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Habitats fortifiés en Bordelais, Bazadais, pays landais du XIe au XVe siècle : état de la recherche

Paru dans : Aquitania Suppl. 4, 1990, 31-51.

Le rapport que nous présentons n’est qu’une réponse, bien incomplète d’ailleurs, à l’un des principaux thèmes de ce colloque : l’état de la recherche dans le domaine des sites fortifiés et défensifs médiévaux. L’aire que nous avons retenue correspond en gros aux départements de la Gironde et des Landes, mais dans le cadre de limites historiques, celles du Bordelais, du Bazadais et des Lannes. Avec Bayonne, ces trois pays constituaient à la fin du XIIIe siècle le noyau gascon du duché d’Aquitaine auquel étaient venus s’agréger après 1259 une partie du Périgord, en 1279 l’Agenais et, en 1287, la partie de la Saintonge située au sud de la Charente1 (fig. 1).

Fig. 1. État de quelques recherches sur les sites fortifiés et défensifs. 1. Limite de département ; 2. Limite de diocèse ; 3. Limite de juridiction ; 4. Frontière ; 5. Étude portant sur l’occupation du sol ; 6. Inventaire général ; 7. POSHA ; 8. Enquête sur les ouvrages de terre.

Au début du XIVe siècle, les limites du Bordelais se confondaient avec celles du diocèse de Bordeaux, aussi bien au nord du côté de la Saintonge et de l’Angoumois qu’à l’est au contact du Périgord ; elles se sont perpétuées jusqu’à nos jours dans les limites départementales2. En revanche, au sud de la Dordogne, le diocèse de Bazas débordait assez largement sur le Lot-et-Garonne actuel. Certes, les communes du canton de Sainte-Foy-la-Grande ainsi que celle de Landerrouat, aujourd’hui girondines, relevaient du diocèse d’Agen ; mais, à partir d’Esclottes, la limite du Bazadais se dirigeait vers Sainte-Bazeille sur les bords de la Garonne, aux portes mêmes de Marmande3. Au sud du fleuve, le Bazadais incluait aussi l’ensemble des paroisses situées sur la rive gauche de l’Avance en aval de Casteljaloux. Mais les Lugues – la majeure partie du canton de Houeillès en Lot-et-Garonne – bien que dépendant de la seigneurie de Casteljaloux, étaient terre agenaise. La situation se compliquait lorsqu’on abordait le pays des Lannes comme on le désignait alors. En effet, la discordance était cette fois complète entre limites religieuses et frontières politiques délimitant les territoires placés dans la directe du roi-duc. Vers l’est, le diocèse d’Aire avait perdu dans des circonstances obscures la majorité des paroisses constituant la vicomté de Gabardan passées au diocèse d’Auch4. Or, le Gabardan est toujours resté une terre landaise rattachée de fait au Marsan et, de nos jours encore, il appartient au département des Landes. C’est aussi le cas du petit pays de Parleboscq qui dépendait naguère du diocèse d’Auch et pourtant placé dans la directe du roi-duc5, alors que Cazaubon, dans la même situation politique et religieuse, est devenu gersois6. Plus au sud, l’archiprêtré de Mauléon (d’Armagnac), situé dans la zone d’interfluve de la Douze et du Midou, aturin au religieux, échappait à la mouvance ducale à de rares exceptions comme Estang, Ayzieu et Lias, aujourd’hui gersois, comme d’ailleurs la majeure partie de l’ancien archiprêtré7. C’est aussi le cas, plus vers le sud, de Toujouse et Monguilhem qui relevaient du diocèse d’Aire et de la sénéchaussée des Lannes, et qui sont aussi gersois8.

La situation n’est guère moins compliquée au sud de l’Adour entre les Lannes et la vicomté de Béarn. En effet, trois limites apparaissent qui ne se confondent que rarement : celle qui sépare les diocèses d’Aire et de Lescar, la plus en retrait vers le nord, celle des départements des Landes et des Pyrénées-Atlantiques, enfin celle de la sénéchaussée des Lannes qui, du moins à l’époque moderne, poussait une large pointe vers le sud. Mais les limites de cette sénéchaussée ont probablement changé au cours des siècles et l’histoire de leurs fluctuations reste à faire. On peut être assuré en tout cas qu’au début du XIVe siècle les territoires de seize communes aujourd’hui “pyrénéennes” étaient ceux de paroisses relevant de la juridiction des Lannes mais non du diocèse d’Aire9. En revanche, plus vers l’ouest, d’autres paroisses du diocèse de Lescar qui dépendaient de la sénéchaussée des Lannes appartiennent aujourd’hui au département des Landes.

À Sault-de-Navailles sur le Luy de Béarn, on passait du diocèse d’Aire dans celui de Dax, lequel, à la différence du précédent, s’étendait largement vers le sud puisqu’il recouvrait alors une frange de la vicomté de Béarn comprenant Orthez et Salies10 et englobait même les pays de Mixe et d’Ostabaret dans le royaume de Navarre. Entre Sault et Saint-Cricq-du-Gave, les paroisses dacquoises de Sault, Bonnut et Saint-Girons, aujourd’hui pyrénéennes, dépendaient alors de la sénéchaussée des Lannes ; mais, au sud des gaves réunis, le tracé extravagant des limites départementales reproduit à peu de chose près celles de l’ancienne sénéchaussée sauf que Saint-Pé-de-Léren, Léren et Auterive, naguère terres dacquoises et “lannaises”, sont devenues pyrénéennes. Enfin, à partir d’Hastingues, la limite du diocèse de Dax et celle de la sénéchaussée des Lannes se confondaient avec le cours de l’Adour. On notera que le roi-duc avait dans sa directe, au début du XIVe siècle et depuis le XIe siècle, le Labourd et la Soule, deux “pays basques” encadrant la Basse-Navarre, pointe septentrionale du royaume navarrais. Le territoire ainsi défini, qui dépasse les limites du département de la Gironde et de celui des Landes mais laisse de côté le canton de Sainte-Foy-la-Grande, correspond à une surface d’au moins 20 000 km2 et comprend 554 communes girondines, 334 communes landaises, auxquelles il convient d’ajouter trente communes du département du Lot-et-Garonne, cinq de celui du Gers et vingt de celui des Pyrénées-Atlantiques11.

Bien conscients de l’ampleur de la tâche, nous n’avons pas pris en compte dans cet essai de bilan la totalité des sites défensifs et fortifiés de l’époque médiévale, ne retenant que ceux que l’on classe sous les rubriques de mottes, enceintes, châteaux, ou maisons fortes, enceintes urbaines ou villageoises. Il est vrai qu’il n’existe pour la région considérée que peu d’études consacrées aux églises et cimetières fortifiés12 et, mis à part quelques monographies, aucun travail de synthèse n’a été consacré aux commanderies, abbayes ou prieurés présentant des caractères fortifiés. Il en est de même pour les ponts et les moulins13. Quant aux sites troglodytiques, ils sont fort peu nombreux dans l’aire considérée14. Ceci dit, le phénomène défensif constitue à nos yeux un tout et ne peut être apprécié à un moment donné dans une région déterminée si l’on ne prend pas en compte tous ses aspects, fussent-ils les plus passifs. On ne saurait oublier ainsi que certains édifices comme de simples églises ont pu jouer un rôle défensif : ne sont-elles pas parfois devenues une tombe pour ceux qui, croyant s’y trouver en sécurité, en avaient fait un refuge ! Enfin – cela vaut surtout pour les habitats “seigneuriaux” – il est pratiquement impossible, du moins au stade d’un inventaire, d’établir de manière précise et incontestable l’histoire d’un site, si tant est qu’on n’y parvienne jamais. Certes, nous connaissons tous des mottes dont on a de bonnes raisons de penser que la vie fut très courte et que l’on pourrait donc classer dans un répertoire typologique ou un cadre chronologique précis. La chose est parfois vraie aussi de certaines maisons fortes dont on connaît l’acte qui a permis de les construire et dont l’examen montre à l’évidence qu’elles nous sont à peu de choses près parvenues dans leur état initial. Mais, dans la majorité des cas, la situation est toute autre. Si la descendance de la motte au château ou à la maison forte est parfois bien attestée par les textes ou s’inscrit sur le site, il est aussi, nous le savons bien, des apparences trompeuses. C’est la raison pour laquelle la seule unité d’estimation, s’agissant d’un inventaire, ne peut être, à notre avis, que le site entendu au sens large, c’est-à-dire incluant des monuments situés à une distance pouvant atteindre une centaine de mètres sinon plus, mais dont on sait ou dont on a de bonnes raisons de penser qu’ils ont une histoire commune.

Quant au choix d’une période, il va de soi que, dès lors que l’on retient le site comme unité d’inventaire, cette période est forcément longue du Xe siècle au XVe siècle. Et nous sommes bien conscient à cet égard du caractère artificiel que constitue le milieu du XVe siècle, généralement pris comme terme de l’époque médiévale. Cela est aussi vrai pour les châteaux et les maisons fortes que pour les autres édifices fortifiés, en particulier les moulins et les églises. Ce n’est en fait qu’a posteriori qu’une telle limite semble pouvoir être fixée en fonction, par exemple, de l’apparition de dispositifs propres aux armes à feu ou de critères architecturaux. C’est au bilan des inventaires que nous nous sommes tout d’abord attachés afin de nous faire une idée du nombre des sites défensifs et fortifiés et de leur répartition géographique. Disons-le tout de suite : il n’existe pour le Bordelais, le Bazadais et les Lannes que des inventaires thématiques qui ne concernent d’ailleurs qu’une partie de la région considérée, et quelques inventaires archéologiques généraux qui prennent en compte l’ensemble des sites mais ne concernent, eux aussi, que des secteurs plus ou moins réduits (fig. 1).

C’est par eux que nous commencerons et tout d’abord par celui entrepris par la Commission régionale d’inventaire d’Aquitaine. Dans le cadre de divers types d’opération de recensement qu’il a réalisés depuis une dizaine d’années, cet organisme a pu dresser des inventaires qui – après quelques hésitations au début – incluent aujourd’hui les ouvrages de terre : mottes et enceintes. On peut donc estimer que tous les sites fortifiés ayant laissé des vestiges apparents figureront désormais dans les inventaires. Ainsi, dans le canton de Peyrehorade qui correspond en gros à l’ancien Pays d’Orthe entre Adour et Gaves réunis ont été recensés quatre mottes, un château, une maison forte, trois enceintes “urbaines”, et pas moins de neuf églises présentant des éléments fortifiés sans oublier, bien sûr, tous les bâtiments ne possédant pas d’éléments défensifs actifs ou apparents15. La moisson peut sembler mince, mais elle constitue une mise en garde : aussi longtemps que ce type d’opération ne sera pas terminé, mieux vaudra ne pas trop se lancer dans des généralisations, qui risqueraient de s’avérer hasardeuses. Qui aurait pu imaginer qu’il n’y avait qu’une seule maison forte dans ce canton ? Actuellement, un pré-inventaire a été établi dans les Landes pour les cantons de Saint-Sever, Montfort et Mugron en Chalosse, et en Gironde pour l’ensemble du Médoc cantons de Saint-Vivien, Pauillac, Saint-Laurent, Lesparre, Castelnau et Blanquefort16 (fig. 1).

