August Strindberg, auteur de grandes pièces, qu’on songe à ses pièces historiques ou à sa colossale trilogie Le Chemin de Damas (Till Damaskus), a en même temps gardé toute sa vie une passion pour le petit : rêvant très tôt d’avoir son « Théâtre Libre en miniature » (« Théâtre Libre i miniatyr 1»), il a fait plusieurs tentatives avant de créer à Stockholm son Intima teater en 1907. Et surtout, il a réfléchi au resserrement du drame dès les années 1870, et vu dans le « petit » un moyen de sauver le théâtre européen de la crise dans laquelle il était plongé. Dans « Om modernt drama och modern teater » (« Sur le drame moderne et le théâtre moderne »), qui paraît dans le journal danois Ny Jord en mars 18892, il désigne Le Quart d’heure comme la formule du drame moderne. Il a en effet eu par la presse des échos des Quarts d’heure de Gustave Guiches et Henri Lavedan, deux toutes petites pièces jouées sur la scène du Théâtre Libre en mars 1888, sur lesquelles les critiques français ne s’accordent pas : sont-ce des bluettes insignifiantes, indignes d’être jouées sur une scène de théâtre, ou des expérimentations révolutionnaires, comme le soutient rétrospectivement Francis Pruner dans Les Luttes d’Antoine :
Guiches et Lavedan élaguaient d’un geste franc tout le remplissage et le bavardage destructeurs de l’effet scénique. La contraction limite de la durée scénique, la condensation extrême de l’action constituaient une réforme technique qui commande, en fait, l’évolution ultérieure du modernisme théâtral3.
Mais il est symptomatique qu’au moment où Strindberg voit dans Les Quarts d’heure le théâtre de l’avenir, Guiches et Lavedan cherchent à tourner la page, craignant de rester assujettis au « petit », désireux tous deux d’être admis dans les grands théâtres avec de « grandes » pièces, quitte à retourner au « remplissage » et au « bavardage » évoqués par Pruner. Ni l’un ni l’autre ne prennent la mesure de l’effet produit par leur théâtre express, à ce point insignifiant pour Lavedan qu’il n’en fait pas état dans ses mémoires, après que ses grandes pièces ont été jouées à la Comédie-Française et qu’il est entré à l’Académie française. La façon dont ont été perçus Les Quarts d’heure, par leurs auteurs, les critiques, et Strindberg, apporte un éclairage singulier sur la place des petites formes dans le théâtre à la fin du XIXe siècle en Europe, mais plus généralement aussi dans l’histoire du théâtre.
Deux « extraits d’esprit rosse »
Quand Guiches et Lavedan proposent Les Quarts d’heure à Antoine, ils jouissent déjà d’une certaine notoriété. Né en 1859, Henri Lavedan a publié des nouvelles dans plusieurs revues, dont certaines rassemblées en volumes en 1886 (Mam’zelle Vertu4) et 1887 (Reine Janvier), et surtout il a commencé au début de l’année 1888, sous le pseudonyme Manchecourt, à publier dans La Vie parisienne des scènes dialoguées, caricaturant les gens de « la haute » avec un ton rosse dans le goût de l’époque. Quant à Gustave Guiches, né en 1860, il s’est fait un nom comme romancier, d’abord avec Céleste Prudhomat, puis avec L’Ennemi, des tableaux de mœurs de province qui ont été bien reçus par la critique. Il a également rêvé de théâtre, mais raconte dans ses mémoires comment sa première pièce a été refusée en 1887 par la Comédie-Française, l’entrée des grands théâtres étant barrée à tout nouveau venu par Sardou, Meilhac et Halévy et Pailleron5.
Tous deux sont vis-à-vis du théâtre dans une position paradoxale. Ils aspirent à être admis au « banquet » des auteurs arrivés, Au banquet de la vie étant significativement le titre d’un des volumes de souvenirs de Guiches6. Mais n’y étant pas encore admis, en 1887, ils participent, aux côtés de Villiers de L’Isle-Adam, à la ferveur générale qui accompagne la création du Théâtre Libre. Guiches, racontant dans ses mémoires la troisième soirée du Théâtre Libre, le 12 octobre 1887, où Antoine a fait jouer Sœur Philomène, adaptée d’un roman des Goncourt par Arthur Byl et Jules Vidal, et L’Évasion, pièce en un acte de Villiers de L’Isle-Adam, se souvient d’avoir été médusé par la « puissance de vie » qui se dégageait sur scène, s’exclamant pour finir : « Un théâtre, qui ne ressemble à aucun, nous est né7 ! ».
Après cette soirée, ils auraient décidé, toujours d’après Guiches, d’écrire quelque chose pour Antoine. Cependant, l’idée des Quarts d’heure ne serait pas venue d’un désir d’innovation, mais de considérations pragmatiques :
– Faisons une pièce pour Antoine !
