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La graphie des noms propres en contexte multilingue

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Comment s’écrit l’autre ? Il faut saluer la pertinence et le dynamisme de cet intitulé, et remercier l’organisatrice de cette rencontre de nous donner l’occasion de réfléchir à des thématiques qui sont toujours au cœur de l’actualité, et qui interpellent tout particulièrement les linguistes et les sociologues : les problèmes d’identité, la relation de soi à l’autre, la rapport entre l’oral et l’écrit, la mobilité des individus, les contacts entre langues et cultures.

“Écrire l’autre” : une problématique ‘actuelle’

Les difficultés de la représentation écrite des noms propres

La formulation interrogative de “Comment s’écrit l’autre ?” évoque, de manière tout à fait concrète et contemporaine, les inévitables questions qui accompagnent tout énoncé, à l’oral, d’un nom propre1 : “Comment l’écrivez-vous ?”, “Pouvez-vous épeler ?”. Le nom propre occupe en effet, au sein de la langue, une position particulière : il n’est pas prédictible. En principe dépourvu de sens, il se définit par l’unicité de son référent, par l’individu auquel il renvoie : il le désigne et il le dénomme ; il lui permet d’être représenté dans la langue en tant que signe linguistique, doté d’une forme orale et de sa représentation écrite2. De manière paradoxale, il oscille entre individualité et universalité : individualité, parce qu’il réfère à un individu en principe unique, et universalité, parce que cet individu, comme le signe linguistique qui le représente, restent définitivement acquis, dans l’espace et dans le temps, pour tous les mondes possibles.

L’autre, c’est tout un chacun, c’est aussi bien soi que ce qui n’est pas soi. La prise de conscience de l’altérité ne peut en effet se faire que par rapport à sa propre identité. La question est donc à double face : comment l’autre écrit-il lui-même son nom ? (en prenant en compte la marge de liberté dont il peut disposer, ainsi que le niveau culturel qui lui est propre) ; mais aussi et surtout, comment ce nom est-il écrit par les autres ? (avec une marge d’écart et de différenciation qui varie en fonction du degré de connaissance et de compétence linguistiques propre à chacun). Si le problème se pose à l’intérieur même de toute langue, par exemple en français pour la graphie des prénoms Michèle / Michelle ou Jocelyn / Josselin, la question est particulièrement sensible pour les noms dits ‘étrangers’, c’est-à-dire ceux qui relèvent d’une autre tradition linguistique : le musicien tchèque Antonín Dvořák est représenté en français par une troncation de son prénom et par une disparition des signes diacritiques de son nom : Anton Dvorak ; le nom de la collection Chtchoukine, présentée à la Fondation Vuitton à Paris, n’est pas transcrit du russe de la même manière en français et en anglais (Shchukin). Le processus de transfert est encore plus problématique lorsqu’à la différence de langue s’ajoute une autre tradition d’écriture, comme dans la transcription alphabétique des noms des dirigeants communistes chinois, qui connaît des variantes en Chine même : (pinyin) Máo Zédông > français Mao Tsé-Toung (var. Tung) ; (pinyin) Dêng Xiăoping / (Wade-Giles) Teng Hsiao P’ing > français Teng Siao Ping (var. Siao-Ping). Il faut aussi tenir compte de toutes les graphies fautives individuelles que l’on peut rencontrer à côté de ces graphies institutionnalisées.

L’émergence de sous-disciplines linguistiques

La réflexion sur la graphie des noms propres, qui est de plus en plus d’actualité avec la mondialisation des échanges, s’inscrit dans une problématique plus large qui, depuis une trentaine d’années, vise à donner à l’écrit (à la ‘scripturalité’) le statut de discipline à part entière, en l’intégrant dans le champ de l’analyse linguistique, et en étendant son domaine au-delà de la seule prise en compte des signes graphiques. Il existe désormais une théorie de la langue écrite, une sémiologie de l’écrit, la ‘graphématique’. Il ne s’agit pas seulement d’étudier la nature et la forme des divers types de signes graphiques ou des tracés d’écriture et ce qu’ils révèlent, ce que fait depuis longtemps la paléographie, en codicologie comme en épigraphie et en papyrologie. Il s’agit aussi de s’interroger sur leur contexte matériel et sociolinguistique d’apparition (ce qui est l’objet de la graphématique ‘textuelle’), et d’étudier les interactions que l’écrit entretient avec l’oralité et avec d’autres sous-disciplines linguistiques telles que la phono-graphie et la morpho-graphie.

La réflexion sur la graphie des noms propres prend par ailleurs tout son sens dans le cadre de la linguistique des contacts de langues, des interférences et emprunts, du bilinguisme et du multilinguisme. Les noms propres, comme nous l’avons vu, se définissent par le lien référentiel qui les associe à des individus précis, et par conséquent, à la langue qu’ils parlent et à la civilisation dans laquelle ils évoluent. Les noms propres font donc obligatoirement l’objet d’emprunts de la part des civilisations et des langues avec lesquelles ces individus entrent en contact. Ils ont besoin d’être matérialisés linguistiquement et graphiquement dans d’autres langues que celles dont ils sont issus. Ils peuvent donc, en théorie, se réaliser sous autant de formes, d’avatars, qu’il existe de langues en contact, ainsi, à l’époque moderne, du (ou des ?) prénom masculin (français) Frédéric, (allemand) Friedrich, (anglais) Fredrik, (italien) Federico, ou, dans le monde romain, du prénom et gentilice Titus : latin Titus, grec Τίτος, étrusque Tite, falisque Tito, sud picénien Titúí (datif), ombrien Titis (génitif)3. On pourrait envisager de constituer un dictionnaire multilingue des anthroponymes attestés sous différentes formes linguistiques dans l’Antiquité, une sorte de Who’s who du monde méditerranéen antique.

