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Du monde en miniature à la miniaturisation du monde : les figurants dans les œuvres des « petits » naturalistes (Alexis, Méténier)

En 1889, André Antoine met en scène au Théâtre Libre la pièce d’Edmond et Jules de Goncourt intitulée La Patrie en danger. Il y met en application les théories qu’il a exposées au mois de juillet 1888 dans les pages du Temps à propos de la mise en scène des foules. Répondant à Sarcey et à Claretie, qui commentaient l’usage des foules sur scène à partir du modèle de la troupe des Meininger et déploraient que les foules empiètent sur l’action, Antoine s’enthousiasmait pour le travail effectué par cette troupe, particulièrement dans sa capacité à produire « des groupements d’une vérité extraordinaire1 ». Antoine appréciait notamment la capacité des Meininger à diviser la foule en groupes et individus n’exécutant pas toujours les mêmes gestes et ne prononçant pas nécessairement les mêmes paroles. Si l’opposition de Sarcey et Claretie s’inscrit dans l’idée qu’il existe au théâtre une concurrence entre le texte et l’action, le voir et l’entendre, ainsi que l’a étudié Marianne Bouchardon2, Antoine, lui, veut réconcilier ces deux pôles et faire de la mise en scène un prolongement du texte. Réfléchissant à la question des foules, Antoine développe ainsi une pensée de la figuration qui implique d’y porter une attention particulière, depuis son recrutement jusqu’à sa mise en scène. Ainsi que l’a très précisément étudié Simona Montini, ce traitement des foules au Théâtre Libre s’inscrit historiquement dans le développement de la théorisation de la notion de peuple et recouvre des enjeux esthétiques et dramatiques qui font que désormais les figurants « font partie d’un dessein unitaire et cohérent, incluant l’écriture dramatique, le jeu des acteurs et la construction de l’espace scénique3 ». André Antoine revendique donc une attention accrue portée à la figuration dans la mise en scène de pièces qui présentent de grandes figurations.

Nous souhaiterions ici envisager cette question de la figuration théâtrale sous l’angle de l’adaptation de romans. La Patrie en danger est certes un laboratoire pour Antoine, mais il s’agit avant tout d’une pièce de théâtre conçue pour la scène, même si les codes du drame historique y sont parfois mis à distance au profit d’une forme de « statisme », comme l’a montré Sophie Lucet4. Les foules qu’on y trouve s’inscrivent donc dans cette esthétique théâtrale et si Antoine choisit de remplir la scène de figurants – Edmond de Goncourt assistant à une répétition rapporte qu’« il y avait aujourd’hui 80 figurants, Antoine en veut 200 à la première5 » –, il part bien d’un texte dramatique écrit comme tel. La question de la transposition des figurants présents dans les romans, des Goncourt notamment, qu’adapte Antoine au Théâtre Libre, ou qui sont adaptés sur d’autres scènes, pose davantage de problèmes. En effet, si l’on trouve énormément de figurants·es – c’est-à-dire des personnages plus que secondaires, anonymes, apparaissant à l’arrière-plan de l’intrigue et ne prononçant presque pas de paroles, ou alors des paroles non singularisantes – dans les romans des Goncourt, leur présence n’est pas, comme généralement au théâtre, groupée dans une scène ou un acte, mais plus diffuse. Les figurants·es apparaissent ainsi à l’arrière-plan le temps d’une description plus ou moins longue qui vient constituer le milieu dans lequel évoluent les personnages principaux et secondaires. Ils n’évoluent pas toujours en groupes mais sont parfois individualisés. L’adaptation théâtrale dans un espace restreint et soumis à des impératifs économiques implique donc des choix scéniques qu’il nous faut interroger. Les figurants·es, dans les romans, sont notamment utilisés comme des « effets de réel6 », et à ce titre peuvent avoir une forme de gratuité qui a un coût au théâtre. Ils permettent également de donner une échelle particulière au monde représenté dans les romans, échelle peut-être difficilement transposable sur scène. Derrière le personnel romanesque nommé existent ainsi des centaines, voire des milliers d’anonymes qui approfondissent la représentation et donnent, en miniature, une image de la société et dont le nombre hyperbolique est bien sûr impossible à reprendre au théâtre. Les romans de Flaubert, des Goncourt ou de Zola, qui comptent donc souvent plus de mille occurrences de figurants·es, semblent ainsi faire pendant, mais à une autre échelle, au projet de réflexion sur la figuration que porte le Théâtre Libre, ou du moins son directeur, et qui consiste à vouloir atteindre une forme de « vérité » dans la représentation. Cependant, les moyens diffèrent et pour le dire caricaturalement, le coût du papier et de l’encre nécessaires au déploiement de ces centaines de figurants·es n’est pas le même que celui de la rémunération d’une figuration nombreuse, tout comme l’espace de la page et de l’imagination sont plus souples et extensibles que celui d’une scène de théâtre. De plus, les adaptations des romans ne sont pas toujours réalisées par les auteurs eux-mêmes et sont souvent confiées à des auteurs proches du naturalisme, dont la proximité avec ce courant leur a valu le qualificatif de « petits naturalistes ». Proches de Zola, de Flaubert ou des Goncourt, ces auteurs – Paul Alexis, Oscar Méténier, Jean Ajalbert, pour ne citer qu’eux – entendent reprendre les grands thèmes du naturalisme, selon des modalités qui leur sont propres, souvent jusqu’à la parodie, voire la caricature, ainsi que l’a étudié Marie-Astrid Charlier à propos de Céard, Caze et Alexis7. Leur lecture et leur adaptation des romans n’accordent donc pas nécessairement la même place à la figuration que celle qu’elle prenait initialement.

