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Richesses archéologiques du Bazadais
(14e partie)

Paru dans : Les Cahiers du Bazadais, n° 17, 1969, 3-9.

Canton de Bazas (suite)

Cudos

Protohistoire

Les tumulus de Cudos
Fig. 1. Sites archéologiques de la commune de Cudos.

Il y a un siècle environ, Léo Drouyn signalait, à Cudos, l’existence d’un tumulus, celui de La Roche, situé à proximité du domaine de La Beyrie. À la suite des recherches effectuées par Louis Cadis et par nous-même, nous avons pu inventorier neuf tertres funéraires, et la liste est certainement loin d’en être close. Bien que plus étalé en surface que celui de Marimbault, dont il n’est distant que de trois kilomètres, l’ensemble de Cudos lui est pour l’instant comparable (fig. 1). Les premières fouilles exécutées au printemps 1968 par MM. Y. Marcadal et A. Jerebzoff prouvent, d’autre part, que l’intérêt du site n’est pas moindre que celui de Marimbault. Les tumulus de Cudos sont situés dans la partie septentrionale de la commune, suivant un axe est-sud-est/ouest-nord-ouest, sur une distance d’environ un kilomètre sept cents. On peut distinguer, du nord au sud, deux ensembles et deux tumulus isolés.

Tumulus de Lanusse1

C’est au mois de juillet 1968 que nous avons découvert ces deux tumulus, d’après les indications qui nous avaient été fournies par M. Darroman, propriétaire du tumulus de Deyres.

Pour accéder à ces deux tumulus, il faut, de la R.N. 132, peu avant le passage à niveau de Cudos, en venant de Baulac, prendre un chemin de terre qui part immédiatement après une voie de garage aménagée sur le bas-côté gauche de la route. Ce chemin, encadré de fossés et de talus, longe d’abord à gauche une prairie, puis s’engage dans une forêt de pins. À environ deux cent cinquante mètres de la route, on distingue, sur la gauche, une parcelle attenante au chemin et très nettement délimitée sur tous ses côtés par un fossé et un talus. C’est dans cette parcelle que se trouvent les deux tumulus. L’un est contigu au talus du chemin et occupe l’angle nord-est de la parcelle. De forme hémisphérique très aplatie, il a environ vingt-cinq mètres de diamètre et deux mètres de haut. De la terre semble avoir été enlevée de sa partie sud. Le second tumulus se situe à dix mètres environ du précédent, dans l’angle opposé de la parcelle ; il est moins visible, car il est plus bas et moins large, et surtout parce qu’il a été pratiquement éventré par le tracé des fossés et des talus délimitant la parcelle, qui empiètent sur lui. Seul, un nettoyage complet de l’ensemble permettrait de préciser ses formes et ses dimensions.

Tumulus de Lanusse : Inédits.

Tumulus de Deyres2

Il est situé à sept cents mètres environ des précédents, en direction de l’est. Ce tumulus, qui a fait l’objet de la fouille de MM. Y. Marcadal et A. Jerebzoff, se trouve en bordure du chemin vicinal allant du bourg de Cudos à la R.N. 132, à environ trois cents mètres de cette route. On lui a donné le nom de la propriété voisine. E. Féret a, dès 1893, signalé à Conques, dans le domaine de La Beyrie, un tumulus différent de celui de La Roche dont il est question ci-dessous. Il le situe sur le bord du chemin allant de Cudos à Bazas. Or, le lieu-dit de Conques, qui ne figure plus sur le plan cadastral, correspond actuellement à celui de Monon, voisin de celui de Deyres. Il est donc possible que le tumulus de Conques, dont a parlé E. Féret, et celui de Deyres soient le même, mais Louis Cadis est le premier chercheur à avoir fait mention du tumulus de Deyres de manière précise.

E. Féret, Essai sur l’arrondissement de Bazas, 1893, p. 16.
L. Cadis, “Le Bazadais préhistorique, celtique, gallo-romain et mérovingien”, dans Bulletin de la Société préhistorique française, t. LI, fasc. 9-10, nov. 1954, p. 397 (carte).
J. B. Marquette, “Le peuplement du Bazadais méridional de la préhistoire à la conquête romaine”, dans Revue historique de Bordeaux, 1960, p. 113, note 41, et dans Bazas et le Bazadais, Congrès d’études régionales, Bazas, 1960, p. 23.

Tumulus de La Roche3

C’est le plus anciennement connu des tumulus de Cudos, puisque Léo Drouyn l’a décrit dans son étude sur Les forteresses de terre du département de la Gironde et en a fait mention dans le Dictionnaire archéologique de la Gaule. Différents auteurs, E. Féret, puis E. Piganeau, qui s’en inspirent, en ont parlé à leur tour en le situant au nord-ouest du chemin allant de Cudos à Sauviac, ce qui est erroné. Dom R. Biron en parle aussi dans son Guide archéologique. Le tumulus de La Roche est situé au sud du chemin vicinal allant du bourg de Cudos à celui de Sauviac, à environ trois cents mètres du tournant à angle droit que l’on prend après être passé devant le domaine de La Beyrie. Il est contigu à la route et dans l’angle d’une parcelle délimitée par le talus de la route et un autre talus formant un angle aigu avec le précédent, en direction de l’ouest, et presque en face du chemin conduisant à la ferme de l’Escarpon. Son diamètre de base est approximativement de vingt-cinq mètres, sa hauteur de deux mètres cinquante environ. Il est de forme hémisphérique très aplatie. On l’a, c’est tout à fait regrettable, complanté, il y a quelque temps, de jeunes pins.

