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Les coutumes du Brassenx*

Paru dans : Bulletin de la société de Borda,
avec la collaboration de Jacques Poumarède, n° 371, 1978, 329-352.

Si l’on peut considérer comme à peu près établie la liste des coutumes des pays landais1, il s’en faut, cependant, qu’elles aient toutes fait l’objet d’une édition critique et il en est même, comme celles du Brassenx ou de Saint-Sever, qui sont encore inédites2.

Le Brassenx est un modeste pays de la dimension d’un canton, situé à l’écart des voies de communication, aux confins du Marsan, de l’ancienne vicomté de Tartas et de la Grande lande (fig. 1)3. Jusqu’à une époque récente, il est, d’autre part, resté un pays essentiellement rural, que l’on a parfois qualifié de Petite Chalosse4. Comme pour la plupart des pays landais, on ne sait que fort peu de choses de son histoire jusqu’à l’aube des temps modernes ; aussi, la découverte et la publication de ses coutumes qui, verrons-nous, remontent au plus tard au second tiers du XIVe siècle, revêtent-elles un intérêt que l’on peut, sans exagération, qualifier d’exceptionnel. La seule copie connue à ce jour des coutumes du Brassenx n’a jamais quitté les archives du château de Castillon, à Arengosse5 où, à la fin du siècle dernier, elles furent découvertes par l’abbé L.-B. Meyranx6. Or, le seul auteur à en avoir fait état depuis cette époque, si l’on excepte M. Gouron, auquel il sert de référence, est F. Abbadie, l’éditeur du Livre Noir et des établissements de Dax7. On pourrait s’étonner de ce qu’un spécialiste des coutumes landaises n’ait pas songé à publier les coutumes du Brassenx. Peut-être le temps lui manqua-t-il, mais il n’est pas impossible que l’état de la copie conservée à Castillon l’ait retenu dans une telle entreprise.

Fig. 1. Géographie administrative de la Grande lande et de ses bordures en 1260 (Diocèse de Dax, au nord de l’Adour). 1. Limite du diocèse. 2. Limite de seigneurie. 3. Paroisse ou annexe (La Bastide en Brassenx est postérieure à 1260). 4. Chef-lieu de seigneurie. 5. Château. 6. Castelnau (château et village). 7. Castelnau (village fortifié). 8. Pays de Brassenx. 9. Seigneurie dans le domaine du roi-duc.

Notre attention fut, une première fois, attirée sur les coutumes du Brassenx, alors que nous étudiions les possessions landaises de la famille d’Albret ; mais, c’est à la suite de la parution dans le Bulletin de la Société de Borda d’un récent article consacré au château de Castillon que notre curiosité fut à nouveau mise en éveil8. L’auteur, M. G. Dupouy, y faisait, en effet, état d’un inventaire des archives du château de Castillon qualifié, on ne sait trop pourquoi d’ailleurs, de cartulaire.

Nous sommes alors entré en relation avec ce chercheur, afin de retrouver le texte des coutumes mentionné par F. Abbadie, qui, vérification faite, était effectivement signalé dans l’inventaire. La recherche du document s’avéra, en revanche, assez ardue, car il avait été extrait de la liasse où il aurait dû être classé et, pendant quelque temps, nous avons cru qu’il était définitivement perdu. Ce n’est que grâce à la perspicacité et à la persévérance de M. G. Dupouy qu’il a été finalement retrouvé dans la bibliothèque du château de Castillon9.

Le document se présente sous forme d’un cahier en papier de 20 folios (25,5 x 18,5 cm), portant au verso du dernier folio la mention “Privilege de Brassenx”, ainsi qu’une analyse du XIXe siècle, identique à celle qui se trouve sur l’Inventaire10. Le texte, qui occupe l’ensemble du cahier jusqu’à la moitié du folio 16 r°, a été transcrit par deux copistes qui, pour autant qu’on en puisse juger d’après l’écriture, ont dû effectuer leur travail à la fin du XVIe siècle. La première écriture devient, la fatigue aidant, vite informe. À partir du folio 11 verso intervient le second copiste, dont l’écriture est de plus petit module et, au début du moins, plus régulière. Ce changement de main a entraîné un certain désordre dans la transcription, car le second copiste a commencé son travail au début du folio 12 r°, laissant en blanc le bas du folio précédent ; ce n’est qu’à la suite du folio 13 v° qu’il a utilisé ce demi-feuillet restant pour continuer ensuite son travail au folio 14 r°.

Il est manifeste que les deux copistes n’ont pris qu’un médiocre intérêt au travail qu’ils avaient entrepris ou qu’on leur avait confié. S’ils n’utilisent pas d’abréviations, en revanche, ils ne prennent pas la peine de former les lettres, estropient les mots ou ne les terminent pas et, d’une façon générale, laissent courir ou plutôt traîner la plume. Le premier copiste qui a dû transcrire un acte en latin n’hésite pas à escamoter des parties de phrases ou interprète le texte à sa façon, ce qui donne parfois des résultats assez surprenants11. Aucun des deux, non plus, n’est très respectueux du texte gascon des coutumes, passablement “francisé”, ainsi qu’on pourra le constater. D’autre part, le papier étant poreux et la plume ayant été trop chargée d’encre, l’écriture d’une face réapparaît sur l’autre. La copie des coutumes du Brassenx s’apparente ainsi aux chefs-d’œuvre d’Oïhénart, cauchemar des paléographes et c’est donc avec toutes les réserves d’usage que nous proposons aujourd’hui une transcription du texte des coutumes (fig. 2).

Fig. 2. Une page du cahier de Castillon (f° 6, recto, art. 4-6).

Aux erreurs que nous avons pu commettre, il convient bien sûr d’ajouter celles, innombrables, dont se sont rendus responsables les deux copistes du XVIIe siècle ; mais on ne saurait, de toute façon, leur imputer toutes celles que l’on peut relever sur le document de Castillon. Il s’agit, en effet, de la copie d’un vidimus, en français, fait par-devant Bernard de Bordenave, lieutenant général des Landes au siège de Dax, le 2 août 1513, et rien ne nous garantit que le greffier qui le rédigea avait la compétence nécessaire pour lire et comprendre des documents du XIVe siècle, écrits en latin ou en gascon. Ce vidimus que nous appellerons document A ne fut établi qu’au terme d’une procédure qui avait commencé le 24 mai précédent. Ce jour-là, se présentèrent à Dax, Étienne du Camp, juge de la baronnie de Brassenx, agissant au nom des autres jurats et des manants et habitants de la baronnie, assisté de Me Sans de Baffoinhe12. Ils étaient porteurs d’un “vieux et ancien instrument” contenant “plusieurs beaux estatuz et privilleges”, pour lesquels ils requéraient l’exécution d’un vidimus. Ils craignaient en effet de le perdre – ce qui se produisit d’ailleurs – “au grand préjudice et domaige a la cause publique de la dite baronye”. Si le greffier Rodrigue n’en établit l’expédition que quelques semaines plus tard, ce fut, sans aucun doute, en raison de la nécessité pour le lieutenant général de convoquer auparavant Me Bernard de Casaler, procureur d’Alain le Grand, sire d’Albret et seigneur du Brassenx13. Lors du collationnement de l’acte, le procureur fit d’ailleurs un certain nombre de réserves sur les droits de son maître et fournit un mémoire malheureusement perdu, qui fut, en même temps que sa procuration, transcrit avec le vidimus sur les registres de la sénéchaussée.