Que se passe-t-il donc quand ces « petits naturalistes » adaptent leurs modèles ? Que conservent-ils des romans ? Nous souhaiterions ici interroger le rapport des petits naturalistes aux auteurs qu’ils prennent comme modèles en nous concentrant sur la question, a priori mineure, voire de détail, de la figuration. Si les figurants prolifèrent dans les romans des Goncourt et de Zola, qu’advient-il d’eux dans les adaptations théâtrales ? Les figurants constituent-ils un marqueur assez fort de l’esthétique naturaliste pour qu’il soit réemployé par la seconde, voire la troisième, génération ? Les petits naturalistes continuent-ils à vouloir faire rentrer la société dans sa diversité, « les basses classes8 » des Goncourt, « l’humanité9 », voire « la vie10 » dans leurs œuvres, ou procèdent-ils au contraire à une réduction d’échelle dans la représentation ?

Afin de proposer un commencement de réponse à ces questions, nous nous intéresserons à deux petits naturalistes, Paul Alexis et Oscar Méténier, qui ont collaboré à l’adaptation de romans des Goncourt. Nous envisagerons d’abord la question des figurants·es au théâtre à partir des adaptations des romans à la scène, prioritairement au Théâtre Libre. Puis, après être passée du roman au théâtre, nous reviendrons au roman afin d’étudier le traitement fait par Paul Alexis et Oscar Méténier des figurants·es dans deux œuvres romanesques qui revendiquent, pour l’une, Madame Meuriot, un héritage flaubertien, pour l’autre, Madame la Boule, un héritage goncourtien.

De la prolifération à la condensation : raréfaction de la figuration du roman à la scène

Dans les romans, c’est bien à la constitution d’un arrière-plan « réaliste » que participent les figurants·es. Il apparait en effet logique que les lieux publics dans lesquels passent les personnages ne soient pas des espaces vides. Mais il n’est pas évident de transposer cette logique sur une scène théâtrale, en témoigne le modèle fourni par Edmond de Goncourt lorsqu’il adapte Germinie Lacerteux au théâtre de l’Odéon, le 18 décembre 1888. La pièce présente en effet une réduction drastique du personnel figurant. Si l’on compte environ 900 occurrences de figurants·es dans le roman11, la didascalie initiale de la pièce n’en fait apparaître aucun. Leur présence est à déceler au sein des tableaux, dans des didascalies externes et internes qui font surgir au troisième tableau, lors de la scène du bal de la Boule Noire quelques utilités anonymes : un petit voyou, une gamine, un garde de Paris et un individu, « plusieurs femmes », « deux femmes », « le bal »12 mentionnées dans des didascalies ; au huitième tableau qui se joue « dans une rue du quartier Saint-Georges13 » : le conducteur de cheval de l’omnibus, un sergent de ville et « un rassemblement14 » peu caractérisé. Enfin, l’épilogue au cimetière de Montmartre voit apparaître à l’arrière-plan « un ouvrier, caché par les croix et creusant une nouvelle tranchée15 ». En réduisant le nombre de scènes jouées dans un espace public, l’auteur évite en partie la question de la figuration. De même, en ne mentionnant pas explicitement la figuration dans la didascalie initiale, il délègue au metteur en scène le choix de remplir ou non les quelques scènes qui peuvent en nécessiter. La présence d’une figuration importante ne semble donc pas, si l’on s’en tient à ces observations, un impératif pour Edmond de Goncourt. Sa propre démarche d’adaptation, qui se dispense d’une figuration foisonnante autorise dès lors des adaptations semblables de la part d’autres auteurs.