La théorisation du bilinguisme, il y a une quarantaine d’années, s’est faite à partir de l’observation de langues modernes contemporaines, et en prenant essentiellement en compte leur dimension orale. Il existe désormais, parallèlement au bilinguisme et au multilinguisme, un bigraphisme et un multigraphisme, qui se constituent en disciplines autonomes en se calquant sur la modélisation et la terminologie mises en place pour l’oral. On a, jusqu’à une époque récente, confondu sous l’appellation générique de “bilinguisme”, des faits qui relevaient en fait du bigraphisme. Un document bilingue est écrit en deux langues différentes (le latin et le grec, par exemple), chacune des deux langues étant représentée dans son propre système d’écriture. Dans le cas du bigraphisme, deux systèmes d’écriture sont utilisés pour représenter une même langue, et il n’y a pas nécessairement coïncidence entre la langue et le système graphique qui est utilisé. Il arrive fréquemment, par exemple, qu’un texte en langue latine soit écrit en caractères grecs, et inversement4. Cette distinction entre les deux systèmes, celui du fonctionnement de la langue, et celui de sa représentation écrite, est fondamentale. Elle donne lieu à une grande diversité de réalisations particulières.

Le bigraphisme (en anglais biscriptality, calqué en français par biscripturalité) est une discipline récente. La première systémisation générale, qui a consacré le concept et sa dénomination, et proposé une typologie de ses réalisations, est la thèse d’habilitation du slavisant Daniel Bunčić, soutenue en 2012 à l’université de Tübingen : Biscriptality in Slavic and non-Slavic Languages. A Sociolinguistic Typology. Mais la discipline était depuis longtemps en germe, dès la fin du XIXe siècle, sous le nom de digraphie. On notera en particulier les études de Carlo Consani (1988‑1990) sur l’épigraphie grecque chypriote. La terminologie est instable, à l’image de la diversité des phénomènes pris en compte. On trouve encore digraphisme (Marganne & Rochette 2013), et allographie ou hétérographie (den Heiger, Schmidt et Pataridze, 2014), plus ou moins synonymes selon les théories proposées. Les remarques introductives à l’ouvrage publié par Daniele Baglioni et Olga Tribulato en, 2015, Contatti di lingue – Contatti di scrittura. Multilinguismo e multigrafismo… (p. 9-37), offrent de ce point de vue une intéressante tentative de mise au point.

La philologie classique n’avait bien sûr pas attendu l’émergence d’une discipline spécifique et jargonnante pour s’intéresser à la graphie des noms propres. Les index des recueils épigraphiques, les monographies consacrées à la langue des inscriptions, et les commentaires qui accompagnent tout examen d’un texte épigraphique, ne manquent pas de fournir des inventaires et des remarques ponctuelles sur les particularités graphiques. Mais il est bien difficile de dégager, de cet amas hétéroclite et ponctuel d’informations, les lignes de force qui gouvernent les pratiques scripturaires spécifiques des noms propres.

Une problématique exigeante et complexe

L’étude de la graphie des noms propres en contexte multilingue représente une tâche particulièrement ardue et exigeante, parce qu’elle nécessite une approche doublement transversale, se situant à la croisée de différentes disciplines, linguistiques et philologiques en particulier, et à l’intersection d’une infinité de langues. Ces langues sont, dans l’Antiquité, de surcroît souvent méconnues, parce que pauvres en représentations graphiques, quand elles n’en sont pas quasiment dépourvues. Les langues grecque et latine, auxquelles nous nous intéressons ici, présentent un cas d’étude particulièrement intéressant, non seulement en raison de leur proximité structurelle liée à leur commune origine indo-européenne, et de leur étroite association historique sur une très longue période, mais aussi parce que toutes deux ont interagi avec une multitude d’autres langues qu’elles ont côtoyées, voire supplantées5. Seule une confrontation entre des spécialistes de diverses langues peut permettre de voir s’il est possible, à partir de réalisations linguistiques différentes, de dégager une typologie commune des processus d’interférences graphiques spécifiques des noms propres6.

Les variables de la représentation graphique

L’accès à l’écrit

Comment s’écrit l’autre ? Il peut s’écrire de bien des manières, mais il peut aussi ne pas s’écrire du tout. On ne peut passer sous silence toute la masse des “exclus de l’écrit”, tous ceux qui sont passés dans l’Histoire sans laisser de trace, parce qu’ils appartenaient à des civilisations qui n’avaient pas ou pas encore de tradition écrite, ou parce qu’ils occupaient, au sein de la société, une position trop modeste pour pouvoir sortir de l’anonymat : ils n’appartenaient ni aux classes dirigeantes et possédantes, qui se représentent épigraphiquement7 et qui sont mobiles, ni aux professions qui ont laissé des signatures, comme les marques de potiers, qui figurent en général parmi les plus anciens témoignages onomastiques attestés épigraphiquement. Cette déperdition des “sans-noms” constitue manifestement la majorité des individus, même si, dans un renversement paradoxal, les noms propres représentent, dans l’ensemble de la documentation épigraphique qui nous est parvenue, la majeure partie des témoignages linguistiques conservés. C’est même notre principale, voire quasiment notre seule source d’information sur bien des langues d’attestation fragmentaire, comme l’étrusque.

Il y a par ailleurs tous ceux – et leur proportion devait être très importante dans l’Antiquité – qui n’ont pas accès à la culture de l’écrit, parce qu’ils ne la maîtrisent pas du tout (analphabétisme), ou très imparfaitement (illettrisme). Ce sont ceux que les Romains appellent illiterati, rustici ou barbari, et c’est ce que la didactique contemporaine englobe sous le concept plus large de “littéracie”. Le mot est adapté de l’anglais literacy, et il désigne la maîtrise des connaissances fondamentales qui permettent à un individu de communiquer dans une société de culture écrite. Cette variable culturelle n’est pas sans conséquence sur la graphie des noms propres. L’incapacité à pouvoir produire un témoignage écrit et à signer soi-même entraîne le recours à des tiers (des proches ou des scribes professionnels), comme on le voit dans les documents juridiques ou administratifs conservés sur papyrus ou sur tablettes8. Ces tiers ne sont pas nécessairement formés dans la même langue et dans la même culture écrite, ce qui peut entraîner des interférences de divers types. On sait aussi qu’en épigraphie la démultiplication des intervenants (commanditaire, rédacteur, graveur), et en papyrologie la diversité de “mains”, nécessitent des analyses complexes.

