Le séquençage chronologique, faisant émerger des dynamiques évolutives des parures, offre l’opportunité de s’intéresser à la distribution spatiale des morphotypes rencontrés. L’analyse de leur répartition permet de mettre en exergue des aires géographiques qui concentrent un certain nombre de critères typologiques tout en excluant d’autres. Ces aires de distribution privilégiée correspondent à des faciès de la culture matérielle ou à des ambiances typologiques qui peuvent traduire des éléments culturels partagés par plusieurs groupes ainsi que des interactions entre ces groupes. Le cadre chronologique de l’étude permettra d’appréhender la dynamique spatiale de ces faciès.
Modalité d’analyse
L’analyse spatiale des types de parures et l’identification des faciès se limiteront au cadre chronologique, c’est-à-dire entre le VIIIe et le Ve s. a.C., soit entre les Horizon 1B et 3C du phasage général pour les raisons précitées. À ce stade de l’étude, il n’est plus nécessaire de trier les sites et/ou ensembles selon le type d’occupation et le degré de fiabilité puisque l’on travaillera dorénavant à l’échelle du point géographique. Dès lors, les sites non funéraires réintègrent la grille d’analyse. Seuls les contextes mal datés et situés sur plusieurs horizons chronologiques seront exclus de l’étude.
Afin de dégager de grandes tendances typologiques dans l’espace et le temps, on proposera une synthèse cartographique des types pour chaque horizon à partir des cartes des répartitions de chacun des types (Annexes II). Leur analyse offre des résultats satisfaisants quant à l’identification d’ambiances typologiques sur l’ensemble du territoire.
Horizon 1B (800/775 – 725/675 a.C.) : la transition Bronze-fer
La distinction de faciès par l’étude de la répartition de certains types de parures est peu aisée pour cet Horizon 1B dans la mesure où le nombre de gisements concernés et le volume d’objets bien identifiés restent limités. De plus, la nécropole du Causse (n° 305) concentre à elle seule la grande majorité des artefacts de cet horizon1. Une fois ces limites interprétatives établies, il est tout de même possible d’émettre quelques remarques à partir de la carte de synthèse des types rencontrés sur la zone d’étude (fig. 81).
En premier lieu, la distribution spatiale d’un petit nombre de morphotypes ne connaît pas de logique particulière dans la mesure où ils sont peu nombreux et qu’on les rencontre dans la plupart des sites de cet horizon. On évoquera notamment les anneaux en alliage cuivreux de formes variées (An.1.A, An.2.A, An.3.A, An.4 et An.5), les perles en alliage cuivreux, en verre, en ambre, en os ou en roche (Pe.1.A/B/D/E/G, Pe.3.B.1, Pe.4.A, Pe.5.A et Pe.6.B) et, enfin, les boutons hémisphériques à barrettes ou à griffes (Bt.2.A/B). On peut également ajouter à cette liste les quelques fragments de bracelets, souvent difficilement reconnaissables, mais appartenant à des individus ouverts ou fermés de formes simples (Br.1.B/C/D, Br.5.C et peut-être Br.8.A). Enfin, l’épingle à tête vasiforme (Ep.22) de la nécropole de Barranco de la Peña (n° 89) ne peut être associée à un faciès précis car ce type circule très largement à l’ouest des Alpes et dans le Midi de la France durant tout le Bronze final et le début du Premier âge du Fer2.
En revanche, on peut noter que plusieurs types de parures se concentrent plus nettement à la frontière orientale de la zone d’étude. Le petit groupe de sites concernés a livré préférentiellement une grande variété d’épingles en alliage cuivreux de types divers (Ep.1.A, Ep.2.A, Ep.3, Ep.4, Ep.5.A, Ep.8, Ep.9, Ep.10, Ep.11.A et Ep.12), des bagues de section plate (Ba.1.B), des boucles d’oreille rubanées (Bo.5), des boutons plats ou hémisphériques (Bt.1, Bt.3.B) des torques ou fragments à tige torsadée (To.15 et To.18.A), des perles larges (Pe.1.H) et enfin des pendeloques en “8” ou en rouelle (Pen.1 et Pen.6). À l’exception des épingles de type “du Roc” dont on suppose qu’elles trouvent leur origine dans le Tarn, les autres morphotypes cités connaissent tous des parallèles dans le Midi de la France, comme cela a déjà été mentionné lors de leur étude. Bien que l’appréhension d’un faciès commun à tous ces sites demeure difficile du fait de l’indigence dont souffrent les données, il est tout de même intéressant de constater que la répartition de ces parures correspond, dans une certaine mesure, aux limites spatiales d’autres types de vestiges. Ainsi, les productions céramiques du Bronze final IIIb de la région des Causses et d’une partie de l’Albigeois participent à un faciès plus largement répandu dans le Languedoc et rattachable au groupe Mailhac I3. La distribution privilégiée de types de parures dans la moitié orientale de la zone d’étude témoignerait donc de la perduration, au Premier âge du Fer, des contacts entretenus avec le sud-est de l’actuelle Occitanie (départements de l’Aude et des Pyrénées-Orientales). La fibule à double ressort (Fi.5.A.1) du Causse (n° 305) constitue un indice supplémentaire du rattachement de cette région avec le Languedoc puisque des exemplaires similaires sont connus à Mailhac à la même période4. Concernant les rites funéraires, l’étude menée par S. Adroit a permis également de mettre en évidence un groupe s’étendant du Languedoc au Tarn au cours de son étape 2 (800-725 a.C.), et qui couvrait aussi la zone catalane de l’Espagne5. Bien qu’en l’état, il soit impossible de discuter des autres groupes qu’elle a pu identifier en raison du manque de contexte à parures pour la période considérée, on a déjà pu établir que les pièces inédites mises au jour dans la nécropole de Los Castellets II à Mequinenza (Saragosse) restent très proches typologiquement de celles découvertes dans le Castrais. Dès lors, ces maigres indices semblent indiquer une répartition dépassant les limites établies par les seuls rites funéraires. L’individualisation d’un groupe par S. Adroit situé aux confluences du Cinca, du Sègre et l’Èbre, ne trouve pas d’éléments probants pour le mobilier de parure6. La nécropole de Los Castellets II paraît s’insérer en revanche dans la sphère typologique qui couvre les régions tarnaises, languedociennes et catalanes que l’on nommera “catalano-languedocien”7.
Horizon 2 (725/675 – 575/550 a.C.) : les premiers marqueurs du Premier âge du Fer
L’accroissement du nombre de données disponibles permet de dégager des zones de distribution privilégiée des types de parures et de rendre de compte d’au moins quatre faciès typologiques différents, voire plus (fig. 82).
Le premier et le plus facilement lisible se trouve à l’Est, entre Sud lotois, Tarn et Comminges. Il fait suite au faciès “catalano-languedocien” déjà observé dans cette même zone lors de l’horizon précédent dont il en conserve quelques critères, comme les diverses morphologies d’épingles (Ep.3, Ep.4, Ep.5, Ep.8 et Ep.9). Le point principal commun qui rapproche les sites à parures de cette aire, ce sont les torques à terminaisons recourbées (To.5, To.10, To.18 et To.20) et à crochets (To.17, To.19 et To.24), dont les quelques déclinaisons de la tige ne dessinent pas de logique distributive. Les torques mises au jour dans la nécropole d’Arihouat (n° 148) sont du même type, soulignant par là même le rattachement du site à ce faciès typologique. Ce constat à partir du seul mobilier de parure est donc là encore divergent de celui observé pour les rites funéraires qui tendrait à isoler un groupe culturel dans la région du Comminges8. À l’intérieur de ce large faciès, également incarné par des bracelets (Br.6.A et Br.12), des fibules (Fi.13.A.3 et Fi.13.A.7),des épingles (Ep.6, Ep.7, Ep.13 et Ep.17) ou des boutons (Bt.1 et Bt.3.A), quelques parures se signalent par leur concentration exclusive dans les sites du département du Tarn. Ce lot comprend les fibules serpentiformes (Fi.4), les “cônes launaciens” et les torques composites sertis de perles en ambre (To.25). Comme on a déjà eu l’occasion de le mentionner lors de leur étude, ces types connaissent une large diffusion principalement centrée sur le Languedoc occidental, voire jusqu’en Catalogne pour les fibules serpentiformes ou les torques à perles en ambre9. Ainsi, ce faciès et les sites tarnais de manière plus significative, appartiendraient à un ensemble “catalano-languedocien” ou “pré ibéro-languedocien” plus large. Ces critères discriminants se développent au moins jusqu’à la moitié sud du Lot comme en témoigne le fragment de torque composite à chaînette (To.24) découvert dans la grotte des Igues de Magnague à Carrenac (n° 198)10.
À la suite de P.-Y. Milcent, on peut s’interroger sur une possible progression de ce faciès vers le nord du département du Lot11. En effet, quelques objets provenant de cette région demeurent difficilement associables à un faciès précis. C’est le cas des bracelets fermés à section hémisphérique (Br.8.A) ou des torques à crochets en alliage cuivreux (To.4.A) qui connaissent une vaste distribution puisqu’on en rencontre aussi bien dans les sites languedociens que dans ceux du Centre de la France12. Toutefois, les datations pour les exemplaires languedociens situent leur apparition dans cette région dès la transition Bronze-Fer, tandis que les modèles de France du Centre sont rattachés par P.-Y. Milcent à son groupe 2b du Ha D1-2, qui se forme vers le tout début du VIe s. a.C. Ces éléments de datation invitent à émettre l’hypothèse que ces parures apparaissent d’abord dans le Languedoc avant de connaître une distribution dans le Centre de la France. Dès lors, on peut supposer que les individus présents dans le cadre d’étude et datés de l’horizon 2B marquent une étape intermédiaire dans cette adoption progressive.
C’est dans la moitié nord lotoise que l’on rencontre également des parures principalement diffusées dans la partie septentrionale du cadre géographique. Ce faciès se matérialise par la répartition des bracelets, brassards ou anneaux de jambe à nodosités (Br.9.A.1, Br.9.B, Br.10.A et Br.11), connus aussi bien vers les contreforts du Massif central dans le site Bédat à Dubans (n° 205) que dans le nord de la Gironde dans l’habitat de l’Isle-Saint-Georges (n° 164). On peut ajouter à la distribution de ces parures annulaires en alliage cuivreux celle des exemplaires en lignite ou en terre cuite (Br.24.A et Br.25) qui se rencontrent dans la même aire de diffusion avec une extension vers le Centre-Ouest, comme dans le site du Combe de Vaux à Échebrune (n° 114).
