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Introduction

Introduction

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L’histoire de la géographie humaine est courte – un siècle et demi à peine : c’est au début des années 1880 qu’elle se détache de l’arbre commun que constituait jusqu’alors la discipline. Elle hérite de ses outils (la carte en particulier), de l’attention portée aux multiples visages du monde (depuis Alexandre de Humboldt, c’est une discipline de terrain très sensible à la diversité des paysages) et de la prise en compte des flux et du jeu des échelles (comme l’a enseigné Carl Ritter). C’est sous l’influence de l’évolutionnisme qu’elle s’autonomise ; celui-ci pose une question essentielle : dans quelle mesure le destin de l’homme est-il modelé par les contraintes environnementales ?

J’ai écrit il y a près de soixante ans un Essai sur l’évolution de la géographie humaine (1964) consacré aux dynamiques ainsi lancées. J’y montrais que la discipline avait pris deux visages : celui que je désignai alors de géographie classique et celui que Peter Gould baptisa en 1968 Nouvelle Géographie. Vues avec du recul, elles me paraissent plus complémentaires qu’opposées.

Un tsunami – qui coïncide avec le passage de la modernité à la postmodernité et au tournant culturel de la géographie – a frappé dernièrement toutes les sciences de l’homme et de la société. Deux formes nouvelles de l’interprétation de l’œuvre humaine sur la terre en résultent : la géographie poststructuraliste, d’une part, et celle qui résulte d’une approche pleinement culturelle, de l’autre.

Au début des années 1960, le cheminement de la pensée géographique était encore largement autonome, mais la situation évoluait rapidement. Les événements de 1968 le soulignent. Les agitations sont justifiées et motivées par des mouvements d’idées qui secouent l’ensemble des sciences sociales. On ne peut plus séparer l’évolution de notre discipline de celle des autres formes de la réflexion sur la vie collective : cet essai fait donc une large place à l’environnement intellectuel dans lequel s’inscrit la trajectoire de la géographie humaine. Cela explique l’effacement, durant près d’un demi-siècle, de la question environnementale dans l’agenda de cette discipline – un effacement qu’on ne peut que déplorer.

L’histoire de la géographie humaine court sur un peu plus de 120 ans. L’Essai sur l’évolution de la géographie humaine racontait, pour l’essentiel, un passé que je n’avais pas vécu. L’ouvrage ici proposé retrace des transformations dont j’ai été le témoin et l’acteur : on ne s’étonnera pas de voir le récit passer parfois de la troisième personne du spectateur à la première de celui qui est engagé dans l’action.

Le texte qui suit retrace, étape par étape, les transformations de la discipline et précise, pour chacune, la dynamique des sciences sociales au sein desquelles elles sont intervenues – une dynamique qui les explique largement. Un changement majeur intervient aux alentours de 1970 : jusque-là, la géographie, conçue à l’origine comme une science naturelle de la présence humaine sur la terre ne s’inspirait que peu des autres sciences sociales. Au-delà, elle puise une large partie de ses idées dans le monde alors en pleine effervescence de la pensée sociale. Cela m’a conduit à m’attacher, du chapitre 3 au chapitre 6, à la genèse des idées et des idéologies qui influent dès lors sur le cours de notre discipline, sur lesquelles je reviens dans les deux derniers chapitres.

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Pau
Chapitre de livre
EAN html : 9782353111367
ISBN html : 2-35311-136-X
ISBN pdf : 2-35311-137-8
ISSN : en cours
Posté le 09/06/2022
2 p.
Code CLIL : 3403; 4093; 3126
licence CC by SA
Licence ouverte Etalab

Comment citer

Claval, Paul (2022) : “Introduction”, in : Claval, Paul, Nouvel essai sur l’évolution de la géographie humaine. Espace, sciences sociales et philosophie, Pau, PUPPA, Collection Sp@tialités 1, 9-10, [en ligne] https://una-editions.fr/introduction-claval/ [consulté le 09/06/2022].
en attente
Illustration de couverture • Portrait de Paul Claval
(design : S. Vincent).
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