UN@ est une plateforme d'édition de livres numériques pour les presses universitaires de Nouvelle-Aquitaine

Sur les traces du public des théâtres de Pompéi : des spectateurs aux usagers

par

Cassius Dion écrivait – plus d’un siècle après la catastrophe de 79 – que les habitants de Pompéi étaient assis au théâtre lorsqu’elle survint :

τέφρα ἀμύθητος ἀνεφυσήθη […] καὶ πόλεις δύο ὅλας, τό τε Ἑρκουλάνεον καὶ τοὺς Πομπηίους, ἐν θεάτρῳ τοῦ ὁμίλου αὐτῆς καθημένου, κατέχωσε1.

On peut se demander sur quelles informations reposait une telle affirmation2, qu’il ne faut assurément pas considérer comme un reflet direct de la situation au moment de l’éruption, mais plutôt comme une façon d’incarner une communauté civique frappée de plein fouet par la catastrophe. On peut aussi s’interroger sur la composition du “rassemblement” ou de la “foule” désignés par le terme ὅμιλος, dont le singulier, évoquant une communauté homogène, masque assurément une grande diversité3.

Les spectacles et les lieux qui les accueillaient constituaient des temps de rassemblement et des espaces de convergence dans toutes les villes du monde romain : Pompéi en offre un exemple non pas canonique mais très spécifique. La ville samnite puis romaine fut dotée d’une panoplie d’édifices de spectacles qui la distingue par sa précocité, avec deux théâtres voisins (l’un en plein air et l’autre couvert) et un amphithéâtre, tous érigés avant la fin de la République, quand Rome elle-même ne bénéficiait encore d’aucun théâtre ou amphithéâtre permanent. En 79 comme dans les années, voire dans les siècles précédents, qui étaient celles et ceux qui prenaient place dans les théâtres de Pompéi ? La conservation exceptionnelle de cette ville permet-elle de répondre plus précisément qu’ailleurs à cette difficile question ?

Même si les échos des spectacles de gladiateurs apparaissent prépondérants dans les annonces de spectacles comme dans les graffiti qui couvrent les murs de la ville4, il exista bien une “vie théâtrale”5 intense à Pompéi. La construction du grand théâtre, sans doute dès le IIe s. a.C., et celle du theatrum tectum, après la fondation de la colonie, dans les années 70 a.C., attestent en premier lieu l’ancienneté de l’activité dramatique et de la culture théâtrale à Pompéi (fig. 1).

Les deux théâtres de Pompéi au sein de l’insula VIII 7.
Fig. 1. Les deux théâtres de Pompéi au sein de l’insula VIII 7. Les numéros indiqués en bleu correspondent aux numéros d’entrée conventionnels (DAO É. L.-T. d’après les RICA Maps).

Le contexte campanien, très ouvert aux influences hellénistiques, explique en partie cette précocité6. L’intérêt particulier de Sylla pour le mime et les spectacles comiques7 pourrait aussi avoir encouragé la construction d’un nouveau théâtre couvert, pour accueillir de nouveaux spectacles devant un public plus restreint au sein de la colonie de vétérans établie par son neveu8. Mais en dehors de cette coexistence des deux théâtres, au sujet desquels beaucoup de questions restent en suspens9, “sulla vita teatrale di Pompei siamo, a ben pensare, poco informati10.

Les habitants de Pompéi n’avaient-ils vraiment d’yeux que pour les gladiateurs, en particulier à la fin de la vie de la cité ? À quelles occasions fréquentaient-ils les théâtres ? Quels types de spectacles y voyaient-ils et comment les recevaient-ils ? Nous verrons que les réponses sont loin d’être évidentes, malgré l’excellente conservation de ce site enseveli par le Vésuve et les documents incomparables qu’il a livrés. Nous commencerons par réinterroger quelques sources qui ont été sollicitées pour illustrer un “goût du théâtre”11 qui aurait été particulièrement marqué chez les Pompéiens. Nous chercherons ensuite dans les édifices eux-mêmes les traces plus tangibles de la diversité du public qui les fréquentait. Nous nous demanderons enfin si la question du “public” des théâtres ne devrait pas se déplacer de la caractérisation des spectateurs à celle des usagers de ces espaces publics.

