Introduction
Par sa localisation, le territoire correspondant à l’ex-région Nord-Pas-de-Calais (fig. 1) fut, pendant le XIXe siècle, au cœur d’un dense réseau d’échanges intellectuels sur la question des origines de l’Homme et de son évolution au cours des temps géologiques.
Au sud de ce territoire, la vallée de la Somme devient, grâce à Boucher de Perthes, un laboratoire d’idées nouvelles sur l’ancienneté de l’Homme, au cœur de l’attention du monde savant. Au nord, en Belgique, la naissance de la préhistoire suivit un cours différent, basé sur les recherches de Schmerling dans les grottes de la région de Namur1 ; cependant, la partie occidentale de la Belgique partage avec le nord de la France des caractéristiques géomorphologiques et une histoire industrielle communes. La proximité de l’Angleterre, avec laquelle le Pas-de-Calais présente une certaine continuité géologique, a également suscité des échanges de part et d’autre du détroit.
Nous allons évoquer les modalités d’émergence de la préhistoire dans le nord de la France, la réception des idées nouvelles et les mécanismes de leur diffusion parmi les chercheurs. On s’intéressera également aux orientations méthodologiques prises par la préhistoire dans le nord de la France, sous l’influence de différentes personnalités et sur les rapports avec les réseaux parisiens, marqués par le cadre théorique développé par Gabriel de Mortillet.
Le cadre chronologique considéré embrasse toute la deuxième partie du XIXe siècle, à partir des premières mentions d’artéfacts lithiques et d’ossements animaux attribués à une époque antéhistorique, pendant les années 1830, jusqu’au début de la Première Guerre mondiale, qui, dans cette région comme dans beaucoup d’autres, marque une rupture brutale des dynamiques de recherches du fait de la disparition de plusieurs amateurs et savants spécialistes de la préhistoire et de la géologie du Quaternaire.
Spécificités régionales
Importance des contextes géologiques
des occupations préhistoriques
Parcourir le fil de l’histoire de la préhistoire régionale ne peut pas être dissocié d’une considération des contextes de conservation des sites préhistoriques. Les spécificités structurelles et sédimentaires du Nord-Pas-de-Calais doivent être brièvement évoquées ici, car elles ont des implications importantes pour la reconnaissance et les conditions de mise au jour des sites et des objets préhistoriques, en particulier paléolithiques.
La région Nord-Pas-de-Calais est structurée en deux grandes zones2 (fig. 2.A) : un haut pays, situé au sud-ouest, représenté par des plateaux développés dans la craie crétacée et appartenant à la bordure septentrionale du Bassin parisien et un bas pays, situé au nord-est, constitué par des plaines et collines développées dans les sables et argiles tertiaires et appartenant à la bordure méridionale de la plaine nord-ouest européenne.
Deux systèmes morphostratigraphiques différents résultent de ces caractéristiques (fig. 2.A) : le haut pays, d’une part, accueille des vallées encaissées dans lesquelles les versants ont pu conserver des nappes fluviatiles pléistocènes étagées, éventuellement marquées dans la morphologie par un système de terrasses (cas de la vallée de la Somme). Le bas pays, d’autre part, est caractérisé par une succession de plaines basses et larges, avec des limites de fond de vallée souvent mal circonscrites dans un contexte de pente faible. La plupart des vallées du bas pays sont en outre dépourvues de roches dures susceptibles d’alimenter des nappes fluviatiles grossières (graviers et galets), à la différence de ce qui est observé dans les terrasses de la vallée de la Somme.
Une abondante sédimentation lœssique déposée pendant les périodes glaciaires sur l’ensemble de la région a été responsable à la fois d’une conservation exceptionnelle des contextes préhistoriques, mais également d’un niveau d’enfouissement parfois élevé, dans le haut comme dans le bas pays3 (fig. 2.B-C).
Dans le cadre de cette configuration, les occupations préhistoriques se rencontrent dans des situations différentes dans ces deux espaces en fonction des contextes morphosédimentaires4 : en contexte de vallées fluviatiles, au sein des formations fines des systèmes de terrasses, en contexte de plateau ou de versant, au sein de séquences comprenant des formations lœssiques et des paléosols humifères (fig. 2.B-C).
Les spécificités de ces contextes ont des répercussions sur l’acquisition des connaissances concernant les sites préhistoriques : les occupations de la préhistoire très ancienne sont irrégulièrement conservées, souvent profondément enfouies et peu accessibles. Leur mise au jour était faite à l’occasion de creusements d’envergure, comme l’exploitation de briqueteries et de carrières, le creusement de canaux, la construction d’infrastructures.
Dans les contextes de fond de vallée du bas pays, les extractions de graviers ont été quasiment inexistantes, à la différence de ce qui s’est passé dans la vallée de la Somme ; les occupations préhistoriques s’intègrent donc rarement dans des séquences archéostratigraphiques et ne sont pas en relation avec un système morpho-stratigraphique facilement perçu et interprétable, tel qu’un système de terrasses, comme c’est le cas dans la vallée de la Somme.
Des dépôts quaternaires sont également conservés le long du littoral du Pas-de-Calais, visibles dans les falaises fossiles qui délimitent la plaine maritime actuelle5. C’est dans ce secteur que se focalisèrent les premières recherches d’industries lithiques.
Bien que les contextes karstiques, contrairement à ce qui est observé dans la Belgique voisine, soient rares dans la région, les escarpements calcaires présents dans la vallée Heureuse à Rinxent, dans la boutonnière du Boulonnais (Pas-de-Calais)6, ont livré des occupations préhistoriques en lien avec des grottes et abris sous-roche7, dont le rôle a été important dans l’histoire de la recherche régionale.
Particularités du contexte socio-économique
L’essor du Quaternaire dans le Nord – Pas-de-Calais, dans le cadre du développement des études géologiques, doit être considéré à la lumière des interrelations entre science et industrie pendant le XIXe siècle8. L’exploitation minière du bassin houiller9, mais aussi d’autres activités d’extraction, comme celle de la craie ou du marbre ainsi que la gestion des ressources en eau, ont favorisé le développement d’études fines de la composition du sous-sol. Ces besoins ont suscité aussi des synthèses assez précoces10. Elles ont généré des besoins en formation des cadres et des techniciens, ainsi qu’une professionnalisation des spécialistes des sciences de la terre11. Ce contexte a favorisé la mise en place d’échanges scientifiques et techniques entre différents acteurs régionaux : compagnies minières, universités (la Faculté des Sciences de Lille est créée en 1854), sociétés savantes et musées (“Musée Gosselet” et “Musée houiller”)8.
