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L’utilisation du bois dans les mines médiévales et modernes du Lyonnais et du Beaujolais
L’exemple de la mine de Cella à Joux (69)

par

avec la collaboration de Romain Bonnamour

Introduction

Situés en bordure orientale du Massif central, où le bois est un matériau déjà utilisé dans les mines gauloises1, les monts du Lyonnais et du Beaujolais intègrent des gisements métallifères exploités entre le Moyen Âge et l’Époque moderne. Les récentes recherches archéologiques sur les mines de ce secteur abordent l’utilisation du bois autant à partir des sources écrites que des découvertes sur le terrain. 

Des sources écrites de la fin du Moyen Âge permettent de mieux percevoir les métiers du bois dans les mines du Lyonnais et du Beaujolais tandis que les archives du XVIIIsiècle apportent de nombreuses informations sur son utilisation pour l’exploitation du cuivre. À l’occasion de fouilles réalisées dans le cadre de l’archéologie programmée, une voie de roulage en bois a été découverte dans un réseau souterrain de la mine de plomb argentifère de Cella à Joux (69)2. Du choix des essences jusqu’à la mise en place dans la mine, différents aspects, parmi lesquels les techniques de conception et l’outillage mis en œuvre, ont été abordés par l’étude des éléments constituant la voie et des déchets de taille. 

Métier et utilisation du bois dans les mines du Lyonnais et du Beaujolais

Les métiers du bois dans les mines à la fin du Moyen Âge

Entre 1454 et 1455, Jehan Dauvet, procureur du roi, inspecte les mines de plomb, d’argent et de cuivre du Lyonnais et du Beaujolais dans lesquels Jacques Cœur avait des intérêts3. Lors de ses inspections, il décrit les travaux miniers et inventorie les biens immobiliers, les outils et les matériaux.

Le bois sert à étayer les ouvrages souterrains, chantiers, puits et galeries, mais également à maintenir accessibles les porches des galeries4. Ainsi, à Chessy (69), Dauvet constate que les ouvrages sont en mauvais état et que la mine est “mal appuyée de bois”5. Pour qualifier les éléments utiles à l’étayage, le procureur parle de “cintres”. Une grande quantité de pièces en chêne est stockée sur la montagne de Pampailly, à Brussieu (69), à proximité du puits principal de la mine6. Stockées là depuis deux ans au moment de la visite de Dauvet, elles étaient destinées à la construction d’une grande roue permettant d’extraire les matériaux de la mine.

Le bois sert aussi à la construction des installations de traitement, comme les roues permettant d’actionner les meules à minerais ou les soufflets. Transformé en charbons, il est également utilisé en métallurgie, pour la forge comme pour la transformation du minerai. Du bois et du charbon sont ainsi stockés dans les martinets, ateliers qui réunissent toutes les installations permettant de transformer les minerais extraits en métal7.

En ce qui concerne le personnel, les charpentiers de mine sont une catégorie sociale bien individualisée dans la hiérarchie des mineurs. Ils réalisent un travail spécifiquement adapté aux contextes miniers8. Ainsi, en 1455, il y a quatre charpentiers pour une centaine de personnes travaillant dans la mine de Pampailly. Par ailleurs, le charpentier de mine se distingue de l’“apoieur” ou “appoyeur”9. Le premier construit et entretient les installations d’extraction et de traitement. Le second, équivalent du boiseur, assure certainement la pérennité des ouvrages souterrains et leurs accès grâce au boisage. Les charpentiers semblent profiter des mêmes avantages que les maîtres-mineurs, ceux qui dirigent les travaux, et les ouvriers de martels, ceux qui abattent la roche. Ils se distinguent ainsi des manœuvres. Du matériel spécifique est utilisé pour le travail du bois. Par exemple, ce sont notamment six haches de charpentiers, sept petites haches ainsi que quatre tarières qui sont inventoriées à Pampailly parmi d’autres outils10.

Le XVIIIe siècle : du bois pour l’extraction du cuivre

Dans les inventaires du XVIIIe siècle, le bois destiné à l’extraction se distingue de celui mis en œuvre dans les installations de surface11. De nombreuses machines, comme des baritels (fig. 1), nécessitent l’utilisation de bois pour leur fabrication puis leur entretien. Des voies de roulage en bois sont également utilisées dans la région à cette époque12.