Ainsi, lorsque Paul Alexis et Oscar Méténier adaptent Les Frères Zemganno au Théâtre Libre, la figuration se voit réduite et condensée. Patrick Besnier, dans l’édition des Souvenirs d’Antoine, rappelle « l’échec16 » de l’adaptation des Frères Zemganno, créée le mardi 25 février 1890. La pièce est jugée incompréhensible, notamment par la critique, et se caractérise par sa brièveté puisqu’elle « durait trois quart d’heures17 ». C’est l’aspect étrangement bref et décousu de la pièce qui retient l’attention de la critique et non pas tant la mise en scène. À peine Sarcey relève-t-il que la mise en scène d’Antoine est « pleine d’adresse » et que c’est « bien réglé »18. D’un point de vue matériel, on passe d’un roman de 375 pages format in-18 dans son édition originale à une pièce de 64 pages in-12, ce qui implique quelques coupures. Comme le rappelle Catherine Dousteyssier-Khoze dans l’édition qu’elle donne du roman : « La pièce occulte toute la première moitié du roman pour se concentrer sur la préparation du tour des deux frères et débute dans le gymnase des frères Bescapé, aux Ternes19. » Sur les trois tableaux, un seul, le deuxième, se joue dans un espace public favorable à l’apparition d’une figuration importante. La didascalie initiale annonce : « Spectateurs et spectatrices, clowns, écuyers, écuyères, machinistes et garçons d’écurie20 ». Ces figurants et figurantes apparaissent au deuxième tableau, à la fois suggérés par les bruits qui viennent de la scène, « un bruit d’applaudissements21 », puis incarnés. De même, surgit dans ce tableau « la foule22 ». Le point culminant de l’intrigue voit ainsi la scène se remplir de figurants·es, et donc une mise en accord de l’action et de la mise en scène. Comme pour La Patrie en danger, la mise en scène de la figuration s’incarne dans « une foule » qui apparait dans un tableau (ou acte). La figuration semble donc être envisagée comme un effet qui doit fonctionner par concentration et non comme une décoration qui pourrait alors apparaître à différents moments. En outre, le roman Les Frères Zemganno concentre la majeure partie de la figuration dans les spectateurs qui assistent aux différentes représentations mises en scène dans le livre. Paul Alexis et Oscar Méténier n’ont donc pas ici une sélection très compliquée à faire parmi la profusion de figurants·es présents dans l’ouvrage, et prennent naturellement les scènes de foules, ils captent l’essence de la figuration dans le roman.

Ce procédé qui vise à concentrer la figuration dans un tableau ou un acte est également présent dans La Fille Élisa. Pour cette pièce en trois actes créée le 26 décembre 1890 et adaptée par Jean Ajalbert, la correspondance d’Antoine garde la trace d’une demande faite à Derenbourg, directeur des Menus-Plaisirs où la pièce devait être représentée :

Je spécifiais que Derenbourg nous assurerait tous les soirs les soixante mêmes figurants de nos représentations & que, dans aucun cas, (car je connais les mœurs des Menus-Plaisirs) on n’en retirerait un seul23.

Le chiffre précis de « soixante » et l’exigence d’Antoine indiquent l’importance de la figuration dans la mise en scène. Ces figurants·es devaient notamment être utilisés pour l’acte II dont la didascalie, par l’énumération, indique la variété et la profusion : « La scène est à la cour d’assises, un jour de cause célèbre ; de la foule, stagiaires, jeunes femmes, vieux messieurs ; – des fauteuils derrière les conseillers ; au lever du rideau, – reprise de l’audience24. » La didascalie de la deuxième scène de l’acte précise les actions qui doivent être effectuées par la figuration :

Un brouhaha, comme un entracte de théâtre… Dans la salle, les gens se mettent debout, s’étirent, se saluent de loin des avocats, des gardes, des journalistes sortent, vont et viennent de la salle au prétoire… Des journalistes à leur banc continuent d’écrire… Un municipal s’accote à la table des pièces à conviction… Des paroles s’échangent au milieu des allées et venues jusqu’au moment où la salle un peu désemplie, des groupes se forment25

La figuration telle que décrite dans cette didascalie met en application l’ambition d’Antoine d’émuler les Meininger en faisant effectuer différentes actions aux figurants·es d’une même scène. On retrouve le procédé qui consiste à faire coïncider point culminant de l’action et figuration nombreuse sur scène. La réponse du Théâtre Libre à la question de la figuration, telle qu’elle se formule dans le cas de l’adaptation de romans au personnel romanesque non limité est donc de produire un effet de concentration qui permet également de souligner le moment le plus dramatique de l’intrigue : la chute de Nello hors scène, le procès d’Élisa. C’est ainsi que du roman au théâtre, les dispositifs s’inversent. Si dans le roman la figuration jouait un effet de réel, au théâtre, elle crée un effet spectaculaire26. Contrairement à la figuration diffuse qui viendrait former un « milieu », les pièces présentent un acte rempli d’un grand nombre de figurants·es et optent pour des scènes dans lesquelles la figuration est dispensable.