Un peu plus au sud, la distribution de fibules en fer à pied droit terminé par un bouton (Fi.10.B.4) indique l’existence d’un faciès régional autour du Néracais en Lot-et-Garonne à partir de l’horizon 2B. La fabrication locale de ce type de fibule en fer ou en alliage cuivreux semble être validée par la découverte sur l’habitat de Chastel à Aiguillon (n° 248) d’un possible moule bivalve de fibule à pied droit bouleté en alliage cuivreux daté autour de 600 a.C.13. Malgré une concentration de ces fibules dans le département du Lot-et-Garonne, on notera qu’un exemplaire de même type a été mis au jour dans la sépulture 6 du tumulus L.3 d’Ossun (n° 287), témoignant de contacts entre ces deux régions. De manière plus générale, l’étude de la répartition de ces fibules interroge les groupes culturels observables par le prisme du rite funéraire qui place les nécropoles lot-et-garonnaises à l’intersection d’un groupe “catalano-languedocien” et d’un groupe d’Aquitaine méridionale14. Pourtant, le mobilier de l’horizon 2B (puis celui de l’horizon 3A), amène plutôt à une lecture différente, individualisant le Néracais des autres entités constatés.
Concernant les parures des deux versants des Pyrénées, la reconnaissance de faciès est bien moins lisible et mal assurée. En effet, les nécropoles des Pyrénées centrales françaises et de la moyenne vallée de l’Èbre partagent quelques caractères communs, invitant à les rattacher à une même ambiance typologique. C’est le cas des boutons plats à bélière (Bt.1), très largement distribués dans les sites associables au faciès “catalano-languedocien” mais, surtout, les bracelets “en armilles soudées” (Br.1.D) et des fibules à double ressort (Fi.5.A.1), fortement répandus dans cette région. Néanmoins, cette considération se heurte, premièrement, au faible nombre de critères mis en jeu et, deuxièmement, au fait que les parures du versant français donnent une place majeure au fer alors que ce métal est quasi absent des pièces navarraises (fig. 65 et 68). La fibule à double ressort (Fi.5.A.1) de la sépulture 2 du tumulus J d’Ibos (n° 282) est un exemple particulièrement parlant de ce phénomène puisque cette dernière est en fer tandis que tous les autres individus similaires de la vallée moyenne de l’Èbre sont en alliage cuivreux, comme dans le tumulus de Corral de Mola à Uncastillo (n° 88) ou dans la tombe 10 du niveau D de la nécropole d’El Castejón à Arguedas (n° 34)15. De plus, ce type de fibule n’est pas un modèle endogène : il apparait sur ces sites de la moyenne vallée de l’Èbre par le biais d’importations venues du littoral méditerranéen de la péninsule Ibérique16. Si l’origine des fibules à double ressort est restée longtemps un sujet de discussion au sein des communautés de protohistoriens espagnols et français17, on rappellera qu’elles sont surtout répandues dans le Golfe du Lion occidental18. Ainsi, la présence de ces modèles sur les sites de Navarre et de Saragosse s’explique sûrement par leur importation via l’Èbre depuis la Catalogne. De même, l’exemplaire connu dans la tombe 338 de Gourjade à Castres (n° 299) aurait plutôt circulé par l’Aude et l’arrière-pays languedocien. Il serait donc tentant de voir dans la fibule en fer d’Ibos une imitation locale de modèles rencontrés par contacts (peut-être ponctuels) avec les populations installées sur les versants sud des Pyrénées. En l’état cette hypothèse ne peut pas être étayée par d’autres types objets puisque le reste du mobilier de parure mis au jour dans les sites Pyrénéens est constitué de pièces disposant d’une large distribution et non associables à un faciès précis19. De fait, on se bornera à voir dans la répartition de ces objets des indices de contacts ponctuels encore précoces.
On doit s’interroger en revanche sur la distribution des fibules à arc à boucle à pied simple ou large (Fi.9.A/B) qui apparaissent dans la seconde moitié du VIIe s. a.C. Il serait tentant d’en faire un type propre aux sites de la haute et moyenne vallée de l’Èbre identifiant, ce faisant, un autre faciès régional. Toutefois, des nécropoles plus au sud, dans la Meseta, comme celles d’Alcolea de las Peñas (n° 9) ou d’Herrería (n° 19), ont livré quelques individus. On peut dès lors se demander si ces fibules ne sont pas un témoignage de contacts soutenus entre les sites de la vallée et de ceux des plateaux de la Meseta.
En revanche, l’identification d’un faciès centré sur les sites de la Meseta est plus évidente. Ce faciès se caractérise par la distribution privilégiée d’agrafes de ceinture en alliage cuivreux à plaque subtrapézoïdale (Ag.1), ainsi que par les premiers modèles à échancrures ouvertes et un crochet (Ag.3) à partir de l’horizon 2B. Les agrafes de type (Ag.1) découvertes dans le tumulus de Corral de Mola à Uncastillo (n° 88) et ou dans la nécropole de la Atalaya à Cortes (n° 39), c’est-à-dire dans la moyenne vallée de l’Èbre, suggèrent que le faciès de la Meseta pourrait s’étendre au nord, au-delà des limites suggérées par A. Lorrio (fig. 14)20. L’aire de répartition dessinée par ces parures comprend également quelques fragments de fils spiralés appartenant probablement à de petites parures pectorales (Pec.2) et deux fibules à pivot (Fi.2). Là encore, la présence de ce type de fibules pourrait traduire des contacts avec les sites du littoral méditerranéen de la péninsule dans la mesure où ces pièces sont largement distribuées dans ces régions, comme l’attestent notamment les sept exemplaires déposés dans la nécropole de Can Piteu à Sabadell (Barcelone)21.
Pour finir, un petit nombre de parures ne présent pas de répartition privilégiée et ne peuvent, de fait, être associable à un faciès précis. C’est le cas des épingles à tête enroulée en alliage cuivreux (Ep.1) ou en fer avec anneau (Ep.2.B), des bracelets ouverts en fer (Br.18), des bracelets à tampons en fer (Br.19) et des pendeloques en rouelle (Pen.6).
Horizon 3 (575/550 – 425/400 a.C.) : le Premier âge du Fer flamboyant
Contrairement à l’horizon précédent, le nombre de données dont on dispose pour l’Horizon 3 permet de segmenter l’identification de faciès selon les différentes étapes chronologiques. Toutefois, la qualité des datations attribuées à certain sites et/ou ensembles n’autorise pas une lecture respectant strictement les limites chronologiques des sous-horizons22. On acceptera donc des distinctions plus larges que celles du phasage général mis en place. Dès lors, l’étude s’intéressera aux sites de la transition entre les Horizons 2B-3A (~600-~550 a.C.) (fig. 83), puis à ceux du milieu de l’Horizon 3 et donc recouvrant l’Horizon 3B (~550-~450 a.C.) (fig. 84), et enfin aux gisements exclusivement représentés lors de l’Horizon 3C (475-400 a.C.) (fig. 85). Malgré sa relative imprécision et bien qu’il autorise quelques recoupements des marges chronologiques, ce découpage permettra déjà de rendre perceptible des phénomènes de contractions ou d’expansions de faciès au cours temps.
Transition entre les Horizons 2B-3A (~600-~550 a.C.)23
Au cours de la première moitié du VIe s. a.C. la distribution des fibules de type Golfe du Lion (Fi.13) dessine les contours d’un faciès à l’est de la zone d’étude. Ces pièces sont surtout répandues dans le Tarn, le Tarn-et-Garonne et dans le Sud lotois pour la France, et dans le tumulus Mas de Flandi à Calaceite (n° 65) en Espagne24. La même zone a également livré une agrafe à échancrures et un crochet (Ag.4), correspondant au type dit “de Mailhac”25, et des torques à tige torsadée à crochets en alliage cuivreux (To.17). Toutes ces pièces renvoient à des éléments de comparaisons connus plus largement dans l’aire ibéro-languedocienne26. Elles matérialisent la continuité du faciès “catalano-languedocien” identifié lors de l’Horizon 2, dont sont repris quelques éléments typologiques. Cependant, dans le courant du VIe s. a.C., ce faciès typologique semble s’étendre vers l’Ouest, probablement via l’axe garonnais, comme en témoigneraient les quelques rares exemplaires de fibules du type du Golfe du Lion déposés dans la nécropole de Grand Jean à Aiguillon (n° 247) et dans celle de Pujaut à Mios (n° 167)27. L’individu lot-et-garonnais daterait du deuxième quart du VIe s. a.C., tandis que ceux de Gironde doivent plutôt se situer entre le milieu et le troisième quart de ce même siècle. Enfin, on relèvera que contrairement à l’Horizon 2, on ne dispose d’aucune donnée pour la région du Comminges et du département de l’Ariège pour la totalité de l’Horizon 3, empêchant de fait de rattacher ces régions à une ambiance typologique précise.
Comme pour l’horizon précédent, on peine à attribuer à tel ou tel complexe culturel certains types de parures que l’on retrouve le long des contreforts du Massif central, de la Corrèze au sud du Tarn. Il s’agit des torques à tige lisse et crochets en alliage cuivreux (To.4.A) et les perles en ambre de forme annulaire (Pe.4.A). On ajoutera à ce groupe d’objets les bracelets en alliage cuivreux à terminaisons spiralées (Br.3.A) qui sont seulement connus dans la nécropole de Flaujac-Poujols (n° 207) et pour lesquels il est possible d’envisager une fabrication locale.
La répartition des diverses parures annulaires à nodosités (Br.9, Br.10 et Br.11) trace à nouveau les limites d’un faciès dans la zone septentrionale du cadre d’étude qui ne s’étend pas au-delà de la Garonne au sud. Toutefois, à la différence de l’horizon précédent, la plupart des individus recensés durant cette première moitié du VIe s. a.C. se concentrent plutôt à l’Ouest, dans les départements de Charente, Charente-Maritime et de Gironde. Pour l’heure, on ne constate pas de logique distributive en fonction du type de nodosité (bossettes, dents, créneaux).
