Cela a toujours été une tradition au Proche-Orient et particulièrement au Levant de naviguer entre plusieurs langues et plusieurs écritures : on y trouve presque depuis le début de l’écriture des inscriptions en hiéroglyphes égyptiens ou en cunéiforme akkadien. Cela a aussi été une habitude, particulièrement, de parler une langue et d’en écrire une autre. Pour ce qui est de la langue, on n’en saisit bien sûr que le choix dans l’expression écrite, et la langue effectivement parlée dans un contexte donné nous échappe presque entièrement, sauf allusion très particulière dans un texte.
Plusieurs facteurs ont joué un rôle dans le multilinguisme et le multigraphisme local. D’une part, pendant près de deux millénaires après l’invention de l’écriture, la langue parlée par les habitants de la côte n’a pas eu d’écriture propre et n’a pas pour autant été transcrite dans une autre écriture. L’écrit était donc réservé aux autres langues. De plus le statut des langues a joué : à côté de la langue parlée, on peut distinguer selon les cas la langue de la puissance politiquement dominante, ou une langue culturellement dominante, ou encore une langue qui, pour des raisons diverses, avait acquis un statut international, sans que cela repose sur une domination politique ou culturelle du peuple qui la parlait.
Quelques exemples parmi d’autres l’illustreront : au début du IIe millénaire, dans la tombe du roi de Byblos Ip-shemu-abi, on a exhumé des objets où son nom et celui de son père, Abi-shemu, de type tout à fait phénicien, sont écrits en hiéroglyphes égyptiens1. Byblos était, depuis le IVe millénaire, en relations étroites avec l’Égypte qui venait y chercher le bois manquant sur les rives du Nil : la ville a subi sur tous les plans l’influence de cette culture prestigieuse et il est possible que le roi de Byblos se soit senti en état de dépendance par rapport au pharaon. Il n’est donc guère possible de démêler la part du politique et du culturel dans ce phénomène.
Au XIVe siècle, la situation est radicalement différente. Aussi bien les cités phéniciennes, vassales de l’Égypte, que les souverains des différents empires dominant l’Orient, Assyrie, Mitanni, empire hittite, écrivent au pharaon en langue babylonienne et en cunéiformes akkadiens, comme l’a montré la correspondance passive du pharaon Amenhotep IV (Akhenaton) trouvée à El Amarna2. Nulle situation de déclin politique n’est à déduire de cet état de fait ni pour l’Égypte, ni pour les Hittites, et l’on ne doit pas fonder là-dessus l’idée que Babylone aurait dominé le Proche-Orient politiquement. Le prestige de sa culture écrite (on a retrouvé dans différents endroits, au Levant comme en Élam, des copies de l’épopée de Gilgamesh) est inversement bien réel3 et a donné à la variante babylonienne de la langue akkadienne un statut de langue internationale. C’est pour cela que le roi de Byblos écrit au pharaon, son Seigneur, en babylonien.
L’invention de l’alphabet probablement, le développement de son usage sûrement, sont liés à la volonté des habitants du monde ouest-sémitique du Levant d’écrire leur propre tradition. Ougarit apporte un exemple particulièrement éclairant : dans cette cité de la côte syrienne, au nord de la Phénicie proprement dite, on a trouvé plusieurs milliers de tablettes de la seconde moitié du XIIIe siècle, dont la moitié à peu près est en cunéiformes logo-syllabiques et en langue akkadienne : il s’agit notamment de tout ce qui concerne les relations internationales, lettres, traités, et notamment les échanges avec l’empire hittite qui dominait la région, ainsi que ce qui relève de la culture babylonienne. Mais l’autre moitié est dans la langue locale, que l’on a baptisée ougaritique, et en écriture alphabétique cunéiforme : ce système servait pour l’administration locale, la correspondance locale, les rituels et l’écriture des mythes locaux. Il y a donc bien un choix identitaire dans le développement de la possibilité d’écrire dans la langue locale4. Il en est peut-être allé de même très tôt plus au sud, en monde proprement phénicien. On a également trouvé à Ougarit des lettres venues de Tyr et de Sidon, en cunéiforme alphabétique mais qui reflètent des traits de langue proprement phéniciens5, qui montrent en tout cas que l’idée d’écrire la langue que l’on parlait était déjà présente.
