Parler d’avant-garde à propos du naturalisme peut sembler à première vue, sinon erroné, du moins excessif et contestable. L’histoire littéraire a eu l’habitude d’opposer très nettement les avant-gardes (symbolistes et fumistes) et les naturalistes qui, emmenés par Zola, auraient même servi de repoussoirs aux premiers. L’histoire littéraire n’a certainement pas eu tout à fait tort, puisque les écrivains de l’époque ont eux-mêmes mis en scène cet affrontement tant esthétique qu’idéologique. De ce point de vue, l’Enquête sur l’évolution littéraire de Jules Huret (1891) est très utile pour comprendre combien l’affrontement des « blocs » littéraires relève pour une bonne part de la mise en scène : à plusieurs reprises, c’est la proximité entre les « écoles » qui s’exprime par-delà les étiquettes qui chapitrent le livre. Dans son avant-propos, Jules Huret propose d’ailleurs une classification alternative, bâtie sur le critère du tempérament : les « acides et pointus » côtoient les « boxeurs et savatiers » ou encore les « vagues et morfondus1 ». Huret rebat les cartes du champ littéraire avec humour pour souligner, sur le mode de la provocation espiègle, l’inefficacité des étiquettes lorsqu’elles quittent le domaine du symbole pour (mal) désigner les pratiques.
À l’heure de la « civilisation du journal2 », les luttes littéraires et artistiques, avec leur dose de mise en scène, sont très rentables, quand bien même elles se construisent sur de sérieuses divergences. La revue Le Chat noir en témoigne. Zola y fait figure de tête de Turc : moqué, caricaturé, le père du naturalisme y incarne l’anti-symbolisme et semble habiter les antipodes de Montmartre. Un mois après le lancement de la revue, le 11 février 1882, on peut lire cette première salve :
Je fais souvent le pèlerinage de Médan, cette Mecque des naturalistes. Un soir, j’étais
sous la fenêtre du cabinet du Maître où brillait la lampe du travailleur ; tout à
coup la croisée s’ouvrit et dans la nuit un papier tomba.
Je le pris, l’essuyai et lus ce qui suit :
Mounard dit la trique
Simple document
À mon ami Victor Hugo3
Comme l’a montré Catherine Dousteyssier-Khoze dans son article sur les rencontres chatnoiresques de Salis et Zola4, la caricature du maître de Médan dans Le Chat noir, obsessionnelle en 1882-1883, ne se réduit pas à une simple charge. C’est le paradoxe bien connu de la parodie : elle moque mais elle assure aussi la promotion du moqué, elle prend ses distances mais repose aussi sur une connivence, elle critique mais fonctionne, de fait, sur les mêmes ressorts. Or, une vague parodique déferle dans les années 1880-1890 sur Zola : dessins, pièces de théâtre et chansons se multiplient pour moquer tantôt les prétentions scientifiques de l’écrivain, tantôt sa littérature d’« égouts » et de « trottoirs » ou encore sa posture de chef de file. Gervaise, Coupeau, Lantier et Nana habitent l’imaginaire socio-culturel de l’époque et vivent bientôt hors du livre, en véritables vedettes fictionnelles. Des cabarets fumistes au pain d’épice de la Foire du Trône5, des chansons potaches6 aux assiettes « parlantes7 », Zola et le naturalisme se promènent de haut en bas, en majeur et en mineur, sur l’échelle des hiérarchies culturelles.
Si l’on veut bien aborder le naturalisme par le discours social et l’histoire culturelle de la fin du XIXe siècle plutôt que par le seul roman, force est de réfléchir à sa place dans le champ littéraire et artistique de la Belle Époque. À le considérer par ses sociabilités, ses réseaux médiatiques et ses lieux communs, au double sens rhétorique et topographique, le naturalisme apparaît comme très mobile dans l’espace socio-culturel de l’époque. Il est à la fois très fortement personnalisé avec Zola et se fixe ainsi du côté d’une littérature à succès, cédant parfois aux sirènes commerciales tout en étant consacrée et légitimée dès le début du XXe siècle. Mais si on envisage le naturalisme dans les discours et les pratiques du temps, au-delà donc de cette incarnation zolienne que la critique et l’histoire littéraires ont rendue écrasante, voire invisibilisante, on se rend compte que le naturalisme est très polysémique et qu’il agit à différents niveaux du champ artistique et culturel. D’abord, le naturalisme participe d’une logique groupale qui va du cercle rapproché de Médan aux avant-gardes littéraires et artistiques. Ensuite, dès la fin du XIXe siècle et au moins jusqu’à l’entre-deux-guerres, le naturalisme sert également de slogan ou de marque et fonctionne comme effet de communication8 pour de nombreux écrivains et artistes (chanteurs et chanteuses, acteurs et actrices notamment). Enfin, le naturalisme est convoqué pour signifier une certaine manière de penser et de représenter le monde lorsqu’il s’agit de mettre en évidence tout à la fois l’importance du corps et des émotions, voire des névroses, les manières de vivre socialement et économiquement marginalisées, la fonction documentaire et sociale de l’art et de la littérature.
