, que cela soit en référence à la religion ou pas, choquent à cause des corps qu’ils montrent sur scène comme Pasolini choqua avec un acteur nu dans Théorème : Romeo Castellucci qui dans certains spectacles a fait intervenir des personnes obèses, anorexiques, très grand et mince ou encore avec une trachéotomie ou sans bras, provoquent les habitudes, et Pippo Delbono avec ses acteur·rice·s en situation de handicap physique et mental ou bien marqué·e·s par les difficultés de leur parcours de vie.
Romeo Castellucci : blasphème et corps obscènes
Depuis le début de leur travail, les membres de la Socìetas sont guidé·e·s par un principe qui engage leurs créations : l’iconoclastie. Dans Les Pèlerins de la matière, ouvrage réunissant différents articles, Claudia Castellucci définit l’iconoclastie de la façon suivante :
“Iconoclastie” ne signifie pas “an-icône”, ni “sans-icône”, mais je “casse l’icône”. […] L’iconoclastie est une force qui s’inscrit en compétition – par une rupture – avec une puissance formidable. L’iconoclastie ne montre pas un mur blanc, ni une rupture de quelque chose dont on ne sait plus ce que c’est, mais une image qui porte le signe de cette rupture et qui est en compétition, en puissance, avec celle d’“avant”. Ce qu’il y avait avant n’est plus là : voilà ce que dit l’iconoclastie17.
Une des ruptures que nous pouvons identifier dans le travail de Romeo Castellucci se situe du côté de la tradition théâtrale. En effet, il ne fait pas incarner des personnages à ses acteur·rice·s dans le sens où il·elle·s ne jouent pas des personnages qui interagiraient avec d’autres personnages selon une histoire fictive écrite par un·e auteur·rice, même quand il met en scène des adaptations de textes du répertoire comme L’Orestie d’Eschyle ou Jules César de William Shakespeare. Ou plutôt, et c’est ce qui dérange sans doute une partie des spectateur·rice·s, ses mises en scène ne sont pas focalisées sur le texte mais sur la création d’images en rupture avec ce que la grande majorité des spectateur·rice·s de théâtre attendent quand il·elle·s assistent à une représentation18. En effet, si certains spectacles de Romeo Castellucci sont créés à partir de textes, le but n’est pas d’en donner une interprétation, une lecture qui serait transmise aux spectateur·rice·s grâce à des signes scéniques, mais de produire des images qui les provoquent et qui portent donc en elles les signes d’une rupture. L’image est au centre des créations de la Socìetas, des images créées avec tous les moyens scénographiques utilisables au théâtre, lumière, éléments de décors, sons, etc., et surtout avec les corps des acteur·rice·s.
Ainsi, plusieurs spectacles de Castellucci ont suscité des critiques virulentes. Trois d’entre eux ont été particulièrement visés. Le premier, déjà évoqué, Sur le concept du visage du fils de Dieu a été créé en 2010. Les représentations au théâtre de la Ville à Paris, et dans d’autres villes où le spectacle a été présenté, ont été perturbées par des fondamentalistes catholiques qui taxent le spectacle d’être « obscène et blasphématoire »19. La description par un journaliste de l’Humanité permet de comprendre aisément pour quelles raisons :
Sur la scène […], apparaît un grand vieillard (Gianni Plazzi) soutenu par deux servants de scène. On le pose devant le poste de télévision. Un homme dans la quarantaine (Sergio Scarlatella), qu’on identifie aisément comme son fils prêt à partir au travail, lui fait avaler des cachets. Soudain le père fait sur lui. Une tache marron dans le dos de son peignoir en témoigne. Le fils le déshabille, le lave méticuleusement. Une odeur de pisse et de merde gagne la salle. Des gens sortent. Pas beaucoup. Le père se vide à nouveau. Le fils recommence d’effectuer la toilette du vieillard, lequel pleure, honteux, avant de souiller délibérément son lit en y versant le contenu d’un récipient qu’on peut croire empli de ses déjections. […] Maintenant le fils n’est plus là, le père, immobile, est assis sur son lit. Dans la pénombre, des enfants envahissent la scène. […] Tirant de leurs sacs à dos des jouets en forme de grenades, ils bombardent l’image du Christ (tableau d’Antonello da Messina, XVe) dans un grand bruit de guerre. À leur sortie, le visage de Jésus peu à peu se lézarde, se creuse, s’efface par plaques, jusqu’à ce qu’apparaissent en lieu et place les mots : “You are (not) my sheperd” (tu (n’) es (pas) mon berger).