– Oui, mais quelle pièce ? Trois actes exigeront trois ou quatre mois de travail et,
dans un tel délai, le Théâtre-Libre sera comblé de manuscrits !… […] Il faudrait trouver,
tout de suite, un sujet neuf, saisissant, surtout bref !.… Comme les fables express
de Villiers de L’Isle-Adam. L’idée jaillit. C’est ça ! Du théâtre express ! Un moment
de la vie, une situation empoignante, drame ou comédie qui secoue violemment le spectateur
et que d’après ce document vivant, il dénouera lui-même, comme il voudra. Un acte
tout au plus d’un quart d’heure. Chacun le nôtre et voilà le titre : Les quarts d’heure. Au travail8 !…
Guiches écrit Au mois de mai, et Lavedan Entre frères, qui n’ont aucun lien entre eux, mais qu’ils regroupent sous le titre Les Quarts d’heure. Les pièces en un acte ont déjà fleuri depuis les années 1870, mais cette fois, il s’agit de pièces plus réduites encore, transposant à la scène la « concentration des effets » chère à Poe et à Baudelaire dans le récit bref, sans négliger l’art de la chute. On peut d’ailleurs se demander si Maupassant, dont le succès a fait rêver le jeune nouvelliste qu’était Lavedan, n’a pas inspiré aussi son Quart d’heure.
Antoine accepte Les Quarts d’heure et les intègre à ce qui restera comme « la soirée des cinq », ainsi baptisée car il y a regroupé les pièces de quatre des cinq signataires du célèbre manifeste paru dans Le Figaro du 18 août 1887, Paul Bonnetain, Lucien Descaves, Paul Margueritte et Gustave Guiches9, qui y abjurent un naturalisme dévoyé par Zola, accusé d’être descendu « au fond de l’immondice » avec son dernier roman La Terre. Cette soirée a lieu le 23 mars 1888, Les Quarts d’heure venant à la fin, après La Pelote10 de Bonnetain et Descaves, et Pierrot assassin de sa femme, une pantomime de Paul Margueritte11 accompagnée d’une musique de Paul Vidal.
Pour son Quart d’heure, Guiches s’est inspiré de son deuxième roman, L’Ennemi, l’histoire d’Esther, une jeune femme qui, après la désillusion de son premier amour, accepte un mariage de raison avec un homme immensément riche et très amoureux d’elle. De romantique, Esther devient cynique, troquant son rêve d’amour contre un rêve d’argent, mais se pliant fallacieusement à ses obligations contractuelles, les baisers, la cérémonie, le voyage de noces. Dans Au mois de mai, Guiches a sélectionné une situation, le moment où le mariage est décidé et où le fiancé transi d’amour aborde la question du voyage de noces. Pour en augmenter l’effet, il fait du futur marié richissime, joué par Antoine, un phtisique au dernier degré et accentue la rouerie de la promise qui choisit les destinations de voyage les plus contre-indiquées pour son futur époux, tout en s’assurant de façon faussement ingénue que le contrat de mariage lui est favorable. Voici comment Guiches résume lui-même sa scène dans Le Spectacle :
Dans le coin le plus printanier d’un beau jardin, deux fiancés échangent, avec des
paroles ardentes, leurs projets de bonheur, elle rayonnante de beauté et de joie,
lui délicat et toussotant. Ils parlent de leur voyage de noce. L’instinct de conservation,
l’enthousiasme, lui, pour les pays chauds. Il vante l’Italie, l’Espagne, l’Afrique,
les tièdes et splendides nuits d’Egypte !… Mais elle proteste. Ce soleil ! Cette
chaleur torride est déprimante ! Non ! Non ! Elle raffole des pays du Nord. Elle veut
la Norvège, les fjords, une croisière jusqu’aux banquises et les sports d’hiver !…
Il accepte tout. Il la suit, et leur dialogue nous fait voir cette triomphante jeunesse
allant, courant, entraînant le pauvre amour essoufflé, tandis qu’elle continue son
boréal voyage, sa course vers le but, la vie… qui apparaît sous les traits du beau
cousin, un athlétique jeune homme annonçant que les chevaux sont prêts et attendent
pour la promenade quotidienne, cette promenade dont le fiancé n’est pas12 !…
Quant au Quart d’heure de Lavedan, Entre frères, il est présenté ainsi dans La Revue illustrée : « Entre frères, le quart d’heure que nous publions, est une scène rapide et palpitante qui synthétise, en huit minutes, les situations d’un drame en cinq actes13 ». Entre frères, qui compte deux scènes (pour matérialiser la sortie des médecins) est résumé ainsi par Louis Ganderax dans la Revue des Deux Mondes :
Personnages, une marquise douairière et ses trois fils : le marquis, le comte, le vicomte. […] La marquise est à l’agonie : « Mes enfans (sic), dit-elle entre deux râles, j’ai trompé votre père… Un de vous n’est pas son fils… Et c’est… c’est… » Une syncope… Les fils, croyant que leur mère est morte, récapitulent rapidement toute sa vie : lequel d’entre eux, selon les probabilités, est un intrus ? Le second se dénonce et dit ses raisons. Assentiment de l’aîné, qui reçoit froidement ses adieux, sans que le cadet proteste. Mais, tout à coup, la mère rouvre les yeux et la bouche : « C’est le marquis14 ! »
Même si la critique portant sur « la soirée des cinq » fait souvent état d’une soirée macabre, « croquemoresque15 », Les Quarts d’heure venant après l’histoire de domestiques rapaces spoliant l’héritage d’un brave homme (La Pelote), et la pantomime de Pierrot rejouant en cauchemar l’assassinat de Colombine, les deux Quarts d’heure sont plutôt bien accueillis par le public, Guiches se souvenant dans ses mémoires avoir été soulagé, après avoir craint que le public ne prît ces « deux extraits d’esprit rosse16 » pour une simple farce.
