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Clownesse(s) fin-de-siècle : sur les traces d’actrices mineures devenues personnages mythiques

La fin-de-siècle voit l’avènement d’une figure qui jusque-là n’existait qu’au masculin : la clownesse. Effigie publicitaire, la clownesse constitue une sorte de double « mineur » de la vedette Belle Époque. En revanche, par son anonymat, elle est l’antonyme de la vedette. On la trouve, par exemple, en tête des programmes du Nouveau Cirque, ou sous forme de produit dérivé, sur des mouchoirs souvenirs que Molier distribue à ses spectateurs fidèles.

Clownesse, le genou sur un tabouret, brandissant une bannière portant l'inscription 'circus mola'.
Dessin de Gerbault ayant servi à illustrer des mouchoirs-souvenirs pour les invités du Cirque Molier en 1892. Ernest Molier, Cirque Molier : 1880-1904, Paris, P. Dupont, 1904, p. 96. (gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France)

La clownerie au féminin intéresse aussi bien les études littéraires que l’histoire du cirque, qu’il s’agira ici de faire dialoguer afin de questionner certaines idées reçues. En effet, les études littéraires se sont penchées sur les déclinaisons fictionnelles de la clownesse, de la Lulu de Champsaur1, à celle de Wedekind2, ainsi que sur ses apparitions picturales3. Des chercheuses comme Sandrine Bazile ou Sophie Basch ont évoqué les actrices qui ont pu inspirer Lulu à Champsaur, sans s’attarder sur ces questions de génétique scénique, car elles avaient pour objectif principal de mettre l’accent sur le travail de l’auteur. Un article plus récent de Filippos Katsanos s’inscrit dans la même perspective : aborder la Lulu de Champsaur comme un être fictionnel, au croisement de deux cultures érotiques, celle de la scène et celle du livre, et voir dans ce personnage la synthèse de deux stéréotypes contradictoires dans les discours masculins, celui de la vierge inaccessible et celui de la prostituée offerte à tous4. Dans toutes ces analyses, l’acrobate, qu’elle ait ou non existé, est écrite et décrite par un auteur, et c’est le prisme de cet auteur qui est examiné. Les articles sur le cirque, quant à eux, prennent pour unique source historique le livre de Tristan Rémy, Les Clowns, qui a le mérite de consacrer un chapitre aux femmes clowns. Néanmoins, ce chapitre est peu documenté, et pour cause : il y a très peu de sources sur ces actrices tombées dans l’oubli. Les repères chronologiques y sont en outre difficiles à établir. S’il nomme Lonny Olchansky, clownesse anglaise du XIXe siècle, d’après Henry Thétard5, ainsi que la française Eva, clown blanc aux côtés de l’Auguste Flappi, sans donner de dates, Tristan Rémy s’attache un peu plus longtemps à décrire une certaine Miss Loulou, anciennement fil-de-fériste, dont la carrière de clownesse et partenaire de son mari Atoff de Consoli a vraisemblablement commencé dans les années 1920-30, bien après l’époque qui nous intéresse ici : son nom de scène est donc probablement une réminiscence des Lulus fin-de-siècle6. Né en 1897, Tristan Rémy considère que la clownesse « a toujours fait exception »7, ce qui est dû selon lui à deux causes : d’une part, « la difficulté à faire-valoir un partenaire qui est un homme » réclame « de la volonté, de l’à-propos, de la souplesse8 » ; d’autre part, la rareté des vocations chez les femmes clowns serait liée à « la crainte du ridicule9 ». Il se félicite que cette crainte soit moins forte chez la jeune génération, et il cite à l’appui deux clownesses en herbe. Ces arguments, qui valent peut-être pour le milieu du XXe siècle, méritent d’être interrogés pour la Belle Époque. D’abord, le duo Auguste-Clown blanc n’y était pas encore installé comme modèle. Certes, ceux qui le créèrent, Foottit et Chocolat, étaient alors à leur zénith. Mais les autres clowns de la fin-de-siècle pouvaient apparaître seuls ou avec des acolytes, plus ou moins nombreux : ce fut le cas, par exemple, d’Agoust, qui fit des numéros, et joua dans des ballets-pantomimes, et même « en bande » avec les Hanlon-Lees. Le duo Clown blanc-Auguste n’étant pas une convention intégrée dans les années 1880-1900, les clownesses n’y furent donc pas forcément des faire-valoir. Ensuite, pour ce qui concerne la crainte du ridicule, on sait qu’un certain nombre d’artistes de scène « mineures », parmi lesquelles les chanteuses épileptiques ou les danseuses de cancan, ne craignaient ni la grimace, ni l’insolence10. Une lecture un peu rapide de ce chapitre de Tristan Rémy a pu conduire à des approximations dans des articles récents. Par exemple, Colette Cosnier-Hélard, en s’y référant indirectement, affirme qu’Yvette Damoiseau Spiessert fut « sans doute la première femme clown » en 1928, et insiste sur « l’inexistence des femmes clowns tout au moins jusqu’à une époque récente11. » Zed Cézard déduit de ce chapitre que les femmes clowns ont été, au départ, cantonnées aux rôles de clowns blancs, ce qui leur permettait « de représenter la raison et la sagesse », et d’incarner « la beauté et la vertu » « qualités socialement considérées comme féminines12 ». Or, qui a lu les Lulu de Champsaur et de Wedekind sait que la sagesse et la raison ne sont pas leurs principales qualités. Mais Lulu n’est-elle qu’un fantasme, une fiction, un mythe ? La clownesse est-elle un personnage théâtral ou romanesque conçu par un ou plusieurs auteurs, ou est-elle un emploi créé par une ou des actrices ? Lorsqu’on examine les costumes, les programmes, ou encore les déclinaisons de la figure de la clownesse dans la peinture ou au cinéma, on s’aperçoit que cette question simple n’est pas aisée à trancher.