Les fibules à pied droit (Fi.10.B.4) qui caractérisaient le faciès néracais dans l’Horizon 2 semblent s’étendre entre 600 et 550 a.C. Outre les exemplaires toujours présents en Lot-et-Garonne, on retrouve dorénavant des modèles très proches, avec ou sans bouton à l’extrémité du pied (Fi.10.B.1 et Fi.10.B.3), de l’embouchure de la Leyre en Gironde au Toulousain. Cependant, l’aire de distribution de ces fibules semble confinée aux sites de la moyenne vallée de la Garonne. En effet, en Tarn-et-Garonne, la sépulture A du tumulus 16 de la nécropole du Frau (n° 326) a livré une pièce mêlant à la fois un pied droit similaire aux exemplaire précités et un ressort court prolongé par un faux ressort (Fi.10.B.2), élément stylistiquement proche des fibules du Golfe du Lion de l’aire ibéro-languedocienne28. Cette fibule du Frau pourrait marquer le point extrême au-delà duquel les caractéristiques des fibules à pied droit du néracais cessent de s’exprimer. Enfin, au cœur de ce faciès néracais, dans la nécropole de Grand Jean (n° 247)29, les fibules (Fi.14.B.1) mêlant à la fois des critères morphologiques forts des fibules à pied droit (corps en alliage cuivreux, ressort en fer avec un des départs de la corde à proximité de l’arc) et des traits proches des modèles navarro-aquitains (arc cintré massif, pied coudé surmonté d’un large bouton), doivent être perçues comme une imitation locale de modèles pyrénéens. Ces parures indiquent que la région subit les premières influences méridionales vers le milieu du VIe s. a.C. À partir de 525 a.C., on perd la trace de ce faciès néracais, les sites lot-et-garonnais et girondins adoptant alors les codes morphologiques pyrénéens.
C’est plus au sud, vers 575 a.C., qu’apparaissent les fibules navarro-aquitaines en fer (Fi.14.A), aussi bien sur les sites du versant nord des Pyrénées, comme dans les nécropoles d’Ibos (n° 283) ou de Ger (n° 264), que dans la nécropole d’El Castejón à Arguedas (n° 34), en moyenne vallée de l’Èbre. Typologiquement, les premiers modèles se distinguent par leur ressort court ou moyen monté sur un axe peu ou pas débordant. L’aire dessinée par leur distribution comprend également les premiers torques à cannelure et tampons (To.14.A) que l’on rencontre dans la nécropole d’Ossun (n° 287) et probablement déjà dans le Sud landais en raison des multiples exemplaires connus dans la région de Mont-de-Marsan (n° 185)30. Les bracelets “en armilles soudées” (Br.1.D) également connus dans le Sud landais et déjà observés dans la zone pyrénéenne au cours de l’Horizon 2, voient leur distribution s’étendre en direction du sud, dans la moyenne vallée de l’Èbre et jusqu’en Meseta, comme en témoignent les exemplaires de la nécropole de Molina de Aragón à Chera (n° 15)31. Ces trois éléments typologiques réunis contribuent à former un faciès “pyrénéen” cohérent centré sur le versant nord des Pyrénées et la vallée moyenne de l’Èbre. Il succède aux premiers contacts ponctuels entamés lors de l’Horizon 2. En cette première moitié de VIe s. a.C., il ne s’étend au-delà du sud du département des Landes vers le nord, tandis qu’en péninsule Ibérique, quelques pièces commencent à timidement circuler vers la Meseta.
Plus au sud, des interrogations demeurent à propos des fibules à double ressort (Fi.5) et des deux agrafes de ceinture à évidements et un ou trois crochets (Ag.5.D/E). Concernant les fibules, deux exemplaires sont à signaler le long de la haute vallée de l’Èbre, tandis qu’un troisième se trouve plus au sud, dans la sépulture 66 d’El Tesoro à Carabias (n° 13). Comme dans l’horizon précédent, il est peu aisé de rattacher ces pièces à un faciès régional précis dans la mesure où leur présence traduirait plutôt des importations de Méditerranée. Les deux agrafes de ceinture découvertes dans les nécropoles de La Atalaya (n° 39) et d’Ibos (n° 283) appartiendraient au faciès pyrénéen. Cependant, cette répartition pourrait relever du fait que ce sont en réalité les rares agrafes de ce type issues de contextes bien datés et rattachables au seul Horizon 3A. La majorité des autres exemplaires comparables proviennent de sites de la Meseta mal documentés, comme les nécropoles de Carratiermes à Montejo de Tiermes à (n° 51) ou de Valdenovillos à Alcolea de las Peñas (n° 9), tous datés plus largement de l’Horizon 3. On suspectera alors que les deux agrafes provenant de part et d’autre des Pyrénées expriment un processus d’expansion des agrafes qui trouvent leur origine plus au sud, en Meseta.
Il est en revanche possible d’identifier une répartition privilégiée des agrafes à plaque subtrapézoïdale et un crochet (Ag.1) ou a échancrures ouvertes (Ag.3) et des boucles serpentiformes (Bl.5) entre la haute ou moyenne vallée de l’Èbre et la Meseta32. À ces éléments de ceinture s’ajoutent plusieurs lots de perles en alliage cuivreux en anneau, globulaire ou en tige rabattue (Pe.1.A/C/F), ainsi que plusieurs sous-types de pendeloques à petit anneau de suspension (Pen.3.C/D/E/G). Tous ces objets suggèrent qu’il n’y a pas de différence entre le répertoire des parures de la vallée de l’Èbre et de celui de la Meseta d’où se développerait la culture celtibérique. La distribution des fibules à double ressort (Fi.5) pourrait venir confirmer ce sentiment d’homogénéité observé pour la culture matérielle de cette large aire géographique.
Au cours de cette première moitié du VIe s. a.C., plusieurs types de parures échappent, pour l’heure, à l’identification de faciès. C’est le cas des bracelets de formes simples en alliage cuivreux (Br.1.A.2, Br.5.A/B et Br.12.A/B/C) ou en fer (Br.18 et Br.20). Même constat pour les bracelets à tampons massifs ou grêles (Br.6.A.1 et Br.6.B) qui étaient associés au faciès Sud lotois/Tarn/Comminges lors de l’Horizon 2 mais qui sont adoptés à présent dans l’ensemble de la zone d’étude. Enfin, on peut s’interroger sur les boucles d’oreilles à tige rubanée et crochet (Bo.5) qui sont présentes aussi bien à l’est, dans les limites d’influence de l’aire ibéro-languedocienne qu’à l’ouest dans la nécropole du Pujaut à Mios (n° 167). Précédemment rattachées au faciès Sud lotois/Tarn/Comminges, leur adoption sur la façade atlantique aurait-elle profité des mêmes contacts menant à l’apparition des fibules de type du Golfe du Lion à l’ouest ? Si l’on peut poser cette hypothèse, les éléments manquent pour répondre convenablement à cette question.
Horizons 3B élargi (~550-~450 a.C.)33
La stabilité du faciès ibéro-languedocien au cours de la seconde moitié du VIe s. a.C. et de la première moitié du siècle suivant, dans la zone comprenant les départements du Lot, du Tarn-et-Garonne, de Haute-Garonne et du Tarn, est très nettement marquée par la répartition des divers sous-types de fibules de type Golfe du Lion (Fi.13.A.2/3/4/5/6 et Fi.13.B.2/3). Ce qui est en revanche nouveau, c’est que ces pièces sont également présentes en grand nombres dans la plupart des sites de la Meseta (principalement au nord de la province de Guadalajara et au sud de celle de Soria). L’adoption massive de fibules caractéristiques de l’aire ibéro-languedocienne dans cette région de la Meseta paraît étonnante dans la mesure où aucune attestation n’est à signaler plus à l’est, dans les provinces de Huesca et de Teruel, ou à l’est de celle de Saragosse. On peut dès lors supposer que les rares exemplaires découverts en haute et moyenne vallée de l’Èbre résultent d’échanges, via le fleuve, entre la Meseta et la Catalogne. Bien que l’on ne puisse pas complètement exclure la production locale de fibules de type du Golfe du Lion, aucun indice typologique ne vient appuyer cette interprétation. Les torques en alliage cuivreux à tige lisse à crochet (To.4), ceux fermés en fer (To.7), et les perles en alliage cuivreux à tige rabattue courte (Pe.1.D) ou en ambre (Pe.4), sont des éléments exclusivement connus dans le Sud lotois, le Tarn et le Tarn-et-Garonne.
Comme précédemment, les bracelets à terminaisons spiralées en alliage cuivreux (Br.3), et maintenant leurs équivalents en fer (Br.16), se répartissent le long des contreforts du Massif central, dans les nécropoles de Flaujac-Poujols (n° 207) et du Causse (n° 305). Ces sites, et particulièrement celui du Lot, livrent également d’autres pièces qui contribuent à définir un faciès peu visible jusqu’à présent, dans une zone autour de la confluence du Tarn et de la Garonne, que l’on nommera “faciès du Quercy”. Ce faciès est délimité par la distribution des fibules à pied coudé à axe débordant (Fi.15.B), des agrafes à crochet simple (Ag.7) et par des perles fusiforme en os (Pe.5.C)34.
Dans le dernier quart du VIe s. et le début du Ve s. a.C., dans les sites du département du Lot apparaissent des types de parures inconnues jusqu’alors. Il s’agit des fibules à fausse corde à bouclettes (Fi.17), ou à timbale (Fi.20), et de torques à tige creuse (To.23)35. Toutes ces parures renvoient à des pièces de la sphère hallstattienne bien représentées dans le centre et l’est de la France notamment. Si les fibules à fausse corde à bouclette et les torques à tige creuse semblent se cantonner exclusivement à la moitié nord du département lotois, les fibules à timbale touchent un plus large territoire puisqu’on dénombre quelques attestations sporadiques en Charente, dans le Tarn et en Hautes-Pyrénées36.
Les bracelets, anneaux de jambe ou brassards à nodosités en alliage cuivreux (Br.9 et Br.10) et les bracelets en lignite ou terre cuite (Br.24 et Br.25) délimitent un faciès Centre/Centre-ouest au nord de la Garonne. Cette zone comprend aussi les rares fibules zoomorphes (Fi.7) et les boucles d’oreilles à crochet en électrum (Bo.6) de Dordogne et de Haute-Vienne. On associera également à ce faciès les premiers bracelets en alliage cuivreux à tampons tangents (Br.6.C). Ces modèles, répandus dans les sites proches du littoral atlantique, entre la Vendée et le bassin d’Arcachon (plus tardivement en Gironde, lors de l’Horizon 3C), pourraient être liés à l’activité salicole dans cette zone37.