Le document qui fit l’objet du vidimus était un procès-verbal, en gascon, établi le 14 mars 1361 (n. st.) dans la ville d’Arjuzanx par Me Blaise de Potereu, notaire de la sénéchaussée des Landes, assisté de Me Arnaud deu Camp, peut-être un ancêtre du juge et jurat de 1513. Il relate la prise de possession de la baronnie de Brassenx par Arnaud Amanieu, sire d’Albret (1359-1400), à la suite du décès de son père, Bernard Aiz V (1326-1359) (Doc. B ; fol. I r°-15 v°)14. Si la copie de ce document occupe la presque totalité du cahier de Castillon, c’est qu’il contient, insérés, deux autres actes : le premier, qui fut présenté par Arnaud Amanieu aux habitants du Brassenx pour justifier de ses droits, est une lettre patente, en latin, émanée de la chancellerie anglaise, datée de Londres, le 14 juillet 1341. Il s’agit de la ratification par Édouard III de la saisine faite par le sénéchal de Gascogne en faveur de Bernard Aiz V, héritier de sa sœur Mathe, des biens-fonds, juridiction et revenus divers, naguère concédés par le roi-duc à Mathe d’Albret, en échange de sa renonciation à une partie de ses droits sur la succession de Bergerac (Doc. C ; f° 2 r°-3 v°)15. Le second document, présenté celui-là par les habitants de la baronnie de Brassenx, était une lettre patente en gascon, émanée elle aussi de la chancellerie anglaise, mais non datée et cependant scellée de cire verte sur lacs de soie blanche et verte. La lettre proprement dite n’est qu’une confirmation, par un souverain du nom d’Édouard, des coutumes et privilèges du pays de Brassenx (Doc. D I ; f° 4 v°-5 r°). À la suite se trouve le texte gascon des coutumes en 62 articles (Doc. D 2 ; f° 5-r°- 13 v°). Le schéma du vidimus recopié sur le cahier de Castillon est donc le suivant : A ; B (C) B (D I, D 2) B ; A.

L’existence de plusieurs copies, même non datées mais différant par leur contenu, permet, en général, d’établir une chronologie au moins relative des versions successives d’une coutume. Malheureusement tel n’est pas, semble-t-il, le cas pour le Brassenx ; l’acte de concession originel – si du moins il y en eut un – avait, en effet, disparu bien avant le milieu du XIVe siècle et les lettres de confirmation non datées ne font aucune allusion à la révision qui aurait pu avoir lieu à cette occasion. Cependant, en éclairant les rares documents que l’on possède sur le Brassenx au XIIIe siècle à la lumière de l’histoire des autres pays landais et en examinant avec attention le contenu des lettres de confirmation du roi Édouard et celui des coutumes, il est possible de proposer une tradition de ces coutumes assez différente, on va le voir, de celle exposée en 1361 par les habitants du Brassenx à Arnaud Amanieu d’Albret.

Quelle était la situation du Brassenx au moment où il commence à apparaître dans les textes, dans le second tiers du XIIIe siècle ? Ses limites à cette époque ne nous sont pas exactement connues, dans la mesure où le seul document qui en traite – un article des coutumes – ne peut être daté avec précision. En tout cas, celles-ci ont été rédigées avant 1361 et l’on peut estimer que s’il y eut des variations de frontières par rapport au siècle précédent, elles furent probablement minimes. Dans la première moitié du XIVe siècle, le Brassenx était, en tout cas, organisé en quatre jurades16. Il s’agissait de celles d’Arjuzanx, de celle de Morcenx et Garosse ; de celle d’Igos, Suzan et Saint-Saturnin ; enfin, de celle de Villenave, Ousse, Bézaudun et Beylongue. Cet ensemble de dix paroisses correspond approximativement à l’archiprêtré du même nom dans le diocèse de Dax, qui comprenait, en plus, les paroisses de Luglon et de Saint-Martin-d’Oney17. Dans certains de ses confins le Brassenx possédait des frontières “naturelles”. Orienté vers le bassin de l’Adour, il est drainé par le Bez, affluent de rive droite de la Midouze mais, au nord-ouest, une vaste zone de marécages le sépare de la Grande lande de Sabres et de Labouheyre, tournée vers l’Océan et drainée, plutôt mal, par la Leyre et les ruisseaux se jetant dans les étangs côtiers (fig. 3).

Fig. 3. Le pays de Brassenx au début du XIVe siècle : 1. Limite de jurade. 2. Limite de seigneurie. 3.  Limite de diocèse. 4. Limité d’archiprêtré. 5. Paroisse. 6. Seigneurie. 7. Archiprêtré. 8. Château. 10. Castelnau.

Lorsqu’il apparaît dans les actes de la chancellerie anglaise – dans les années 1241-1250 – le Brassenx est une possession du roi-duc, dans laquelle celui-ci exerce par l’intermédiaire de ses officiers l’ensemble des droits régaliens, en même temps qu’il y reçoit l’hommage des nobles. Cette situation était aussi celle des pays de Maremne, Marensin, Labenne, Gosse et Seignanx, sur la côte, des seigneuries de Labouheyre, Sabres et Laharie dans l’intérieur, ainsi que de celles de Pontonx et de Saubusse et de la prévôté de Dax, sur les deux rives de l’Adour. En fait, la presque totalité du diocèse de Dax situé entre l’Adour et l’Océan était administrée directement par le roi-duc, à l’exception de la vicomté de Tartas et de ses annexes de Lesperon, Rion et Mées et de la seigneurie de Sore qui appartenait aux Albret et peut-être de la paroisse de Mano (fig. 1). Le Brassenx s’insère donc dans un ensemble beaucoup plus vaste qui, au milieu du XIIIe siècle, constituait, au moins par son étendue, un des éléments essentiels du domaine du roi-duc18.