La situation change au début du Ier millénaire avec le développement de l’usage de l’alphabet linéaire sous la forme commune à tout le Levant que l’on appelle couramment “phénicienˮ. Les témoignages remontant à cette première époque sont relativement rares en Phénicie, qui il est vrai n’a pas été largement explorée, sauf à Byblos où une série d’inscriptions royales remonte probablement à une époque antérieure à l’entrée de la côte phénicienne dans le système de vassalité néo-assyrien6. Mais des inscriptions en phénicien hors de la Phénicie sont sans doute contemporaines, qu’elles émanent d’un milieu louvite anatolien ou qu’elles aient été déposées par les Phéniciens eux-mêmes dans différents sites méditerranéens (Crète, Sardaigne, Malte). Les Phéniciens écrivent donc en phénicien, avec un alphabet phénicien, même si très vite les contacts avec l’empire assyrien ont imposé à la chancellerie des cités l’usage aussi de l’akkadien sous sa forme néo-assyrienne. La présence en Phénicie d’un représentant de l’empereur assyrien est bien attestée sous Assarhaddon et on a des lettres de lui en akkadien, envoyées depuis là où il relate ses relations avec les rois de la côte soumis à l’Assyrie7.
Dès cette époque, l’araméen joue aussi probablement un rôle en terre phénicienne si l’on extrapole la situation attestée par un texte (2 R 18, 26) : quand Jérusalem est encerclée par l’armée assyrienne, il paraît clair au roi Ézéchias de Juda que les négociations avec le chef de l’armée assyrienne doivent se faire en araméen, langue de communication commune aux deux interlocuteurs. De fait l’araméen, loin de s’éteindre lors de la conquête des royaumes araméens de Syrie par l’empire assyrien aux IXe-VIIIe siècle, a connu une expansion inattendue : du fait des déportations de populations araméennes pratiquées par les Assyriens, qui s’opéraient par communautés entières, leur langue s’est répandue à travers tout le Proche-Orient. Des Araméens ont rempli de hautes fonctions dans l’administration assyrienne et l’araméen jouait sans doute dès cette époque le rôle de langue de communication internationale8 qui fut ensuite le sien à l’époque perse. Des documents récemment apparus et publiés montrent que l’administration satrapique perse fonctionnait en araméen en Bactriane9 : il en était certainement de même dans la Transeuphratène et donc en monde phénicien, même si aucun document conservé ne l’atteste. On a ici un cas étonnant de langue internationale dont l’usage ne fut porté ni parce qu’elle était la langue propre d’un pouvoir politique fort ni pour son prestige culturel, somme toute à l’époque bien modeste.
Ce long préambule peut paraître un peu hors sujet, il est cependant important pour situer comment les Phéniciens ont pu appréhender l’usage d’une langue “étrangèreˮ et la navigation entre leur langue locale et les autres. Ils avaient un long passé de multilinguisme, au moins dans l’usage officiel et celui des élites, et sans doute pour tout le monde, dans ces cités qui servaient de carrefour ; en outre, ces marchands qui naviguaient en Méditerranée et parcouraient les routes commerciales de l’Orient, avaient certainement la claire conscience que les langues étaient multiples.
La rencontre entre les Phéniciens et le monde grec n’a pas attendu l’époque hellénistique. Sans même parler des échanges commerciaux de l’époque archaïque à Chypre, en Égée et sur la côte levantine, peut-être reflétés dans les épopées homériques, la culture grecque s’impose en Phénicie même comme une culture dominante dès l’époque achéménide. Les Phéniciens passent ainsi rapidement, dès la fin du Ve siècle, de la mode des sarcophages anthropoïdes de type égyptien (tels celui de Tabnit ou d’Eshmunazor à Sidon10) à celle des sarcophages en forme de theke, importée de Grèce. Mais la conquête d’Alexandre change cependant la donne : il y a désormais adéquation totale entre la langue du pouvoir, la langue de la culture dominante et la langue des contacts internationaux.