La maîtrise, plus ou moins aboutie, de la relation bilatérale entre l’écrit et l’oral (écriture / lecture, codage / décodage), entraîne un nombre plus ou moins important d’erreurs et de déviances. Il peut s’agir de fautes de graphie, d’écriture, par exemple dans le choix des graphèmes, plus ou moins adaptés à la réalité phonique à transcrire, ou dans leur tracé. Mais il peut aussi s’agir de correction orthographique, ce qui ne peut s’apprécier que par rapport à une norme enseignée en milieu scolaire ou professionnel, dans des écoles de scribes et des chancelleries. Il est difficile de parler d’uniformité graphique et d’orthographe “officielle” dans le monde romain (Desbordes 1990, 161 sq.). La norme (ratio, regula) est ce qui se dégage de l’usage dominant (usus), sans exclure d’autres types d’usages, qui ne sont pas nécessairement perçus comme fautifs. Le nom grec Philargyrus (= Φιλάργυρος) apparaît ainsi en latin républicain sous différentes formes en P– ou Ph– initial9 (et –y– ou –u– intérieur) : P(h)ilargurus, Philarcurus, Philargyrus (CIL, I2), à quoi s’ajoutent, à l’époque impériale, des formes à F– initial. L’important est que les variations ne dépassent pas un seuil qui mettrait en péril la fonction référentielle, identificatrice, caractéristique du nom propre.

Le nom propre dans la langue 

Quel est le statut du nom propre anthroponymique dans la langue ? Présente-t-il, en dehors de ses propriétés référentielles, une spécificité ? Comme tout élément du lexique, le nom propre se conforme aux structures de sa langue d’appartenance : il puise dans le même stock de phonèmes et de graphèmes, et dans les langues flexionnelles, il se plie aux règles de la déclinaison pour pouvoir s’intégrer dans un énoncé. Il observe aussi les mêmes conventions graphiques : type d’écriture (hiéroglyphique, syllabique, alphabétique – avec ou sans notation des voyelles), emploi ou non de signes diacritiques, sens de l’écriture (dextro- ou sinistroverse), scriptio continua ou interponctuation, usage d’abréviations10, etc. D’un point de vue graphique, le nom propre ne se démarque donc pas spécifiquement, au sein de sa langue d’appartenance, des autres mots du lexique, ce qui peut provoquer des problèmes de repérage11. Par contre, d’un point de vue inter-linguistique, le fait que le nom propre porte, inscrits dans sa forme, les indices structurels de la langue dont il est issu, lui permet d’être repéré comme alloglotte (cf. infra). Et il en est de même, d’un point de vue institutionnel, de la structure de la formule onomastique, qui varie selon les peuples, et dont l’évolution et la mixité révèlent les phénomènes d’acculturation et de domination12.

Si la langue se définit comme un ensemble de systèmes (phonologique, graphique, morphologique et autres), ces systèmes ne sont ni monolithiques ni figés. Ils constituent tout autant d’espaces variationnels13, qui permettent aux usagers d’adapter leur expression aux exigences de chaque situation de parole. Le choix des variantes et leur combinaison font de chaque production langagière, écrite ou orale, une réalisation unique, qui s’inscrit dans un contexte temporel (dimension évolutive) et spatial (traits dialectaux), et qui porte aussi la marque du locuteur-scripteur, de son niveau socio-culturel et de ses intentions dans le choix du type de texte, dédicace ou defixio, par exemple, ce que la sociolinguistique a modélisé en créant les concepts de diachroniquediatopiquediaphasiquediastratique et diasituatif. En témoignent, en latin, le choix entre une écriture en lettres capitales ou en cursive, en fonction du contenu et de la finalité du texte, la présence ou non d’apex, ou encore, des variantes telles que Caeso / Kaeso (> gr. Καίσων)14 ou Claudius / Clōdius (> gr. Κλαύδιος / Κλώδιος), ou la graphie archaïsante de [ī] par le digramme <ei>, comme dans Chīlo (< gr. Χείλων) et Nīcep(h)or(us) (< gr. Νīκηϕόρος), dans une defixio de Délos, datée approximativement de 100 a.C. : C. Seium C.f. Cheilonem … Neiceporus (ID 2534)15. La formule onomastique archaïque et dialectale Popliosio Valesiosio16 se démarque de son équivalent ultérieur en latin classique P(ublii) Valerii par son phonétisme et sa flexion : elle est antérieure à l’action du rhotacisme (évolution de –s– intervocalique en –r-) et elle présente une désinence dialectale de génitif en –osio au lieu de –ī. La forme archaïque du prénom, Poplios (pour Pūblius), avec occlusive sourde, est identique à celle de ses correspondants dans les langues grecque (Πόπλιος, Πού-) et étrusco-italiques (étr. Pupli(e))17. La transcription grecque du prénom latin M(arcus) par Μάαρκος dans les inscriptions de Délos, du IIe s. a.C., avec gémination de l’alpha pour noter la quantité longue de la voyelle, révèle une origine italique, campanienne, et non romaine18, comme le laisse attendre la présence de communautés d’Italici (Ἰταλικοί) dans les inscriptions de Délos.

Linguistiquement, le nom propre est donc inscrit dans l’Histoire et dans la diachronie. Mais étant donné son rôle sensible comme marqueur d’identité, il peut aussi entrer en résistance contre l’évolution et constituer un conservatoire d’archaïsmes. C’est ce que montre le cas bien connu des abréviations prénominales C. et Cn. de Gaius et de Gnaeus (arch. Gnaivos), qui maintiennent le signe de la palatale sourde, alors que le rendu à l’oral, ainsi que les formes pleines des transcriptions grecques, Γάιος et Γναῖος, attestent une prononciation avec sonore19. On sait aussi que c’est essentiellement dans l’onomastique que se conservent les vestiges de langues disparues, comme celles qui ont été évincées par la romanisation.