L’habit fait-il la clownesse ?

Les mémoires d’Ernest Molier constituent une piste utile pour faire l’archéologie des clownesses sur les pistes françaises. Dès sa première représentation le 21 mars 1880, Molier confie un rôle de clownesse à l’écuyère Alice Lavigne, qui porte pour l’occasion un chapeau pointu, et joue plutôt un rôle de travesti en clown, que de clownesse13.

M. Molier est assis sur un tabouret, une clownesse de chaque côté: Mlle Dezoder à gauche, et Mlle Lavigne à droite.

C’est probablement Léa d’Asco qui inventa14 la fameuse houppette blonde reprise par l’illustrateur Gerbault pour les livrets de Champsaur.

Clownesse en habit de cirque, saluant le public.
Léa D’Asco, Cirque Molier, 1884, dessin de Mars pour Le Monde illustré, reproduit dans Ernest Molier, Cirque Molier : 1880-1904, Paris, P. Dupont, 1904, p. 37. (gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France)

De son numéro de 1884, Molier dit peu de choses : « La jolie Léa D’Asco, de la Renaissance, fit un superbe clown, amusant tout le monde par son bagout et émoustillant mes invités du sexe fort par ses formes suggestives15 ». Chanteuse, actrice, Léa d’Asco semble avoir créé dès 1879 à l’Hippodrome et au cirque Franconi des numéros comiques, vêtue tantôt d’un costume « rouge et noir à papillons diamantés » et d’une « perruque jaune »16, et tantôt d’une « tunique jaune parsemée de dessins grotesques », dont « un superbe papillon aux ailes étendues de chatoyantes paillettes17 ». Molier va, quant à lui, confier les rôles de clownesses à des actrices, des chanteuses, et/ou des acrobates, en veillant principalement à mettre en valeur leurs « formes suggestives ». Il y eut par exemple Melles de Briège et Menty en 188718. Un programme du 9 juin 1892 annonce « l’universelle clownesse et son Groom fidèle » et stipule que « cette année, Monsieur Molier nous présente Melle Mariette Marvielle, aussi grâcieuse que jolie et bien faite, dans un costume suggestif de clownesse, suivie de son groom fidèle, Melle Renée Sonderska19 ». Toutes deux débutent dans des numéros de dressage de la chienne Séra, « élevée en liberté », et du singe Justin. Elles jouent de la guitare, de la mandoline, de la lyre et même des bouteilles. Melle Campbell, « clownesse plantureuse et désopilante20 », leur succèdera en 1894. Molier, connu pour choisir « les plus belles filles de France et de Navarre21 » en renouvelle régulièrement le personnel. Par leur polyvalence (acrobates aux multiples talents, musiciennes, actrices, dresseuses) et par leur passage éphémère dans ce rôle, ces clownesses sont plus proches des danseuses de revue que des vedettes comme Foottit, attaché au Nouveau Cirque et clown à plein-temps.

Champsaur, qui fait partie du cercle de Molier, conçoit sa Lulu en 1888 dans un esprit similaire. Chez ses illustrateurs Chéret, Gerbault et Morin, « l’impression de nu22 » domine. Sur la couverture signée Chéret, le sein semble presque sorti du décolleté. Un léger voile recouvre la croupe de la clownesse.

Personnage masqué brandissant un cœur rouge au-dessus d'une danseuse en vol. En dessous, un homme âgé lit un manuscrit en souriant, tandis que les deux personnages virevoltent au-dessus de lui.
Couverture de Jules Chéret pour Félicien Champsaur, Lulu, pantomime en 1 acte, Paris, E. Dentu, 1888. (gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France)

Gerbault lui dessine un tutu de danseuse ou d’écuyère et un décolleté si plongeant qu’il semble laisser les seins à nu.

C’est aussi Gerbault23 qui signe, pour cette pantomime et pour l’apparition de Lulu dans Les Éreintés de la vie, publiée la même année, la fameuse houppette qui deviendra le trait distinctif de la clownesse, repris ensuite dans les textes narratifs de Champsaur, mais qui n’est pas mentionnée au départ dans la pantomime Lulu comme une caractéristique du personnage. Il y a donc eu probablement un jeu d’influence entre l’illustrateur et l’auteur. À la fois enfantine et phallique, la houppette se dresse sur la tête comme une montagne ou une pâtisserie, cerclée d’un fil et de fleurs. Louis Morin préfère revêtir Lulu d’un chapeau pointu à la manière de Foottit, clown qui incarnera d’ailleurs le rôle d’Arlequin à la création.