De caractère général aussi, mais avec un objectif sensiblement différent sont les plans d’occupation des sols historique et archéologique d’Aquitaine (POSHA) dont la réalisation a été entreprise par le CROS17. Tâche considérable, mais qu’il fallait bien commencer. Les POSHA se proposent, en effet, d’établir un recensement exhaustif des sites archéologiques ou présumés tels et cela de la préhistoire à l’époque moderne ; la nature des vestiges connus ou supposés variant, bien sûr, selon les périodes mais incluant pour l’époque médiévale tous les sites à caractère défensif ou fortifié précédemment évoqués. Actuellement, en plus du POSHA de la commune d’Agen –  en dehors de notre aire –, ont été réalisés ceux des communes d’Aire-sur-l’Adour et de Dax18 ; un troisième en cours, pratiquement terminé, sera publié en 1990 : il concerne le sud du département de la Gironde – cantons d’Auros, Bazas, Captieux, Grignols, Saint-Symphorien et Villandraut  – soit 69 communes appartenant naguère, pour la majeure partie à l’ancien diocèse de Bazas, et pour la partie occidentale à l’archiprêtré de Cernès dans le diocèse de Bordeaux. Nous aurons l’occasion de revenir sur la contribution que ces divers inventaires ont apportée à la connaissance des sites fortifiés médiévaux : mais on peut, dès maintenant, signaler que le POSHA du Bazadais a permis de recenser 22 sites de mottes, 18 de châteaux de pierre et 15 de maisons fortes, ainsi que 18 églises, 2 commanderies, 2 moulins et un pont fortifié (fig. 1).

À côté de ces inventaires systématiques il convient de citer les mémoires de maîtrise – DES et TER – entrepris depuis plus de trente ans et consacrés à l’histoire de l’occupation du sol et du peuplement d’un territoire de l’importance d’un canton en zone rurale, mais limité parfois à une commune dans la banlieue de Bordeaux (fig. 1). Ce n’est que progressivement que le recensement des sites archéologiques a pris dans ces recherches une forme systématique au point de devenir aujourd’hui un préalable à toute autre démarche. Mais la nouveauté de l’entreprise, la nécessité d’embrasser une longue période et de “faire du terrain”, découragent bien des étudiants : c’est ce qui explique que peu de cantons aient encore fait l’objet d’une étude de ce type. En voici néanmoins la liste : Dans la Chalosse landaise : régions d’Amou, Montfort, Pouillon, Côteaux du Soubestre et pays de Louvigny19 ; dans la Grande Lande et la Lande Maritime : pays de Marensin (sud du canton de Castets et nord de celui de Soustons) ; vallée de l’Eyre et Pays de Buch (cantons de Sabres), Pissos (Landes), Belin, La Teste (Gironde)20.

Trois mémoires ont été consacrés au Bazadais, entendu comme diocèse : le plus ancien, œuvre de Mlle E. Traissac consacré à la majeure partie du diocèse au sud de la Garonne, le plus ancien des mémoires réalisés sur le thème de l’occupation du sol constitue un ouvrage de référence qui a largement inspiré les travaux qui ont suivi ; le second qui le recoupe en partie mais établi sur des bases plus systématiques, concerne la partie orientale du diocèse sur la rive gauche de l’Avance, aujourd’hui pour une grande partie en Lot-et-Garonne (cantons de Bouglon, Meilhan et en partie Grignols) ; le plus récent est consacré aux bassins de l’Escouach et de la Gamage, deux petites rivières affluents de rive gauche de la Dordogne (cantons de Pujols et de Sauveterre-de-Guyenne en partie), à la limite septentrionale de l’ancien diocèse21. Proportionnellement le Bordelais a, pour des raisons qui n’ont rien de scientifique, été moins étudié : en plus des mémoires consacrés à la vallée de l’Eyre et au pays de Buch on en compte pour l’instant cinq : deux concernent le pays de Cernès – rive gauche de la Garonne en amont de Bordeaux (cantons de Podensac et la Brède)22 ; deux l’Entre-deux-Mers : l’un la rive droite de la Garonne en aval de Langoiran (sud du canton de Créon)23, l’autre le bassin de l’Engranne aux confins septentrionaux des anciens diocèses de Bazas et de Bordeaux, en bordure de la Dordogne (partie est du canton de Branne, nord du canton de Targon) ; un autre le Cubzaguais, au nord de la Dordogne (canton de Saint-André-de-Cubzac)24. Des travaux portant sur le communes de la banlieue médiévale de Bordeaux viennent d’être achevés – commune de Talence25 –  ou sont en cours  – communes de Bègles et Villenave-d’Ornon, de Mérignac et de Pessac sur la rive gauche, de Cenon et de Floirac sur la rive droite. On ne saurait oublier trois thèses en cours, sur le Bazadais septentrional, la banlieue de Bordeaux et la grande paroisse Saint-Seurin qui prendront aussi largement en compte l’ensemble des données archéologiques26.

Ainsi que nous l’avons souligné, les mémoires les plus anciens laissent au lecteur le soin de constituer lui-même un inventaire forcément approximatif des sites défensifs et fortifiés. En revanche, dans les plus récents, on trouve des bilans très solidement documentés. Ainsi, dans les pays de l’Escouach et de la Gamage ont été recensés 16 sites de mottes conservées ou disparues ; dans le bassin de l’Engranne 30, dont 13 conservées.

À côté de ces enquêtes, il convient de signaler la thèse que Paul Roudié a consacrée à L’activité artistique à Bordeaux et en Bordelais et en Bazadais : il s’agit des deux diocèses – entre 1453 et 155027. L’auteur n’a certes pas publié un inventaire systématique des monuments qu’il avait étudiés, mais le caractère exhaustif de cette étude – comme en témoigne l’abondant répertoire des sources et des noms de lieux cités dans l’ouvrage – permet sans difficulté d’établir l’inventaire des édifices qui furent fortifiés au cours de cette période. Des rubriques facilitent d’ailleurs la recherche : travaux militaires à Bordeaux ; fortification des villes secondaires – pour les châteaux urbains – et, surtout, un substantiel chapitre consacré à l’architecture civile et militaire des campagnes, où sont successivement abordés : le château de Coutras – une exception ; les restaurations de châteaux forts – entendons par là ceux antérieurs à 1453 ; enfin la persistance de certains éléments défensifs dans des constructions nouvelles. Tout à fait intéressante est la distinction faite par l’auteur entre ces constructions et celles qu’il qualifie de “non militaires”, et dont il souligne le grand nombre. Voici une idée des conclusions auxquelles il est parvenu : pour les deux diocèses, douze châteaux et maisons fortes seulement – sans compter l’Ombrière et Puy-Paulin à Bordeaux – auraient fait l’objet de restaurations ou transformations dans les années 1453-1550 ; seulement six constructions auraient vu le jour au cours de cette période : Le Gravoux à Saint-Genès-de-Castillon, Monleau à Moulon, Mouchac à Grézillac dans l’Entre-deux-Mers, peut-être Plain-Point à Saint-Aignan, en Fronsadais, enfin, le château de Boisset, à Berson en Blayais. Cela fait très peu pour le plus grand des départements français ; en revanche, Paul Roudié cite près de trente-cinq édifices, des maisons nobles apparemment pour le plus grand nombre, qui présentent un appareil militaire parfois très réduit et le plus souvent modeste. C’est à mi-chemin entre les inventaires généraux et les inventaires thématiques que se placent les travaux entrepris par L. Drouyn il y a maintenant plus d’un siècle. En effet, son ouvrage le plus célèbre, la Guyenne militaire, paru en 1865, est sous-titré : Histoire et description des villes fortifiées, forteresses et châteaux construits dans le pays qui constitue actuellement le département de la Gironde, pendant la domination anglaise28. Aux châteaux, maisons fortes et enceintes urbaines, L. Drouyn a ajouté un certain nombre de moulins et un “aperçu historique sur les temps antérieurs à la domination anglaise” qui n’est autre qu’un premier inventaire des ouvrages de terre avec quelques incursions dans le domaine du troglodytisme. Bien sûr, l’auteur n’a jamais prétendu à l’exhaustivité, mais une bonne partie des édifices seigneuriaux fortifiés de l’époque médiévale en Bordelais et Bazadais y est répertoriée. À eux seuls, châteaux et maisons fortes font l’objet de plus de 95 notices. À cet inventaire, qui recouvre l’ensemble du département de la Gironde, il convient d’ajouter Les Variétés Girondines, une série d’articles parus dans les Actes de l’Académie de Bordeaux29, qui présentent, à l’occasion de monographies communales, un inventaire encore plus précis des sites défensifs et fortifiés de la partie septentrionale de l’ancien diocèse de Bazas, incluant les édifices religieux par nature – cimetières, églises – ou bien encore les commanderies et les moulins. Cette série de monographies ne constituait probablement, dans l’esprit de Léo Drouyn, que le début d’une collection qui aurait pu s’étendre à l’ensemble du département. La matière de cette entreprise est réunie dans les quatre tomes de notes archéologiques, restées manuscrites, source de toutes les publications de cet auteur30. Ces notes, composées de notices accompagnées de plans et de dessins, consacrées à des monuments qui ne sont pas exclusivement girondins d’ailleurs, se présentent, grâce à leurs tables, comme un inventaire de la majorité des édifices qui nous intéressent. Encore aujourd’hui, l’ensemble des notes et publications de Léo Drouyn constitue pour le département de la Gironde le point de départ de toute recherche sur les ouvrages fortifiés et défensifs médiévaux. Il n’existe en revanche pour les Landes aucun ouvrage semblable à la Guyenne de Léo Drouyn, ni de notes d’érudits que l’on puisse rapprocher des siennes31. Peut-être s’y réfère-t-on trop d’ailleurs. Car, pour avoir beaucoup écrit et rempli des cahiers de dessins d’une exceptionnelle qualité, Léo Drouyn n’avait pas tout vu et, depuis plus d’un siècle maintenant, la manière de “traiter” un site a tout de même évolué.

Parmi les inventaires typologiques qui ont le plus souvent tenté les chercheurs, à côté de ceux consacrés aux châteaux et maisons fortes bâties en pierre du XIIIe au XVe siècle, ceux qui concernent les ouvrages en totalité ou en majeure partie en terre occupent une place de choix. Léo Drouyn a été en Gironde un pionnier dans ce domaine, mais pendant longtemps il n’a guère fait d’émules. Il a fourni, en effet, pas moins de quatre inventaires assortis de monographies32 : les deux premiers parus en 1854 et 1858 furent repris et complétés en 1865 dans une rubrique particulière de la Guyenne militaire ; mais, neuf ans plus tard, à l’occasion de la sortie du premier numéro du bulletin de la Société archéologique de Bordeaux, il compléta une nouvelle fois cet inventaire. Dans l’introduction de la Guyenne se sont déjà plus de 65 sites de types et d’époques très divers qui sont recensés pour l’ensemble du département de la Gironde, le critère principal étant la rareté ou l’absence de vestiges bâtis. Il en ajouta 23 neuf ans plus tard, ce qui porte à 88 le nombre d’édifices recensés par ce pionnier ; il devait d’ailleurs compléter une fois encore cette liste dans les fascicules des Variétés girondines. Dans la mesure où il n’existe pas à ce jour d’inventaire des ouvrages de terre couvrant l’ensemble du département de la Gironde, on ne peut apprécier parfaitement la qualité de l’inventaire de L. Drouyn ; mais deux enquêtes récentes nous permettent néanmoins de nous en faire une idée. S. Faravel a recensé sur le territoire de quinze communes des bassins de l’Escouach et de la Gamage seize sites d’ouvrages de terre dont sept bien attestés ; or, elle a noté que six fois sur neuf pour les sites incertains, et cinq fois sur sept pour ceux attestés archéologiquement, Léo Drouyn en avait déjà fait état. Dans une autre région du Bazadais, celui de la rive gauche de la Garonne que Léo Drouyn connaissait moins bien, pour vingt-deux sites de même nature actuellement recensés dans le cadre du POSHA, il n’en avait en revanche reconnu que huit.