Le nom propre exporté

Quand il s’exporte, le nom propre emporte avec lui les caractéristiques structurelles de sa langue d’origine, en même temps que les propriétés sociolinguistiques qui lui sont associées. Il importe, dans les langues d’accueil, des séquences phono-graphématiques jusque-là inconnues, ainsi (entre autres) des lettres grecques zêta et upsilon en latin, ou des groupes consonantiques [sm / zm] et [gd]20:

ὕμνος > Hymnus, CIL, I, 2718, cognomen d’esclave sur une tessera nummularia de 71 a.C.21
Ζῆθος > Zethus, CIL, I, 2679 et 2683 (Minturnes, Ier s. a.C.). Cic., Fam. 9,15,122
Κόσμος > Cosmus, affranchi d’Auguste (CIL, VI, 5202), var. Cozmus (CIL, VI, 5202 et 5203)23
Σμύρνα > Zmyrna, CIL, VI, 7996 (époque d’Auguste)24
Ζμάραγδος (Σμ-) > Smaragdus, CIL, VI, 20793 / Zmaragdus, CIL, XV, 241825

Ces séquences permettent de repérer le nom propre comme étant alloglotte tant qu’il ne connaît pas de processus d’intégration (Ζῆθος > Setus / Zethus)26. Il importe aussi des modes de formation étrangers, comme le suffixe patronymique -ίδης, typiquement grec, ou la dérivation hypocoristique par troncation, également typique du grec, qui renvoie par exemple la forme réduite Ascla (nom d’esclave et d’affranchi) à la forme pleine Aesculapius / Asclepios : ion.-att. Ἀσκληπιός / dor. Ἀ(ι)σκλαπιός > Ἀσκλᾶς > Asclas (CIL, VI, 32294) / Astlas (CIL, VI, 647), Ascla (CIL, I2, 1241 : Ascla Minicia(e) seru.), Ascula (CIL, XIV, 2531)27.

Le nom propre reflète aussi l’état de la langue d’origine au moment où il a été exporté, ce qui peut se révéler riche d’enseignements. Il peut par exemple révéler, dans certaines couches sociales, des cas d’évolution phonétique bien plus précoces que ce que l’on croyait. C’est le cas pour le grec, dès l’époque républicaine, dans des cognomina, de la prononciation itacisante de l’upsilon (υ = [ü] >[i]) : Chiteris = Κυθηρίς (CIL, I, 1771), Miro = Μυρώ (CIL, I, 2423)28, ou la fricatisation de l’occlusive aspirée φ ([ph] > [f]) : Heliofo = Ἡλιοφῶν (CIL, I, 2652 [antérieur à 88 a.C.]), Orfeus = Ὀρϕεύς (CIL, I, 753 [59 a.C.])29 ; et inversement, en latin, de la non-prononciation de la nasale dans la séquence –ns– : Ηορτήσιος = Hortē(n)sius (Cf. infra).

Mais quand il s’exporte, le nom propre doit aussi, pour être fonctionnel, s’intégrer dans les structures de la langue d’accueil, sous peine de devenir un ‘ovni’ linguistique. Le nom gréco-oriental Malchio, d’esclave et d’affranchi, est la transcription en caractères latins du grec Μαλχίων, qui est lui-même adapté de la racine sémitique MLK, “roi”, avec vocalisation, et adjonction d’un suffixe anthroponymique grec -ίων qui lui permet d’entrer dans le système flexionnel30. C’est là toute l’ambivalence du nom propre, qui doit lâcher un peu de son identité pour pouvoir continuer à remplir ses fonctions d’identification et de désignation. Le problème était déjà bien connu des grammairiens latins. Conformément à leur vision du monde, ils classaient les noms propres en trois catégories : indigènes (latins), étrangers (grecs), et barbares (nomina Latina, Graeca / peregrina, barbara), en les repérant par la structure morpho-phonologique de leur finale, ainsi de Tanaquil, Hasdrubal, Pulpud et Bogud (roi de Maurétanie), et des nombreux patronymiques grecs en -ης (-ίδης) et noms barbares en –ēs31 :

Priscien, GL 2, 213, 7-14 : In –d… duo sunt neutra… ‘aliud’ et ‘quid’ et ex eo composita […]. 14‑16 : Inueni tamen apud Liuium in CXII Ab Vrbe condita in –d desinens barbarum nomen regis Maurorum Bogud, cuius genetiuum secundum tertiam declinationem Bogudis protulit,
“À finale en –d, il n’existe en latin que deux mots, des neutres, ‘aliud’ et ‘quid’ et leurs composés […]. J’ai cependant trouvé chez Tite-Live, au livre CXII de Depuis la fondation de la Ville, un nom barbare se terminant en –d, celui du roi des Maures Bogud, qui fait au génitif Bogudis, sur le modèle de la troisième déclinaison.”

Priscien, GL 2, 213, 7-14 : In –d… duo sunt neutra… ‘aliud’ et ‘quid’ et ex eo composita […]. 14‑16 : Inueni tamen apud Liuium in CXII Ab Vrbe condita in –d desinens barbarum nomen regis Maurorum Bogud, cuius genetiuum secundum tertiam declinationem Bogudis protulit,
“À finale en –d, il n’existe en latin que deux mots, des neutres, ‘aliud’ et ‘quid’ et leurs composés […]. J’ai cependant trouvé chez Tite-Live, au livre CXII de Depuis la fondation de la Ville, un nom barbare se terminant en –d, celui du roi des Maures Bogud, qui fait au génitif Bogudis, sur le modèle de la troisième déclinaison.”

2, 246, 8-14 : frequentissime tertia utuntur declinatione in propriis quae formam habent patronymicorum, et in barbaris, ut Thucydides, Thucydidae et Thucydidis, Mithridates…, Tigranes… Huiuscemodi enim nomina Parthica etiam Graeci ancipiti terminant genetiuo, modo –ου modo –ους : Τιγράνης, Τιγράνου καὶ Τιγράνους uel Τιγράνεος.
“très souvent les auteurs déclinent sur la troisième déclinaison les noms propres [sc. grecs] qui ont la forme de patronymiques, ainsi que les noms barbares, ainsi de Thucydides, Thucydidae et Thucydidis, Mithridates…, Tigranes… Dans les noms parthes de ce type, les Grecs eux aussi attestent une double forme de génitif, en –ou et en –ous : Tigranes, Tigranou et Tigranous (ou Tigraneos).”

Mais il ne faudrait pas en conclure que le nom propre, de par sa forme, peut être un révélateur de l’identité ethnique et linguistique, ou tout au moins, qu’il puisse toujours l’être. On sait très bien, par exemple, depuis les travaux d’H. Solin (1971), qu’il était de bon ton de donner des noms grecs à ses esclaves quelle que fût leur origine, et surtout lorsqu’ils étaient d’origine rustique ou barbare, pour les valoriser.