Court poème intitulé « Moralité », illustré par trois intervenants du cirque en haut du poème.
Illustration de Henry Gerbault dans Félicien Champsaur, Lulu, pantomime en 1 acte, Paris, E. Dentu, 1888, n. p., [p. 12]. (gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France)
Lulu vu de dos, vêtue d'un chapeau pointu et d'un habit fluide et transparent.
Illustration de Louis Morin dans Félicien Champsaur, Lulu, pantomime en 1 acte, Paris, E. Dentu, 1888, n. p., [p. 33]. (gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France)

Dans la pantomime Les Éreintés de la vie, Champsaur affublera Lulu des deux coiffures superposées.

L’argument du livret Lulu ne lui donne aucune acrobatie à exécuter, et ses jeux de scène sont assez réduits : elle réclame son cœur perdu auprès de Schopenhauer, fait du charme pour le récupérer, s’enfuit avec ruse, et offre aussitôt ce cœur au gommeux Arlequin. On trouve peu de choses sur la manière dont Melle Massoni, qualifiée de « clownesse danseuse » dans le livret, et de « mime » dans la presse, interpréta le rôle lors de la création de Lulu au Nouveau Cirque le 1er octobre 1888. Massoni est une inconnue, si on la compare à ses deux partenaires de scène Agoust et Foottit. Dans Le Charivari, Pierre Véron se contente de regretter que Champsaur ait confié le rôle à « une mime italienne » et non à « une Parisienne parisiennante24 ». Il conclut sa critique en ces termes : « Tout au plus me resterait-il à analyser quelques-unes des toilettes de l’aimable société. Mais, absorbé par la Lulu déshabillée, je n’ai plus pensé à regarder les Lulu de l’assistance ni leurs ornementations variées. Ce sera pour la prochaine occasion25. » On saisit que Melle Massoni n’a donc pas été recrutée pour ce rôle (uniquement) pour ses qualités d’actrice, mais probablement pour sa plastique.

Cha-U-Kao, Karlotta Kiddjah et les autres

Quelles autres artistes ont incarné les clownesses en amont ou en parallèle de l’élaboration du « type » promu par Champsaur ? Lulu, on le sait, est une construction mixte, à la fois scénique, picturale et poétique. Elle est l’attraction faite femme. Danseuse, acrobate, mime, dresseuse d’animaux, trapéziste, voltigeuse à bicyclette et équilibriste, elle synthétise en une femme plusieurs actrices des scènes mineures. Certaines de ses inspirations sont facilement reconnaissables : Lulu danse la jota aragonaise à la manière d’Otéro26, elle présente un numéro de corde japonisant avec « des grimaces amusantes de Guecha27 » et se fait appeler pour l’occasion Yama Vacco, clin d’œil à Sada Yacco. Elle emprunte à Loïe Fuller ses danses lumineuses, serpentines et florales28, ce que fit d’ailleurs aussi une écuyère, Teresa Renz, dans son numéro La dame Blanche, au Cirque d’hiver, en 1895.

Sandrine Bazile, qui rappelle que les contemporains de Champsaur le qualifiaient de « voleur d’idées », mentionne deux femmes de cirque qui auraient servi de modèle à Lulu, sans citer ses sources29. La première, dont le nom de scène était bien Lulu, était trapéziste, et travaillait pour l’entrepreneur de spectacle Farini, principalement en Grande-Bretagne. Il s’agissait en fait d’un homme travesti, dont le sexe fut révélé suite à une chute en 1876 à Dublin, défrayant la chronique dans les journaux. Il avait plus jeune porté le nom de scène El Niño, et dans la vie civile, ceux de Sam Wasgate, Sam Farina ou Sam Hunt. S’il a très certainement inspiré les scènes de trapèze et l’irrésistible pouvoir de séduction de Lulu, qui plaît aux hommes aussi bien qu’aux femmes30, il n’avait ni le costume ni le numéro d’une clownesse31. La deuxième femme de cirque qui fut certainement une source d’inspiration pour Champsaur est Cha-U-Kao, contorsionniste, danseuse au Moulin-Rouge et clownesse au Nouveau Cirque. Malheureusement, les seules traces qui subsistent d’elle sont visuelles – peut-être parce qu’elle a eu plusieurs noms de scène, peut-être parce que le nom Cha-U-Kao a été orthographié différemment et s’avère difficile à retrouver dans la presse. La série photographique que réalise Maurice Guilbert de Cha-U-Kao n’est pas datée : elle y présente une série d’équilibres, torsions, souplesses arrière et écarts. Le costume est celui des acrobates, culotte courte, maillot, collants et chaussons de danse. La coiffure est un chignon qui permet de dégager le visage dans toutes les positions : rien de la clownesse ne perce (encore) ici.

