« P.S. : je répare un oubli involontaire en donnant les noms des auteurs du Petit Lord, dont j’ai constaté le succès : ce sont MM. J. Lemaire, Burnett et Schürmann »
Henry Fouquier, « Les Théâtres », Le Figaro, 26 mars 1895, p. 3.
Travailler sur les mineurs, et à plus forte raison sur les invisibles, est gage d’autant de joies que de déconvenues. Paradoxalement, l’« invisible » n’est appelé ainsi qu’au moment précis où il devient un peu visible. Mais souvent les traces échappent, et les archives se dérobent. Le nom de l’auteur invisible devient une variante du « Nom de pays : le nom » de Marcel Proust1 : comment reconstituer le parcours d’un fantôme dont ne subsiste que quelques mentions éparses, échouant à faire biographie ? Faut-il se résoudre à ce que l’invisible retourne à son ombre ? Si l’effacement rend l’enquête difficile, l’invisibilité a de fait ses avantages : réceptacle à fantasmes, appeau à snobisme intellectuel (un génie inconnu sommeille-t-il dans ce carton d’archives ? Ces œuvres perdues ne vont-elles pas révolutionner l’histoire littéraire dont « mon » auteur a été arbitrairement exclu ?), un écrivain disparu n’a peut-être eu que ce qu’il méritait — un charitable oubli, qui fait passer à l’ombre des œuvres mineures circonstancielles, frivoles ou industrielles, décidément inintéressantes au regard de la grande littérature ou des « belles lettres ».
Jacques Lemaire : voilà un dramaturge oublié de la postérité qui a pourtant laissé nombre de traces médiatiques, archivistiques et textuelles, qui sont extrêmement éparses. Désormais confiné au caprice des archives, à la non-conservation, et à la non-reprise de ses œuvres, Lemaire ne s’incarne plus. Les traces qu’il a laissées témoignent cependant d’une remarquable constance : il semble ne cesser de faire des pas de côté, des sauts vers la marge, la coulisse, le hors-page, la note de bas de page, voire la page arrachée. Lemaire génère en effet un « bruit des archives » certain ; on lui attribue des œuvres hétéroclites, pour lesquelles il joue des rôles divers. Lemaire écrit, traduit, adapte, réécrit. Il est le spécialiste des quatre, six ou huit mains, comme si justement il aimait écrire en mineur, et jamais en majeur, comme s’il voulait se délester de son autorité, et rester à jamais l’éternel auteur « second », donc secondaire. Lemaire n’a été le porte-plume ou le collaborateur d’aucun auteur passé à la postérité : il n’a été le Maquet d’aucun Dumas, n’a pas trouvé son Labiche. Cette pratique du pas de côté se lit aussi dans d’autres gestes. Ainsi, il a « créé » à côté de la France, en Belgique. Adepte du pas de côté, il l’est aussi par ses créations dans des « petits théâtres », jamais les mêmes, pour celles qui sont souvent de petites exploitations — autant de symptômes de l’industrialisation du théâtre — ou du dilettantisme de son auteur. Tout se passe en effet comme si Lemaire avait tant travaillé (sur) les genres mineurs qu’il s’en était minoré lui-même, voire qu’il avait travaillé à se minorer. L’« œuvre » de Lemaire, ou sa non-œuvre, relève du geste flaubertien, ou beckettien : du théâtre sur rien, ou presque rien, dont il ne reste rien, ou presque rien.
L’œuvre
Que Jacques Lemaire ne soit pas passé à la postérité est une évidence. En effet, on partira en vain en quête de son nom dans les histoires du théâtre. Quand il est mentionné, c’est en passant, et de façon péjorative. Hélène Lebel le cite par exemple à trois reprises, au prix d’une disqualification. Évoquant les influences étrangères au théâtre français, elle mentionne Le Petit Lord et La Geisha, deux adaptations/traductions co-signées par Lemaire. De la première, elle indique qu’elle relève du « registre facile du pur divertissement2 » et poursuit : « la pièce intitulée Geisha, traduite de l’anglais par Ch. Clairville et J. Lemaire n’est autre qu’une fantaisie japonaise jouée à l’Athénée-comique en 1898 et fort ennuyeuse à en croire l’opinion d’A. de Lostalot, le critique de l’Illustration à cette date3 ». S’appuyant sur une source de seconde main, Lebel balaie les éventuelles qualités artistiques du dramaturge, réduit à l’état de traducteur de « fantaisies » qui réussissent l’exploit d’être ennuyeuses.
La quête de Jacques Lemaire commence par les catalogues. Le croisement des sources habituelles (IDREF, BNF, archives conservées aux ASP, relevé SACD4) permet de reconstituer une bibliographie forcément lacunaire, que nous avons tenté de dresser5 : ne subsistent toutefois dans ces sources que les œuvres publiées, ou dont on a gardé une trace, quand elles ont été représentées. D’autres œuvres apparaissent au détour d’une mention dans un article de journal, une publicité, une notice biographique. Parfois, un titre permet de faire « remonter » un programme, comme c’est le cas pour Chez le couturier6. Les erreurs de transcription sont fréquentes, et obligent à de minutieux recoupements. Le référencement de Merveilleuses et Gigolettes de Jacques Lemaire et Jules Jouy comporte une coquille sur le catalogue BNF (« Jony » pour « Jouy7 »). « P.L. Schöntan » est en concurrence avec « J.P. Schönthan » sur la même notice BNF8. S’ajoutent à cela les graphies variées des auteurs que Lemaire a traduits/adaptés (« Echegarray » pour José Echegaray, « Bjornson Bjonstern9 » pour Bjørnstjerne Bjørnson), de ses collaborateurs (« Schurmann » pour Schürmann), voire des titres de ses œuvres : Le Grand Galéoto voisine avec Le Grand Galeotto ou Galeoto, La Geisha côtoie La Guecha ou La Geischa ; À la hussarde est en concurrence avec À la houzarde ; le relevé SACD note Faits divers pour une pièce qui s’appelle Fait divers. Les attributions sont aussi capricieuses : Lemaire est souvent donné comme auteur d’œuvres dont il n’est que le coadaptateur/traducteur : Le Petit Lord lui est ainsi fréquemment attribué, alors qu’il s’agit d’une adaptation en français de la version scénique de Little Lord Fauntleroy de Frances Burnett Hogdson, d’ailleurs appelée indifféremment « Burnett », « Francis », « Frances », « Françès » ou « Francès », peut-être par confusion avec un des acteurs de la pièce, Francès, qui jouait le rôle de Hobbs. La pratique fréquente de l’écriture en collaboration invisibilise parfois Lemaire (ainsi, dans une notice dévolue à Louis d’Hurcourt10), ou parfois les acolytes de Lemaire.
« Jacques Lemaire » est le pseudonyme d’« Étienne de la Neuville ». Dans les index et les référencements, le nom « Jacques Lemaire » entre en concurrence avec celui de « Neuville11 », « Étienne de la Neuville », « Jacques de la Neuville », « Jacques Lemaire de la Neuville12 » ou « Étienne Lemaire de la Neuville ». La banalité du pseudonyme choisi par Lemaire impose une autre contrainte : la base de données WorldCat agrège en effet plusieurs « Jacques Lemaire ». Le fonds Archives et Manuscrits de la BNF, sous « notre » Jacques Lemaire, renvoie à la lettre d’un autre Jacques Lemaire13. Une recherche sur Gallica pointe souvent vers un majeur presque homonyme, la machine pensant bien qu’on se trompe : à la requête « Jacques Lemaire » elle identifie indifféremment « Lemaître », « Lemaire » ou « Lemerre ». La quête des œuvres et de la vie de Lemaire passe donc par des recherches croisées, par les titres des œuvres ou les noms des collaborateurs.