L. Drouyn, “Les forteresses de terre dans le département de la Gironde” dans Bulletin de la Société archéologique de Bordeaux, 1874, t. I, p. 126.
Dictionnaire archéologique de la Gaule, t. 1, p. 329.
E. Féret, op. cit., 1893, p. 16.
E. Piganeau, “Essai de répertoire archéologique du département de la Gironde”, dans Bulletin de la Société archéologique de Bordeaux, 1897, t. XXII, p. 68.
Dom R. Biron, Guide archéologique illustré du touriste en Gironde, 1923, p. 70.
L. Cadis, art. cité, p. 397 (carte).
J. B. Marquette, art. cité, p. 113, note 42, et op. cit., p. 23, note 42 (par erreur, cette note a été attribuée au tumulus de Quillet).

Tumulus de Quillet4
Fig. 2.  Site des tumulus de Quillet.

Les cinq tumulus de Quillet sont situés à environ sept cent cinquante mètres au nord-ouest de celui de La Roche. Pour y accéder, il faut prendre le chemin vicinal allant du bourg de Cudos à celui de Sauviac, jusqu’au tournant dont nous venons de parler à propos du tumulus de La Roche.

De l’angle extérieur de ce tournant partent, en direction du nord, deux chemins. On prend celui de droite, puis, à quelques mètres, une nouvelle bifurcation à gauche, qui s’enfonce dans une forêt de pins. À deux cent cinquante mètres de la route, on rencontre, à peu près perpendiculairement au sentier que l’on suit, un chemin creux, bordé de talus et de fossés. En l’empruntant sur quelques mètres vers l’ouest on longe, à droite, les parcelles de pins sur lesquelles se trouvent les tumulus de Quillet. Ces tumulus n’ont, jusqu’à ce jour, fait l’objet d’aucune publication. Louis Cadis, qui les découvrit, les a seulement mentionnés dans son article sur les découvertes archéologiques faites dans le Bazadais, publié dans le Bulletin de la Société préhistorique française, en 1954. Lorsque nous visitâmes le site en sa compagnie en 1957, nous avions alors distingué trois tumulus. Au cours d’une nouvelle visite, faite le 24 décembre 1958, c’est une véritable nécropole composée de six tumulus que nous pûmes étudier à la suite d’un nettoyage du sous-bois.

Les deux parcelles sur lesquelles s’élèvent les tumulus sont très soigneusement délimitées par des fossés et des talus.

Parcelle n° 584 : elle comprend, du nord au sud, quatre tumulus, dont trois sont attenants à la limite orientale de la parcelle :

  • Tumulus n° 1 : contigu au talus, il a environ 50 m de diamètre pour 3 m de haut et une forme relativement aplatie. C’est le plus important de la nécropole.
  • Tumulus n° 2 : tronqué par le talus et le fossé, il n’a plus que 13 m de diamètre pour 0,50 m de haut.
  • Tumulus n° 3 : situé à l’ouest du précédent, son diamètre est de 20 m pour une hauteur de 0,75 m environ.
  • Tumulus n° 4 : à proximité du chemin de terre, tronqué comme les deux premiers, il n’a plus que 20 m de diamètre pour 0,50 m de haut.

Parcelle n° 583 : à l’ouest de la précédente. Elle possède deux tumulus assez curieusement soudés l’un à l’autre et situés dans l’angle sud-est en bordure du chemin :

  •  Tumulus n° 5 : haut de 2 m pour un diamètre de 20 m.
  •  Tumulus n° 6 : haut de 3 m pour un diamètre de 30 m.

Ces deux tumulus n’ont jamais été signalés jusqu’ici.

L. Cadis, art. cité, p. 397 (carte).
J. B. Marquette, art. cité, p. 113 et op. cit., p. 23.

Époque Gallo-Romaine

Le site de Monon

C’est sans aucun doute, avec celui de Taleyson à Bernos, un des sites les plus intéressants du canton de Bazas, par la succession sur le même terrain d’une villa gallo-romaine, puis d’une église et de son cimetière. Comme à Taleyson l’église a disparu, mais le site de Monon a été profondément bouleversé et des fouilles systématiques risqueraient finalement d’être assez décevantes.

Jusqu’en 1792, il y eut, au lieu-dit Conques, une église dédiée à Notre­-Dame, qui était, à l’époque, une annexe de Saint-Martin de Bazas. Lors de la constitution des communes, deux ans auparavant, le territoire de l’ancienne paroisse de Conques fut rattaché en partie à celle de Bazas, en partie à celle de Cudos. L’église et son cimetière furent inclus dans cette dernière commune, puis l’édifice fut vendu et détruit, le cimetière nivelé et le nom même de Conques disparut pour être remplacé par celui de Monon (fig.1).