Or, dans cette constitution progressive de ce que j’appelle une culture naturaliste, le théâtre a joué un rôle essentiel. Parent pauvre des études littéraires dédiées au naturalisme, souvent réduit à la figure d’André Antoine du côté des études théâtrales, le drame naturaliste est paradoxalement assez méconnu ; paradoxalement car, a priori, de nombreux travaux ont compté pour la connaissance que l’on en a, notamment ceux de Francis Pruner, Jean-Pierre Sarrazac et Philippe Marcerou9 ; pour le théâtre des Goncourt et de Daudet, les travaux d’Anne-Simone Dufief10 ; les ouvrages consacrés à la pantomime, notamment ceux d’Ariane Martinez et Gilles Bonnet11, croisent également quelques écrivains naturalistes ou apparentés, comme Joris-Karl Huysmans, Paul Margueritte ou Léon Hennique, fascinés par le personnage de Pierrot ; enfin, les travaux de Marianne Bouchardon, sur Henry Becque notamment12, ont montré combien l’analyse du théâtre renouvelle le personnel naturaliste et permet d’étendre sa sphère.
On pourrait immédiatement opposer que Becque, Huysmans ou Hennique ne sont justement pas tout à fait naturalistes, qu’ils n’y sont pas réductibles, voire qu’ils s’y sont farouchement opposés au cours de leur deuxième carrière. Mais ces arguments seraient encore prisonniers du carcan Zola : à la fin du XIXe siècle, on peut s’inscrire dans le courant ou l’esprit naturaliste en n’imitant pas Zola et même en le contestant ; autrement dit, il existe différentes manières d’être naturaliste qui ne se superposent ni à Zola, ni au roman, ni même à la France. La forte personnalisation du naturalisme, alimentée par Zola lui-même et par le discours médiatique des années 1880-1890, a conduit à une bizarrerie de l’histoire littéraire : le naturalisme est sans doute l’un des seuls mouvements littéraires dont le périmètre est réduit à un seul auteur et un seul genre, le roman – le théâtre étant complètement invisibilisé. On admet, à la suite des travaux d’Yves Chevrel, un naturalisme international13 ; mais on refuse qu’il existe en France un autre naturalisme que zolien. Par conséquent, le naturalisme est aussi le seul mouvement pour lequel on n’admet pas vraiment de querelles internes et de sous-groupes. Si un écrivain, tel Huysmans ou Margueritte, prend résolument ses distances avec Zola, on ne dit pas qu’il ouvre une autre voie naturaliste, on dit qu’il en sort. Tout conflit avec Zola se solde par un discours de rupture avec le naturalisme alors que l’œuvre de tel ou tel écrivain maintient bien sûr la veine naturaliste. Bref, l’histoire littéraire a superposé école naturaliste et esthétique naturaliste ; or, les deuxième et troisième générations naturalistes montrent au contraire qu’on peut s’éloigner, voire claquer la porte de la première – l’école – tout en continuant évidemment de s’inscrire dans la seconde – l’esthétique. Par ailleurs, la présence importante du naturalisme dans le discours social, de la fin du XIXe siècle aux années 1930, montre qu’il opère et signifie au-delà de Zola et des Rougon-Macquart stricto sensu. Or, c’est sans doute au théâtre que ce phénomène d’extension du domaine du naturalisme est le plus visible.
L’étude des liens entre naturalisme et champ dramatique permet ainsi, c’est mon hypothèse, de quitter le naturalisme majeur de Zola et du roman pour explorer, réticulairement, sa veine mineure et spectaculaire. Or, dans cette veine-là, le naturalisme se positionne résolument à l’avant-garde, notamment lorsqu’il élit domicile au Théâtre Libre d’Antoine à partir de 1887. Dans ce « théâtre à côté », selon l’expression fameuse d’Adolphe Aderer14, c’est une autre vie naturaliste qui se laisse saisir, constituée d’individus que le discours critique place d’habitude sous d’autres étiquettes esthétiques, formée de valeurs artistiques et morales un peu différentes du discours médiatique zolien, et où les « maîtres », tels Edmond de Goncourt, montrent un autre visage. Bref, l’expérience naturaliste au Théâtre Libre d’Antoine est particulièrement intéressante pour analyser, dans une perspective théorique, ce qui se passe quand le majeur se déplace « à côté », dans les marges. En outre, dans une perspective historico-culturelle, l’étude du théâtre naturaliste est aussi nécessaire pour comprendre non seulement que le naturalisme n’a pas été seulement une école romanesque, mais qu’il a aussi constitué un moment important de l’histoire dramatique en participant à la rénovation du théâtre, et qu’il a même correspondu à un certain air du temps. Si, dans l’histoire des spectacles, la rénovation théâtrale est fortement personnalisée et incarnée par Antoine et, dans une moindre mesure, par Porel et Perrin, on tentera de montrer, à rebours de l’imaginaire romantique qui préside à cette lecture fondée sur la figure du génie, que la rénovation théâtrale résulte d’un processus nettement plus culturel qu’auctorial. En d’autres termes, la rénovation dramatique de la fin du XIXe siècle doit être pensée comme l’un des aspects de la culture naturaliste de l’époque.