Schéma représentant un baritel installé sur un puits de la mine de cuivre 
de Chessy (69) et d’un seau (1801-1802) (Archives Nationales, F/14/8114).
Fig. 1. Schéma représentant un baritel installé sur un puits de la mine de cuivre de Chessy (69) et d’un seau (1801-1802) (Archives Nationales, F/14/8114).

Pour les ouvrages souterrains, il y a le bois spécifiquement dédié à l’étampage, celui servant à la conception des “piles” (étais) dans les galeries, et le bois réservé aux “cadres de puits”. Deux essences semblent principalement mises en œuvre : le pin et le chêne. Des planches de châtaignier et de peuplier sont aussi stockées à proximité des sites d’extraction.

Des pièces de bois en chêne servent à l’entretien des rouages des machines, notamment celles liées au traitement minéralurgique, par exemple les bocards. Du bois est stocké sous forme de “planches et de plateaux” de chêne, de tilleul, de sapin et de peuplier sur les sites de fonderie. Le bois blanc est mis en œuvre brut ou transformé en charbons pour le grillage et la transformation métallurgique du minerai. Des fagots servent également pour le grillage du minerai.

Des douelles et courbes de chêne ainsi que du bois de charronnage sont aussi inventoriés. Les premières pouvaient être utilisées pour la fabrication des seaux servant aux transferts des matériaux dans les puits (fig. 1). Le second servait peut-être à la conception et à l’entretien des brouettes utilisées dans la mine13.

Un exemple archéologique de mise en œuvre du bois dans les mines du Lyonnais et du Beaujolais : la voie de roulage de la mine de Cella

Une voie de roulage dans une mine de la fin du Moyen Âge

La voie de roulage en bois découverte à Joux intègre les caractéristiques fonctionnelles d’autres exemples connus en France, principalement dans le massif vosgien, mais aussi en Lyonnais. Celle de Joux est ainsi constituée de limandes en bois, servant de rails, disposées parallèlement à quelques centimètres de distance. Ces limandes sont fixées à l’aide de chevilles en bois sur des pièces de jonction, mais aussi des traverses. Une volée est constituée par deux limandes parallèles. 

Trois volées successives ont pu être étudiées à Joux. Les deux premières sont complètes tandis que seule une des limandes est conservée pour la troisième volée, située au niveau d’un virage à angle droit (fig. 2 et 3). D’autres pièces de jonction et traverses, dépourvues de limandes, étaient cependant conservées en place sur une portion plus importante de la galerie fouillée. Les pièces de jonction permettent de réunir les volées de rails entre elles et disposent donc d’au moins quatre trous permettant de recevoir les chevilles. Les traverses, qui ne servent pas à solidariser les volées entre elles, supportent l’extrémité des rails et intègrent donc deux trous recevant des chevilles. Des résidus d’extraction compactés constituent un ballast mis en place entre les traverses et pièces de jonction pour stabiliser la voie.

Réseau ancien de la mine de Cella à Joux (69) et voie de roulage découverte dans la galerie d’accès (G. Bonnamour).
Fig. 2. Réseau ancien de la mine de Cella à Joux (69) et voie de roulage découverte dans la galerie d’accès (G. Bonnamour).
Relevé en plan et en coupe de la voie de roulage découverte 
dans le réseau anciende la mine de Cella à Joux (69) (G. Bonnamour).
Fig. 3. Relevé en plan et en coupe de la voie de roulage découverte dans le réseau anciende la mine de Cella à Joux (69) (G. Bonnamour).

Cette voie a été mise en place dans un second temps le long d’une galerie sinueuse percée depuis la surface14. Cette dernière donne accès vers le nord, à environ 80 m depuis le porche, à une zone de chantier qui a permis d’exploiter un filon de galène. Depuis son entrée, la galerie a d’abord été percée grâce à des abattages par le feu, probablement durant la première moitié du XVe siècle d’après des datations radiocarbone effectuées. Ensuite, dans l’ensemble du réseau encore accessible, seule la pointerolle a été utilisée pour abattre la roche. Certains secteurs de la galerie d’accès semblent avoir été recalibrés dans un second temps, en hauteur et en largeur, afin d’y installer la voie de roulage. Cette dernière a probablement été mise en place au moment où l’exploitation s’enfonce sous terre, au-delà de la première zone de chantier accessible. L’évacuation des matériaux à l’aide de chariots se faisait donc par la galerie d’accès, le transfert étant facilité par le pendage négatif de la galerie en direction de la surface.