Entre fréquentation des spectacles et “goût du théâtre”

Se poser la question du public qui fréquentait les théâtres de Pompéi pour y voir des spectacles oblige à affronter celle, tout aussi délicate, de la nature des spectacles qu’ils accueillaient. En effet, si on veut chercher les traces d’une réception de ces spectacles qui nous permettent de nous interroger sur leurs spectateurs, il faut commencer par en déterminer la nature.

Des spectateurs pour quels spectacles ?

À l’instar de ce que l’on connaît pour Rome, à la fin de la République et sous Auguste12, les spectacles dramatiques – désignés par le terme générique de ludi scaenici – pouvaient, à Pompéi comme ailleurs, être multilingues ou du moins relever de genres associés initialement à diverses langues : jeux latins, grecs et même osques. Revenons sur ces catégories en nous interrogeant sur ce qu’elles peuvent révéler du public des théâtres de Pompéi.

Les ludi graeci et latini : échos et incertitudes

Dans la cité campanienne comme à Rome, les spectacles dramatiques étaient donnés dans le cadre de ludi qui pouvaient prévoir la distinction entre ludi latini et ludi graeci. Une découverte survenue en 2021 dans la nécropole de la porte du Sarno est venue le confirmer13. Ces fouilles ont mis au jour un monument funéraire portant l’épitaphe d’un ancien esclave municipal, Marcus Venerius Secundio, qui avait rempli des fonctions liées au culte de Vénus et au culte impérial avant de devenir augustale. Déjà connu par d’autres documents pompéiens, il serait décédé dans les deux dernières décennies de la ville après avoir été actif sous Néron. À l’instar des plus hauts magistrats de la cité, on rappelle sur son tombeau le financement, en son nom seul, de quatre jours de spectacles, associant jeux grecs et latins :

M(arcus) Venerius coloniae / lib(ertus) Secundio aedituus / Veneris Augustalis et min(ister) / eorum hic solus ludos Graecos / et Latinos quadriduo dedit

Parmi les nombreuses informations que recèle cette nouvelle inscription, l’attestation épigraphique de “jeux grecs” organisés à Pompéi est une nouveauté importante. Les recherches d’É. Paillard sur le théâtre grec dans l’Italie romaine montrent que les ludi graeci correspondaient bien à des spectacles donnés en langue grecque, et non, comme on a pu le penser, à des pièces en latin sur des sujets grecs ou d’inspiration grecque14. Ici, la mention des ludi graeci, peu fréquente dans l’épigraphie romaine15, place l’intervention évergétique de cet affranchi en écho avec les types de jeux donnés à Rome, en particulier avec les jeux séculaires. Ceux-ci prévoyaient le déroulement de ces différentes manifestations dans des lieux spécifiques, théâtre temporaire en bois, théâtres de Pompée et de Marcellus : on peut se demander si à Pompéi aussi jeux “grecs” et “latins” se déroulaient dans des lieux distincts. Les deux théâtres voisins auraient dans ce cas pu trouver une utilité certaine. L’organisation de ludi graeci par M. Venerius Secundio témoigne sans doute encore plus directement de l’influence du philhellénisme de Néron, en particulier dans le domaine des spectacles et concours16.

Concernant le public, soulignons que l’organisation de spectacles en langue grecque reflète le plurilinguisme d’une partie des spectateurs, qu’il s’agisse d’habitants de Pompéi ou de gens de passage, qui pouvaient prendre place aussi dans les gradins des théâtres17. S’il est difficile de mesurer quelle proportion des habitants de Pompéi ou des voyageurs de la région comprenaient le grec, bien attesté à Pompéi18, rappelons que la compréhension des textes dramatiques n’était pas le seul plaisir recherché au théâtre. Assister à des spectacles de genres divers, dans lesquels tout ne passait pas seulement par le texte mais aussi par la musique, les décors et la performance des acteurs, faisait pleinement partie de l’expérience théâtrale. G. Zuchtriegel évoquait ainsi avec justesse, à l’occasion de la découverte de cette tombe, le parallèle contemporain d’un spectacle en langue française dans lequel Isabelle Huppert venait alors de briller sur la scène du grand théâtre de Pompéi, à l’occasion du festival “Pompei theatrum mundi”, devant un public italien et international19.