Le but est bien d’« ébranler physiquement le spectateur » conformément au projet des Castellucci ; ici, avec les images mais aussi avec des odeurs.
Au-delà de la question des intégristes, qui suscita encore récemment en 2018 une interdiction par le Préfet de la Sarthe que des enfants jouent dans la dernière scène du spectacle, l’incontinence du père et les odeurs diffusées dans la salle ont provoqué de vives réactions de spectateur·rice·s.
Qu’est-ce qui se joue ici ? Ruwen Ogien, dans La Liberté d’offenser. Le sexe, l’art et la morale, s’étonne que des actes naturels, comme la défécation que personne ne réprime dans la sphère privée, soient objets de choc lorsqu’ils sont présentés sur une scène de théâtre, alors que des choses que l’on trouverait
répugnantes quand elles sont faites en réalité (torturer quelqu’un à mort pour obtenir son numéro de carte bleue, le découper à la tronçonneuse pour savoir où il cache sa cocaïne, etc.) […] on peut [les] trouver intéressantes, fascinantes, excitantes, et mêmes admirables lorsqu’elles sont représentées par des écrits, des images ou simulées par des acteurs20.
Ici encore la question de la représentation et de l’art se pose. L’exposition sur une scène d’actes quotidiens mais réservés à la sphère intime n’auraient pas lieu d’être sur une scène. Pourtant, ils ne sont bien évidemment pas réalisés réellement, mais imités et signifiés, avec la matière marron qui s’écoule de la couche du père, et des odeurs. Sans doute que les spectateur·rice·s de théâtre n’ont pas pour habitude d’assister à de telles scènes, mêmes représentées, alors que les actions les plus violentes dans des médias comme la télévision, le cinéma ou internet sont leur lot quotidien.
Les deux autres spectacles qui ont défrayé la chronique sont donc Giulio Cesare et L’Orestea (una commedia organica?). Ici, les réactions négatives s’appliquent à la simple exhibition de corps que l’on peut à nouveau qualifier d’« obscènes » dans le sens de corps desquels nos regards se détournent le plus souvent quand on les croise dans la vie.
Dans le premier spectacle, Marc-Antoine est joué par un acteur laryngectomisé, César et Cassius par deux femmes aux corps anorexiques, et Brutus, par un homme anorexique. Dans le second spectacle, Apollon est joué par un acteur sans bras, Clytemnestre et Électre par des actrices aux corps obèses, Agamemnon par un acteur trisomique, Oreste par un acteur rachitique. Ces corps sont en outre bousculés, et le mot est faible, comme l’indique Léna Martinelli sur le site de France Culture : « Certaines séquences sont à la limite du soutenable, peuvent choquer. Toutefois, aucune image n’est gratuite, ni le revolver dans ce halo de lumière sépulcrale, ni la chair ensanglantée, ni l’obèse Clytemnestre qui se fait fouetter, ni cet Apollon à moignons, ni les fascinants testicules d’un Oreste rachitique »21.
Ainsi, il ne suffit pas que les images soient justifiées pour susciter l’adhésion. N’est-ce pas la façon de présenter ces corps sur scène qui entraine des attaques frontales et des réactions très fortes ? En proposant des spectacles hors du paradigme aristotélicien de la représentation, puisque le metteur en scène montre et fait jouer ces corps sans en passer par la médiation de la représentation22, Romeo Castellucci crée une confrontation directe entre les acteur·rice·s et les spectateur·rice·s. Aucun filtre ou faux semblants ne viennent s’immiscer entre eux·elles. Ce qui provoque les sens des spectateur·rice·s, en particulier avec les voix des acteur·rice·s, exacerbées, amplifiées ou poussées jusqu’aux cris et avec leurs corps souvent nus ou à moitié nus.
