Si, dans les parties précédentes, nous avons étudié les pigments et couleurs utilisés sur les albâtres anglais, leur emploi standardisé, les principes esthétiques régissant leur combinaison ainsi que leur codification d’ordre moral, nous ne nous sommes pas encore interrogés sur les propriétés et les effets visuels produits par les polychromies médiévales. Quels étaient leurs aspects de surface, leurs finitions, l’intensité des couleurs, leurs interactions avec l’albâtre ? Comment ont-elles été créées et appliquées, et quelles étaient les difficultés éventuelles auxquelles les peintres pouvaient être confrontés ? Afin de pouvoir nous faire une idée plus juste et plus précise de ces questions matérielles, un facsimilé en albâtre d’un panneau anglais a été sculpté, puis peint. Bien que sa coloration soit atypique, c’est le panneau de l’Assomption du Musée d’Aquitaine de Bordeaux qui a été retenu.
C’est en effet grâce à une collaboration étroite avec le personnel du musée, notamment avec sa tailleuse de pierre, Amandine Bély, que cette copie a pu être réalisée. Les constats effectués et les résultats obtenus au cours de la création de l’œuvre seront présentés dans l’ordre d’exécution des différentes étapes du travail. Ils ont été traités beaucoup plus amplement dans un autre article, auquel nous renvoyons le lecteur intéressé1. Nous mettrons ici l’accent sur les éléments qui peuvent nous renseigner sur les modalités de fabrication d’un panneau d’albâtre au Moyen Âge.
La taille du panneau
Faute d’avoir pu acquérir de l’albâtre d’origine anglaise – les carrières ne sont aujourd’hui plus exploitées –, la copie a été réalisée en utilisant une variété provenant de la Puebla de Hijar à Teruel en Aragon (fig. 49–50). Les deux variétés sont comparables par la finesse de leur grain, qui permet d’obtenir un poli hautement brillant, et leurs propriétés physiques générales, comme leur faible dureté et, par voie de conséquence, la possibilité de le façonner aisément. Si l’un comme l’autre sont de couleur blanche, il n’est en revanche pas certain que leur translucidité soit la même. À en juger d’après l’apparence de fractures récentes de panneaux médiévaux, le blanc de la pierre venant du Derbyshire paraît plus dense et opaque que celui de l’albâtre espagnol2. Étant donné que cette différence éventuelle de translucidité se révèle surtout lorsque les deux variétés d’albâtre sont rétroéclairées, son impact visuel semble néanmoins relativement limité. Insérés dans des retables ou de petits écrins constitués de caisses en chêne dont les fonds étaient dépourvus d’ajours, les albâtres médiévaux ne pouvaient en effet être éclairés que de manière frontale ou latérale3.
Pour le travail de sculpture, le panneau parallélépipédique brut a d’abord été scié afin de faire coïncider ses dimensions avec celles du panneau original. Lors de l’acquisition du bloc, les surfaces étaient déjà planes et lisses, mais non polies. Une fois les grandes lignes de la composition reproduites sur un film transparent, celles-ci sont répliquées sur la dalle vierge. Elles fixent la position des personnages et leurs attitudes (fig. 51). Le sculpteur commence ensuite à enlever de la matière dans les zones grossièrement délimitées par le dessin préparatoire. Au fur et à mesure du dégagement des contours, les repères graphiques servant de guide au sculpteur, tracés à l’aide d’un crayon ou d’une pointe métallique, sont renouvelés régulièrement. Au fur et à mesure de l’avancement de la sculpture, ces repères peuvent être de plus en plus finement détaillés (fig. 52, 54). Il se peut fort bien que les albâtriers du Moyen Âge aient procédé d’une manière similaire.
La taille de l’albâtre a été réalisée à l’aide de petits ciseaux droits et de gradines (fig. 53). Ils ont été propulsés à l’aide d’un maillet, tantôt en bois, tantôt en métal4. Les plis serrés ainsi que d’autres zones exigus ont été creusés à l’aide de rifloirs (fig. 54). Au Moyen Âge, les sculpteurs ont également pu avoir recours à des trépans – il n’a cependant pas été nécessaire d’en utiliser ici –, afin d’effectuer un travail préparatoire pour certaines entailles profondes.