Ainsi qu’en témoignent les exemples précédents, depuis quelques années l’inventaire des ouvrages de terre a repris, aussi bien en Gironde que dans les Landes. Ces travaux ont donné lieu à trois mémoires de maîtrise : le plus ancien – il date de 1973 – a pour cadre le département de la Gironde33. S’appuyant avant tout sur des sources bibliographiques rarement vérifiées sur le terrain et non citées, cet inventaire est d’une fiabilité très limitée et difficilement utilisable. Tel n’est pas le cas des deux autres enquêtes entreprises par P. Hittos et P. Ménil ; la première, réalisée en 1979, concerne la Grande Lande et ses bordures de Guillos et Belin en Gironde, au nord, à Arengosse et Laharie dans les Landes, au sud, et de l’océan à l’ouest à Captieux et Roquefort, à l’est ; elle déborde donc sur le Cernès, le Bazadais, le Marsan, sans les inclure en totalité34. La seconde, entreprise en 1983, porte sur la partie du département de la Gironde située sur la rive gauche de la Garonne et de la Gironde – Bazadais exclu : il s’agit donc du Cernès – sauf dix communes méridionales déjà étudiées par P. Hittos – du pays de Buch et du Médoc (130 communes et 4 800 km2)35. Non seulement ont été pris en compte les édifices en terre, mais aussi ceux qui présentent des parties bâties dont on ne peut dire pour l’instant si elles sont contemporaines de la construction de l’ouvrage de terre ou postérieures (fig. 1).

Malgré cette incertitude typologique, ces deux inventaires, établis à partir de la bibliographie existante et d’enquêtes sur le terrain, constituent une base solide dans la perspective d’un inventaire plus général. Ce sont en effet, 93 ouvrages qui ont été recensés dans le premier cas et 42 dans le second. Il convient de rapprocher de ces enquêtes celles réalisées par D. Barraud et B. Chièze aux confins du Bordelais, de l’Angoumois et du Périgord dans les cantons de Coutras et de Guîtres. L’inventaire publié reprend des ouvrages existants et reconnus parfois depuis le XIXe siècle, mais fait aussi état de découvertes récentes et des résultats d’une enquête menée à partir d’indices toponymiques36. Nous avons de notre côté, à l’occasion d’une étude portant sur le pays de Born au XIIIe siècle et en nous appuyant à la fois sur les indications fournies par des érudits landais du siècle dernier – Thore et l’abbé Depart – et sur les rares textes médiévaux, tenté de recenser et d’identifier les ouvrages de terre de cette pointe du diocèse de Bordeaux en bordure de l’océan37. Cette étude complétait des recherches que nous avions entreprises à l’occasion de nos travaux sur la famille d’Albret dans d’autres parties du Bordelais, du Bazadais et des Lannes38. Nous citerons enfin, pour mémoire, deux entreprises qui ont en commun l’utilisation de la photographie aérienne comme moyen d’investigation. Il s’agit, d’une part, de l’inventaire des “mottes féodales” entrepris en Médoc et en Entre-deux-Mers, dans le cadre d’une enquête plus générale, par le groupe archéologique de la SNIA. Signalé en 1982 et 1984, il ne s’est apparemment traduit que par une carte muette39 figurant dans le catalogue d’une exposition et la photographie d’une motte. Si l’inventaire a eu lieu, ce médiocre – faux – résultat se passe de commentaires. La seconde entreprise est celle menée actuellement par M. Didierjean : pour l’instant elle n’a donné lieu qu’à la reproduction de trois photographies de mottes, celles de Génissac et du Barry à Mouliets-et-Villemartin et celle d’un site du Bas-Langoiran qualifié par son inventeur de “Premier château de Langoiran”. En Bazadais, M. Didierjean a aussi repéré ce qui semble bien être une motte à proximité du bourg d’Uzeste. Mais, pour l’instant, cette enquête n’a donné lieu non plus à aucune publication40. C’est aussi dans la rubrique des inventaires typologiques qu’il convient de placer l’ouvrage de J. Gardelles, Les châteaux du Moyen Âge dans la France du Sud-Ouest : la Gascogne anglaise de 1216 à 123741. Ce travail constitue, en effet, l’ouvrage de référence pour les châteaux et maisons fortes construits du début du XIIIe siècle à la veille de la guerre de Cent Ans : 87 sites pour le Bordelais, près de 60 pour le Bazadais, 106 pour l’ensemble des Lannes et de leurs dépendances ont été inventoriés et ont fait l’objet de notices. Nous y reviendrons.

Signalons, enfin, la thèse que Mme S. Desobeau a consacrée à l’architecture médiévale et de type médiéval dans le nord de l’Entre-deux-Mers42. Dans le cadre de ses recherches, l’auteur a entrepris un inventaire qui se veut exhaustif des édifices civils, médiévaux par leur date ou leur style, de quatre cantons de l’Entre-deux-Mers bazadais et bordelais : Pujols, Sauveterre, Branne et Targon. Cet inventaire porte sur 94 édifices dont 36 ont fait l’objet d’une notice, les autres n’ayant bénéficié que d’un examen plus sommaire. Ce résultat, comparé à celui auquel est parvenu Paul Roudié, pourrait surprendre, mais Mme S. Desobeau n’a pas limité son étude à la période 1450-1550 ; d’autre part, et cela est plus gênant pour notre propos, elle n’a pas systématiquement inventorié les éléments défensifs actifs ou passifs des demeures étudiées.

Quelles conclusions peut-on tirer de l’examen de ces divers inventaires qui, il convient de le souligner, mis à part ceux entrepris par l’Inventaire général et dans le cadre des POSHA, n’ont rien de systématique ? La première concerne le nombre de sites seigneuriaux présentant des caractères défensifs ou fortifiés. L’enquête générale que nous avons menée dans les 69 communes de l’ancien arrondissement de Bazas nous a donné 50 sites, tous types confondus. Les inventaires consacrés aux ouvrages de terre – nous avons vu combien ce critère était vague – nous apportent de leur côté des renseignements précis sur les mottes du département de la Gironde et d’une partie des Landes. V. Quintanilla avait recensé pour l’ensemble du département de la Gironde 128 ouvrages attestés et 97 douteux ; P. Ménil a reconnu pour sa part, dans le Médoc, la majeure partie du Cernès, le Buch et le Born 83 sites dont 78 certains – retrouvés ou attestés par des textes ou des descriptions – et cinq hypothétiques, simplement mentionnés par des auteurs des XVIIIe et XIXe siècles. On notera qu’à l’intérieur de l’aire retenue par P. Ménil, V. Quintanilla recense 85 édifices pour le seul département de la Gironde – 32 attestés et 43 incertains – auxquels il faut ajouter les onze édifices du pays de Born soit en tout 96 “édifices” au lieu de 83 “sites”. Mais l’approche n’est pas la même, le premier inventaire – celui de V. Quintanilla – prenant en compte les édifices, le second les sites. Finalement, les conclusions de P. Ménil, qui a conduit son enquête avec infiniment plus de rigueur, ne diffèrent donc pas trop, quantitativement du moins, de celles de V. Quintanilla. Quant à P. Hittos dont le champ d’enquête était, on l’a vu, la Grande Lande et ses bordures, il est parvenu à un résultat plus modeste : 26 sites, dont 21 simples et cinq doubles, soit 31 ouvrages. Telles sont les premières données chiffrées dont on dispose pour les ouvrages de terre dans les pays landais, mais nous ignorons pratiquement tout de la situation dans la majeure partie du Marsan et des Chalosses.

Bien qu’il ait assigné à son enquête un cadre chronologique limité laissant “en amont” les fortifications antérieures à 1200 qui n’auraient pas eu de descendance, ainsi que les maisons fortes postérieures à 1337, Jacques Gardelles a eu le grand mérite de couvrir l’ensemble de la région considérée et même bien au-delà. Partant des notices et des cartes qui les accompagnent, voici quel est, par “pays”, le nombre de monuments qu’il a recensés43 : Bordelais : 87, dont 16 pour les régions au nord de la Dordogne, 27 pour l’Entre-deux-Mers, 20 pour le Médoc, 19 pour le Cernès et 4 pour les pays de Buch et de Born ; Bazadais : 59 , dont 31 pour la partie au nord de la Garonne et 28 pour celle située au sud ; Grande Lande, Lande Maritime, Marsan, Gabardan : 48 ; Chalosses et Tursan : 59. On aboutit ainsi à un total de 253 édifices soit 146 pour la Gironde et 107 pour les Landes. Parmi eux 168 seraient antérieurs à 1274, les 85 autres, dont 14 seulement pour l’ensemble des Landes et des Chalosses, datant de la période 1274-1337. Or, pour les régions concernées à la fois par cet inventaire et ceux précédemment évoqués, la question s’est posée de savoir si les résultats auxquels ils parvenaient étaient identiques. Nous avons donc procédé à deux sondages, l’un portant sur le Bazadais, l’autre sur le Médoc, le Pays de Cernès et les pays de Buch et de Born – la partie du diocèse de Bordeaux située sur la rive gauche de la Garonne –, en distinguant pour la commodité de l’approche : les sites ne comportant apparemment qu’une motte ; ceux présentant des constructions en dur sur ou à côté de mottes : il s’agit de sites devenus chefs-lieux de châtellenies et, de ce fait, bien documentés tant par les sources écrites que sur le plan archéologique, en d’autres termes les sites de “châteaux” ; enfin, les maisons fortes – constructions en dur en général, mais pas forcément sans antécédent d’ouvrage de terre. En Bazadais, sur 22 sites de mottes dont 2 doubles recensés dans le cadre du POSHA, J. Gardelles n’en a retenu que deux ; en revanche, 19 sites de châteaux sont communs aux deux inventaires ; enfin, sur 9 sites de maisons fortes antérieures à 1337, J. Gardelles n’en a recensé que 5. Dans le second sondage qui, géographiquement, ne recouvre que pour une très faible partie le précédent, les conclusions auxquelles nous sommes parvenu sont à peu près identiques, mais avec quelques nuances (fig. 2).

Fig. 2. Sites fortifiés du Médoc, du Cernès, du Buch et du Born. Carte de situation.