La situation du Brassenx au sein de ces terres landaises ne présente, par ailleurs, rien d’original. Le premier document émané de la chancellerie anglaise qui, à notre connaissance, mentionne le Brassenx remonte au 15 février 1241. Ce jour-là, le roi Henri III concéda aux boni homines d’Arjuzanx (Azjusan) qui, de son consentement, avaient fortifié (firmaverunt) le château royal de cette localité, un certain nombre de privilèges, les uns généraux “les coutumes et libertés dont jouissaient déjà les hommes de Labouheyre”, les autres propres : l’obligation pour chaque possesseur d’une maison de la ville de payer 12 d. de cens à la Saint-Michel et, pour l’ensemble de la communauté, celle de verser 54 s. de queste (questa) et 20 s. de cens19. Or, le même jour, les boni homines de Sabres qui avaient, eux aussi, fortifié le castrum de leur localité, recevaient de la même façon les privilèges et coutumes de Labouheyre et se voyaient tenus de verser au roi 8 l. 10 s. de costa et questu à la Saint-Michel et à la mi-mai, ainsi que 30 s. de cens20.

Les événements qui se déroulaient à Arjuzanx et Sabres illustrent la politique menée par le roi-duc dans les pays landais, depuis le début de son règne, politique que son fils, le prince Édouard, allait encore développer par la suite, et marquée par la construction de castra royaux, à la fois forteresses et centres de peuplement, destinés à mieux assurer la présence ducale et à contrôler la population, tout en apportant à la connétablie de nouveaux revenus. En effet, dès 1220, le roi-duc possédait des châteaux à Labouheyre et Laharie21 et, lorsque fut achevée la grave crise des années 1249-1254, le prince Édouard décida la restauration du château de Pouillon22 et la construction de ceux de Bourricos23 et d’Auribat24. Or, chaque fois que le roi-duc ou son fils entreprennent de faire édifier ou aménager un castrum, comme à Arjuzanx ou à Sabres, ils appellent des habitants du voisinage à venir le peupler et, pour attirer des colons, ils concèdent des coutumes. De tels peuplements sont attestés à Labouheyre25, Bourricos26, Saint-Geours-d’Auribat27 et Pouillon28 et les coutumes et privilèges de ces établissements sont, sinon toujours connus, du moins mentionnés29.

Mais à quoi correspondaient exactement ces castra royaux ? Bien qu’une étude approfondie du problème reste encore à entreprendre, on peut esquisser les principaux traits de ces fondations. Sur le terrain, un castrum se présente de deux façons : il peut s’agir ou bien d’une motte accostée d’un village fortifié – comme ce fut apparemment le cas à Labouheyre ou, hors du domaine royal à Sore – ou bien seulement d’une enceinte fortifiée comme à Pouillon. Le type de Labouheyre est sans doute le plus ancien et le regroupement de l’habitat autour de la motte y fut, au moins dans un premier temps, probablement spontané. Le bourg ne fut d’ailleurs fortifié qu’au XIVe siècle. En revanche, à Bourricos et Pouillon, où il n’y eut semble-t-il jamais de motte, la construction du castrum paraît avoir coïncidé avec l’implantation d’une population regroupée.

À quel type appartenait exactement le castrum d’Arjuzanx ? II convient de noter tout d’abord qu’avant 1241 il y avait selon toute probabilité une paroisse à Arjuzanx, ainsi que le suggèrent le toponyme et le patronage de saint Jean-Baptiste. D’après un document de 1289, le castrum aurait été prope Aasjuzan30. S’il n’était donc pas très éloigné du chef-lieu de la paroisse, il ne se confondait pas pour autant avec lui. Ce schéma d’un castrum, situé à une certaine distance de l’église sur un site qui présentait probablement des avantages défensifs, et tout à fait classique et se retrouve à Pouillon, à Sore ou à Labrit – ces deux derniers, castra des Albret. En ce qui concerne la typologie de l’établissement d’Arjuzanx, le document de 1241 ne précise malheureusement pas s’il s’agit d’une motte accostée d’un bourg fortifié ou seulement d’une enceinte. Si l’on prend à la lettre le texte des coutumes qui fait état à plusieurs reprises de la “ville” et dans certains articles du “castet et ville reau”31 il semblerait qu’il y ait eu à Arjuzanx, à la fois une motte “le castet” et un bourg fortifié, la “ville”. Au château proprement dit, les autres textes n’y font jamais allusion de façon explicite. En revanche, l’existence d’un bourg est attestée à la fois par le contenu de certains articles des coutumes, par un acte d’accensement d’un casal en 128932, ainsi que par le procès-verbal de prise de possession de 1361, établi in villa d’Arjusan.

Or, jusqu’à ces dernières années, il a existé à Arjuzanx un ensemble de fortifications qui étaient sans doute les vestiges du castet et peut-être du bourg. L’un d’eux, la tour de la Carreyre, est bien connu, depuis la publication, en 1928, d’une photographie exécutée au début du siècle par Félix Arnaudin33 (fig. 4). Elle était située sur la rive droite du Bez, à 150 m de la rivière, à l’est du chemin qui venait de l’église d’Arjuzanx et qui, après avoir franchi la rivière au moulin du bourg, se digeait vers Rion et Tartas (fig. 5). C’était une bâtisse carrée fort simple, de 8 m de côté, construite en garluche, composée d’un rez-de-chaussée dépourvu de porte à l’origine, ainsi que de deux étages sur plancher, avec porte au premier et fenêtre au second. La construction d’un tel édifice au cœur de la lande pouvant difficilement remonter au milieu du XIIIe siècle, nous nous sommes longtemps interrogé sur la configuration et l’emplacement du premier castrum d’Arjuzanx. Or, d’autres photographies exécutées par Félix Arnaudin révèlent l’existence, à proximité de la tour, d’une énorme motte de terre située entre la tour et la rivière (fig. 6-7)34. Il s’agit, sans aucun doute, du premier château d’Arjuzanx. L’emplacement de la ville reste problématique, mais nous sommes enclin à l’identifier avec une vaste parcelle située sur le plateau au sud-est de la tour, en bordure du chemin de Tartas35.

Fig. 4. Tour de la Carreyre, à Arjuzanx, vue du nord-ouest. Photo F. Arnaudin 1901.
Fig. 5. Situation de la tour (n° 131) et de la motte d’Arjuzanx (n° 99), d’après la minute de l’ancien plan cadastral (Arch. dép. Landes).