Plus au sud, le faciès pyrénéen reconnu précédemment semble se développer à partir de 525 a.C. au-delà des limites identifiées jusqu’alors. Les fibules navarro-aquitaines à axe peu ou pas débordant (Fi.14.A.1/2/3), auxquelles on ajoutera les torques à tampons et tige polygonale, à entailles transversales, torsadée ou plate (To.11, To.12, To.16 et To.21.A), constituent le noyau typologique de ce faciès qui s’étend de la vallée de la Leyre à la moyenne vallée de l’Èbre. D’autres pièces qui sont morphologiquement bien liées à cette ambiance typologique pyrénéenne se diffusent sur la quasi-totalité du cadre géographique retenu. Les bracelets “en armilles soudées” (Br.1.D) qui perçaient timidement en Meseta lors de l’Horizon 3A, sont alors plus fréquents dans cette région, mais sont également adoptés en Haute-Vienne à la toute fin du VIe s. a.C. ou dans le courant du Ve s. a.C., comme en témoignent les exemplaires des sites de Moissac à Glandon (n° 331) et de Puysséguy à Saint-Mathieu (n° 338)38. Au même moment, cette distribution s’accompagne de celle des fibules navarro-aquitaines richement décorées à axe débordant en fer ou bimétalliques (Fi.14.A.4/5/6/7 et Fi.14.B.2) qui, si elles restent majoritairement représentées dans les sites compris entre la façade nord des Pyrénées et la vallée de la Leyre, sont bien attestées dans la moyenne vallée de l’Èbre et en Meseta et, dans une moindre mesure, dans les gisements situés au nord de la Garonne. On fera un constat similaire pour les torques à tampons à tige lisse ou à cannelures (To.3.A.2/3 et To.14.A/B), à la différence qu’ils ne semblent pas être adoptés par les populations installées au nord de la Garonne.
Il est difficile d’associer à un faciès précis les fibules à double ressort (Fi.5) et celles à arc en boule et pied en “ancre” (Fi.9.C)39. Le fait qu’elles se rencontrent sur l’ensemble du nord-ouest de l’Espagne donne une impression d’homogénéité typologique pour l’ensemble de la zone. Les sites de la moyenne vallée de l’Èbre se distinguent de ceux plus au sud seulement par une perméabilité prononcée aux productions rattachées au faciès pyrénéen.
A contrario, on lit plutôt bien les limites d’un faciès “Meseta” qui se matérialise par la distribution préférentielle des agrafes de ceintures à échancrures fermées (Ag.4.A) et des boucles quadrangulaires à un, deux ou quatre évidements (Bl.1/2/3). Cette zone est aussi marquée par la perduration des bracelets à tampons massifs ou grêles (Br.6.A.1 et Br.6.B), des divers sous-types de perles en terre-cuite (Pe.2.A/B/D/E/F), en verre (Pe.3.A) ou en os (Pe.5.A/B), des pendentifs à double spirales (Pen.5) et des parures pectorales à plaque décorée (Pec.1) ou à fils spiralés (Pec.2), connus lors de l’étape précédente. Cette zone concentre également la majorité des éléments que l’on connaît de manière très ponctuelle ailleurs : fibules de type Acebuchal (Fi.13.A.1) ou annulaire à simple ardillon (Fi.19.A), agrafes de ceinture à plaque quadrangulaire (Ag.2), à échancrures ouvertes (Ag.3), à échancrures fermées et un crochet (Ag.4.B), à évidements et simple ou triple crochets (Ag.5.A/B/D/G) et enfin colliers constitués de perles en alliage cuivreux de formes variées (Pe.1.A/B/C/F). À partir du dernier quart du VIe s. a.C., la région voit l’adoption des fibules navarro-aquitaines richement décorées (Fi.14.A.4/5/6/7), qui, rappelons-le, viennent s’ajouter aux fibules de type du Golfe du Lion (Fi.13) en provenance de l’aire ibéro-languedocienne. Ces objets témoignent de la richesse des liens noués entre les peuples de Meseta et ceux des Pyrénées ou de la Méditerranée.
Enfin, un certain nombre de parures ne sont pas associées à une aire géographique précise. La distribution de plusieurs d’entre elles appelle quelques remarques. C’est le cas des agrafes de ceinture à évidements et trois crochets (Ag.5.E/F) qui ne sont connues qu’au sud d’un axe Aude-Garonne, jusqu’à la Meseta. Ces pièces appartiennent à la famille des agrafes dites “ibéro-languedociennes” dont les autres variantes ont été rattachées au faciès Meseta. Malgré leur concentration dans cette zone de la Meseta, il est délicat de les associer à cette seule région dans la mesure où elles apparaissent vraisemblablement de façon concomitante sur l’ensemble d’une zone comprise entre le sud de l’axe Aude-Garonne, l’aire ibéro-languedocienne et la Meseta40. En l’absence de données chronologiques fiables, on n’associera pas ces pièces à un faciès précis. On fera un constat similaire pour les autres types d’agrafes de ceinture de morphologie proche et pour les boucles leur étant rattachées (Ag.4.C/D et Bl.4/5). Enfin, la dernière remarque concerne les pendeloques en rouelle (Pen.6) qui avaient été liées au faciès catalano-languedocien dans l’Horizon 1B. Dans l’Horizon 3, ces parures semblent être abandonnées par les populations de l’aire ibéro-languedocienne alors qu’elles sont en revanche bien attestées dans quelques sites pyrénéens ou de Meseta à la fin du VIe et au début du Ve s. a.C., comme la sépulture 1 du tumulus de Pau (n° 271) ou la tombe 31 de Herrería (n° 19)41.
Horizons 3C (475–400 a.C.)42
Les faciès identifiés jusqu’à présent sont toujours attestés dans les trois derniers quarts du Ve s. a.C. Les éléments nouveaux introduits au cours de ce sous-horizon 3C, comme les multiples variantes de fibules à ressort “laténien” (Fi.18) ou les agrafes ajourées (Ag.6), se conforment aux distributions déjà observées.
Ainsi, les fibules à ressort “laténien” à arc épais en alliage cuivreux (Fi.18.B.1) semblent se diffuser préférentiellement dans les mêmes territoires que ceux investis auparavant par les fibules de types Golfe du Lion (Fi.13) – c’est-à-dire la zone comprise entre le Sud lotois, le Tarn-et-Garonne et le nord du Toulousain, mais aussi la Meseta – même si quelques rares exemplaires sont recensés en Aquitaine méridionale et septentrionale43. La persistance de fibules du type du Golfe du Lion (Fi.13) et de boutons plats à bélière externe (Bt.1) dans les sites français montre que cette zone reste donc marquée par un faciès ibéro-languedocien.
Conservant leur statut de “carrefour culturel”44, les sites des environs des Causses du Quercy, entre Lot et Tarn-et-Garonne, semblent relever de plusieurs ambiances typologiques endogènes ou exogènes. La première conserve les même marqueurs que précédemment, tels que les fibules à pied coudé (Fi.15.A.1), les agrafes à simple crochet (Ag.7), les bracelets en alliage cuivreux ou en fer à terminaisons spiralées (Br.3 et Br.16) et les perles d’ambre ou d’os (Pe.4.A et Pe.5.C). À ces pièces géographiquement bien implantées et de fabrication que l’on suppose locale, viennent s’ajouter des fibules à ressort “laténien” à arc coudé en fer (Fi.18.A.2). La seconde ambiance typologique, caractéristique de la koinè celtique du Ve s. a.C., est documentée par des parures surtout représentées dans l’est et le centre de la France qui sont rattachables à des productions classiques du Ha D3 ou LT A ancienne, comme les fibules à timbale (Fi.20), les agrafes ajourées (Ag.6) et les torques à tige creuse (To.23). Au-delà du département du Lot, ces pièces touchent aussi les sites septentrionaux de la zone d’étude, comme en témoignent l’agrafes ajourée mise au jour sur le site du Moulin du Fâ à Barzan (n° 113) ou le torque de la sépulture 2 de la nécropole des Planes à Saint-Yrieix-sur-Charente (n° 108)45. On peut y ajouter les fibules en alliage cuivreux pourvues d’un ressort “laténien” et d’un arc plat (Fi.18.B.2). Ces modèles sont également principalement présents dans la moitié nord de la zone géographique, bien que l’on relève quelques exemplaires un peu plus au sud, comme dans les nécropoles arcachonnaises des Gaillards à Biganos (n° 158) et du Truc du Bourdiou à Mios (n° 168) ou celle du Frau à Cazals (n° 326)46.
Bien implanté dans la moitié nord de la zone d’étude, le faciès Centre/Centre-ouest s’exprime toujours selon les mêmes critères, à savoir les parures annulaires en alliage cuivreux à nodosités (Br.9.A.1/2) ou en lignite (Br.24), auxquelles on ajoutera les pendeloques quadrangulaire en roche taillée (Pen.11) de Haute-Vienne. Il est intéressant de signaler aussi la présence de bracelets à tampons tangents (Br.6.C) dans le tumulus T des Gaillards à Biganos (n° 158). L’apparition de ce type, autrefois réservé aux sites côtiers du nord du Poitou, dans la nécropole sud-girondine témoignerait de contacts entre ces régions, probablement via l’activité salicole du littoral comme on a déjà eu l’occasion de le mentionner.
Dans les nécropoles arcachonnaises, on observe donc une frontière poreuse entre une diffusion méridionale d’objets du faciès Centre/Centre-ouest et d’objets pleinement rattachables à un faciès pyrénéen. Ce dernier est toujours marqué par la distribution, entre le Sud girondin et la moyenne vallée de l’Èbre, des fibules navarro-aquitaines, surtout celles à axe débordant serti de disques et pourvues d’un faux ressort (Fi.14.A.6), des torques en alliage cuivreux et tampons bouletés à tige lisse ou à cannelures et incisions (To.3.A.3 et To.14.C) ou en fer à tampons moulurés (To.3.B.2). Les nouveaux éléments qui apparaissent lors de l’Horizon 3C dans cette même zone comprennent les fibules navarro-aquitaines en alliage cuivreux à pied libre et arc plat (Fi.14.C.2), ainsi que des fibules morphologiquement proches des modèles navarro-aquitains auxquels est greffé un ressort “laténien” (Fi.18.A.3). Concernant ce dernier type de fibules, on notera qu’il n’est connu qu’en Aquitaine centrale et méridionale, principalement dans les nécropoles des environs du plateau de Ger et plus sporadiquement au nord, dans la sépulture d’Ambrus (n° 249) en Lot-et-Garonne et dans la sépulture 1 du tumulus H de la nécropole de Pujaut à Mios (n° 167) en Gironde47. Toutefois, malgré cette répartition préférentielle de ces fibules navarro-aquitaines à ressort “laténien”, l’expansion du faciès pyrénéen précédemment identifié est toujours bien lisible pour les seuls sites de l’Horizon 3C. Les multiples fibules navarro-aquitaines mal caractérisées que l’on retrouve jusque dans le tumulus A2 de la nécropole de la Pierre levée à Chenon (n° 102)48, ou les bracelets en “armilles soudées” (Br.1.D) dont l’attestation la plus septentrionale se trouve dans le tumulus de La Motte de Jouveaux à Champsac (n° 330), témoignent de la diffusion de ce faciès bien au-delà du nord de la vallée de la Garonne49.
