C’est en 1827 que les habitants de Montcaret voulurent établir un lavoir en captant l’eau des fontaines Saint-Pey et Conteau. Les travaux de terrassement mirent au jour, à cette occasion, des parements de murs et un sol mosaïqué qu’on utilisa comme parois et fond du lavoir, sans y attacher plus d’importance1.
En 1873, l’Abbé Delpeyrat curé de Montcaret notait que l’emprunt de terre effectué près du bourg dans le but de niveler le terrain où l’on était en train de construire la gare avait mis au jour un “tombeau” et des “fours à poteries”2.
En outre le fossoyeur, lors du creusement des tombes dans le cimetière situé autour de l’église, atteignait souvent des mosaïques ou ramenait des monnaies et des fragments de céramiques3.
Le cimetière situé en plein bourg autour de l’église, et devenu trop étroit, fut désaffecté en 1920. Pierre-Martial Tauziac, habitant de Montcaret, connaissait l’intérêt de ce secteur, du point de vue archéologique grâce, entre autre, à l’abbé Delpeyrat, qui l’avait sensibilisé à l’archéologie, alors qu’il était son enfant de chœur4. Il demanda l’autorisation d’effectuer un sondage qui fut réalisé en 1921 et qui confirma la richesse du site. Pierre-Martial Tauziac poursuivra les fouilles jusqu’en 1939 sous le contrôle de Jules Formigé, architecte en chef des Monuments Historiques. L’intérêt des vestiges fit classer le site au titre des Monuments Historiques dès le 5 mars 1926.
Un plan général des travaux a été dressé par M. Cocula, architecte départemental, et publié dans la communication de synthèse faite par Jules Formigé5.
De 1947 à 1951, Pierre Grimal, alors directeur de la circonscription archéologique, a effectué une série de sondages, au cours desquels il s’est plus particulièrement attaché à préciser la chronologie relative des structures de la partie ouest du site6.
Ultérieurement, divers sondages réalisés dans l’église ou conséquences de travaux d’aménagement des abords du site ont permis de préciser l’extension des vestiges de cette villa.
La construction du nouvel espace muséal en 1995 a donné lieu à des opérations préventives préalables7, qui ont également apporté des précisions quant à l’extension du site et permis la redécouverte de vestiges mis au jour par Pierre-Martial Tauziac et ré-enfouis lors de la construction du premier bâtiment de protection de la salle cruciforme et de ses mosaïques.
Une étude concernant l’aménagement extérieur du site pour une meilleure présentation au public a été réalisée par C. Balmelle en 19958. Ce programme de mise en valeur était, cependant, subordonné en partie à un échange de terrains entre la Municipalité et l’État. La Municipalité aurait alors fait don d’une partie du chemin rural, qui passe devant l’église, afin que le site archéologique ne soit plus formé de deux parties mais soit constitué d’un seul tenant. En contrepartie, l’État cédait une fraction de son terrain située en partie sud du site ; espace qui devait permettre de réaliser des places de stationnement aux abords de l’église.
Enfin, dans le cadre d’un Projet collectif de recherche (PCR) intitulé La villa gallo-romaine de Montcaret et son environnement, ont été réalisés des prospections aériennes et terrestres en 1999 et, en 2002 et 2003, plusieurs sondages dans le but de comprendre comment s’articulaient entre elles les différentes structures mises au jour et reconstituées lors des restaurations/restitutions effectuées à la suite des fouilles de Pierre-Martial Tauziac. La question de reprendre, sinon des fouilles, tout au moins des sondages, s’est, en effet, posée rapidement. D’une part, les interprétations de Jules Formigé n’étaient plus suffisantes pour expliquer l’organisation du site et d’autre part, les restaurations ne permettaient pas une nouvelle lecture des structures susceptible de répondre aux questions nouvelles portant sur les établissements antiques. Cela dit, fallait-il reprendre des opérations de terrain sur un site déjà largement fouillé ? Pouvait-on en attendre des réponses satisfaisantes ? En définitive nous avons jugé qu’il fallait entreprendre ce travail sans lequel il était impossible de formuler des explications à la hauteur des problématiques nées des avancées de la recherche depuis soixante ans9.
De nouveaux sondages ont eu lieu en 2008, à l’occasion de la dépose d’un certain nombre de mosaïques qu’il fallait restaurer et, en 2010, pour tenter d’achever le programme de 2008.
Finalement, ces sondages nous ont permis de comprendre comment cet édifice s’articulait et avait évolué au cours du temps. Toutefois, il ne nous a pas toujours été possible de dater précisément ces transformations en l’absence de trouvailles de matériel archéologique, céramique ou autre, qui nous aurait autorisé à proposer des datations plus serrées pour les constructions et leurs transformations. Les datations proposées ont été réalisées sur la base de l’étude architecturale des vestiges et des comparaisons que l’on a pu faire avec d’autres édifices de plan identique.
Nous avons, par ailleurs, cherché la place que Montcaret pouvait avoir au sein des autres habitats connus de la région. Nous avons comparé les structures retrouvées à celles de ces établissements et rapproché les éléments communs à toutes ces résidences.
En ce qui concerne la collection Tauziac, sa constitution est, comme nous l’avons vu, hybride. Elle a été commencée bien avant les fouilles de la villa, puisque nous savons, par Pierre-Martial Tauziac lui-même, qu’elle débuta, à l’âge de dix ans, par l’échange avec un camarade de classe, d’une hache néolithique contre le chocolat de son goûter10. On ne connaît, malheureusement, pas la provenance de toutes les pièces. On la possède pour certaines, quand elles sont le résultat d’affouillements personnels sur le territoire de la commune ou de dons effectués par des habitants de Montcaret et des alentours. Ceux-ci, en effet, connaissaient l’intérêt porté par Pierre-Martial Tauziac à ce type de matériel et lui apportaient les trouvailles qu’ils pouvaient avoir effectuées au cours de travaux, agricoles ou autres.
Enfin, il est manifeste que des objets ont des provenances plus, voire, très éloignées, et même que certains ensembles, comme un petit trésor monétaire, ont été, selon toute vraisemblance, achetés.
Il n’a donc pas été toujours facile d’attribuer tel ou tel objet aux fouilles de la villa et il a fallu, pour chacun, considérer la cohérence avec l’ensemble des matériels.
Pour nous aider nous avons, toutefois, disposé des carnets de notes de Pierre-Auguste Conil, qui fut président de la Société historique et archéologique du Libournais et secrétaire de la Société archéologique de Bordeaux. Ce dernier passait régulièrement sur le site, à l’occasion des fouilles de Pierre-Martial Tauziac, réalisait des croquis, des dessins et portait ses réflexions sur ses carnets, qui nous sont parvenus. Toutes les découvertes n’y figurent vraisemblablement pas, mais nous sommes, au moins certain que ce qui y est présenté provient des travaux effectués sur la villa. Ce qui vaut, en particulier, pour des pièces qui ont, aujourd’hui, disparu.
C’est pourquoi, nous exposons dans cet ouvrage, outre une recherche sur les vestiges de l’établissement antique, une étude pour resituer ce dernier dans le temps et son environnement, à l’aide des éléments de la collection Tauziac, qui nous ont paru pouvoir éclairer ces phénomènes, et des prospections aériennes et terrestres réalisées.
Notes