On ne sait que bien peu de choses sur l’histoire du castrum d’Arjuzanx, au cours du siècle qui suivit sa fondation. Il bénéficia en tout cas de la sollicitude du roi-duc : une première fois, au lendemain de la concession des premiers privilèges, le 18 juin 1243, Henri III octroya à Arjuzanx un marché chaque semaine, le jeudi et une foire deux jours durant, la veille et le jour de la Saint-Laurent36 ; puis, en 1276, Édouard Ier confirma le marché et déplaça la foire à la Saint-Jean-Baptiste, jour de la fête patronale37. Comme la plupart des possessions ducales le castrum servit aussi d’assiette à des fiefs-rentes : Henri III assigna ainsi à Bidaut de Caupenne une rente de 16 l. morl. sur les castra de Sabres et Arjuzanx (Asjusan), dont quatre sur le moulin du roi de cette paroisse38. D’autre part, en 1289, Pierre Itier, alors lieutenant du sénéchal en deçà des landes et Me P. Arn. de Vic, clerc, accensèrent à J. du Poyau, voisin d’Arjuzanx, un casal appelé Boeria castri, moyennant 8 s. morl. payables au bayle de Brassenx, à Toussaint39.

Fig. 6-7. La motte d’Arjuzanx, 6. (en bas) Vue prise de 50 m de la tour en direction du nord ; à gauche le moulin, 7. (en haut) Vue prise de la rive nord du Bez en direction du sud : à droite la tour (Clichés F. Arnaudin, Fonds de l’Écomusée de Marquèze (n° 1395, 1374).

Telle est donc l’image que les textes et l’archéologie nous donnent du castrum d’Arjuzanx, castelnau typique fondé en 1241, constitué d’une motte, puis d’une tour et d’un bourg fortifié – la ville – dont les boni homines reçurent à cette occasion des privilèges et coutumes. Une regrettable lacune dans la documentation – reflet probablement du rôle bien modeste que joua à cette époque le Brassenx – ne nous permet de jeter qu’un bien faible éclairage sur la période qui va du commencement de la guerre de Guyenne (1294) jusqu’aux débuts de la guerre de Cent ans. Il est seulement question du Brassenx à l’occasion de la concession de la baillie ou de l’assignation de ses revenus40. Ce serait, en principe, durant cette période qu’Édouard Ier ou Édouard II auraient octroyé aux habitants du Brassenx une confirmation de leurs coutumes, mais nous verrons qu’il s’agit manifestement d’un faux41. Il convient donc d’évoquer immédiatement les circonstances dans lesquelles le Brassenx entra dans le patrimoine de la famille d’Albret.

C’est de façon tout à fait indirecte que cela se produisit, à la suite du décès survenu en août ou septembre 1338 de Mathe d’Albret, veuve d’Élie Rudel, seigneur de Bergerac et sœur de Bernard Aiz V, sire d’Albret42. Mathe n’ayant pas eu d’enfant institua, en effet, son frère légataire universel. La situation politique dans le duché était alors particulièrement délicate, puisqu’à l’automne 1337 la rupture avait été consommée entre Philippe VI et Édouard III. Or, bien qu’il fût encore officiellement dans le camp français, le sire d’Albret avait, dès le 8 mai 1338, conclu avec le roi-duc une alliance secrète qu’il tardait à mettre à exécution. S’il hésitait sur le parti à prendre, c’est qu’il supputait encore les conséquences forcément graves d’un tel revirement. Le roi de France, qui soupçonnait l’existence de pourparlers entre le sire d’Albret et Édouard III, faisait d’ailleurs tout pour le retenir dans son camp. C’est sur ces entrefaites que Mathe mourut (septembre 1338). Or, une des raisons et non des moindres qui avait conduit le sire d’Albret à se tourner vers Édouard III était précisément l’expectative de l’héritage de Bergerac. Mathe n’ayant pu, au terme d’un long procès, faire valoir les droits qu’elle prétendait avoir sur les biens de son défunt époux, les avait en presque totalité cédés au roi-duc, aux termes d’un accord conclu le 8 avril 1338. C’est ainsi que la châtellenie de Bergerac et sa prévôté et le château et la ville de Montignac passèrent, nominalement pour la première, car le roi de France y avait établi un gardien, aux mains d’Édouard III. En échange, Mathe reçut des droits à Blaye, le château et la prévôté de Montendre, le manoir de Condat près de Libourne, la prévôté de Born et Mimizan, la seigneurie de Labouheyre, enfin la baronnie de Brassenx43, le tout en possession perpétuelle pour elle et ses héritiers, sauf l’hommage au roi-duc.

On comprend que, dans son traité secret avec le roi-duc, Bernard Aiz V ait fait inclure l’accord passé entre Mathe et Édouard III un mois auparavant. Si d’autres facteurs, tels que la récupération de la vicomté de Tartas à la suite du décès de son frère Guitard (janvier 1338) ont pu influencer Bernard Aiz V, il ne fait aucun doute que ce fut la perspective de recueillir la succession de Mathe qui le détermina à prendre le parti anglais. On ignore à quelle date précise le sire d’Albret prit possession du Brassenx et des autres biens dont il avait hérité de sa sœur. En effet, l’acte par lequel le sénéchal de Gascogne donna à Bernard Aiz V saisine de la succession de Mathe n’a pas été retrouvé. À cette occasion, le sénéchal apporta d’ailleurs quelques aménagements au contrat primitif d’avril 133844. La seigneurie de Montendre et la ville de Blaye étant passées aux mains des Français, il leur substitua les baillies et les terres de Pontonx, Auribat, Gosse et Seignanx dans les Landes. La prise de Blaye se situe durant l’été 1339 ; aussi, est-ce probablement au cours de l’année 1340 que le Brassenx passa aux Albret. Le document daté de Londres, le 14 juillet 1341, qui fut, en 1361, présenté aux habitants du Brassenx par Arnaud Amanieu n’est, en effet, qu’une confirmation par Édouard III de la saisine ordonnée par son sénéchal. Le sire d’Albret se fit octroyer cette lettre à l’occasion d’un voyage qu’il fit à Londres, cette année-là ; le 7 octobre suivant, il rendait d’ailleurs hommage pour le Brassenx.

Nous ignorons de quelle façon se déroula la prise de possession par Bernard Aiz ou son représentant mais, verrons-nous, il est probable que les habitants – bien qu’ils aient affirmé le contraire en 1361 – ne lui présentèrent pas les lettres de confirmation de leurs coutumes par le roi Édouard, pour l’excellente raison qu’elles n’existaient sans doute pas. Ainsi s’expliqueraient, selon nous, les excès commis par Bernard Aiz V, la confection du faux et la forme solennelle de la prise de possession faite en 1361 par Arnaud Amanieu.