L’adaptation de Charles Demailly par Alexis et Méténier créée au Gymnase-Dramatique le 19 décembre 1892 module le procédé de concentration en un acte. Sur les cinq actes que comporte la pièce, deux présentent une grande figuration : le premier dans lequel se déroule un bal et qui requiert donc des « invités et invitées » et le dernier qui se passe au café-concert et implique la présence de « spectateurs et spectatrices »27. La pièce prenant de grandes libertés avec le roman – le dernier acte étire ce qui ne constitue qu’un passage dans un court chapitre – il est difficile de procéder à une véritable comparaison. La pièce s’ouvre et se termine sur des actes requérant une figuration importante. Il ne s’agit plus ici de concentrer mais d’encadrer, en créant deux points culminants d’un point de vue visuel qui correspondent à des étapes importantes de l’intrigue : la rencontre entre Charles et Marthe et le choc final de Charles entendant Marthe sur la scène d’un café-concert. Le collectif des figurants·es se fait témoin de la rencontre initiale et de la fin du personnage principal, jouant en cela un rôle proche de celui que pouvait jouer le chœur antique. La figuration permet également, notamment dans le dernier acte où sont présents des « spectateurs et spectatrices », de créer « une continuité entre la scène et le parterre » semblable à celle qu’observe Simona Montini à propos de la mise en scène de La Fille Élisa dans laquelle « les spectateurs du Théâtre Libre deviennent les spectateurs du procès. Malgré lui, le public est donc impliqué dans la figuration28. » Dans Charles Demailly également, par un effet d’identification et de mise en abyme, le public du café-concert représenté se fait l’égal du public du Gymnase-Dramatique. La figuration est donc à nouveau circonscrite à des actes et non diffuse, elle est également collective et non individualisée et se trouve limitée par la prédominance de nombreuses scènes d’intérieurs privés, sélectionnées sans doute pour les mêmes raisons économiques, comme cela a pu être le cas dans d’autres adaptations. C’est notamment ce qui se produit pour l’adaptation de La Fille Élisa. Ajalbert évoque dans une lettre à Edmond de Goncourt la volonté de Derenbourg de « diminuer la figuration29 » qu’il refuse de prendre en charge et veut faire rémunérer par Antoine, comme le rapporte ce dernier dans une autre lettre à Goncourt datée de janvier 189130. Entre limitation de l’espace et contrainte budgétaire, la présence d’une figuration nombreuse et diffuse reste difficile à mettre en œuvre au théâtre.

L’adaptation des romans se heurte donc à des impératifs non esthétiques, et les petits naturalistes, Méténier et Alexis, s’ils font des choix, les font aussi en hommes de théâtre. Cependant, hommes de théâtre, ils sont aussi écrivains de nouvelles et de romans, et c’est donc à leurs romans que nous nous intéresserons afin de voir ce qu’ils retiennent des figurants·es.

Un usage petit naturaliste du figurant de roman : restriction des bornes du monde inconnu

Dans leurs romans, Flaubert, les Goncourt et Zola organisent la présence diffuse des figurants·es. Si quelques grandes scènes viennent concentrer les foules, les romans sont également rythmés par des descriptions de décors remplis d’anonymes qui font exister un monde à l’arrière-plan de l’intrigue et créent un effet de perspective. Nous parcourrons deux romans parisiens afin de proposer l’étude de cas d’un usage petit naturaliste de la figuration : Madame Meuriot : mœurs parisiennes de Paul Alexis paru en feuilleton en 1890 et édité en volume en 1891 et Madame la Boule « roman de mœurs parisiennes » d’Oscar Méténier, paru en feuilleton en 1889 et édité en volume en 1890. Dans les deux romans, la présence de dédicaces à Flaubert pour Alexis, à Goncourt pour Méténier, établit explicitement une filiation avec une esthétique littéraire réaliste et naturaliste. Tout comme le fait l’inscription dans le genre du « roman de mœurs », renforcée par les nombreux hypotextes réalistes et naturalistes aisément identifiables, de Flaubert aux Goncourt en passant par Zola mais également Eugène Sue, voire Sade pour Madame La Boule.

Les romans dont Alexis et Méténier s’inspirent foisonnent donc de figurants·es. Ainsi, l’on dénombre31 quelque 2400 occurrences dans L’Éducation sentimentale et environ 900 dans Germinie Lacerteux. On trouve moins de figurants dans Madame Meuriot et Madame la Boule32. Cette raréfaction de la figuration est à mettre sur le compte d’un « tarissement du descriptif33 » identifié par Marie-Astrid Charlier. Si, comme elle l’a montré, les petits naturalistes reprennent les thèmes naturalistes tout en les infléchissant, ce qui fait la spécificité de l’esthétique naturaliste semble être mis de côté : on trouve assez peu de descriptions chez les petits naturalistes. Or, les descriptions sont le milieu naturel des figurants·es et leur raréfaction peut signifier par conséquent la diminution de la population figurante.