Le nom propre en contexte multilingue

Langue et écriture

Comment “s’écrit l’autre” en contexte multilingue ? Comment gérer la diversité linguistique et graphique ? Il est bien difficile de ne pas tomber dans l’éparpillement des témoignages individuels, tant les faits de langue interfèrent avec les faits d’écriture, dans des situations d’échange à chaque fois uniques, des “instantanés linguistiques”, comme l’a joliment dit Coline Ruiz Darasse. Plutôt que de s’égayer dans la diversité des langues et des systèmes d’écriture, dont nous n’avons d’ailleurs qu’un aperçu parfois restreint, mieux vaut tenter de mettre en valeur quelques grandes lignes de force : d’une part, le rôle dominant joué, dans le développement des échanges écrits, par quelques grandes puissances comme les Phéniciens, les Grecs, les Étrusques, et en dernier lieu les Romains ; et d’autre part, le caractère de ‘melting-pot inter-linguistique’ qu’ont dû présenter bien des zones à forte circulation et concentration commerciale. Qu’on songe, par exemple, à ce que pouvait être la situation de l’Italie avant la conquête romaine, avec sa mosaïque de langues et de dialectes. Les anthroponymes n’ont pas toujours été transcrits directement d’une langue à l’autre. Ils ont pu passer par des langues intermédiaires, qui ont laissé leur empreinte dans la transaction. Le grec, en particulier, a servi de vecteur entre l’Orient et l’Occident (cf. supra, le cas de Malchio), et une forme latine telle que Alixentros témoigne d’un passage par l’étrusque (Ἀλέξανδρος > étr. Aleχs(a)ntre > lat. Alixentros ~ Ἀλέξανδρος > lat. Alexander)32, tout comme l’abréviation par C. du prénom Gaius. Dans de pareilles circonstances de promiscuité et d’échanges, il n’est pas étonnant que l’on ne sache plus très bien à quelle langue peut appartenir un nom comme Titus (vu supra), qui se retrouve sous des formes quasi homonymes dans les langues étrusco-italiques (Tite, Tito) et en grec (Τίτος).

Il n’est pas rare, de plus, qu’une langue puisse s’écrire dans un système graphique qui n’a pas été prévu pour elle. Le phénomène est connu sous le nom d’allographie. C’est d’ailleurs ainsi que naissent la plupart des systèmes d’écriture, par transferts et adaptations successives d’une langue à l’autre : du phénicien au grec, puis du grec au latin (via l’étrusque) et aux langues italiques, et du latin aux langues celtiques et autres langues occidentales. On parle ainsi de ‘gallo-grec’ et d’ ‘osco-grec’ (gaulois ou osque écrits en caractères grecs), en recourant à des composés dont le premier membre a valeur linguistique (il désigne la langue), et le second, graphique (le système d’écriture). L’allographie peut recouvrir un phénomène historique de transition, de passage d’une tradition écrite avant l’adoption d’un alphabet indigène. Elle peut aussi être, dans le cadre d’une pratique bilingue, l’indice d’un bilinguisme dit ‘imparfait’, d’une pratique exclusivement orale d’une seconde langue, sans la maîtrise de l’écrit. Mais, comme le montrent les cas de Romains qui choisissent de s’identifier en grec, l’allographie résulte souvent d’une stratégie énonciative, d’une adaptation au contexte, voire d’un choix délibéré de revendication identitaire ou d’intégration.

Il n’est pas rare, dans le monde romain, de trouver des textes en langue latine écrits en caractères grecs, et l’on peut dire que le monde romain a été rapidement digraphe, comme il a été bilingue. Il offrait la possibilité d’écrire chacune des deux langues dans l’alphabet de l’autre. Mais ce digraphisme bidirectionnel était déséquilibré, puisque les cas de langue grecque transcrite en caractères latins sont moins fréquents. Comme pour l’allographie, dont il représente une forme spécifique, le digraphisme est motivé par des considérations d’ordre énonciatif, par les besoins et les visées de la communication. Parmi les dizaines de graffiti laissés par les touristes en Égypte dans les tombeaux des pharaons de la Vallée des Rois, en milieu hellénophone, un certain Hortē(n)sius a préféré transmettre son nom à la postérité en le transcrivant en grec, Ηορτήσιος, mais le maintien du H– initial dans cette forme hybride, trahit le phénomène, maladroit, de transcription33.

Transpositions d’un système d’écriture dans un autre

Comment se fait la transposition d’un système d’écriture dans un autre ? Elle se fait par transcodage, par application de règles de correspondances qui ne concernent pas que les seuls transferts de signe à signe (correspondances ‘graphématiques’), mais qui impliquent aussi la morphosyntaxe (le traitement des finales désinentielles) et le formulaire onomastique, par exemple dans l’inscription de Délos ID 2013, qui met en scène l’affranchi grec Aristomachos et son patron romain Gnaeus Seius34. L’inscription est en langue grecque, mais on peut reconstituer le substrat latin :

ID 2013 : Γναῖον Σήιον Γναίου υἱὸν Ῥωμαῖον | Γάιος Σήιος Γναίου Ἀριστόμαχος
               [= Cn. Seium Cn. f. Romanum | C. Seius Cn. l. Aristomachus]

Les abréviations latines prénominales sont développées (Γναῖον = Cn(aeum), Γναίου = Cn(aei), Γάιος = C(aius)), tout comme la mention, traditionnellement exprimée par son équivalent grec, de la filiation (υἱὸν = f(ilium)), et les noms sont fléchis à la grecque (nominatif grec en –ος = latin –us, accusatif en –ον = –um, génitif en –ου = –i). La graphie utilisée coïncide avec la langue employée : on parle de transcription.