Le metteur en scène empêche ainsi l’instauration d’une distance brechtienne qui permettrait un regard éloigné et critique sur ce à quoi il·elle·s assistent. Les réactions sont épidermiques pourrait-on dire, comme si la peau des spectacteur·rice·s était à vif, écorchée par la disparition de la protection que peut constituer le voile de la représentation. Pour certain·e·s, c’est le rejet, pour d’autres, comme Bruno Tackels, « cette violence intimée au public n’est pas destructrice, elle est au contraire adoucissante, et presque apaisante »23. Ces formes de violence provoquent donc des émotions fortes et c’est à ce niveau-là que les dissensions apparaissent viscéralement, sans doute parce qu’« en France, l’émotion est plutôt mal vécue, récusée par une «certaine» lecture de Brecht »24.
Pippo Delbono : corps en situation de handicap
Bruno Tackels commente dans la citation précédente le théâtre de Pippo Delbono qui, lui aussi,
embarque les spectateurs en des “arrières-mondes” inquiétants et intimes, d’autant plus difficiles à traverser en public, avec d’autres. Il touche à des points-limites de l’humain, le corps meurtri, la sexualité exposée dans tous ses états de désir, […], les êtres exclus de la norme (par la norme), […] – autant de points sensibles qui ne peuvent que susciter des prises de position à la fois vitales et réactives25.
Pippo Delbono est constamment présent sur scène pendant les spectacles et il prend en charge la quasi-totalité du texte, quelques extraits de textes écrits, du répertoire théâtral, des poèmes aussi ou encore des lettres issues de correspondances, mais, surtout une parole à la première personne où il explique le prétexte du spectacle, palabre sur le théâtre ou la politique italienne, présente les acteur·rice·s de sa compagnie et leurs parcours de vie, etc. Il danse également et il crie beaucoup, ce qui insupporte une partie des spectateur·rice·s qui n’hésitent pas à sortir avant la fin des représentations. Ses paroles accompagnent les images qu’ils composent avec les corps de ses acteur·rice·s à partir des propositions qu’il·elle·s font pendant le travail de création. Sans forcément de liens entre elles, alternant chorégraphies, défilés d’acteur·rice·s costumé·e·s, playbacks sur des chansons de variétés italiennes ou françaises, etc., ces images sont autant d’étapes dans le « parcours d’émotion »26 que le spectacle constitue selon le metteur en scène.
Dans ses spectacles, il présente ainsi à chaque fois ou presque les histoires des rencontres avec ses acteur·rice·s les plus emblématiques. Bobò tout d’abord qui parcourra les routes du monde à ses côtés pendant plus de vingt années, jusqu’à sa mort en 2018. Son dernier spectacle, La Gioia, créé en 2018, est un hommage à son plus fidèle compagnon. Son physique et les petits cris qui sortaient de sa bouche étaient présents dans tous les spectacles. Gianluca Ballarè qui a pratiquement été élevé par Pippo Delbono et sa mère est également dans la troupe depuis de nombreuses années, ses playbacks sur des chansons populaires italiennes sont des moments ludiques attendus par les spectateur·rice·s habitué·e·s aux spectacles de Pippo Delbono. Enfin, Nelson Larricia, ancien SDF, schizophrène, rencontré dans les rues de Naples. Son corps très maigre, presque rachitique, resté marqué par ses années dans la rue, est reconnaissable entre tous.
Ces acteurs et le reste de la compagnie accomplissent des partitions scéniques qui choquent une partie des spectateur·rice·s. Deux exemples permettent de saisir à quel point les spectateur·rice·s sont convoqué·e·s : Nelson Larricia qui à la fin de Questo buio feroce, créé en 2006, chante My way en venant serrer des mains dans le public, en disant « Thank you, thank you » simplement habillé d’un slip, et Gianluca Ballarè qui dans La Menzogna, crée en 2008, apparaît nu et imite le chat pendant une longue séquence, puis il descend dans le public pour saluer, et donc toucher quelques spectateur·rice·s du premier rang pendant que Pippo Delbono les prend en photo. Bruno Tackels rapporte les réactions du public et du metteur en scène répondant au public à cette séquence lors d’une représentation au Teatro Argentino de Rome :
Certains mettent la main devant leur visage, se cachent dans leur manteau. La tension monte dans le parterre (les places les plus chères). […] Il cherche à récupérer Gianluca, nu au bord du plateau, qui commence à émettre de dangereux miaulements, incroyablement érotiques. Et là, c’est trop.