La principale différence n’est cependant pas tant quantitative que qualitative. Ce qui diffère, c’est le mode de gestion du personnel figurant qui voit disparaître massivement les figurants·es anonymes et inconnus. Dans les romans d’Alexis et de Méténier un rapport de proximité est d’emblée établi avec les figurants·es qui se trouvent scrutés ou écoutés par les personnages et qui leur sont souvent potentiellement connus. Cette raréfaction des inconnus opère une restriction du monde représenté, en accord avec la localisation des intrigues. Dans Madame Meuriot, les espaces se ferment constamment, qu’il s’agisse de l’immeuble, de la pension dans laquelle se rencontrent les époux Meuriot, du square où se retrouvent les pensionnaires âgés, ou bien de l’immeuble dans lequel Madame Meuriot loue une garçonnière pour Gustave. Même lorsque Madame Meuriot et Gustave regardent par la fenêtre de la garçonnière, c’est dans « la rue Léonie. Une vraie rue de province, où il passait peu de monde » et les figurants observés deviennent connus par habitude : une « femme entretenue », un « vieillard très propre décoré » qui lui rend visite, les « ouvrières »34 de l’atelier de blanchisserie. Les décors ont tendance à se dépeupler, comme pour se dispenser d’une description, à l’image de la gare : « Cela, sur le trottoir du débarcadère, devenu désert, car les derniers voyageurs de l’express venaient de filer, et aux yeux de l’employé impatient de refermer “la sortie” derrière eux35 ». On trouve encore cependant quelques rapides descriptions qui font exister des figurants·es potentiels. Ainsi, à l’ouverture du roman, et dans l’espace clos de l’immeuble sont aperçus « les gros bras rouges d’une bonne », et sont entendus « une voix de contralto », « d’autres pianos ». L’espace s’ouvre un instant pour faire entendre « par-dessus la maison, par-dessus tout le quartier, […] un large ronflement, aux profondes nappes sonores, fait de mille bruits, à travers lesquels la proximité du boulevard Montmartre me[t] comme l’écoulement perpétuel d’un fleuve de voitures36 ». L’inconnu est mis à distance notamment par son appréhension auditive qui l’empêche d’acquérir l’épaisseur d’une figure. De plus, une scène topique d’aube parisienne opère une sorte de feuilletage intertextuel :

Très loin, parfois, le roulement d’un fiacre, quelque murmure de voix éméchées, un rire de fille. Puis de grands silences retombaient sur le quartier, paisible enfin, mais pas pour longtemps. Des voitures de maraîchers allant aux Halles, commencèrent à passer. C’était aussi la descente des balayeurs ; et une nuée de marchands de journaux devaient se rendre rue du Croissant, pour « attendre le papier37.

Des réminiscences se jouent dans ce passage qui viennent thématiser des intertextes naturalistes par le biais des figurants·es entendus : la mention des voitures de maraîchers allant aux Halles rappelle la description du petit matin aux mêmes Halles dans Le Ventre de Paris de Zola, et le lever des travailleurs parisiens évoque un autre lever observé par Anatole Bazoche dans Manette Salomon des Goncourt :

Dans la rue s’éveillaient les premiers bruits de la grande ville. Le travail allait à l’ouvrage, les passants commençaient. […] il y avait dessous des ombres de misère et de sommeil, des gens des halles, des ouvriers de cinq heures, des silhouettes sans sexe qui balayaient, tout ce peuple du matin qui passe, au pied du plaisir encore allumé […]38.

Ces quelques rapides passages font donc exister des figurants inconnus dans le roman d’Alexis. On en trouve plus rarement chez Méténier, qui lui aussi se prête à l’écriture topique de Paris la nuit. Sont ainsi aperçus, « rue de la Chapelle », à « une heure avancée » alors que la rue est « presque déserte », « un ivrogne », « un fiacre », « les derniers tramways de la ligne du square Monge à la Chapelle39 ».