Échecs et conquêtes : questions de générations
Flaubert, Goncourt, Zola, Daudet, les « quatre fantastiques » du courant réaliste-naturaliste du second XIXe siècle, se sont essayés au théâtre. Parmi les créations, on peut citer Henriette Maréchal (1865) des Goncourt, Le Candidat (1874) de Flaubert, Les Héritiers Rabourdin (1874) de Zola. Toutes ont essuyé des échecs cuisants. Quant aux adaptations et auto-adaptations, qui constituent le corpus principal du théâtre naturaliste, leur réception a été très variable : de L’Assommoir adapté par le « carcassier » Busnach à l’Ambigu en 1879 à Germinie Lacerteux adapté par Paul Porel à l’Odéon en 1888, les échecs critiques et les scandales n’ont pas empêché, au contraire, le succès public. Francisque Sarcey, le célèbre critique du Temps, résume ce paradoxe en une phrase, à propos de L’Assommoir : « Je trouve ce spectacle très répugnant et ne comprends rien à la frénésie d’admiration qu’a marquée le public15 ». Mais les quelques succès populaires obtenus de haute lutte par les « maîtres » du naturalisme ont été effacés de l’histoire littéraire qui s’est résolument appuyée sur le discours critique et les articles de presse pour présenter le théâtre naturaliste comme un théâtre de romanciers. Les nombreuses adaptations de leurs romans passeraient mal la rampe en raison d’une incompatibilité de genre : un roman ne serait pas transposable au théâtre sans appauvrissement de sa matière, de sa force et de son intérêt. Ce jugement très répandu, encore aujourd’hui d’ailleurs, repose d’une part sur une approche négative de l’adaptation, considérée comme un genre non légitime parce qu’elle ne satisferait pas au critère d’originalité qui domine en régime romantique. D’autre part, il repose sur l’idée que le théâtre aurait été pratiqué par ces romanciers dans un but uniquement commercial et médiatique. Zola et Goncourt n’auraient cherché qu’à occuper le devant de la scène, à la lettre, c’est-à-dire à gagner en visibilité et en valeur socio-symbolique. Dans le discours critique de l’époque mais encore parfois aujourd’hui, cela veut dire, par réflexe axiologique, que de telles intentions intéressées sont incompatibles avec une quelconque recherche artistique ou préoccupation esthétique – elle, forcément désintéressée.
Pourtant, s’il est tout à fait exact que le théâtre relève d’une stratégie d’autopromotion – mais cela est vrai pour la plupart des dramaturges à une époque où le régime médiatique s’impose –, il n’est pas moins vrai que Zola et Goncourt ont souhaité, très sérieusement, une profonde rénovation théâtrale qui leur semblait nécessaire alors que les scènes parisiennes s’enfonçaient dans la convention, la déclamation ampoulée, la starification des acteurs et actrices, l’invraisemblance des intrigues servies par une mise en scène standardisée. Émile Zola mène bataille dans la presse de l’époque et fait paraître en 1881 Le Naturalisme au théâtre16. Il y défend un jeu de l’acteur plus naturel, avec un parler, des gestes et des déplacements plus proches de la vie ordinaire ; l’abandon des toiles peintes au profit de décors en trois dimensions et de vrais objets ; des costumes en adéquation avec la classe sociale du personnage pour mettre fin au défilé de couturiers qu’est devenue, selon lui, la scène parisienne. Tous ces principes, Edmond de Goncourt les partage et les expose dans son Journal.
Or, au grand dam de Zola et de Goncourt, cette bataille théorique attend son dramaturge de génie pour être incarnée. À défaut de dramaturge, c’est un jeune acteur amateur, André Antoine, qui en 1887 quitte le Cercle Gaulois pour se lancer dans une aventure un peu folle : la création du Théâtre Libre, théâtre privé qui fonctionne par abonnement et, ce faisant, échappe à la censure. Ce « théâtre à côté17 » se donne pour mission de faire connaître de jeunes auteurs et comédiens de talent. Si Antoine est tourné vers la promotion de la jeunesse avec son théâtre-tremplin, il en justifie l’existence et en démontre la nécessité en s’appuyant sur quelques figures d’autorité, Émile Zola surtout, âgé alors de quarante-sept ans, et Edmond de Goncourt ensuite, qui en a soixante-six18. Henriette Maréchal donné en 1865 à la Comédie-Française, puis Germinie Lacerteux donné en 1888 à l’Odéon font figure de modèles pour Antoine. Rodolphe Darzens, son secrétaire, écrit à propos de Goncourt dans le n°4 du Théâtre Libre illustré en 1890 :
[…] le premier il a tenté dans une pièce littéraire comme celle qu’a représentée l’Odéon, de briser le moule des actes et de les remplacer par une succession de tableaux formant chacun une scène unique qui semble prise dans la vie réelle. Aussi est-ce pour le directeur du Théâtre Libre un grand honneur que d’avoir compris la place spéciale qu’occupera dans l’histoire de l’Art dramatique de ce siècle, Edmond de Goncourt, et d’avoir offert sa scène trois fois de suite pour des manifestations de cette nature19.
Le Théâtre Libre partage en effet le souci d’inventer un théâtre « pri[s] dans la vie réelle » et servi par un jeu « naturel » et une scénographie réaliste20. C’est pourquoi Zola fait figure de référence théorique pour Antoine, même si la dimension stratégique de son patronage est tout aussi importante. Dans Mes Souvenirs sur le Théâtre Libre, Antoine est très clair lorsqu’il explique comment il a réussi à approcher le cercle naturaliste, grâce à Arthur Byl, Jules Vidal puis Paul Alexis :
[…] j’eus un étourdissement le jour où Alexis m’annonça qu’ayant parlé de notre affaire à Léon Hennique, un autre de Médan, qui venait d’avoir un acte, tiré d’une nouvelle d’Émile Zola, refusé à l’Odéon, celui-ci se montrait disposé à nous le confier. Dans l’instant j’entrevis que le nom de Zola sur notre programme nous vaudrait l’attention certaine de Sarcey21.