Il cite alors quelques réactions de spectateur·rice·s : « Mais c’est un scandale ! Ce n’est pas du théâtre, ça ! », « […] comment osez-vous nous présenter ça ? », « On ne comprend rien à ce que vous faites. Vous avez vraiment un problème, vous. »27
Quelques années auparavant, il lui est reproché notamment de faire accomplir des séquences à la limite de la décence par des personnes qui ne seraient pas en mesure de réaliser ce qu’elles font. Une dépêche de l’AFP afin d’annoncer plusieurs de ses spectacles présentés lors du festival d’Avignon 2002, est titrée : « Pippo Delbono et ses handicapés au festival d’Avignon : entre générosité et démagogie. » Elle commence ainsi : « La compagnie d’handicapés rescapés de la misère psychiatrique et de l’abandon, constituée par l’homme de théâtre italien Pippo Delbono, fait, depuis le 8 juillet, au 56e Festival d’Avignon, courir le public aux représentations de la trilogie proposée par ces Italiens », et se termine par une question :
Sans doute, y a-t-il de la générosité dans la démarche de Pippo Delbono qui offre une possibilité de s’exprimer à ces hommes et ces femmes laissés sur le bord de la route. Mais ce théâtre maladroit à la limite du patronage, a-t-il sa place dans un festival d’art qui, par ailleurs, affiche dans le domaine du spectacle des créations sophistiquées, aux recherches davantage d’ordre esthétique ?28
Faire jouer des personnes en situation de handicap, notamment mental, et les présenter dénudées serait donc le signe d’une décadence esthétique et d’une compassion malvenue.
Quant à Pippo Delbono, il se défend d’utiliser ces personnes contre leur gré :
Gianluca, dans “La Menzogna” apparaît nu et fait le chat. Il aime se mettre nu. Il a un corps privé absolument de perversion, duquel émane la douceur d’un bébé. […] Gianluca est le seul qui peut se montrer nu sur scène en exprimant cette beauté. Il est clair qu’il faut avoir la capacité de l’aimer, le corps de cette personne “différente”. Si tu as cette faculté, Gianluca t’apparaît beau, à caresser comme un chaton29.
Et à propos de Bobò : « Quand je regarde Bobò, je vois de la beauté, de la sensualité, de l’érotisme sur le plateau (je ne l’instrumentalise pas), il me redonne un sens de la beauté. Je ne pense pas au malheur. » Pippo Delbono travaille à partir des propositions des acteur·rice·s et il explique à plusieurs reprises que Gianluca aime à se présenter nu sur scène (même si au final, c’est rare quand on connaît l’ensemble des spectacles de la compagnie). Il poursuit : « Certains spectateurs, c’est vrai, sont incapables de voir la beauté chez Bobò ou Gianluca, ils ne voient que le handicap ; je trouve que c’est une limite culturelle. »30
Pour Pippo Delbono, au contraire, l’indécence et l’obscénité proviennent davantage de la surexposition de corps normés, notamment de femmes à la télévision italienne par exemple, il déclare :
Il y a quelques jours, sur les plages de San Sebastian, je voyais des gens prendre des bains de soleil. En maillot de bain ou nus. Sans avoir peur de la nudité. Nous, au contraire, nous avons toujours préféré les corps cachés. Les perversions, oui, pourvu qu’elles ne soient pas avouées. Pour sauvegarder la morale. Ou alors des femmes qui s’exhibent à la télé avec une grosse poitrine, des lèvres et des culs bien en vue. Acceptées, non censurées, parce qu’image juste du vrai Italien qui aime la vraie femme, le vrai adjudant, le vrai mâle. Cette pornographie-là, on l’accepte, on ne la censure pas31.
Pippo Delbono adhérerait sans doute à ce que Ruwen Ogien écrivait à propos de la pornographie :
[…] je récuse les deux principes qui semblent régir le statut politique et moral des représentations sexuelles explicites dans nos sociétés démocratiques : seules les représentations sexuelles artistiques sont protégées, seules les représentations sexuelles qui procurent un délicieux sentiment esthétique sont protégées32.
Et, en remplaçant « sexuelles explicites » par « des corps hors normes », ces propos s’appliquent parfaitement aux spectacles de Pippo Delbono.