C’est le 14 mars de cette année que le sire d’Albret, en tant que baron de Brassenx, se rendit à la maison communale d’Arjuzanx, où avait été convoquée la cour du Brassenx45. Il était entouré de plusieurs nobles de sa suite, Guilhem de La Motte et son fils du même nom, chevaliers, de Pierre de Labrit, son oncle, de Guillaume Raimond de Montholiu, Arnaud de Las, Arn. Guilhem de Vinholles, damoiseaux, ainsi que de Me P. d’Escoutet, bachelier en lois et Dominique deu Fazar. Les habitants du Brassenx étaient représentés par les nobles de la seigneurie, parmi lesquels Pierre, seigneur de Montholiu et Guilhem deu Soee, chevaliers, Arn. Guilhem, seigneur de Buy, Assault de Fargues, Pierre de Sancta Crotz, Arn. Guilhem Raimond de Montholiu, Espaignou, Amanieu et Pierre de Sis, Amanieu de Besaudun, seigneur d’Arosse et Pierre de Villenave, ainsi que Bernard de Lasque, damoiseaux ; à leurs côtés se trouvaient les jurats, Me André deu Fazar, Arnaud Fortaner, Me Vidal deu Fazar, Jean de Podenx, Jean deu Forsat et Jean de Morsanx assistés de notables, Jean Delau d’Arjuzanx, Guiraud deu Forsat, Perinault de Latortatz, Pierre de Lasquet et Pierre d’Arbieu, sans compter 100 à 120 personnes de la ville et baronnie. Le sire d’Albret, en tant qu’héritier de Bernard Aiz V, fit alors lire les lettres patentes du mois de juillet 1341, par lesquelles le roi-duc confirmait la concession du Brassenx à Bernard Aiz V, puis, il manifesta son intention de faire serment de fidélité aux habitants, en les requérant d’en faire autant. C’est alors que Me V. deu Fazar, avocat et juré, agissant au nom des nobles, bourgeois et habitants, après avoir remercié le sire d’Albret de sa venue et l’avoir salué, lui fit observer que son père avait, de son vivant, innové en bien des choses au mépris des coutumes de Dax et des usages de la baronnie de Brassenx. Il reprocha en particulier au défunt sire d’Albret d’avoir contraint les gens du Brassenx à faire ost et aubergade de “gens armad” et à se rendre à Casteljaloux pour combattre ses ennemis pendant quarante jours, à leurs frais, en les menaçant de les “destruire” en cas de désobéissance. Il priait donc Arnaud Amanieu de bien vouloir remettre les choses en l’état initial et de maintenir les privilèges, franchises et libertés des habitants. Il rappela, à cette occasion, que ces coutumes avaient été brûlées à l’occasion des guerres, puis confirmées par le roi d’Angleterre et en fit faire la lecture par P. d’Escotet. Les échanges de serment eurent lieu immédiatement après, le sire d’Albret précisant qu’il renonçait à toutes les innovations faites par son père, les habitants qu’ils prêtaient leur serment au nom de toutes les gens de la ville d’Arjuzanx et de la baronnie de Brassenx.

C’est grâce au procès-verbal de cette cérémonie que nous est parvenu le texte des coutumes, qu’il convient maintenant d’examiner.

La première des questions que soulève l’examen de ce texte concerne son éventuelle filiation avec les privilèges concédés en 1241 par Henri III aux boni homines d’Arjuzanx, car il ne fait aucun doute qu’il s’agit de deux documents différents.

En effet, les privilèges de 1241, mises à part les clauses concernant les redevances dues par les boni homines d’Arjuzanx, n’étaient autres que les coutumes et libertés de Labouheyre. Or, celles-ci, dans leur version de 1427, la seule connue à ce jour, se réduisent à six articles46. Même si, comme nous le verrons, il existe entre les coutumes du Brassenx et celles de Labouheyre des points communs, on ne saurait les confondre, puisque les coutumes du Brassenx ne comptent pas moins de 62 articles. Il existe, d’autre part, de sensibles différences dans la nature et le montant des redevances qui doivent être versées au roi, d’une part d’après le privilège de 1241, de l’autre d’après les coutumes. Ainsi, dans celles-ci, il n’est plus question du cens que doivent payer les détenteurs de maisons dans la ville, tandis que le montant de la taille passe de 54 s. à 10 l. morl. et celui du cens de 30 s. à 12 s. 8 d. morl.47. Enfin, nous avons vu que les foires ne furent fondées qu’en 1243 et que leur calendrier fut modifié en 1276. Or, un article des coutumes leur est consacré, qui ne pouvait figurer dans les privilèges de 1241 ; la date des foires y est d’ailleurs différente de celles attestées en 1243 et 127648.

À ces différences dans le nombre et le contenu des articles, s’en ajoutent d’autres qui ont trait à la qualité des bénéficiaires. Le nom de boni homines d’Arjuzanx peut s’interpréter de deux façons et on peut y voir, soit les représentants de la communauté qui reçoit les privilèges, soit l’ensemble de cette communauté. Pour autant qu’on puisse en juger d’après le formulaire utilisé à la même époque par la chancellerie anglaise, il ne semble pas que celle-ci ait été très rigoureuse dans ce domaine49. Quoi qu’il en soit, on ne saurait assimiler les boni homines de 1241 aux “borges habitants de nostre ville d’Arjusan et besins de nostre castet reyau, ensemble los jurats nobles et comun de nostre baronnie de Brassenx”, destinataires des lettres de confirmation du roi Édouard ou encore les confondre avec l’ensemble des “nobles, bourges, juratz et habitantz de la ville et baronnie” qui, en 1361, jurent fidélité au sire d’Albret.

Cette dernière expression que l’on retrouve dans de nombreux articles des coutumes50 semble, d’autre part, s’opposer sur le plan géographique à celle de boni homines d’Arjuzanx, qui figure dans les privilèges de 1241. Certes, dans trois des quatre premiers articles des coutumes, ainsi que dans quelques autres qui en sont proches par leur contenu, on relève des formules telles que “habitans deu territory de nostre castet et ville reau” qui suggèrent que, dans ces cas, seules étaient concernées des personnes résidant dans la ville ou tout au plus dans la paroisse d’Arjuzanx, assimilée au territoire du château. Mais, nous le verrons, ces premiers articles de la coutume figuraient probablement déjà dans une première version tirée des privilèges de 1241 dont ils sont repris51. D’autre part, à l’article 4, on relève à la mite de l’expression “toutz los habitans deudit nostre castet territory e ville reau”, la formule “ensemble totz los de nostre baronye”, selon toute vraisemblance interpolée. Il est donc probable qu’en fait, sinon en droit, les privilèges de 1241 n’aient concerné qu’une aire géographique restreinte, alors que les coutumes intéressaient, dans la plupart des cas, toutes les paroisses de la baronnie.

On ne saurait donc confondre les privilèges de 1241, dont le contenu n’est que très partiellement explicité dans la lettre d’Henri III et les coutumes du XIVe siècle : dans le premier cas on n’a affaire qu’à une demi-douzaine d’articles tout au plus, s’adressant à un petit groupe d’hommes bien déterminé qui avait fortifié le castrum d’Arjuzanx ; dans le second, à un ensemble beaucoup plus considérable d’articles s’appliquant le plus souvent à l’ensemble des habitants de la baronnie52. Cependant, ainsi que nous venons d’y faire allusion, non seulement des éléments communs sont décelables entre privilèges et coutumes, mais il apparaît que les privilèges ont constitué le noyau des coutumes, si bien qu’on peut les qualifier de première version des coutumes du Brassenx.