Cette confession est éloquente à plusieurs titres. Elle montre l’aspect publicitaire de Zola dont la célébrité permet à ce jeune théâtre « à côté », en marge, de toucher le plus légitime des critiques. Elle montre également que le Théâtre Libre devient rapidement une véritable « scène des refusés », où le théâtre naturaliste des maîtres déjà mûrs trouve refuge et d’où le théâtre de la jeune garde va se positionner pour tenter de se faire connaître et ensuite gagner les grandes scènes. Intergénérationnel, le Théâtre Libre est à la fois refuge et tremplin mais, dans les deux cas, il s’agit de promouvoir la rénovation théâtrale. Les générations de Goncourt et Zola, qui ont entre quarante-cinq et soixante-cinq ans, jouent avec Antoine le scénario de la malédiction littéraire et des génies incompris des scènes subventionnées. Se trouve ici transposée dans le champ théâtral l’opposition qui structure le champ artistique dans le discours médiatique avec, d’un côté, le Salon officiel et, de l’autre, le Salon des refusés, c’est-à-dire l’art académique, conventionnel et poussiéreux d’une part, l’art rejeté dans les marges, inventif et subversif d’autre part. Si l’on traduit en termes dramatiques, le Théâtre Libre construit sa posture22 dans le sens d’une scène des refusés où se joue, littéralement et métaphoriquement, l’invention d’un nouveau théâtre qui tend à subvertir les conventions. Voici comment le Théâtre Libre est défini dans La Gazette de France le 17 octobre 1887 :
Qu’est-ce que le Théâtre Libre ?
C’est un théâtre destiné à mettre au jour – au jour du gaz – les œuvres des jeunes,
des incompris, des méconnus, de ceux que les directeurs de théâtre font poser, épatent par de solennelles paroles, envoient à tous les diables, ou bernent de vaines promesses.
[…] Ces potentats – les directeurs – ont horreur du nouveau en tout et pour tout,
des situations nouvelles comme des nouvelles figures.
Tandis que les maîtres y trouvent enfin refuge et reconnaissance, la jeune génération s’y positionne en tant qu’avant-garde, partageant avec les symbolistes et les fumistes un même type de lieu, petit, marginal et privé, ainsi qu’un même type de sociabilités groupales et « fraternelles ».
Cette dimension groupale et marginale du Théâtre Libre a été largement effacée de l’histoire du théâtre, éclipsée par la figure d’Antoine. On pourrait même dire, sans trop exagérer, qu’Antoine est au Théâtre Libre ce que Zola est au naturalisme. Parce qu’ils en sont les créateurs/inventeurs, les auteurs donc, on considère le Libre et le naturalisme comme une œuvre, leur œuvre, et tous les acteurs qui ont participé à l’aventure comme des personnages. Or, comme le naturalisme avec Zola, le Théâtre Libre existe au-delà d’Antoine en tant que groupe, slogan, état d’esprit, manière de jouer et de faire voir. Bref, une culture « Théâtre Libre » se développe dans les années 1880, comme on parle d’une culture « Chat noir » irréductible à Rodolphe Salis23.
« À côté » et en petit : petits formats pour petits naturalistes
Pour la jeune génération naturaliste, partagée entre Médaniens et Greniéristes, c’est-à-dire entre Zola et Goncourt, le Théâtre Libre est une formidable occasion de se faire un nom et de conquérir visibilité et légitimité – ce qui va de pair à la fin des années 1880. Deux types de production sont alors possibles, en fonction des assignations avec lesquelles ils doivent composer puisqu’ils sont encore inconnus, ou presque, du public : soit ils essaient de placer une de leurs créations, souvent une pièce au format réduit, en un acte, parce que les directeurs ne prennent pas le risque d’une pièce longue qui engage un coût important et pourrait être un naufrage ; soit ils adaptent un roman ou une nouvelle des maîtres et font ainsi coup double : ils attirent le public et même un Sarcey, on l’a vu, sur le nom de Zola ou Goncourt, et ils s’attirent les bonnes grâces des mêmes Zola ou Goncourt qui peuvent évidemment leur être utiles sur le plan médiatique et éditorial.
Médanien de la première heure puisqu’il est cosignataire du fameux recueil Les Soirées de Médan paru en 1880, Léon Hennique propose pour la première soirée du Théâtre Libre, le 30 mars 1887, une adaptation en un acte de la nouvelle d’Émile Zola, Jacques Damour. Le même soir, Paul Alexis propose Mademoiselle Pomme, comédie farce en un acte qu’il a reprise à partir d’un texte de Duranty. Arthur Byl donne Un préfet et Jules Vidal La Cocarde, toutes deux en un acte également. Certes, le format en un acte est réservé – assigné – aux auteurs jeunes et peu connus. Mais sans exclure cette donnée tout à fait exacte, le petit format est, chez Antoine, une marque de fabrique naturaliste. Alors que la pièce en un acte est un format tout à fait fréquent et banal à l’époque, du théâtre légitime au théâtre populaire, les jeunes auteurs du cercle Antoine artialisent ce format court et artifient leurs contraintes de production (rapidité d’écriture, jeunesse) pour en faire une marque de fabrique collective.