Mais il y a bien une ambiguïté fondamentale dans la réception des Quarts d’heure. Du côté des critiques, on y voit surtout des « fumisteries » qui n’ont pas vraiment leur place au théâtre. Les deux auteurs eux-mêmes, au demeurant, semblent douter de la valeur de ces petites pièces. D’autres, à l’inverse, et Strindberg en particulier, y voient les ingrédients d’une révolution dramatique.
De simples « fumisteries » ?
Dans un temps où la « fumisterie17 » était à la mode, où Lavedan et Guiches se délectaient des soirées passées à écouter les « féroces fantaisies de [Villiers qui] recelaient toujours un fond de farce et de mystification18 », où Lavedan lui-même publiait sous pseudonyme ses saynètes dans La Vie parisienne, qui n’était pourtant, selon ses dires, « pas autre chose qu’un amusant journal à feuilleter au café, chez le coiffeur ou en wagon », on se demanda si ces Quarts d’heure devaient être pris au sérieux.
Sarcey, parmi les premiers, cherche le mot idoine dans sa chronique, hésitant entre fumisteries, bouffonneries lugubres et saynètes :
Au mois de mai et Entre frères sont évidemment de simples fumisteries. J’en rirais peut-être de bon cœur, si on me les jouait dans un atelier19 ; ces bouffonneries lugubres sont à la mode. Mais sur un théâtre ! en exigeant de moi que je les prenne au sérieux, comme la révélation d’un art nouveau ! Ah ! non, jamais, par exemple. De qui se moque-t-on ici ?
Prenons une de ces deux… je ne trouve pas le mot, et il n’y en a pas dans la langue. Mettons : saynètes, bien que ce ne soit pas cela20.
Cette hésitation teintée de réprobation a quelque chose à voir avec le petit format. Celui-ci est traditionnellement associé à des formes comiques, aux saynètes qui désignent étymologiquement des petites comédies bouffonnes, aux sketches, intermèdes comiques, numéros de cabaret et music-hall. Mais le théâtre express de Guiches et Lavedan a ceci de particulier qu’il n’est pas franchement comique, ressortissant à une forme d’humour noir ne permettant pas au spectateur de trancher entre le gai et le triste, le comique et le tragique ; il attente en effet au dogme de l’unité d’impression, laissant au public le soin de décider s’il faut en rire ou en pleurer.
La formule oxymorique de Sarcey (« bouffonneries lugubres ») traduit, autant que la gêne à employer le mot « saynète », la difficulté à faire entrer Les Quarts d’heure dans une catégorie bien identifiée. Ce terme de saynète, repris par Francis Pruner dans Les Luttes d’Antoine, est-il de fait approprié pour désigner de telles scènes dont le but était de créer un « profond et saisissant effet », selon les termes de Guiches ? En les qualifiant, faute de mieux, de « saynètes », Sarcey sous-entend qu’elles sont ratées, ne faisant pas rire comme le feront celles d’un Courteline.
Au terme de saynète, Louis Ganderax préfère celui de « bluette » dans sa chronique de la Revue des deux Mondes21, mais pour considérer de même que de telles pièces n’ont pas droit de cité sur la scène d’un théâtre. Comme lui et Sarcey, une bonne partie des contemporains estiment que ces scènes auraient davantage leur place au cabaret, avec l’idée que pour être tout à fait réussies, il eût fallu y mettre un peu plus de fantaisie. C’est encore l’avis d’une des plumes du Gil Blas (le diable boiteux), vingt ans après :
C’étaient deux brèves scènes effleurant charge, imitées des farces énormes et virulentes par lesquelles Villiers de L’Isle-Adam se délassait d’écrire des chefs d’œuvre. C’était fait avec rien ; on ne parlait presque pas, tout était dans le décor, la mise en scène, la physionomie des acteurs et, enfin, dans quelques phrases à l’emporte-pièce ; le spectateur avait un peu froid dans le dos, – on applaudissait à tout rompre. On abusa depuis de ces charges d’ateliers, mais on négligea presque toujours d’y mettre une petite dose de sel fin22.
Les Quarts d’heure, en raison de leur format, ont été apparentés au « style Vie Parisienne », aux saynètes dialoguées vives, piquantes, frivoles et « boulevardières23 » des Gyp, Toc, Lavedan/Manchecourt, avec cette différence de taille qu’ils n’étaient pas assez gais. Du reste, pourquoi ni l’un ni l’autre ne sont-ils parus dans La Vie parisienne, où Lavedan publie pourtant depuis début 1888 sa série « La Haute » ? Il faut croire qu’ils n’étaient pas tout à fait dans le style. Et si Lavedan publie Entre frères dans La Revue illustrée, nous n’avons pas trouvé trace d’une publication d’Au mois de mai de Guiches. C’est à se demander si Guiches et Lavedan ont véritablement cru que leur théâtre express fût du vrai théâtre.
Petites pièces, petits auteurs ?