La raréfaction des descriptions se fait plus importante dans Madame La Boule. Si l’on trouve encore quelques descriptions de figurants·es anonymes, il s’agit souvent de scènes remarquables lors d’événements particuliers. Ainsi lors de la fête du dix-huitième arrondissement, le narrateur mentionne la présence de différents figurants : « la foule », « les régisseurs », « les pitres », des « instrumentistes », le « public40 ». Certaines scènes n’entraînent étonnamment pas de descriptions. Les promenades de Jeanne et de son amant Jules dit « la Boule » aux fortifications sont résumées en une seule phrase et font l’économie de la description de la population qui s’y trouve. Tout au plus, et filtrée par l’opinion du personnage, a-t-on un aperçu des promeneurs·euses des Champs-Élysées où il y a « trop beau monde et de trop belles toilettes41. » Plusieurs scènes qui entrent en écho avec des scènes goncourtiennes – une scène au palais de justice, une scène dans un bal public – ne donnent lieu à aucune description fouillée des figurants·es qui y évoluent, comme si le milieu ne comptait plus tant que l’intrigue. De même, dès que des figurants sont introduits, ils sont reliés aux personnages de façon explicite ou pris en charge par le narrateur qui traduit leurs pensées et en fait donc des personnages focalisants, ce que font très rarement Flaubert, les Goncourt ou Zola. Les « commères » de l’immeubles sont ainsi « déçues42 » lors d’une descente de police qui se passe sans esclandre. Le « public » d’un café-concert reconnaît au discours direct Jeanne lorsqu’elle monte sur scène : « plusieurs l’avaient reconnue. – C’est une enfant de la Chapelle… j’vous dis que c’est la fille au père Rousselet 43». On ne croise plus d’ombres impressionnistes qui se déplacent dans les rues de Paris, les « ombres44 », quand elles sont mentionnées, se révèlent toujours être des personnages menaçants rencontrés précédemment. En outre, le monde est explicitement présenté comme connu, à partir du moment où l’héroïne, Jeanne, entre dans l’univers de la prostitution et doit donc être en mesure de déchiffrer le monde qui l’entoure. La jeune fille bénéficie de guides qui lui font connaître la topographie parisienne de la prostitution. Dès lors, toutes les figurantes potentielles que sont les prostituées évoluant dans l’espace parisien deviennent des collègues et les passants inconnus se voient transformés en clients potentiels qui tentent de raccrocher Jeanne ou auxquels elle adresse des regards. Les restaurateurs et autres cabaretiers deviennent également complices des prostituées auxquelles ils réservent des tarifs spéciaux. Une grande partie du fonds de possibles figurants·es se voit ainsi employé et intégré à un réseau de connaissances des personnages principaux. Si tous·tes n’accèdent pas à une identité, une typification est cependant opérée et un rapport établi qui participent à la progression de l’intrigue. Cela entre en cohérence avec le rythme narratif adopté qui enchaîne les événements et procède donc à l’économie de temps morts ou de descriptions étendues, dans une esthétique proche de celle du roman populaire. Les descriptions que l’on pourrait dire « neutres » de figurants anonymes et inconnus servant principalement à constituer un milieu, voire s’affranchissant d’un but narratif explicite ainsi que cela a pu être reproché à Flaubert lors de la parution de L’Éducation sentimentale45, sont très limitées. L’écriture semble ainsi viser une forme d’efficacité qui n’est pas sans rappeler les impératifs théâtraux. En effet, sur scène peu de gratuité et chaque personnage doit rentrer dans un rôle précis, ne serait-ce qu’en raison d’impératifs économiques. Méténier et Alexis écrivent donc leurs romans en hommes de théâtre et ne semblent pas reprendre de façon aussi développée les longues descriptions de leurs modèles.

Ainsi donc, le monde représenté se rétrécit. Le « tarissement du descriptif46 » qui limite le foisonnement de la figuration a plusieurs conséquences. Tout d’abord, l’absence d’inconnu et d’inexploré dont les figurants·es permettaient d’inscrire la trace entraîne une « condensation » de la représentation qui se trouve privée de perspective. Dans le même temps, les figurants inconnus saillent d’autant plus que leurs apparitions sont rares. C’est ce que l’on perçoit notamment dans le feuilletage intertextuel des représentations topiques du Paris nocturne ou matinal. Les textes deviennent presque des palimpsestes, des pastiches ou parodies pour revenir à l’analyse de Marie-Astrid Charlier. De la même façon que la scène de théâtre limite le foisonnement des figurants·es qu’on trouvait dans les romans, le cadre du roman petit naturaliste vient restreindre la représentation de la société et finalement limiter la dimension naturaliste et réaliste de l’esthétique mise en œuvre. Cela entraîne une modification de l’échelle du monde représenté qui se réduit, voire se miniaturise. Il ne s’agit plus ici de proposer d’œuvre-monde, même si, comme l’a noté Marie-Astrid Charlier à propos de Paul Alexis, ce modèle est « toujours présent en filigrane47 ». Le roman prend l’échelle du quartier, si ce n’est d’une partie du quartier et semble donc proposer des relations entre les personnages à cette échelle. On connait ce qu’on connait, et tout le monde peut se replacer d’une façon ou d’une autre dans un espace qui laisse peu de place à l’inconnu ou à l’inexploré. C’est particulièrement le cas dans Madame la Boule puisque Jeanne et la Boule ont constamment conscience d’être reconnus et reconnaissables et vont jusqu’à donner un faux point d’arrivée au fiacre qui les mène dans un autre quartier afin qu’on ne puisse pas les retrouver. Dans une moindre mesure, Madame Meuriot adapte également ses trajets afin d’éviter d’être reconnue lorsqu’elle se rend dans la garçonnière. La miniaturisation de la représentation se fait donc reflet d’un rapport spécifique à Paris, qui ne prend pas pour modèle le Paris dont des auteurs comme Flaubert, Zola ou les Goncourt nous proposent l’image et dans lequel prime l’anonymat. En outre, dans les deux romans, la limitation du descriptif entraîne un infléchissement vers une poétique plus proche de celle qu’Alexis et Méténier pratiquent au théâtre48 que de celle du roman telle que la pratiquent Flaubert, Zola et les Goncourt. Privé des échappées que permettent les figurants·es inconnues et anonymes, l’espace romanesque, à l’image de la scène théâtrale, se clôt sur lui-même et se heurte par là-même à ses limites.