Nous avons vu que, dans la lettre de privilège de 1241, il était seulement fait état des “libertés et coutumes de Labouheyre”, dont le contenu n’est pas autrement explicité. Bien qu’on ne possède de cette coutume qu’une copie tardive, il n’est pas interdit d’y voir – au moins dans sa partie initiale – un texte beaucoup plus ancien, héritier en partie de celui octroyé antérieurement à 1241. Les premiers points qui y sont successivement abordés concernent : le paiement de la queste (art. I), le droit de perprise, celui d’établir des maisons, moulins, pêcheries et garennes, ainsi que l’exemption de lods et ventes (art. 2) ; l’exécution du droit de perprise (art. 3) ; l’exercice du droit de padouen (art. 4)53. Or, dans les coutumes du Brassenx les quatre premiers articles portent sur le paiement de la queste (art. I), le droit de perprise (art. 2), l’exemption de lods et ventes (art. 3), l’usage des padouens (art. 4). La ressemblance est donc frappante, mais elle est d’autant plus manifeste qu’en matière de droits de mutation, d’assiette de la queste et des franchises en résultant, ainsi que d’usage des padouens, le contenu des articles est le même dans les deux cas. Seule la perprise fait, à Labouheyre, l’objet de certaines précisions en matière de prise de posession et d’extension du droit54. D’autre part, les bénéficiaires des privilèges de 1241 sont qualifiés de boni homines, alors que ceux de Labouheyre sont à la même époque désignés sous le nom de burgenses et probi homines55. Il s’agit manifestement de la même catégorie d’individus, comme le prouvent de nombreux documents contemporains56.

Mais peut-on aller jusqu’à affirmer que les quatre premiers articles des coutumes de Brassenx correspondent aux libertés et coutumes octroyées en 1241 sur le modèle de celles de Labouheyre ? Certainement oui, dans la mesure où une des objections majeures que l’on pourrait opposer à une telle conclusion est, on va le voir, aisément réfutable. L’objection réside dans le fait que l’article 2 des coutumes du Brassenx n’est pas le seul qui traite du droit de perprise ; c’est aussi le cas des art. 52-55 qui, de surcroît, sont presque les derniers des coutumes.

Ces articles précisent, en effet, de quelle manière ce droit peut s’exercer (art. 55) et quels en sont son contenu et ses applications : établissement de bédats, moulins, colombiers, droits de chasse, pêche, découverte de mines et de trésors (art. 52-53), enfin droit de sous-accaser les biens et droits perpris (art. 54). Or, à quelques nuances près, ces clauses sont, dans les coutumes de Labouheyre, intégrées aux art. 2 et 3. La disjonction que l’on relève dans les coutumes de Brassenx pourrait donc être envisagée comme la preuve d’une opposition ou d’une différenciation avec les coutumes de Labouheyre. Or, les art. 52-55 des coutumes du Brassenx présentent avec trois des quatre premiers une ressemblance frappante dans la formulation du nom des bénéficiaires qualifies “d’habitans de la ville d’Arjusan et terratory de notre dit castet”, dans un cas ou “deu castet et ville reau”, dans l’autre ; ces formules, mis à part les art. 22-23 qui traitent de l’usage des moulins, ne se rencontrent que dans ces cas précis. C’est sans doute parce que l’article 2 de la coutume du Brassenx était – à la différence de l’article correspondant de celle de Labouheyre – beaucoup trop concis qu’à deux reprises, au moins, son contenu fut explicité. À cette occasion, le rédacteur reprit tout simplement le formulaire du premier article traitant déjà de cette question. Ainsi, la présence en plusieurs endroits des coutumes d’articles traitant du problème de la perprise, ne saurait constituer une objection à l’hypothèse d’une première version des coutumes réduites aux quatre premiers articles ; bien au contraire, l’archaïsme du formulaire de ces articles que nous avions déjà souligné se trouve ainsi indirectement confirmé, en même temps que leur place originale, dans le corps des coutumes.

Notes

*      Le présent article a fait l’objet de la part de ses auteurs d’une communication aux Journées de Bordeaux de la Société d’Histoire du Droit et Institutions des anciens Pays de droit écrit (2-3 octobre 1977).