Cha-U-Kao performant un spectacle de contorsionisme.
Maurice Guibert, photographies « Cha-U-Kao », Ma vie photographique : portraits, demeures et voyages, entre 1886 et 1895, Vue 13 F7. (gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France)

Néanmoins, on peut faire le lien entre les exploits de Cha-U-Kao et quelques attributs que Champsaur a donnés à Lulu : il évoque au début du roman « sa force et sa souplesse en gymnastique32 » lorsqu’elle est enfant. Il explique que le couple de saltimbanques qui l’adopte lui disloqua « peu à peu » « les membres », ce dont elle « souffrit d’abord, maltraitée », puis « se délecta d’être applaudie33 ». Champsaur insiste sur « sa souplesse, le torse arqué dans un sens ou dans l’autre », ses sauts périlleux et ses grands écarts. Les « souples torsions de buste34 » de la clownesse envoyant des baisers au public témoignent de ce passé de disloquée. C’est surtout Henri de Toulouse-Lautrec qui a portraituré Cha-U-Kao au cours des années 1890 : donc après les pantomimes et le roman fragmentaire L’Amant des danseuses, mais avant le roman Lulu. Or, toute la différence entre ces œuvres de Champsaur est que les premières font apparaître la clownesse comme une figure haute-en-couleurs et érotique avec un seul numéro à son répertoire, celui du cochon, alors que le roman détaille de multiples numéros. Sur les peintures de Toulouse-Lautrec, Cha-U-Kao est plus âgée que sur les photographies de sa vie de contorsionniste. Son portrait dans l’album Elles est le seul qui ne soit pas situé dans une maison close : se repose-t-elle après un numéro ? Attend-elle un client qui ne vient pas ? Ou sa présence dans cet ouvrage dédié au monde de la prostitution est-elle seulement liée au fait que derrière elle se dessine la silhouette d’un couple vénal ?

Cha-U-Kao en costume jaune et noir est assise sur une banquette rouge, l’air pensif. En arrière-plan, un couple élégamment vêtu discute dans une ambiance tamisée.
Toulouse-Lautrec, « La Clownesse assise, 1896 », Elles, préface de Jean Vallery-Radot, texte et notices de Jean Adhémar, Monte-Carlo, André Sauret, éditions du livre, 1952 (gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France)

Si Cha-U-Kao a peut-être emprunté sa houppette et sa collerette à Léa d’Asco, elle développe un costume singulier qui la rapproche de Pierrot. Sa couleur jaune éblouissante contraste avec une culotte bouffante et des collants noirs, mais il ne comporte pas de motifs ou de paillettes qui attrapent le regard, pas de tissu précieux. C’est un costume fait pour bouger, plus que pour plaire aux hommes : sa liberté de mouvement est sensible, même hors-scène, dans l’écart qu’elle donne à ses jambes, et qui trahit son passé de contorsionniste. Starobinski insiste sur le contraste entre l’avachissement du corps hors-scène, et « les sources vitales pour cabrioler dans l’arène35 » que retrouvent les saltimbanques.

Cha-U-Kao chevauchant un cochon sous les aboiements de son caniche. Au cirque : 22 dessins aux crayons de couleur, Londres, Paris, New York, Goupil et Cie, 1905, p. 8. (gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France)

Dans Au cirque, la série de scènes de piste que Toulouse-Lautrec a dessinées de mémoire alors qu’il était interné à Saint-James, on est frappé de constater que les clowns ont les deux pieds bien campés dans le sol, alors que Cha-U-Kao est constamment en déséquilibre : soit elle vient de chuter à terre, soit elle résiste à la chute. Comme d’autres clowns de son époque et avant elle, Cha-U-Kao associe clownerie et dressage d’animaux domestiques : elle travaille avec un caniche, un âne et, plus original, avec un cochon. On a souvent dit que le cochon de Lulu était emprunté au tableau Pornokratès de Rops (1875), et on a tiré de cette relation atypique des interprétations symboliques et idéologiques, l’associant à une forme de misogynie : le cochon, image dégradée de « la société contemporaine », irait de pair avec la féminité. Il serait, selon les termes de Mireille Dottin-Orsini, « l’animal de la fange et du fumier, de l’infame et de l’impur, le symbole de la basse sensualité36 ». On a fait aussi des interprétations symboliques du tableau de Jean-Richard Goubie Écuyère aux cochons et aux oranges au Cirque Molier, peint en 188837, la même année que les premières Lulu. Les cochons y seraient des allégories du regard masculin, voire des images de bourgeois, et les oranges des offrandes érotiques. Il est étrange qu’on ne se soit jamais demandé si ces numéros porcins ont existé ou non sur scène. Or, le dressage de cochons semble avoir été l’un des numéros récurrents du cirque Molier38, mais aussi des cirques Fernando et Medrano. Sans écarter les lectures allégoriques, il paraît important de ne pas éluder la dimension concrète des actes scéniques. Dans le dessin de Toulouse-Lautrec, c’est le caractère héroï-comique du numéro de Cha-U-Kao qui ressort : elle chevauche un cochon, dans un rodéo absurde, sous les aboiements de son caniche. Choisir pour partenaire de scène des animaux, c’est se situer sur un autre plan que celui de la séduction. La gouaille, chez Cha-U-Kao, l’emporte sur le potentiel érotique de la clownesse. D’ailleurs, Toulouse-Lautrec ne la dépeint jamais en compagnie rapprochée d’un homme, fût-il clown. À la manière de Sancho Panza, elle chevaucha aussi un âne au Moulin-Rouge lors d’une « redoute », c’est-à-dire un bal public carnavalesque, aux côtés de la Goulue, et escortée d’autres clownesses39.