J. Gardelles a recensé tous les sites qui recèlent des vestiges de constructions d’importance variable, et qui ont été chefs-lieux de châtellenie : Lesparre, Castillon à Saint-Christoly, Vertheuil, Castelnau, Blanquefort et Lamarque en Médoc ; L’Ombrière et Puy-Paulin à Bordeaux ; Podensac, Noaillan, Castelnau-de-Cernès et Villandraut en Cernès ; enfin Lamothe-de-Buch, Belin et Uza dans la Lande maritime. Il s’agit là de châteaux attestés en 1274. Ce même auteur a pris aussi en compte les châteaux et maisons fortes édifiées jusqu’en 1337 qu’il qualifie toujours de “châteaux”, dont certains se signalent encore ou se signalaient naguère par des vestiges parfois considérables : le Breuil à Cissac, Sémignan à Saint-Laurent, Cussac, Bessan à Soussans, Agassac à Ludon, Le Castéra de Saint-Médard en Médoc ; Veyrines à Mérignac, Le Castéra d’Ornon à Mérignac, Labrède, Cagès à Illats, Budos, Léogeats, Balizac, Fargues en Cernès. Mais, dans d’autre cas, les vestiges se réduisent à peu de chose comme à l’Isle-Saint-Georges, Landiras, Pessac (Pape Clément) ou Audenge, ou bien ils ont disparu comme au Castéra à Saint-Germain-d’Esteuil. La motte de Montaner en Born et la maison forte de Virelade n’ont pu être encore identifiés. À l’examen, on se rend compte que J. Gardelles ne s’est pas toujours intéressé aux sites sur lesquels il ne subsistait aucun vestige de construction : tel est le cas de la première maison forte des Got à Villandraut. De celles des Fargues ou des Budos antérieures à la construction des grands édifices du début du XIVe siècle encore visibles aujourd’hui. Mais pour quelle raison, le château d’Hostens, dont il ne reste cette que des monticules de terre, mais bien attesté en 1274, a-t-il été classé comme une construction des années 1274-1293 ? En revanche, pour la période 1274-1337, J. Gardelles a pris en compte des édifices attestés par des documents, entre autres des autorisations de construction ou de reconstruction ; parfois il n’en reste aucun vestige : ainsi, au Luc à Blanquefort, à la motte de Caupenne à Parempuyre, à Livran à Saint-Germain-d’Esteuil ou à Saint-Magne ; d’autres fois le site a disparu comme à Lilhan en Médoc ou bien il n’a pas été possible de l’identifier : ainsi à Uch dans Lesparre ou à Vallenon dans Saint-Seurin-de-Cadourne. On peut ainsi se demander si la construction a bien eu lieu. D’autres fois encore, comme au Castéra à Talais, compte tenu de la nature des vestiges subsistants – des tertres – l’autorisation concerne-t-elle bien le site ? À côté de cela J. Gardelles n’a pas pris en compte des ouvrages qui existent toujours et qui se présentent sous forme de tertres circulaires ou rectangulaires entourés de fossés. Que certains remontent au XIIe siècle n’est guère douteux, mais il est non moins probable que dans les premières années du XIIIe siècle nombre d’entre eux étaient encore “en fonction” ; pour les autres, il doit s’agir, soit de tertres anciens soit de terrassements plus récents ayant servi d’assiette ou même constitué une partie des structures de maisons fortes du XIIIe au XVe siècle. Appartiennent à ces différents types : Cantemerle à Ludon, Saint-Genès-de-Meyre à Avensan, Romefort à Castelnau, La Motte de Carcans en Médoc, la motte de Canéjan, Fontaudin à Pessac, Saint-Albe à Gradignan, Les Castérasses et Gassies à Cabanac, Riet à Saint-Maurillon, le Tuco de La Motte à Budos, La Mothe à Sauternes en Cernès ; les Castéras à Audenge, le Tuc de Rambardine et celui de Cadet à Aureilhan, les tucs de Houns à Saint-Paul, ceux de Castet à Sainte-Eulalie, le tuc de Sarrazin et la motte de Monjat à Pontenx dans la Lande maritime. La nature ou la médiocrité des vestiges jointe à l’absence de documents les a fait sans doute écarter par J. Gardelles ; mais rien ne prouve que certains n’aient pas été édifiés et que d’autres n’aient pas continué à être utilisés entre 1217 et 1337. Il existe aussi toute une série de résidences nobles pour lesquelles on ne dispose que de rares témoignages écrits postérieurs à 1337, mais dont il serait risqué d’affirmer qu’elles ne sont pas plus anciennes : Issan à Cantenac, Citran à Avensan, Lanessan à Cussac, Terrefort et Saint-Abon à Blanquefort, Le Thil à Saint-Médard, La Tour de Carnet à Saint-Laurent en Médoc, et ce ne sont là que quelques exemples. Au terme de ce sondage, il apparaît que J. Gardelles a sous-estimé le nombre des ouvrages fortifiés existant au cours de la période allant de 1217 à 1337, et encore les sites que nous avons évoqués ne constituent-ils qu’une partie de ceux que l’on pourrait recenser. Cela doit être aussi vrai des autres parties du Bordelais, du Bazadais ou des Lannes. En fait, cette sous-estimation est inhérente aux inventaires typologiques établis dans des cadres chronologiques précis.

Au terme d’un pré-inventaire que nous avons établi à l’occasion de cet essai de bilan on peut estimer à trois cents en Bordelais et Bazadais le nombre de sites d’habitats seigneuriaux fortifiés bien attestés et à une bonne centaine les sites possibles. En revanche, pour les Lannes et leurs dépendances, nous ne pensons pas qu’il y en ait eu plus de deux cents – et c’est un maximum. À cela plusieurs raisons qui valent chacune pour telle ou telle partie des Lannes : la faiblesse du peuplement dans la Grande Lande ; le droit coutumier interdisant toute forme de fortification – même au roi-duc-dans la pointe méridionale du pays ; enfin – et cela est surtout valable pour les Chalosses – le fait que bien des sites qui n’avaient jamais porté que des fortifications en terre – simples maisons fortes des XIIe et XIIIe siècles – furent abandonnées sans que l’on ait vu apparaître aux XIVe et XVe siècles, sur ces mêmes sites ou sur des sites nouveaux, des maisons fortes en dur. L’inventaire des sites seigneuriaux fortifiés landais avec ses blancs dans l’espace et ses ruptures dans le temps serait probablement passionnant à réaliser. À la différence de ce qui se passe pour ces sites, il n’existe pas en Bordelais, Bazadais et Lannes l’ébauche d’un inventaire consacré aux enceintes urbaines ou villageoises ; sans doute a-t-on considéré qu’elles ne présentaient pas de caractères suffisamment originaux et qu’elles n’étaient pas assez nombreuses pour justifier une telle démarche. Dans la Guyenne militaire, Léo Drouyn a rédigé des notices plus ou moins longues sur un certain nombre d’enceintes dans le cadre de monographies urbaines : tel est le cas pour les anciennes cités de Bordeaux et Bazas mais, dans celui – le plus fréquent – de villes ou de bourgs ayant une origine castrale, c’est à partir du château que l’enceinte est étudiée. L. Drouyn n’a pas pour autant négligé les bastides. Il a ainsi étudié les enceintes de Blaye, Bourg, Saint-Émilion, Castillon et celle de Libourne pour la partie du Bordelais située au nord de la Dordogne ; celles de Rions et Saint-Macaire et des bastides de Cadillac et Créon en Entre-deux-Mers ; celles de La Réole, des habitats castraux de Gensac, Pujols, Castelmoron, Lamothe-Landerron et des bastides de Sauveterre et Monségur dans le nord du Bazadais ; celles des bourgs castraux de Langon, Cazeneuve, Aillas et Roquetaillade dans la partie méridionale du diocèse. En Bazadais, les seules enceintes qu’il n’ait pas décrites sont celle de Captieux et celles de localités se trouvant actuellement en Lot-et-Garonne : Meilhan, Casteljaloux, Bouglon et Sainte-Bazeille.

Plusieurs travaux plus ou moins récents ont aussi abordé directement ou non le problème des enceintes. Une mention particulière doit être accordée, comme pour les habitats seigneuriaux, aux POSHA : ceux des communes de Dax et d’Aire contiennent de substantielles notices consacrées aux enceintes de ces deux villes. Dans celui du Bazadais sont étudiées aussi de façon approfondie les enceintes de Bazas, Langon, Roquetaillade, Cazeneuve, Aillas et Captieux ainsi que les problèmes posés par les sites de Castets-en-Dorthe et Villandraut. D’autre part, quatre fascicules de l’Atlas historique des villes de France portent sur des villes bazadaises et landaises : Bazas, La Réole, Saint-Sever et Mont-de-Marsan44. Enfin, dans le chapitre des Albret consacré à leur patrimoine figure un certain nombre de notices qui concernent les enceintes de Gensac, Pujols, Castelmoron, Sainte-Bazeille dans le nord du Bazadais ; Casteljaloux, Meilhan, Aillas et Cazeneuve dans la partie sud du diocèse ; Rions dans l’Entre-deux-Mers bordelais ; Sore, Bourricos et Labouheyre dans la Grande Lande ; enfin, Tartas et Clermont en Chalosse45. D’autres encore peuvent être glanées dans les mémoires de maîtrise traitant de l’histoire de l’occupation du sol ou dans les travaux de l’inventaire général. Les habitats castraux proprement dit ont aussi suscité un certain nombre d’études : la plus ancienne est celle de B. Cursente sur les castelnaux du Béarn, du Tursan et du Marsan, une œuvre de pionnier46 ; sont de même nature celle que nous avons consacrée aux castelnaux du Bazadais méridional47 ou des monographies comme celle de Roquetaillade48 ; le problème de la fortification des bastides a donné lieu, il y a déjà près de trente ans, à un débat entre C. Higounet et J.-P. Trabut-Cussac qui s’est traduit par deux articles, qui restent encore aujourd’hui des travaux de référence49. J. Gardelles a abordé à son tour cette question en 1973, et plus récemment de façon ponctuelle à l’occasion du colloque de Sauveterre-de-Guyenne50. Mais c’est à J.-M. Lalanne qu’il convient de rendre un hommage particulier pour avoir, dans un excellent TER consacré à la topographie des bastides landaises, révélé les éléments d’enceinte d’un certain nombre d’entre elles51. De même que pour les maisons fortes, on ne saurait enfin oublier les compléments fort intéressants apportés par P. Roudié pour la période 1453-1553 en Bordelais et Bazadais : porte du Cailhau et fossé et boulevard de Sainte-Croix à Bordeaux ; enceintes de Casteljaloux et la Réole en Bazadais, de Blaye, Bourg, Saint-Émilion, Libourne et Cadillac en Bordelais52.

Ces travaux, et le nombre bien plus restreint d’enceintes urbaines ou villageoises que de mottes, châteaux ou maisons fortes nous permettent de proposer non un pré-inventaire, mais un inventaire à peu près complet de ces constructions. Précisons que nous n’avons pas pris en compte les enceintes de basses-cours castrales – quelle qu’en soit l’époque – dont nous n’avons pas pour l’instant la preuve qu’elles aient abrité un village (fig. 3). Enceintes d’origine antique [4] : Bordeaux, Bazas, Aire, Dax ; enceintes urbaines médiévales greffées à celles de cités antiques [4] : Bordeaux [2], Bazas [1], Aire [1] ; enceintes d’origine castrale : Bordelais [6] : Blaye [2], Bourg Rions, Castillon ; Bazadais [13] : Gensac, Pujols, Castelmoron, Pommiers, Sainte-Bazeille, Langon, Roquetaillade, Cazeneuve, Aillas, Captieux, Meilhan, Bouglon, Casteljaloux ; Lannes [14] : Gabarret ; Roquefort, Mont-de-Marsan [2], Hontanx, Perquie en Marsan ; Sore, Labouheyre dans la Grande Lande ; Tartas [2] ; Uza ; Pouillon en Chalosse ; Castelnau-Tursan et Miramont en Tursan. À ces enceintes reconnues on peut ajouter des enceintes possibles, sinon probables : Francs et Villandraut en Bordelais ; Castets-en-Dorthe et Cocumont en Bazadais ; Sabres, Arjuzanx, Bourricos dans la Grande Lande ; Duhort en Chalosse ; Peyrehorade, Clermont et Castelnau en Chalosse ; Brassempouy, Castelsarrazin, Samadet, Urgons, Doazit, Mugron, Montgaillard, Pimbo, Sarraziet dans le Tursan ; d’autres, enfin dont il conviendrait de rechercher si elles ont ou non abrité un bourg, encore que la chose soit probable : Fronsac, Saint-André-de-Cubzac et Noaillan en Bordelais ; Landerron et Blasimon en Bazadais ; Labrit dans les Landes. À ce groupe, de loin le plus important, il faut ajouter les enceintes qui ne sont pas toujours complétées par un château, protégeant des bourgs d’origine ecclésiastique : Saint-Émilion et Saint-Macaire [3] en Bordelais ; la Réole [3] et Caudrot en Bazadais ; Saint-Sever [2] et Sorde dans les Landes ; enfin, les enceintes protégeant des bastides, les unes certaines : Créon, Libourne et Cadillac en Bordelais ; Monségur, Sauveterre, Pellegrue et Samazan en Bazadais ; Saint-Justin, Arouille, Labastide-d’Armagnac, Saint-Gein, Montégut, Cazères et Grenade en Marsan ; Geaune, Sarron, Coudures et Labastide en Tursan ; Bonnegarde, Montfort et Hastingues en Chalosse ; les autres seulement possibles comme Betbezer et Rondeboeuf en Marsan et Baigts en Chalosse. On arrive ainsi à un total de plus de 100 enceintes urbaines et villageoises de toute taille, de toute origine et de toute nature pour l’ensemble des trois pays.