Lemaire pratique volontiers la parodie et le clin d’œil. Les titres sont souvent des reprises : L’Enlèvement des Sabines fait remonter nombre de références qui polluent la recherche ; Quand on conspire est aussi le titre d’une opérette-bouffe en un acte d’Antony Mars, créée en 1887 ; Prenez garde à la peinture a été utilisé par plusieurs auteurs, comme Chez le couturier. À la Houzarde peut faire référence à la célèbre musique de Schweska. L’œuvre de Lemaire s’écrit au présent, dans des références contemporaines, désormais obscures. L’argument de Chez le couturier montre par exemple qu’il s’agit d’une pièce de circonstance, le premier tableau mettant en scène « Émilienne de Rançon » et « Manette Guilbert, la divette à la mode14 » — toutes choses qui rendent difficile le passage à la postérité.
Ces difficultés une fois exposées, une bibliographie, forcément provisoire, peut être dressée. Elle montre que Lemaire a écrit des ouvrages dramatiques extrêmement hétéroclites, joués dans des théâtres extrêmement différents, avec un nombre de collaborateurs assez important. Les créations ont eu lieu au Palais-Royal (1885), aux Ternes (1888), aux Folies-Bergères (1888, 1892, 1894, 1896), à la Comédie Parisienne (1895, 1896), à Bobino (1888, 1900), à l’Athénée-Comique (1898), aux Folies Dramatiques (1897), aux Bouffes (1901), au Casino de Paris (1895), au Grand Guignol (1901, 1903), aux Nouveautés (1910), au Théâtre des Escholiers (1901), au Théâtre des Poètes (1896), au Théâtre Maguéra (1900), au Théâtre-Libre (1893, salle des Menus Plaisirs), puis au Théâtre Antoine (1898, 1902). À Bruxelles, Lemaire a été joué à l’Alcazar (1891), au Théâtre des Galeries Saint-Hubert (1900), à la Comédie Royale (1907), à l’Opéra-Comique (1907) ou au Théâtre de la Scala (1910). Lemaire retrace d’ailleurs l’histoire des théâtres parisiens, jouant au Théâtre Maguéra, ancien Athénée-Comique, lui-même ancienne Comédie Parisienne. Les genres de ses productions sont également variés — ballet, « opéra-comique » en un acte ou en trois, opérette, chanson, « saynète-revue », ou « revuette15 », vaudeville, « ballet-pantomime », « conte lyrique »… Lemaire a écrit, parfois plusieurs fois, en collaboration avec Jules Jouy, Louis d’Hurcourt, Edigio Rossi, Paul Febvre, Henry Houry, J.P. Schöntan, Charles Clairville, Luc Malpertuis ou Joseph Schürmann. Les musiciens avec lesquels il a collaboré sont (entre autres) André Messager, Louis Ganne, Victor Roger, Charles Hubans, Louis-César Desormes, Paul Fauchey, Jules Bouval, Paul Delmet, Jane Vieu ou Dimitry Lévidis.
Lemaire a également été romancier, dans le style militaire (À la pointe de l’épée, 1879, Le Tambour-Major Flambardin, 1894, Les Marins de la Garde, 1896), romans illustrés16 par Job, grand spécialiste de la chose militaire17. En 1905 parait dans Le Monde illustré une nouvelle, « La Princesse Loulou ». Lemaire a aussi écrit un essai sur Wagner et une Histoire de l’opérette, citée dans la notice biographique du Dictionnaire national des contemporains de C.-E. Curinier18. Faute d’en retrouver une trace, cela pourrait être le feuilleton « L’opérette, ses origines, son histoire » paru dans la revue Le Manteau d’Arlequin à partir de novembre 190719.
De ce relevé, une première idée émerge : Lemaire est un polygraphe auquel aucun genre n’a échappé (roman, théâtre, poésie, essai, chanson, revue). Ses productions sont résolument hétéroclites, le majeur — un essai sur Wagner, des adaptations de pièces sérieuses jouées chez Antoine20 — côtoyant le mineur— des « scénarios » pour des ballets, joués aux Folies Bergère avant d’« autres numéros du programme », comme Milagrito Gorgé, la « nouvelle Patti », « l’Australien Cronin dans ses jeux des Clubs, si originaux [sic] et les sœurs Leamy les vertigineuses gymnastes21 ». Le Petit Lord, créé à la Comédie Parisienne, a toutefois été repris au Théâtre Antoine, preuve que mineur et majeur se rejoignent. Lemaire écrit dans le style de Labiche ou Duvert, ou Courteline, succombe à la mode des Pierrot : il est un homme de son temps.
Wagner et Bjørnson d’un côté, Bain de vapeur pour dames et V’la le train de plaisir de l’autre : il n’est finalement pas très difficile de comprendre que la postérité pouvait assez peu garder trace d’un être aussi volatil. Il donne l’impression d’être un de ces dilettantes de théâtre comme le siècle en comporte beaucoup. De fait, on ne trouve pas sa trace dans les ouvrages qui retracent la vogue wagnériste en France22, ni dans les Souvenirs d’Antoine23, ni dans la correspondance conservée24 : tout juste le trouve-t-on mentionné dans une note de bas de page de Joseph Schürmann, pourtant fort peu avare d’anecdotes théâtrales25. Dans les ouvrages de Charles Mosnier ou de Francis Pruner sur Antoine et le Théâtre Libre, Lemaire ne fait l’objet que de mentions factuelles et ne semble pas mériter un examen dédié. La « minorité » de Jacques Lemaire est visible par… son effacement, mais aussi aux petits caractères réservés à son nom sur les couvertures de ses rares livres encore consultables. Dans l’œuvre même, et en particulier dans la pratique du livret, comme pour La Carmagnole, le texte de Lemaire est à chercher au-dessus des portées. Dans la notice biographique la plus complète qui lui est consacrée, trois paragraphes consécutifs se terminent sur un « etc. » aussi imprécis que las26.
Une vie
Reconstituer la vie de Jacques Lemaire tient aussi de la gageure. Les diverses notices biographiques sont encore une fois lacunaires et erronées. Le Dictionnaire national des contemporains de C.-E. Curinier le fait naître à Paris, ce qui est faux27. Grande est la tentation de remettre en doute ce qui se dit ensuite — un passé de « chasseur d’Afrique », puis de journaliste — qui semble plus tenir du roman à la Maupassant que du factuel. Cette notice, en outre, reprend, en en changeant quelques éléments, un texte paru dans Photo-Programme à l’occasion de la création de La Carmagnole, ce qui permet de voir une rare photographie de Lemaire28. Lemaire n’a pas laissé de mémoires, et ne semble pas avoir laissé de témoignages sur son œuvre ou sa vie. Quand on le croise dans les journaux, c’est pour exercer un droit de réponse : droit de réponse à Bjørnstjerne Bjørnson qui déplore la « mutilation » de son œuvre29, droit de réponse dans une affaire de duel à Bruxelles30. Il signe une préface à sa traduction du Ghetto de Heijermans, préface qui tient du caveat, car la pièce tourne autour de la « question juive », sujet qui peut « soulever bien des colères31 ». Lemaire évoque d’ailleurs une « religion de mansuétude et de pardon32 » et espère que la pièce pourra « préparer le terrain où germera la véritable Fraternité33 », attitude plus que courageuse au tournant du siècle.
Quelques éléments permettent de poser des jalons : une naissance en 1858, un passage par le lycée Hoche, comme le prouve sa participation à la saynète-revue du Centenaire, où il est mentionné comme co-auteur de la pièce, « ancien élève », et comédien dans le rôle (muet) du premier assesseur34. Une carte de visite conservée à la BNF indique une adresse parisienne35, une lettre en indique une autre36, avant un passage à Bruxelles, dans les années 1907-1912, où il est le rédacteur en chef du Manteau d’Arlequin, revue théâtrale et mondaine, en fait revue programme attachée au Théâtre des Galeries et au Théâtre Olympia37, pour lesquels il travaille.