Pourtant le grec ne se développe pas dans l’écrit d’affichage de manière évidente à nos yeux11. L’écrit grec ne s’impose vraiment en Phénicie qu’à l’époque romaine : l’inscription bilingue d’Arwad/Arados, qui date du début du règne d’Auguste, est la plus ancienne inscription grecque dans le domaine d’influence de la ville12. Certes il y en a de plus anciennes ailleurs, j’y reviendrai, mais pas en grand nombre. Et, plus curieusement, la majorité des inscriptions phéniciennes de Phénicie date de l’époque hellénistique : dans la ville et le territoire de Tyr, l’écrit phénicien conservé est même presque entièrement d’époque hellénistique13. Il en va de même pour la région d’Arwad, à une beaucoup plus petite échelle : l’inscription de Tartous, sur laquelle je reviendrai, est la plus ancienne et remonte au IIIe siècle. Cela tient au fait que l’on passe d’un écrit d’affichage réservé au pouvoir, et même aux rois, à la pratique des particuliers de faire graver des inscriptions, dédicaces aux divinités ou inscriptions funéraires, et donc à un usage beaucoup plus répandu de l’écrit sur pierre. Or ces deux genres, religieux et funéraire, sont clairement conservateurs : c’est dans les sanctuaires et sur les tombes que l’on a conservé l’usage du phénicien. Inversement, on écrit le grec quand on veut “helléniserˮ, ἑλληνίζειν, pour reprendre une terminologie utilisée en milieu judéen. L’inscription en l’honneur de Diotimos de Sidon14, vainqueur aux jeux néméens, est intéressante à plus d’un égard : gravée vers 200 a.C., c’est une des plus anciennes inscriptions grecques de Phénicie et elle émane précisément du contexte des jeux du gymnase et du stade, symbole de l’hellénisation (1 Mac 1,14 et 2 Mac 4,13-14). Elle a été vue par Renan, mais est depuis considérée comme perdue. Nous y reviendrons.
Quand on pense au bilinguisme, on évoque surtout les inscriptions bilingues. Elles sont pratiquement absentes de Phénicie, si l’on excepte l’inscription d’Arwad déjà citée, qui se situe dans un contexte bien particulier et sur laquelle je reviendrai plus loin. Les inscriptions bilingues peuvent être regroupées en deux ensembles de contexte différent : le premier groupe est celui des bilingues de Chypre, dès l’époque classique, et notamment celles des rois de Kition et Idalion, Milkiyaton et Pummayiyaton15, rois phéniciens mais qui vivent dans une île où le contact entre les deux cultures est très ancien. Il s’agit d’un phénomène local, comme le montre d’ailleurs le fait que certaines inscriptions bilingues sont en phénicien et écriture phénicienne d’une part, grec en syllabaire chypriote de l’autre16. La première inscription de Larnaca tis Lapithou en revanche, se situe en contexte hellénistique17.
Le deuxième groupe comprend les inscriptions provenant de Grèce, auxquelles je rattache aussi la double inscription bilingue de Malte18, même si la raison d’être d’une version en grec y est sans doute moins évidente : elle est certainement liée à l’origine tyrienne des dédicants, sans doute habitués à utiliser le grec dans leurs navigations en Méditerranée orientale. En dehors de celle-ci, ces inscriptions bilingues émanent donc de Phéniciens présents en monde grec, dans les îles de l’Égée, à Athènes et au Pirée, à Démétrias de Thessalie19. Elles sont très majoritairement funéraires. Je ne m’attarderai pas sur ces inscriptions sur lesquelles j’ai déjà écrit20, mais je soulignerai qu’à part l’ex-voto de Délos21, qui est une inscription comportant deux langues qui se suivent, plus qu’une bilingue, les autres dupliquent en phénicien et en grec un texte à peu près identique. J’avais cru pouvoir noter que le texte phénicien était le plus souvent placé en premier, mais l’ordre des versions est moins stable que je ne le pensais. Le texte phénicien donne en général un peu plus d’informations, ne serait-ce qu’une généalogie un peu plus fournie, à la fois parce qu’elle est utile seulement aux compatriotes du défunt et parce que le modèle grec se limite strictement à la mention du patronyme, alors que l’usage phénicien est plutôt celui d’une généalogie développée. On doit relever aussi l’usage d’une phraséologie propre au phénicien, avec parfois une phrase à la première personne qui met l’épitaphe dans la bouche du défunt, ou parce que l’inscription fait mention du mémorial érigé.