Lors de la deuxième soirée, le 30 mai 1887, En famille, pièce en un acte d’Oscar Méténier, ouvre le bal tandis que la deuxième pièce, qui n’a rien de naturaliste, bien au contraire, La Nuit Bergamasque d’Émile Bergerat, est une comédie en vers en trois actes. Dans sa chronique dramatique du Cri du Peuple, Paul Alexis qui signe du pseudonyme Trublot raconte comment, à cette occasion, le Libre traverse sa première crise : « plusieurs “actionnaires” littéraires du Théâtre Libre, des “jeunes” un brin sectaires, voulant bien avaler du calice bergeraté, mais pas à triple doses » s’opposent à Antoine qui, lui, « veut jouer d’tout, d’tout24 ». Ce récit d’Alexis-Trublot évoquant la révolte des « jeunes » témoigne de la dimension groupale du Libre et nuance sa forte personnalisation retenue par l’histoire du théâtre. Antoine rencontre des oppositions dans ses choix de programmation et la première crise du printemps 1887 a été « si violent[e], que le Théâtre-Libre a été sur l’point de se scinder en…deusses Théâtres-Libres !!!25 ». C’est dire le degré d’appropriation de ce lieu par les « jeunes », un lieu qui n’appartient donc pas qu’à son créateur et à propos duquel on peut parler de co-auctorialité, au moins dans les premières années. Par ailleurs, dans cet extrait du Cri du Peuple, Alexis-Trublot, certes juge et parti en tant qu’auteur du Libre lui-même, montre combien la question du format agite les discussions : les « jeunes » peuvent bien accepter ce raté de Bergerat, ce « Bergeraté », mais pas « à triple doses », pas avec une pièce en trois actes. Le Théâtre Libre, autrement dit, est le lieu d’une querelle de territoire qui se compte en actes : puisque les « jeunes » ont un acte, qu’il s’agisse de commandes d’Antoine, de choix pratiques ou esthétiques, les « vieux », soit les auteurs déjà consacrés, ne sauraient avoir davantage. Antoine voulait un théâtre pour les jeunes auteurs, il doit rester fidèle à ce principe et, pour cela, respecter le juste équilibre des formats, sans tenir compte d’autres critères comme la légitimité, la valeur symbolique ou encore le capital économique d’un auteur. D’ailleurs, Antoine lui-même articule le petit format et la rénovation théâtrale. Il rêve par exemple « d’jouer un acte d’la Patrie en Danger si M. Edmond de Goncourt y consen[t]26 ». En termes d’auteur consacré, difficile alors de faire mieux que le dernier des Goncourt ; et pourtant, Antoine projette encore une pièce en un acte. L’écrivain consentira, mais avec une pièce en cinq actes. Pour Edmond, les choses sont claires : à grand auteur, grand format.
De fait, les « jeunes » qui s’opposent à Antoine concernant La Nuit Bergamasque ont sans doute en tête que le petit format doit identifier le Théâtre Libre car les écritures et formats brefs sont résolument modernes. Ils résonnent avec les pratiques symbolistes qui circulent notamment dans les petites revues et qui se laissent voir et entendre dans différents cabarets, à Montmartre notamment. Petit format pour petits naturalistes, parmi lesquels Léon Hennique, Paul Alexis, Joris-Karl Huysmans, Lucien Descaves, Léon Ajalbert, Henry Céard et Paul Margueritte, la pièce en un acte devient le format de la jeune (avant-) garde théâtrale. Pourtant, les intrigues des pièces naturalistes en un acte ne sont pas toujours novatrices27 mais le format et la mise en scène, parfois la langue, portent le renouveau et la modernisation. Autrement dit, ce que j’ai appelé ailleurs « l’effet Antoine »28 se combine à un effet format, proche de l’effet support29, pour donner à des pièces au contenu parfois banal une dimension novatrice et les situer à l’avant-garde.
Au-delà du genre dramatique, l’écriture brève correspond aux convictions poétiques et esthétiques des petits naturalistes qui, dans les genres narratifs, se distinguent par la pratique du conte, de la nouvelle ou encore du roman bref. À considérer le corpus naturaliste dans son ensemble, comme œuvre collective et en diachronie, les pièces en un acte apparaissent comme le pendant dramatique de la pléthore de recueils de récits brefs. Ce type de format correspond à une esthétique de la miniaturisation caractéristique du naturalisme des deuxième et troisième générations, à la fois autoparodique et pessimiste, et qui apparaît volontairement comme épuisé, participant d’un imaginaire de la fin pour la bien nommée fin-de-siècle. Du cercle du Chat Noir à celui du Grenier, on élit la forme brève pour son ironie ludique et son pessimisme parfois joyeux, souvent grinçant. La forme brève exprime aussi un autre rapport au réel et à l’histoire qui considère le détail et l’anecdote comme les supports d’une représentation vraie, plus proche des petites vies et des individus « moyens » qui préoccupent les artistes du second XIXe siècle. À ceux de la critique qui considèrent que les pièces courtes, en un ou deux actes, sont des « fumisteries » plutôt que du théâtre, lequel semble commencer à trois actes, ses défenseurs rétorquent, à l’image de Simon Boubée à propos de l’adaptation de Sœur Philomène des Goncourt, que c’est « un théâtre tout spécial », « quelque chose de bizarre mais d’empoignant », qui fait l’effet d’une « nouvelle, ou si l’on veut une anecdote mise en scène avec beaucoup de naturel30 ». Cette critique de Boubée est riche d’enseignements sur ce que Jean-Pierre Sarrazac31 a appelé la romanisation du théâtre en empruntant la notion à Bakhtine.
En effet, le drame se « romanise » tout au long du XIXe siècle, il se narrativise du côté du roman et, par là même, en tire de nouveaux textes et de nouveaux effets, au service de la rénovation théâtrale. Or, le théâtre naturaliste, avec ses nombreuses adaptations, a largement œuvré pour cette « romanisation » du théâtre. Par conséquent, il est tout à fait logique qu’il ait essaimé sur d’autres scènes, chez des auteurs pas du tout naturalistes. Il suffit de citer Cyrano de Bergerac (1897) d’Edmond Rostand, et notamment les didascalies de l’acte II, intitulé « La rôtisserie des poètes », où l’on entend aussi bien Le Ventre de Paris de Zola que Les Bouchers de Fernand Icres, représenté au Théâtre Libre une dizaine d’années auparavant, en 1888. Les fameuses pièces de bouchers présentes sur scène ont certainement inspiré Rostand avec le « comptoir surmonté d’un épais dais en fer forgé, auquel sont accrochés des oies, des canards, des paons blancs ». Des théâtres « à côté » aux grandes scènes parisiennes, les circulations formelles et thématiques sont patentes. Ce n’est sans doute pas la moindre des conquêtes d’Antoine que d’avoir vu ses choix de mise en scène non seulement imités ailleurs, sur des scènes mainstream, mais surtout littérarisés et textualisés sous la plume d’un Rostand32.