Ces relations s’étendaient naturellement à la Belgique, caractérisée par les mêmes structures géologiques qui se prolongeaient de part et d’autre de la frontière franco-belge et, en particulier, à l’université de Mons8.
Les spécificités du tissu socio-économique ne concernaient pas seulement les acteurs, mais également la production de données. L’industrialisation croissante et la création de nouvelles infrastructures se traduisirent par la réalisation d’une série de grands travaux – construction de chemins de fer, réalisation du Canal du Nord, aménagement des ports de Boulogne, Calais (Pas-de-Calais) et Dunkerque (Nord), exploitation de carrières et travaux d’extraction – qui fournirent l’occasion d’observer des séquences quaternaires, associées souvent à des sites archéologiques12.
De ce contexte particulier émergèrent une partie des acteurs et des éléments d’observation qui firent de la géologie du Quaternaire le principal moteur de connaissances sur la préhistoire dans la région.
Méthodologie de la présente étude
Cette problématique historique a été abordée par un dépouillement systématique des écrits concernant la préhistoire et le Quaternaire parus dans les publications d’une sélection de sociétés savantes locales et régionales13 (tabl. 1). Le corpus régional a été complété par les mentions relatives à la préhistoire et au Quaternaire du Nord et du Pas-de-Calais dans plusieurs supports nationaux : le Bulletin de la Société Géologique de France, pour la période 1830-1908, le Bulletin de la Société Préhistorique Française, pour la période 1904-1914, le Bulletin de la Société d’Anthropologie de Paris pour la période 1859-1909 et l’Anthropologie, pour la période 1874-1908. Le Bulletin de la Société belge de géologie, de Paléontologie et d’Hydrologie, a également été prise en considération, pour la période 1887-1909, étant donné l’importance des relations transfrontalières qui ont lié le Nord de la France et la Belgique dans la réflexion sur la géologie du Quaternaire.
Par ailleurs, plusieurs sociétés savantes régionales et locales ont été actives à partir de la première moitié du XIXe siècle, chacune caractérisée par une assise géographique, des objectifs scientifiques et un fonctionnement spécifique (tabl. 1). Seul un petit nombre d’entre elles a accordé une place, d’ampleur très variable, à la question de l’ancienneté de l’espèce humaine.
Assise et cadre géographique | Revues consultées | Date création | Nombre de mentions concernant la Préhistoire ou le Quaternaire au niveau régional |
Local | Mémoires de la Société d’émulation de Cambrai | 1804 | 19 (1829-1880) |
Bulletin de la Société académique des antiquaires de Morinie | 1831 | 22 (1931-1914) | |
Bulletin et mémoire de la Société académique de l’arrondissement de Boulogne-sur-Mer | 1864 | 49 (1864-1913) | |
Régional | Bulletin de la Commission historique du Nord | 1839 | 28 (1839-1814) |
Annales de la société géologique du Nord | 1875 | 446 (1875-1914) | |
National | Revue d’Anthropologie | 1872 | 3 (1872-1888) |
L’Anthropologie | 1890 | 6 (1892-1908) | |
Bulletin de la Société d’Anthropologie de Paris | 1859 | 7(1865-1900) | |
Bulletin de la Société préhistorique française | 1904 | 16(1904-1914) | |
Bulletin de la Société géologique de France | 1830 | 8 (1866-1893) | |
Belgique | Bulletin de la société belge de géologie, hydrologie et de paléontologie | 1887 | 3 (1899-1901) |
et de contextes quaternaires dans le Nord et dans le Pas-de-Calais.
Les Annales de la Société géologique du Nord, publiées à partir de 1875, sont une des principales sources de découvertes et d’observations concernant la préhistoire et le Quaternaire régional. Fondée en 1870, la société répondait aux besoins de la région en termes de connaissances en sciences de la Terre, dans le contexte industriel et social de la fin du XIXe siècle14.
La Société Académique de l’Arrondissement de Boulogne-sur-Mer, dont le cadre géographique incluait le Boulonnais mais aussi la vallée de l’Aa, a également joué un rôle particulièrement important dans le développement de la préhistoire régionale, témoignant des premiers échanges concernant la haute antiquité de l’Homme et manifestant de l’intérêt pour les vestiges matériels préhistoriques15.
Processus d’émergence de la Préhistoire
Une naissance tardive
et des observations ponctuelles
Premières observations (1833-1851)
Si quelques découvertes ponctuelles de faune éteinte et d’industries lithiques sont signalées de façon relativement précoce dans la région, elles n’alimentèrent pas immédiatement le débat sur l’ancienneté de l’espèce humaine alors en cours.
La mise au jour de dents fossiles d’éléphantidés, lors des travaux d’extraction de silex dans les alluvions de la vallée de l’Aa, constitue la première mention de faune aujourd’hui considérée comme quaternaire dans la région du Nord16. Ces restes furent mis au jour à plusieurs reprises à des profondeurs importantes dans des contextes de cailloutis17, et “apparaissent y être enfouis depuis les guerres de César et même, selon quelques auteurs, depuis les déluges, soit universels soit partiels18”.
Le ramassage d’industries lithiques, représentées par des haches polies trouvées en contexte dunaire par M. Dutertre-Delporte, un chercheur boulonnais, est également attesté avant 1842, date d’entrée de cette collection au Musée de Boulogne-sur-Mer19, mais leur découverte n’est publiée que postérieurement. Les découvertes faites à Fontaine-au-Pire, près de Cambrai (“plusieurs haches en silex20”), ne donnent pas de précisions sur le contexte de mise au jour de ces pièces.
La première contribution régionale à la classification des dépôts postérieurs au Tertiaire est représentée par les descriptions de la coupe de Sangatte (“drift” de Sangatte) (Pas-de-Calais) (fig. 3.A). Elle est due à Joseph Prestwich, qui explora le littoral du Pas-de-Calais en 1850, à la suite des géologues William Phillips et Adolphe d’Archiac, et constitue une des premières descriptions de séquences stratigraphiques quaternaires de ce secteur21 (fig. 3.B).
Malgré l’attribution de ces vestiges à une période reculée de l’histoire, ces observations étaient encore déconnectées d’une réflexion sur leur dimension chronologique mais elles ont participé néanmoins à l’émergence d’une notion de temps antéhistorique pour l’humanité.
Prise en compte de l’ancienneté de l’espèce humaine
Il faudra attendre le début des années 1860 pour que ces découvertes soient intégrées dans un système interprétatif qui prend en compte la dimension chronologique.