L’acte de décès de Lemaire permet paradoxalement de lui redonner un bout de biographie. Le document qui indique sa mort redonne à Lemaire une naissance, une date de naissance, un nom de naissance, des parents, une épouse, une adresse, mais aussi un métier, à savoir « homme de lettres », et une reconnaissance, celle de la Légion d’honneur38. Un passage par la base Léonore indique les états de service de Lemaire : engagé dans l’armée en 1879, il est successivement sous-lieutenant (en 1883), puis lieutenant (en 1887), et enfin capitaine en 1905. Son dossier ne comporte aucune observation, aucune campagne, aucune affaire, aucune blessure, aucune lettre, aucune action d’éclat : il est fait chevalier de la légion d’honneur « par décret du 16 juillet 1908 » — une carrière militaire en mineur, par tradition familiale plus que par conviction. Jacques Lemaire semble donc venir d’une famille noble, légitimiste, qui se consacre à la chose militaire par habitus, mais est homme de lettres par goût.
L’avis de décès complète le tableau : Lemaire est né à Saint-Germain en Laye le 9 octobre 1858, et décédé au « domicile conjugal » au 1 rue Cavallotti (Paris 18e) le 13 janvier 1913 à dix-sept heures ; son épouse, plus âgée d’un an, se nommant Mariette Léontine Derkatel, « sans profession », épousée en 1895. La poursuite de la quête généalogique nous apprend qu’Étienne Lemaire de la Neuville est le fils de Jacques Auguste Lemaire de la Neuville (1802-1881), « garde du corps de Charles X », par son quatrième mariage, avec Alyde Jehannot de Bartillat — le père de Lemaire a d’abord épousé une femme plus âgée que lui de près de vingt ans, puis deux très jeunes femmes mortes très précocement. Lemaire a une sœur aînée, mariée au marquis d’Asnières-la-Chasteigneraye, de la même mère, et un demi-frère, Julien Lemaire de la Neuville. On peut imaginer une famille aristocratique, sans aucun doute royaliste — le père s’est marié en Belgique. L’acte de mariage de Lemaire de la Neuville lui assigne une profession, « rentier », situe son adresse au 22 bis rue Chaptal. Son épouse, née le 2 janvier 1857 à Montigny-sur-Vesle (Marne), habite à la même adresse avec sa mère. Les témoins du mariage sont Marcel Picard, négociant, Frédéric Cousot, « homme de lettres », Robert d’Hurcourt, « rédacteur au Temps » et Martin Genest, « journaliste parlementaire ». On notera que deux de ses témoins portent le même nom que deux des collaborateurs de Lemaire au théâtre.
L’avis de décès indique que les « amis » qui ont déclaré son décès sont André Brun, avocat à Neuilly-sur-Seine et Henri, comte de Saussine, compositeur de musique. La mention d’Henri de Saussine ouvre une autre porte : Henri de Saussine du Pont de Gault, né à Béziers en 1859, s’est installé à Paris en 189339. Le salon de son somptueux hôtel particulier du Faubourg Saint-Germain, l’hôtel de Créqui, était un centre névralgique de la vie mondaine et intellectuelle de la Belle Époque. Saussine, ingénieur de profession, y accueillait des écrivains ou de futurs auteurs comme Paul Bourget, Anna de Noailles, Henri de Régnier, Marcel Proust ou Colette et Willy, des mondains comme la comtesse Greffuhle, la Princesse de Polignac, Robert de Montesquiou, et des musiciens comme César Franck, Gabriel Fauré, Vincent d’Indy, Maurice Ravel, Reynaldo Hahn ou Léon Delafosse — une des filles de Saussine, Renée, devint violoniste. Jacques-Émile Blanche a peint son portrait et a laissé une biographie de lui40. Compositeur, Saussine était aussi un homme de lettres : il a écrit des dialogues philosophiques, un roman, Le Nez de Cléopâtre (1893), recensé par Proust41, et une pièce de théâtre, Omphale, jouée au Théâtre des Escholiers en 1896. Le Monde musical, le 30 juin 1902, citant un article du Figaro, le caractérise ainsi « Il vibre comme une grande lyre très mince qui aurait beaucoup plus de sept cordes » ; « C’est un grand “Touchatout” artistique »42 — comme notre héros, qui ne travailla jamais avec lui. On peut supposer que Lemaire a fréquenté le salon de Saussine, y rencontra des artistes « majeurs », et y découvrit Wagner. Mais Lemaire n’est pas Vinteuil, ni Bergotte. Est-il d’ailleurs un des personnages anonymés de « L’Éventail43 » de Marcel Proust, portrait dégoûté des snobs du salon des Saussine ?
L’avis de décès de Lemaire, de fait, dans sa matérialité factuelle, échoue à dire l’essentiel de la vie de Lemaire. Une plongée dans les mémoires de Saussine, non publiés jusqu’en 2017, permet d’éclairer toutefois, de façon surprenante, la biographie de Lemaire. On apprend ainsi que Lemaire a, en compagnie de « J. Soulié, Pierre de Bougoing » et Saussine lui-même, manié les marionnettes à la création de Perlino, œuvre de Saussine, chez Madeleine Lemaire44, rue de Monceau, en 1903 — on devait cette création à Judith Gautier45. Plus loin Saussine consacre trois pages à son cher ami « Étienne de la Neuville », « auteur d’ouvrages pour la jeunesse et adaptateur de pièces de théâtre », disant de lui que sa vie est digne du Père Goriot. En fait de père Goriot, c’est bien plutôt aux Scènes de la vie de Bohème que l’on pense, avec Lemaire dans le rôle de Mimi. Saussine raconte :
C’est peu de jours après, qu’en rentrant, je trouvai sur ma table une dépêche, m’annonçant la mort subite de mon ami Étienne de La Neuville, réclamant ma présence et signé « Marie de La Neuville ». Je sautai dans un taxi, à la fois triste et intrigué, car j’aimais fort Étienne et je ne connaissais aucune Marie de la Neuville. En arrivant, je trouvai près du lit de mon pauvre camarade, une pauvre femme en larmes, que je voyais pour la première fois de ma vie. Des explications, qu’entrecoupaient des pleurs sincères et touchants, me permirent, petit à petit, de reconstituer la triste histoire de ce demi-ménage, régularisé depuis quinze ans, mais après une liaison déjà presque aussi longue, et pour légitimer deux filles. De cette paternité et de ce mariage avec une petite danseuse de la Porte Saint-Martin, jamais Étienne ne m’avait parlé, ni ne m’avait jamais fait allusion, en plus de trente ans d’intimité. Mais, dans son tiroir, après sa mort survenue brusquement à la suite d’une otite, on avait trouvé une lettre donnant mon adresse et m’indiquant comme le plus cher de ses amis, et celui sur lequel on pouvait le plus compter46.
Saussine indique ensuite avoir fait diverses démarches pour assurer une vie décente à « Marie de la Neuville » (épousée de fait en 1895), à qui la sœur de Lemaire accorda une pension, refusant toutefois de la rencontrer. La biographie de Lemaire se complète : on apprend ainsi qu’il fit Saint-Cyr, après Hoche ; qu’il s’engagea dans la cavalerie ; qu’il s’effondra à la suite de la mort de sa mère (en 1875), et du suicide de son père (en 1881), ruiné, tombé « sous la coupe d’une “gouvernante” ». Son demi-frère voulut lui venir en aide, mais :
Étienne s’obstina à donner sa démission et à vouloir gagner sa vie dans la littérature et le journalisme, ce qui, même avec du talent, est souvent illusoire et, en tout cas, désespérait sa sœur, désireuse d’un mariage avantageux et sauveur, qu’elle lui proposa en vain plusieurs fois. La raison principale, qu’il n’avoua ni à sa sœur ni à moi, était sa liaison, déjà commencée, avec la femme qui, malgré elle-même, je crois, a cependant bien réellement perdu et gâché la vie du pauvre garçon. Cette vie, avec de rares éclaircies (quelques bénéfices qu’il réalisa avec des traductions et des adaptations, surtout celle du Petit Lord) fut lamentable, bien au-delà de ce qu’il m’en laissa soupçonner. Il semble vraiment et le sort de mon cher Jacques d’Ailly en fut un autre exemple, que les Grecs voyaient juste en accusant le Destin d’accumuler ses coups sur ceux que la Nature a commencé par favoriser de tous ses dons47.