Permettant de faire circuler de petits chariots en bois, les voies de roulage de ce type sont utilisées au XVe siècle dans la région lyonnaise. En effet, dès 1454, une telle installation est inventoriée dans des archives associées à la mine de Pampailly15. Découverts au niveau du porche d’accès d’une galerie de cette dernière, des éléments en bois provenant d’une voie de roulage ont été abattus entre 1460 et 147016. Dans la galerie, seule subsiste une seconde voie utilisée lors d’une reprise de la mine datant du XVIIIe siècle. Quant à la voie découverte à Joux, elle est constituée d’éléments provenant d’arbres ou de branches abattus durant l’hiver 1473-1474 (fig. 4). 

ÉchantillonTypeEssenceDate abattage
1TraverseChêneautomne/hiver 1473/1474
2TraverseChêneautomne/hiver 1473/1474
3TraverseChêne1474
4JonctionChêne1474
5LimandeChêneautomne/hiver 1473/1474
6LimandeChêneautomne/hiver 1473/1474
7LimandeChêneautomne/hiver 1473/1474
En haut, datation dendrochronologique (C. Dormoy, Archéolabs) d’éléments 
provenant de la voie de roulage découverte dans le réseau ancien de la mine de Cella à Joux (69). 
En bas, une traverse et une pièce de jonction dans le détail (G. Bonnamour).
Fig. 4. En haut, datation dendrochronologique (C. Dormoy, Archéolabs) d’éléments provenant de la voie de roulage découverte dans le réseau ancien de la mine de Cella à Joux (69). En bas, une traverse et une pièce de jonction dans le détail (G. Bonnamour).

Le maintien de la voie : les pièces de jonction et les traverses

Dans la partie de galerie fouillée à Joux, cinq traverses et quatre pièces de jonction restées à leurs emplacements se répartissent sur la douzaine de mètres de sol de galerie fouillée. Elles sont installées entre les parois et sur le sol rocheux de la galerie. Une dernière traverse a été retrouvée dans le ballast. Les trous recevant les chevilles sont cylindriques avec un diamètre de 2 à 2,5 cm. 

De section rectangulaire, les traverses mesurent de 10 à 20 cm de largeur et ont une hauteur variant entre 5 et 7,5 cm. À une seule exception, elles présentent des angles plus ou moins biseautés à leurs extrémités. Ceci facilite leur introduction en force entre les parois de la galerie qui peuvent être surcreusées. Parfois, des coins, petites pièces de bois pouvant être taillées en biseau, sont enfoncés entre la paroi et un côté de la traverse afin de figer cette dernière. À proximité de la zone de chantier, les traverses sont espacées de 5 à 10 cm. La face supérieure de la seconde est plus haute de quelques centimètres vis-à-vis de la première. Ce dispositif, situé au niveau d’un ressaut du sol rocheux de la galerie, qui suit un pendage positif depuis la surface, permet peut-être de rehausser progressivement la voie en évitant une pente trop forte. 

Les pièces de jonction présentent toutes des angles biseautés à leurs extrémités. Deux d’entre elles ont les mêmes proportions que les traverses précédemment décrites. Un à deux coins en bois mis en place entre un côté et la paroi contribuent à mieux les stabiliser. Pour chacune de ces pièces, quatre trous de chevilles permettent d’assembler les limandes et les volées entre elles. Une autre pièce de jonction, qui intègre beaucoup plus de trous que nécessaire, n’a pas les mêmes proportions et son épaisseur est moins importante que les précédentes (fig. 4). Une saignée au milieu de la face supérieure est certainement liée à l’usure engendrée par un guide qui s’encastre entre les limandes et qui était fixé sous le chariot afin de le maintenir sur les rails.

Au niveau du virage à angle droit vers l’ouest, l’installation est plus complexe. Une pièce de jonction est bloquée contre la paroi ouest à l’aide de cales, tandis que du côté opposé, elle est fixée grâce à une cheville sur une pièce de bois perpendiculaire. Cette dernière est calée, à l’aide de deux coins à chacune des extrémités, entre les parois d’une galerie plus ancienne qui s’oriente vers le sud-est. 

Des limandes en bois : les rails de la voie

Trois volées de rails successives ont pu être étudiées (fig. 3). Sur la face supérieure, les limandes présentent toutes des traces d’usure liées aux passages répétés d’un chariot. Les arêtes et les bords situés entre les limandes sont également usés, ce qui est probablement lié au frottement du guide placé sous le chariot.