Nous ne pourrons faire ici le tour des traces des spectacles qui ont pu être donnés en grec à Pompéi ; revenons cependant sur quelques objets qui ont pu être interprétés en ce sens et nous ramènent à la question du public de ces spectacles.

On a voulu voir dans un jeton en ivoire découvert en 1760 dans la villa dite de Cicéron à Pompéi20, conservé aujourd’hui au musée archéologique national de Naples21, une “tessère théâtrale”, sorte de ticket d’entrée pour une pièce d’Eschyle qui aurait été donnée au théâtre de Pompéi22 (fig. 2).

Jeton de jeu en ivoire trouvé en octobre 1760 dans la “villa de Cicéron”
Fig. 2. Jeton de jeu en ivoire trouvé en octobre 1760 dans la “villa de Cicéron” à Pompéi, échelle 1:1 (Sur autorisation du Ministero della Cultura – Museo Archeologico Nazionale di Napoli).

L’objet porte en effet au revers le nom ΑΙΣΧΥΛΟΥ, qui renverrait au poète grec, associé à des nombres qui correspondraient à un numéro de place dans le théâtre. Mais ce jeton n’a en fait rien à voir avec un billet d’entrée au théâtre : il appartient à une série, bien attestée tout autour de la Méditerranée, de jetons de jeu qui comportent sur leur revers un nombre de 1 à 15, en chiffres romains et grecs (ici XII – IB), et parfois un mot qu’on présume associé à l’image souvent présente à l’avers. L’étude du corpus a permis de retracer une origine alexandrine pour ce jeu dont le principe demeure inconnu23. Selon E. Alföldi-Rosenbaum, la dizaine de jetons connus portant la légende ΑΙΣΧΥΛΟΥ pourraient faire allusion au nom d’un grand prêtre d’Alexandrie plutôt qu’au poète grec24, même s’il est impossible d’assurer cette hypothèse25. Les représentations architecturales et paysagères qu’on retrouve sur certains exemplaires semblent évoquer le paysage urbain d’Alexandrie26 : l’image du jeton pompéien a souvent été artificiellement “théâtralisée” et si elle a quelque chose à voir avec le monde théâtral elle ne représente assurément pas le théâtre de Pompéi27. Autrement dit, ce jeton de jeu ne dit rien des spectacles grecs qui ont pu avoir lieu à Pompéi et ne nous informe pas plus sur les modalités d’accès du public au théâtre.

Il faut écarter également définitivement d’autres “tessères” qui ont pu lui être associées comme exemples de “billets d’entrée” aux spectacles de théâtre à Pompéi28, dont une qui attesterait la représentation de comédies “latines” dans la ville29. Cet objet, qui comporterait une indication précise de numéro de place dans les gradins, assortie de la mention de la Casina de Plaute, est en fait une pure invention de l’abbé Romanelli à l’appui de la théorie des “tessères théâtrales”, comme il l’indique lui-même explicitement30.

Si ce type d’objet reste trop souvent interprété de manière erronée, c’est sans doute parce qu’on aimerait justement connaître le programme des spectacles donnés aux théâtres de Pompéi. Cependant, il faut se résoudre à admettre qu’on ne sait pas quelles pièces du théâtre grec y ont été jouées, avant 1927 et la première mise en scène attestée d’Euripide sur la scène du grand théâtre31.

On a maintes fois voulu reconnaître dans des décors pompéiens (fresques murales, revêtements de sol en mosaïque, décors d’objets précieux ou quotidiens…), les échos de représentations dramatiques donnés à Pompéi32. Sur cette catégorie de sources, l’œuvre de M. Bieber a fait date, rassemblant de très abondants témoignages visuels sur le théâtre grec et romain qu’elle confronte avec les sources textuelles et archéologiques connues alors33. Pompéi y occupe une place importante, à la fois pour ses vestiges architecturaux et pour les nombreuses images que le site a livrées. La présence visuelle du théâtre peut y être relevée dans les représentations de masques, isolés34 ou rassemblés en groupes évoquant des constellations de personnages comiques ou mythiques35 ; des représentations d’acteurs36 ; d’auteurs37 ; d’autres professionnels de la scène38 et enfin de de scènes de tragédies ou de comédies qu’il s’agit de mettre en rapport avec des textes dramatiques connus39. Cette veine documentaire a été appréhendée de manière encore plus ample et approfondie depuis et a bénéficié en particulier de l’enquête systématique de K. M. D. Dunbabin sur la présence des spectacles dans l’art romain40. L’autrice n’appréhende plus seulement ces images comme des sources pour restituer les pratiques spectaculaires mais avant tout comme des productions artistiques dont il s’agit de comprendre le contexte, les fonctions, la cohérence et les spécificités.