En lieu et place du « Bel-Ami » attendu, Lemaire serait donc un soutier du théâtre, un poète amoureux fidèle de son actrice — Illusions perdues d’un chasseur d’Afrique — chez Proust, il serait Swann, qui a épousé Odette — mais lui la trouve sans doute tout à fait son genre.
À la recherche des œuvres perdues
Qu’a écrit Lemaire ? Ou, plutôt, comment écrivait-il ? Le programme conservé à la BNF du Petit Lord recopie des recensions. Celle de Francisque Sarcey (dans Le Temps) est édifiante : « On a, pendant mon absence, joué Le Petit Lord… Je ne puis que vous donner l’avis de mes enfants qui se sont beaucoup amusés à cette pièce d’enfants ». Sans doute est-il mieux de ne pas envoyer de critique, ou d’envoyer les enfants des critiques, quand il s’agit de Lemaire… Pour La Geisha, un critique parle de « prétendue fantaisie » « bêbête à faire pleurer ». En dépit d’un propos « drôle », ce fut « très moral, très banal et très assommant ». Et de citer Sarcey, qui a trouvé la pièce « une longue suite de niaiseries », décidément juste bonne à faire rire les Anglais48. La plupart du temps, de fait, on ne parle pas du style de Lemaire. Le plus aimable qu’on peut dire sur lui se trouve sans doute sous la plume du critique des Folies-Bergère, journal spécial au théâtre, au sujet du Petit Lord : « cette comédie est traduite dans la phraséologie élégante à laquelle M. Jacques Lemaire, le bon lettré, nous accoutuma de longue date49 » — Lemaire a été le scénariste de nombreux ballets de Mme Mariquita joués dans ce lieu.
L’éthos d’auteur de Lemaire, de fait, semble être fait de minorations conscientes, au bord du masochisme. « La Princesse Loulou », nouvelle de 1905, peut être lue comme une histoire autobiographique, car elle a pour personnage Montescourt, un ex-« Chasseur d’Afrique50 ». Le début de la nouvelle projette le lecteur et la lectrice dans un salon situé rue Saint-Guillaume, où doit se jouer une « tragédie lyrique » en un acte de la vicomtesse de Montferrand-Sageret et des « mélodies du comte de Doulaincourt, accompagnées par l’auteur » :
– La musique de Doulaincourt est quelquefois agréable, Car ce n’est pas lui qui la
fait, mais il a le tort de l’interpréter, ce qui la gâte singulièrement, Quant à la
vicomtesse, c’est un autre genre, elle opère elle-même ; elle a étudié l’harmonie,
la fugue, le contrepoint, et sa science, réelle, a les résultats les plus funestes
pour ses auditeurs.
– Dis donc ; ça va être gai !
– Bah, on n’est pas forcé d’écouter51.
S’ensuit la description de la soirée. La pièce, « tragédie lyrique en un acte », est de « M. Paul Badin ». Si la partition est « d’avant-garde », le livret est « du dernier bateau », l’action se passant… dans le cabinet d’un dentiste. Le premier vers, splendide alexandrin (« Ah ! je souffre, je souffre épouvantablement ! »), est accompagné « d’une petite flûte », « tandis qu’au quatuor s’affirmait la perplexité du guérisseur », soucieux de savoir s’il faut arracher la dent malade. Le client est chanté par :
un débutant, garçon tonnelier de son état, découvert par la vicomtesse, un jour qu’il
mettait son vin en bouteille dans la cave, en beuglant une romance sentimentale. Ce
trésor rare, répondant au nom peu flatteur de Canasson, possédait un organe généreux
et assez étendu ; mais, insuffisamment préparé, point encore rompu aux difficultés
de la scène, il se confinait en un geste unique et eurythmique, consistant à se taper
sur les cuisses, du plat de sa vaste main, à intervalles réguliers ; en revanche,
il manquait de tact dans l’intonation et il poussait les éclats de sa voix jusqu’à
l’indiscrétion, car il en arrivait à gêner visiblement les conversations qui avaient
repris ; on ne s’entendait plus52. Le martyre musical et dentaire a cependant une fin :
Et le rideau tombait, pendant que l’orchestre, déchaîné en un tutti formidable, reprenait
le thème de la dent cariée, maintenant passé aux cuivres.
Les spectateurs, rappelés aux sentiments de leurs devoirs mondains par la fin de la
pièce, furent saisis subitement d’un délirant enthousiasme. Les bravos éclatèrent,
confinant à la frénésie ; on appela : « L’auteur !… l’auteur !… »
Et comme il était tacitement entendu que « l’auteur » voulait dire la Vicomtesse,
ce fut elle seule qui vint saluer, l’air plus lugubre que jamais, après quoi, elle
consentit funèbrement à accepter les félicitations exubérantes de tous les indifférents
: — Sublime… Merveilleux… Génial… Louise
n’existe plus… Vous avez fait plus vrai que L’Enfant-Roi…53
La satire du théâtre de société, de la musique d’avant-garde, ou du salon des Saussine, est patente… Quand on conspire est un vaudeville, qui finit, par convention, par une chanson censée réunir public et scène dans la jouissance (gustative) du dénouement. Mais en fait de bon vin rouge, les auteurs écrivent : « notre picrate aura-t-il su vous plaire54 ». L’Enlèvement des Sabines a pour héros un professeur d’histoire qui écrit des tragédies versifiées sur des sujets historiques. La scène se passe à Pont-sur-Oise, une ville qui ne compte pas de théâtre, à moins qu’on ne puisse appeler théâtre l’arrière-salle du café où doivent se produire pour des représentations exceptionnelles la troupe du « 4e Théâtre Français », dont le directeur Septime Bédarride (nom d’une ville de province). Il s’agit de faire du grand théâtre dans un petit théâtre, la mention de « 4e » théâtre français invalidant toutefois la légitimité de l’entreprise. L’Enlèvement des Sabines, titre de la pièce du héros, enfin représentée, est sifflée, et son auteur victime d’une cabale : un perroquet, bien mal à propos, vient perturber le grand style tragique en répétant « Embrassons-nous, embrassons-nous », saillie à la Labiche au milieu d’un Corneille55. La justice va fort heureusement triompher : le professeur sera reconnu comme un maître, son épouse a un retour d’amour, et ses enfants se marient. Lemaire, ainsi, semble jouer sans cesse de la distance, et du rapport majeur/ mineur, se plaçant délibérément « à côté ». En effet, Lecomte nous rappelle que La Geisha était précédée d’un prologue qui invitait à « prendre pour ce qu’elle était56 » (pas grand-chose sans doute).
Mineur, et ayant conscience de l’être, Lemaire a cependant été présent dans le champ théâtral, ou a tenté de maintenir une présence, comme le prouvent ses envois dédicacés conservés par la BNF57. Paradoxalement, il semble d’ailleurs avoir été au cœur des transformations du champ théâtral.
Ainsi, il a travaillé avec Joseph Schürmann, grand passeur de fameux étrangers, pour des pièces sociales, représentées chez Antoine : il a pris part au renouvellement du répertoire et du jeu initié par celui-ci. Mais il a aussi participé à l’industrialisation du théâtre, en adaptant en français des succès comme Le Petit Lord et La Geisha, qui inaugure la folie des comédies musicales58. La Vie théâtrale, au sujet de cette pièce, fulmine : « C’est vraiment dommage de condamner une excellente troupe et un coquet théâtre à la production, si vaine et si coûteuse, de pareilles sornettes59 ». Aux Folies-Bergère, Lemaire se met au service d’un music-hall naissant. Il joue à Maguéra, quand la salle a subi de grands travaux, et est devenue une salle de mille quatre cents places, sous l’influence de sa nouvelle directrice. Même chose pour les théâtres de Bruxelles dont il est le secrétaire général, sous la direction de Fonson, qui subissent « une métamorphose brusque et complète60 ». Le Manteau d’Arlequin, dont il est le rédacteur en chef, dénote aussi par son goût prononcé pour la « réclame61 », et son caractère de plus en plus mondain et de moins en moins théâtral.
