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Richesses archéologiques du Bazadais
(12e partie)

Paru dans : Les Cahiers du Bazadais, n° 15, 1968, 1-7.

Canton de Bazas (suite)

Nous avons présenté, dans le dernier numéro des Cahiers, la fin de l’inventaire archéologique de la commune de Bazas. M. J.P. Mohen ayant bien voulu consacrer une étude aux découvertes faites lors des fouilles des tumulus de Marimbault, nous avons reporté l’inventaire archéologique des communes de Bernos, Cudos, Gajac, Gans, Le Nizan et Lignan aux numéros suivants.

Marimbault

Protohistoire

Tumulus de Pessec et de Darmand (fig. 1)
Fig. 1. Plan de la nécropole de Marimbault.

C’est à la suite d’une visite qu’il y fit, le 26 avril 1867, que Léo Drouyn décrivit pour la première fois une partie de la nécropole protohistorique de Marimbault et lui consacra une rubrique dans ses Notes. Il devait les reprendre quelques années plus tard dans le cadre d’un article intitulé “Les forteresses de terre dans le département de la Gironde” publié en 1874 dans le Bulletin de la Société archéologique de Bordeaux. En voici le paragraphe concernant Marimbault, accompagné du croquis dessiné par Léo Drouyn :

“Tumuli de Mottes à Marimbault : ces tumuli au nombre de quatre sont situés sur le bord d’un petit ruisseau qui se jette dans le Beuve près de la Tuilerie de Mottes : ils sont disposés de cette façon :
Le premier, A le plus rapproché de la route, a 10 m de diamètre et 1,50 m environ de hauteur ; il est éloigné du second, B de 10 m environ. Celui-ci a 30 m de diamètre et 3 m environ de haut. Le troisième, C est éloigné du second de 36 m ; il a 16 m de diamètre et 1,50 m environ de haut.
Le quatrième, D éloigné du troisième de 16 m, a également 16 m de diamètre, mais seulement 1 m de haut. Il est situé à l’est du troisième, tandis que les trois premiers sont placés sur une même ligne orientée nord-sud. Aucun d’eux n’est entouré de fossé et aucune dépression du terrain n’existant dans les environs, on doit supposer que la surface seule de la terre des alentours a servi à former ces quatre buttes qu’il serait certainement intéressant de fouiller”.

Ces notes de Léo Drouyn devaient être reprises par divers auteurs d’inventaires en des termes parfois erronés. C’est ainsi qu’Édouard Féret parle, en 1893 “de tumulus sur divers points de la commune, surtout à la Tuilerie de Mottes” ; E. Piganeau évoque de son côté, en 1897 “quatre tumuli, dont celui des Mothes” ; quant à Dom R. Biron, il ne fait que citer “quatre tumuli”. Visiblement, aucun de ces auteurs n’avait vu ce dont il parlait.

Il fallut finalement attendre presque un siècle avant que les tumulus de Marimbault ne reviennent sur la scène de l’actualité archéologique régionale, grâce à l’initiative de M. L. Cadis. Celui-ci ayant repéré au nord de la commune, aux lieux-dits Pessec et Darmand, un groupe de sept tumulus, y entreprit, en effet, en 1950 et 1959, des fouilles qui s’avérèrent tout à fait fructueuses. La nécropole découverte par M. L. Cadis est située dans un site facilement accessible, au sud de la route départementale N° 9 allant de Bazas à Pompéjac, dans une zone couverte de taillis et surtout d’une forêt de pins. M. L. Cadis l’a présentée, en même temps que le compte rendu de ses premières fouilles, dans un article du Bulletin de la Société Préhistorique française publié en 1951. Les tumulus sont répartis en deux groupes : quatre à Pessec et trois à Darmand.

Les tumulus de Pessec sont assez éloignés les uns des autres. Deux d’entre eux, pratiquement soudés, se trouvent à proximité de la route départementale N° 9, presque face à l’embranchement du chemin vicinal se dirigeant vers le bourg de Lignan. La végétation qui les recouvre actuellement rend difficile une appréciation exacte de leurs dimensions. Le plus proche de la route, situé à moins de 10 m d’elle, a un diamètre approximatif de 10 m et 1,50 m de haut environ. Le second doit mesurer 30 m de diamètre et 3 m de haut1. Ils sont situés sur une propriété appartenant à M. Latapie et M. L. Cadis leur a donné, dans le cadre de la nécropole, les numéros 1 et 2. Le troisième tumulus découvert par M. L. Cadis et qui, nous le verrons, a fait l’objet d’une fouille, est situé à environ 200 m des précédents en direction du nord-est, dans une forêt de pins qui appartenait, en 1950, au docteur Peyri2. Large à la base de 25 m environ et haut de 3 m, il est contigu à la limite de la parcelle soulignée par un fossé et un talus. Il est connu sous le nom de tumulus Peyri ou tumulus N° 3. Quant au quatrième tumulus, le plus petit de ce premier ensemble, il est situé à l’angle d’une prairie qui appartenait, vers 1950, à M. Dunié et distant de 80 m environ du précédent en direction du nord-est3. Il est haut seulement de 0,75 m pour un diamètre de 15 m environ.