Une fois l’albâtre dégrossi en taille libre, les phases finales du travail ont été réalisées à l’aide d’un pantographe de sculpteur (fig. 54). Il s’agit d’un instrument composé de tiges métalliques coulissantes qui, fixé sur l’original, permet de déplacer un stylet qui est dirigé vers le point du relief qu’il s’agit de reproduire. En verrouillant la position du stylet, les coordonnées spatiales X, Y et Z sont “enregistrées”. Après avoir transféré le pantographe sur le panneau vierge, la pointe du stylet indique au sculpteur la position précise du point à reproduire.
Après l’achèvement du travail de sculpture proprement dit, le panneau a été poli. Pour des raisons pratiques, le polissage s’est effectué à l’aide d’un papier ponce à grains très fins, et non avec du sable et de la peau de chèvre, des matériaux utilisés par les albâtriers du Moyen Âge d’après Cheetham5.
Faute d’en avoir saisi l’utilité, le traitement habituel du revers des panneaux n’a pas été reproduit. En effet, la partie basse de l’arrière des albâtres médiévaux était presque toujours recreusée (fig. 56). Cet évidement ne servait probablement pas tant à réduire le poids du panneau pour le rendre plus transportable, comme on peut le lire parfois, qu’à en faciliter la manipulation pendant la taille et la mise en peinture6. Durant ces phases de travail, le facsimilé de l’Assomption a souvent été posé à plat, ne serait-ce que pour éviter les coulures de peinture7. Le creux pratiqué dans le revers permet alors de glisser la main sous l’albâtre, de le pivoter et ainsi d’accéder plus facilement à ses différentes parties, tant avec le ciseau qu’avec le pinceau.
Au Moyen Âge, le revers était également percé de deux à quatre trous pratiqués au trépan. Les albâtriers y inséraient des fils de cuivre, scellés avec du plomb liquide, qui servaient à attacher le panneau au fond de l’écrin en bois destiné à les abriter8 (fig. 57). Enfin, le revers révèle assez fréquemment des marques gravées, qui permettaient sans doute le plus souvent d’identifier les panneaux appartenant à un même retable (et de ne pas les mélanger avec d’autres panneaux en cours d’élaboration), afin de pouvoir les assembler correctement lorsqu’ils étaient complètement achevés9.
La copie complète du panneau de l’Assomption a nécessité une soixantaine d’heures de travail. Un sculpteur médiéval aurait toutefois pu réaliser une plaque en beaucoup moins de temps ; selon l’estimation d’Amandine Bély, vingt-cinq à trente heures auraient suffi à un sculpteur expérimenté travaillant en taille libre. La durée nécessaire à la réalisation du facsimilé s’explique par l’utilisation du pantographe et l’objectif de reproduire précisément un modèle médiéval, deux éléments qui ralentissent fortement le travail.
La réalisation de la peinture
Avant la peinture proprement dite, l’albâtrier appliquait sur les fonds dorés du panneau des pastilles, confectionnées à l’aide de poussière d’albâtre et de colle10. Il s’agit d’une opération délicate, dont la principale difficulté était d’assurer aux pastilles une bonne adhérence tout en donnant à leur surface une courbure régulière. Le sculpteur ou le peintre – il s’agit probablement souvent de la même personne11 – pouvait aussi pratiquer des incisions sur ses sculptures. La plupart d’entre elles servaient à déterminer la largeur des lisérés dorés, notamment lorsqu’il s’agissait d’ourlets d’une certaine longueur, comme les bordures d’un manteau ou d’un drap de lit (fig. 58)12. Les iris des yeux semblent, eux aussi, avoir parfois été incisés. Il en va ainsi de la Vierge de la Nativité du retable de Saint-Michel de Bordeaux, ou encore de celle de l’Annonciation de Saint-Nicolas-du-Bosc. Ces incisions permettaient de déterminer au préalable la direction du regard et de s’assurer du parallélisme des iris (fig. 59).
Pour des raisons pratiques, la dorure devait être réalisée avant l’application des peintures (fig. 60). Les zones où la peinture ne serait pas encore complètement sèche attirent en effet la feuille d’or qui y adhère immanquablement. À moins d’attendre pendant une longue période – plusieurs semaines –, il semble préférable d’appliquer la dorure avant la peinture, sans quoi des parcelles d’or risquent de se fixer à des endroits où cela n’était pas prévu13.