La première volée, la plus au sud, est composée de deux limandes fixées sur une traverse vers le sud et sur une pièce de jonction à l’opposée. Un clou renforce un des assemblages chevillés sur la traverse, ce qui est peut-être lié à une consolidation de l’installation lors d’une phase d’entretien. Avec une longueur de 3,10 et 3,20 m, les limandes atteignent une hauteur d’une dizaine de centimètres et une largeur de 10 à 20 cm. Les deux limandes de cette première volée suivent une légère courbure vers l’ouest.

Au nord de la précédente, la seconde volée est assemblée à la précédente puis à la suivante par l’intermédiaire de pièces de jonction. Les limandes mesurent environ 2,30 m de longueur et ont une section rectangulaire de 10 cm de largeur et de 5 à 7 cm de hauteur. Comme celles de la paire précédente, les limandes qui composent la seconde volée suivent une légère courbure vers l’est. À l’amorce du virage à angle droit vers l’ouest, une pièce complémentaire renforce l’assemblage de la limande occidentale. Cette pièce épouse aussi vers le nord la forme de la limande courbe de la volée suivante. 

La limande occidentale de la troisième volée, installée à l’intérieur du virage à angle droit vers l’ouest, mesure environ 1,30 m. Épousant la forme du virage, elle est plus massive que celles précédemment décrites. Sa section rectangulaire mesure de 6 à 8 cm de largeur et de 6 à 7 cm de hauteur. L’éclatement du bois, au niveau des chevilles qui fixent la limande sur les pièces de jonctions, démontre l’impact probable du passage du chariot chargé. En effet, ce dernier, qui circule vers le sud en direction de la sortie, est soumis à la force centrifuge vers l’est et le guide s’appuie contre la limande située à l’intérieur du virage. Découverte hors de son emplacement d’origine, la seconde limande courbe est en sapin, un bois plus tendre que le chêne, ce qui explique un degré d’altération plus important. Avec une largeur d’une dizaine de centimètres, elle présente une section moins imposante avec une épaisseur de 5 cm maximum. Contrairement à celle située à l’intérieur du virage, elle était moins soumise à l’arrachement, mais elle a subi un écrasement plus important du fait de la force centrifuge.

Le travail du bois : choix des essences et façonnage des pièces

Les volées conservées de la voie n’ont pas été démontées et sont restées en place dans la mine. Une pièce de jonction, deux traverses et leurs chevilles ont été prélevées dans les parties où les limandes étaient absentes ou dissociées. Des chutes de taille et des éclats de type copeaux ont été retrouvés et échantillonnés dans le ballast, principalement au contact du sol rocheux. Abandonnés par les mineurs, des coins et des chevilles, fragmentées ou entières, ont également été retrouvés. Parmi les nombreux éléments en bois prélevés lors de la fouille, 125 inventoriés, 44 ont été sélectionnés après lavage pour être identifiés de façon plus précise. 

Les sept fragments de la voie qui ont été étudiés par dendrochronologie proviennent d’arbres ou de branches. L’absence d’attaques de larves suggère que les pièces ont été façonnées et mises en place dans la mine immédiatement après l’abattage17.

Toutes les pièces servant à la constitution de la voie proviennent principalement de chênes ; elles ont été coupées en suivant l’orientation des cernes, le fil du bois. Les limandes cintrées proviennent ainsi de branches ou de troncs naturellement courbés comme c’est le cas pour un exemple similaire retrouvé dans la mine du Vieux Rimpy à Sainte-Marie-Aux-Mines (68)18. Quelques pièces façonnées et déchets de taille sont en pin. Ce dernier est notamment utilisé pour des coins, mais également pour des limandes constituant les rails.

Étant donnée la sinuosité de la galerie d’accès, les différents éléments en bois utilisés pour fabriquer la voie de roulage, notamment les limandes, ont été débités et dégrossis à l’extérieur. Le façonnage des différents éléments a été finalisé dans la mine ; ils ont ensuite été ajustés à leur emplacement, comme en témoignent les nombreux déchets retrouvés : chutes de taille et copeaux multicentimétriques. À partir de ces éléments et des traces d’outils relevées sur les pièces façonnées, trois types d’outils paraissent mis en œuvre pour confectionner et ajuster ces pièces (fig. 5). Les traces probables détectées sur des traverses et des pièces de jonction suggèrent que l’herminette a été utilisée pour dégrossir les pièces de bois. La hache ou la hachette semble avoir servi pour segmenter les éléments, biseauter l’extrémité des pièces de jonctions et des traverses ainsi que confectionner les coins ainsi que les chevilles. Pour percer les trous, les mineurs utilisent certainement une tarière munie d’une mèche dont l’extrémité conique, probablement de type cuillère, permet de creuser des trous de 2 à 2,5 cm de diamètre. 