Chez Henri Lavedan, ce Quart d’heure apparaît à bien des égards comme une anomalie dans sa carrière, qui a suivi deux chemins. D’un côté il a été le séduisant Manchecourt, auteur prolifique de saynètes dialoguées dans le « style Vie Parisienne », brocardant l’aristocratie, la haute bourgeoisie et autres castes parisiennes. De l’autre, il a été salué comme le « puissant créateur24 » de pièces applaudies à la Comédie-Française et autres grands théâtres parisiens. De fait, quand il s’est agi de théâtre, il semble qu’il n’ait jamais conçu de faire autre chose que des vraies pièces, c’est-à-dire des grandes. Une anecdote25 montre à quel point son Quart d’heure ressemble à un accident de parcours. Lavedan raconte en effet dans ses mémoires comment, en 1888, lors du gala annuel du cirque Molier, un des grands moments du Paris mondain, il se retrouva assis à côté de Jules Claretie, alors administrateur de la Comédie-Française. La scène, telle que rapportée par Lavedan, est éloquente :
Claretie se tournant vers moi, me dit :
– Savez-vous ce que vous devriez faire ? Un petit acte pour le Théâtre Français.
– Moi, monsieur ?
– Oui. Je lis vos dialogues de la Vie parisienne. Vous êtes né pour le théâtre. Alors ?
Et il semblait vraiment attendre mon acceptation dans un transport de joie. Mais –
voyez ma suffisance ! – tandis qu’en effet j’étais ébloui et confus de sa bonté, c’est
tout au plus si, dans je ne sais quel mouvement de mauvais esprit, je ne me rebiffai
pas quand je lui dis, étonné moi-même de mon audace :
– Monsieur, je ne vous remercierai jamais assez. Seulement, puisque vous me voulez
tant de bien, ce n’est pas, si vous le permettez, un acte, et encore moins un petit que je vous ferai pour être digne de votre bienveillance.
– Et quoi donc ?
– Une pièce, monsieur, et en plusieurs actes : deux, trois, quatre, enfin une grande26.
Claretie ayant accepté l’offre du jeune audacieux, celui-ci raconte comment, une fois chez lui, il se retrouva à la fois ivre de bonheur et envahi de terreur à l’idée de ne pas être à la hauteur, ajoutant :
Je songeais que je n’avais encore jamais fait de théâtre, car je n’attachais, pour ma part, aucune espèce d’importance à ces Quarts d’Heure que Gustave Guiches et moi, sans les prendre très au sérieux, nous avions écrits avec astuce autant pour nous amuser que pour « étonner » le monde, et qu’Antoine avait accueillis au Théâtre-Libre par pure gentillesse. Alors, tout d’un coup, maintenant, j’allais m’attaquer à une grande pièce ? Ah, il le fallait ! je l’avais promis. […] Pouvais-je, voyons, après ma fanfaronnade, me présenter à Claretie avec un acte, et même deux ? Une honte ! Et quel aveu d’impuissance27 !
Lavedan fait donc ses « débuts » avec Une Famille, comédie en quatre actes, jouée en mai 1890 à la Comédie-Française. Et il connaît ensuite la carrière d’un grand dramaturge, écrit d’autres comédies et drames en quatre et cinq actes, est reçu à l’Académie française en 1899. Ce n’est pas ici le lieu de s’étendre sur sa carrière et ses succès, sinon pour remarquer qu’il va désormais couler ses grandes pièces dans le moule de ses illustres prédécesseurs, Augier et Sardou, figurer en bonne place dans les répertoires des grands théâtres, et donner raison dans ses mémoires, significativement intitulés Avant l’oubli, à tous ceux qui, comme Sarcey ou Ganderax, voyaient dans Les Quarts d’heure des bouffonneries ratées qui n’avaient rien à faire sur une scène de théâtre.
Quant à Gustave Guiches, s’il rend un hommage appuyé à Antoine dans ses mémoires, sa carrière montre malgré tout qu’il a eu, lui aussi, chevillée au corps la volonté de faire grand, que ce soit dans le roman ou au théâtre. Son orgueil de romancier est assez démontré par le fait qu’il signe en 1887 le célèbre « manifeste des cinq », d’une violence inouïe à l’égard de Zola. Il y avait dans ce réquisitoire, comme Guiches l’explique dans ses mémoires, la volonté de ne pas rester l’éternel disciple, « l’homme qui se fait petit devant cette grandeur28 ». Il s’agissait donc d’abord de se grandir. Et Guiches, non sans ironie, note rétrospectivement que de ce point de vue, ce fut plutôt raté, comme le montre une chanson qu’il cite, où Jules Jouy caricaturait les cinq en moucherons face à Zola l’éléphant29.
Par ailleurs, concernant le théâtre, malgré l’admiration rétrospective qu’il témoigne à Antoine, son objectif était bien d’entrer dans le « Temple ». Dans ses mémoires, il insiste beaucoup sur son statut de provincial ayant une place à conquérir : la Comédie-Française et l’Académie française représentent également pour lui la consécration. Et pour lui aussi, donc, le Quart d’heure n’est qu’une péripétie dans un parcours où il s’agit de suivre le cursus honorum de Lavedan. Il y réussira à moitié, car s’il ne sera jamais académicien, il arrivera cependant à se faire jouer au théâtre de la Renaissance, puis au théâtre Sarah Bernhardt, avant qu’une de ses pièces, Nuage, ne soit acceptée à la Comédie-Française en 1901.
L’un et l’autre semblent ainsi, rétrospectivement, se rallier à l’appréciation d’un Thalasso écrivant, en 1909, que Les Quarts d’heure « venaient accroître la liste des pièces qui n’étaient pas du théâtre30 ». Et pourtant, on peut penser qu’ils contribuent au contraire à un tournant dans l’histoire du théâtre.