La dorure, dans le cas des albâtres, se faisait à la mixtion, c’est-à-dire qu’on faisait adhérer la feuille au support grâce à une colle à base d’huile. Ces mixtions étaient teintées à l’aide de pigments d’ocre jaune ou rouge et de minium. La couleur du pigment teintant la mixtion influe sur la nuance que prend l’or. L’utilisation du minium accélère le séchage de la mixtion et permet ainsi de raccourcir le temps d’attente pour y déposer la feuille d’or ; en outre, le minium permet d’obtenir un fini particulièrement lisse de la feuille d’or (fig. 61). La feuille est appliquée dès lors que la mixtion est presque sèche, après plusieurs heures, entre deux et douze selon les conditions environnementales (hygrométrie, température, ventilation…), mais aussi selon la quantité de plomb (minium) qu’elle contient. Posée sur un coussin à dorer, la feuille d’or est ensuite découpée selon la forme et les dimensions approximatives d’une zone que l’on souhaite couvrir. Grâce à l’électricité statique, la feuille est saisie à l’aide d’une palette à dorer (pinceau plat à poils longs), puis déposée sur la zone recouverte de mixtion. Au contact de celle-ci, l’or adhère à la surface d’une manière irrégulière. Il convient alors de parfaire l’adhérence à l’aide d’un pinceau dit appuyeux et d’en chasser l’air. Contrairement à la dorure à l’assiette, technique à l’eau convenant notamment à un support en bois, il n’est pas nécessaire de polir la dorure à l’aide d’une agate. Le surplus d’or, déposé au-delà des zones couvertes de mixtion, s’enlève facilement à l’aide d’un pinceau.
Observations sur les pigments et les liants
Bien que l’albâtre soit poli, et ne semble donc offrir que peu d’accroche, la peinture peut être appliquée sans sous-couche. Nos propres analyses tout comme celles effectuées par d’autres équipes de recherche confirment que cette pratique était la règle pour les albâtres anglais médiévaux14. Comme cela a été signalé ci-dessus, il existe au moins trois exceptions parmi les albâtres néo-aquitains. Le saint Pierre du panneau de l’Entrée au Paradis conservé à Libourne porte un manteau à la doublure bleue peinte à l’azurite. Cette couche bleue est posée sur une première couche de couleur gris foncé, qui densifie la couleur tout en obscurcissant quelque peu la teinte ; il en va de même du nimbe du Christ de la Résurrection de Saint-Michel, dont l’azurite est pareillement posé sur une sous-couche noirâtre (fig. 62). La peinture verte (résinate de cuivre) des robes des anges de l’Assomption du Musée d’Aquitaine a été posée sur une couche d’ocre jaune ou de blanc de plomb qui aurait jauni. Le résinate étant translucide, la présence de la sous-couche génère une nuance tirant sur le jaune-marron.
Sur les panneaux médiévaux, le liant utilisé était de l’huile ; pour nos essais, nous avons utilisé de l’huile de lin. Étant donné que ces échantillons ont révélé un jaunissement rapide après quelques mois seulement, on peut se demander si les peintres médiévaux n’utilisaient pas d’autres variétés d’huile, ou s’ils ne connaissaient pas des procédures permettant d’éviter ce jaunissement.
Lors de leur application sur l’albâtre, les pigments ne réagissent pas tous de la même manière. D’après les résultats des analyses physico-chimiques, les peintres des panneaux néo-aquitains utilisaient avant tout des pigments minéraux, en l’occurrence du blanc de plomb, des ocres jaunes, du minium (orange), du cinabre (rouge intense), des ocres rouges (de rouge profond à marron), du résinate de cuivre et du vert-de-gris (vert), parfois aussi de l’azurite (bleu). Les colorants ou laques, d’origine organique, apparaissent beaucoup moins souvent15. Parmi eux, l’indigo est le plus fréquemment utilisé ; un jaune organique non identifié, présent sur les trois panneaux de Libourne, n’a pas été détecté ailleurs. D’après nos expérimentations, il est nettement plus difficile d’obtenir des surfaces homogènes et couvrantes en ayant recours à des pigments organiques, tel que le stil de grain ou la bourdaine, qu’en utilisant des colorants minéraux (fig. 63–64).
Comme la polychromie médiévale des albâtres présente justement ce fini, manifestement recherché par les peintres anglais, nous pensons que ces propriétés différentes des pigments minéraux et organiques conditionnaient du moins en partie la prévalence des premiers par rapport aux seconds. Il se peut que la plus grande stabilité des pigments minéraux ainsi que leur intensité parfois plus importante aient également contribué à les faire privilégier.