La dédicace offerte par le fils du roi de Sidon22, Diotimos23, pour spectaculaire qu’elle soit, s’insère bien dans cet ensemble : le texte phénicien comporte également des détails absents de la version grecque, comme le nom de l’objet dédié et des précisions sans doute juridiques : dans les deux cas, la lecture est discutée mais la présence de ces éléments est certaine.
Enfin, je mentionne dans le même groupe la double inscription déjà évoquée, gravée sur la base de deux cippes provenant de Malte24, particulièrement chère aux phénicisants puisque c’est sur cette inscription que l’abbé Barthélémy a établi le déchiffrement du phénicien25. Là encore, la version phénicienne est plus développée que la version grecque.
Les échanges entre langues ne se limitent pas aux inscriptions bilingues. Si l’on écrit en phénicien, on écrit dans un contexte où le pouvoir et les institutions sont grecques et il a fallu trouver le moyen de rendre ces institutions et concepts. Le phénomène a été très bien étudié en monde romain, pour Palmyre d’une part, pour le monde punique de l’autre26. Mais les inscriptions phéniciennes d’époque hellénistique en fournissent aussi des exemples. On peut citer notamment l’inscription d’Abdmiskar de Sidon27, si du moins on retient l’interprétation que Catherine Apicella et moi-même avions proposée il y a quelques années28. Il porte le titre de RBʿBRLSPT RBŠNY, qui avait fait couler beaucoup d’encre et que nous avons proposé d’interpréter comme “chef de l’au-delà du rivage, chef en secondˮ. Abdmiskar aurait été le second de Philoclès, roi de Sidon, dans sa fonction de commandement sur la confédération des Nésiotes. Quel que soit le titre que Philoclès aurait porté, peut-être “navarqueˮ, il est rendu en phénicien, si l’on accepte notre hypothèse, par la périphrase “chef de l’au-delà du rivageˮ dont le caractère maladroit montre la difficulté à rendre un concept politique étranger au monde phénicien.
Il ne s’agit dans ce cas que d’une fonction, ou un titre, dans une inscription qui suit par ailleurs un modèle traditionnel d’une dédicace phénicienne. Un autre mot, PLG, a également posé des problèmes d’interprétation. D’une racine signifiant “partagerˮ, il a d’abord été traduit dans deux inscriptions phéniciennes d’époque hellénistique de la région de Tyr29 comme signifiant une “divisionˮ administrative, donc un “districtˮ. Mais cette traduction aboutissait à une impasse car on ne savait alors comment rendre compte de la mention d’un district de Laodicée et d’un autre d’Ashtarot pour situer des constructions évoquées dans des inscriptions provenant de la région de Tyr et dont l’une au moins est datée de l’ère de Tyr. La difficulté se résorbe si l’on pense à une “partˮ, un “lotˮ, donc un domaine attribué à un personnage : le sanctuaire est bâti et offert dans le domaine de Laodicos30, et l’on peut même penser à une manière de rendre en phénicien la terre attribuée à un colon macédonien31. Le mot aurait, de façon élargie, été utilisé aussi pour le domaine (du temple) d’Ashtart.
Un autre exemple de transposition d’un mode d’écrit grec en phénicien, de façon plus globale, est fourni par le décret par lequel la communauté des Phéniciens du Pirée32 rendait compte des honneurs qu’elle décernait à un de ses membres, son chef, Shemaʿbaʿal, en remerciement des bienfaits qu’il lui avait procurés, c’est-à-dire la construction du sanctuaire et de son téménos. Le décret est gravé en phénicien même si deux courtes lignes en grec reprennent le nom du dédicataire et de la communauté qui a fait graver la stèle. Il s’agit donc d’une inscription bilingue tout à fait déséquilibrée. Le texte même du décret reprend un modèle grec, avec mention de l’offrande d’une couronne d’or dont le prix est mentionné, l’énumération des raisons qui ont valu à Shemaʿbaʿal un tel honneur, l’évocation de l’affichage du décret au vu de la communauté, la mention des responsables de l’opération et la volonté de remercier celui qui s’est montré généreux envers sa communauté. On est bien dans la logique de l’évergétisme en usage dans les cités grecques. Il n’en est que plus intéressant de voir ce texte écrit en phénicien au Pirée. Mais il est vrai qu’il date de la fin du IVe siècle, et était probablement affiché à l’intérieur du sanctuaire de la communauté des Sidoniens. Le texte comporte un certain nombre de hapax en phénicien, signe qu’il s’agit d’une phraséologie étrangère à l’écrit phénicien connu ailleurs.