Une chute de découpe provient d’une pièce de bois déjà façonnée, recyclée à l’occasion de la fabrication de la voie ou de son entretien (fig. 5). Une pièce de jonction présente beaucoup plus de trous que nécessaire, certains étant par ailleurs percés à travers des trous plus anciens dans lesquels les chevilles étaient encore présentes (fig. 4). Alors que quatre suffisent, onze trous ont ainsi été forés. Ces observations peuvent tout aussi bien témoigner de phases d’ajustage de l’installation que démontrer le recyclage d’éléments façonnés plus anciens.

En haut et à gauche : trace de hache au niveau d’un biseau créé à l’extrémité d’une traverse. 
En haut et à droite : chute de taille, provenant d’une pièce déjà façonnée, présentant des traces de hache. 
En bas et à gauche : coupe d’un trou et d’une amorce de trou montrant l’utilisation d’une mèche, certainement de tarière, de type cuillère. En bas et à droite : extrémité d’une traverse présentant des traces de hache (Photo : G. Bonnamour).
Fig. 5. En haut et à gauche : trace de hache au niveau d’un biseau créé à l’extrémité d’une traverse. En haut et à droite : chute de taille, provenant d’une pièce déjà façonnée, présentant des traces de hache. En bas et à gauche : coupe d’un trou et d’une amorce de trou montrant l’utilisation d’une mèche, certainement de tarière, de type cuillère. En bas et à droite : extrémité d’une traverse présentant des traces de hache (Photo : G. Bonnamour).

Conclusion

L’analyse des sources écrites médiévales et modernes démontre que le bois est largement mis en œuvre dans les mines polymétalliques du Lyonnais et du Beaujolais. Les essences sont sélectionnées suivant les applications et un personnel spécialisé dans les métiers du bois présent dans les mines se distingue des simples manœuvres. Comme le démontre aussi l’analyse des pièces constituant la voie découverte à Joux, la conception des éléments en bois mis en œuvre est réalisée à l’aide d’un outillage adapté, la hache en particulier. Utilisée dans les mines dès la protohistoire, son usage a aussi été démontré dans les mines médiévales  alpines19

Les monts du Lyonnais et du Beaujolais se trouvent en bordure du bassin Rhodanien, axe d’échange économique favorisant également la diffusion des savoir-faire à la fin du Moyen Âge. C’est durant cette période que des techniques minières innovantes, comme les voies de roulage découvertes à Joux et à Pampailly, y sont développées par des mineurs dits “Allemands”20. De nombreuses voies de roulage datant pour la plupart de l’époque moderne ont été retrouvées dans le massif des Vosges, anciennes provinces minières germaniques21. C’est au sud de ce massif, à Steinbach (68), qu’un seul exemple plus ancien, datant probablement de la seconde moitié du XVe siècle, a toutefois été découvert22. Mise en place quelques années auparavant, durant l’hiver 1473-1474, la voie de roulage de Joux est donc, avec celle identifiée à la mine de Pampailly, un des rares exemples archéologiques antérieurs à l’époque moderne.