Les évènements de 1858-1859, avec la validation et le retentissement des découvertes de Jacques Boucher de Perthes dans la vallée de la Somme, grâce aux visites des géologues et paléontologues anglais Hugh Falconer, puis Joseph Prestwich et John Evans, suivies par les observations d’Albert Gaudry, peuvent être considérés comme contributeurs majeurs aux réflexions sur l’antiquité géologique de l’Homme et de la discipline préhistorique22.
C’est entre 1862 et 1870 que les idées de Boucher de Perthes se diffusèrent au sein des sociétés savantes locales et suscitèrent un intérêt pour les objets préhistoriques dans la région, en particulier dans le secteur de Boulogne-sur-Mer.
La question de l’ancienneté de l’Homme n’a suscité que peu de débats dans le paysage régional et, malgré les réticences de l’abbé Daniel Haigneré, archéologue et ecclésiastique de Boulogne-sur-Mer23, les déductions de Boucher de Perthes ont été acceptées et intégrées avec enthousiasme24. Toutefois, cette diffusion tardive, qui survient quelques années après la reconnaissance internationale des idées de Boucher-de-Perthes, ne peut qu’être constatée, le seul dépouillement bibliographique ne permettant pas d’expliquer ce décalage.
À la suite des recherches de l’“archéologue d’Abbeville25”, les découvertes se multiplient, en premier lieu dans le secteur de Boulogne-sur-Mer. Boucher de Perthes était en contact avec les érudits de cette ville (notamment avec Marcel Dutertre26) et le système interprétatif introduit par les recherches de la vallée de la Somme devient la référence et le cadre comparatif des découvertes de la région.
Un érudit local à la curiosité éclectique, Nicolas Bouchard-Chantereaux, ramassa en 1863, au pied de falaises du littoral, des silex taillés “analogues à ceux dont il venait d’être si fort question à propos du Diluvium d’Abbeville27”. Bien que peu significatives d’un point de vue scientifique selon nos critères actuels28, ces découvertes eurent des répercussions importantes pour la région, et firent l’objet d’une communication par Armand de Quatrefages à l’Académie des Sciences29 et à la Société d’anthropologie de Paris30.
Dans les contextes de versant, les découvertes de haches en pierre taillés se multiplièrent, et les inventeurs soulignèrent la ressemblance de ces dernières avec “celles dont la découverte due à M. Boucher de Perthes, a eu tant de retentissement31”.
Les coupes quaternaires du littoral continuèrent à attirer l’attention des géologues anglais, parmi lesquels les géologues William Whitaker et William Topley, qui ramassèrent en 1865 des objets en pierre taillés “dont la forme rappelle les haches de Moulin-Quignon” à Sangatte et à Wissant32. Des nouvelles observations de Joseph Prestwich signalèrent également un outil lithique in situ dans la coupe de Sangatte, ainsi que de la faune fossile33 (fig. 3.C).
Cependant, aucun site majeur ne se dégagea et peu de découvertes en stratigraphie furent signalées : Vaudricourt, près de Béthune, fut le principal site étudié, avec la première publication de coupe stratigraphique des alluvions quaternaires locales, associée à des pièces bifaciales (fig. 3.D-E). Il s’agit de silex taillés trouvés dans une sablière, entre 5 et 8 m de profondeur34, et “semblables à ceux de Saint-Acheul, se trouvant dans une couche quaternaire de 80 cm d’épaisseur, composée de silex de la craie brisés ou roulés, enveloppés dans un sable argileux très collant35”. C’est d’ailleurs le seul site régional à avoir été intégré dans les réflexions de Gabriel de Mortillet, et à faire partie de son classement, pour illustrer l’Acheuléen36. Certaines de ces pièces intégreront, à côté de celles de Saint-Acheul, l’exposition universelle de 1867, pour illustrer, au sein de la “Galerie de l’histoire du travail”, les temps préhistoriques et l’âge de la pierre (“la Gaule avant l’emploi des métaux”)37. En 1883, Mortillet mentionne également d’autres découvertes ponctuelles d’outils “chelléens” dans le Pas-de-Calais, en contexte d’alluvions quaternaires, mais Vaudricourt reste le site le plus marquant38.
Deux têtes de réseau ouvert à l’international :
Ernest Hamy et Jules Gosselet
La bibliographie régionale de la seconde moitié du XIXe siècle, dans les domaines de la préhistoire et du Quaternaire, inclut les publications de nombreux auteurs, allant de l’historien local aux universitaires, en passant par des représentants des corps de métier impliqués dans la géologie appliquée (ingénieurs des mines, hydrologues, conducteurs de travaux, etc.). Leur contribution respective, en fonction des types des revues et de leur assise géographique, a fait l’objet d’un décompte de la part de l’une d’entre nous (J.C), afin de rendre compte des auteurs les plus présents dans les différentes catégories de publications (fig. 4).
Les schémas réalisés à partir de ces décomptes font ressortir l’importance de deux personnalités (Ernest Hamy et Jules Gosselet) qui, chacune de leur côté, impulsèrent les recherches sur la préhistoire et le Quaternaire régionaux, des années 1860 au début du siècle suivant.
Tous deux natifs du nord de la France, ils développèrent une carrière universitaire qui leur conféra une stature nationale, tout en poursuivant, à l’échelle régionale, des travaux de terrain sur le Quaternaire et la préhistoire, qui n’étaient pourtant pas leur champ de recherche unique. Leur action locale s’appuyait sur l’association étroite d’une société savante et de ses publications, d’un musée à orientation naturaliste et de collaborateurs ancrés dans le territoire.
Le plus jeune des deux savants, né en 1842 à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), s’appelait Ernest-Théodore Hamy39 (fig. 5.A). Il fut initié à l’archéologie par un de ses professeurs de collège, l’abbé Haigneré. Parti en 1861 suivre des études de médecine à Paris, Hamy rencontra Jean-Martin Charcot et Paul Broca et assista aux séances de la Société d’anthropologie de Paris, fréquenté alors par les anthropologues les plus éminents ainsi que par des préhistoriens comme Gabriel de Mortillet et Louis Lartet. Admis comme membre titulaire de la société en 1867, en même temps que son concitoyen et ami Émile Sauvage, il publia dans son bulletin, entre 1865 et 1908, des articles qui relèvent de plusieurs registres : l’anthropologie physique, la paléoanthropologie, l’ethnographie, l’américanisme, mais aussi la préhistoire régionale.
En effet, parallèlement à sa carrière nationale, qui le mena jusqu’à la chaire d’anthropologie du Muséum national d’histoire naturelle et à la direction du Musée d’Ethnographie du Trocadéro, Hamy conduisit, à partir de 1864, des recherches de terrain dans le Boulonnais, à la suite de son ami le naturaliste Nicolas Bouchard-Chantereaux.