Le naturalisme depuis l’histoire des spectacles : troubles dans le champ
Pour revenir à la question des formats, leur continuité dans le champ littéraire et dramatique de la fin du siècle ainsi que l’articulation nette entre position marginale/mineure et écriture brève doit nous conduire à repenser tout à la fois le théâtre naturaliste et le cercle du Théâtre Libre, mais aussi le naturalisme tel qu’il apparaît une fois passé à la moulinette de l’histoire des spectacles.
En considérant ensemble naturalistes et avant-gardes littéraires (symbolistes, fumistes…), on constate un partage des formes (souvent brèves), un partage des sociabilités (restreintes, à la marge), un partage de certains modes de communication (le scandale, la transgression) et un partage de supports (les petites revues). Pour illustrer cela, il suffit de donner quelques exemples pour chaque item : pour les formes brèves, on peut penser au monologue dramatique, pratiqué dans les réseaux fumistes, et à la pièce en un acte du côté naturaliste ; pour les sociabilités, Le Chat Noir et le Théâtre Libre ; pour les scandales, les fameuses supercheries de la jeunesse fumiste et l’autoparodie pornographique, matérialiste ou farcesque des naturalistes qui a déclenché plusieurs procès ; enfin, pour les revues, Le Chat Noir, La Plume d’un côté, La Revue indépendante, la Revue moderne et naturaliste, ou encore la Revue verte de l’autre33.
Toutes ces circulations montrent que l’histoire littéraire et dramatique se construit sur des flux alors que l’historiographie, ou si l’on veut l’écriture de l’histoire littéraire et dramatique, privilégie des blocs. Ainsi, du côté des études littéraires, pour comprendre ce qu’était le naturalisme, il faut aller chercher du côté du théâtre, de la culture spectaculaire de manière générale, des petites revues, des rencontres avec les jeunes écrivains et artistes au Chat Noir ou au Cirque Fernando. Du côté des études théâtrales, pour comprendre ce qu’était le Théâtre Libre, il faut aller chercher du côté des avant-gardes littéraires et artistiques afin de saisir le théâtre d’Antoine à sa juste place dans une « culture à côté34 » dont il participe, avec d’autres formes ; il faut aussi aller chercher du côté des formes narratives naturalistes, avec lesquelles se déploie un jeu d’influences fascinant. Le roman et la nouvelle naturalistes, modèles pour Antoine, jouent un rôle important dans l’histoire de la rénovation théâtrale car le metteur en scène les incarne, les dramaturgise. La « romanisation » du théâtre, véritable lame de fond des productions dramatiques de la fin de siècle, s’accélère tandis que les pièces, au tournant du XXe siècle, textualisent les innovations d’Antoine en termes de mise en scène. Les liens entre son travail scénique et dramaturgique d’une part, et la culture naturaliste d’autre part, fonctionnent selon un mouvement que l’on peut caractériser ainsi : le texte naturaliste (roman, nouvelle) est dramaturgisé dans un projet de rénovation scénique et théâtrale qui, ensuite, par effet retour, fait l’objet d’une littérarisation/textualisation dans des pièces, des romans, des récits qui maintiennent ainsi une filiation naturaliste. L’exemple de Rostand l’a montré.
Cependant, on ne peut s’arrêter là sous peine d’invisibiliser un autre visage du naturalisme et du Théâtre Libre. Tous deux, dont les histoires sont décidément entrecroisées, fonctionnent comme avant-garde dans le champ théâtral mais sont aussi résolument tournés vers le centre et le majeur, à la fois du point de vue institutionnel et du point de vue commercial, c’est-à-dire aussi bien en termes de valeur symbolique/artistique que de valeur économique/médiatique. En effet, la programmation du Théâtre Libre est très éclectique et l’écart est grand entre un Paul Margueritte et un François de Curel, entre un Arthur Byl et un Émile Bergerat, comme on l’a vu. L’éclectisme d’Antoine est d’ailleurs souvent convoqué comme argument pour le défaire d’une identité naturaliste trop forte, jugée dégradante pour le grand metteur en scène qui influencera tant de rénovateurs du siècle suivant : Stanislavski, Copeau, Jouvet, etc. De mon point de vue et dans la perspective qui est la mienne, cet éclectisme est plutôt le signe de la grande maîtrise d’Antoine en termes de stratégie d’autopromotion et de positionnement dans le champ. Situé à l’avant-garde, il entretient dans le même temps une correspondance avec Francisque Sarcey, publiée en partie dans ses souvenirs. Promoteur de la jeune garde théâtrale, il s’assure la protection de quelques grands noms. Son théâtre est un tremplin à double titre : pour la jeunesse qu’il lance, mais aussi pour lui-même. Le directeur du Libre n’a jamais caché son ambition de quitter l’« à côté » pour le cœur de la vie théâtrale de son temps, ce à quoi il est parvenu avec l’Odéon et le Théâtre Antoine. Ces déplacements et ces phénomènes de polarisation entre centre et marge, majeur et mineur, ne sont pas exceptionnels et sont même, au contraire, au cœur d’une vie littéraire et artistique faite de conquêtes, de querelles de territoire, de mobilités socio-artistiques et symboliques. Cependant, le naturalisme est assez exceptionnel dans la mesure où il n’a pas progressé d’une marge vers le centre, comme c’est souvent le cas. Il n’a pas été une avant-garde bientôt instituée, conformément au schéma habituel de la vie des groupes littéraires qui va de la formation à la dissolution que provoque la consécration35. Pendant le dernier tiers du XIXe siècle et au-delà, le naturalisme a occupé horizontalement tous les espaces, centre et marges confondus.