Même d’un pigment minéral à l’autre, les effets produits peuvent varier notablement. Il en va ainsi de leur pouvoir couvrant. Une ocre rouge, par exemple, forme une couche opaque couvrante dès la première couche, alors que les ocres jaunes en nécessitent souvent une deuxième voire une troisième. En fonction du nombre de couches, l’aspect de surface des peintures peut varier. Une simple couche aboutit souvent à un aspect plutôt mat, que l’application d’une deuxième couche rend plus satiné16 (fig. 65). Compte tenu de l’aspect généralement lisse des couches de peinture médiévale, les peintres ont dû procéder à un broyage fin des grains. Certains pigments, dont l’azurite notamment, ne doivent toutefois pas être broyés trop finement ; sans cela, ils perdent l’éclat et l’intensité de leur couleur.
Au sein des peintures à base de pigments minéraux, le résinate de cuivre est un cas à part. Il ne se présente pas sous la forme de poudre mais d’un liquide visqueux et translucide17. Celui-ci étant susceptible de sécher, il ne se conserve guère longtemps et doit être produit en fonction de cette conservation. Sa teinte peut varier considérablement en fonction de la durée de chauffe à laquelle on soumet le mélange de térébenthine de Venise, d’huile et de vert-de-gris, passant d’une nuance bleuâtre au vert, puis au marron (fig. 66). Quant à son aspect, on remarque qu’en augmentant le nombre des couches appliquées sur l’albâtre, il devient certes plus foncé et dense, mais qu’il garde aussi toujours sa translucidité. Il se distingue, en outre, par son aspect très brillant qui apparaît dès la première couche. Celui-ci peut cependant disparaître assez facilement sous l’effet des frottements. Ainsi, sur les panneaux originaux, l’aspect brillant des surfaces n’a pas été conservé (fig. 40).
Il y a lieu de se demander si la brillance n’était justement pas l’une des qualités activement recherchées par les albâtriers. Le fini brillant – même s’il s’agit de types de brillants différents – caractérise en effet non seulement le résinate de cuivre vert, mais aussi le blanc éclatant de l’albâtre poli, ainsi que la dorure à la feuille, autrement dit les matériaux qui colorent les surfaces les plus importantes des panneaux médiévaux. Comme l’ont relevé d’autres études physico-chimiques, les fonds verts des albâtres anglais étaient souvent recouverts d’un glacis, c’est-à-dire d’une couche d’huile contenant quelques grains de pigments verts18 ; ces glacis conféraient eux aussi aux surfaces un aspect brillant ou satiné. Si les analyses physico-chimiques menées au sein du corpus néo-aquitain n’ont pas pu détecter de glacis (qu’ils soient posés sur du vert ou d’autres couleurs), on ne peut exclure qu’ils aient disparu au cours du temps ; des recherches complémentaires seraient à mener à ce sujet. Même au cas où de tels glacis n’auraient effectivement pas été utilisés pour d’autres couleurs que le vert, les panneaux médiévaux montraient sans doute un fini au moins satiné (et non mat), comme peut l’illustrer la copie peinte de l’Assomption du Musée d’Aquitaine (fig. 67).
Notes •••
- Mulliez et al. 2022.
- Le Trône de Grâce de Castelnau-de-Médoc a malheureusement été vandalisé à deux reprises en 2018 et 2019, de sorte que l’intérieur de la pierre a été mis à nu à plusieurs endroits. La cassure d’un panneau représentant le Trône de Grâce, conservé au musée Vivenel de Compiègne, montre, elle aussi, un blanc très dense et vif.
- Les écrins en bois originels des retables et des panneaux isolés ne sont que rarement conservés. Ceux abritant des panneaux isolés se rencontrent encore à la Burrell Collection de Glasgow (3 exemplaires), au V&A Museum de Londres, à l’Ashmolean Museum d’Oxford, à la cathédrale de Worcester et au musée national de Reykjavik (provenant de l’église de Selardalur). Voir à ce propos aussi Nelson 1920, 57. Pour les cadres en bois des retables, trop nombreux pour être tous énumérés ici, voir par exemple ceux de Saint-Michel de Bordeaux en Nouvelle-Aquitaine, ou ailleurs sur le territoire français à Saint-Nicolas-du-Bosc et à Évreux (provenant de La Selle). Philip Nelson a rédigé une étude spécifiquement dédiée aux hucheries des albâtres ; voir idem 1920.
- En se fondant sur les pratiques des sculpteurs du XXe siècle, Cheetham 2005, 24 supposait que la sculpture d’albâtre s’était fait sans propulseur, principalement afin de limiter le risque de cassures.
- Voir Cheetham 2005, 24, note 144.