Notes

  1. André Antoine, Lettre à Francisque Sarcey, « Chronique théâtrale », Le Temps, 23 juillet 1888.
  2. Marianne Bouchardon, « Contre le “bric-à-brac’’ : réticences et résistances de la critique dramatique (1870-1900) », Romantisme, vol. 188, 2, 2020, p. 39-48.
  3. Simona Montini, « La foule au Théâtre Libre d’André Antoine (1887-1894) : marée sournoise ou théâtre vivant ? », Cahiers FoReLLIS – Formes et Représentations en Linguistique, Littérature et dans les arts de l’Image et de la Scène, La Foule au théâtre, I. La foule : un personnage ? Quel personnage ? [https://cahiersforell.edel.univ-poitiers.fr:443/cahiersforell/index.php?id=275]
  4. Sophie Lucet, « La Patrie en danger, de Jules et Edmond de Goncourt, un drame historique à contretemps ? », Cahiers Edmond et Jules de Goncourt, 13, 2006, p. 55-76.
  5. Edmond de Goncourt, Journal. Mémoires de la vie littéraire, t. III 1887-1896, texte intégral établi et annoté par Robert Ricatte, Robert Laffont, coll.  « Bouquins », 1956, p. 241 (jeudi 14 mars 1889).
  6. Roland Barthes, « L’effet de réel », Communications, 11, 1968, p. 84-89.
  7. Marie-Astrid Charlier, « Parodies du roman de mœurs chez les “petits” naturalistes. L’épuisement d’un genre ? (Henry Céard, Robert Caze, Paul Alexis) », dans Philippe Dufour, Bernard Gendrel, Guy Larroux (dir.), Le Roman de mœurs, un genre roturier à l’âge démocratique, Classiques Garnier, coll. « Rencontres », 427, 2019, p. 203-217.
  8. Edmond et Jules de Goncourt, Germinie Lacerteux, édition d’Éléonore Reverzy, Classiques Garnier, 2022, p. 53.
  9. Émile Zola, Nouveaux contes à Ninon, Contes et nouvelles, texte établi, présenté et annoté par Roger Ripoll, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1976, p. 403.
  10. Les Goncourt rapportent un propos de Flaubert qui dit à propos de L’Éducation sentimentale qu’il aimerait que ce soit « un grand tableau de la vie », Edmond et Jules de Goncourt, Journal. Mémoires de la vie littéraire, t. I, édition établie par Robert Ricatte, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1989, p. 793 (29 mars 1862).
  11. D’après mon propre relevé.
  12. Edmond et Jules de Goncourt, Théâtre, édition critique par Michele Sollecito et Roberta De Felici, Paris, Classiques Garnier, coll. « Bibliothèque du XIXe siècle », 81, 2021, p. 362.
  13. Ibid., p. 393.
  14. Ibid., p. 397
  15. Ibid., p. 407.
  16. André Antoine, « Mes souvenirs » sur le Théâtre-libre, édition établie et annotée par Patrick Besnier, Tusson, Charente, Éditions Du Lérot, coll. « D’après nature », 2009, p. 142.
  17. Ibid., p. 142.
  18. Francisque Sarcey, « Chronique théâtrale », Le Temps, 3 mars 1890.
  19. Catherine Dousteyssier-Khoze, « Introduction », Edmond et Jules de Goncourt, Œuvres complètes, sous la direction d’Alain Montandon, t. IX, Les Frères Zemganno, édition critique par Catherine Dousteyssier-Khoze, Honoré Champion, 2012, p. 57.
  20. Paul Alexis et Oscar Méténier, Les Frères Zemganno, pièce en trois actes, en prose, tirée du roman d’Edmond de Goncourt, représentée pour la première fois au Théâtre Libre le mardi 25 février 1890, Charpentier, 1890.
  21. Ibid., p. 27.
  22. Ibid., p. 30.
  23. André Antoine, lettre à Edmond de Goncourt, Paris, vendredi (début de janvier) 18(91), dans James B. Sanders, La Correspondance d’André Antoine, Québec, Éditions du Préambule, coll. « Analyses Littéraires », 1987, p. 278.
  24. Jean Ajalbert, La Fille Élisa, pièce en trois actes, en prose, tirée du roman d’Edmond de Goncourt, représentée pour la première fois sur le Théâtre Libre le 26 décembre 1890, Charpentier, 1891, p. 30.
  25. Ibid., p. 36.