  1. Nous renvoyons à M. Gouron, Catalogue des chartes de franchises de la France : Les chartes de franchises de Guyenne et Gascogne, Paris, 1935.
  2. L’édition de la coutume de Saint-Sever est en cours de préparation ; voir la présentation du travail en cours par MM. Maréchal et J. Poumarède dans le Bull. Soc. Borda, 1977, p. 194-201. Certaines éditions sont exemplaires, comme c’est le cas de celle du Livre Noir et des Établissements de Dax, publiés par F. Abbadie dans les Arch. hist. de la Gironde, 1902, t. XXXVII. En revanche, Les coutumes de Tartas, éd. Abbé Foix, dans Bull. Soc. Borda, 1911, p. 201-235 et 253-268 et celles de Maremne, Les statuts de la vicomté de Maremne, éd. baron D’olce, dans la même revue, 1882, p. 279-289 et 1883, p. 57-64, 107-112 et 231-247 seraient à reprendre, de même que celles de Labouheyre insérées par F. Arnaudin dans son ouvrage, Choses de l’Ancienne Grande lande, 2série. La baronnie de Labouheyre, p. 75-101.
  3. Il correspond au canton de Morcenx, sauf Onesse et Sindères, ainsi qu’à deux communes du canton de Tartas-Ouest : Beylongue et Villenave.
  4. Voir R. Cuzacq, Géographie historique des Landes. Les pays landais, 2 éd., Mont-de-Marsan, 1953, p. 29.
  5. Arengosse, cant. de Morcenx, Landes. Sur le château de Castillon, on peut consulter G. Dupouy, “À propos du château de Castillon à Arengosse”, dans Bull. Soc. Borda, p. 1-23 et 313-321.
  6. L’inventaire des archives du château de Castillon à Arengosse a été terminé en 1893 par l’abbé L.-B. Meyranx. Ces archives comprennent 568 pièces, réparties en 30 liasses (XVIe-XIXe siècles), plus 17 registres (XVIIIe-XIXe s.). Il y a deux pièces du XIVe s. et une du XVs.
  7. F. Abbadie, Histoire de la commune de Dax, dans Bull. Soc. Borda, 1898, p. 26. Cet auteur déclare que ces coutumes furent “renouvelées” par édouard III, en 1338 et confirmées le 14 mars 1360, par Arnaud Amanieu d’Albret. Il précise de quelle façon étaient élus les quatre jurats et mentionne trois articles concernant le droit d’appel à la cour de Dax (art. 13, 56, 62). F. Abbadie devait à nouveau mentionner les coutumes du Brassenx dans son Introduction faisant suite à la préface de l’édition du Livre Noir de Dax (Arch. hist. Gironde, t. XXXVII, 1902, p. CI, CII). C’est à partir de la mention figurant dans Bull. Soc. Borda que M. Gouron a fait état dans son catalogue de l’acte de 1360 – en réalité 1361 n. st. – (n° 38), dans lequel il voit une concession et du vidimus de 1513, qu’il a qualifié de confirmation (n° 39, voir ci-après). Il ne fait, en revanche, aucune allusion aux indications contenues dans l’Introduction au Livre Noir.
  8. Voir n. 3, art. cité. p. 5. Il y est aussi question des privilèges de Brassenx, p. 6.
  9. Nous tenons à exprimer nos remerciements à M. G. Dupouy, qui a bien voulu entreprendre sur place les recherches nécessaires, ainsi qu’à M. le comte de Lastours qui a bien voulu lui communiquer le document.
  10. Liasse, Arjuzanx n° 8.
  11. Ainsi, le pays d’Auribat, Auree vallis devient nostras villas ; si nondum fuerit inductus devient si vestrum dominium inductum fuerit !
  12. II s’agit de la famille de Baffoigne, qui devait connaître au XVIe siècle une extraordinaire ascension sociale (Voir G. Dupouy, art. cité et Abbé L.-B. Meyranx, Les rois des Lannes aux XVIe et XVIIe siècles. Histoire extraite du chartrier du château de Castillon en Brassenx, s. l. n. d.
  13. Alain le Grand (1471-1522) avait succédé à son aïeul Charles II (1415-1471), lui-même fils de Charles Ier, connétable de France tué à Azincourt (1401-1415). Le père de Charles Ier était Arnaud Amanieu (1359-1401), dont il sera question plus loin, en même temps que de son père Bernard Aiz V (1326-1359). Alain le Grand était père de Jean, qui devint roi de Navarre (1494-1516) et aïeul d’Henri Ier (1522-1555), l’époux de Marguerite d’Angoulême, sœur de François Ier, les parents de Jeanne d’Albret, mère du roi Henri IV.
  14. Pour la famille d’Albret nous renvoyons à nos articles parus dans Les Cahiers du Bazadais, Les origines (XIe s.-1240) (3e et 4e trim. 1975) ; Les hommes et le patrimoine (1240-1360), première partie (3e trim. 1976), seconde partie (3e trim. 1977) ; Le rôle politique (1240-1360) (2e tri. 1978) ; pour Terres et hommes d’Albret, se reporter à Les Albret. L’ascension d’un lignage gascon (XIe s.-1360), thèse Lettres, Bordeaux, 1972, 4e partie.
  15. Voir ci-après. Nous avons retrouvé l’original de cet acte aux Arch. dép. des Pyrénées-Atlantiques, E 160. C’est une pièce de parchemin, scellée de cire verte sur lacs de soi, avec un fragment de sceau important.
  16. Art. 8. Cette liste présente un grand intérêt. On remarque, en particulier l’absence de la paroisse d’Arengosse. Il y avait probablement un noyau d’habitat à Arengosse et peut-être une église, mais ce n’était qu’une annexe de Bézaudun. Aujourd’hui, Bézaudun se trouve dans la commune d’Arengosse. Plus intéressante encore est la mention de Villenave. M. Gouron avait voulu identifier Villenave avec la bastide de Montaigut, fondée en Brassenx, vers 1319, par le sénéchal d’Édouard II, Guillaume de Montaigut (ouvr. cité, n° 2059) et attestée en 1327-1329, en même temps que celle de Monpazier que ce même auteur a voulu identifier avec le lieu-dit La Bastide, dans la commune actuelle de Villenave, mais sur la rive opposée du Bez. S’il en était ainsi, le texte des coutumes serait probablement postérieur à 1319. On notera, cependant, qu’en 1305 Bidau Brane était, du chef de sa femme Douce de Montolieu, seigneur de la motte de Villenave en Brassenx (voir J.-P. Trabut-Cussac, L’administration anglaise en Gascogne, 1972, p. 127 et R. G., t. III, n° 4484). Il est donc certain que si une bastide fut fondée à Villenave, un habitat et peut-être une paroisse y existaient dès le XIIIe siècle. D’ailleurs, le patronage de sainte Quitterie, qui est celui de l’église de Villenave, convient mal pour une fondation du XIVe s. et le toponyme de Villenave est connu en d’autres régions dès le Xe s. (Ainsi Villenave-de-Gironde aujourd’hui Gironde, près de La Réole, en Gironde). On ne saurait donc se référer à la mention de Villenave pour dater le texte des coutumes. Il est certain, en revanche, que contrairement à ce que pensait H. Tartiere, Beylongue appartenait au Brassenx, tandis que Luglon était une dépendance de la seigneurie de Sabres (Essai de géographie ancienne du département des Landes, p. 20).
  17. J. de Font-Reaulx, le diocèse de Dax (carte), 1968. Au XVIe siècle, Villenave était chef-lieu de cet archiprêtré (voir Pouillés des provinces d’ Auch, de Narbonne et de Toulouse, publiés sous la direction de M. François, Paris, 1972, t. I, p. 30).