M. L. Cadis avait aussi découvert, à 170 m environ du tumulus Peyri, sur le bord du chemin vicinal allant du hameau de Pessec à Marimbault, au lieu-dit Darmand, un second groupe de trois tumulus dans une lande appartenant alors à M. Béguerie. Il leur donna les N° 5, 6 et 7 et Béguerie I, II et III4. Les tumulus N° 5 et N° 6, contigus au chemin, sont seulement distants de 5 m. Le premier est large de 30 m environ à la base et haut de 2,70 m. Le second possède un diamètre d’environ 25 m pour une hauteur de 1 m ; quant au tumulus N° 7, distant d’une vingtaine de mètres des précédents en direction de l’est, il a aussi une trentaine de mètres de diamètre pour une hauteur de 1,50 m environ.

Dans l’article de présentation de la nécropole que fit M. L. Cadis, celui-ci ne procéda à aucun rapprochement particulier entre l’ensemble qu’il venait de découvrir et celui décrit par Léo Drouyn. Or, à la suite d’une nouvelle visite sur le terrain, nous avons été frappé par les différences entre la description de Léo Drouyn et celle de M. L. Cadis. Les seuls points de ressemblance sont, en effet, la situation au sud de la route allant de Bazas à Marimbault et l’existence de quatre tumulus (en excluant ceux de Darmand). Les différences sont, par contre, assez nombreuses. Elles concernent tout d’abord le lieu-dit : les tumulus se trouvent au lieu-dit Pessec, alors que Léo Drouyn les place à la Tuilerie de Mottes. Il n’y a pas, d’autre part, trace, à Pessec, du moindre ruisseau allant se jeter dans le Beuve. Les seuls cours d’eau qui bordent, dans ce secteur, la commune de Marimbault sont le ruisseau du Bois de Bacquey et celui du Basque qui, en confluant, donnent naissance à une des branches du Beuve, mais ils coulent à environ 1 km de la nécropole. Restent enfin les distances séparant les divers tumulus et leurs dimensions. L’ensemble des quatre tumulus décrit par Léo Drouyn est, en effet, compris sur une distance d’environ 60 m, selon un axe nord-sud. Or, la nécropole découverte par M. L. Cadis mesure environ 250 m selon un axe sud-ouest/nord-est. Si les tumulus A et B de Léo Drouyn ressemblent aux tumulus N° 1 et 2 de M. L. Cadis, par contre, il nous est apparu comme impossible de reconnaître le tumulus C de L. Drouyn comme étant le tumulus Peyri.

C’est en fonction de ces données que nous avons essayé, le 30 août dernier, d’élucider le problème posé par ces descriptions divergentes. La végétation luxuriante qui recouvre la zone des tumulus N° 1 et 2 nous avait jusqu’ici retenu dans nos investigations mais, en nous frayant non sans peine un chemin, nous sommes parvenu à découvrir, à une quarantaine de mètres du tumulus N° 2 selon un axe nord-sud, un troisième tumulus haut de 1,50 m, avec un diamètre de 20 m environ et couronné par une touffe de châtaigniers. Poursuivant nos recherches, nous avons ensuite découvert vers l’est, à 15 m du précédent, un quatrième tumulus un peu moins haut, mais aussi large à sa base. Si l’on reprend la description de Léo Drouyn, on constate que le groupe de quatre tumulus qu’il a décrit correspond à l’ensemble constitué par les tumulus N° 1 et 2 et ceux que nous avons découverts. On peut, d’autre part, expliquer assez facilement les autres points de la description de Léo Drouyn qui pourraient paraître litigieux. Si les tumulus A, B, C, D de Léo Drouyn se trouvent, en effet, dans la commune de Marimbault au lieu-dit Pessec, il existe, de l’autre côté de la route départementale N° 9, un lieu-dit La Tuilerie, situé dans la commune de Lignan et qui est, sans aucun doute, la Tuilerie de Mothes dont parle Léo Drouyn. Quant au ruisseau qu’il évoque, ce n’est qu’un profond fossé séparant deux parcelles. Il était sans doute plein d’eau en 1867 et s’écoulait peut-être finalement dans le Beuve. Il existe donc deux tumulus de plus dans la nécropole de Marimbault, les tumulus C et D de Léo Drouyn, auxquels nous avons donné les numéros 8 et 95. Il s’en faut certainement, d’ailleurs, que l’inventaire de ce secteur soit définitif, mais seul un nettoyage systématique des environs pourrait permettre une enquête.