Pareil renouvellement, en mineur ou en majeur, impose la mort de l’auteur : Lemaire, en outre seulement traducteur chez Antoine, se fond littéralement dans le décor : au sujet de La Bonne Espérance, Le Temps, le 15 octobre, note « le pittoresque exact » de la mise en scène. Émile Faguet, dans Les Débats, affirme que la pièce réussit car « décorateur et metteur en scène ont été de véritables collaborateurs du Poète62 » (ici, Heijermans) : le « jeu de la mer » était particulièrement saisissant et spectaculaire.
Dans les productions dites mineures, il en va de même. Lemaire disparait derrière un nouveau personnel théâtral. La Geisha avait lancé la mode des « girls », que Le Manteau d’Arlequin célèbre avec une certaine nostalgie63. Officier à la colle avec une petite actrice, Lemaire semble avoir consacré sa production à la promotion de la (petite) femme (de Paris). La Geisha fascine le critique du Cluny : journal spécial du théâtre de Cluny. Jugeant le spectacle médiocre, il souligne toutefois que le livret original a été « cantharidé64 », et que l’œuvre relève de la « littérature aphrodisiaque65 ». L’Intransigeant remarque qu’on ne « s’ennuie pas », peut-être car on peut voir « une foultitude de jolies filles parisiennes ayant trouvé tout naturellement la grâce et le charme des fines mousmés japonaises66 ». Le programme de Chez le couturier annonce des « théories blondes des vierges honnêtes se montrent, vêtues seulement de l’or de leurs chevelures et de grandes ailes blanches de libellules dissimulant leurs attraits ». Un entrefilet « courriers des théâtres » conservé avec le programme de Merveilleuses et Gigolettes, s’appesantit peu sur le style de Lemaire et Jouy, mais vante le « bal ultra-débraillé67 » des gigolettes…
De façon plus sérieuse, Lemaire exerce aussi à un moment où l’auctorialité évolue. Little lord Fauntleroy était paru en feuilleton en 1885-1886, et publié en volume en 1886. Il avait été très vite l’objet d’adaptations scéniques « pirates » ; l’autrice avait attaqué les plagiaires, et écrit sa propre version scénique, créée en 1888 au Terry’s Theatre : c’est cette version qu’adapte Lemaire, d’où la présence de « Burnett » comme co-autrice. Une faillite avait déchaîné une querelle semblable, Bjørnson ayant estimé que la pièce avait été traduite sans son consentement, et qu’elle avait été mutilée68 (les adaptateurs avaient coupé le dernier acte). La Commission des auteurs et des compositeurs dramatiques avait exercé le lendemain son droit de réponse69 ; et Lemaire lui-même, ancien journaliste, s’était appliqué à répondre, signant pour Schürmann, en voyage. Plaidant sa bonne foi, il assurait que la pièce souffrait, dans sa version originale, de « longueurs insupportables », qui amènent un dénouement « en queue de poisson ». Lemaire met en avant sa « bonne foi littéraire », son « souci de l’art », et aussi son « désintéressement », « puisqu’au Théâtre Libre il n’y a pas de droits d’auteurs70 ». Lemaire a donc jugé qu’il pouvait être meilleur auteur que Bjørnson ; ou plutôt, il était meilleur « faiseur » que lui pour le théâtre français. Plus tard, dans la presse, le nom de Lemaire revient au sujet d’une autre querelle de droits : se jouaient concurremment à Paris deux traductions du Grand Galeoto ; Mme De Rute, l’autre traductrice, émit des « réclamations71 » arguant que sa version, de fait, était la « seule approuvée par l’auteur 72», tandis que Schürmann assurait avoir l’autorisation, depuis cinq ans, d’Echegaray73.
Qui, toutefois, peut dire de façon définitive qui est « Jacques Lemaire », réduit à la nécessité de produire des pièces en un acte, des revues, pour faire vivre sa petite actrice et ses deux filles ? Dans Le Manteau d’Arlequin, sans qu’on puisse attribuer la responsabilité du texte à Lemaire, l’« histoire de l’opérette » commence par un rappel du mortem operatur tristitia de Saint-Paul, et affirme : « en ce commencement de siècle lugubre, l’on est enclin à se perdre dans les noirs nuages d’Ibsen et autres Bjornson » ; « on a peur de rire », avant de formuler ce vœu : « l’heure est venue d’entreprendre le bon combat pour cette franche gaité qui s’en va74 ».
Dans la collection Rondel75 se cache cependant un hapax : une pièce manuscrite de Lemaire et Schürmann, intitulée Jeunesse, « drame d’amour » situé dans la « Pologne allemande ». Les personnages sont le curé Hoppe, des « vicaires » fanatiques, une jeune première « vénale » doté d’un demi-frère bête et sanguin, et un étudiant tout aussi colérique. Cette improbable pièce, dans le genre frénétique, finit fort mal, le frère tuant Annette dans un accès de rage imbécile : « Annette, ne meurs pas… Miséricorde, elle meurt ! » ; la dernière réplique étant : « Hans, avec un cri terrible : “C’est fini !” Il se jette sur elle » (fin) ».
Une petite carte dédicacée de Lemaire, datée de septembre 1896, accompagne le manuscrit :
Sept. 96 « mon cher ami, voici le chef-d’œuvre dont je vous ai parlé, le soir de la première du Grand Galeoto. Si la lecture vous agrée, je donnerai un fort coup de pouce à la pièce. Il y a des négligences de style à limer et des coupures à faire. Fixez-moi dès que vous pourrez, SVP pour que je retire ce très curieux ouvrage du Théâtre Libre, où je ne le donnerai définitivement que si vous n’en voulez pas.
On ignore à qui est adressée cette carte ; visiblement, en tout cas, la personne n’a « pas voulu » de cette pièce, que Lemaire, par ironie, qualifiait « de chef-d’œuvre », ou de « très curieux ouvrage », se minorant dans les deux cas, et promettant de remédier aux insuffisances de la pièce, qu’il souligne, dans un curieux mouvement d’autodénigrement. La pièce ne figure pas non plus au répertoire du Théâtre-Libre. Cette pièce de jeunesse, d’un style noir, Lemaire avait l’espoir de la voir jouée après la création d’une pièce dont il n’était que l’adaptateur. Il n’en fut rien.
Dans Le Manteau d’Arlequin, un article est dévolu à Jacques Le Lorrain, dramaturge « qui eut toutes les peines du monde à se faire jouer », et avait écrit sur sa devanture de cordonnier : « Jadis je fis des pièces illisibles/Maintenant j’en pose d’invisibles ». Le chroniqueur inconnu, qu’on se plaît à imaginer être Lemaire, continue en racontant une anecdote : « vous avez une pièce qui se voit à votre bottine » dit l’« élégant raté » , ce à quoi le jeune dramaturge répond : « j’en ai même une autre chez Antoine qui se verra également l’hiver prochain76 »…
Lemaire s’est-il condamné lui-même à la minorité éternelle ? N’a-t-il jamais fait qu’œuvre alimentaire, laissant de côté une production originale, faisant de lui un poète doublement maudit ? Lemaire est l’homme qui a vu Proust, entendu Hahn, aimé Wagner. C’est un personnage digne des Ratés de Lenormand — puffiste, zutiste, bulle de savon, dilettante, vagabond, saltimbanque, « etc. ».
Œuvres de Jacques Lemaire
1879 : À la pointe de l’épée, roman,Tours, A. Mame et fils.
1885 : Quand on conspire de Jacques Lemaire et Louis d’Hurcourt. Création (selon catalogue BNF) : Théâtre du Palais Royal, 21 août. Ternes, 3 décembre 1888 (SACD). Publication : Paris, R. Godfroy, 1888.
1888 : Prenez garde à la peinture de Jacques Lemaire. Création : Ternes, 14 janvier.
1888 : Presse-Ballet de Jacques Lemaire, musique de Charles Hubans, chorégraphie d’Henri Justamant (SACD). Création : Folies-Bergère, 9 avril.
1890. Bain de vapeur pour dames de Jacques Lemaire et Paul Febvre. Création : Bobino, 6 septembre 1890 (SACD)/21 septembre 1900 (IDREF). Publication : Paris, Deplaix, 1900.
