Certaines contributions de ce catalogue d’exposition concernent notre domaine de recherche. Celle de Wiktor A. Daszewski, “Il paesaggio nell’Egitto greco-romano” (p. 22-25) traite des thèmes nilotiques et prend en exemple la mosaïque de Palestrina en privilégiant l’interprétation du décor principal du sanctuaire1, qui serait la première référence réaliste avec perspective en vol d’oiseau de la vallée du Nil et de son paysage au moment de l’inondation. Dans “L’Egitto fuori dall’Egitto” (p. 26-28) et “La scala e il dio Osiris” (p. 29), G. C. V. reprend une partie des conclusions de son article de la RSAnt, 30, 2000 (cf. supra).
Elle reprend également les grandes lignes de sa publication de 19992 dans le texte (p. 198-208) et le catalogue (VII, p. 209-223) de l’article “Gli ogetti egizi nelle Marche dal periodo piceno a quello romano”. Elle fait ressortir, d’abord, les facteurs géographiques et commerciaux (route de l’ambre) favorable à une diffusion : les contacts du Picenum, à l’époque protohistorique, pourraient donc s’organiser avec Mycènes, mais aussi avec le monde oriental, conformément à l’analyse de G. Garbini3.
Pour l’Égypte, la figure de Bès est connue dans la région (VII.1), ainsi que d’autres amulettes égyptiennes ou égyptisantes (Ptah-Patèque, œil oudjat, Isis lactans, chat, scarabées : VII.2.3.5 à 7) attestées dans le matériel funéraire. La route de l’Adriatique doit être revalorisée par rapport à l’habituelle médiation étrusque. On insiste sur le rôle de Cunero, port de Numana, et d’Ancône dont les contacts avec Tarente, Alexandrie, Rhodes et Délos sont actifs à l’époque hellénistique, mais il nous semble difficile de prouver que le temple dédié à Aphrodite Euploia, déesse “orientalisante” et restauré par un préfet d’Égypte, puisse être lié à Isis Pelagia. Quant aux amulettes, elles jouent un rôle protecteur dans la vie et la mort des personnes, en particulier des femmes ; on notera la présence d’amulettes oudjat sur l’ile de Hvar4.
À l’époque impériale, l’auteur souligne les contacts avec Rome, Aquilée et l’Illyrie. La triade alexandrine est à l’honneur, mais on remarque une résurgence du culte d’Osiris. Les sites côtiers (Ancône, Senigallia, Fano) accueillent les divinités isiaques qui se diffusent le long des voies routières (via Salaria et Flaminia)5. G. C. V. rend hommage aux travaux de G. C. Susini sur l’ambiance cultuelle de la zone et les points de contact possibles : sanctuaires thérapeutiques, Fortuna de Fano, liens avec Aquilée et l’autre rive. Elle date le début de la diffusion du début du Ier siècle p.C. et pense qu’Ancône a eu le premier rôle.
Elle remarque la diversité du matériel. Ainsi, à Treia, on trouve des statues de prix, mais aussi des objets en terre cuite ou en bronze qui pourraient provenir de petites officines locales. Un tableau fait la synthèse des sites à matériel “isiaque”. Puis l’auteur consacre un développement au site de Treia. Elle signale une mosaïque décorée d’un ibis et d’un chien noir au galop (Anubis ?) découverte en 1985 (photo) dans la zone du SS Crocifisso. Elle attribue à Isis (?) une dédicace dominae où Lucretia Sabina fait don d’une conduite d’eau (CIL, IX, 5652) et cite deux épigraphes en relation avec des fonctionnaires romains en Égypte : l’une, funéraire, de Faustine, esclave de Q. Ramnius Martial, préfet d’Égypte (en 117-119 p.C.), l’autre trouvée à Fabriano sur la base d’une statue et dédiée par les citoyens de Treia à leur patron, C. Camurius Clemens, qui fut epistates des sept nomes et du nome arsinoïte en Égypte, sous Trajan.
G. C. V. présente d’autres objets plus significatifs trouvés aux abords du couvent : une statue masculine royale (?) acéphale, une statue de reine ou de prêtresse (?) acéphale tenant le chasse-mouche (VII.9 et 10), un buste acéphale en calcite d’Isis avec nœud et manteau à franges, de provenance inconnue et conservé à Sassoferrato (VII.11), ainsi qu’une tête de Sarapis en marbre de Treia (VII.13). On y ajoutera un bronze d’Harpocrate (G. Bejor, Trea, 1977, p. 83 et 125). L’ensemble de ce matériel l’amène à l’hypothèse un peu forcée de l’existence d’un temple égyptien à fonction thérapeutique sous le sanctuaire chrétien où l’on a retrouvé une série de pièces autour d’une cour avec des ouvrages hydrauliques (sous Trajan ou les Antonins ?).
La présence isiaque s’expliquerait par l’activité économique du lieu et ses liens avec Ancône. Une tête de Ptah de provenance inconnue est conservée au musée d’Ancône (VII.12) ainsi qu’un bronze d’Isis lactans qui serait un rejet d’une production locale (VII.14). Plusieurs petits bronzes sont répertoriés : quatre Isis Fortuna, dont une de Sassoferrato (VII.15) et deux de provenance inconnue : VII.16 qui est une simple Fortune et VII.17, ainsi qu’une statuette trouvée à Canneto di Tronzano et conservée au musée d’Ascoli (VII.18) ; un Apis de Sassoferrato (VII.19) ; un Osiris-Antinoos de provenance inconnue et conservé au musée d’Ancône (VII.20) ; un couple de deux animaux accroupis exhumés à Sassoferrato, où il semble difficile de reconnaître Anubis (VII, 21) ; une série d’Osiris-ouchebtis (VII, 22-23) ou d’ouchebtis (VII, 24-26) dont l’authenticité est suspecte pour certains, bien que reconnue par M. Malaise, “Isis en Occident : thèmes, questions et perspectives d’un colloque”, dans L. Bricault (éd.), Isis en Occident, Leyde-Boston, 2004, 485 ; enfin, un vase millefiori (VII, 27).
- Voir P. G. P. Meyboom, The Nile mosaic of Palestrina, RGRW 121, Leyde, 1995.
- Oggetti, idee, culti egizi nelle Marche. Dalle tombe picene al tempio di Treia, Picus Suppl. VI, Tivoli, 1999.
- Cf. G. Capriotti Vittozzi & G. Garbini, “Un amuleto egizio-filisteo da Cupra Maritima”, Rend. Accad. Naz. Lincei ser. 9, vol. 11, 2000, 529-541.
- Pour d’autres exemples, cf. P. Selem, Izidin Trag, Split, 1997, n° 2.21-2.24.
- Catalogue Iside, Milan, 1997, 375.