C’est en 1949, au moment où il effectuait les fouilles de Taleyson, que Louis Cadis eut l’attention attirée sur ce site par le fermier de Monon, M. Andel. Celui-ci, en labourant ses champs, avait, en effet, découvert des monnaies qui s’avérèrent être des bronzes romains du IVe siècle. Depuis cette époque, jusqu’en 1957 au moins, Louis Cadis reçut ainsi périodiquement d’autres monnaies trouvées dans les mêmes conditions. Ce n’est cependant qu’en 1954, après une visite du site effectuée en compagnie de M. Grimal, alors directeur de la Circonscription des Antiquités historiques, que Louis Cadis se décida à entreprendre un sondage. D’après la correspondance échangée à cette époque entre Louis Cadis et Me Cabanne, propriétaire de la ferme de Monon, il semblerait d’ailleurs que ce soit plutôt le fermier, M. Andel, qui ait effectué des fouilles sous la surveillance de Louis Cadis et de son petit-fils, M. H. Daron.

Les notes laissées par Louis Cadis sur ce sondage sont assez laconiques : les travaux auraient eu lieu sur une parcelle dite pièce du cimetière, qui doit correspondre à la parcelle n° 271, section F. Ces fouilles révélèrent :

L’existence de trois couches de squelettes séparées les unes des autres par 0,30 m de terre environ, mais il n’est pas impossible qu’il y en ait eu une quatrième :

  • au niveau supérieur, on découvrit dans une sépulture une bague, une croix, des grains de chapelet et une pièce de monnaie datant du règne de Louis XIII. Ce niveau a donné également des grains de chapelet ou de collier, épars, en verre, en buis et en jais, ainsi que des traces de dépôt de cuivre ou de bronze sur des crânes, restes sans doute de monnaies ;
  • au niveau intermédiaire, L. Cadis recueillit une monnaie du règne de Louis XIII, ainsi que des tessons, dans une sépulture à ciste avec pierres de chant encadrant le squelette et logement pour la tête. Il y a, à Taleyson, un niveau semblable.

L’existence de fondations et en particulier d’empierrements compacts de 10 à 15 cm d’épaisseur reposant sur un lit de moellons de la même épaisseur, ainsi que celle d’un bloc en pierre taillée, assis sur une maçonnerie, qui était peut-être la base d’un pilier.

Dans le champ, à fleur de terre ou mêlées aux squelettes, la présence de monnaies romaines ou modernes. Nous sommes renseignés sur ces monnaies par une lettre de M. Ducasse à Louis Cadis, du 25 octobre 1955, par les notes de fouille et par celles que nous prîmes au cours d’une visite chez L. Cadis. À l’exception d’une pièce d’attribution douteuse du 1er ou IIe siècle, tous les exemplaires trouvés datent du IIIe et du IVe siècle : Valérien (253-260) (1 ex.),

Tetricus père (268-273) (4 ex.), Claude II (268-270) (1 ex.), Constantin I (306-337) (1 ex;), Constance II (337-361) (1 ex.), Gratien (375-383) (1 ex.), ainsi que deux autres monnaies du IIIe ou IVe siècle non identifiées.

Certaines de ces pièces sont actuellement déposées au musée de Villandraut. Nous ignorons le sort des autres.

À ces monnaies romaines s’ajoutaient un denier d’argent de Louis le Pieux, à la légende CHRISTIANA RELIGIO, et des monnaies modernes d’Henri IV et de Louis XIII.

E. Féret, op. cit., 1893, p. 16.
L. Cadis, art. cité, 1954, p. 398. 

Notes

  1. Plan cadastral, section F, n° 84.
  2. Plan cadastral, section F, n° 538.
  3. Plan cadastral, E 1, n° 29.
  4. Plan cadastral, section E 3, n° 583, 584.
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Pessac
Chapitre de livre
EAN html : 9782356136572
ISBN html : 978-2-35613-657-2
ISBN pdf : 978-2-35613-658-9
Volume : 4
ISSN : 2827-1912
Posté le 15/11/2025
8 p.
Code CLIL : 3385
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Licence ouverte Etalab

Comment citer

Marquette, Jean Bernard, “Richesses archéologiques du Bazadais (14e partie)”, in : Boutoulle, F., Tanneur, A., Vincent Guionneau, S., coord., Jean Bernard Marquette : historien de la Haute Lande, vol. 2, Pessac, Ausonius éditions, collection B@sic 4, 2025, 1197-1202. [URL] https://una-editions.fr/richesses-archeologiques-du-bazadais-14
Illustration de couverture • D’après Villandraut : ruine de la tour située à l’angle sud-est de l’ancienne collégiale
(dessin, 1re moitié du XIXe siècle. Arch. dép. Gironde 162 T 4).
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