Ce secteur du Pas-de-Calais était favorable en effet à l’éclosion des premières recherches préhistoriques : outre les possibilités culturelles offertes par cette ville40, qui vit aussi se former la vocation de l’égyptologue Auguste Mariette, les prospecteurs trouvaient sur le littoral les opportunités offertes par les plages et par les coupes des falaises. Hamy entra en 1866 à la Société académique de l’arrondissement de Boulogne-sur-Mer, fondée en 1863, entre autres, par l’abbé Haigneré et par Bouchard-Chantereaux. Dès cette date et jusqu’à sa mort en 1908, il devint un des pivots de cette société et publia régulièrement le résultat de ses recherches préhistoriques dans ses bulletins et mémoires, souvent en collaboration avec Émile Sauvage, qui assurait la fonction de conservateur du Musée de Boulogne-sur-Mer, établissement doté de riches collections ethnographiques, archéologiques et paléontologiques.
Les travaux d’Hamy associent un exposé rigoureux des données à des essais de synthèse dans lesquels il prend en compte à la fois l’industrie lithique, la faune et la stratigraphie, mettant à profit ses connaissances et son attirance pour des disciplines aussi variées que l’anthropologie, l’ethnographie, la géologie et la paléontologie.
L’autre protagoniste principal de la recherche régionale durant cette période est Jules Gosselet (fig. 5.B). Celui-ci est né à Cambrai (Nord), dix ans plus tôt qu’Ernest Hamy. Son père, tout comme celui d’Hamy, était pharmacien. Gosselet entreprit des études de géologie à Paris et soutint sa thèse de doctorat sur les terrains primaires de Belgique, de l’Avesnois et du Boulonnais en 1860. Après avoir occupé différents postes d’enseignement en province, Gosselet, contrairement à Hamy, revint en 1864 s’établir dans le Nord, à Lille où il occupa la chaire de géologie de la Faculté des Sciences. Ce fut le début d’une longue carrière universitaire qui le conduisit à occuper une place de premier plan parmi les géologues français. Il entra très tôt à la Société géologique de France dont il fut élu président en 1894 ; il put y fréquenter les géologues les plus renommés de l’époque : Joseph Prestwich, Charles Lyell, Adolphe d’Archiac, ainsi que des paléontologues et préhistoriens comme Albert Gaudry, Édouard et Louis Lartet, Édouard Piette, Geoffroy d’Ault du Mesnil, Édouard Dupont, Gabriel de Mortillet et Marcellin Boule.
Homme de terrain, il multipliait les observations sur les moindres carrières et affleurements de la région, ce qui lui permit de proposer plusieurs descriptions stratigraphiques des dépôts quaternaires. Gosselet ne se contenta pas de diffuser ses résultats dans des publications nationales et dans quelques revues de sociétés savantes, comme le Bulletin de la Société académique de Cambrai, sa ville natale, ou les Mémoires de la Société des sciences de Lille. Il mit en place, de manière encore plus efficace qu’Hamy, un système de promotion de ses recherches qui s’appuyait sur les mêmes piliers : une société savante – la Société géologique du Nord, qu’il fonda en 18708, une publication périodique, les Annales de ladite société et un musée de géologie et de minéralogie, le Musée Gosselet (fig. 5.C-D), qui est à l’origine du Musée d’histoire naturelle de Lille. Une telle organisation, adossée à l’université de Lille, lui permit de fédérer les travaux de chercheurs régionaux variés, dont un certain nombre allaient développer les thématiques de la géologie du Quaternaire et, corrélativement, de la Préhistoire.
Le Quaternaire n’était pas la préoccupation centrale de Gosselet lui-même ; les publications uniquement consacrées à ce sujet sont minoritaires dans sa bibliographie. Son apport à la connaissance du Quaternaire et de la préhistoire tient dans les observations disséminées dans des notes, qu’il multiplia dans les Annales de la Société géologique du Nord41 et dans des “descriptions géologiques” du nord de la France, qu’il publia par canton avant de les rassembler dans une “Esquisse géologique du Nord de la France et des contrées voisines”, dont le 4e fascicule, publié en 1903, fut consacré aux terrains quaternaires.
Si Hamy et Gosselet n’ont jamais collaboré, ils se sont fréquemment côtoyés au sein de diverses assemblées comme la Société géologique de France et la Société géologique du Nord. Le lien entre les deux personnalités est également établi par Émile Sauvage, qui appartenait à la fois à la Société d’anthropologie de Paris, à la Société géologique de France – dont il fut vice-président – et à la Société d’anthropologie de Bruxelles.
Par leur position universitaire comme par leur implication dans des associations nationales de chercheurs, Hamy et Gosselet entretenaient tous deux des relations s’étendant au-delà des frontières nationales.
Par l’entremise de la Société d’anthropologie de Paris, dont Édouard Dupont était membre, et de la Société d’Anthropologie de Bruxelles, dont Hamy était membre correspondant, les échanges avec la Belgique étaient fréquents et orientaient vers la recherche de comparaisons inter-régionales.
De tels rapprochements ont surtout été effectués sur le terrain par les géologues. Grâce aux excursions de la Société géologique du Nord, auxquelles participaient parfois, de manière informelle ou organisée, des chercheurs de la Société géologique de France ou de la Société belge de géologie, les corrélations entre séquences sédimentaires purent être argumentées et facilitèrent l’élaboration de systèmes d’interprétation à valeur régionale et extra-régionale. En septembre 1853, la Société géologique de France, invitée par la Société d’agriculture de Valenciennes, tint dans cette ville une réunion extraordinaire à l’occasion de laquelle elle visita les terrains quaternaires, tertiaires, crétacés, carbonifères et dévoniens des environs. En septembre 1880, les sociétaires se rendirent à Boulogne-sur-Mer : ils purent y étudier, sous la direction d’Émile Sauvage, les coupes du littoral entre Calais et Wissant. De tels échanges s’étendaient aux régions frontalières et donnaient lieu à réciprocité. En septembre 1874, les membres de la Société géologique de France se rendirent à Mons puis à Avesnes, accompagnés de membres de la Société géologique du Nord et de la Société géologique de Belgique. En 1890, la société belge de géologie, de paléontologie et d’hydrologie conduisit une excursion dans la vallée de la Haine en Belgique, au cours de laquelle le belge Émile De Munck et un disciple français de Gosselet, Jules Ladrière, purent confronter leurs observations sur les limons quaternaires de part et d’autre de la frontière. Les échanges se poursuivirent deux ans plus tard à l’occasion d’une excursion organisée par la Société géologique du Nord dans le nord de la France et le sud de la Belgique, sous la direction de Jules Ladrière, à qui revint le rôle d’affiner la stratigraphie des dépôts quaternaires du nord de la France. En août 1895, Gosselet accueillit à Lille une session extraordinaire de la Société belge de géologie, de paléontologie et d’hydrologie au cours de laquelle les excursionnistes visitèrent, entre autres, les carrières d’Arques et la falaise fossile de Sangatte42.