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De même que se développe à la fin du siècle cette « culture à côté » dont parle Julien Schuh et à laquelle participe pleinement le théâtre naturaliste au Théâtre Libre, se déploie aussi, dans le second XIXe siècle, une culture naturaliste assez complexe à circonscrire car elle occupe tous les étages des hiérarchies littéraires et culturelles. En effet, la culture naturaliste essaime dans les petites revues comme les grands quotidiens, au salon de la princesse Mathilde comme au Chat Noir ; elle produit une œuvre-monde aux ambitions scientifiques mais aussi des micro-nouvelles et des pièces en un acte ; elle est éditée chez Charpentier dont l’épouse tient salon, en même temps que jouée dans une petite salle du Passage de l’Élysée-des-Beaux-Arts ; elle se diffuse sur ce qu’on appellera plus tard des produits dérivés, pain d’épice, cigares et assiettes « parlantes » ; elle se retrouve également au Moulin Rouge, sous la forme du « quadrille naturaliste36 » qui rend célèbre La Goulue, Valentin-le-Désossé et Nini Patte-en-l’air ; elle est également présente dans les arts graphiques avec les programmes du Théâtre Libre réalisés, entre autres, par Toulouse-Lautrec et Henri Ibels ; bientôt, elle donne sa couleur à l’Académie puis au Prix Goncourt, avec comme premiers membres des naturalistes des deuxième et troisième générations, parmi lesquels certains ont fait les beaux jours du Théâtre Libre : Paul Margueritte, Joris-Karl Huysmans, Léon Hennique, Lucien Descaves. Du théâtre « à côté » à l’Académie Goncourt, le naturalisme a fait du chemin dans le champ dramatico-littéraire de la Belle Époque. Dans le fond, cependant, pas tant que ça, puisque la trajectoire est cohérente d’un théâtre d’avant-garde à une contre-Académie française constituée initialement en cénacle.
Notes
- Jules Huret, « Avant-Propos », Enquête sur l’évolution littéraire, Paris, Charpentier, 1891, p. VII-XXI.
- J’emprunte l’expression désormais consacrée à Dominique Kalifa, Philippe Régnier, Marie-Ève Thérenty et Alain Vaillant (dir.), La Civilisation du journal. Histoire littéraire et culturelle de la presse française au XIXe siècle, Paris, Nouveau Monde éditions, 2011.
- Le Chat noir, 11 février 1882.
- Catherine Dousteyssier-Khoze, « Rodolphe Salis et Émile Zola : rencontres chatnoiresques », dans Alain Vaillant et Roselyne de Villeneuve (dir.), Le rire moderne, Nanterre, Presses universitaires de Nanterre, 2013, p. 217-231. [http://books.openedition.org/pupo/3646]. Sur Le Chat noir plus globalement, voir Caroline Crépiat, Denis Saint-Amand et Julien Schuh (dir.), Poétique du Chat noir (1882-1897), Nanterre, Presses universitaires de Paris Nanterre, 2021.
- John Grand-Carteret, Zola en images, Paris, Félix Juven, 1908, p. 68 : « Derniers objets, dernière incarnation de la popularité : la pipe Gambier et le pain d’épice. On a pu se payer le luxe de fumer Zola ou de piper dans la tête de Zola, à une époque où l’on ne se doutait certes guère que le grand penseur serait bêtement fauché, un matin d’octobre, par la fumée s’échappant des fissures d’une cheminée. Et quant au pain d’épices, ceux qui fréquentaient la foire du Trône, aux approches de 1880, peuvent se souvenir de petits cochons à têtes, plus ou moins ressemblantes, de Zola et de Nana pompeusement baptisés : Lui et Elle. »
- Voir Frédéric Robert, Zola en chansons, en poésies et en musique, Sprimont, Mardaga, 2001.
- L’Assommoir fait par exemple l’objet d’une série de douze assiettes Jules Vieillard de Bordeaux qui reproduisent les épisodes jugés les plus dramatiques du roman.
- Je me permets de renvoyer à mon article : Marie-Astrid Charlier, « La montée en célébrité de l’Académie Goncourt au début du XXe siècle », dans Adrien Rannaud et Mélodie Simard-Houde (dir.), La vedette et ses plumes : presse, littérature et célébrité, Sur le journalisme [en ligne], à paraître en 2025.
- Francis Pruner, Les Luttes d’Antoine au Théâtre-Libre, Paris, Minard, 1964 ; Jean-Pierre Sarrazac et Philippe Marcerou, André Antoine, l’invention de la mise en scène. Anthologie de textes d’André Antoine, Arles, Actes Sud, 1999.
- Voir Anne-Simone Dufief, « Les Goncourt et le théâtre ». Cahiers Edmond et Jules de Goncourt, vol. 1, 13, 2006. [www.persee.fr/issue/cejdg_1243-8170_2006_num_1_13].
- Ariane Martinez, La pantomime, théâtre en mineur, 1880-1945, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2008 ; Gilles Bonnet, La Pantomime noire, 1836-1896, Paris, Hermann, 2014.