Deux femmes – dont Cha-U-Kao – sont à dos d'âne. Elles sont entourés par bon nombre de spectateurs.
Cha-U-Kao chevauchant un âne. Henri de Toulouse-Lautrec, « Une Redoute au Moulin Rouge », Paris, Édouard Kleinmann, 1893. (gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France)

À partir de ces données, on peut affirmer que Champsaur invente (ou du moins diffuse) le néologisme « clownesse » en 1888, mais qu’une décennie auparavant, des actrices s’étaient déjà emparées de rôles clownesques, en particulier Léa d’Asco. Les illustrations du livret Lulu, et celles de Gerbault publiées dans L’Art et la Mode, ou de Mars dans Le Monde illustré, ont certainement impressionné les imaginaires des lecteurs et suscité une attente spectaculaire. Le costume de Lulu, qui était au départ un motif pictural, mais une coquille vide sur le plan théâtral, a été investi au cours des années 1890 par plusieurs actrices. La clownesse est alors véritablement devenue un « emploi » de cirque, dont Cha-U-Kao est aujourd’hui l’incarnation la plus repérable, grâce, à nouveau, à un peintre, Toulouse-Lautrec40. Les clownesses se sont probablement inspirées de la houppette de Léa d’Asco reprise par Gerbault, et le roman de Champsaur s’est à son tour nourri des numéros qu’elles produisaient pour créer un « type ». Il y a ainsi eu une forme de circulation entre scène, peinture, presse et texte littéraire. Quelques traces de cet emploi de clownesse subsistent dans les programmes, affiches et dessins. La soirée parisienne du 30 novembre 1890 au Nouveau-Cirque met à l’affiche une certaine Marguerite Doris, « écuyère sans selle », qui sur le dessin de Louis Vallet est affublée de la houppette. Était-elle pour autant clownesse ? En tout cas, elle proposait un numéro comique en duo avec Foottit, et les parodies équestres sont à l’origine même du clown41. Par ailleurs, on trouve au programme du 24 octobre 1892 du Nouveau-Cirque un « divertissement » nommé Les Clownesses, qu’on peut mettre en relation avec une illustration de presse de la même année42. Elle montre quatre clownesses à houppes, aux physiques et aux costumes proches, entrant sur la piste avec des bâtons à la main. Leur indistinction leur donne plutôt l’allure de danseuses de revue. Dans le même recueil factice, un programme de « matinée pour la jeunesse » dont le lieu et la date ne sont malheureusement pas précisés, mentionne une « entrée de clowns » où figurent quatre clownesses nommées Karlotta Kiddjah, Maud Darling et Suz. [Suzanne] Bettencourt, et Ang. [probablement Angélique] Bridge aux côtés d’un clown nommé Delmas. Un peu plus loin, dans le programme, Karlotta Kiddjah donne une « conférence », probablement parodique. Karlotta Kiddjah (aussi orthographiée Carlotta Kidjah) était en fait une des actrices régulières du cirque Molier. Il lui consacre quelques pages dans ses mémoires. Il raconte que Karlotta et sa sœur Natta (ou Natha) sont devenues depuis de « bonnes mères de famille » dont il taira le nom. Elles étaient, dit-il, « deux jeunes mulâtresses de Tahiti, pas trop noires mais assez foncées pour leur donner un grand cachet exotique, avec des yeux de feu et des dents de jeune chien43 ». Karlotta cumulait, semble-t-il, les emplois de clownesse et de sauvageonne. Molier eut même l’idée de l’enfermer dans une cage, de lui présenter des côtelettes crues, et de la libérer pour faire une mauvaise farce à des visiteurs provinciaux et importuns.

Karlotta Kidjah est enfermée dans une cage, Ernest Molier à ses côtés, la regarde.
Karlotta Kidjah jouant « la sauvagesse » avec Ernest Molier. Ernest Molier, Cirque Molier : 1880-1904, Paris, P. Dupont, 1904, p. 112. (gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France)

Elle était aussi écuyère-amazone, comme l’atteste son numéro de voltige égyptienne, très dénudé, peint par Willette pour le programme de 189544, ou encore porteuse pour Julia de Nys dans un numéro nommé la Bergère géante la même année45.

Willette, Karlotta Kidjah dans son numéro de voltige égyptienne, Cirque Molier, Programme du 14 et 17 juin 1895, coll. « Jaquet », Dessinateurs et humoristes. (gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France)

Elle jouait encore au Cirque Molier au début des années 1910, si on en croit les pages de Comœdia, qui la décrivent comme une « brune clownesse pleine d’entrain46 ».

La clownesse à l’ère de la reproductibilité des images

Les ateliers Nadar ont aussi photographié Mademoiselle Ducastel47 ou Madame Méers48 du Nouveau Cirque avec houppette et chapeau pointu. Ces maigres traces attestent de l’engouement pour les clownesses sur les pistes de la Belle Époque, plus ou moins acrobatiques, tantôt comiques, tantôt plastiques, et souvent les deux. Pour la plupart, la clownesse était un rôle passager, et non un emploi récurrent.