Bibliographie

  • Ancel, B., Fluck, P. (1988) : “Une exploitation minière du xvie siècle dans les Vosges, Le filon Saint-Louis du Neuenberg (Haut-Rhin), Caractères et évolution”, DAF, 1988, 90-91
  • Benoit, P. (1997) : La mine de Pampailly 15e-18e siècle, Brussieu-Rhône, DARA 14, Lyon.
  • Bohly, B. (2008) : “Les vestiges en bois dans la mine médiévale du Donnerloch à Steinbach (Haut-Rhin)”, in : Bailly-Maître, M.-C., Clermont-Joly, M., Annequin, C. éd. : Archéologie et paysage des mines anciennes, de la fouille au musée, Paris, 89-99.
  • Bonnamour, G., Bonnamour, R. (2017) : “Les mines de Joux et du Beaujolais”, Journée d’actualité archéologique en Auvergne Rhône-Alpes 2016, SRA Auvergne Rhône-Alpes, Lyon, 81-86.
  • Bonnamour, G., Bonnamour, R. (2019) : “La mine médiévale et moderne de Cella à Joux en Beaujolais ”, in : Minvielle Larousse, N., Bailly-Maître, M.-C., Bianchi, G., éd. : Les métaux précieux en méditerranée médiévale. Exploitations, transformations, circulations, actes du colloque d’Aix-en-Provence 2017, Archéologie Méditerranéenne, Aix-en-Provence, 183-192.
  • Bonnamour, G. (2016) : “Les mines de cuivre et de plomb du Lyonnais et du Beaujolais au XVIIIe siècle d’après les sources écrites : Des hommes, des ressources et des techniques”, L’Araire, 186, 5-28.
  • Cauuet, B. (2008) : “Équipements en bois dans les mines d’or protohistoriques et antiques (Gaule et Dacie romaine)”, in : Bailly-Maître, M.-C., Clermont-Joly, M., Annequin, C., éd. : Archéologie et paysage des mines anciennes, de la fouille au musée, Paris, 57-73.
  • Fluck, P. (2000) : Sainte-Marie aux Mines, Les mines du rêve,Soultz 
  • Mollat, M. (1952) : Les affaires de J. Cœur, Journal du procureur Dauvet, Tome 2, Paris.
  • Py, V. (2010) : “Techniques et usage du bois des mineurs à Faravellum aux XIe-XIIIe siècles (Freissinières, Hautes-Alpes)”, in : Delhon, C., Théry-Parisot, I., Thiébault, S., éd. : Des hommes et des plantes. Exploitation du milieu et gestion des ressources végétales de la préhistoire à nos jours. XXXe rencontres internationales d’archéologie et d’histoire d’Antibes, Antibes, 293-322.

Notes

  1. Cauuet 2008.
  2. Bonnamour 2017.
  3. Mollat 1952.
  4. Mollat 1952, 350.
  5. Mollat 1952, 249.
  6. Mollat 1952, 309.
  7. Mollat 1952, 325.
  8. Benoit 1997, 37.
  9. Mollat 1952, 349-350 ; Benoit 1997, 37.
  10. Mollat 1952, 269.
  11. Les données synthétisées dans ce paragraphe proviennent de documents manuscrits conservés aux Archives départementales du Rhône (principalement les côtes 1C178 et 1L1058). Ils concernent les mines de cuivre des concessions de Sain-bel et de Chessy et datent de la seconde moitié du XVIIIe siècle (1761-1783 et période révolutionnaire). L’analyse de ces archives a fait l’objet d’une synthèse dans Bonnamour 2016.
  12. Benoit 1997, 99-100.
  13. Bonnamour 2016, 19.
  14. Bonnamour et al. 2017, 184-186.
  15. Benoît 1997, 43-46.
  16. Benoît 1997, 44.
  17. Observations réalisées par C. Dormoy lors de l’analyse dendrochronologique (Archeolabs).
  18. Fluck 2000, 94.
  19. Cauuet 2008 et Py 2010.
  20. Benoît 1997, 46.
  21. Fluck 2000, 94-95, Ancel & Fluck 1988, 90-91.
  22. Bohly 2008, 95.
ISBN html : 978-2-35613-537-7
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Chapitre de livre
EAN html : 9782356135377
ISBN html : 978-2-35613-537-7
ISBN pdf : 978-2-35613-539-1
ISSN : 2741-1508
7 p.
Code CLIL : 4117
licence CC by SA

Comment citer

Bonnamour, Gérald, avec la collaboration de Romain Bonnamour, “L’utilisation du bois dans les mines médiévales et modernes du Lyonnais et du Beaujolais. L’exemple de la mine de Cella à Joux (69)“, in : Meunier, Emmanuelle, Fabre, Jean-Marc, Hiriart, Eneko, Mauné, Stéphane, Tămaş, Călin Gabriel, Mines et métallurgies anciennes. Mélanges en l’honneur de Béatrice Cauuet, Pessac, Ausonius Éditions, collection DAN@ 9, 2023, 303-310, [en ligne] https://una-editions.fr/utilisation-du-bois-dans-les-mines-medievales-et-modernes-du-lyonnais-et-du-beaujolais [consulté le 27/10/2023]
doi.org/10.46608/dana9.9782356135377.35
Illustration de couverture • de Paul Cauuet
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