Systèmes de classification
et approches de la préhistoire
Dans ce contexte, l’émergence de la préhistoire peut être retracée au sein de deux grands ensembles géographiques, chacun lié à l’activité de groupes de chercheurs spécifiques, et d’où découlent des approches différentes : d’un côté les observations et les synthèses réalisées sur le littoral et, au sens large, dans la région de Boulogne-sur-Mer, et, de l’autre côté, les découvertes dans les contextes de versants limoneux de l’Artois.
La région de Boulogne-sur-Mer : des coupes quaternaires du littoral
aux occupations en contexte karstique
La première séquence stratigraphique quaternaire décrite, la falaise de Sangatte (Pas-de-Calais), fut présentée en trois unités par Joseph Prestwich (“old beach”, “chalk rubble”, “flint rubble”)43 (fig. 3.B). La réflexion sur la chronologie de la mise en place de celles-ci s’appuyait sur la comparaison avec les séquences anglaises analogues (Brighton et Dover), ayant livré de la faune fossile et dont le dépôt était “probably of the same age44”. L’auteur établit également un rapprochement avec le cailloutis de silex de la vallée de la Somme où les restes de mammifères étaient présents. La question de l’ancienneté de l’Homme n’était pas encore abordée à ce stade, faute de découvertes d’industries lithiques. On a vu qu’il faudra attendre la découverte de Vaudricourt pour disposer d’une première coupe associant les dépôts quaternaires et des industries lithiques préhistoriques.
Hamy fut sans doute le premier à effectuer des travaux de synthèse des découvertes, incluant les observations de Prestwich, les découvertes de silex taillés à Vaudricourt et celles de faune fossile de la vallée de l’Aa45 (tabl. 2).
Stratigraphie de la vallée de la Somme/Bassin de Paris | Stratigraphie du Boulonnais | Industries/faune |
Lœss | Lœss sur le plateau Quaternaire supérieur | Silex taillés (Châtillon, le Mont-de-Couple, le Portel, Alpreck, Ningle, Equihen, la Salle) Âge des “animaux émigrés” |
“Diluvium rouge” | Quaternaire moyen : Sangatte | –Elephas primigenius (Blendecques) |
“Diluvium gris” | Quaternaire inférieur : Sangatte Blendecques, Arques, Hesdin, Vaudricourt, Wissant | Haches “de St-Acheul” (Blendecques, Hesdin, Vaudricourt, Sangatte) Âge des “animaux éteints” |
d’après Hamy & Sauvage 1866 in : Cazin 1866 ; Hamy 1866.
Avec Émile Sauvage, il continua à identifier les points livrant des silex taillés sur les plages du Boulonnais et, pour la première fois, s’intéressa à leur contexte d’origine et à leur position stratigraphique originelle, en proposant un premier classement chronostratigraphique tripartite basé sur les observations de la Somme et du bassin de Paris46.
L’analogie entre le bassin de la Somme et le Pas-de-Calais reposait en particulier sur les similitudes morphologiques entre le système des terrasses de la Somme et les terrasses de la vallée de l’Aa32.
L’étude des occupations dans les contextes karstiques contribue également à alimenter ce cadre de synthèse.
La recherche de sites pluristratifiés incite les chercheurs de la région à rechercher très tôt des occupations humaines en grotte, à l’image des découvertes effectuées dans le Sud-Ouest de la France et en Belgique47. Les seuls contextes karstiques de la région, dans la vallée Heureuse à Rinxent, entre Marquise et Calais, exploités à partir de 1842 par des carrières de marbre, suscitèrent alors l’intérêt des érudits dès les années 186048 (fig. 6). Plusieurs grottes et abri-sous-roche furent explorés par deux érudits locaux (Ernest Lejeune et Gatien Chaplain-Duparc), puis par Hamy, qui en publiera les résultats (Hamy 1897, 1899). Les principales séquences ayant livré des niveaux paléolithiques : l’abri de la Grande Chambre (fig. 6.C), la Grotte de Clèves (fig. 6.A), l’abri Désiré et la grotte de l’abbé Bomy, sont aujourd’hui entièrement détruites par l’exploitation de la carrière ou vidées par les fouilles anciennes (fig. 6.E).
Ces découvertes alimentèrent la réflexion d’Hamy sur la chronostratigraphie régionale : dans la grotte de la Grande Chambre, il distingua un niveau avec bifaces comprenant “les types classiques dits de St-Acheul et du Moustier49”, et que les recherches récentes permettent d’attribuer au Paléolithique moyen à pièces bifaciales50 (fig. 6.D), associé à une faune fossile, comprenant des restes d’Elephas primigenius et de Rhinoceros tichorhinus. Dans la grotte de Clèves, attribuée aujourd’hui au Paléolithique supérieur final51 (fig. 6.B), il affecta la couche D à “l’âge des animaux éteints” et la couche C à “l’âge du renne”. La même attribution à l’âge du renne est donnée aux industries de l’abri Desiré et de la grotte de l’abbé Bomy. Dans ses déterminations, Hamy introduit ainsi un principe de classement des cultures préhistoriques emprunté à Édouard Lartet, basé sur la prédominance de certains grands mammifères, et à celui d’Édouard Dupont qui avait réduit à deux les époques de la pierre taillée52. Hamy signale enfin que les silex associés au renne ont été retrouvés “à la base de ce fin limon qu’on désigne sous le nom de lœss et qui couvre d’une couche continue, rarement épaisse et parfois stratifiée, toute la surface du pays53”, ce qui assure leur corrélation au niveau régional.
Dans sa réflexion de synthèse, Hamy montre une approche des occupations préhistoriques de type anthropologique et palethnographique, dont l’exemple est fourni par son essai de paléogéographie des populations préhistoriques à partir des données de l’époque54 (fig. 7). Hamy distingue les populations préhistoriques en fonction de leur état d’avancement technologique et propose une limite géographique en France pour les populations qui “taillaient la pierre suivant les types de Saint Acheul et d’Abbeville”, et qui se distinguent de populations périphériques, comme celles du site de Mesvin en Belgique. Cette perspective paléogéographique reste la seule tentative dans la région et pour cette période de produire une synthèse des populations et des cultures préhistoriques à une échelle macro-régionale.