On trouve des apparitions de clownesses dans d’autres formes artistiques « mineures », indices de la persistance de cette figure dans les imaginaires. Maurice Lourdey signe un dessin humoristique nommé « Le portrait de la clownesse », qu’on peut lire comme une raillerie de la peinture académique49. Habillée élégamment mais coiffée d’une houppette rebelle, la clownesse pose sagement pour un peintre, son chien endormi à ses pieds. Mais le caniche se réveille et, par habitude de sauter des cerceaux, bondit sur le tableau circulaire qu’il vient crever. Ici, la dynamique du cirque chahute les usages installés du monde artistique académique. Autre déclinaison de la clownesse dans les arts mineurs : Méliès, qui s’inspirait, on le sait, des attractions de cirque et de music-hall de son époque50, tourne quant à lui en 1902 La Clownesse fantôme. Elle a, au départ, la jolie silhouette et la coiffure de Léa d’Asco et des dessins de Gerbault. Mais lorsqu’elle passe à travers un tonneau, elle se métamorphose en un clown-bouffon à la dégaine de diable ou de satyre, qui lui-même, traversant un cercle, redevient la splendide clownesse. Le numéro oscille entre le corps évanescent, gracieux, plastique et aérien de la clownesse et le corps bouffon, animal, tellurien du clown. La clownesse fantôme est du côté de la modernité, là où son incarnation masculine renvoie plus à une tradition populaire de comique scénique. Ces deux apparitions inter-médiales de la clownesse attestent du pouvoir de cette figure séduisante et subversive, qui attire les regards, crève les écrans et se moque des apparences. Elle est bien l’une des effigies mineures de l’époque.

D’ailleurs, le mot restera attaché à cette séquence historique des années 1880-1914. Le Dictionnaire historique de la langue française d’Alain Rey en repère l’apparition en 1884, donc avant les premiers textes de Champsaur, et il signale que « le terme n’a pas réussi à s’imposer devant femme-clown après les années 1900 où il connut une certaine vogue51 ». Aujourd’hui, si les femmes sont nombreuses parmi les clowns, elles préfèrent féminiser leur titre avec un e, inaudible à l’oral : elles se disent « clownes ».

Cette enquête sur les clownesses fin-de-siècle, qui s’est focalisée sur leurs apparitions en piste et sur scène, a confirmé une réflexion qui m’était déjà apparue en travaillant sur les disloqués et les contorsionnistes. Les néologismes « invisibiliser » et « invisibilisation », qui sont entrés dans le vocabulaire académique via les études de genre cette dernière décennie, ne sont peut-être pas complètement adaptés pour parler du destin des artistes gestuels et corporels. Visibles, les clownesses l’étaient. La seule chose qu’il nous reste d’elles, ce sont justement des images, et parfois un nom de scène. Mais nul ne peut deviner si Cha-U-Kao parlait en piste, quel était le déroulé de ses numéros, ou ce que contenait la conférence de Karlotta Kiddjah. Et comment savoir en quoi consistait exactement le « bagout » de Léa d’Asco, et s’il inspira celui de Lulu ? C’est pourquoi la question de l’auctorialité m’apparaît comme un enjeu historique plus pertinent que celui de la visibilité ou de l’invisibilité. À une époque où toutes les vedettes de la scène et de la piste publiaient leurs mémoires, y compris la danseuse Loïe Fuller ou le dompteur Bidel, la minorité consistait à être écrit ou décrit par d’autres, ou pas du tout. Léa d’Asco, Cha-U-Kao et Carlotta Kiddjah furent ce qu’on appellerait aujourd’hui, au XXIe siècle, des actrices-créatrices. Toute rétrospective et anachronique qu’elle paraisse, cette affirmation peut faire évoluer la façon dont on lit le roman Lulu. Le considérer comme un témoignage documentaire de la scène mineure de la Belle Époque serait forcer légèrement le trait, car il comporte évidemment une part d’invention, mais affirmer, qu’il « fallait posséder l’audace de Champsaur pour soumettre la femme à la dégradation du clown52 » est erroné. Champsaur a créé un type à partir de numéros existants. C’est donc bien aux actrices que revient cette part d’audace, et sans doute en partie à l’initiative d’Ernest Molier ou à d’autres directeurs de cirque, qui avaient probablement vu des clownesses anglaises avant de confier ce rôle à des Françaises. Et si ces actrices s’affublèrent d’une houppette et revêtirent les oripeaux du clown, ce fut sans doute moins dans l’intention de « dégrader » leur féminité, que dans un geste ludique et insolent, proche de celui des danseuses de cancan : une façon de chahuter les conventions, de faire sauter les cadres étriqués, et de jouer avec les apparences.