Dans la translittération, le transfert se fait mécaniquement, de signe à signe, sans s’interroger nécessairement sur la valeur phonique des graphèmes, ni sur l’intégration morpho-phonographique du nom. On aboutit à des formes qui peuvent n’avoir aucune pertinence ni identité linguistiques. On peut ainsi comparer l’accusatif translittéré en –ουμ du latin Sextilium > Σεξτιλιουμ (sur la base d’une équivalence phono-graphématique entre le latin u et le grec ου), et l’accusatif grec en –ον de Kόιντον ‘Ορτήσιον, transcrit (adapté) du latin Q(uintum) Hortensium. Et il en est de même pour le nominatif en –us, translittéré en -ους ou transcrit (adapté) en –ος[/efn_note]Par correspondance fonctionnelle de signe(s) à signe(s), sans fondement phonétique. On trouve aussi parfois –υς, par confusion d’alphabet, comme dans Κασᾶνυς (graffiti, Égypte, Baillet n°1393, cf. supra, note 33), qui peut être interprété comme une transcription / translittération du latin Cas(s)(i)anus (Adams 2003, 585).[/efn_note] : Γ. Ιουλ[ι]ους Τελεσϕόρος = C. Iulius Telesphorus.

Les transferts de langue et d’écriture se heurtent à des déséquilibres dans le nombre et la nature des signes graphiques utilisés par chaque langue35. Pour pallier les déséquilibres par rapport au grec, le latin a eu recours à des digrammes (gr. ψ = lat. ps ; ϕ, θ, χ = ph, th, ch), à des regroupements (ainsi pour la notation des voyelles longues : gr. ε, η > lat. e ; gr. ο, ω > lat. o), et surtout, à des emprunts de signes, y et z, les litterae peregrinae ou Graecae, deux lettres adjointes, au Ier s. a.C., à la fin de l’alphabet latin. Les transcriptions aboutissent à l’établissement de règles de correspondances phono- et morpho-graphématiques que l’on trouve énoncées chez les grammairiens latins, par exemple pour les anthroponymes grecs en –ος = latin –us, et en–ων = latin –ō :

Priscien, GL 2, 271, 15 : Graeca quae apud Graecos in –ος desinentia mutant o in u, secundae sunt declinationis, ut Κῦρος > Cyrus, Cyri, Πύλος > Pylus, Pyli…,
“Les mots à finale grecque en –os qui changent o en u [en latin] sont de la seconde déclinaison, comme Kyros > Cyrus, Cyri, Pylos > Pylus, Pyli.”

Priscien, GL 2, 31, 10-13 : –n […] expellitur a Graecis in –ων desinentibus cum in Latinam transeunt formam, ut Demipho, Simo, leo, draco [< Δημοφῶν, Σίμων, λέων, δράκων], sicut contra additur Latinis nominibus in –o desinentibus apud Graecos, ut Κικέρων, Κάτων pro Cicero et Cato.
“[-n] [représenté par la lettre grecque -ν] disparaît des mots grecs terminés en –ōn quand ils prennent une forme latine, ainsi de Demipho, Simo, leo [‘lion’], draco [‘dragon’], tout comme, inversement, il s’ajoute, en grec, aux mots latins terminés en –ō, comme Kikerōn, Katōn, pour Cicero et Cato.”

Ces règles bidirectionnelles et évolutives constituent un système linguistique spécifique, inter-linguistique, un ‘diasystème’ qui n’existe que dans la zone d’intersection entre les deux langues. De ce diasystème relèvent aussi des marqueurs spécifiques de noms propres féminins, comme le génitif ‘latin’ en –aes : Eutychia Eburnaes ancilla (CIL, VI, 7701)36, ou la déclinaison en nasale (Chrysis, –inis) au lieu de la dentale (-idis), du grec Χρυσίς, -ίδος : Cossutiaes L.l. Chrysinis37 / Sulpiciae Chrysidis38. Bien des transcriptions contreviennent aux règles attendues.

L’usage des inscriptions témoigne d’une grande diversité de réalisations, et leur interprétation nécessite des analyses très fines, qui révèlent parfois des situations complexes, comme celle qu’évoque accessoirement G. Purnelle au détour d’une note39, mais qui ne devait pas être exceptionnelle. La graphie Εὐτουκεία, dans une inscription grecque d’Italie des IIIe‑IVe s.40, apparaît comme totalement insolite en grec, en regard de la forme usuelle du nom féminin Εὐτυχία. Comme l’a bien vu G. Purnelle, les trois variantes graphiques de cette forme “renvoient toutes à une forme latine à l’origine de la forme grecque : ου pour upsilon est en fait le correspondant grec d’un V latin ; le kappa pour khi transcrit un C latin ; le digramme ει est une graphie inverse grecque pour iota ; la forme latine originelle était donc Eutucia”, une variante latinisée de Eutychia, ayant gommé les traits hellénisants de la graphie (et de la prononciation), à savoir l’upsilon et l’aspiration consonantique. Nous sommes donc en présence d’un phénomène d’ “aller-retour” entre les deux langues : le nom grec Εὐτυχία a été translittéré et transcrit en latin sous les formes Eutychia et Eutucia, et cette dernière forme a été à son tour translittérée en grec en Εὐτουκεία. Un nom grec peut donc s’écrire, en grec, à la latine, et les frontières entre les deux langues, se révéler extrêmement complexes.

Ce même effet “boomerang” d’aller et retour, s’observe également en sens inverse, du latin au latin, par l’intermédiaire du grec. Comme toujours dans le cas de la notation de la consonne labiovélaire latine [kw], qui ne trouve pas d’équivalent dans le système phonologique grec, le nom latin Quintus, particulièrement fréquent, présente en transcription grecque les variantes Κο(υ)ι- et Κυι-41, ainsi dans une épitaphe latine de Rome, dédiée à un affranchi impérial Cointus : D.M. Cointo Aug(usti) lib(erto) a frum(ento)42. Dans un flou identitaire et linguistique, la forme ‘latine’ Cointo translittère de toute évidence une forme grecque Κοίντῳ, qui elle-même transcrit le latin homophone Quinto (Quinto > Κοίντῳ > Cointo). Sans recourir au concept inter-linguistique auquel nous donnons le nom d’ “aller-retour”, J. Adams, dans la section qu’il consacre aux phénomènes d’interférence orthographique et de changement de code alphabétique43, s’interroge sur les causes sociolinguistiques du phénomène, sur la nature des situations de bilinguisme imparfait qui peuvent être à l’origine de ces dysfonctionnements graphiques, et il les interprète aux différents niveaux d’une échelle d’acquisition de compétence dans l’écriture latine (p. 71-72).