Ce modèle interprétatif est assez proche de celui proposé par Dupont dans sa perspective d’“ethnographie ancienne55”, qui voyait la coexistence, pendant les âges du Mammouth et du Renne, de deux populations, l’une habitant les zones de plaine et possédant des industries à pièces bifaciales, l’autre occupant les régions montagneuses et caractérisée par des industries à éclats56.
Étude du Quaternaire et classification des lœss
Naissance des classements lithostratigraphiques
En parallèle avec les observations faites sur le littoral, d’autres chercheurs, sous l’impulsion de Gosselet et de la Société géologique du Nord, précisèrent les caractéristiques des sédiments qu’on avait rassemblé jusqu’à présent sous les noms de “diluvium” et de “lœss”.
Contrairement au diluvium, le lœss fut considéré très tôt comme une formation superficielle recouvrant l’ensemble des terrains antérieurs dans le Nord de la France et en Belgique10, permettant des corrélations sur de longues distances. Jusqu’au milieu du XIXe siècle, le lœss ne livrait pas de restes de faune fossile, ce qui en rendait la datation incertaine10.
Dès 1865, Gosselet s’intéressa au “terrain diluvien”, et identifia, dans les dépôts autour de Cambrai, trois assises57 :
- L’assise inférieure ou Diluvium, formée de dépôts grossiers sur 3-4 m (galets roulés, sables grossiers), en discordance sur les terrains antérieurs, et dont l’origine reste difficile à expliquer pour Gosselet ;
- L’assise moyenne ou “lœss”, représenté par une argile sablonneuse, épaisse de 3 à 10 m, en discordance avec le “diluvium” ;
- La terre végétale (“limon” ou “argile à brique”), d’une épaisseur inférieure à 2 m ;
Dans le Hainaut belge, autour de Mons, deux géologues belges, François Cornet et Alphonse Briart58, identifient à Spiennes trois divisions identiques à celle de Gosselet, distinguant un “dépôt caillouteux”, et séparant l’“ergeron”, qui est un limon jaune calcaire stratifié, équivalent au “lœss”, qu’ils interprètent comme d’origine fluviatile, de la “terre à brique”, sans stratification et non calcaire59. L’origine éolienne, bien que proposée par certains60, était encore loin d’être admise. De même la nature de la distinction entre l’ergeron et la terre à briques fit l’objet de discussions, certains auteurs voyant dans cette dernière un produit de l’altération de l’ergeron.
Ces travaux furent repris et précisés par Jules Ladrière, instituteur et disciple de Gosselet, membre de la Société géologique du Nord, en particulier en ce qui concerne la partie limoneuse sus-jacente aux alluvions grossières. Ladrière réalisa dans un premier temps une description détaillée des unités sédimentaires de la région comprise entre la Sambre et l’Escaut, dans le Cambrésis, à l’occasion du creusement de plusieurs voies ferrées, complétant le classement de Gosselet et de Cornet et Briart61. Ensuite, il élargit son champ d’interprétation à l’ensemble de la région, au Nord de la France, à la vallée de la Somme et au bassin de Paris, montrant l’identité du Quaternaire dans cette zone et notant que “cette disposition des diverses couches quaternaires telle que je viens de la décrire, si elle est un fait général, doit se retrouver également dans les grandes vallées du Nord, c’est ce que j’ai pu constater62” et que “la même disposition se retrouve partout dans le Nord de la France63”. Dans son classement, il reprit la séparation des chercheurs précédents des unités grossières, le “diluvium”, et de deux types de limons : l’“ergeron” et la “terre à briques”, en introduisant une notion cyclique dans sa lecture des enregistrements sédimentaires.
Ladrière établit ainsi un système de classification lithostratigraphique des limons quaternaires auquel il donne une valeur chronologique, représentée par trois assises, composées chacune par un gravier de base, recouvert par des unités sédimentaires limoneuses présentant des caractères pédosédimentaires distincts : des limons jaunes, gris, panachés… (tabl. 3, fig. 8.A-C). Ce système est de nos jours directement interprétable en termes de stratigraphie de lœss weichseliens et saaliens64. La précision des descriptions de Ladrière, qui relèvent d’une approche géomorphologique, fait que certaines de ces observations sont encore exploitables aujourd’hui.
Classement lithostratigraphique | Caractéristiques sédimentaires | Restes fauniques/industries | Localisation des observations archéologiques | |
Assise supérieure | Limon supérieur : terre à briques | – | – | |
Limon sableux supérieur : limon bariolé | – | – | ||
Limon sableux supérieur : ergeron | – | – | ||
Gravier supérieur | Silex taillés du type de Moustier/Elephas | Hargicourt, Saint-Acheul | ||
Assise moyenne | Limon gris cendré | – | – | |
Limon fendillé | – | – | ||
Limon sableux rougeâtre | – | – | ||
Limon sableux : limon à points noirs | – | – | ||
Limon sableux : limon panaché | – | – | ||
Gravier moyen | Elephas/pointes moustiériennes | Lille/Noyon | ||
Assise inférieure | Série supérieure | Presle | – | – |
Tourbe | – | – | ||
Glaise | – | – | ||
Série inférieure | Diluvium de Sangatte | Silex chelléens/Elephas | Sangatte, Wissant | |
Diluvium des plateaux | Elephas, silex chelléens | Arques, Doullens | ||
Diluvium et sable | Elephas/Rhinocéros, silex acheuléens | Abbeville, Saint-Acheul, Montières, Spiennes, Quiévy |
avec l’association des restes fauniques et archéologiques connus à l’époque.
Ce travail sera repris ensuite par Victor Commont, qui réalisa des observations minutieuses des terrains de la vallée de la Somme, établissant des coupes du système de terrasses et montrant que chaque nappe alluviale est constituée par la succession de graviers puis de dépôts fins calcaires65.
Commont établit une stratigraphie détaillée des lœss du dernier glaciaire ou “ergeron”, en reprenant la classification de Ladrière mais en la modifiant : il montra, en particulier, que le limon gris-cendré se trouve à la base du lœss récent, et que le limon fendillé marque la partie supérieure du lœss ancien66.
Les observations de Commont, à la suite de celles de Ladrière, permirent donc de définir les principales caractéristiques du système chronostratigraphique des limons du Pléistocène supérieur et moyen.
Il s’agit de la principale contribution apportée par les chercheurs du Nord et, en particulier, à travers le réseau de la Société géologique du Nord, aux études de la vallée de la Somme, qui, grâce à un système chronostratigraphique à haute résolution, deviendra le principal cadre de référence dans l’établissement de la chronologie des cultures préhistoriques dans le nord de la France67.