Notes

  1. Deux pantomimes, Lulu et Les Éreintés de la vie [1888], une nouvelle intitulée Lulu dans le recueil L’Amant des danseuses [Paris, Dentu, 1888, p. 282-294], puis le roman [1901].
  2. La Boîte de Pandore, une tragédie-monstre, 1894.
  3. Jean Starobinski, Portrait de l’artiste en saltimbanque, Paris, Gallimard, 2013 [1970 chez Skira], p. 81-84.
  4. Filippos Katsanos, « Écrire les femmes de cirque entre pratiques culturelles et discours sociaux : la clownesse Lulu de Félicien Champsaur », dans Philippe Goudard et Nathalie Vienne-Guerrin (dir.), Figures du clown sur scène, en piste, et à l’écran, Montpellier, Presses universitaires de la Méditerranée, 2020, p. 115-133.
  5. Henry Thétard, La Merveilleuse histoire du cirque, Paris, Julliard, 1978, p. 313 et 462.
  6. Tristan Rémy, Les Clowns [1945], préface de Bernard de Fallois, Paris, Grasset, 2002, p. 441-442.
  7. Ibid., p. 438.
  8. Ibid., p. 439.
  9. Ibid., p. 445.
  10. Lire à ce sujet Rae Beth Gordon, De Charcot à Charlot. Mises en scène du corps pathologique, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Le Spectaculaire-Cinéma », 2013, p. 108-113.
  11. Colette Cosnier-Hélard, « Le clown et la demoiselle », dans Nicole Vigoureux-Frey (dir.), Le Clown, Rire ou dérision ?, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1999, p. 67-68. Colette Cosnier-Hélard se fonde sur Jacques Fabbri et André Sallée, Clowns et farceurs, Bordas, 1992, p. 188 – qui eux-mêmes s’appuient certainement sur Tristan Rémy. Elle évoque à tort Cha-U-Kao comme étant une « pseudo-japonaise » (et élude l’univers du café-concert), suppose qu’elle « s’illustrait surtout dans des numéros d’écuyère » et « appartenait plus au monde du music-hall qu’à celui du cirque ». Or, séparer de manière stricte ces mondes n’a pas de sens à la Belle Époque, où les artistes passent aisément de l’un à l’autre. Enfin, elle affirme que « le mot clownesse n’existe pas », en évacuant la fin-de-siècle où il a été en vogue.
  12. Delphine Cézard, « 9 – Les clowns et la question du genre », dans Camille Froidevaux-Metterie, Marc Chevrier (dir.), Des femmes et des hommes singuliers. Perspectives croisées sur le devenir sexué des individus en démocratie, Paris, Armand Colin, coll. « Recherches », 2014, p. 229-250. [https://doi.org/10.3917/arco.froid.2014.01.0229]. L’auteur a publié ses premières recherches sous le prénom de Delphine et signe désormais Zed Cézard.
  13. Ernest Molier, Cirque Molier : 1880-1904, op. cit., p. 8, p. 9 et p. 24.
  14. Ibid., p. 35.
  15. Ibid., p. 34.
  16. Anonyme, « Le Cirque Franconi », Le Gaulois, 20 décembre 1879, p. 2.
  17. Dick de L…, « La Fête de l’Hippodrome », Le Monde illustré, 27 décembre 1879, p. 411.
  18. Ernest Molier, Cirque Molier : 1880-1904, op. cit., p. 61 et 63.
  19. Cirque Molier, Programme Souvenir du 9 juin 1892, [p. 3-4], Recueil. Cirque Molier, Paris. 1892-1900, BnF, Arts du spectacle, Cote : WNA-500
  20. Ernest Molier, Cirque Molier : 1880-1904, op. cit., p. 114.
  21. Article du Courrier français de 1892, auteur non-cité, cité par Ernest Molier, ibid., p. 96.
  22. Félicien Champsaur, Les Éreintés de la vie, Paris, Dentu, 1888, p. 62.
  23. Gerbault, dessinateur, fut aussi acteur dans Les Eaux de Bénouville (la réalisation de la pantomime de Champsaur Les Éreintés de la vie), où il joua un cul-de-jatte, et il écrivit lui-même des pantomimes pour Molier, comme Le Buste, en 1889, qu’il interpréta aussi aux côtés de Melle Derly et M. Arthus. Ernest Molier, Cirque Molier : 1880-1904, op. cit., p. 66 et 71.
  24. Pierre Véron, Charivari, 12 décembre 1888, n.p., [p. 2].
  25. Idem.
  26. Félicien Champsaur, Lulu, roman clownesque, Paris, Eugène Fasquelle, 1900, p. 25 et p. 83.
  27. Ibid., p. 62.
  28. Ibid., p. 224-234.
  29. Sandrine Bazile, « Lulu s’affiche – affiches et intertextualité dans Lulu, roman clownesque de Félicien Champsaur », Images&Narrative, Online magazine of the Visual Narrative, 2007. [https://www.imageandnarrative.be/inarchive/affiche_findesiecle/bazile.htm].
  30. Cette séduction auprès des deux sexes, qualifiée de « communion des désirs » est déjà mentionnée dans L’Amant des danseuses, op. cit., p. 256.
  31. Peta Tait, Circus Bodies, Cultural Identity in Aerial Performance, London, Routledge, 2005, p. 66-67.
  32. Félicien Champsaur, Lulu, roman clownesque, op. cit., p. 21.
  33. Ibid., p. 24.
  34. Ibid., p. 54.
  35. Jean Starobinski, op. cit., p. 82.
  36. Mireille Dottin-Orsini, Cette femme qu’ils disent fatale, textes et images de la misogynie fin-de-siècle, Paris, Grasset & Fasquelle, 1993, p. 190-191.
  37. Le tableau appartient désormais à la collection J.Y et G. Borg et été exposé dans l’exposition « Cirque et saltimbanques : aux arts et aux cirque », Musée des beaux-Arts de Rouen, du 10 décembre 2021 au 17 avril 2022. Le cartel commentant ce tableau expliquait : « […] La cavalière est auréolée de fleurs d’orangers, symboles de pureté nuptiale. Les cochons lui offrent des oranges, agrumes alors coûteux qui se vendaient aux portes des cirques pour être offerts aux artistes en gage d’admiration. Ces animaux et ces fruits expriment ici le désir érotique ».