Une révolution dramatique ?
André Antoine estime dans ses mémoires que Guiches et Lavedan « apportèrent vraiment quelque chose de neuf », Les Quarts d’heure étant pour lui les « premiers modèles de ces fameuses “tranches de vie” qui devaient devenir l’une des formules du théâtre naturaliste31 ». De fait, dès 1888, plusieurs voix saluent la nouveauté de ces Quarts d’heure ; avant même que Jean Jullien n’impose l’expression « tranche de vie32 », l’avant-propos à Entre frères, dans La Revue illustrée, fait état de tentatives théâtrales « saisissantes » :
[MM. Guiches et Lavedan] ont rêvé de servir tout palpitants, sur la scène, des morceaux de vie humaine, de vie sobrement observée et comme cueillie au passage. Ce n’était pas une mince besogne que d’empoigner du premier coup un public asservi aux vieilles routines de la rampe. […] Il y a là une création, quelque chose de neuf, d’original et de hardi, qui ne peut manquer d’avoir son heure33.
Strindberg, qui fait partie de tous ces dramaturges qui, dès les années 1870, se sont engagés dans l’offensive contre une dramaturgie jugée obsolète, qui crée en 1888 à Copenhague, sur le modèle de celui d’Antoine, son « Théâtre Libre en miniature » le Skandinavisk Försöksteater34, cherche la formule du théâtre moderne et l’identifie dans Les Quarts d’heure.
Le Quart d’heure convient à l’homme moderne
Dans son essai « Sur le drame moderne et le théâtre moderne » de 188935, le Théâtre Libre d’Antoine, sur le plan scénique, et Les Quarts d’heure de Guiches et Lavedan, sur le plan dramaturgique, sont centraux. Strindberg y dépeint d’abord la crise du théâtre en Europe, et y fait le procès du grand, de la démesure à tous les niveaux, fustigeant les théâtres grands comme des cirques, une conception archaïque du théâtre « salle des fêtes » ou « arène », et s’en prenant aux troupes démesurées, qui obligent à créer des rôles inutiles. Il salue ensuite la véritable rupture, à tous points de vue, que représente l’entreprise d’Antoine, dont il est informé par Le Figaro et les articles d’Edvard Brandes dans le journal danois Politiken36. Et s’étendant pour finir sur la question de la dramaturgie, il fait l’éloge du court. À ses yeux, Zola et Becque font figure de transition, quand ils savent faire court : de Becque, il préfère La Navette (1878), en un acte, aux Corbeaux, « quatre pénibles heures ». Il partage l’avis de Louis Desprez sur les longueurs de l’adaptation de Thérèse Raquin37. Et si pour lui la pièce en un acte est proche de la « formule du drame de l’avenir », c’est Le Quart d’heure de Guiches et Lavedan qui symbolise la révolution : « Une scène unique, appelée un quart d’heure, semble vouloir devenir le type de pièce qui convient à l’homme moderne38 ». En 1894, il martèle encore, dans « Qu’est-ce que le moderne ? », un article publié en français dans L’Écho de Paris, qu’à l’époque de la vapeur, de l’électricité et du téléphone, il faut faire court : « Courte et bonne, c’est la devise du moderniste39 ! »
Du drame concentré au drame abrégé
De fait, ces scènes portent à son comble la logique de réduction déjà à l’œuvre chez un certain nombre de dramaturges européens. On l’a dit, les pièces en un acte se développent depuis les années 1870. Les naturalistes comme les symbolistes cherchent à raccourcir les pièces. Strindberg lui-même, dans la préface de Mademoiselle Julie, en 1888, dit avoir non seulement supprimé dans cette pièce la division en actes, mais avoir réfléchi depuis longtemps à la « forme concentrée » (koncentrerade form)40, c’est-à-dire à la suppression de la division en actes, les entractes faisant retomber la tension.
Mais précisément, la véritable innovation de Guiches et Lavedan est qu’ils ne se contentent plus de concentrer, mais qu’ils abrègent. La notion d’intrigue disparaît, ne reste plus qu’une situation poignante. Et c’est précisément là que réside, pour Strindberg, le potentiel révolutionnaire de ces Quarts d’heure, dans cette situation qui secoue violemment, tout de suite. En 1888, après qu’il a écrit Mademoiselle Julie, sa « pièce affligeante » (sorgespel) en un acte, il se convertit, après avoir reçu les nouvelles de Paris, à l’idée que la scène vaut mieux que l’acte, comme il l’écrit à Georg Brandes à qui il adresse sa pièce :
Vous y trouverez [dans Mademoiselle Julie] une tentative de fournir la nouvelle formule adaptée à nos besoins : abréger les souffrances, laisser tout s’épancher d’un seul coup ! Et très curieusement, je me suis trouvé raffermi dans ma foi en ma formule expérimentale après avoir lu vingt-cinq pièces proposées à mon théâtre. Dans chaque drame il y a en effet une scène ! C’est elle que je veux ; qu’ai-je à faire avec tout le reste, et pourquoi déranger six ou huit acteurs pour qu’ils l’apprennent ! En France, je mangeais toujours cinq côtes de mouton, au grand étonnement des autochtones. La côte se composait en effet d’une demi-livre d’os et de deux pouces de gras, que je laissais. À l’intérieur il y avait un morceau du muscle dorsal, la noix ! C’est elle que je mangeais. Donnez-moi la noix ! voudrais-je dire à l’auteur dramatique41 !