Fig. 3a et b. Fig. 3a et b. Enceintes urbaines et villageoises. 1. Cité ; 2. Bourg ou quartier ; 3. Habitat castral avec enceinte attestée ; 4. Habitat castral avec enceinte probable ; 5. Habitat castral avec enceinte possible ; 6. Habitat d’origine ecclésiastique ; 7. Bastide avec enceinte attestée ; 8. Bastide avec enceinte possible.

C’est d’abord sous forme de notices ou de monographies que se présentent les études consacrées aux habitats défensifs et fortifiés du Bordelais, du Bazadais et des Lannes. Parfois, elles accompagnent des travaux de synthèse auxquels elles servent de référence c’est le cas de la thèse de J. Gardelles, de celles de P. Roudié et de Mme S. Desobeau ou celui de mémoires de maîtrise, tels ceux de J.-M. Lalanne ou de B. Cursente ; parfois elles constituent l’objet même de la recherche entreprise c’est le cas des inventaires : Inventaire général, POSHA, Atlas des villes – ou l’essentiel – mémoires consacrés aux ouvrages de terre. Mais il peut s’agir aussi d’un véritable parti comme celui de Léo Drouyn dans la Guyenne militaire. Restent enfin les monographies qui constituent parfois des “séries”, comme celles que le colonel Massie a consacrées aux sites castraux landais, mais qui, le plus souvent, sont isolées. Que ces notices et monographies soient de qualité diverse n’étonnera guère, et ce n’est pas ici le lieu de comparer les mérites ou les défauts de chacune d’elles. En se référant au dossier idéal comportant données topographiques et photographiques, sources et historiographie, histoire et description, nous nous permettrons néanmoins de faire quelques observations. Si l’on excepte les travaux les plus récents – les notices ne font pas en général état de la situation précise des sites archéologiques – coordonnées, numéros de parcelles cadastrales et conditions d’accès – ou de leurs caractères géographiques – altitude, relief, nature du sous-sol et du sol, hydrographie, couverture végétale. Si les sources écrites sont en général convenablement prises en compte, en revanche, le plus souvent, il n’en existe pas de répertoire précis, situation que l’on retrouve en matière de bibliographie ainsi que pour les plans et documents figurés. L’historiographie fait aussi souvent défaut. En fait, la plupart des notices consistent en une histoire et une description du site, avec, on s’en doute, des différences parfois considérables. Les plans– même sommaires – sont souvent absents ou reprennent – en Gironde – ceux dessinés par L. Drouyn qui servent de référence depuis cent vingt ans ! Il en est de même de l’illustration qui fait aussi fréquemment appel aux gravures du siècle dernier dont l’intérêt est certes parfois considérable, mais qui ont besoin d’être complétées par des photographies modernes.

À vrai dire, nous n’avons trouvé qu’une série de notices franchement mauvaises, celles qui se trouvent dans le mémoire de maîtrise consacré à l’inventaire des ouvrages de terre dans le département de la Gironde (V. Quintanilla) : pas une seule référence de source ou d’ouvrage, quelques rares plans et photographies. Mais les bonnes notices sont rares et les dossiers vraiment complets exceptionnels. Les seuls qui correspondent à la définition que nous avons esquissée sont ceux de l’Inventaire général. Même les POSHA présentent – à notre grande confusion – un défaut majeur : l’absence de relevé récent du site et des édifices, cela en raison du coût d’une telle opération. Ceci dit, si l’on disposait d’un POSHA pour toute l’Aquitaine, un pas de géant aurait été accompli dans notre connaissance des habitats fortifiés. En dehors de ces deux opérations majeures, il convient néanmoins de signaler : les notices de Léo Drouyn, remarquables pour leur époque, reprises et complétées par J. Gardelles ; celles de Paul Roudié appuyées sur des sources écrites et figurées très souvent inédites et abondantes ; certains mémoires de maîtrise tels ceux de B. Cursente et J.-M. Lalanne qui traitent chaque site à travers la grille d’un dossier normalisé et, de ce fait, utilisent plans et photographies. Mais il existe aussi des travaux “d’amateurs” qui méritent une mention particulière. Nous citerons volontiers ceux du colonel Massie : cet ancien militaire nous a en effet laissé lever spécialement et par une ou plusieurs coupes, illustrées de photographies aériennes et au sol, le tout accompagné d’une minutieuse description et d’une histoire du site53. On pourrait aussi évoquer les monographies consacrées au château de Blanquefort ou à ceux de Roquetaillade en Gironde54, à ceux d’Aspremont et de Lacaze en Parleboscq dans les Landes55, ou plus modestement à une motte, celle du Barry à Mouliets-et-Villemartin, encore que dans ce cas la documentation écrite ait été quelque peu oubliée56.

Si l’absence, le petit nombre ou le caractère sommaire des plans, la rareté de l’illustration, constituent l’un des points faibles de la documentation, il en est un autre qui réside dans la part modeste faite à l’histoire des monuments et à leur reconstitution éventuelle. Il faut en rechercher la cause dans le manque d’études spécifiques et de fouilles. N’est-il pas significatif que ce soit à l’occasion de fouilles que l’on soit amené à se pencher sur l’histoire d’un site, et que les fouilles soient presque toujours de sauvetage ! Il convient donc de signaler les quelques études ou publications de documents archéologiques ; ainsi, les articles consacrés à la démolition des remparts de Dax ou de Sore57, la publication des documents relatifs aux sièges de Libourne de 1649 et 165358.

Quant aux fouilles, leur catalogue tient en moins d’une ligne car, à notre connaissance, seulement trois sites ont fait en une vingtaine d’années l’objet de recherches programmées. Il s’agit de ceux de Blanquefort, de Rauzan et de Saint-Germain-d’Esteuil. Le premier, ouvert en 1962 sous la direction de A. Trident, a d’abord consisté en travaux de défrichage, déblaiement et consolidation, puis, à partir de 1966, en fouilles et consolidations59 ; celui de Rauzan, dirigé par R. Coste, a fonctionné de 1972 à 198360. Il a permis de dégager l’édifice, de reconstituer l’histoire du site et de recueillir un intéressant mobilier. Quant à celui de Saint-Germain-d’Esteuil, il a commencé en 1986 sous la direction de P. Garmy et de S. Faravel. Les deux premières campagnes ont permis de dégager à l’intérieur d’un théâtre antique un logis seigneurial (23 m x 7,50 m) associé à une tour carrée de 10 m de côté ennoyée sous l’effondrement de la partie supérieure, ce qui avait fait croire qu’il pouvait s’agir d’une motte. Ces deux édifices constituent les vestiges les plus apparents d’un habitat seigneurial et peut-être villageois délimité par une enceinte associant l’arc de la cavea à des terrassements et fossés médiévaux61. D’autre part, à l’occasion de sondages ou fouilles récentes, les fouilleurs se sont trouvés en présence d’éléments d’enceintes urbaines, ce qui a permis de préciser ou confirmer un certain nombre de points. Ainsi, à Bordeaux, en 1982 et 1983, à l’occasion du creusement d’un parc de stationnement souterrain, ont été retrouvées une partie des fondations de la porte Saint-Julien – sur la route de Toulouse – ainsi que l’amorce des murs de la troisième enceinte (1304) et de ceux d’un grand boulevard de la fin du XIVe siècle62. Des éléments de la partie occidentale de cette même enceinte, dépourvue de fossés en avant, ont été retrouvés en 1984 rue des Frères-Bonnie63. D’autre part, à Mont-de-Marsan, à l’occasion de fouilles menées dans le secteur occidental de l’ancien castelnau, on a mis au jour une structure excavée comblée d’un matériel céramique homogène qui pourrait bien correspondre à l’une des enceintes du castelnau64 ; enfin, à Bazas, des terrassements effectués place de la cathédrale selon un axe nord-sud n’ont pas permis de retrouver les fondations du rempart du Bas-Empire, vraisemblablement situé à plus faible distance de la façade de la cathédrale65.

L’absence d’inventaire systématique, le caractère souvent incomplet des notices et monographies qui les accompagnent, les inventaires partiels n’ont pas permis jusqu’à aujourd’hui le développement de grandes synthèses. Deux seulement ont vu le jour : celles de J. Gardelles et de Paul Roudié, dont les mérites ne sont plus à souligner et que nous avons déjà évoquées. J. Gardelles utilise le terme de château pour désigner tous les habitats seigneuriaux fortifiés. Il considère, d’autre part, que les seuls châteaux que l’on puisse prendre en compte pour la période 1217-1337 sont ceux qui sont attestés par les textes ou bien ceux qui présentent encore des parties maçonnées remontant à cette époque. Il estime aussi que “peu de châteaux de la France du Sud-Ouest conservent des parties antérieures au XIIIe siècle”66. Pour notre part, nous ne pensons pas que l’on puisse qualifier de châteaux tous les habitats seigneuriaux fortifiés et nous réservons ce terme aux chefs-lieux de châtellenie. En outre, on ne saurait exclure, quelle que soit l’époque, des structures entièrement édifiées en terre. Enfin, dans le cadre d’une période donnée, tous les édifices, quelle que soit leur date de construction, sont à prendre en compte aussi longtemps qu’ils ne sont pas désertés.

Jacques Gardelles a donc essayé de dégager les caractéristiques des diverses générations de châteaux et maisons fortes en pierre construits ou remaniés de 1217 à 1337. Il s’agit, tout d’abord, des châteaux romans dans la tradition des pays de l’Ouest, aux courtines parementées en petit appareil et avec gros donjons (Vertheuil, L’Ombrière) et de tours de plus faibles dimensions souvent mal construites, mal conçues et difficiles à dater avec précision. L’auteur met sur le compte de la faiblesse des moyens des vassaux du roi-duc la médiocrité de ces constructions, tout en regrettant la disparition des châteaux du roi-duc – mais il n’y en avait que trois, L’Ombrière, Dax et Belin –, à moins de prendre en compte des constructions comme celles de Labouheyre, Sabres ou Laharie, qui manifestement ne comportaient pas de parties maçonnées lors de leur construction. Sans doute faut-il rechercher dans le nombre et l’importance des constructions en terre et en bois, encore au XIIIe siècle, le fait qu’il ne reste en Bordelais, Bazadais et pays landais, le souvenir d’aucune “salle”, à la différence de la Gascogne intérieure et du Béarn.

Se fondant sur les plans et les conceptions d’ensemble, tenant compte aussi des moyens dont disposaient les constructeurs, l’auteur a examiné ensuite les constructions postérieures à la guerre de Guyenne (1293-1304). Il les a réparties en deux groupes : les “grands châteaux” et les “petits châteaux et maisons fortes”. Parmi les premiers, il distingue les “châteaux de fidèles” aux dispositions “traditionnelles”, comptant sur les défenses naturelles, réutilisant la maîtresse tour et le tracé des enceintes antérieures, la “pierre remplaçant le bois” : il s’agit de sites d’éperons barrés (Roquetaillade, Pommiers, Pujols, Rauzan en Bazadais), de sommets de collines (Benauges en Bordelais), d’îles (Lamarque, Lesparre ou Labrède en Bordelais), de mottes anciennes entourées d’une muraille et flanquées de tours comme à Belin. À ces constructions, l’auteur oppose des châteaux nouveaux. Les uns sont bâtis sur des sites au relief accusé dans lesquels il voit une alliance du relief et de nouvelles techniques : le donjon de Saint-Émilion, dans une enceinte urbaine, inspiré de modèles anglais, Langoiran avec une grosse tour ronde et des tours étagées, Fronsac enfin ; mais l’essentiel des défenses se trouve néanmoins dans les courtines avec fruit important, hourds, mâchicoulis et meurtrières. D’autres châteaux, comme celui de la Réole au plan régulier, révèlent au contraire une indépendance à l’égard du relief. Mais, dans la seconde moitié du XIIIe siècle et surtout au début du XIVe siècle, apparaissent de grands châteaux quadrangulaires, inspirés de modèles étrangers tels que Villandraut, Budos, Fargues en Bordelais, La Trave et le château neuf de Roquetaillade en Bazadais.