  38. En attestent certaines images de programmes et d’affiches : celle de Willette pour illustrer la pantomime En roulotte montre une jeune femme berçant un bébé cochon dans ses bras (Adolphe Willette, Programme du Cirque Molier, 18/06/1894, p 4. [http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb44996856q]. Une affiche non datée d’un recueil factice montre un clown en train de caresser la tête d’un porcin (Caran d’Ache, Affiche du Cirque Molier, non-datée, Recueil. Cirque Molier. 1884-1933. [http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb42538584d]. Dès L’Amant des danseuses, Champsaur décrit des divertissements impliquant des cochons sur scène, qu’il a peut-être vus au Cirque Molier ou au Cirque Fernando, op. cit., p. 179-183 et p. 256-258.
  39. Censé célébrer l’alliance franco-russe, cet évènement était aussi une façon de parodier les défilés militaires. Voir aussi Henri de Toulouse-Lautrec, « Entrée de Cha-U-Kao », Le Rire, 15 février 1896.
  40. Comme le souligne justement Arthur Pougin dans son dictionnaire, ce sont les acteurs qui créent les emplois, et sont imités par d’autres. Parfois l’emploi est nommé sous le nom de l’acteur, et parfois sous celui d’un personnage. Arthur Pougin, Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre et des arts qui s’y rattachent. Poétique, musique, danse, pantomime, décor, costume, machinerie, acrobatisme. Jeux antiques, spectacles forains, divertissements scéniques, fêtes publiques, réjouissances populaires, carrousels, courses, tournois, etc, etc, etc., Paris, Librairie de Firmin-Didot (Paris), 1885, p. 327.
  41. « La soirée parisienne », Nouveau cirque, Soirée du 30 novembre 1890, ill. en couleur de L. Vallet. [http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb44997154b].
  42. « Réouverture des cirques », Recueil. Divers cirques. 1889-1892, vue 6/7, BnF, Gallica. [http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb42539905m].
  43. Ernest Molier, op. cit., p. 110.
  44. Cirque Molier, Programme du 14 et 17 juin 1895, [p. 5], Recueil. Cirque Molier, Paris. 1892-1900, op. cit.
  45. Ernest Molier, op. cit., p. 124-125.
  46. Pierre Le Vassor, « La 33e représentation du Cirque Molier », Comoedia, 6 juillet 1912, p. 3. Il est aussi fait mention de Karlotta Kidjha dans les numéros du 1er juillet 1910, p. 2 (« une bohémienne spirituellement bronzée ») et du 3 et du 5 juillet 1913.
  47. 9462 A. Me Ducastel. (Nouveau Cirque) [Image fixe] : [photographie, tirage de démonstration] / [Atelier Nadar], [Entre 1875 et 1895]. [https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb454928410].
  48. 10127 B. Me Meers. (Nouveau Cirque) [Image fixe] : [photographie, tirage de démonstration] / [Atelier Nadar], [Entre 1875 et 1895]. [https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb45533511d].
  49. Maurice Lourdey, « Le portrait de la clownesse », ill. slnd., coll. « Jacquet ». Dessinateurs et humoristes. Fernand Fau. Lourdey. Testevuide. t. 7 : défets d’illustrations de périodiques, p. 65. [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b531255032].
  50. André Gaudreault et Laurent Le Forestier, Méliès, carrefour des attractions, suivi de la correspondance de de George Méliès (1904-1937), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014, p. 10.
  51. « Clown », Dictionnaire historique de la langue française, tome 1 A-E, Paris, Le Robert, 1998, p. 784. Dans le Larousse de 1928, le terme « clown » est défini comme « un pitre excentrique, proche parent des jesters et des minstrels, qui excite le rire par des dislocations et des tours d’équilibre bizarres, par des fantaisies abracadabrantes et des mots d’esprit. » Mais celui de clownesse n’apparaît pas. Les exemples de clowns « fameux » sont tous masculins « Auriol, Mazurier, Joa [sic] Grimaldi, Tony Grice, les frères Hanlon Lee, Billy Hayden, Foottit et Chocolat, les Fratellini ». Larousse du XXe siècle en six volume, publié sous la direction de Paul Augé, t. 2, Paris, Librairie Larousse, 1928, p. 312.
  52. Sophie Basch, « Introduction », Félicien Champsaur, Lulu, roman clownesque, dans Romans de Cirque, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2002, p. 597.
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EAN html : 9791030011333
ISBN html : 979-10-300-1133-3
ISBN pdf : 979-10-300-1134-0
Volume : 33
ISSN : 2741-1818
Posté le 04/06/2025
18 p.
Code CLIL : 3677
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Comment citer

Martinez, Ariane, « Clownesse(s) fin-de-siècle : sur les traces d’actrices mineures devenues personnages mythiques », in : Charlier, Marie-Astrid, Thérond, Florence, dir., Écrire en petit, jouer en mineur. Scènes et formes marginales à la Belle Époque, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, collection PrimaLun@ 33, 2025, 211-230 [en ligne] https://una-editions.fr/clownesses-fin-de-siecle/ [consulté le 04/06/2025].
Illustration de couverture • Dessin de Raphaël Kirchner, dans Félicien Champsaur, Le Bandeau, Paris, La Renaissance du Livre, 1916.
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