- Marianne Bouchardon (dir.), Henry Becque, prince de l’amertume, actes de la journée d’étude organisée à l’Université de Rouen en mai 2019, Publications numériques du CÉRÉdI, « Actes de colloques et journées d’étude », 27, 2020. [http://publis-shs.univ-rouen.fr/ceredi/index.php?id=1062]. Voir également son édition critique : Henry Becque, Théâtre complet, t. I, éd. Marianne Bouchardon, Paris, Classiques Garnier, 2020 (tome II en préparation).
- Yves Chevrel, Le naturalisme. Étude d’un mouvement littéraire international, Paris, PUF, 1993 [1982]. Dans cette perspective, voir Olivier Lumbroso (dir.), « Naturalismes du monde : les voix de l’étranger », Les Cahiers naturalistes, 94, 2020.
- Adolphe Aderer, Le Théâtre à côté, préface de Francisque Sarcey, Paris, Librairies-Imprimeries réunies, 1894.
- Francisque Sarcey, Le Temps, 20 janvier 1879.
- Voir l’édition de Marianne Bouchardon parue en 2020 chez Classiques Garnier.
- Adolphe Aderer, Le Théâtre à côté, op. cit.
- Sur la passion de Goncourt pour le théâtre et le sens de ses échecs, je renvoie à mon article : Marie-Astrid Charlier, « Valeurs de l’échec : (auto)portrait des Goncourt en auteurs sifflés », dans Jean-Louis Cabanès, Pierre-Jean Dufief, Béatrice Laville, Vérane Partensky et Éléonore Reverzy (dir.), L’Œuvre des Goncourt : un système de valeurs ?, Paris, Classiques Garnier, 2024, p. 161-176.
- Rodolphe Darzens, Le Théâtre Libre illustré, 4, Paris, E. Dentu, 1890.
- Perrin et Porel s’y emploient également, respectivement au Théâtre-Français et à l’Odéon.
- André Antoine, Mes Souvenirs sur le Théâtre-Libre, Paris, Arthème Fayard & Cie, 1921, p. 17.
- Il peut paraître étonnant de voir utilisée ici la notion de « posture », théorisée par Jérôme Meizoz, à propos d’un lieu. Mais précisément, le Théâtre-Libre assume une fonction auctoriale dans un contexte de redéfinition du fait dramatique et de restructuration du champ théâtral et spectaculaire, et cette auctorialité est collectivement fabriquée dans la presse de l’époque.
- Thalasso mentionne Le Chat noir comme une influence, certes discrète, du Théâtre-Libre : « Pour insignifiante qu’ait pu être l’influence du Chat-Noir sur les destinées du Théâtre Libre, il n’en est pas moins vrai que le “clan” de la rue Victor Massé exerça une pression sérieuse sur le mouvement du théâtre contemporain. […] Je devais, pour la sincérité de mon étude, mentionner ce “cénacle” à l’esprit duquel nous devons plus d’un de nos auteurs les plus applaudis et qui, avec beaucoup de bonne humeur, a apporté sa pierre aux assises de notre scène contemporaine. », Thalasso, Le Théâtre Libre, préface de Jean Jullien, Paris, Mercure de France, 1909, p. 44-45.
- Trublot, « À minuit », Le Cri du Peuple, 31 mai 1887, p. 3. Il y a visiblement un décalage entre la date de rédaction de l’article, une semaine avant la représentation du 30 mai, et la publication dans le numéro du 31.
- Id.
- Id.
- Philippe Baron, « Quelques pièces naturalistes en un acte du Théâtre-Libre », dans Philippe Baron et Anne Mantero (dir.), Bagatelles pour l’éternité. L’art du bref en littérature, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, 2000, p. 291-302.
- Marie-Astrid Charlier, « Le drame social naturaliste : tranches de vies ouvrières (1870-1900) », dans Olivier Bara (dir.), « Théâtre social, drame humanitaire », Nineteenth-Century French Studies, vol. 51, 3 et 4, 2023., [10.1353/ncf.2023.0005].
- Je renvoie ici aux travaux de Marie-Ève Thérenty.
- Simon Boubée, « Théâtres », La Gazette de France, 17 octobre 1887, p. 1.
- Jean-Pierre Sarrazac, L’Avenir du drame [1981], Paris, Circé, coll. « Poche », 1999.
- Il y aurait un beau travail à mener sur cette littérarisation de la mise en scène, sur la transformation, en écriture, de la rénovation menée par Antoine, Porel et Perrin.
- Jean-Didier Wagneur, « Journaux et revues naturalistes », dans Colette Becker et Pierre-Jean Dufief (dir.), Dictionnaire des naturalismes, t. 2, Paris, Honoré Champion, 2017, p. 820-827.
- Je renvoie à l’article de Julien Schuh dans ce volume, et plus généralement à ses travaux.
- Voir Anthony Glinoer et Vincent Laisney, L’Âge des cénacles. Confraternités littéraires et artistiques au XIXe siècle, Paris, Fayard, 2013 ; Denis Saint-Amand (dir.), La dynamique des groupes littéraires, Liège, Presses universitaires de Liège, coll. « Situations », 2013.
- Marie-Astrid Charlier, « Le sceau de la pantomime. Relecture mimique et gestuelle de la littérature naturaliste », dans Éléonore Martin, Géraldine Moreau et Erico José Souza de Oliveira (dir.), Horizons/Théâtre, 16-17, « Les ailleurs du mime », 2023, p. 20-50. [https://journals.openedition.org/ht/4208].