La préhistoire au service de la géologie
Les observations sur les dépôts quaternaires et la préhistoire effectuées par les membres de la Société géologique du Nord et publiées dans ses Annales sont nombreuses et couvrent assez uniformément le territoire régional (fig. 9). Elles sont présentes dès la première publication des Annales68. Malgré leur nombre relativement important, les découvertes préhistoriques sont présentées de façon succincte.
Dans cette approche des dépôts quaternaires, la préhistoire est considérée principalement en tant qu’outil de datation, comme support des observations sur la géométrie des couches : “Trouver des silex taillés c’est beaucoup ; mais ce n’est que le côté le moins important de la question scientifique. Le principal est de s’en servir pour fixer l’âge de nos diverses couches quaternaires69”.
L’industrie acheuléenne du site de Quiévy (Nord), trouvé lors de l’exploitation d’une carrière de phosphates, fut la seule qui fit l’objet de plusieurs échanges, en particulier au sujet de sa datation70 (fig. 8.D).
Dans ses synthèses régionales, Ladrière intégra plusieurs découvertes préhistoriques dans son système pédostratigraphique71 : les industries acheuléennes de Quiévy et les restes de faune ancienne fossile, étant associées aux couches de l’assise inférieure et celles d’“époque moustérienne” (Fontaine-au-Pire, Busigny, Nord) à la base de l’assise supérieure72. Ainsi, les restes fossiles et l’industrie lithique permettaient d’affirmer la chronologie du système sédimentaire défini73.
Gosselet réalisa à plusieurs reprises des descriptions des industries lithiques74, mais les données concernant la préhistoire ne sont que brièvement mentionnées dans la synthèse qu’il publia sur les “Terrains quaternaires du Nord de la France”, réalisée à partir de 1880, et dont le chapitre sur l’“âge quaternaire – terrain pléistocène” fut présenté en 190375.
Gosselet conserva les subdivisions du Quaternaire proposées par Ladrière, en y intégrant les connaissances relatives aux découvertes fauniques et archéologiques (tabl. 3). Il proposa également un classement chronoculturel des productions lithiques et des restes humains basé sur les connaissances de l’époque (tabl. 4). Cette synthèse faisait par ailleurs référence aux travaux et à la nomenclature établis en Belgique et dans la vallée de la Somme, mais aucun site de la région n’est intégré dans ce cadre.
“Époques industrielles” | Localisation des observations | Industries/Restes humains |
Magdalénien | Grottes d’Engis et de Goyet | Silex taillés de petite taille, outils en os ; hommes de Engis, Goyet, Furfooz |
Moustiérien | – | Pointes triangulaires retouchées sur une seule face, racloirs et disques ; Homme de Spy (couches C-D) |
Chelléen et Acheuléen | “Saint-Acheul” | Haches taillées sur les deux faces ; |
Mesvinien | Environs de Mons (“cailloux fluviatiles”) | Perfectionnement des grattoirs, apparition des pointes |
Reutélo-Mesvinien | Terrasses inférieures du Hainaut | Moins de percuteurs, plus de racloirs et grattoirs |
Reutélien | Hautes terrasses de l’Artois (Helfaut) ; Monts de Flandres | Percuteurs et racloirs |
Concernant les industries lithiques, Gosselet fusionna le classement des préhistoriens belges, en particulier de Aimé Rutot76 avec celui de Gabriel de Mortillet77, auquel il n’accordait pas de valeur universelle et sur lequel il formula certaines réserves (“la classification de M. de Mortillet (…) ne doit pas être suivie strictement pour tous les diluviums, car on peut rencontrer réunis les deux types de Moustier et de Chelles78”).
Cette référence explicite aux travaux de Mortillet est la seule dans la bibliographie régionale de cette période, néanmoins l’influence de ses idées et de son système de classement est clairement perceptible dans les travaux de Gosselet et d’Hamy.
Remarques conclusives
Au début du XXe siècle, le corpus des données s’enrichit très peu, mais la découverte de nouveaux restes de faune ancienne, dans la vallée de l’Aa en particulier, déplaça l’intérêt vers les travaux en paléontologie79.
Le déclenchement de la Première Guerre mondiale marqua le ralentissement des recherches, suivi par le décès de plusieurs chercheurs, dont Jules Gosselet en 1916, Victor Commont en 1918 et Jules Ladrière, en 1923.
Au vu de cette synthèse, la contribution de la région au développement des systèmes de classification des cultures préhistoriques pourrait sembler particulièrement mince pour la deuxième partie du XIXe siècle. Néanmoins, sur le plan chronostratigraphique, les chercheurs du Nord-Pas-de-Calais ont constitué pendant cette période un cadre qui permet d’exploiter au mieux la haute résolution des enregistrements sédimentaires de plein air de la région, et d’y intégrer des occupations préhistoriques dont la conservation et l’homogénéité chronologique sont souvent exceptionnelles. La meilleure illustration en est fournie par les travaux de Victor Commont dans la vallée de la Somme, fondées sur les conclusions lithostratigraphiques de Jules Ladrière.
Le lien étroit entre préhistoire et géologie du Quaternaire représente, dans cette région, le principal fil conducteur du développement des connaissances pendant la deuxième partie du XIXe siècle : “La géologie a encore rendu d’autres services aux études qui concernent l’antiquité de l’homme, elle les a imprégnées de son esprit de méthode et leur a fourni un personnel parfaitement préparé aux recherches archéologiques78”.
L’évolution historique mise en évidence doit être considérée également au regard des tendances qui structurent la construction de la préhistoire au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle.
Si la question de l’ancienneté de l’Homme a fondé intellectuellement la préhistoire, elle a été abordée selon des approches et des disciplines différentes par les auteurs80. L’approche des géologues, basée sur les observations de terrain, s’est concentrée sur l’étude de la stratigraphie, sur la position des vestiges dans les couches sédimentaires et sur leur chronologie. De l’autre côté, les premiers débats portant sur la nature et l’étude des objets préhistoriques ont permis d’ouvrir la voie aux démarches de la typologie préhistorique81. Dans cette perspective, la construction de la discipline est marquée par le passage d’une préhistoire naturaliste, basée sur les sciences naturelles, qui découle de l’archéo-géologie de Boucher de Perthes, au développement d’une préhistoire historico-culturelle, qui trouve sa principale expression dans le classement typologique de Gabriel de Mortillet, à tendance évolutionniste. Dans cette opposition “les deux débats ne se recoupent pas. Ils ne relèvent pas des mêmes praticiens, n’intéressent pas les mêmes groupes (…). Ce fait suggère que la préhistoire n’a pas véritablement réussi à devenir une ‘archéo-géologie’, ainsi que le souhaitait Boucher de Perthes, et que les deux champs, celui de l’archéologie d’un côté, celui de la géologie de l’autre, y cohabitent plus qu’ils ne s’associent82”.