À ce groupe, Jacques Gardelles oppose celui des petits châteaux et des maisons fortes, forteresses secondaires parfois adultérines dont la plupart ne devaient être encore que de modestes édifices. La rareté des vestiges conservés dans certaines régions comme les Landes, où J. Gardelles ne signale guère que Cauna, Poyaller, Arjuzanx et le donjon de La Cataye à Mont-de-Marsan, milite en faveur de cette hypothèse. En Bordelais et Bazadais se dégagent, en revanche, deux types de maisons fortes : les unes, élémentaires, sont soit des salles d’un ou deux étages soit de véritables tours : Brugnac, Léogeats, Roquefort, Cagès, Ansouhaite, surtout nombreuses dans le nord de l’Entre-deux-Mers : Sauvagnac, L’Embège, Rauzan, Salleboeuf, Laubesc, Semens ; les autres, des blocs “salle-tour” comme à Lavison, Savignac d’Auros et probablement Castets-en-Dorthe, Bessan ou Sémignan. Restent enfin les maisons fortes quadrangulaires à quatre tours ou tourelles d’angle d’assez grande taille : les plus remarquables sont le Grand Puch, Camarsac et Cursan, dans l’Entre-deux-Mers, Le Castéra à Saint-Médard-en-Jalles, Agassac en Médoc, Balizac ou encore Guilleragues en Bazadais. Il s’agit, semble-t-il, d’une adaptation des grands châteaux, dont Villandraut constitue le prototype en Gascogne, aux besoins et aux moyens de seigneurs plus limités que ceux des familles de l’entourage pontifical.

La typologie et la chronologie proposées par Jacques Gardelles servent encore de référence ; mais, à la lumière des travaux entrepris depuis une quinzaine d’années, deux questions majeures se posent : celle du maintien au moins tout au long du XIIIe siècle de forteresses en terre et de leur éventuel rajeunissement par adjonction sur la motte ou à côté de constructions en dur ; celle de la pérennité du modèle “motte-basse-cour” : jusqu’à quelle époque a-t-on continué à construire de tels édifices ? C’est surtout pour la région des Lannes que se posent ces deux questions lorsqu’on constate l’extrême rareté, bien difficile à expliquer, de vestiges maçonnés antérieurs à 1337.

À partir des inventaires qu’ils avaient réalisés, d’autres chercheurs ont entrepris de leur côté le classement typologique des ouvrages de terre. La valeur de ces classements est évidemment en fonction de la qualité du recensement et du dossier de chaque site. V. Quintanilla, s’inspirant des critères proposés par M. Rem, parus dans la revue Antiquity en 1959, mais à partir d’un matériau de médiocre qualité – car faute de vérifications suffisantes elle compte, on l’a vu, 97 “mottes” douteuses pour 128 “certaines” – a tout de même fait apparaître la prééminence des “mottes rondes” sur celles de forme quadrangulaire ou en promontoire, de même que le petit nombre de basses-cours. P. Hittos a souligné lui aussi l’importante proportion de mottes simples et la rareté des tertres quadrangulaires. Mais, l’approximation des données initiales ne nous a pas permis de retenir des chiffres précis. Enfin, P. Ménil, qui a exploré le Médoc, le pays de Buch et le Cernès, a procédé à une analyse plus poussée des 93 édifices recensés sur 83 sites, selon les critères définis dans le Lexique du programme H 40. Sur ces 93 édifices, 82, soit 88 %, sont des tertres, les autres des enceintes [5], des moated sites [2] ou des édifices maçonnés ayant succédé à une motte. Les tertres ne sont que dans 15 cas, soit 20 %, associés à un enclos apparent avec toutes les variantes possibles : inclus décentrés [3] ; tertre et enceinte juxtaposés [1] ; tertre tangent externe [1] ; tertre indépendant de l’enclos [3] ; tertre tangent inclus et externe [1] ; tertre tangent interne [1] ; tertre et enclos alignés et tangents [2]. Les tertres, pour la majorité d’entre eux, sont de forme circulaire [44], exceptionnellement ovale [5], rarement quadrangulaire [12]. Les tertres quadrangulaires sont dans deux cas sur trois de 25 m x 40 m ; le diamètre des tertres circulaires varie de 10/25 m de diamètre (31 %) à 25/40 m (25 %), 40/90 m (20 %), mais ne dépasse qu’exceptionnellement 90 m (3 %). Une première conclusion se dégage déjà de ces travaux d’approche : la prédominance des sites possédant un seul ouvrage de forme arrondie sans enclos. V. Quintanilla et P. Ménil se sont aussi penchés sur la question de la descendance de ces ouvrages de terre : sur 106 sites reconnus, la première en a recensé 59 cas – dont 11 avec superposition. Le second, en revanche, a noté que sur 93 édifices 26, soit moins d’un tiers, avaient une descendance : dans 16 cas la motte sert de support, dans 7 cas elle a été détruite et dans 3 les deux édifices coexistent.

Pour la fin de notre période, Paul Roudié a donné une image tout à fait précise de la situation en Bordelais et Bazadais. Il a fait ressortir l’importance des grandes constructions bordelaises (le Château Trompette, le Fort du Hâ, la Porte de Cailhau, le boulevard Sainte-Croix), sans négliger pour autant les autres enceintes urbaines dont il a montré que l’on n’avait cessé de les réparer même dans le courant de la première moitié du XVIsiècle. La construction ou la reconstruction de maisons fortes, la persistance des éléments défensifs, témoignent de la pérennité des “modèles” médiévaux. Néanmoins, un grand nombre de maisons nobles ou non-nobles ne possèdent pas de moyens de défense et l’on peut regretter que l’auteur n’ait pas cru bon de faire apparaître sur sa carte de répartition les édifices fortifiés et ceux qui ne l’étaient pas, de même que les châteaux et maisons fortes plus anciens. D’autre part, ce n’est qu’au fil des descriptions qu’il mentionne – sauf pour Blanquefort – les aménagements liés à l’usage des armes à feu. Nous nous demandons si, comme cela semble avoir été le cas pour les églises, les guerres de Religion ont entraîné ou non un développement de ces dispositifs. Mais ces quelques remarques ne sauraient en rien atténuer l’importance de ce travail. On le constate encore plus lorsque on aborde les Landes, une région pour laquelle on ne dispose d’aucune synthèse sur les demeures fortifiées de la fin du Moyen Âge. Les conclusions de Paul Roudié ont été confirmées par Mme S. Desobeau quant à la rareté des moyens de protection dans les constructions nouvelles, dès la période 1450-1550 et, lorsqu’il y en a, sur leur caractère peu élaboré.

Voici enfin – ce n’est pas une synthèse mais un constat – les conclusions de l’inventaire mené à travers les 69 communes du sud de la Gironde qui correspondent à la partie de l’arrondissement de Langon située sur la rive gauche de la Garonne (fig. 4). Sur les 50 sites d’habitats seigneuriaux recensés nous avons inventorié : 22 sites certains ou probables de tertres des XIe et XIIe siècles67 : La Mothe à Aillas, La Mothe de Savignac, La Mothe de Berthès, le château de Langon, la motte du Moulin et celle du Château de Fargues, celle de Barjumeau et La Mothe à Sauternes, La Motte à Léogeats, le château de Captieux, les mottes jumelles de Tontoulon et le Castet proche de Tontoulon, les mottes doubles de Pey de Bordes à Bernos, le douc de Couhé au Nizan, le douc de Boutevin à Lignan, La Motte de Sauviac, le douc de Rippes à Sendets, le château de Lerm, Uzeste, le Castéra à Hostens, la motte de Lucmau, la motte de Cazeneuve à Préchac ; deux sites sur lesquels l’existence d’une motte oblitérée par les constructions ultérieures est probable (Auros, Roquetaillade) ; enfin, un site sur lequel l’existence de la motte est incertaine (Saint-Loubert).

Fig. 4. Sites fortifiés du Bazadais. 1. Motte existant ; 2. Motte attestée disparue ; 3. Motte probable disparue ; 4. Motte possible ; 5. Château existant ; 6. Château attesté disparu ; 7. Maison forte existant ; 8. Maison forte attestée disparue ; 9. Maison forte probable disparue ; 10. église fortifiée ; 11. église fortifiée disparue ; 12. Enceinte de ville ou de bourg, clôture de cimetière existant ; 13. Enceinte de ville ou de bourg, clôture de cimetière attestée disparue ; 14. Enceinte de ville ou de bourg, clôture de cimetière incertaine ; 15. Moulin fortifié ; 16. Cimetière ; 17. Commanderie.

Dix-huit sites ont porté des châteaux de pierre, chefs-lieux de châtellenies hautes justicières à la fin du XIIIe siècle : Aillas, Auros, Savignac, Lados, Langon, Roquetaillade (Mazères), Castets-en-Dorthe, Lerm, Captieux, Saint-Michel-de-Castelnau, Bazas, Sauviac [2], Gans, Castelnau-de-Cernès, Villandraut, Noaillan, Cazeneuve. Dans trois cas, (Langon, Captieux, Cazeneuve), le château de pierre s’est sans aucun doute superposé à la motte ; dans deux autres (Roquetaillade, Auros), selon toute probabilité. à Sauviac, Aillas, Savignac, le site de la motte et celui du château qui lui a succédé sont distincts ; à Villandraut, justice du XIVe siècle, le château a remplacé une maison forte, mais sur un site différent. Restent huit cas sur lesquels il est impossible de se prononcer : Lerm, Bazas, Noaillan, Lados, Castets, Saint-Michel, Gans, Castelnau. Dans cinq cas, il ne reste plus aucun vestige de ces châteaux parfois imposants, démolis avant la Révolution comme à Langon, Gans, Captieux, en 1840 à Bazas, vers 1930 à Saint-Michel. Huit de ces châteaux ont été à l’origine d’habitats subordonnés, cinq avec enceinte certaine (Langon, Roquetaillade, Aillas, Captieux, Noaillan) un avec enceinte probable (Castets), un autre sans enceinte (Auros).

Le nombre de maisons fortes recensées ne s’élève qu’à quinze ; neuf sont antérieures à 1337 : Villandraut, Illon à Uzeste, Fargues, La Tourasse à Léogeats, Balizac, La Trave à Préchac, Le Camp de César et Le Battant à Pompéjac, La Motte à Coimères ; six autres sont postérieures : Les Castérasses à Birac, la tour de Trazits à Gajac, Grignols, Le Mirail à Brouqueyran, La Travette à Préchac, Razens à Aillas. À Fargues, la relation avec une motte est certaine ; elle est possible à Illon sur le même site, avec déplacement à Léogeats. Les vestiges réduits à un tertre et à des terrassements ont fait croire dans le cas de Pompéjac (deux cas) ou de Coimères que l’on était en présence de mottes, ce que les sources écrites et l’examen des lieux infirment. On notera le médiocre état des vestiges de ces diverses maisons fortes : ce n’est que dans trois cas qu’il y a eu intégration dans des édifices ultérieurs (Illon, Grignols, Brouqueyran) ; le plus souvent il s’agit de ruines parfois imposantes (Fargues, La Tourasse, La Trave), parfois réduites à peu de chose (Birac, La Travette, Razens). À Gajac, nous ne sommes même pas parvenus à localiser le site.