Conclusion : la liberté d’offenser
Romeo Castellucci et Pippo Delbono perturbent donc constamment les spectateur·rice·s qui viennent assister à leurs spectacles. En dévoilant et exhibant des corps obscènes, ils rompent avec la tradition aristotélicienne et le théâtre pour lequel il s’agit de représenter une histoire fictive en faisant incarner des personnages par des acteur·rice·s. Les corps de leurs acteur·rice·s sont confrontés à vifs à ceux des spectateur·rice·s. Certain·e·s sont ému·e·s, d’autres rejettent en bloc ces rencontres inattendues. Bruno Tackels explique ainsi les réactions négatives face aux spectacles de Pippo Delbono :
Les acteurs de Pippo Delbono […] n’ont pas à se perdre dans le personnage d’une pièce, mais portent avec eux, toute leur vie durant, le personnage qu’ils sont, et qui est en même temps en face d’eux, un peu comme une marionnette, mais toujours en vie, jamais pétrifiée […]. Au lieu de se laisser entraîner par ce qu’ils voient, les spectateurs s’empêchent de regarder vraiment, par ces fausses questions : “Celui-là est handicapé, non ? – Ah bon, tu crois, on ne dirait pas… – Oui c’est pas sûr… difficile de savoir…”33.
Il est difficile de blâmer les spectateur·rice·s qui se poseraient de mauvaises questions, étant englué·e·s dans des préjugés et enfermé·e·s dans des stéréotypes induit par le corps social et leurs habitudes culturelles, il·elle·s sont peu enclin·e·s à se laisser aller à la rencontre avec des personnes hors du commun.
En revanche, il est possible de contextualiser ces réactions négatives et aussi d’expliquer les raisons pour lesquelles nous pouvons trouver ces réactions excessives. Partons du principe philosophique qui fut le fil rouge du travail de Ruwen Ogien pendant une grande partie de sa vie de chercheur, l’éthique minimale, soit « la liberté de faire ce qu’on veut de sa propre vie du moment qu’on ne nuit pas à autrui »34. Un principe qui est « toujours fortement contesté, tantôt au nom de la «dignité humaine» tantôt au nom de la «nature humaine» »35. Dans La Liberté d’offenser, il ajoute : « Le principe de non nuisance à autrui peut-il justifier la répression morale et légale des attitudes ou des actions qui provoquent des émotions négatives, c’est-à-dire déplaisantes, comme le dégoût, l’anxiété, l’embarras, l’inquiétude ou des malaises sensoriels du genre de ceux qui sont provoqués par des bruits stridents ou des odeurs désagréables ? »36. Les « bruits stridents » ne sont pas sans rappeler les petits cris émis par Bobò dans les spectacles de Pippo Delbono ou les aboiements proférés pendant de longues minutes par plusieurs acteurs portant des costumes d’hommes d’Église dans La Menzogna et les « odeurs désagréables », celles du spectacle de Romeo Castellucci que nous avons évoqué plus haut. La réponse est bien évidemment que le principe de non nuisance à autrui ne peut pas justifier la répression morale, on pourrait ajouter que les spectateur·rice·s heurté·e·s ont tout le loisir de quitter la représentation avant son terme. Pourtant, des procès attentés à Pasolini, nous en sommes désormais arrivés à des condamnations morales contre des propositions qui n’entendent que provoquer des émotions et faire jouer des personnes qui n’ont que peu l’occasion d’être présentes sur nos scènes.
Pour terminer, nous pourrions appliquer à Romeo Castellucci et Pippo Delbono, ce que Ruwen Ogien écrit à propos de la pornographie :
Dans Penser la pornographie, je voulais seulement montrer qu’à partir du moment où on accepte, comme je crois qu’il est bon de le faire, les principes d’une éthique minimale, il n’existe aucune raison de stigmatiser la pornographie visuelle comme un genre “immoral”, ce qui ne nous interdit pas, bien entendu, de porter toutes sortes de jugements, négatifs ou positifs, sur la qualité esthétique ou les conditions de productions d’œuvres qui appartiennent au genre.37.
Notes
- Site de la compagnie, [en ligne] https://www.Societas.es/?lang=en [consulté le 02/11/22].