Parmi cet ensemble seuls trois tumulus ont, jusqu’ici, fait l’objet de fouilles et de sondages, dans le cadre de deux campagnes qui se sont déroulées en 1950 et 1959. Au mois de mars 1950, profitant du fait que le tumulus Peyri avait été en partie éventré par des enlèvements de terre, M. L. Cadis ouvrit une tranchée et découvrit une urne funéraire contenant un vase accessoire. Malheureusement, au cours d’une pause, alors que l’urne se trouvait encore in situ et que le fouilleur était absent, un voisin mal intentionné et pensant trouver un trésor dans l’urne, la brisa. M. L. Cadis put cependant récupérer la plus grande partie des tessons du vase principal et de la petite coupe qu’il contenait. On peut encore les voir au Musée de Villandraut. Poursuivant ses recherches, M. L. Cadis découvrit au mois de mai, sous le tumulus Dunié, une urne avec son vase accessoire qu’il put enlever dans de bonnes conditions et reconstituer. Ils figurent tous deux dans une vitrine spécialement aménagée du Musée de Villandraut.

Aux mois de mai et de juillet 1959, grâce à une subvention de la Direction régionale des Antiquités historiques et avec le concours de l’entreprise Farbos de Bazas, une fouille fut enfin entreprise sur le tumulus Béguerie N° 1 par les soins de M. L. Cadis. En creusant une tranchée de 1 m de large environ selon un des diamètres du tumulus, les fouilleurs découvrirent cette fois, outre une urne, trois vases accessoires et une grande épée en fer. La poterie était, au moment de la découverte, en très mauvais état, à cause de l’action des racines des arbres et de l’humidité. Si l’épée a pu être recueillie dans sa presque totalité, par contre, à l’exception de deux vases accessoires et du couvercle de l’urne, le reste du mobilier est réduit à des fragments informes. L’épée est actuellement exposée au Musée de Villandraut.

Des fouilles systématiques de la nécropole seraient évidemment passionnantes, mais compte tenu des résultats déjà obtenus, elles ne sauraient être conduites qu’avec toutes les précautions scientifiques souhaitables.

Archives municipales de Bordeaux, L. Drouyn, “Notes archéologiques”, t. 3, p. 577-578.
L. Drouyn, “Forteresses de terre dans le département de la Gironde”, dans Bulletin de la Société archéologique de Bordeaux, 1874, t. 1, p. 125-126.
E. Féret, Essai sur l’arrondissement de Bazas…, 1893, p. 18.
E. Piganeau, “Essai de répertoire archéologique du département de la Gironde”, dans Bull. de la Société archéologique de Bordeaux, 1897, t. XXII, p. 68.
Dom R. Biron, Guide archéologique…, 1928, p. 107.
L. Cadis, “Les tumulus dans le Bazadais”, dans Bulletin de la Soc. préhist. française, t. XLVIII, N° 3, 4, mars-avril, 1951.
P. Grimal, “Informations archéologiques” dans Gallia, t. IX, 1951, p. 123, Fig. 12 (plan) ; 124 s. Fig. 13-14… (Compte rendu des fouilles de 1950).
L. Cadis, “Le Bazadais préhistorique, celtique, gallo-romain et mérovingien”, dans Bull. de la Soc. préhist. française, t. LI, fasc. N° 9-10, nov. 1954.
L. Cadis, Le Bazadais et le pays de Sauternes, (carte), première et seconde éditions.
J. B. Marquette, “Le peuplement du Bazadais méridional de la Préhistoire à la conquête romaine”, dans Revue historique de Bordeaux, t. IX, avril-sept. 1960, p. 113 (carte) et dans Actes du XIIIe Congrès d’études régionales, p. 23.
J. Coupry, “Informations archéologiques”, dans Gallia, t. XIX, p. 375, Fig. 9 et 10 ; 376 s. (Compte rendu des fouilles de 1959).

Notes

  1. Plan cad. section A N° 279.
  2. Plan cad. section A N° 280.
  3. Plan cad. section A N° 283.
  4. Plan cad. section A N° 277.
  5. Plan cad. section A N° 289.
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Pessac
Chapitre de livre
EAN html : 9782356136572
ISBN html : 978-2-35613-657-2
ISBN pdf : 978-2-35613-658-9
Volume : 4
ISSN : 2827-1912
Posté le 15/11/2025
6 p.
Code CLIL : 3385
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Licence ouverte Etalab

Comment citer

Marquette, Jean Bernard, “Richesses archéologiques du Bazadais (12e partie)”, in : Boutoulle, F., Tanneur, A., Vincent Guionneau, S., coord., Jean Bernard Marquette : historien de la Haute Lande, vol. 2, Pessac, Ausonius éditions, collection B@sic 4, 2025, 1155-1160. [URL] https://una-editions.fr/richesses-archeologiques-du-bazadais-12
Illustration de couverture • D’après Villandraut : ruine de la tour située à l’angle sud-est de l’ancienne collégiale
(dessin, 1re moitié du XIXe siècle. Arch. dép. Gironde 162 T 4).
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