Aux sept enceintes déjà recensées, il convient d’ajouter celle de Bazas, – en partie d’origine antique, en partie d’origine médiévale – ainsi que la seconde enceinte de Langon autour du bourg de Notre-Dame (prieuré de La Sauve). Les autres sites présentant des vestiges de fortification sont deux commanderies – celle de Cours, d’origine templière avec maison forte, dépendances et chapelle à l’intérieur d’une courtine, et celle des Antonins de Pondaurat, ensemble plus complexe associant commanderie, chapelle, pont et moulin et peut-être enceinte villageoise. Mais nous n’avons trouvé qu’un autre moulin fortifié, celui de Piis à Bassanne. Mis à part une banale clôture, nous ne pensons pas que les abbayes cisterciennes de Fontguilhem et du Rivet aient jamais été fortifiées, pas plus que le couvent des mineurs de Bazas hors les murs ou l’enclos canonial d’Uzeste. Un examen minutieux des sites de cimetières n’a permis de retenir, sur plus de soixante sites, que trois d’entre eux : Sendets, Gajac et, avec réserves, Pompéjac. En revanche, des traces de fortification se voient ou se voyaient dans 18 églises : à Escaudes, Lucmau, Préchac, Insos (Préchac), à la collégiale de Villandraut, à Noaillan et Marimbault, dans les petites landes du Bazadais ; à Cudos, Birac, Gajac, Trazits (Gajac), Sendets, Gans, Lavazan, Saint-Germain-d’Auros, Campin et Auzac (Grignols), Monclaris (Sigalens) dans le pays mêlé ; mais cela ne constitue finalement qu’une faible proportion. Comparé à d’autres parties du Bordelais ou du Bazadais, le sud du diocèse de Bazas apparaît finalement comme une région peu fortifiée à la fin du Moyen Âge, sauf dans la partie située au sud-ouest du chef-lieu du diocèse en direction des Lannes.

Que ce bilan, même limité aux sites “seigneuriaux”, soit incomplet, nous en avons bien conscience : il permettra – du moins nous le souhaitons – de se faire une idée assez précise de l’état de la recherche dans les trois pays étudiés. Celle-ci présente un aspect positif : l’existence de grands répertoires anciens ou de synthèses récentes appuyés sur des inventaires à peu près exhaustifs. Ses faiblesses résident : dans l’inégalité des traitements selon les régions – le retard des études dans le Marsan et la Chalosse est criant – ou selon les thèmes – les mottes, les enceintes, les églises attirent moins que les “châteaux” ; dans la rareté des inventaires systématiques et généraux qui, en plus de leur fiabilité, permettent seuls d’appréhender le phénomène défensif sur une vaste échelle pour une époque donnée ou de suivre son évolution sur une période longue ; dans la rareté des fouilles, le caractère ponctuel des campagnes de photographies aériennes, l’absence de relevés topographiques, ou le petit nombre d’investigations dans les archives, y compris celles de l’époque moderne et, à l’inverse, le caractère répétitif de bien des monographies.