  18. Il n’existe pas d’étude sur le domaine ducal au milieu du XIIIe siècle. Il convient de se reporter à J.-P. Trabut-Cussac, ouvr. cité, ainsi qu’aux t. I et I suppl. des Rôles gascons publiés par F. Michel et C. Bémont et au t. IV de notre étude sur les Albret.
  19. Calendar of the Patent Rolls, Henri III (1232-1247), p. 245.
  20. Ibidem, p. 245.
  21. Ibidem, 1216-1225, p. 251, 276, 497.
  22. R. G., t. I, n° 4330 (18 déc. 1254). Le prince indique qu’il a à nouveau fait clore son castrum (de novo claudi fecimus), mais il prend des mesures pour faciliter cette clôture. Plus tard, il se réserve un emplacement pour y construire une maison.
  23. Le 6 mai 1255, il est dit construit de novo (R. G., t. I n° 4475).
  24. Ici, le prince autorise les hommes d’Auribat à construire un lieu fortifié, fortalicium seu casamentum (RG., t. I, n° 4327, 3 déc. 1254) puis, il se réserve un emplacement pour bâtir une domus (8 oct. 1255, n° 4585). Chaque fois, comme à Pouillon, il autorise les habitants à prendre le bois nécessaire pour la clôture.
  25. Le 6 mai 1255, il est fait mention des homines de Herbafavera (R. G., n° 4475) et le 29 octobre 1304 (R. G., t. III, n° 4632), le roi-duc autorise la clôture de la ville. De toute façon, le début du peuplement est forcément antérieur à 1241.
  26. Le 6 mai 1255, le prince s’adresse à tous les habitants infra castrum nostrum de Borricos (R. G., t. I, n° 4475).
  27. Le prince s’adresse aux hominibus castri Sancti Georgii in Aurevalle (R. G., n° 4485, 8 mai 1255).
  28. Ici le prince s’adresse omnibus hominibus qui apud Pollionem castrum nostrum se receperint morandi causa (R. G. t. I, n° 4330, 4586).
  29. R. G., t. I, n° 4330, 4586 (Pouillon), 4585 (Auribat), 4475 (Bourricos).
  30. R. G., t. II, n° 1327. Il est question d’un casal vocatum Boerria castri prope Aas Juzan.
  31. Art. 2-4.
  32. Voir n° 30.
  33. F. Arnaudin, Au temps des échasses, 1928, pl. II ; E. Menaut, La Grande lande dans l’œuvre de Félix Arnaudin, dans Bull. Soc. Borda, 1960, p. 35 ; P. Arambourou, La tour et le tertre d’Arjuzanx, dans Bull. Soc. Borda, 1960 p. 1-2 ; J. Gardelles, Les châteaux du Moyen Âge dans la France du Sud-Ouest, 1972, art. Arjuzanx. La tour a été détruite et le site bouleversé à la suite de l’aménagement de la mine de lignite en 1960.
  34. Fonds Félix Arnaudin de l’Écomusée de la Grande lande, clichés n° 1373-1376, 1378-1379 et 1395-1397. Nous tenons à exprimer nos remerciements à M. F. Lalanne qui nous a signalé l’existence de ces clichés et nous en a aimablement communiqué des tirages.
  35. Arch. dép. Landes, plan cadastral d’Arjuzanx, section B, n° 128. Les parcelles 126-129 pourraient correspondre à un retranchement. La motte correspond probablement au n° 99, la tour au n° 131.
  36. Calendar of the patent rolls, Henry III, 1232-1247, p. 380.
  37. Apud Astiusan in Bracengo (R. G., t. II, n° 66).
  38. Il s’agit probablement du moulin sur le Bez (R. G., t. I, n° 4484). Le roi se réserve escaetis et omni alio genere servicii et justicie.
  39. Ce casal se trouve entre celui de Bernard de Lalana à l’est, celui de Mathieu de Lalana à l’ouest et les casals d’Arn. de Marches et Vital de Desast, au nord et au sud (R. G., t. II, n° 1327). À quoi correspondaient ces casals ? Dans la mesure où le paiement de la queste exonérait les tenants du roi en Brassenx de toute redevance foncière, on serait tenté d’assimiler ces casals avec les emplacements dans le castrum, pour lesquels la lettre de 1241 prévoyait un cens de 12 d. Mais le montant de la redevance, le fait qu’un de ces casals soit qualifié de boeria font songer à une véritable exploitation. Dans ce cas, il y a contradiction avec l’article Ier des coutumes.
  40. R. G., t. IV, n° 255, 809, 850, 879, 883, 910, 986.
  41. Voir ci-après.
  42. Pour tout ce qui suit, nous renvoyons à notre étude sur les Albret, en particulier au chapitre traitant de la succession de Bergerac (Les cahiers du Bazadais, 3e tr. 1977) et à la 3e partie, Le rôle politique des Albret (1240-1360) (Ibid., 2e tr. 1978).
  43. Le 26 juillet 1338, Gaston de Foix, vicomte de Béarn et lieutenant du roi de France, qui se trouvait alors à La Réole mandait à Arnaud-Guillaume de Béarn, seigneur de Lescun de se rendre à Mont-de-Marsan et, de là, in terra de Brassenchis et de Adiusano sub obediencia regis Anglie existentibus, pour les soumettre au roi de France. Gaston de Foix ignorait, on s’en doute, l’existence de l’accord entre le sire d’Albret et le sénéchal de Gascogne (A. h. G., t. I, p. 98-99).
  44. Il constitue la substance de l’exposé des lettres patentes de confirmation d’Édouard III du 14 juillet 1341 (Doc. C).
  45. Doc. B.
  46. Voir F. Arnaudin, ouvr. cité, p. 79-84.
  47. Art. 1-6.
  48. Voir n° 36, 37.
  49. Le roi-duc s’adresse ainsi tantôt aux probi homines de Maremne, Marensin, Gosse et Seignanx, tantôt aux fideles de ces mêmes pays, pour leur demander de se tenir prêts à faire chevauchée (ad equitandum et guerreandum) (R. G., t. I, n° 2219, 2202, 28 oct. et 9 déc. 1253) ; mais, il promet à ses dilecti et fideles homines de ces terres de respecter leurs bons usages et bonnes coutumes (R. G., t. I, n° 4393-4396). Voir aussi n° 169, 485, 2120.
  50. En particulier dans ceux traitant de droit public ou de droit pénal.
  51. Voir ci-après.
  52. Il se pose, en effet, pour les articles touchant au paiement de la queste, aux droits d’usage et de perprise et aux franchises et exemptions de leudes et de péages, la question de savoir quelles personnes en étaient bénéficiaires au XIVe s. et où elles résidaient. C’est, en effet, dans ces articles que l’on rencontre le formulaire remontant au XIIIe s. ; or, il n’a pas toujours été explicité.
  53. Les articles suivants concernent des problèmes de procédure civile et pénale, ainsi que le privilège des foires. La seconde partie des coutumes est manifestement plus récente.
  54. Nous reviendrons plus loin sur ce point.
  55. R. G., t. I, n° 3216 (17 mai 1254).
  56. Voir n° 48.
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Chapitre de livre
EAN html : 9782356136572
ISBN html : 978-2-35613-657-2
ISBN pdf : 978-2-35613-658-9
Volume : 4
ISSN : 2827-1912
Posté le 15/11/2025
16 p.
Code CLIL : 3385
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Comment citer

Marquette, Jean Bernard, avec la collab. de Poumarède, Jacques, “Les coutumes du Brassenx”, in : Boutoulle, F., Tanneur, A., Vincent Guionneau, S., coord., Jean Bernard Marquette : historien de la Haute Lande, vol. 2, Pessac, Ausonius éditions, collection B@sic 4, 2025, 843-858. [URL] https://una-editions.fr/coutumes-du-brassenx-1
Illustration de couverture • D’après Villandraut : ruine de la tour située à l’angle sud-est de l’ancienne collégiale
(dessin, 1re moitié du XIXe siècle. Arch. dép. Gironde 162 T 4).
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