1891. À la hussarde/À la houzarde de Jacques Lemaire et Louis d’Hurcourt. (SACD : ajout d’Albert Renaud, rôle indéfini). Création : Bruxelles : Théâtre de l’Alcazar, 11 mai 1891.
1892 : Rêve d’or, ballet-pantomime en 1 acte et 2 tableaux, scénario de Jacques Lemaire, musique de Louis-César Desormes, mise en scène et chorégraphie de Mme Mariquita. Création : Folies-Bergère, 6 janvier. Publication : Paris, Roger et Cie.
1893 : Une faillite, adaptation en 4 actes par Jacques Lemaire et Joseph Schürmann d’En Fallit (1874) de Bjørnstjerne Bjørnson. Création : Paris, Théâtre Libre (salle des Menus Plaisirs), 8 novembre (1894 SACD). Publication : Paris, Tresse et Stock.
1894 : Le Tambour-major Flambardin, roman, Paris, Delagrave.
1894 : Merveilleuses et gigolettes, ballet-pantomime en 2 actes et 3 tableaux de Jules Jouy et Jacques Lemaire, musique de Louis Ganne, mise en scène et chorégraphie de Mme Mariquita. Création : Folies-Bergère : 21 décembre. Publication : Enoch et Cie (1895).
1895 : Sans puits House Argument [du] ballet pantomime en trois tableaux, livret de Jacques Lemaire et Egidio Rossi (José sur SACD). Création : Casino de Paris, 4 janvier. Publication : s. éd.
1895 : Le Petit Lord. Adaptation par Jacques Lemaire et Joseph Schürmann, d’après l’adaptation scénique de Frances Burnett Hodgson de son roman Little Lord Fauntleroy. Création : Paris, Comédie-Parisienne, 24 mars; reprise au Théâtre Antoine le 11 mars 1898. Publication : Tresse et Stock.
1896 : Le Grand Galéoto, pièce en 3 actes et 1 prologue. Adaptation par Jacques Lemaire et Joseph Schürmann d’El Gran Galeoto, drama en tres actos y en verso, de José Echegaray. Création : Paris, Théâtre des poètes (Comédie-Parisienne pour la SACD), 11 avril 1896. Publication : Paris, A.Charles.
1896 : Les Marins de la garde, roman. Paris, Delagrave.
1896 : Chez le couturier, ballet-pantomime en 2 tableaux de Pierre Louis Flers et Jacques Lemaire, musique de Victor Roger, mise en scène et chorégraphie de Mme Mariquita. Création : Folies-Bergère, 23 mai.
1897 : Don John ou Le Policeman de Pierre, texte de Jacques Lemaire (relevé SACD, mention de Pietro ( ?) « Lanciani » ?). Création : Bruxelles, 5 mai 1897.
1897 : La Carmagnole, opéra comique en 3 actes, paroles de Jacques Lemaire, Louis d’Hurcourt et Henry Darsay. (relevé SACD mention de « Arrachard »), Musique : Paul Fauchey. Création : Folies Dramatiques, 2 décembre 1897. Publication : Léon Grus.
1898 : Clair de lune, comédie en 1 acte de Jacques Lemaire, musique de Jules Bouval. Illustration : H. Gerbault. Publication : Alphonse Leduc.
1898 : La Geisha, opérette en 3 actes, adaptation de Charles Clairville et Jacques Lemaire de l’œuvre d’Owen Hall (livret) et Sydney Jones (musique). (relevé SACD : mention d’Antony Mars). Création : Athénée-Comique, 8 mars.
1899 : L’Amour dans le drame wagnérien : Tristan et Iseult, essai, de Wattier frères.
1900 : Bain de vapeur pour dames, vaudeville en 1 acte de Jacques Lemaire et Paul Febvre. Création : Paris, Bobino-music-hall, 21 septembre. Publication : Paris, E. Deplaix.
1900 : Mariée de Carnaval de Jacques Lemaire. Création : théâtre Maguéra, 25 février.
1900 : V’là l’train de plaisir, « revuette en un acte » de Jacques Lemaire et Luc Malpertuis. Création : Maison du Rire (Exposition de 1900), 1er juin.
1900 : La Petite Princesse, texte de Jacques Lemaire, musique de Franchille, Création : Théâtre des Galeries Saint-Hubert, Bruxelles, 20 avril.
1901 : Pour la Lune, conte lyrique en vers par Edouard Guillaumet et Jacques Lemaire, musique de Paul Delmet, partition piano et chant. (relevé SACD : mention d’ » A. Forck » ?) Création : Bouffes, 15 avril 1901 et Grand Guignol : 24 juin 1901. Publication : Enoch.
1901 : Ghetto, pièce en 3 actes. Adaptation par Jacques Lemaire de Ghetto, burgerlijk treurspel in 3 bedrijven de Herman Heijermans (1898). Création : Paris, Théâtre des Escholiers/Nouveau-Théâtre, 9 avril. Publication : Stock, avec une préface de Jacques Lemaire.
1902 : La Bonne Espérance : jeu de la mer, pièce en 4 actes. Adaptation de Jacques Lemaire et Joseph Schürmann d’Op hoop van zegen, spel van de zee, in 4 bedrijven d’Herman Heijermans (1900). Création : Théâtre Antoine, 20 octobre 1902 (8 décembre 1902 sur le relevé SACD).
1903 : Dix Mélodies pour chant et piano. Chanson « Sérénade » de Jacques Lemaire, extraite de Clair de Lune. Musique de Jules Bouval. Publication : Alphonse Leduc.
1903 : Fait divers, comédie en 1 acte de Jacques Lemaire et Victor Genest. Création : Paris, Grand-Guignol, 11 février 1903. Publication : Librairie Théâtrale.
1905 : « La Princesse Loulou », nouvelle de Jacques Lemaire, supplément du Monde illustré, janvier 1905, illustrations de Landiny [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5696181k/f206.item].
1907 : Le Tête à Perruque, texte de Jacques Lemaire. Création : Opéra-comique de Bruxelles, octobre 1907.
1907 : Les plus jolies chansons de France, pièce en un acte de Jacques Lemaire et Victor Genest. Création : Comédie-Royale, Bruxelles, octobre 1907.
1907 : Le Bachot en cour d’assises, saynète-revue inédite et universitaire en 1 acte, de Louis Klecker, avec le concours de MM. Louis Bouquet, Jacques Lemaire et René Bignon, 1807-1907. Fête du centenaire du lycée de Versailles (lycée Hoche). Publication : Versailles, impr. de L. Luce.
1907-1912, rédaction en chef du Le Manteau d’Arlequin : revue hebdomadaire, théâtrale et mondaine, Bruxelles, s.e.
1910 : L’Amour en grève, opérette en 2 actes et 7 tableaux de Jacques Lemaire et Henry Houry. Musique de Jane Vieu. Partition chant et piano. Publication : Paris, M. et J. Vieu
1910 : L’Enlèvement des Sabines : en 4 actes, texte de J.P. Schöntan, Jacques Lemaire et Joseph Schürmann. Création : Théâtre des Nouveautés, 10 septembre. Publication : Paris, M. Eschig.
1910 : Mamzell’ Dactyle opérette en 3 actes. Adaptation de Jacques Lemaire de Die Tippmamsell de W. Frieser et Karl Georg Zwerenz (1908). Mus. de R. Raimann. Création : Bruxelles, Théâtre de la Scala, 9 juillet. Publication : Bruxelles, A. Cranz.
1911 : « A Hilda » : mélodie pour soprano ou ténor avec accompagnement d’orchestre : op. 20: comp. 1910 de Jacques Lemaire ; musique de D.C. Levidis. Publication : F. Durdilly, Ch. Hayet succr (Paris).
1911 : « Tristesse » : mélodie pour soprano ou ténor avec accompagnement d’orchestre : op. 5 : comp. 1899 / poésie de Jacques Lemaire ; musique de D.C. Levidis. Publication : F. Durdilly, Ch. Hayet succr (Paris).