Inversement, on doit sans doute renoncer à voir dans le mot dikastès de l’inscription grecque de Diotimos de Sidon, déjà évoquée14, la traduction du phénicien “suffèteˮ33, comme le suggérait Bikerman. Celui-ci est rendu par kritès dans les autres contextes, et notamment dans le titre du Livre des Juges. C’est bien, dans le contexte de l’inscription de Sidon, une fonction judiciaire de type grec que remplissait Diotimos.
La grotte de Wasta, entre Tyr et Sidon, parmi les nombreuses questions qu’elle pose et son intérêt pour l’étude de l’anthropologie religieuse et des cultes de fécondité, qui ont été bien mis en lumière par Corinne Bonnet34, a révélé un graffito particulièrement intéressant puisqu’il est en phénicien, mais écrit en caractères grecs35. Il commémore probablement l’offrande d’un vêtement au dieu Paʿam, par un personnage dont le nom et le patronyme sont phéniciens. Langue phénicienne de l’inscription dit-on tout le temps ? pas totalement cependant puisque justement la filiation est indiquée par le mot Υιος. Le bloc nom-patronyme est donc dans son ensemble en grec, même si les noms sont phéniciens, écrits en caractères grecs. On se trouve ici en présence d’un document qui montre une imbrication particulièrement développée des deux langues, mais en même temps maladroite, signe à la fois du développement de l’usage de l’alphabet grec et de la maîtrise toute relative de la langue elle-même.
Il n’a été question jusqu’ici que des Phéniciens dans ce contexte d’échanges linguistiques qui ne semblent pas concerner les Grecs, peu sensibles à l’intérêt des langues “barbaresˮ. Dans les romans grecs, il est vrai plutôt d’époque romaine, on ne semble même pas envisager que les Phéniciens parlent autre chose que le grec36. C’est ce qui fait l’importance d’un document tout petit, mais très suggestif. Il vient de Tartous, l’antique Antarados, et plus précisément du Tell Ghamqé en face de l’île d’Arados, ar-Ruad, au nord du monde phénicien, dans l’actuelle Syrie. Une inscription y a été découverte en 1897, elle est maintenant conservée au Louvre. Si elle est facile à lire, à déchiffrer, sans beaucoup d’ambiguïté de lecture, son interprétation a fait l’objet de discussions sur lesquelles je ne reviendrai pas ici. La lecture du premier mot comme un anthroponyme de forme grecque, Hermaios ou Hermias, a fait assez vite l’objet d’un consensus. Il est suivi par une expression signifiant qu’il a érigé l’objet sur lequel était inséré ce cartel. La suite a paru très peu claire. La dernière ligne semblait bien porter au centre le mot BN, “fils deˮ, mais on peinait à reconnaître des anthroponymes phéniciens de part et d’autre, ce qui a entraîné des essais d’interprétation laborieux, d’autant plus que l’inscription est gravée en scriptio continua, ce qui autorisait de couper les mots à peu près n’importe où. J’ai proposé, dans une étude37, de lire la troisième ligne Démadès fils de TʾŠL. Le premier anthroponyme, de bonne facture grecque, ∆ηµάδης, est attesté pour un orateur attique, mais aussi en Cyrénaïque, à Athènes, en Thessalie et en Carie38. Le second pose plus de question, mais il n’est clairement pas sémitique. Il s’agit donc aussi en milieu phénicien d’un nom étranger. Le rapprochement le plus clair jusqu’à présent, qui m’a été fourni par J.-B. Yon, est avec le nom Θασιλας attesté en Égée39. La question que l’on peut poser est de savoir qui sont les deux personnages, dédicant et dédicataire40. L’absence de tout ethnonyme ou mention d’origine pourrait d’abord laisser penser que ce sont des habitants du lieu, qui donc n’avaient pas à dire d’où ils venaient. On ne se dit pas “tyrienˮ à Tyr. Mais deux objections peuvent être soulevées. La première est que les Phéniciens prennent parfois un nom grec quand ils sont en milieu grec, mais gardent toujours leur nom phénicien dans la version phénicienne de leurs inscriptions, et ce jusqu’au milieu du IIe siècle (inscription de Malte). Or ici nous sommes sans doute, d’après la forme de l’écriture, au milieu du IIIe