Dans la région considérée, l’approche naturaliste de la préhistoire semble perdurer dans les dernières décennies du XIXe siècle, par les travaux de la Société géologique du Nord, alors que la préhistoire culturelle est représentée uniquement par l’approche ethnographique des travaux d’Ernest Hamy.
Bibliographie
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- Pontier, G. (1911) : “Découverte d’un squelette de mammouth à Arques par le Dr. Pontier”, L’Anthropologie, 22, 370.
- Prestwich, J. (1851) : “On the drift at Sangatte Cliff, near Calais”, Proceedings of the Geological Society, 7, 274-278.
- Prestwich, J. (1893) : “On the evidence of a submergence of Western Europe, and of the Mediterranean coasts, at the close of the glacial or so-called Post-glacial period, and immediately preceding the Neolithic or Recent period”, Philosophical transactions of the Royal Society, 184, 903-984.
- Quatrefages, A. de (1864) : “Industrie primitive – Silex taillés recueillis sur le bord de la mer par M. Bouchard-Chantereaux”, CR hebdomadaires des séances de l’Académie des Sciences, 6 juin 1864, 1052.
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- Sommé, J. (1977) : Les plaines du Nord de la France et leur bordure : étude géomorphologique, thèse de doctorat d’État, Université de Paris I, 1975 (éd. 1977), Paris, Lille.
- Sommé, J. (1991) : “Le système morphotectonique de boutonnière dans le relief du Nord de la France”, Hommes et Terres du Nord, 2-3, 171-176.
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- Van Den Broeck, E. (1887) : “Note préliminaire sur l’origine probable du limon hesbayen, ou limon non stratifié, homogène”, Bulletin de la Société belge de géologie, de paléontologie et d’hydrologie, 1re série, 1, 151-159.
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Notes
- Schmerling 1833.
- Sommé 1977 ; Deschodt 2019, 2021.
- Deschodt 2021 ; Antoine & Locht 2015 ; Antoine et al. 2021.
- Antoine & Locht 2015.
- Sommé 1977.
- Sommé 1977, 1991.
- Fagnart 1988 ; Vallin & Masson 1989.
- Blieck et al. 2014.
- Dollé 1985.
- Meugy 1852.
- Meilliez & Blieck 2014 ; Blieck et al. 2014.
- Vallin 1987b, 13.
- Vallin 1987a, b ; 1988a, b ; 1989a.
- Vallin 1987a ; Auguste et al. 2014 ; Meilliez & Blieck 2014.
- Vallin 1989a.
- Desmarquoy 1833.
- “à 10 pieds du sol”et recouverts “de quatre pieds de cailloux” (ibid., p. 211).
- Ibid., p. 209.
- Haignéré 1866, 184.
- Le Glay 1852.
- Prestwich 1851.
- Hurel & Coye 2011 ; Antoine et al. 2011.
- “On a prétendu prouver l’ancienneté des dépôts de silex par la profondeur des couches dans lesquelles ils sont enfoncés, dans la vallée de la Somme ; or, des dépôts semblables ont été trouvés à fleur de sol en divers lieux, et notamment dans quelques endroits exploités par M. Hamy lui-même. N’y a-t-il pas là une grave difficulté qu’il faudrait élucider avant de formuler une opinion qui ne peut être qu’une hypothèse dans l’état actuel de la science” (Haignéré 1866).
- “Dès les premiers mots de M. Boucher de Perthes, nous avons jugé qu’il était dans le vrai” (Bouchard-Chantereaux, in : Hamy 1866).
- Hamy 1866, 225.
- Boucher de Perthes 1857, 159.
- Cazin 1866, 167.
- Tuffreau 1971.
- Quatrefages 1864.
- Hamy 1865.
- Bruyelle 1865.
- Hamy 1866, 1899.
- Prestwich 1893.
- Charvet 1866, 215.
- Danglure 1866.
- Mortillet 1867, 1872.
- Mortillet 1867 ; Quiblier 2014.
- Mortillet 1883, 161.
- Vallin 1989b, Demon & Révillion 2018.
- Hilaire 1985.
- Auguste et al. 2014.
- Hankar 1895, 438, 448.
- Prestwich 1851, 275.
- Ibid., 276.
- Hamy 1866, 223.
- Hamy 1866 ; Cazin 1866.
- Dupont 1872.
- Cousin 1865.
- Hamy 1899, 7.
- Vallin & Masson 1989.
- Fagnart 1988.
- “époque du Mammouth” ou “époque des animaux éteints” ; et “époque du Renne” ou “époque des animaux émigrés” (Dupont 1872 ; Mortillet 1872, 433-434 ; Hamy 1897, 1899).
- Hamy 1899, 11.
- Hamy 1872.
- Dupont 1874, 720.
- Dupont 1874 ; Loiseau, 211-212.
- Gosselet 1865.
- Briart et al. 1867.
- Cornet & Briart 1872, 259.
- de Mercey 1879 ; Van den Broeck 1887, 1888.
- Ladrière 1879.
- Ladrière 1879, 31.
- Ladrière 1890, 93.
- Sommé & Tuffreau 2014.
- Commont 1909 ; Antoine et al. 2011.
- Commont 1912 ; Antoine et al. 2011.
- Antoine et al. 2011.
- Ortlieb 1875.
- Gosselet 1891, 1.
- Cayeux 1890 ; Ladrière 1890 ; Gosselet 1891.
- “J’établirai donc les rapports qui existent entre les dépôts quaternaires du plateau de l’Escaut et ceux des contrées voisines, en me basant surtout sur la structure des couches ; l’étude de la faune me viendra aussi en aide et je tiendrai compte des produits de l’industrie humaine” (Ladrière 1890, 93).
- Ladrière 1890.
- “chacune de ces assises appartient à une époque différente. L’assise inférieure est caractérisée par la faune ancienne à Elephas primigenius, Rh. tichorhinus et les silex chelléens : l’assise supérieure est post-moustérienne” (Ladrière 1890, 149).
- Gosselet 1885, 1891.
- Gosselet 1903.
- Rutot 1897.
- Mortillet 1872, 1883.
- Gosselet 1885.
- Pontier 1897, 1908, 1911.
- Coye 2005, 702.
- Richard 2011.
- Ibid., p. 277.