  26. Sur la façon dont les effets des dispositifs s’inversent du roman au théâtre, nous renvoyons à l’article de Marie-Astrid Charlier, « Le sceau de la pantomime. Relecture mimique et gestuelle de la littérature naturaliste », dans Éléonore Martin, Géraldine Moreau et Erico José Souza de Oliveira (dir.), « Les ailleurs du mime », Horizons/Théâtre, 16-17, 2023, p. 20-50.
  27. Paul Alexis et Oscar Méténier, Charles Demailly : pièce en cinq actes, tirée du roman de Jules et Edmond de Goncourt, représentée pour la première fois à Paris, sur le théâtre du Gymnase-Dramatique, le 19 décembre 1892, Paris, Charpentier et Fasquelle, 1893. [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1149357]
  28. Simona Montini, art. cit.
  29. Lettre de Ajalbert à Goncourt, janvier 1891, citée par James B. Sanders La Correspondance d’André Antoine, Québec, Éditions du Préambule, coll. « Analyses Littéraires », 1987, p. 278.
  30. André Antoine, lettre à Edmond de Goncourt, Paris, vendredi (début de janvier) 18(91), cité par James B. Sanders, op. cit., p. 278.
  31. Il s’agit ici des chiffres obtenus grâce à des relevés personnels et manuels n’étant donc pas infaillibles.
  32. Une comparaison proportionnelle des occurrences peut être établie en s’appuyant sur les dix premières pages des éditions Charpentier de formats similaires (in-12) : Madame Meuriot : dix occurrences de figurants ; Madame la Boule : quinze occurrences ; L’Éducation sentimentale : cinquante cinq ; Germinie Lacerteux : quarante.
  33. Marie-Astrid Charlier, « Parodies du roman de mœurs chez les « petits » naturalistes. L’épuisement d’un genre ? (Henry Céard, Robert Caze, Paul Alexis) », art. cit., p. 210.
  34. Paul Alexis, Madame Meuriot. Mœurs parisienne, Paris, Charpentier, 1891, p. 243.
  35. Ibid., p. 178.
  36. Paul Alexis, op. cit., p. 2-3.
  37. Ibid., p. 158.
  38. Edmond et Jules de Goncourt, Manette Salomon, édition établie et annotée par Stéphanie Champeau avec le concours d’Adrien Goetz, Gallimard, coll. « Folio classique », 1996, p. 171.
  39. Oscar Méténier, Madame la Boule, Paris, Charpentier, 1890, p. 56.
  40. Ibid., p. 65-66.
  41. Ibid., p. 48.
  42. Ibid., p. 9.
  43. Oscar Méténier, op.cit., p. 54.
  44. Ibid., p. 71.
  45. Cette question est traitée de façon étendue par Florence Pellegrini, « Figuration, énumération, complétion : du descriptif », Flaubert, 19, 2018. [http://journals.openedition.org/flaubert/2878]
  46. Marie-Astrid Charlier, « Parodies du roman de mœurs chez les « petits » naturalistes. L’épuisement d’un genre ? (Henry Céard, Robert Caze, Paul Alexis) », art. cit., p. 210.
  47. Marie-Astrid Charlier, « Paul Alexis naturalo-fumiste : du Cri du peuple aux Trente romans », Autour de Vallès, 51, 2021, p. 49.
  48. Jeanne Barnicaud indique d’ailleurs qu’une adaptation théâtrale de Madame La Boule fut envisagée en 1896. Jeanne Barnicaud, « Madame La Boule par Oscar Méténier (1889) », 25 mai 2020. [https://histfemtat.hypotheses.org/207]
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Pessac
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EAN html : 9791030011333
ISBN html : 979-10-300-1133-3
ISBN pdf : 979-10-300-1134-0
Volume : 33
ISSN : 2741-1818
Posté le 04/06/2025
11 p.
Code CLIL : 3677
licence CC by SA

Comment citer

Le Saux, Éva, « Du monde en miniature à la miniaturisation du monde : les figurants dans les œuvres des “petits” naturalistes (Alexis, Méténier) », in : Charlier, Marie-Astrid, Thérond, Florence, dir., Écrire en petit, jouer en mineur. Scènes et formes marginales à la Belle Époque, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, collection PrimaLun@ 33, 2025, 337-348 [en ligne] https://una-editions.fr/du-monde-en-miniature-a-la-miniaturisation-du-monde/ [consulté le 05/06/2025].
Illustration de couverture • Dessin de Raphaël Kirchner, dans Félicien Champsaur, Le Bandeau, Paris, La Renaissance du Livre, 1916.
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