Notes

  1. Pour connaître de manière détaillée les variations territoriales du duché Aquitain, il convient de se reporter à l’ouvrage de J.-P. Trabut-Cussac, L’administration anglaise en Gascogne sous Henry III et Édouard Ier de 1254 à 1307, Droz, 1972, en particulier p. XIX-XXV. Aux pays que nous avons énumérés, il convient d’ajouter deux pays “basques”, le Labourd en arrière de Bayonne et la Soule.
  2. Dom R. Biron, Précis d’histoire religieuse des anciens diocèses de Bordeaux et de Bazas, Bordeaux, 1925. Pour ce qui suit, voir les cartes des anciens diocèses de Bordeaux, Bazas, Agen, Auch, Aire et Dax, établies par J. de Font-Réaulx. Nous avons de notre côté établi une carte des juridictions du Bordelais, du Bazadais et des Lannes à la fin du XVIIe siècle et une carte de la mouvance ducale à partir des Recogniciones de 1274 (inédites).
  3. Appartenaient au diocèse de Bazas les paroisses d’Esclottes, Sainte-Colombe-de-Duras, Baleyssagues, Saint-Géraud, Caubon, Castelnau et Mauvezin-sur-Gupie, Beaupuy et Sainte-Bazeille.
  4. Il s’agit, en plus de la paroisse de Gabarret, de celles de Lussolle, Groloux, Losse, Estampon, Saint-Jouannet, Lubbon, Arx, Baudignan, Rimbez, Baudiets, Herré, Escalans et Sainte-Meille.
  5. Aujourd’hui canton de Gabarret.
  6. Chef-lieu de canton du Gers.
  7. À l’exception de celles incluses dans les communes landaises du Frèche et de Lacquy (canton de Villeneuve-de-Marsan), les autres paroisses de l’archiprêtré constituent aujourd’hui le canton de Cazaubon (Gers).
  8. Ces deux anciennes paroisses de l’archiprêtré du Plan au diocèse d’Aire, situées au sud du Midou, sont aujourd’hui des communes du canton de Nogaro (Gers).
  9. Du XIVe au XVe siècle, la vicomté de Louvigny dépendait de la sénéchaussée des Lannes mais du diocèse de Lescar. Il s’agit des paroisses de Boueil, Boueilho, Lasque (auj. cant. de Garlin, Pyr. Atl.), ainsi que celles de Coublucq, Poulacq, Poursiugues, Boucoue, Arzacq, Méracq, Mialo, Seby, Lonçon, Beyrie, Fichoux, Cabidos, Louvigny, Luyos (auj. cant. d’Arzacq, Pyr. Atl.). Mais les paroisses de Vignes (cant. d’Arzacq, Pyr. Atl.), Arbleix et Picheby étaient en Béarn.
  10. C’est le cas de Monget, Peyre, Castelner, Poudenx, (dans le canton d’Hagetmau) ou de Bassercles, Beyries, Argelos, Casteignos-Soulens (cant. d’Amou). En revanche, Saint-Médard, Castéide, Lacadée, sont passés aux Pyrénées-Atlantiques.
  11. Chiffres approximatifs.
  12. Pour les deux départements on doit consulter : R. Rey, Les vieilles églises fortifiées du Midi de la France, 1925 ; pour la Gironde, A. Brutails, Les vieilles églises de la Gironde, 1912 ; B. Pierre, La fortification des églises en Gironde, TER, sous la direction de J. Gardelles, Université de Bordeaux III, 1985. On peut aussi consulter de L. Drouyn les Notes manuscrites (Arch. comm. de Bordeaux) ainsi que les Variétés Girondines (voir n° 29). Pour les Landes : X. de Cardaillac, Églises fortifiées landaises, 1926 (ouvrage qui concerne surtout la partie sud-ouest du département ; sans plan, ni photographie) ; Abbé A. Depart, Les commanderies dans le département des Landes, Dax, 1894 (notices sur 42 commanderies).
  13. Voir P. Mouthon, Les moulins d’eau de l’Entre-deux-Mers, XIe-XVIe siècles, T.E.R., Université de Bordeaux III, 1987.
  14. Voir J. Clémens, Le troglodytisme de Saint-Caprais et de Saint-Émilion d’après les sources médiévales, dans Saint-Émilion, Libourne, Actes du XXIe congrès de la Féd. Hist. du Sud-Ouest, 1977, p. 107-119 ; Le troglodytisme de l’estuaire de la Gironde, dans les Cahiers du Vitrezais, 1987, p. 75-87.
  15. Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France, Landes. Canton de Peyrehorade, Paris, 1973, 2 vol. Essentiel pour toute recherche est le Répertoire des Inventaires, fasc. n° 11, Aquitaine, 1978. Parmi les inventaires généraux anciens mais très complets, on peut signaler : A. Ducoumeau, La Guyenne historique et monumentale, 1842, 4 vol. in-4° ; Abbé Baurein, Variétés bordelaises, rééd. Bordeaux, 1876, 4 vol. ; F. Jouannet, Statistique du département de la Gironde, 1837-1843, 2 vol. in-4° ; suppl. 1847 ; H. Tartière, Notices historiques, publiées dans les Annuaires administratifs des Landes, 1863-1871 ; E. Dufourcet, E. Taillebois, G. Camiade, L’Aquitaine historique et monumentale, 1890-1897, 3 vol. in-8°, fig., pl.
  16. Rapports d’activité annuels. D’autres cantons sont en cours d’inventaire : Carbon-Blanc, Créon, Cadillac et Targon en Entre-deux-Mers ; Podensac et Labrède en Cemès sur la rive gauche de la Garonne, pour la Gironde, ainsi que Geaune dans les Landes.
  17. Centre de recherches sur l’occupation du sol, Université de Bordeaux III, URA 1999.
  18. Plans d’occupation des sols historique et archéologique d’Aquitaine : Agen, 1980, par J. Clémens ; Aire-sur-l’Adour, 1982, 166 p., 110 illustrations, 2 plans couleur, par B. Watier, Jean Cabanot et Bernadette Suau ; Dax, 1986, 450 p., 272 illustrations, 3 plans couleur, par J.-C. Merlet, B. Watier, J. Cabanot, B. Suau. Nous avons entrepris le POSHA du Bazadais : les 69 communes qui correspondent à l’ancien arrondissement de Bazas appartiennent aujourd’hui à celui de Langon. Sont aussi en cours les POSHA de Périgueux par C. Chevillot, Mme C. Girardy, Mme A. Tobie, Mme A. Higounet et C. Lacombe, et celui de Bergerac par Yann Laborie. Parution prévue en 1990. La réalisation du POSHA de Bordeaux vient d’être décidée.
  19. J.-Y. Darracq, L’occupation du sol et le peuplement de la région d’Amou des origines aux temps modernes, 1969 ; N. Duvignac, L’occupation du sol dans la région de Montfort-en-Chalosse au Moyen Âge, 1970 ; M. Decla, Recherches sur l’occupation du sol et le peuplement de la région de Pouillon au Moyen Âge, 1971 ; B. Thomas, L’occupation du sol sur les côteaux du Soubestre et ses marges en pays de Louvigny au Moyen Âge, 1977.
  20. G. Bouhier, Le peuplement et l’occupation du sol des pays de la Moyenne Leyre au Moyen Âge, 1977 ; P. Jato Y. Doncel, L’occupation du sol et le peuplement du pays du Buch de la préhistoire à la fin du Moyen Âge, 1977 ; Françoise Lafitte, Le peuplement et l’occupation du sol dans le Marensin des origines au XVIsiècle, 1978.
  21. E. Traissac, Le peuplement et la vie rurale en Bazadais jusqu’à la Guerre de Cent Ans, 1954 ; B. Dufau, L’occupation du sol et le peuplement de la région de Bouglon, 1974 ; S. Faravel, Occupation du sol et peuplement des bassins de l’Escouach et de la Gamage de la préhistoire à la fin du Moyen Âge, 1984.
  22. M. Bauret, Peuplement et occupation du sol des pays du bassin inférieur du Ciron au Moyen Âge, 1980 ; A. Jouanny, Le peuplement et l’occupation du sol dans le canton de la Brède des origines au Moyen Âge, 1981.
  23. P. Voinier, L’occupation du sol sur la rive droite de la Garonne de Floirac au Tourne jusqu’à la fin du Moyen Âge, 1981.
  24. F. Boutoulle, Occupation du sol et peuplement dans le bassin de l’Engranne de la préhistoire à la fin du Moyen Âge, 1986 ; Nicole Sigougneau, Occupation du sol et peuplement dans le Cubzaguais de la préhistoire à la fin du Moyen Âge, 1983.
  25. A. Puginier, Talence et son vignoble du XIIIsiècle à 1548, 1987. D’autres mémoires sont consacrés à l’étude de commanderies dont la série est interrompue pour longtemps sans doute, en raison de l’incapacité des services d’archives de réaliser et de communiquer les microfilms de documents dont le déplacement est interdit.
  26. Mlle S. Faravel, Le Bazadais septentrional ; M. Bochaca, La banlieue de Bordeaux ; Mlle S. Lavaud, La paroisse Saint-Seurin de Bordeaux.
  27. Paul Roudié, L’activité artistique à Bordeaux, en Bordelais et en Bazadais de 1453 à 1550, Bordeaux, 1975, 2 vol., en particulier le chapitre V, Architecture civile et militaire : les villes, p. 243-256 ; les campagnes, p. 291-300.
  28. Ouvrage en deux tomes avec de nombreux plans et dessins et 151 planches gravées hors-texte. On peut citer aussi les travaux de deux contemporains de L. Drouyn : H. Ribadieu, Les châteaux de la Gironde, 1856 et E. Guillon, Les châteaux historiques et viticoles, 1866-1869, 4 vol.
  29. L. Drouyn, Variétés Girondines ou essai historique et archéologique sur la partie de l’ancien diocèse de Bazas renfermée entre la Garonne et la Dordogne, 1878-86, 3 vol. in-8, fig. et pl. (extrait des Actes de l’Académie de Bordeaux).
  30. Aux archives communales de Bordeaux, mss 288-292, notes prises au cours de la période 1856-1893.
  31. Celles de l’abbé Foy ne concernent que les sites religieux.
  32. L. Drouyn, Quelques châteaux du Moyen Âge à partir de l’époque féodale dans la Gironde et la Dordogne, dans Actes de l’Académie de Bordeaux, 1854, p. 75-140 ; Ricochets archéologiques dans le département de la Gironde. Esquisses de monuments, dans Bulletin monumental, t. XXIV, 1858, p. 457-523, fig. ; Introduction de la Guyenne militaire, t. I, 1865 ; Forteresses de terre dans le département de la Gironde, dans Soc. Arch. de Bordeaux, t. I, 1874, p. 121-141.
  33. Viviane Quintanilla, Les mottes féodales en Bordelais, TER, Bordeaux, 1973, t. I, 46 p., 17 p. de pl. ; t. II (inventaire), 107 p. et 5 p. de planches.
  34. P. Hittos, Inventaire des mottes féodales et des ouvrages de terre dans la Grande Lande et ses bordures, TER, Bordeaux, 1979.
  35. P. Ménil, Mottes et enceintes de terre dans les Landes et les graves du Bordelais, TER, Bordeaux, 1983.
  36. D. Barraud et B. Chièze, Inventaire des mottes castrales de la région de Coutras, dans Rev. hist. et arch. du Libournais, 2e trim. 1983, p. 61-71.
  37. J. B. Marquette, Le pays de Born à la fin du XIIIe siècle, dans Bull. de la Soc. de Borda., 1er trim. 1977, p. 55-106. Nous avons aussi évoqué la motte d’Arjuzanx dans Les coutumes du Brassenx (en assoc. avec J. Poumarède), dans Bull. de la Soc. de Borda., 3e trim. 1978, p. 340-344.
  38. Les Albret, dans Les Cahiers du Bazadais. Voir en particulier : les origines (XIsiècle-1240), n° 31, 4e trim., p. 71-101, et Terres et hommes d’Albret (1240-1360), 2e-3e trim. 1979, p. 539-700.
  39. Bulletin de liaison et d’information, AAA (Association des archéologues d’Aquitaine), n° 1, 1982, p. 41-43 et n° 3, 1984, p. 117-120. La motte photographiée est celle de Carcans (n° 1, p. 40). N’étant pas publiée, cette enquête n’aura servi à rien.
  40. Ibid., n 4, 1985, p. 95-98.
  41. J. Gardelles, Les châteaux du Moyen Âge dans la France du Sud-Ouest. La Gascogne anglaise de 1216 à 1237, Genève, 1972, 286 p. + LXVIII p. de planches et 12 cartes. Cet ouvrage a été précédé de deux articles : Châteaux du Bazadais et châteaux du Sud-Ouest Gascon de 1250 à 1330, dans Rev. hist. de Bordeaux, nouvelle série, t. IX, 1960, p. 169-182, carte ; Géographie des châteaux landais dans la seconde moitié du XIIIe siècle, dans Bull. de la Soc. de Borda., 1957, p. 21-31, carte ; on peut aussi consulter, du même auteur et de divers collaborateurs, Dictionnaire des châteaux de France, Guyenne, Gascogne, Béarn, Pays Basque, 1981.
  42. S. Desobeau, Architecture civile médiévale et de type médiéval dans le nord de l’Entre-deux-Mers, thèse de doctorat de 3e cycle, Bordeaux, 1982, t. I 269 p., t. II planches, 79 p.
  43. Parfois Jacques Gardelles consacre une seule notice à une commune comportant plusieurs sites bien distincts (ex. Aillas, Sauviac). Aussi, ces chiffres n’ont rien de rigoureux.
  44. Atlas historique des villes de France, sous la direction de C. Higounet, J.-B. Marquette et P. Wolf : J.-C. Lasserre, Saint-Sever, 1981 ; J.-B. Marquette, Bazas, Mont-de-Marsan, 1981 ; J. Gardelles, La Réole, 1981.
  45. Cf. supra, n. 38.
  46. B. Cursente, Les castelnaux en Béarn, Marsan, Gabardan (XIe, XIIe, début XIIIe siècles), TER sous la direction de C. Higounet, 1968, 2 vol.
  47. J. B. Marquette, Approche sur les castelnaux du Bazadais, dans Géographie historique du village et de la maison rurale, CNRS, 1979, p. 37-82 ; ID., La ville de Langon au début du XVIIIe siècle, dans Les Cahiers du Bazadais, n° 24, 25 (1973), 28 (1975).
  48. C. Lasserre, J. Gardelles, J.-B. Marquette, Roquetaillade, dans Les Cahiers du Bazadais, n° 53-54, 2e-3e trim., 1981.
  49. C. Higounet, Bastides et frontières, dans Le Moyen Âge, t. LIV, 1949, p. 113-132 ; J.-P. Trabut-Cussac, Bastides ou forteresses. Les bastides de l’Aquitaine anglaise et les intentions de leurs fondateurs, dans Le Moyen Âge, 1954, p. 81-135.
  50. J. Gardelles, La fortification des bastides, dans la Gascogne anglaise jusqu’à la Guerre de Cent Ans, dans Actes du colloque franco-britannique tenu à York, en 1973, Bordeaux, Féd. hist. du Sud-Ouest, 1975, p. 7 et suiv. ; Les fortifications de Sauveterre-de-Guyenne, dans Sauveterre-de-Guyenne, 700 ans d’histoire (1281-1981), Bordeaux, 1985, p. 43-50.
  51. J.-M. Lalanne, Étude topographique des bastides landaises, TER sous la direction de C. Higounet, t. I, 201 p. ; t. II, p. 203-241, plans, d’où a été extrait l’article : Notes sur la topographique des bastides landaises, dans Bull. de la Soc. de Borda., 2e trim. 1973, p. 157-173 ; 3e trim., p. 259-278.
  52. Cf. supra, ouvr. cité, p. 247-256.
  53. J.-F. Massie, Les origines du bourg de Doazil, dans Bull.de la Soc. de Borda., 4e trim. 1974, p. 319-324 ; avec J.-L. Blanc, Le castéra de Bonnegarde, Ibid., 1er trim. 1977, p. 34-54 ; Le peuplement du château de Pouillon en 1289, Ibid., Ier trim. 1978, p. 13-32 ; 2e trim., p. 123-186 ; Le castrum de Saint-Sever, Ibid., 1er trim. 1980, p. 3-74 ; L’escarpement encerclé et la motte de Belhade, Ibid., 2e trim. 1981, p. 291-310.
  54. A. Tridant, La forteresse de Blanquefort, 1974, 1979 et supra, n° 48.
  55. R. Bavoilot, Note préliminaire à l’étude du château d’Aspremont. La motte et le donjon central, dans Bull. de la Soc. de Borda., 3e trim. 1981, p. 475-492. F. Lafargue, Le château de Lacaze en Parleboscq, Ibid., 4trim. 1985, p. 581-642.
  56. S. Faravel, C. Martin, C. Sireix, Sauvetage archéologique de la motte du Barry à Mouliets-et-Villemartin, Rev. hist. et arch. du Libournais, Ier trim., 1987, p. 17-23.
  57. J. Vergès, La démolition des remparts de Dax, dans Bull. de la Soc. de Borda, 3e-4e trim. 1977, p. 391-407 ; L. Descoubes, Le château de Sore. La ville. Le Bourg. Ibid., 2e trim. 1981, p. 249-290.
  58. Voir les Cahiers méduliens, n° 1, juillet 1969, p. 10-11 ; n° 6, janvier 1971, p. 67-70 ; n° 8, juillet 1971, p. 644 ; n° 12, décembre 1972, p. 23-30 ; n° 26, juillet 1979, p. 10-11.
  59. Archéologie en Aquitaine, Bulletin de liaison et d’information. Association des Archéologues d’Aquitaine, n° 4, 1985, p. 34.
  60. Ibid., n° 1, 1982, p. 43-46 et n° 2, 1983, p. 48-51. Voir aussi Rauzan en quête de son passé. Dix ans de recherches historiques et archéologique à Rauzan,1971-1981, publié par l’équipe du Rauzanais hist. et arch. sous la direction de R. Coste.
  61. Archéologie en Aquitaine, n° 4, 1985, p. 53-57. Signalons au passage la discrétion avec laquelle sont signalés dans ce bulletin certains sondages uniquement portés sur la carte. On peut aussi indiquer la fouille entreprise en 1976 par l’équipe de la S.N.I.A.S. à la motte Maucour, commune de Baigneaux (cf. Archeologia, n° 184, nov. 1983, p. 38-41).
  62. Bordeaux-Victoire : Bull. de liaison d’information de l’AAA, n° 1, 1982, p. 21-23 ; n° 2, 1984, p. 29 (D. Barraud).
  63. Rue des Frères-Bonnie : Ibid, n° 3, 1984, p. 32-34 ; n° 4, 1985, p. 34-37 (D. Barraud).
  64. Mont-de-Marsan : Ibid, n° 4, 1985, p. 61-65 (D. Roux) et p. 60-61 : calle de l’Abreuvoir.
  65. Bazas : Ibid., n° 4, 1985, p. 33 (J.-F. Pichonneau).
  66. Ouvr. cité, p. 50 et suivantes.
  67. Les noms en italique sont ceux d’édifices conservés en totalité ou en partie.
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Pessac
Chapitre de livre
EAN html : 9782356136572
ISBN html : 978-2-35613-657-2
ISBN pdf : 978-2-35613-658-9
Volume : 4
ISSN : 2827-1912
Posté le 15/11/2025
24 p.
Code CLIL : 3385
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Licence ouverte Etalab

Comment citer

Marquette, Jean Bernard, “Habitats fortifiés en Bordelais, Bazadais, pays landais du XIe au XVe siècle : état de la recherche”, in : Boutoulle, F., Tanneur, A., Vincent Guionneau, S., coord., Jean Bernard Marquette : historien de la Haute Lande, vol. 2, Pessac, Ausonius éditions, collection B@sic 4, 2025, 1231-1254 [URL] https://una-editions.fr/habitats-fortifies-en-bordelais-bazadais-pays-landais
Illustration de couverture • D’après Villandraut : ruine de la tour située à l’angle sud-est de l’ancienne collégiale
(dessin, 1re moitié du XIXe siècle. Arch. dép. Gironde 162 T 4).
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