siècle. Ce serait le seul cas, au milieu de beaucoup d’autres, où un Phénicien se serait désigné sous un nom grec en phénicien et dans son pays d’origine, et on ne voit guère pourquoi le père, s’il était phénicien, aurait adopté à la place de son nom phénicien un nom étranger, mais non grec. La seconde est que le monument, probablement funéraire, a été fait par quelqu’un qui ne mentionne aucun lien familial avec le défunt, comme si ce dernier n’était pas dans son pays. On pense bien sûr au parallèle avec l’inscription du monument à la mémoire d’Antipatros l’Ascalonite, un Phénicien d’Ascalon auquel un Sidonien avait érigé un monument à Athènes41. Il me semble donc qu’on peut poser l’hypothèse qu’il s’agit d’un Grec, ou en tout cas un étranger au monde phénicien, hellénisé, qui aurait érigé ce monument à un compatriote décédé et isolé, en Phénicie et en phénicien. Si l’hypothèse est avérée, on a là un cas tout à fait exceptionnel, et notamment par l’usage même du phénicien, par quelqu’un qui n’est pas d’origine phénicienne.
Je terminerai sur le dernier monument daté en langue phénicienne (et ici je ne parle bien sûr que du phénicien d’Orient), l’inscription du gymnase d’Arados42, qui date de 25-24 avant notre ère, le début du règne d’Auguste. Il est hautement symbolique que ce soit dans un gymnase, lieu par excellence du vivre à la grecque, que l’on ait ce dernier témoignage, malheureusement mal conservé et difficile à lire. C’est encore une inscription bilingue, une dédicace à Hermès et Héraclès, Hermès et Milqart en phénicien. Mais dans la version phénicienne, l’ordre des éléments n’est plus classique : le nom des divinités est à la fin, comme en grec, alors qu’il est plus couramment au début dans les dédicaces phéniciennes. La datation est en chiffres grecs, et n’est pas exprimée à la manière phénicienne43. Bref, on semble bien avoir ici une traduction en quelque sorte mot à mot du grec en phénicien, par quelqu’un qui ne maîtrisait plus les codes de l’écrit phénicien, sans doute sorti de l’usage : on ne connaît pas d’autre inscription datée après la fin du IIesiècle. Le caractère maladroit de l’écriture en phénicien témoigne sans doute aussi de ce que cette inscription ne se situe plus dans un contexte où elle était courante. Écrire en phénicien dans un gymnase relève donc de la revendication nationaliste et identitaire : il s’agit d’affirmer une forme de “phénicitéˮ là même où on affichait le plus un mode de vie et de culture à la grecque.
Tout au long de l’époque hellénistique, les contacts et les interactions ont donc été multiples entre le phénicien et le grec, et les Phéniciens ont navigué de l’un à l’autre, avant d’adopter clairement le grec dans les cités. C’est une évolution sans doute acquise dans le courant du Ier siècle a.C., si l’inscription d’Arados témoigne bien que le phénicien n’était plus guère en usage au début du règne d’Auguste. Cette évolution n’est cependant pas linéaire, et elle ne témoigne pas de l’abandon par les Phéniciens de leur propre culture. Ces derniers se sont approprié les mythes grecs relatifs à l’origine phénicienne de l’alphabet grec et Cadmos est figuré sur des monnaies de Sidon tendant un rouleau de papyrus à trois Grecs44. C’est bien ainsi leur propre rapport à l’écriture qu’ils valorisent. Europe est représentée sur une mosaïque conservée au musée de Beyrouth, dont la mise en scène correspond au même “cartonˮ que le tableau décrit au début du roman d’Achille Tatius36. L’épigramme agonistique contenue dans l’inscription de Diotimos de Sidon déjà citée14 comporte des références mythologiques (au peuple de Phoronis, à Cadmos, aux Agénorides), inhabituelles dans une inscription de ce type : elles visent à montrer la parenté des Sidoniens avec les Grecs, donc la légitimité de la présence et de la victoire de Diotimos dans des jeux panhelléniques. Le moule grec de l’épigramme est remanié pour valoriser les origines de Sidon. Les Phéniciens ont ainsi adopté la langue grecque comme véhicule de leur propre culture.