Autres pièces non retrouvées : Bécarre, l’Isba, A Trianon, Entre deux victoires, Les Bluets, Faute de grive, Eternelle Vérité.
Notes
- Marcel Proust, « Nom de pays : le nom », dans À la recherche du temps perdu, Tome 1, Du côté de chez Swann, Paris, Gallimard.
- Hélène Lebel, Le Théâtre à Paris (1880-1914) : reflet d’une société ?,Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2001, p. 89.
- Ibid., p. 90.
- Le registre papier de la SACD atteste de l’activité de dramaturge de Lemaire de 1888 à 1910. Il ajoute des noms de collaborateurs ou des titres d’œuvres non présents par ailleurs.
- Voir « Bibliographie des œuvres de Jacques Lemaire » en fin d’article.
- Un recueil factice de programmes est conservé aux ASP sous la cote 8-RO-10847. Le nom de Lemaire est indiqué, mais ne renvoie pas à sa notice auteur sur le catalogue BNF.
- Pour les documents qui renvoient à l’ouvrage imprimé (cote BNF : VM BOB-33860 et IFN-10076698). Le recueil factice en rapport avec le spectacle indique bien « Jouy » (cote BNF : 8-RO-10953).
- C’est ici l’inverse : le livre est correctement référencé (L’Enlèvement des Sabines, par exemple cote BNF : 8-RF-64279), mais pas le spectacle, où est oublié également le nom de Joseph Schürmann, troisième auteur (cote BNF : 4-ICO THE-2372).
- C’est ainsi qu’il figure dans le Recueil Mosnier. Volume 2, Le Théâtre-Libre — Tournées en France et à l’étranger — Acteur à Paris — Première nomination à la direction de l’Odéon — Autres tournées avant la fondation du Théâtre Antoine 1890-1897, p. 133. [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b10462772r]. Antoine écrit de son côté « Bjorsten », comme on peut le voir cité chez Francis Pruner dans Les luttes d’Antoine au Théâtre Libre, Paris, Minard, « Bibliothèque des Lettres modernes », 1964-2007, t. II, p. 345.
- « Louis d’Hurcourt », Photo-Programme, revue artistique illustrée, 1897.
- Voir Lionel Renieu, Histoire des théâtres de Bruxelles depuis leur origine jusqu’à ce jour, Buchartre et Van Buggenhoudt, 1928, vol. 1.
- Voir Fanny Urbanowiez, Bruxelles sur scène : Luc Malpertuis et l’histoire de la revue théâtrale en Belgique (1880-1930), Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 2022.
- Dans le fonds Antoine, cote 4-COL-113(4530), datée de 1929. Il s’agit du fils d’Hippolyte Lemaire, ancien critique dramatique du Monde illustré.
- Jacques Lemaire, Chez le couturier, programme, op. cit.
- Qualificatif minorant appliqué à V’là l’train de plaisir (Fanny Urbanowiez, Bruxelles sur scène : Luc Malpertuis et l’histoire de la revue théâtrale en Belgique (1880-1930), op. cit., p. 334).
- De là sans doute sa réputation d’auteur « jeunesse » qui subsiste dans les rares notices qui lui sont consacrées comme dans Jean-Claude Polet, dir., Auteurs européens du premier XXe siècle. 1, De la drôle de paix à la drôle de guerre, 1923-1939 : anthologie en langue française, Bruxelles, De Boeck université, 2002, p. 813. Lemaire est cité dans le répertoire des traducteurs.
- Voir François Robichon, Job ou l’histoire illustrée, Paris, Herscher, 1984.
- C.-E. Curinier, dir., Dictionnaire national des contemporains : contenant les notices des membres de l’Institut de France, du gouvernement et du parlement français, de l’Académie de médecine…, Paris, Office général d’éd. de librairie et d’impr., 1899-1919, t. 3, p. 330. Lemaire est à « Lemaire de la Neuville, Jacques ».
- Le Manteau d’Arlequin : revue artistique, théâtrale et mondaine, Bruxelles, s.e. Les articles sont signés par des pseudonymes théâtraux qui ne permettent pas d’identifier les auteurs. La BHVP conserve une partie des numéros. Le feuilleton commence dans le numéro du samedi 12 octobre 1907, 3, p. 14-20. Lionel Renieu indique différentes dates de lancement (1900, op. cit., vol. 1, p. 44 ou 1911, vol. 2, p. 532). Il qualifie d’ailleurs le magazine de « petite revuette », qualificatif décidément souvent appliqué à Lemaire (op. cit., vol. 2, p. 906).
- C’est Joseph Schürmann, néerlandais, qui a sans doute agi comme passeur pour Heijermans. Il en a été de même pour Echegaray et Bjørnson. Impresario amené à voyager, Schürmann était très au fait des nouveautés étrangères.Théodore Massiac, dans « Indiscrétions théâtrales », (Gil Blas, 9 novembre 1892, p. 3) retrace la genèse de la présentation d’Une faillite chez Antoine. On apprend que Schürmann et Lemaire avaient d’abord présenté une pièce d’Echegaray au metteur en scène, qui n’avait pas été séduit, et en avait demandé une autre : il montera Une faillite. Les deux traducteurs se tournent vers le Théâtre des Poètes (ou la Comédie-Parisienne) pour Le Grand Galéoto en 1896.
- Selon Le Journal, 10 mars 1895, p. 3. Le programme de Merveilleuses et Gigolettes indique que la pièce passait, le 6 février 1895, après Valah-Duc, « clown-virtuose », le « quadrumane écuyer présenté par le Professeur Grais », les Kliks, Excentric’s dans « la tête vivante », une « polka des nounous » de Grillet et la « danse serpentine » de Mme Bob-Walter. Les autres numéros étaient Mme Alice Aubry, les « célèbres Sheffer » « dans leurs merveilleux exercices “les jeux icariens” », et le capitaine Martin, tireur américain. Chez le couturier, le 31 janvier 1897, passait après « la marche des demi-vierges » et avant Grand d’habits, pantomime de Catulle Mendès, avec Jeanne Chasles et Musidora ; se succédaient les numéros d’illusionnistes, de femmes bicyclistes, de clowns musicaux et de danseurs russes (doc. cit.).
- Voir Cécile Leblanc, Wagnérisme et création en France, 1883-1889, Paris, Honoré Champion, 2005. L’analyse de Lemaire parait en 1899, soit assez tardivement, mais elle semble être la publication d’une conférence précédemment donnée. Dans Le Manteau d’Arlequin, il est fait de fréquentes références (assez anecdotiques) à Wagner, preuve que c’est Lemaire qui tient la plume. Voir par exemple 23 novembre 1907, 8, p. 8.
- André Antoine, Mes souvenirs sur le Théâtre-Libre, Paris, Arthème Fayard et Cie, 1921.
- COL-113 . Fonds André Antoine (1858-1943), aux ASP.
- Dans Joseph J. Schürmann., Secrets de coulisses, Paris, M. Bauche, 1911, p. 8, note 1 : « en collaboration avec Étienne de la Neuville, en littérature Jacques Lemaire ». La même note réapparait p. 111 à propos d’Une faillite.
- C.-E. Curinier, dir., Dictionnaire national des contemporains : contenant les notices des membres de l’Institut de France, du gouvernement et du Parlement français, de l’Académie de médecine…, op. cit. La notice mériterait une explication de texte, tant elle présente les œuvres de Lemaire dans un ordre graduel, du mineur vers le majeur, comme pour légitimer son entrée dans le dictionnaire. Sont d’abord mentionnées les pièces en un acte, mais qui ont « dépassé la centième représentation », puis les pièces plus « conséquentes ». Viennent ensuite les romans « en volumes » et les conférences. La dernière phrase est : « il est décoré de divers ordres ».
- D’autres erreurs se glissent. Une faillite est qualifiée de « comédie en cinq actes ». La pièce est bien en 4 actes dans l’adaptation de Lemaire et Schürmann ; le dernier acte a été supprimé de la version française, au grand dam de l’auteur (voir infra.). L’auteur indique également que Lemaire a été le premier à faire représenter en France les auteurs étrangers qu’il a traduits. C’est au moins faux pour Heijermans : Ahasvère avait été créé par Antoine en 1893 (sans nom de traducteur il est vrai).