De l’autre côté des Pyrénées, la lecture des ambiances typologiques est plus difficile à appréhender dans la mesure où les ensembles bien documentés et uniquement datés des trois derniers quarts du Ve s. a.C. sont rares. En l’état, il est peu aisé d’identifier une singularité typologique de la moyenne vallée de l’Èbre, comme en témoignent les fibules navarro-aquitaines en alliage cuivreux à arc épais (Fi.14.C.1), surtout réparties dans le site de la Meseta, et seulement connues dans le piémont sud des Pyrénées par l’individu de la nécropole de Betance à La Sotonera (n° 30)50. Il s’agit vraisemblablement d’une évolution régionale des types canoniques en fer (Fi.14.A). On rencontre le même problème pour les fibules en alliage cuivreux à pied droit “en ancre” (Fi.10.B.5) et dont il faut signaler l’étonnant exemplaire découvert bien plus au nord, sur l’habitat de l’Isle-Saint-Georges (n° 164)51.
On peut en revanche rattacher au faciès de la Meseta les fibules à double ressort et arc en croix (Fi.5.D), celles discoïdes dépourvues de ressort (Fi.8.B) ou les modèles annulaires complets (Fi.19.B), les agrafes de ceinture à évidements et quatre ou six crochets (Ag.5.H/I), les parures pectorales à grandes spirales (Pec.2.C), ainsi que les perles en alliage cuivreux en anneau (Pe.1.A/B).
Enfin, la dispersion de plusieurs types de parures n’est guère interprétable en termes de faciès. C’est le cas des agrafes de ceinture à échancrures ouvertes ou à évidements et un crochet (Ag.4.A et Ag.5.A/D) qui connaissent une large diffusion dans la moitié sud de la France et le nord de l’Espagne. On ne discerne pas non plus de logique distributive pour les bracelets simples en fer (Br.14, Br.18 et Br.20) qui sont mis au jour surtout dans les sites du nord-est de la zone d’étude mais dont l’étude avait montré qu’il subsistait beaucoup d’incertitude sur leur ancrage tant chronologique que spatial. Un autre type de fibule apparu au cours du Ve s. a.C., la fibule discoïde en alliage cuivreux pourvue d’un ressort (Fi.8.A.1), est traditionnellement associé aux sites pyrénéens mais son rattachement au faciès pyrénéen soulève plusieurs interrogations52. Contrairement à ce qui avait été écrit par J.-P. Mohen et C. Éluère dans les années 1970, deux exemplaires de ce type ont été mis au jour en Espagne, sur deux gisements de la Meseta53. Ces mêmes auteurs ont fait remarquer que plusieurs sites de Marne et de Côte-d’Or ont livré de nombreux individus comparables54. Ces fibules ne sont donc pas exclusives des seuls sites pyrénéens. Pour cette raison et en l’état des données régionales disponibles, il paraît préférable de ne les associer à aucun faciès précis. Enfin, la plupart des sites du quart sud-ouest de la France ont livré des fibules en fer à ressort “laténien” à arc en demi-cercle (Fi.18.A.1), preuve que ce modèle est communément adopté par la plupart des communauté de la région dans les trois derniers quarts du Ve s. a.C.
Éléments de synthèse de l’Horizon 3
Il est à présent possible de synthétiser et mettre en perspective les observations faites pour l’Horizon 3.
À l’Est, la pérennité d’un faciès ibéro-languedocien au cours du VIe et du Ve s. a.C. est très nettement lisible. Son emprise territoriale concerne principalement la région tarnaise et le Nord toulousain et constitue l’extrémité occidentale d’un complexe culturel connu dans l’arrière-pays languedocien. Si l’emprise spatiale de ce faciès semble se contracter entre l’Horizon 2 et l’Horizon 3, cela tient surtout à l’absence de données dans le Comminges et l’Ariège. Dans tous les cas, les résultats pour le seul mobilier de parure peuvent être aisément corrélés avec ceux obtenus pour les pratiques funéraires de cette période puisque, comme le note S. Adroit :
“[…] les pratiques funéraires observées dans le Castrais semblent plus tournées vers la Méditerranée que vers l’Aquitaine”55.
Pour autant, les sites implantés à l’intérieur de la zone délimitant le faciès ibéro-languedocien livrent des parures qui trahissent également des contacts avec les régions plus à l’ouest. La présence de pièces caractéristiques des zones atlantiques, que l’on associera volontiers aux faciès du Centre-ouest ou pyrénéen, se rencontrent régulièrement dans la zone orientale du cadre d’étude dans la seconde moitié du VIe s. a.C. À l’inverse, dans le quart sud-ouest de la France, on a relevé des productions associées au faciès ibéro-languedocien dans des sites installés le long de l’axe garonnais jusqu’à la vallée de la Leyre lors de la première moitié du VIe s. a.C.56. Enfin, de l’autre côté des Pyrénées, ce sont les gisements du nord de la Meseta, et plus sporadiquement, ceux de la moyenne vallée de l’Èbre qui attestent une plus large diffusion des parures méditerranéennes, et dont on suppose qu’elles ont transité en péninsule Ibérique le long du fleuve.
Au nord du Tarn, il est possible de distinguer un faciès constitué de pièces surtout réparties dans la région des Causses du Quercy et, plus généralement, dans les marges occidentales du Massif central. Si l’on peut penser que ce faciès trouve son origine dans l’horizon précédent, ce n’est qu’à partir du milieu du VIe s. a.C. qu’il s’affirme vraiment. L’existence de ce groupe typologique est confirmée par un faisceau d’indices observés par ailleurs. Tout d’abord, cette zone se caractérise par des pratiques funéraires très similaires faisant intervenir à la fois l’inhumation ou l’incinération sous tumulus et la déposition d’équidés à l’intérieur de certaines tombes dites “aristocratiques”57. On peut également y associer la répartition des épées à antennes de type LD-F-P1 selon la classification de C. Farnié Lobensteiner, qui traduirait, d’après cette auteure, une production régionalisée entre le Bas Quercy et les Causses tarnaises58. Enfin, on peut se demander si ce faciès quercynois ne manifesterait pas les limites occidentales de la “Culture du sud du Massif central”. Cette culture, mise en évidence par F. Delrieu et P.-Y. Milcent, se caractérise par l’adoption des pratiques funéraires du domaine Nord-Alpin, ainsi que par l’usage de productions artisanales (métalliques ou céramiques) et par le phénomène de la déposition d’offrandes métalliques proches de ceux connus dans le Midi de la France. Elle s’étendrait jusqu’aux Cévennes à l’ouest et de l’Auvergne à l’arrière-pays montpelliérain59. De manière plus générale, la synthèse d’influences culturelles venues du nord et du sud de la France pour la région des Causses quercynoises comme dans le reste du département du Lot, s’illustre parfaitement par l’étude de la répartition des parures. En effet, on a pu mettre en exergue que cette zone livrait des types de parures rattachables tout autant au faciès ibéro-languedocien, qu’à ceux de France Centrale et Orientale, Centre-ouest et pyrénéen dès le milieu du VIe s. a.C.60. De plus, quelques parures que l’on associera aux productions des Causses du Quercy sont attestées plus à l’ouest, témoignant ainsi de relations réciproques entre cette région et celles de Nouvelle Aquitaine.61
Dans la moitié nord du cadre d’étude, on distingue toujours au cours de l’Horizon 3 un faciès centré sur le Poitou-Charente, le Limousin, le Périgord et le nord de la Gironde. Celui-ci, déjà identifié lors de l’Horizon 2, s’exprime bien plus nettement à partir du VIe s. a.C. Cette large zone couvre un espace quasi identique à celui défini pour les céramiques graphitées bien représentées dans le Centre-Ouest et sur la bordure occidentale du Massif central62. Ce faciès semble rester cloisonné au nord de la Garonne durant une bonne partie du VIe s. a.C., tandis qu’à la toute fin de ce siècle et dans la première moitié du siècle suivant, des sites côtiers du Sud girondin ou ceux implantés au sud de la moyenne vallée de la Garonne livrent des parures rattachables au faciès Centre/Centre-Ouest. À côté de pièces caractéristiques du faciès France Centrale/Orientale, cette région livre aussi du mobilier appartenant au faciès pyrénéen, attestant l’expansion de ce dernier à partir du dernier quart du VIe s. a.C. L’adoption de pièces issues du faciès pyrénéen touche particulièrement les sites de Dordogne et de Haute-Vienne ; les éléments découverts au nord de la Charente durant le Ve constituent l’expansion septentrionale maximale du faciès pyrénéen connue à ce jour. La présence de parures pyrénéennes en Centre-Ouest laisse penser que la Dordogne et ses affluents, via l’estuaire de la Gironde, ont pu jouer un rôle déterminant dans la diffusion et l’adoption de ce mobilier. Le phénomène de diffusion vers le nord, dès 525 a.C., des marqueurs typologiques qui définissent le faciès pyrénéen dépasse le cadre de seules parures et se manifeste également sur les décors céramiques de la moitié nord de la Gironde et dans les sites de l’estuaire de la Garonne63.