Le Quart d’heure, ou la tragédie moderne
Pour Strindberg, à la recherche de la formule d’un nouveau théâtre tragique, c’est précisément cette forme abrégée, puissante, qui peut permettre à la tragédie contemporaine de s’épanouir. En 1887, il a écrit Fadren (Père), une tragédie en trois actes, et publié deux essais importants, « Hjärnornas Kamp » (« Combat des cerveaux ») et « Själamord » (« Meurtre psychique42 »), qui traduisent son intérêt pour la psychologie et les mécanismes inconscients par lesquels une âme prend l’ascendant sur une autre âme, la lutte pouvant conduire à un véritable meurtre. Il se prend à rêver d’une dramaturgie qui permettrait de mettre en valeur ce combat des cerveaux tel qu’il s’exprime déjà dans Père. Supprimer les entractes ne suffit pas pour que la tension ne faiblisse pas. À ses yeux, Les Quarts d’heure apportent la solution. Il n’est pas question pour lui de bluettes ou de saynètes, mais de « tragédies comme on n’en avait jamais vu auparavant43 », Strindberg ayant l’intuition que la « bouffonnerie lugubre », pour reprendre les termes de Sarcey, a quelque chose à voir avec le tragique moderne.
Dès la fin de l’année 1888, au moment de fonder son « théâtre expérimental scandinave » (Skandinavisk Försöksteater), Strindberg se met en quête de pièces courtes. Alors qu’il a écrit à Gustaf af Geijerstam le 15 novembre pour lui demander une « pièce en un acte », il lui réécrit trois jours plus tard : « Si tu veux écrire une scène violente, puissamment vivante, pas une pièce entière, alors fais-le ! […] Deux personnages, pas d’intrigue, mais le combat des cerveaux, la bataille des âmes, poussés au plus vif de la tension44 ».
Et sans attendre de recevoir des pièces, Strindberg se met lui-même à écrire pour son théâtre des Quarts d’heure, où il recherche la situation empoignante, violente, la lutte des cerveaux. Des neuf pièces courtes qu’il écrit entre 1888 et 189245, la première, La plus forte (Den Starkare), est celle qui s’apparente le plus au modèle parisien, et c’est d’ailleurs ainsi que Strindberg la présente dans la presse en janvier 1889 : « La plus forte est ce qu’on appelle un Quart d’heure, parce qu’elle ne dure que quinze minutes46 ». La scène est en effet aussi courte que celles de Guiches et Lavedan. Deux femmes, Madame X et Madame Y, se rencontrent dans un café. La scène consiste en un long soliloque de Madame X, femme comblée, épouse, mère et actrice, qui s’apprête à fêter Noël en famille, face à une Mme Y célibataire, et actrice renvoyée du Grand théâtre, mais dont Mme X se rend compte, en lui parlant, que tout concorde pour la désigner comme l’heureuse maîtresse de son mari. Combat des cerveaux indécis, où Strindberg laisse aux actrices ou aux spectateurs, comme le souhaitait Guiches, le soin de dénouer les choses, la plus forte étant soit celle qui plie mais ne rompt pas (Mme X), soit celle qui garde tout du long un silence méprisant. Pendant l’hiver 1888-1889, Strindberg écrit deux autres pièces courtes, Paria et Simoun, mettant en scène un tel combat des cerveaux, la dernière allant même jusqu’au meurtre psychique, Strindberg réservant à sa femme Siri le rôle de la criminelle, comme il le lui écrit le 27 février 1889 : « Tu seras une jeune fille arabe qui tue psychiquement un officier français (avec des chants entre autres)47 ».
Les Quarts d’heure, même si l’aventure du théâtre expérimental de Strindberg a été très éphémère48, ont donc donné à Strindberg l’occasion de préciser sa conception du drame moderne, qui va avoir une si grande importance dans la rénovation de la dramaturgie en Europe. Si sa dramaturgie a évolué avec le temps, il n’en reste pas moins que ses pièces courtes ont été, au XXe siècle, une source d’inspiration majeure aussi bien au théâtre qu’en musique. De fait, pour ne prendre qu’un seul exemple, son Quart d’heure La plus forte, inspiré dans son format de Guiches et Lavedan, a lui-même inspiré quantité d’artistes49 dont Eugene O’Neill (Before Breakfast), Samuel Beckett (La dernière bande), Schönberg en musique 50, ou encore Bergman au cinéma (Persona).