- « Jacques Lemaire », Photo-Programme, revue artistique illustrée, 1897.
- Voir Le Figaro du 24 novembre 1893, et infra.
- Voir Comoedia du 25 octobre 1907.
- Herman Heijermans, Ghetto, pièce en trois actes. Adaptation française de MM. Jacques Lemaire et J. Schürmann. Préface de M. Jacques Lemaire, Paris, P.-V. Stock, 1901, p.V.
- Ibid., p. VII.
- Ibid., p. XI.
- 1807-1907. Fête du centenaire du lycée de Versailles (lycée Hoche). Le Bachot en cour d’assises, saynète-revue inédite et universitaire en 1 acte, de Louis Klecker, avec le concours de MM. Louis Bouquet, Jacques Lemaire et René Bignon,… Versailles : impr. de L. Luce, 1907.
- Le nom « E. de la Neuville » est barré pour « Jacques Lemaire ». L’adresse est au « 2, rue Duperré ». Lemaire écrit à Paul Gavault : « avec mes vifs remerciements pour sa nuit (?) hors la loi (souligné) à la commission des lecteurs (acteurs ?) du 14 juin ». Lemaire cherche des appuis.
- Dans la collection Rondel, le dossier de La Neuville R Mn 842 contient une lettre du « 19 9r 1899 » et indique que l’auteur habite 22, rue Raphaël. Lemaire écrit à Rondel sur la recommandation de Jules Lévy, un ami commun : il veut faire acheter un lot de pièces de Duvert qui lui manque (à la vente Sarcey) et ira jusqu’à quarante francs. Duvert semble être son maitre en vaudeville.
- Lionel Renieu, op. cit., vol. 2, p. 532.
- Voir sur le site archives.paris.fr, registre des décès, années 1913, Paris 18, vue 23/30.
- Voir Jan Zieliński, « Proust and the Ollendorff’s Method », dans Cultural Studies Appendix – English Issue 2019/1, varia, p. 299-318. [zalacznik_eng_2019_1.19_Zielinski.pdf].
- Jacques-Émile Blanche, In Memoriam patris et filii H. et B. P. de G. S., Dieppe, Impr. de la Vigie de Dieppe, 1942. Le portrait est reproduit dans les Mémoires de Saussine citées ci-dessous. Aucune mention de Lemaire dans cet ouvrage (non plus que chez Reynaldo Hahn).
- Marcel Proust, « Un roman à lire : Le Nez de Cléopâtre par Henri de Saussine », Gratis-Journal, juillet 1893. On lira à ce sujet la thèse de Kim Joowon, « La pensée musicale de Marcel Proust », dirigée par Mireille Naturel et soutenue à Paris III en 2021.
- Cité dans l’introduction d’Alex Bèges au Comte Henri de Saussine du Pont de Gault, 1859-1940. Mémoires (1859-1914), Béziers, Société archéologique scientifique et littéraire, « Cahier XXVIII », 2017. Bèges a travaillé à polir une version dactylographiée, fautive, d’un manuscrit désormais perdu.
- Nouvelle parue dans Les Plaisirs et les jours.
- Madeleine Lemaire est une autre référence polluante.
- Mémoires, op. cit., p. 120.
- Ibid., p. 186.
- Ibid., p. 188.
- La Vie théâtrale, 25 mars 1898
- Folies-Bergère, journal spécial au théâtre, 25 mars 1895.
- Jacques Lemaire, La Princesse Loulou, supplément du Monde illustré, janvier 1905, illustrations de Landiny p. 24. [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5696181k/f206.item].
- Ibid., p. 4.
- Ibid., p. 7.
- Ibid. L’Enfant-roi est une comédie lyrique en cinq actes, livret d’Émile Zola, musique d’Alfred Bruneau, publiée chez Choudens en 1905 : Lemaire renvoie à une création récente.
- Jacques Lemaire et Louis d’Hurcourt, Quand on conspire, Paris, R. Godfroy, 1888, p. 30.
- Jacques Lemaire, J.P. Schöntan et J. Schürmann, L’Enlèvement des Sabines, Paris, M. Eschig, 1910, p. 168.
- Louis-Henry Lecomte, Histoire des théâtres de Paris : 1402-1911, [Reprod. en fac-similé], Genève, Slatkine reprints, 1973, p. 211.
- Lemaire envoie par exemple un exemplaire dédicacé de M’zelle Dactyle à Rondel, lui donnant du « mon cher ami » : il connaît les règles de sociabilité du milieu. Son essai sur Wagner, conservé à la BNF, est également dédié à Rondel, avec la minoration mondaine qui convient : Lemaire dédicace son « modeste ouvrage » en espérant qu’il prendra place dans sa « merveilleuse bibliothèque ».
- The Geisha avait été créé en 1896 au Daly’s Theatre, et avait été un énorme succès. Elle s’est exportée aux États-Unis (Daly’s Theatre à New York) et en Europe avec un succès non démenti. La pièce est parfois considérée comme un modèle de « l’impérialisme » musical britannique (voir Jeffrey Richards, Imperialism and Music: Britain, 1876-1953, Manchester; New York, Manchester University Press, 2001). Les critiques français sont souvent hostiles à ce spectacle « fait pour les Anglais ». Gil Blas (« Indiscrétions Théâtrales », 2 mars 1898), nous apprend que l’équipe anglaise est sur place. Pour une fois Lemaire est distingué : le livret a été confié à « deux de nos meilleurs librettistes ».
- Art. cit.
- Lionel Renieu, Histoire des Théâtres de Bruxelles, op. cit., p. 531.
- La revue fait une grande place aux encarts publicitaires, mais aussi aux « placements de marques » avant l’heure. On notera que les Grands magasins proposent des « casseroles à grives, à gibier, etc. nickel pur, aluminium et tri-métal, coutellerie fine » et qu’« un ascenseur électrique donne accès à tous les rayons » (Numéro du 23 novembre 1907, 8, p. 4). Ailleurs sont vantés les « cognacs et liqueurs de M. Ferreyra ». Les pièces sont « sponsorisées » par des marchands : Raffles fait la publicité de tapis de la maison Benezra, et de meubles et d’antiquités de la maison Zondervan (numéro 14, du 15 février 1908, p. 13). Lemaire était rédacteur en chef de la revue, même si l’idée vient de Fonson.
- Voir dans le recueil de Charles Mosnier (vol. 3, op. cit.), qui compile les recensions de l’adaptation de Lemaire et Schürmann.
- 24 octobre 1908, 5, s. p., l’auteur parle des « Gibson girls », sur le mode de la nostalgie : des douze petites danseuses connues il y a douze ans à Londres, « il ne reste plus que des marquises et des duchesses — et des milliardaires » — apogée de l’« actressocracy ».
- « Érotique », « leste » en argot.
- 11 mars 1898.
- 10 mars 1898, p. 2, critique de « Dom Blasius ».
- Daté du 12 décembre 1894.
- Le Figaro, 24 novembre 1893.
- Le Figaro, 25 novembre 1893.
- Ce qui éclaire d’un jour encore plus pathétique les souvenirs de Saussine.
- Le Ménestrel, 24 mai 1896. La version Lemaire-Schürmann s’est jouée en avril, celle de Mme de Rute un mois plus tard, au Nouveau Théâtre. Mme de Rute était la fille de la princesse Laetitia Bonaparte (nécrologie, L’Intransigeant, 8 février 1902). L’avis général est que la traduction Rute est meilleure.
- La Lanterne, 22 mai 1896.
- Henry Fouquier, « Les Théâtres », 1er mai 1896, dans le recueil factice d’articles de presse réunis et classés par Edmond Stoulling (4-RJ-4192 (45)).
- 27 février 1909, 15, p. 14 et 15.
- Rondel ms 2010. Il s’agit d’un exemplaire des « copies dramatiques et littéraires » de « CH. Henry, 5 rue Montholon, 5e ».
- « Il y a pièce et pièce », 27 février 1909, 15, s. p.