La reconnaissance d’un faciès pyrénéen est le phénomène le plus marquant de l’étude des faciès de l’Horizon 3. Plusieurs questions se posent quant à son origine et sa réalité culturelle. Les premiers témoins sont tout d’abord confinés aux piémonts nord et sud des Pyrénées et à la moitié sud des Landes. Les pièces provenant des nombreuses nécropoles pyrénéennes françaises laissent penser que l’origine de ce faciès se trouve dans le piémont français plutôt que dans le piémont espagnol, pour plusieurs raisons. La première est naturellement le nombre et la relative homogénéité des parures mises au jour dans les nécropoles du versant français qui appartiennent quasi exclusivement à cette sphère pyrénéenne. La seconde tient au fait que le mobilier qui définit le mieux cette ambiance typologique sont les fibules préférentiellement fabriquées en fer (fibules navarro-aquitaines : Fi.14.A). Or, on a pu noter que l’usage de ce métal est très tôt privilégié, dès le début du l’Horizon 2, pour la confection des parures dans cette région, comparativement aux autres (fig. 65), ce que J.-P. Mohen avait déjà relevé64. En revanche, dans les nécropoles de moyenne vallée de l’Èbre ces fibules se rencontrent en plus petit nombre et avec moins de variantes et, en outre, l’ensemble des parures sont peu souvent fabriquées en fer (fig. 68). Ainsi, la confection d’objets d’apparat en fer s’inscrit volontiers dans la tradition artisanale du versant français. Le piémont pyrénéen français et le Sud landais semblent donc constituer le cœur de ce faciès pyrénéen. Cette hypothèse d’un groupe culturel homogène et stable sur le versant français se trouve corroborée par les pratiques funéraires locales qui voient émerger à cette période l’utilisation de tumulus communautaire renfermant des sépultures à incinération, alors que les nécropoles espagnoles témoignent d’un rite funéraire différent65. Ce que ne traduisent pas les pratiques funéraires en revanche, c’est l’extension de ce faciès jusqu’au Néracais et au Sud girondin à partir du milieu du VIe s. a.C., ce qui a pour conséquence la disparition d’un faciès que l’on percevait le long de la moyenne vallée de la Garonne entre 625 et 550 a.C. On peut rattacher à ce phénomène d’homogénéisation progressive de la culture matérielle d’Aquitaine méridionale et centrale la distribution des épées à antennes de type LP-F-P2 (selon la classification de C. Farnié Lobensteiner) qui sont principalement connues dans des nécropoles pyrénéennes mais aussi dans le site lot-et-garonnais de Tayrac durant la seconde moitié du VIe s. a.C.66. Cette diffusion des types pyrénéens de parures se poursuit à la fin de ce même siècle vers le Centre-Ouest de la France notamment et s’accompagne d’un mouvement similaire dans les formes et les décors céramiques, comme on a déjà pu le mentionner67. De l’autre côté des Pyrénées, le développement de ce faciès vers le sud se lit nettement dans les nécropoles de la Meseta, dans la zone dite celtibérique.
Les fibules navarro-aquitaines mises au jour dans les sites implantés sur les marges occidentales du Massif central et dans le Castrais, bien qu’en plus faible proportion, attestent que ces peuples entretiennent également des contacts avec l’aire du faciès pyrénéen68. Dans une certaine mesure, on peut mettre en parallèle ce fait avec la répartition des épées à antennes de type LP-F-P3 (toujours d’après C. Farnié Lobensteiner) qui touche tout le quart sud-ouest de la France entre la seconde moitié du VIe et le Ve s. a.C.69.
Il est possible de percevoir une extension encore plus à l’est des types pyrénéens. Là encore, les sites tarnais et la vallée de l’Agout semblent jouer un rôle pivot dans la diffusion vers la Méditerranée des critères stylistiques pyrénéens. C’est ce que signifient les deux fibules provenant de la nécropole de Saint-Julien à Pézenas (Hérault), qui appartient pleinement au complexe culturel ibéro-languedocien. Ces fibules découvertes dans les tombes 149 et 234 semblent être des imitations locales de fibules navarro-aquitaines à axe serti de perles (Fi.14.A.4) ou de disques (Fi.14.A.6)70. La distribution, dans cette zone, de fibules adoptant des codes stylistiques à la fois ibéro-languedocien et pyrénéen, telles que les modèles de type Golfe du Lion à long ressort et arc plat décoré (Fi.13.A.6), illustrés par exemple par la fibule de la sépulture 533 du Causse (n° 305)71, atteste le rôle du Tarn comme carrefour commercial et culturel.
Si le cœur du faciès pyrénéen semble se situer dans le piémont français, le cas des sites de la moyenne vallée de l’Èbre demeure difficile à cerner. Bien que les gisements montrent qu’indubitablement, la région est fortement soumise à une influence culturelle pyrénéenne dès le deuxième quart du VIe s. a.C., puisqu’ils livrent des fibules navarro-aquitaines, ainsi que des types de torque surtout répandus sur le versant français, on y trouve aussi des morphotypes que l’on rattacherait a priori à la culture matérielle de la Meseta. Les parures de cette zone témoignent donc d’une grande mixité stylistique de laquelle n’émerge aucun faciès local clairement identifiable. Ce constat diverge de celui observé pour les pratiques funéraires qui mettent en évidence un groupe dans la moyenne vallée de l’Èbre72. Dès lors, on peut s’interroger sur le fait que cette mixité typologique régionale pourrait être un critère déterminant de l’identification d’un groupe culturel et dont l’homogénéité se traduit justement par la diversité qui le compose.
Pour autant, la concentration de certaines parures dans le nord de la Meseta semblent délimiter l’emprise géographique usuellement retenue pour discerner la Celtibérie. Toutefois, les limites du faciès celtibère sont moins nettes pour les parures qu’elles ne peuvent l’être pour d’autres témoins archéologiques, tels les pratiques funéraires, la morphologie des habitats (les castros) et l’équipement militaire. Comme on vient de le mentionner, plusieurs types de parures appartenant à ce faciès sont connus en dehors des limites admises, comme en moyenne vallée de l’Èbre, mais aussi plus à l’est, dans les provinces de Teruel et de Saragosse. Outre les pièces pleinement associables à cette culture, les sites régionaux ont livré des parures qui, a priori, appartiennent à la sphère pyrénéenne (fibules navarro-aquitaines), à la sphère ibéro-languedocienne (fibules Golfe du Lion) et, plus généralement, aux sites côtiers méditerranéens (fibules à double ressort). La présence importante de ces pièces dans les sites de Meseta souligne le fait que la Celtibérie est marquée par des types exogènes qui témoignent de contacts soutenus, soit directement, soit de proche en proche, entre les populations du nord de la Meseta et leurs voisines. Enfin, l’analyse de la distribution des parures du nord de la Meseta ne permet pas de retrouver, en l’état de la documentation, la tripartition de la Celtibérie telle qu’elle est démontrée par A. Lorrio à partir des panoplies militaires (fig. 8).
L’étude de la répartition du mobilier de parure questionne ainsi les limites de la culture celtibérique, qu’il faut peut-être envisager moins tranchées que celle proposées par les modèles actuels73. Ces derniers tendent à identifier les origines culturelles de la Celtibérie, au début du VIe s. a. C., dans une zone comprise entre le Haut-Tage/Haut-Jalón et Haut-Douro. Elles se matérialisent par l’apparition des premiers castros, l’implantation des nécropoles à incinération et par une homogénéité typologique du mobilier céramique et métallique74. L’expansion de cette culture au-delà de la cordillère Ibérique au nord, dans les sites installés au sud de la moyenne vallée de l’Èbre, ne serait observable qu’à partir de la fin du IVe ou au milieu du IIIe s. a.C. Elle marquerait la “celtibérisation” tardive des peuples de la culture des “Champs d’Urnes”75. Cependant, des parures rattachées au faciès de la Meseta sont connus dans les sites de la moyenne vallée de l’Èbre ; d’abord en petit nombre dès la fin du VIIe ou le début du VIe s. a.C. (Horizon 2), puis dans le courant du VIe et Ve s. a.C. (Horizon 3) lorsque leur diffusion devient plus soutenue.
Cette perméabilité entre les marqueurs culturels de la Celtibérie et le groupe de la moyenne vallée de l’Èbre (culture des “Champs d’Urnes”) s’observe également, dans une moindre mesure toutefois, dans les pratiques funéraires. On associe à la Celtibérie les nécropoles à incinérations individuelles, aux sépultures déposées en fosse, et pouvant être signalées en surface par une stèle, et dont la topographie, faite d’alignements de tombes, laisse apparaître des “rues” de circulation (Aguilar de Anguita, Navafría ou Alpanseque). Les nécropoles de la moyenne vallée de l’Èbre se distinguent par la déposition d’incinérations individuelles dans les loculi encerclés par une structure de pierre ou d’adobe, le tout recouvert par un tumulus (parfois empierré) de faible dimension (El Castejón à Arguedas ou El Castillo à Castejón). Toutefois, cette distinction des pratiques funéraires n’est pas toujours aussi nette et les deux régions connaissent une certaine diversité dans les modes d’enfouissement des défunts76. Il arrive que des nécropoles celtibériques partagent des caractéristiques répandues plus au nord. C’est le cas par exemples de celles de Herrería III (n° 19) ou de Prados Redendos à Sigüenza (n° 25) qui connaissent la pratique de la déposition funéraire sous tumulus. À cela s’ajoute le fait que la nécropole d’Herrería III est caractérisée par une superposition stratigraphique des sépultures plutôt que par un développement en extension, comme c’est le cas pour la nécropole d’El Castejón (n° 34). Ainsi, malgré de réelles divergences, on observe donc quelques traits similaires et ponctuels dans les pratiques funéraires de la Meseta et de la moyenne vallée de l’Èbre dès le VIe s. a.C.
Appréhender les différences dans les modèles d’implantations des habitats entre l’aire celtibérique et de celle de la moyenne vallée de l’Èbre est en revanche plus délicat. L’érection de castros fortifiés est connue dans les zones situées à proximité du fleuve mais la topographie régionale bien distincte de celle de la Meseta – impliquant des solutions architecturales et une emprise territoriale différentes – ainsi que la documentation partielle pour les sites de la moyenne de l’Èbre, empêchent encore de dégager une vision d’ensemble77. Il parait donc prématuré de proposer une séparation nette ou, au contraire, de voir une homogénéité entre les habitats de la Celtibérie et de ceux de la culture des “Champs d’Urnes”.
Néanmoins, à partir des quelques éléments mis en évidence, principalement par le mobilier de parure et, dans une moindre mesure, par les pratiques funéraires, on peut émettre l’hypothèse que certains critères qui distinguaient jusqu’à présent les limites de la culture celtibérique devaient être mouvants. Dans tous les cas, les modèles théoriques actuels ne rendent pas compte d’une frontière diffuse entre la zone usuellement reconnue comme le centre de la culture celtibère (Haut-Tage/Jalón et Haut-Douro) et la culture des “Champs d’Urnes” de la moyenne vallée de l’Èbre entre le VIe et le Ve s. a.C.
Bilan
L’un des premiers enseignements que l’on doit retenir de cette étude est que l’identification de multiples faciès bien différenciés n’exclut nullement la caractérisation de phénomènes évolutifs des parures communs à l’ensemble du territoire. Bien que s’exprimant par des morphotypes singuliers, chacun des grands faciès identifiés connaît, tout au long du Premier âge du Fer, une augmentation significative du nombre de parures en circulation, mais aussi un style décoratif toujours plus exubérant et sans cesse renouvelé ou ajusté. Le phénomène le plus intéressant est le fait que de véritables modes peuvent être adoptées partout au même moment sur le territoire, sans pour autant remettre en question la réalité de ces faciès.