- Voir plus en détail Mulliez et al. 2022. Comme l’a déjà fait Cheetham 1984, 25, il convient sans doute de distinguer les statues d’applique de grandes dimensions des panneaux historiés. Les statues peuvent effectivement atteindre un poids bien moindre lorsqu’elles sont complètement évidées, comme c’est le cas du saint Martial de la cathédrale de Bordeaux ou de la Pietà de Burghley House, Lincolnshire (inv. EWA08599). Les panneaux, en revanche, ne sont creusés que dans leur partie inférieure, et l’allègement qui en résulte est beaucoup moins significatif.
- Lors de nos expérimentations, par exemple, le résinate de cuivre, qui reste visqueux pendant plusieurs jours, avait tendance à couler lentement vers le bas, une fois que le panneau avait été redressé.
- Ces fils de cuivre formant des boucles furent passés dans des trous pratiqués dans le fond des hucheries ; des chevilles en bois, passées à travers les boucles à l’arrière de ces cadres en bois, permettaient de maintenir les panneaux en place.
- Voir Cheetham 1984, 25. Voir aussi Nelson 1920, 60.
- Nous avons choisi de la colle organique, en l’occurrence de la colle de peau de lapin. Pour plus de détails, voir Mulliez et al. 2022.
- Voir les quelques remarques à ce sujet dans Schlicht 2019, 190-191. Dans le cas d’œuvres prestigieuses, le commanditaire faisait parfois appel à un artiste-peintre spécialisé, comme cela fut le cas pour le retable de la chapelle Saint-Georges de Windsor : William Burdon reçut en 1367/1368 40 livres pour peindre un panneau pour la grande chapelle des chanoines ainsi qu’un retable dans la chapelle supérieure (Cheetham 1984, 27).
- Il semble en effet peu probable que les incisions résultent d’un découpage de la feuille d’or après sa pose, car celle-ci est si ténue que le risque de la déchirer aurait été très élevé.
- Voir plus en détail Mulliez et al. 2022.
- Voir par exemple Colinart & Klein 1997, 99. Voir aussi Pereira-Pardo et al. 2018, 5. Tout en confirmant l’absence de sous-couches dans la plupart des cas, Cheetham 2005, 26 précise toutefois : “grounds […] were used […] sometimes to add depth and hue to the surface coat of a thinner colour such as vermilion glazes, blue smalt or azurite”. Selon Land 2011, 65-66, l’utilisation d’azurite nécessite une sous-couche (blanc de plomb et/ ou noir de carbone).
- L’étude menée par Pereira-Pardo et al., 2018 sur les albâtres de Kettlebaston et la Vierge à l’Enfant du British Museum, conclut à la présence d’un seul pigment organique, en l’occurrence le kermès (rose), les autres étant tous de nature minérale : cinabre, ocre rouge, minium, vert-de-gris, résinate de cuivre, azurite, blanc de plomb et noir de carbone. De manière analogue, les couleurs du retable de Rouvray sont composées de pigments minéraux, à la seule exception du bleu organique (probablement de l’indigo ; voir Colinart & Klein 1997, 99). Les albâtres anglais du pays basque, notamment le retable de la Passion de Plentzia, ne font appel qu’à des pigments minéraux (Castro et al. 2008, 763).
- Parfois, le même pigment appliqué sur un même panneau peut générer des effets de surface différents. Ainsi, la première couche de cinabre utilisé pour le facsimilé de l’Assomption prenait un aspect mat à certains endroits, tandis que d’autres apparaissaient satinés. Les raisons à l’origine de ce phénomène n’ont pas pu être élucidées : les zones respectives présentent-elles une porosité différente ?
- Le résinate de cuivre vert a été confectionné selon les instructions données par Mayerne 1620, fol. 31 : “Pour faire le vert transparent qui s’applique sur un fonds d’or ou d’argent. Prenés un petit pot. Thérébentine de Venise 2 onces, huile de thérébenthine 1 once et demie. Vert de gris broyé grossièrement sur le marbre 2 onces. Mettés-le parmy la thérébenthine et huyle sur les cendres chaudes. Prenés une pièce de verre, et en mettés une goutte dessu advisant si la couleur vous plaist. Après mettés y la grosseur d’une noix de terra merita (curcuma). Laissés bouillir doulcement, jusques à tant que vous voyés que vostre vert soit fort beau. Passés tout doucement à travers un linge.”
- Cheetham 1984, 56-57 ; Colinart & Klein 1997, 99, à propos du retable de Rouvray ; Land 2011, 72.