Les Phéniciens sont entrés à plein dans le monde de l’écrit grec et certainement aussi dans celui de l’oral, même si nous n’avons pas les moyens de l’appréhender, tout en continuant à pratiquer et à revendiquer leur culture, au moins pendant la plus grande partie de l’époque hellénistique. Au début de l’époque romaine, l’emploi maladroit de la langue témoigne qu’on se situe clairement plus dans le registre de la revendication “nationalisteˮ, si l’on ne craint pas d’employer un mot sûrement anachronique, mais l’état d’esprit est le même. Les Phéniciens se sont approprié la culture grecque, mais le lien symbolique avec leur propre langue restait assez fort pour qu’ils souhaitent l’écrire dans le contexte du gymnase à la fin du Ier siècle a.C. et pour qu’au début de l’empire romain, des légendes en phénicien, LṢR et LṢDN ou LṢDNM soient encore inscrites sur les monnaies de Tyr et de Sidon45. Ce sont des symboles d’un attachement à l’écriture au-delà de son utilisation réelle, comme l’est peut-être la petite épigraphe trouvée à Kharayeb46, sur une céramique que l’on peut dater des IIe-IIIe siècles de notre ère47. Il s’agit probablement d’une pseudo-inscription48 qui, par le souci de graver des signes encore d’inspiration phénicienne, montre l’attachement de son auteur à sa culture d’origine.
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Notes
- Aruz et al. 2008, 57-58. Voir Montet 1928, I p. 165-166 et II, pl. XCVII, no 618.
- Moran 1987. Liverani 1998.
- Roche-Hawley & Hawley, éd. 2012 et 2015.
- Hawley et al. 2015, spéc. p. 231-236.
- Arnaud 1999-2000.
- De petites épigraphes sur céramique, trouvées dans les fouilles de Tell Kazel, datent également du début du Ier millénaire : Briquel Chatonnet & Gubel 2019.
- Voir Luukko & Van Buylaere 2002, 112-114, no 126-128.
- Gzella 2015, 106-124.
- Naveh & Shaked 2012.
- Le Meaux & Briquel Chatonnet 2019.
- Millar 1983, 61 souligne la continuité, dans un premier temps, entre période perse et période hellénistique dans les cités phéniciennes.
- Rey-Coquais 1970, no 4000.
- Briquel Chatonnet 2011.
- Bikerman 1939.
- Sur la vocalisation de ces anthroponymes, Briquel Chatonnet et al. 2015.
- CIS I.89 = KAI 39. Masson 1961, no 220, 246-248. Inscription trouvée à Idalion dans le temple d’Apollon et gravée sur une base de statuette en marbre blanc. Elle fait partie du groupe des inscriptions de Milkiyaton à Rashap-MKL.
- IGL III/1, n° 2778 ; CIS I 95. Une photo du contexte a été publiée par Masson 1977, 324 et d’autres photos de sa mission par Amadasi Guzzo 2015. Pour cette inscription voir aussi Bianco & Bonnet 2016 et Bonnet & Bianco 2018, (spéc. p. 43-44). Lors d’une mission à Chypre menée avec Jimmy Daccache et Robert Hawley, nous n’avons pu retrouver cette inscription, dans un paysage qui a bien changé.
- Gubel et al. 2002, no 178, p. 158.
- Masson 1979.
- Briquel Chatonnet 2012, étude à laquelle je renvoie pour la comparaison des versions phénicienne et grecque de ces inscriptions.
- Baslez & Briquel Chatonnet 1990.
- Kantzia 1980 [1986] ; Sznycer 1980 [1986] ; Sznycer 1999. Sur cette inscription, voir aussi Lipinski 2004, 149-155, Xella 2010 et Amadasi Guzzo 2013.