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Le fait qu’on ait trop souvent assimilé en France ces Quarts d’heure à des saynètes ratées, tel Sarcey se consolant d’avoir soixante ans « si c’est là l’art nouveau qu’on nous prépare », et que leurs auteurs eux-mêmes n’aient pas réitéré l’expérience, renonçant au contraire aux Quarts d’heure pour frayer avec le « vrai » grand théâtre, n’a pas aidé à la valorisation de ces « morceaux de vie humaine ». Ces Quarts d’heure n’en restent pas moins symptomatiques d’un moment de rupture dans le théâtre européen. Ils s’inscrivent dans la réaction observée à la fin du XIXe siècle en Europe, comme le montre John H. Muse dans Microdramas : crucibles for theater and time51, contre une tendance dramaturgique inflationniste sensible dans les mélodrames, les drames historiques, ou les drames inspirés de Wagner. On a vu que Strindberg a été un de ceux qui ont dénoncé cette démesure, parmi tant d’autres, notamment au Théâtre Libre, qui ont choisi les pièces en un acte. Les Quarts d’heure, même si leurs auteurs n’en ont peut-être pas pris la mesure, contribuent à l’émergence de ces formes nouvelles, inspirant d’autres auteurs qui les assument plus radicalement, tel Strindberg qui y voit l’avenir du drame, et susciteront à leur tour de nouvelles recherches. John H. Muse souligne ainsi combien la tradition du microdrame, depuis les futuristes italiens jusqu’à Beckett et Caryl Churchill, est enracinée dans les expérimentations de Guiches, Lavedan et Strindberg. Et si Strindberg a perçu les potentialités tragiques du Quart d’heure, le XXe siècle montrera aussi que Le Quart d’heure, qu’on l’appelle microdrame, dramaticule, ou dramascule (Dramolette chez Thomas Bernhard), peut aussi bien se prêter à la farce qu’à la tragédie, ou associer les deux, comme Guiches et Lavedan l’ont fait dans leurs scènes empreintes d’un humour noir qui a stupéfié les spectateurs.
Notes
- Lettre à Hjalmar Branting, 17 mars 1888, August Strindbergs Brev VII, Februari 1888 – december 1889, Stockholm, Bonniers, 1961, p. 39.
- Il sera ensuite repris dans le journal suédois Morgonbladet, 17, 18 et 20 avril 1889.
- Francis Pruner, Les Luttes d’Antoine. Au Théâtre Libre, t. 1, Paris, Minard, 1964, p. 177.
- Mam’zelle Vertu, Paris, A. Laurent, 1886.
- Gustave Guiches, Le Spectacle, Trois étapes du Théâtre et de la vie parisienne de 1887 à 1914, Paris, Éditions Spes, 1932, p. 21.
- Gustave Guiches, Au Banquet de la vie, Paris, Éditions Spes, 1926.
- Gustave Guiches, Le Spectacle, op. cit., p. 25.
- Ibid., p. 26.
- Le cinquième signataire est J.-H. Rosny.
- Paul Bonnetain et Lucien Descaves, La Pelote, Pièce en trois actes, en prose, Paris, Alphonse Lemerre, 1889.
- Paul Margueritte, Pierrot assassin de sa femme, Pantomime en 1 acte, Musique de Paul Vidal, Paris, Heugel et Cie, 1892 (d’abord publiée en 1882 chez Paul Schmidt, sans la partition).
- Gustave Guiches, Le Spectacle, op. cit., p. 27.
- « Les Quarts d’heure, Entre frères », La Revue illustrée, 56, 1er avril 1888, dans tome cinquième, p. 257-259 (Le Quart d’heure est signé de façon erronée Gustave Guiches et Henri Lavedan). La citation est extraite de la première page du numéro qui n’est pas reproduite dans le volume. [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k200154x/f279.item]
- Louis Ganderax, « Revue dramatique, Au Théâtre-Libre », Revue des Deux Mondes, 1er septembre 1888, t. 89, p. 226.
- « La Vie parisienne, Mœurs élégantes, choses du jour, fantaisies, voyages, théâtres, musique, modes », 31 mars 1888, p. 179, [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1257548r/f186.item.r=Lavedan].
- Gustave Guiches, Le Spectacle, op. cit., p. 27.
- Voir Daniel Grojnowski, Bernard Sarrazin, Fumisteries – Naissance de l’humour moderne (1870 – 1914) – Anthologie, Paris, Omnibus, 2011.
- Henri Lavedan, Avant l’Oubli II, Écrire, Paris, Plon 1934.
- Camille Le Senne reprend l’idée dans Le Théâtre à Paris, 4e série, sept. 87 – oct. 88, Paris, Librairie H. Le Soudier, p. 495 : « Ces fumisteries, supportables entre deux paravents (encore faut-il qu’ils soient japonais), MM. Guiches et Lavedan les ont savamment infiltrées du pessimisme le plus prétentieux ainsi que d’un macabrisme écœurant. »
- Francisque Sarcey, Feuilleton du lundi 26 mars 1888, Le Temps, p. 2. [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k231724r/f2.item.zoom]
- Louis Ganderax, « Revue dramatique, Au Théâtre-Libre », op. cit., p. 226.
- Le Diable boiteux [Ludovic de Vaux], « M. Henri Lavedan », Le Gil Blas, 10 avril 1911, p. 1.
- Voir Clara Sadoun-Édouard, « La Vie parisienne ou la mise en scène de la mondanité », dans Olivier Bara et Marie-Ève Thérenty (dir.), Presse et scène au XIXe siècle, Médias 19. [https://www.medias19.org/publications/presse-et-scene-au-xixe-siecle/la-vie-parisienne-ou-la-mise-en-scene-de-la-mondanite].
- Le diable boiteux, Gil Blas, op. cit.
- Anecdote attestée par Francis de Croisset dans La Vie parisienne au théâtre, Paris, Grasset, 1929, p. 112-115.
- Henri Lavedan, Avant l’oubli II, Écrire, op. cit., p. 242-243.
- Ibid., p. 244.