- Entretien avec Alexandre Demidoff, Le Temps, 28 mars 2003, [en ligne] https://www.letemps.ch/culture/claudia-castellucci-theatre-obscene-ebranler-physiquement-spectateur [consulté le 02/11/22].
- Le tableau s’intitule Salvator Mundi, il date de 1465.
- Pour obtenir des informations sur l’Odin Teatre cf. le site de la compagnie, [en ligne] https://odinteatret.dk/about-us/eugenio-barba [consulté le 02/11/22].
- Site de la compagnie, [en ligne] https://www.pippodelbono.it [consulté le 02/11/22].
- Pippo Delbono, Le Corps de l’acteur ou la nécessité de trouver un autre langage. Six entretiens romains avec Hervé Pons, Besançon, Les Solitaires Intempestifs, 2004.
- André Habib, « Remarques sur une réception impossible : Salò et La Grande bouffe », article daté du 4 janvier 2001, publié dans HorsChamp, novembre-décembre 2020, [en ligne] https://www.horschamp.qc.ca/spip.php?article37#nb40 [consulté le 02/11/22].
- Ruwen Ogien, La Panique morale, Paris, Grasset, 2004.
- Adapté du roman homonyme, le film est résumé ainsi dans un article qui explicite le passage du roman au film : « 1968. Une famille de la riche bourgeoisie milanaise reçoit un jeune invité mystérieux et sensuel, qui a des rapports sexuels avec chaque membre de cette famille. Son départ provoque la désagrégation du noyau familial, et plonge chaque personnage, à l’exception de la domestique, dans une profonde crise existentielle. Du roman au film, Théorème est la démonstration de l’irruption violente du sentiment du sacré, dans une société aux valeurs fictives, où l’homme se déréalise. L’image du désert apparaît emblématique dans la construction de la parabole pasolinienne du sacré », in Vogin Magali, « Quand la mauvaise conduite triomphe des bonnes manières. Le désert de la conscience dans Théorème de Pasolini : du roman au film », Italies, 11, 2007, [en ligne] http://journals.openedition.org/italies/1152 [consulté le 02/11/22].
- Octroyé par Marc Gervais, un jésuite canadien qui admirait Pasolini, le pape Paul VI fit annuler cette décision.
- Nous renvoyons à l’article de Christel Taillibert, cf. note 14, qui expose et cite les différentes critiques qui sortirent à l’époque. Nous nous focaliserons sur les critiques émanant du monde religieux, en lien avec l’obscénité.
- René de Ceccatty : « Pasolini résumait lui-même l’histoire comme une “histoire religieuse : un Dieu qui arrive dans une famille bourgeoise : beau, jeune, fascinant, les yeux bleus. Et il aime tout le monde”. […] Pasolini a résumé plusieurs fois son film : “Il s’agit de l’arrivée d’un visiteur divin dans une famille bourgeoise. Cette visitation met en l’air tout ce que les bourgeois savaient d’eux-mêmes ; cet invité est venu pour détruire” », René de Ceccatty, Sur Pier Paolo Pasolini, Roquecor, Éditions du Scorff, 1998, p. 107.
- [en ligne] https://www.ilfattoquotidiano.it/2018/09/13/pasolini-50-anni-fa-veniva-sequestrato-per-oscenita-teorema-il-film-che-sconvolse-venezia/4622888/ [consulté le 02/11/22]. Nous traduisons.
- Christel Taillibert, « Théorème (Pier Paolo Pasolini, 1968) », in : Gérard Camy (dir.), Cinquante films qui ont fait scandale, CinémAction, 103, Corlet, 2002, p. 5. Le numéro de la page correspond à l’article téléchargeable [en ligne] https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-02190538/document [consulté le 02/11/22].
- Ibid.
- Cité dans Michelle Chanonat, « Castellucci, la beauté du chaos », Jeu, 158, 2016, p. 72-75. L’extrait cité se trouve p. 75.
- Claudia et Romeo Castellucci, Les Pèlerins de la matière. Théorie et praxis du théâtre. Écrits de la Socìetas Raffaello Sanzio, traduit par Karin Espinosa, Besançon, Les Solitaires Intempestifs, 2001, p. 23-24. L’autrice souligne.