Dans le cas de noms romains comme Ruphus ou Phidelis orthographiés, au lieu du f attendu (Rufus, Fidelis), avec le digraphe ph normalement réservé à la transcription du φ dans les mots d’origine grecque :

Rufus (passim) / Ruphus, CIL, IV, 4615
C. Rublei(us) Fidelis (CIL, VI, 1057. 3, 86) / C. Publei(us) Phidelis (CIL, VI, 1058. 3, 30 ; 210 p.C.)44,

l’interprétation peut être différente et ambiguë45. On peut y voir, comme dans les cas précédemment évoqués, un phénomène de retranscription à partir du grec : latin Rufus > grec Ῥοῦϕος > lat. Ruphus. Toutefois, la spirantisation en grec, aux alentours de l’ère chrétienne, de l’occlusive ‘aspirée’ (ou plutôt ‘expirée’) ϕ = [ph] en [f], a mis fin à la différence structurelle fondamentale qui opposait les systèmes phonologiques grec et latin (grec [ph] ~ latin [f])46 ; mais, dès avant cette assimilation phonétique, il existait une équivalence fonctionnelle entre le ϕ grec et le f latin, le second servant systématiquement à transcrire le premier (Fundanius > Φουνδάνιος), comme en témoignent les alphabets bilingues conservés dans les papyrus d’Égypte, qui font correspondre ϕ à f (ιϕϕε)47. Il existait donc, dans le monde gréco-romain, à l’intersection des deux langues, un espace commun dans lequel les signes graphiques ϕ et f pouvaient, avant même de référer au même phonème /f/, permuter, et être à l’origine de contrépels (“graphies inverses”)48 et de métissages (hybridations) graphiques.

Métissage graphique

Le phénomène entre dans la catégorie plus générale de l’interférence linguistique, de l’intrusion d’éléments d’une langue dans une autre. Il peut se faire par alternance de code graphique (“code-switching graphique”) au sein d’un même texte, mettant par exemple en opposition une partie formulaire et une partie personnelle, individuelle. Il peut aussi prendre la forme d’une hybridation graphique, par exemple, par insertion de caractères grecs dans une séquence graphique latine, ainsi dans la transcription des occlusives “aspirées”, normalement rendues, selon les niveaux de langue, par les digrammes ph, th, ch ou par les consonnes simples p/f, t, c. G. Purnelle49 a relevé dans les inscriptions latines de Rome 14 emplois du signe x pour rendre le khi grec, normalement reproduit par c(h), ainsi que deux cas d’emploi du signe du thêta (θ) et un du signe phi (ϕ), au lieu des graphies attendues t(h) et p(h) / f :

CIL, VI, 4561 (Ier s.) : Eparxis C. Iuli Philargyri50
ICUR 25068 (IIIe s.) : Xrusanθus filie Xrysidi51
CIL, VI, 35212 (Ier s.) : P. Atellius P.f. θeodorus52
CIL, VI, 16196 = 10,7396  (IIe/IIIe s.) : Cornelius Epaϕru(d)itus53

ou inversement, l’emploi en grec, au datif, d’un omicron -ο au lieu de l’omega -ω(ι) attendu, par translittération du datif latin en –ō :

CIL, III, 555 : Κ. Καρπουρνίο Εὐτύχο Φίλητος (= Q. Calpurnio Eutycho Philetus)

Les applications de ces différents cas de figure sont multiples. Leurs repérages sont subtils, et l’analyse de leurs manifestations et de leur motivation requiert une grande finesse d’analyse tenant compte de toutes les facettes de la question, matérielles, linguistiques et énonciatives.

À la question posée : “Comment s’écrit l’autre ?”, nous pouvons répondre : “de bien des manières”, prévisibles ou non, correctes ou fautives. Et cette diversité a beaucoup à nous apprendre : sur le rapport du nom propre à la langue, sur le rapport de l’écrit à l’oral, sur les contacts entre langues et cultures, et surtout, sur la nature humaine, sur la complexité et la difficulté de la relation à autrui, jusque dans le moindre petit fait de l’écrit.