- Gustave Guiches, Au Banquet de la vie, op. cit., p. 217.
- Ibid., p. 225.
- Adolphe Thalasso, Le Théâtre-Libre, Essai critique, historique et documentaire, Paris, Mercure de France, 1909, p. 140.
- André Antoine, Le Théâtre, Paris, Les Éditions de France, 1932, p. 222-223.
- Jean Jullien, « Essai sur le théâtre vivant », dans Art et Critique, 63, 9 août 1890, p. 14.
- La Revue illustrée, 56, op. cit., p. 257.
- L’aventure de son « Försöksteater » (Théâtre expérimental) à Copenhague a été éphémère.
- Ny Jord, mars 1889, op. cit.
- Il cite pratiquement in extenso l’article très élogieux du Figaro du 12 octobre 1887 où Émile Blavet rend compte de la soirée où sont jouées Sœur Philomèle et L’Évasion.
- Louis Desprez, L’Évolution naturaliste, Paris, Tresse Éditeur, 1884, p. 334.
- « En scène, en quart d’heure tyckes vilja blifva typen för nutidsmenniskors teaterstycke ». Trad. Marguerite Diehl, dans Théâtre cruel et théâtre mystique, Gallimard, Paris, 1964, p. 84.
- August Strindberg, « Qu’est-ce que le moderne ? », L’Écho de Paris, 20 décembre 1894 (trad. Georges Loiseau).
- Au début des années 1870, il avait réécrit une de ses pièces, Den Fredlöse (Le Hors-la-loi), en la ramenant de cinq actes à « un unique grand acte ».
- August Strindberg, Lettre à Georg Brandes (29/11/88), trad. Carl-Gustaf Bjurström, Théâtre complet 2, Paris, L’Arche, p. 569.« Ni finner emellertid ett försök till att ge la nouvelle formule lämpadt efter våra behof : göra pinan kort, låta det rasa ut på en gång ! Och eget är att jag funnit mig stärkt i min tro på min försöksformel efter att ha läst 25 till min teater inlemnade dramer. I hvarje dram fins nemligen une scène ! Det är den jag vill ha; hvad skall jag med det andra rasket att göra, och besvära sex, åtta skådespelare att lära !I Frankrike åt jag alltid 5 fårkotletter, till autoktonernas stora forbauselse. Kotletten bestod nemligen af ett halft skålpund ben, och två tum speck som jag lemnade. Ini satt en kula af ryggmuskeln, la noix! Den åt jag. Gif mig nöten ! vill jag säga åt dramaturgen ! » (August Strindbergs Brev VII, op. cit., p. 183-184).
- « Hjärnornas Kamp » paraît dans la Neue Freie Presse à Vienne en juin 1887, puis dans Ny Jord en mars 1888. « Själamord » paraît dans Politiken en mai 1887. Les deux articles seront ensuite rassemblés, avec d’autres essais, dans Tryckt och Otryckt II et III (1890 et 1891).
- August Strindberg, « Det var tragedier, sådana man icke sett förr » (« Om modernt drama och modern teater », op. cit.).
- August Strindberg, Lettre à Gustaf af Geijerstam (18/11/88), August Strindbergs Brev VII., op. cit., p. 166. « Vill du skrifva en våldsam, lifskraftig scen, icke helstycke, så gör det! (…) Två personer, utan intrig, men skarp spänning i Hjernornas Kamp, själarnes strid ».
- Dans l’ordre : La plus forte (Den Starkare), Paria, Simoun (Samum), Doit et avoir (Debet och kredit), Premier avertissement (Första Varningen), Devant la mort (Inför Döden), Amour Maternel (Moderskärlek), Il ne faut pas jouer avec le feu (Leka med Elden), Le Lien (Bandet). Voir August Strindberg, Samlade Verk 33, Nio Enaktare 1888-1892 (Édition Gunnar Ollén), Stockholm, Almqvist & Wiksell Förlag, 1988.
- Politiken, 24 janvier 1889, cité par Carl-Gustaf Bjurström, Théâtre complet 2, op. cit., p. 570.
- August Strindberg, Lettre à Siri von Essen (27/02/2889), August Strindbergs Brev VII, op. cit., p. 257. « Du blir Arabisk Flicka som själamördar en Fransk officer (med sång bland annat) ».
- Voir Marthe Segrestin, « Le Försöksteater de Strindberg », dans Philippe Baron (dir.), Le Théâtre Libre d’Antoine et les théâtres de recherche à l’étranger, Paris, L’Harmattan, 2007, p. 97-113.
- Voir la préface de Barry Jacobs dans Strindberg’s One Act Plays, New York, Washington Square Press, 1969 ; et Egil Törnqvist, « The Strindbergian One-Act Play », Scandinavian Studies, Summer 1996, Vol. 68, 3, p. 356-369.
- Voir Friedrich Buchmayr : « “Cela pourrait venir de moi” – l’admiration d’Arnold Schoenberg pour August Strindberg », dans Joëlle Caullier (dir.), “C’est ainsi que l’on crée…” À propos de La Main heureuse d’Arnold Schoenberg, Villeneuve-d’Ascq : Presses universitaires du Septentrion, 2003. [http://books.openedition.org/septentrion/69644].
- John H. Muse, Microdramas : Crucibles for Theater and Time, Ann Arbor, University of Michigan Press, 2017, p. 9.