- À ne pas confondre avec le Diotimos de Sidon de l’inscription agonistique étudiée par Bikerman 1939. L’homonymie témoigne de la popularité des noms propres théophores parmi les Phéniciens qui hellénisent leur nom en grec. Ces formes de nom sont surreprésentées dans leurs communautés, alors qu’elles sont plutôt rares en monde grec. Voir Briquel Chatonnet 1995. Le nom recouvre probablement un théophore en Baʿal. Voir dernièrement Bianco 2015, 60.
- CIS I. 122 et 122 bis. KAI 47. ICO Malte 1 et 1 bis. Sznycer 1975. Gubel et al. 2002, no 178, 158.
- Barthélémy 1758 ; Briquel Chatonnet 2009.
- Bertinelli Angeli 1970.
- P. Bordeuil et E. Gubel dans Gubel et al. 2002, no 78, 86-87.
- Apicella & Briquel Chatonnet 2008.
- Première inscription d’Oum el Amed (Dunand & Duru 1962, 181-184 et Kassis dans Gubel et al. 2002, no 144, 137-138) et inscription provenant de la région de Tyr (Bordreuil 1995, spéc. p. 187-190 et Bordreuil dans Gubel et al. 2002, no 123, 126).
- Apicella & Briquel Chatonnet 2007.
- Il s’agirait alors d’une attribution individuelle. La Phénicie n’a pas donné lieu à fondation de cité ni à l’installation de colons macédoniens (Sartre 2001, 144-145). Y a-t-il pu y avoir un lien avec la proximité de Ptolémais-Akko, seule fondation lagide dans la région (ibid. p. 120) ?
- KAI 60. Gubel et al. 2002, no 176, 156-157. Pour la date, Baslez & Briquel Chatonnet 1991a ; pour l’étude de la phraséologie et la forme du décret, Baslez & Briquel Chatonnet 1991b.
- Apicella & Briquel Chatonnet 2015.
- Bonnet 2015, 279-287.
- Beaulieu & Mouterde 1947-1948 ; Sznycer 1958. Sur le phénomène de l’allographie, notamment en monde phénicien, Briquel Chatonnet 2017.
- Briquel Chatonnet 1992.
- Briquel Chatonnet 2015, où l’on trouvera toutes les interprétations antérieures de cette courte inscription.
- Pour les différentes attestations, voir Briquel Chatonnet 2015.
- IG XII (5) 544 B 2, 59.
- Le nom Hermaios/Hermias a été transcrit avec un sigma final, qui est absent des deux autres noms. Si l’inscription a été pensée en grec, ce qui est probable dans l’hypothèse proposée ici d’une inscription émanant d’un grec, son nom est au nominatif, avec une finale en -Σ, alors que celui de Démadès est au datif et celui de TʾŠL/ Θασιλας est au génitif. Le respect de la flexion est aussi un élément qui plaide en faveur d’un auteur grec, car quand l’auteur est phénicien, ce n’est souvent pas le cas. Voir Briquel Chatonnet et al. 2015, 236.
- CIS I.115. Bonnet 1990.
- Étude détaillée de l’inscription dans Briquel Chatonnet 2019. Voir aussi Briquel Chatonnet 2012. L’hypothèse sur le lieu d’origine de l’inscription, posée dès la première étude (Savignac 1916, 576-579), vient de la fonction de gymnasiarque du dédicant mentionnée dans la version grecque.
- En phénicien, l’expression normale, après la fin de la royauté et donc de la datation par année de règne, est BŠT …. LʿM suivi du nom de la ville : “en l’an … du peuple de …ˮ, qui désigne l’ère d’une cité. Voir Sznycer 1975. Dans cette inscription, l’expression LBNT après le chiffre en grec de l’année (“de la constructionˮ) renvoie sans doute à l’ère de fondation de la ville, au sens grec du terme. Il s’agit encore d’une rétroversion difficile en phénicien d’un concept grec.
- BMC Phoenicia, p. 293 : no 488, pl. XXXV.1. Aussi BnF, MMA, fds gén. 2281, coll. Pellerin : monnaie de Tyr frappée au milieu du IIIe siècle.
- Briquel Chatonnet 1991, 10 (avec les références). Millar 1993, 286 et 290.
- Kawkabani 1973 ; Briquel Chatonnet 1991.
- Elle est inscrite sur un tesson de céramique dans le cadre d’une tabula ansata, qui permet de proposer cette datation.
- Certains signes pourraient ressembler à du phénicien, d’autres non.