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Notes

  1. Dans cette étude, nous entendons le “nom propre” dans son sens restreint d’ “anthroponyme”.
  2. Biville 1998.
  3. Salomies 1987, 57 ; Hadas-Lebel 2004, 117-124.
  4. Wouters 1976 ; Purnelle 1999.
  5. Cf. (entre autres) Adams 2003 ; Ruiz Darasse & Luján Martínez 2011 ; Mullen & James 2012 ; Biville 2018.
  6. Cette étude porte plus spécialement sur les interactions entre le grec et le latin, sans toutefois s’interdire quelques incursions dans d’autres domaines linguistiques. La “restriction” (si l’on peut dire) au premier millénaire, ne permet pas d’illustrer la diversité des cas de figure, qui sont bien mieux documentés à partir de l’époque impériale.
  7. Ainsi du grec alphabétique, attesté sur des poteries à partir des environs de 775 a.C., en Italie centrale (cf. Biville 2008, 42-43), ou du plus ancien texte épigraphique latin, la fibule de Préneste (CIL, I, 3), daté (s’il est authentique) des environs de 600 a.C., en écriture sinistroverse (que nous transcrivons – imparfaitement – en la renversant) et en langue latine archaïque : Manios med fhefhaked Numasioi (= latin classique Manius me fecit Numerio), “Manius m’a faite / fait faire pour Numérius”.
  8. Cf. par exemple, en Judée, vers 120 p.C., le cas de Babatha, de langue araméenne, sous la tutelle de son mari Judah, dans leurs relations avec le pouvoir romain, et le rôle de langue médiatrice joué par le grec dans les échanges communicationnels (Adams 2003, 264-269 et 566-567 ; Biville 2017, 69-70).
  9. Purnelle 1995, 273, 291, 469. Solin 2003, II, 815-818.
  10. Alors que l’épigraphie latine fait un grand usage des abréviations, en particulier dans les formules onomastiques (prénoms) et dans les titulatures, le grec, dans les transcriptions qu’il opère à partir du latin, procède systématiquement au développement de ces abréviations. Cf. par exemple, dans l’édit bilingue de Sagalassos (sous Tibère) : Sex. = Sex(tus) > Σέξτος, Ti. = Ti(berii) > Τίβεριου (Biville 2017, 83).
  11. Ainsi, dans l’une des plus anciennes inscriptions latines, dite du “Vase de Duenos” (CIL, I, 4), rédigée en scriptio continua, la séquence duenos (variante archaïque du latin classique bonus), peut s’interpréter comme un nom propre, ou comme un appellatif, “un homme bon”.
  12. Cf., entre autres, Poccetti 2009. Meissner 2012.
  13. Cf. Van Heems 2011.
  14. Salomies 1987, 26.
  15. Degrassi 1965, ILLRP 1150 = ID 2534 (Durrbach 1926–). Adams 2002, 680-682. Cf. Solin 2003, I, p. 125-129 (Nicep(h)or) et II, p. 711-712 (Chilo).
  16. Lapis SatricanusCIL, I, 2832a, Rome, vers 500 a.C.
  17. Salomies 1987, 45. Hadas-Lebel 2004, 153-158.
  18. Salomies 1987, 37-38. Adams 2003, 661-662.
  19. Salomies 1987, 28-30.
  20. Biville 1990, 99-101 (z). 1990, 296 (zm- / sm-). 1995, 257-260 (y). Cf. aussi, infra, la transcription des occlusives ‘aspirées’.
  21. Cf. aussi Solin 2003, III, 1262-1263.
  22. Zet(h)us / Setus, cf. Solin 2003, I, 521-522.
  23. Solin 2003, III, 1201-1202.
  24. Var. Smyrna, Ismurna. Solin 2003, III, 1237-1238.
  25. Solin 2003, III, 1223-1224.
  26. Biville 1990, 107.
  27. Pour d’autres attestations, cf. TLL 2.0.771, 21-40, s.u. Asclas, Ascla, Ascula. Solin 2003, I, 384. Sur la proximité et les échanges entre les groupes consonantiques [tl] et [kl], cf. Biville 1990, 318-319 (*-tlo– > –c(u)lum ; ἀντλεῖν > anclare) et Biville 1995, 158-159 (ss.uu. péss(u)lum > pesclum), áss(u)la > astla > astula / ascla).
  28. Biville 1995, 293-294.
  29. Biville 1990, 191.
  30. Solin 1996, III, 603 (‘Semitische Namen’).
  31. On les trouve déclinés en latin sur le modèle de la première (-ēs, –ae) ou de la troisième (-ēs, –is) déclinaison. Le grec présente aussi pour ces noms une double déclinaison, -ης, -ου et –ης, -ους.
  32. Biville 1990, 217.
  33. N°846, édition J. Baillet (1920-1926). Cf. Adams 2003, 585.
  34. Dürrbach 1926. Adams 2003, 644.
  35. Biville 1990, 44-51.
  36. Rome, début du Ier s. p.C. (Solin 2003, III, 1320).
  37. Notizie degli Scavi di Antichità 1916, 392, Rome, époque d’Auguste (Solin 2003, III, 1226).
  38. CIL, VI, 26991, Rome, époque impériale (Solin 2003, III, 1226).
  39. Purnelle 1995, 125, n. 79, et surtout p. 186, n. 16.
  40. RAC 10 (1933), 232. Le nom Εὐτυχία, très fréquent, se rencontre dans les inscriptions latines de Rome sous les variantes Euthycia et Euticia (formes les plus fréquentes), mais aussi Eutichia (CIL, VI, 15182), Heuthycia (CIL, VI, 24096), Eytychia (CIL, VI, 24693), Eutyxia (CIL, VI, 13176/7. 20774). Cf. Solin 2003, III, 1320-1324.
  41. Gignac 1976, 225.
  42. IGUR 728. Cf. Adams 2003, 71.
  43. Adams 2003, 71-76 (§ VII.4.1 : ‘Orthographic interference and alphabet-switching’).
  44. Il s’agit du même individu. Purnelle 1995, 203, n. 49.
  45. Biville 1990, 189-194. Purnelle 1995, 202-203.
  46. Cf. les témoignages de Quintilien 12, 10, 57, sur l’impossibilité pour un Latin de prononcer le [ph] de Ἀμφίων (> Ampio), et de Cicéron, ap. Quint. 1, 4, 14, sur l’impossibilité pour un Grec de prononcer le [f] latin de Fundanius (> Hundanius). Biville 1990, 158 et 190.
  47. Cavenaile 1956-1958, CPL n° 58-59. Biville 1990, 190.
  48. À propos de cette coexistence, à Rome, de deux systèmes pour noter le /f/ latin, f et ph, G. Purnelle (1995, 330) évoque aussi le caractère “plus prestigieux” de la graphie hellénisante en ph.
  49. Purnelle 1995, 453-456.
  50. Grec Ἐπαρχίς. Solin 2003, II, 1089.
  51. Grec Χρυσάνθος. Solin 2003, I, 174-176. Χρυσίς > C(h)rysis (C(h)ri-, C(h)ru-). Xrysis, CIL, VI, 14780 (IIe-IIIe s.). Solin 2003, III, 1225-1228
  52. Grec Θεόδωρος. Solin 2003, I, 78-80. Et inversement Thεοδώ[ρῳ] (IGUR 378 ; IIe/IIIe s.). Cf. Solin 2003, I, 78.
  53. Grec Ἐπαφρόδιτος > Epaphroditus (-prho-, –fro-). Solin 2003, I, 343-348. Sur le problème de la double localisation de l’inscription, cf. Purnelle 1995, 454 n. 10.
ISBN html : 978-2-38149-000-7
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Article de colloque
EAN html : 9782381490007
ISBN html : 978-2-38149-000-7
ISBN pdf : 978-2-38149-001-4
ISSN : 2741-1818
Posté le 24/02/2020
13 p.
Code CLIL : 3147
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Comment citer

Biville, Frédérique, “La graphie des noms propres en contexte multilingue”, in : Ruiz Darasse, Coline, Comment s’écrit l’autre ? Sources épigraphiques et papyrologues dans le monde méditerranéen antiques, Pessac, Ausonius éditions, collection PrimaLun@ 1, 2020, 15-28 [En ligne] https://una-editions.fr/la-graphie-des-noms-propres-en-contexte-multilingue [consulté le 15 juin 2020].
doi.org/http://dx.doi.org/10.46608/UNA1.9782381490007.2
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