L’exemple le plus éloquent concerne le mobilier des faciès ibéro-languedocien et pyrénéen, tous deux répandus de part et d’autre des Pyrénées et associés à des parures aisément identifiables. Plusieurs éléments distinguent les cultures matérielles de ces deux entités, notamment au cours de l’Horizon 3. Si le premier des deux faciès est marqué par l’usage privilégié de l’alliage cuivreux et l’abandon progressif du port du torque, le second donne une place prépondérante au fer tandis que se développent les torques, tant d’un point de vue quantitatif que stylistique. Néanmoins, ils livrent aussi tous les deux des agrafes de ceinture dites de type “ibéro-languedocienne”78. On y constate aussi une évolution morphologique similaire des fibules de types Golfe du Lion pour l’un et navarro-aquitaines pour l’autre : pied coudé uniquement, élargissement de l’arc pour l’ajout de décor, ressort monté sur axe qui tend à s’allonger au fil du temps afin de recevoir des éléments d’ornementation rapportés79.
On pourrait aussi mentionner l’introduction du ressort “laténien” qui est adopté partout sans pour autant bouleverser la stabilité des faciès tels qu’ils sont identifiables dans le registre archéologique. Chaque groupe culturel adapte cette nouveauté technologique à ses propres canons esthétiques. Dès lors, malgré de fortes divergences stylistiques, les parures traditionnelles de ces complexes peuvent être soumises à des modes ou des codes tout à fait comparables.
Le second enseignement qui découle des remarques précédentes est qu’il existe dans le territoire considéré un ensemble de codes appliqués au mobilier d’apparat qui, culturellement intégré par les peuples qui en ont l’usage, se manifestent à plusieurs niveaux. Ces codes mènent à l’adoption de certains critères typologiques et à l’exclusion d’autres sans que ces choix soient parfaitement identiques à l’intérieur d’un même faciès identifié.
Les découvertes de la vallée de la Leyre illustrent bien ce propos. Dès le milieu du VIe s. a.C., le mobilier mis au jour dans les nécropoles comprend des parures associables au faciès pyrénéen, phénomène qui, du reste, est attesté également pour le mobilier céramique et les épées à antennes80. Parallèlement, ces sites ont livré des indices de productions locales, comme les fibules arcachonnaises (Fi.16)81. En outre, ces nécropoles sud-girondines témoignent de contacts avec les populations du Centre-Ouest de la France, incarnés par la présence de bracelets à tampons tangents (Br.6.C), type inconnu dans les zones plus au sud.
De fait, les faciès qui ont été définis ne sont pas monolithiques mais sont plutôt l’expression de tendances fortes pouvant, dans les zones limitrophes, s’interpénétrer. Le cas des sites de la moyenne vallée de l’Èbre l’illustre parfaitement puisque l’on observe que les parures qu’ils livrent émanent a priori de sphères culturelles extérieures.
Pour tenter d’obtenir une image plus juste de la réalité des groupes culturels régionaux, les conclusions ont été comparées avec celles relatives à d’autres éléments de la culture matérielle, notamment les pratiques funéraires, le mobilier céramique ou les épées. Si plusieurs points de concordance ont été perçus, il arrive aussi que les observations ne trouvent pas de correspondances directes avec ces résultats. Ce constat tient au fait que l’ensemble des facteurs qui définissent un groupe culturel peuvent se diffuser suivant des processus d’adoptions et de rejets distincts. Ainsi, la distribution des parures suit une logique différente de celle du mobilier d’armement qui elle-même ne correspond pas à celle d’un type de pratique funéraire particulier. On touche donc ici aux limites de l’exercice qui consiste à définir un groupe culturel en archéologie.
Ces résultats mettent en évidence des interactions culturelles à plusieurs échelles, ou degrés, entre différentes entités culturelles. Peut-on aller plus loin et définir la nature ou les modalités de ces interactions, du point de vue des parures ?
La définition d’une culture en archéologie protohistorique se fonde exclusivement sur l’analyse des vestiges de la culture matérielle. De fait, cette discipline reste dans l’impossibilité d’appréhender tout en pan de la culture immatérielle qui constitue, avec son pendant matériel, la “culture”82. Cette culture, partagée par un ensemble d’individus se reconnaissant d’un même groupe, s’inscrit dans une histoire, c’est-à-dire qu’elle est hétérogène et mouvante. En archéologie, l’étude de l’évolution de la culture matérielle permet d’apprécier cette dynamique fluctuante d’un des aspects de la culture dans le temps et l’espace, tout en évitant l’écueil de tomber dans le culturalisme83. Ce type d’étude, qui rend compte de l’hétérogénéité de la culture matérielle, mène à la caractérisation d’interactions entre plusieurs entités culturelles. Ces interactions traduisent une action de réciprocité entre les entités culturelles qui, là encore, n’est pas figée, mais peut être constamment négociée. Ce processus dynamique n’est pas nécessairement équilibré et peut être asymétrique dans la mesure où les interactions culturelles sont au centre d’un jeu d’influences. Ces contacts, qui peuvent prendre plusieurs formes (migration, conquête, commerce, action d’une autorité politique), doivent être perçus comme un réseau de relations réciproques entre individus84. Ce phénomène d’échanges entre cultures est bien distinct de la notion de transfert culturel qui désigne plutôt le déplacement des critères culturels d’une entité vers une autre. Ce dernier rend compte de la perméabilité des cultures entres elles, entraînant des modifications dans l’entité réceptrice dont le métissage est une des manifestations concrètes85.
D’autres formes de contacts entre cultures (hybridation ou syncrétisme) ont été théorisées en anthropologie culturelle dans le courant du XXe s. a.C. Parmi elles, l’acculturation, principalement définie par M.-J. Herskovits, désigne des “phénomènes qui résultent du contact direct et continu entre des groupes d’individus de culture différente avec des changements subséquents dans les types culturels originaux de l’un ou des deux groupes”86. Il s’agit d’un processus lent et progressif qui comprend l’adoption de traits étrangers puis leur assimilation, entraînant la disparition des critères distinctifs de la culture réceptrice à plus ou moins long terme87. L’ibérisation du Languedoc-occidental et du Roussillon à la fin du Premier âge du Fer ou la celtisation de la péninsule Ibérique à partir de l’expansion de la culture Celtibérique dès le VIe s. a.C. sont des exemples de ce processus d’acculturation88.
À ce stade de l’analyse, il reste délicat de caractériser la nature des contacts qui lient les faciès entre eux en raison de certaines divergences qui demeurent selon les types de vestiges pris en compte (parures, armement, céramiques ou pratiques funéraires). Ce qui est clair en revanche, c’est que des interactions culturelles se jouent entre les entités culturelles installées dans la zone d’étude. Certaines s’apparentent à un phénomène d’acculturation qui se manifeste de manière plus ou moins explicite (relation entre le faciès pyrénéen et le faciès ibéro-languedocien), tandis que d’autres traduisent un processus d’hybridation (culture matérielle de la moyenne vallée de l’Èbre). Dans tous les cas, il est à présent indispensable de penser les relations entre ces faciès comme un réseau pourvu de nombreux nœuds et non pas comme une entité qui se diffuserait de façon unilatérale. Les contacts entre les communautés du sud-ouest de la France et du nord-ouest de l’Espagne ne suivent pas exclusivement un axe nord/sud. Il faut envisager des liens plus complexes respectant un processus dynamique de réciprocité. L’adoption des fibules à pied coudé et à ressort bilatéral dans la région “ibéro-languedocienne” va imprégner les productions pyrénéennes qui vont alors développer de nouveaux codes décoratifs, tel que l’ajout d’un long axe débordant serti. Cette proposition va à son tour se diffuser en Languedoc et dans le nord-ouest de l’Espagne. Au même moment, les sites du nord de la Meseta jouent un rôle majeur dans la diversification stylistique des agrafes “ibéro-languedociennes” que l’on retrouve sur l’ensemble des sites de la moitié sud de la France et du nord de l’Espagne. Loin d’être exhaustifs, ces quelques exemples sont une illustration des interconnexions possibles entre les faciès.
On conclura en rappelant que les résultats obtenus ont permis de mettre en évidence des faciès qui doivent être compris comme des “aires d’influence” que l’on ne saurait accoler au terme de “groupe culturel” dans la mesure où le sujet a été principalement abordé à travers le prisme de la distribution du mobilier de parure. Ces faciès délimitent des zones géographiques à l’intérieur desquelles se jouent des relations de tout ordre menant à des identités collectives différemment partagées sur le territoire. In fine, c’est en proposant une micro-analyse sur les porteurs de ces parures que se dessinera plus précisément la nature de ces relations entretenues à large échelle.
Notes
- Cette nécropole comprend 118 objets de parures sur les 169 pouvant être rattachés à cet horizon 1 (en comptant les objets de type indéterminé).
- Audouze & Courtois 1970, 40-54.
- Carrozza 2000, 13, fig. 3.
- Voir la partie concernant l’étude des fibules à double ressort (Fi.5) ; Taffanel et al. 1998, 297.
- Il s’agit de son groupe 2b1 : Adroit 2015, fig. 168, 465.
- Ibid.
- On choisira ici le terme “catalano-languedocien” plutôt que celui de “ibéro-languedocien”, ce dernier terme consacrant plutôt le lien culturel qui unit les sites méditerranéens de la fin du Premier âge du Fer.
- Groupe 4a2 de S. Adroit : Adroit 2015, fig. 177, 482.
- Graells i Frabregat 2014, fig. 30, 256. Pour les torques sertis de perles en ambre, en dehors des multiples exemplaires connus sur les sites des départements de l’Aude et de l’Hérault, un exemplaire pourrait avoir été mis au jour dans une tombe de Serrat de Balà (Girone) : Py 2016, 162 ; Graells i Frabregat 2014, fig. 31, 261.
- Pl.107 n° 1891.
- Milcent, in : Filippini 2010, 47.
- Py 2016, 85, 86 et 159 ; Milcent 2004, 160.
- Dautant 1985, 256.
- Groupes 4d et 4b de S. Adroit : Adroit 2015, fig. 177, 482.
- Ibos : pl. 147 n° 868 ; Uncastillo : pl.64 n° 4641 et 4642 ; Arguedas : non figuré.
- Rivalan 2011, 259, fig. 284.