- Sur la question du traitement du texte chez les Castellucci, cf. Bruno Tackels, Les Castellucci. Écrivains de plateau I, Besançon, Les Solitaires intempestifs, 2005, p. 27-31.
- « Dans un communiqué, il [le secrétaire général de l’Institut Civitas] se félicite “de constater que dès la première représentation de ces spectacles obscènes et blasphématoires à Paris, l’indignation des chrétiens se manifeste avec dignité et fermeté et néanmoins sans excès, malgré tout ce que peut écrire une certaine presse spécialisée dans la désinformation. Des jeunes gens issus de mouvements divers ont démontré qu’une belle jeunesse pouvait se coaliser pour défendre l’honneur du Christ à travers une grande réaction spontanée qui s’étendra, je l’espère, de jour en jour” », cité dans « Des fondamentalistes s’attaquent au théâtre de la Ville », L’Humanité, 23 octobre 2011. L’auteur de l’article n’est pas indiqué, [en ligne] https://www.humanite.fr/des-fondamentalistes-chretiens-sattaquent-au-theatre-de-la-ville [consulté le 02/11/22].
- Ruwen Ogien, La Liberté d’offenser. Le sexe, l’art et la morale, Paris, La Musardine, 2007, p. 58.
- Léna Martinelli, « Orestie (comédie organique ?) », de Romeo Castellucci, Festival d’automne à Paris, l’Apostrophe-Théâtre des Louvrais à Pontois, 15 janvier 2016, [en ligne] https://www.franceculture.fr/theatre/orestie-comedie-organique-de-romeo-castellucci-festival-dautomne-paris-lapostrophe-theatre [consulté le 02/11/22].
- Il ne s’agit pas en effet de faire jouer des personnages qui auraient des particularités physiques et mentales par des acteur·rice·s.
- Bruno Tackels, Les Castellucci. Écrivains de plateau I, op. cit, p. 63.
- Bruno Tackels, Pippo Delbono. Écrivains de plateau V, Besançon, Les Solitaires intempestifs, 2009, p. 46.
- Ibid. L’auteur souligne.
- Pippo Delbono, Mon théâtre, Arles, Actes Sud, 2004, p. 162.
- Bruno Tackels, Pippo Delbono. Écrivains de plateau V, op. cit., p. 55. La séquence est longuement décrite par Bruno Tackels, nous renvoyons à son ouvrage pour davantage de détails.
- Ibid., p. 48.
- Nous reprenons ici les citations utilisées par Corinne Fortier et traduites par ses soins, issues de l’ouvrage de Leonetta Bentiviglio, Pippo Delbono. Corpi senza menzogna, Florence, Barbes editore, 2009, in : Régine Atzenhoffer et Margaret Gillespie (dir.), Le Corps dans tous ses éclats, GRAATOn-Line, 22, octobre 2019, p. 308.
- Pippo Delbono, Mon théâtre, op. cit., p. 200.
- Pippo Delbono, Regards, traduit par Myriam Tanant, Arles, Actes Sud, 2010, p. 100. Corinne Fortier dit la même chose : « Le théâtre de Pippo Delbono appartient au post-porn en tant qu’il convoque la présence de corps “extra-ordinaires” souvent jugés “ob-scènes” au sens étymologique de ce qui doit rester en dehors de la scène, tandis que le dramaturge montre l’érotisme de ces corps, l’obscène étant plutôt l’apanage de nos sociétés patriarcales qui produisent des corps féminisés soumis aux désirs masculins de la même manière que le sont les acteurs vis-à-vis des metteurs en scène », Corinne Fortier, « À corps et à cris : Pippo Delbono ou l’extra-ordinaire théâtre des corps », dans ibid.
- Ruwen Ogien, La Liberté d’offenser. Le sexe, l’art et la morale, op. cit., p. 15.
- Bruno Tackels, Pippo Delbono. Écrivains de plateau V, op. cit, p. 34.
- Ruwen Ogien, L’Éthique aujourd’hui. Maximalistes et minimalistes, Paris, Gallimard, 2007, p. 195.
- IbId., p. 195-196.
- Ruwen Ogien, La Liberté d’offenser. Le sexe, l’art et la morale, op. cit., p. 17. L’auteur souligne.
- Ruwen Ogien, La Panique Morale, op. cit., p. 10-11.