- On a longtemps pensé que les fibules à double ressort (Fi.5) étaient apparues en Espagne par l’intermédiaire des marchands phéniciens et de l’implantation de leurs premiers comptoirs commerciaux dans le quart sud-est de la péninsule. Cependant, les dernières études sur la question localisent plutôt leur origine dans le Levant de l’Espagne, vers le Pays Valencien, sans lien directement établi avec le commerce méditerranéen : Argente Oliver 1994, 52-53 ; Graells i Frabegat 2014, 249.
- Graells i Frabregat 2014, fig. 25, 250.
- J.-M. Escudé-Quillet relève que seule une hache à talon découverte à Tarbes pourrait témoigner de contacts entre les Pyrénées françaises et espagnoles au tout début du Premier âge du Fer : Escudé-Quillet 1998, 213-214.
- Lorrio 2005b, fig. 2, 55.
- Graells i Fabregat 2014, 251-252.
- Il s’agit principalement de sites ou contextes espagnols seulement connus par lot d’objets et dont le mobilier de parure ne permet pas de préciser leur datation. On conservera alors les propositions chronologiques disponibles dans la documentation d’origine qui les place entre le milieu du VIe et le milieu du Ve s. a.C., soit dans le courant de l’Horizon 3, entre les sous-horizons 3B et 3C.
- L’analyse développée ici s’intéresse aux parures provenant d’ensembles datés de la transition des Horizon 2B-3A ou uniquement de l’Horizon 3A.
- Pl.59 n° 4495.
- Parzinger & Sanz 1987, non paginé, abb.1 n° 10.
- Pour l’origine et la distribution des fibules du type du Golfe du Lion, voir : Schüle 1969, karte 21 ; Rivalan 2011, 332-333 et 367, fig. 184.
- Incinération 8 d’Aiguillon : pl.124 n° 2746 ; sépulture 4 du tumulus F et tumulus B de Mios : pl.92 n° 37 et n° 45.
- Pl.212 n° 1989.
- Pl.212 n° 1989.
- Dans la sépulture 3 du tumulus L.7 d’Ossun : pl.151 n° 911.
- Dans la sépulture 3 du tumulus L.7 d’Ossun : pl.151 n° 911.
- On signalera cependant un exemplaire d’agrafes à échancrures ouvertes et décor moulé (Ag.3.D) bien plus au nord, dans l’incinération 2 de la nécropole de Grand Jean à Aiguillon (n° 247) : pl.214, n° 2740.
- L’analyse porte sur les parures issues d’ensembles datés strictement de l’Horizon 3B mais également d’ensembles attribués plus largement à l’Horizon 3.
- En plus des exemplaires lotois, on relèvera que les nécropoles pyrénéennes d’Avezac-Pratt-Lahitte (n° 277) et de Bartres (n° 279) ont également livré deux exemplaires de fibules à pied coudé et axe débordant (Fi.15.B). De même, une agrafe en simple crochet (Ag.7) a été mise au jour dans la sépulture 18-19 la nécropole du Truc du Bourdiou à Mios (n° 168).
- Le fragment de torque de même type mis au jour dans la sépulture de Cablanc à Barbaste (n° 250) n’est pas pris en compte ici dans la mesure où ce dernier est légèrement différent des exemplaires lotois. En effet, contrairement à ces derniers, sa tige est rabattue plutôt que creuse. Enfin son tampon torique le rapproche des productions pyrénéennes connues à la même période. On peut toutefois s’interroger sur la particularité de sa tige qui pourrait résulter d’une synthèse des modèles lotois et pyrénéens : pl.125 n° 171.
- Dans l’enclos 81 du site de Bellevue à Chateaubernard (n° 100) et dans la tombe n° 1057 du Causse à Labrugière (n° 305) et dans la sépulture 4 du tumulus P.2 de la nécropole de Taillan à Barzun (n° 261) : pl.70 n° 1862 ; pl.200 n° 2374 ; pl.129 n° 203.
- Dumas & Constantin 2015, 115-116.
- Pl.217 n° 467 et pl.219 n° 491.
- On notera que, en l’état de la documentation, la répartition des divers sous-types de fibules à double ressort (Fi.5) ne dessine pas de concentration clairement établie propre à chacune des variantes. Enfin, la nécropole d’El Altillo à Aguilar de Anguita (n° 8) située en Meseta et fouillée par le Marquis de Cerralbo au début du XXe s. a.C. a livré une fibule de ce type Fi.9.C. Dès lors, il est prématuré de discuter de l’origine géographique de ces parures.
- Schüle 1969, Karte 20 ; Rivalan 2011, 282; fig. 155.
- Py 2016, 204-205 ; pl.21 n° 3093 et pl.135 n° 268 et 270.
- Les sites et/ou ensembles rassemblés ici sont exclusivement datés de l’Horizon 3C. Cependant, les observations faites lors de l’étude des parures de l’Horizon 3B élargi sont toujours valables pour celles de l’Horizon 3C. La précision apportée par l’étude des seules parures datées des trois derniers quarts du Ve s. a.C. permet de mieux appréhender les changements à l’œuvre lors de la transition Premier-Second âge du Fer.
- On dénombre trois exemplaires de ce modèle de fibule à ressort “laténien” (Fi.18.B.1) en dehors de son aire de distribution privilégiée : une fibule dans la “Région de Mont-de-Marsan” (n° 185), une autre dans le tumulus Tugayé de Ger (n° 265) et une dernière sur le site des Châtelliers à Paizay-Naudouin-Embourie (n° 104) : pl.71 n° 303 ; pl.99 n° 94 ; pl.133 n° 245.
- Lambert et al. 2000, 100, fig. 17.
- Pl.71 n° 305 et pl.72 n° 314.
- Pl.88 n° 15 ; pl.94 n° 64 ; pl.214 n° 2065.
- Pl.93 n° 39 ; pl.125 n° 159.
- Pl.70 n° 301.
- Pl.216 n° 445.
- Pl.37 n° 4564.
- Pl.91 n° 2476.
- Mohen & Éluère 1970.
- Dans la tombe 98 de la nécropole d’Herrería (n° 19) et dans la nécropole de Cabezo de Ballesteros à Épila (n° 79) : pl.27 n° 3262 ; pl.62 n° 4628.
- Mohen & Éluère 1970, 186, fig. 3.
- Adroit 2015, 499.
- Cette observation laisse penser que la vallée de l’Agout faisait le lien entre la vallée de l’Aude et celle de la Garonne et permettait ainsi de connecter l’aire atlantique avec l’aire méditerranéenne.
- Adroit 2015, 509-510.
- Farnié Lobensteiner 2012, 244-246.
- Milcent & Delrieu 2007.
- On rappellera que les parures associées à la sphère culturelle hallstattienne s’expriment plus sûrement dans la moitié nord du Lot.
- Maitay et al. 2009, 320, fig. 11 ; Maitay 2010, pl.IV et Va. En revanche, on ne peut pas discerner à partir du seul mobilier de parure les divers sous-groupes plus largement caractérisés à l’intérieur de cet espace : Maitay et al. 2009, 322, fig. 12.
- Ce répertoire décoratif comprend l’adoption de boutons, de bossettes ou de motifs cannelés associés à des cupules en frise simple ou en trèfle : Dumas & Constantin 2015, 113.
- Mohen 1980, 196, fig. 111.
- Adroit 2015, 503-509 ; il est difficile d’appréhender les pratiques funéraires de moyenne vallée de l’Èbre et de Navarre tant la documentation est ancienne. Cependant quelques fouilles récentes, comme les nécropoles d’Arguedas (n° 34) ou d’El Castillo (n° 37), laissent entrevoir l’utilisation de tumulus individuels de taille moyenne couvrant une structure d’adobe ou de pierre : Royo Guillén 2000.
- Farnié Lobensteiner 2012, 246-247.
- Dumas & Constantin 2015, 113.
- On rappellera que des traces de contacts Est/Ouest ont déjà été perçues à travers l’extension vers la façade atlantique de pièces associables au faciès “ibéro-languedocien” au cours de l’Horizon 3.
- Farnié Lobensteiner 2012, 248-254.
- Si ces fibules sont considérées comme des imitations, c’est en raison de la présence de décors au sommet de l’arc ou du bouton réalisé en or ou en argent. Ces éléments ne connaissent aucune comparaison dans le domaine pyrénéen : Mohen 1980, 218, fig. 120.
- Pl.187 n° 1644.
- Royo Guillen 2000, 42, fig. 1.
- Lorrio 2005b, 55, fig. 2.
- Ruiz Zapatero & Lorrio 2005, 662.
- Royo Guillén 1990, 131 ; Ruiz Zapatero & Lorrio 2005, 670, fig. 4.
- C’est en raison de cette diversité et aussi par le manque de documentation fiable que les travaux sur les pratiques funéraires par S. Adroit ne rendent pas compte de l’existence d’un groupe bien identifiable dans la moyenne vallée de l’Èbre : Adroit 2015, 496, fig. 187.
- On pense notamment aux habitats de hauteur de Bursau (n° 75), Burrén y Burrena (n° 81), La Cruz (n° 82) ou Morredón (n° 83), principalement connus par prospection.
- Schüle 1969, karte 20 ; Cerdeño 1978, 290, fig. 3 ; Mohen 1980, 245-246, fig. 130 et 131 ; Parzinger & Sanz 1987, 173-175, abb. 3 et 4 ; Rivalan 2011, 282, fig. 155.
- Rivalan 2011, 331-332 ; ce rapprochement entre l’évolution morphologique des fibules de type du Golfe du Lion et les fibules navarro-aquitaines ne doit pas faire oublier les différences propres à chaque type. Contrairement aux premières, les fibules navarro-aquitaines ne comprennent jamais les caractères suivants : bouton en cabochon, ressort à un sens de torsion, présence d’un faux ressort, ressort pouvant être à corde externe, et absence d’axe.
- Dumas & Constantin 2015 ; Farnié Lobensteiner 2012, 252, fig. 94.
- On relèvera néanmoins que celles-ci demeurent fortement influencées par les éléments décoratifs issus du répertoire pyrénéen. C’est le cas de leur ressort monté sur axe qui était probablement pourvus de disques et qui rappelle les fibules navarro-aquitaine de types Fi.14.A.5 et Fi.14.A.6.
- Herskovits 1952, 8.
- Sur les limites interprétatives des notions de cultures et l’identification de phénomènes d’acculturation en archéologie voir : Bats 2006, 37-39.
- Barbau & Labrude 2014, 185.
- Une sépulture pourvue de type d’objets issues de cultures matérielles distinctes est un bon exemple de métissage culturel : Barbau & Labrude 2014, 187.
- Herskovits et al. 1936 ; Bats 2006, 30.
- Bats 2006 ; Barbau & Labrude 2014.
- Bats 2006, 36-37.