On pourrait avoir l’impression que l’abondance d’images reflète un goût particulier des spectacles théâtraux chez les Pompéiens41. Cependant, d’une part, la forte présence des images de spectacles dans le répertoire artistique et décoratif n’est pas propre à Pompéi : elle se retrouve dans tout le monde romain, de la République jusqu’à l’Antiquité tardive40. C’est la conservation particulière de Pompéi qui explique une surreprésentation relative. D’autre part, tous ces échos d’un “goût du théâtre” sont marqués par l’imagerie incontournable de la tragédie et de la comédie grecques d’époque classique et hellénistique, incarnées au premier rang par Euripide et Ménandre. Ils ne peuvent être simplement compris comme des images de spectacles ayant réellement eu lieu à Pompéi, qui nous renseigneraient à la fois sur le répertoire, grec ou latin, et, d’un autre point de vue, sur le goût des habitants pour tel ou tel type de spectacles42. En effet, il s’agit souvent d’images stéréotypées, qu’on retrouve sur des supports divers, à travers tout l’empire et sur une très large période43. Lorsqu’elles apparaissent dans un contexte domestique, souvent dans les parties publiques des domus, leur sélection par les propriétaires témoigne, plutôt que du souvenir de pièces vues ou organisées à Pompéi, d’une volonté d’affichage et notamment de mise en avant d’une culture grecque, très prégnante depuis la période samnite et restée valorisée dans certaines classes sociales jusque sous l’empire. Il en va de même pour le décor théâtral de certains objets, de la plus banale lampe à huile44 au gobelet en argent “aux squelettes” du trésor de Boscoreale où apparaissent Ménandre et Euripide45 : ce ne sont pas des souvenirs de spectacles46. Au-delà de leur rôle de vecteur d’une identité culturelle partagée au sein de l’empire, les connotations liées à l’imagerie théâtrale qui y apparaît ne peuvent être interprétées qu’en replaçant chaque décor dans la série à laquelle il appartient et chaque objet dans son contexte archéologique (rarement bien connu), historique et culturel.

Parmi les indices qui ont conduit à interpréter certaines images comme des reflets de spectacles théâtraux, la présence d’un cadre architectural évoquant celui des fronts de scène dans les peintures de IIe ou de IVe style a parfois été lue de manière très “réaliste” invitant, pour ces dernières, à y voir une image presque directe du théâtre de Pompéi47. Les personnages représentés au sein de ces décors seraient des acteurs, même sans attributs ou costumes explicites et les scènes reflèteraient des spectacles réels, tragédies, comédies ou pantomime48. On pourrait dès lors interroger les motivations des commanditaires de ces décors en tant qu’éventuels amateurs de spectacles49. Cependant, les fronts de scènes en question sont très génériques et, même en tenant compte des indications de Vitruve sur l’inspiration scénographique de certains décors peints50, il semble plus raisonnable de considérer que le cadre architectural théâtralisant de ces décors avait une vocation en premier lieu ornementale et structurante51, conférant une animation remarquablement dynamique au décor tout en enrichissant éventuellement l’ensemble des images incluses de connotations royales, triomphales52 ou philosophiques53. Mais rien dans ces représentations ne nous renseigne précisément sur les spectacles ou le public des théâtres de Pompéi.

Quelques graffiti évoquant des vers d’Euripide54 et Ménandre55 ont enfin été repérés à Herculanum et Pompéi, mais il semble s’agir de citations devenues proverbiales56 plutôt que de récitations extraites de pièces vues sur place par des spectateurs enthousiastes. Le public des tragédies et comédies grecques comme latines demeure insaisissable.

Des “jeux osques” pour quel public ?

On peut raisonnablement supposer l’existence à Pompéi des “jeux osques” mentionnés par les sources littéraires, désignant sans doute des représentations d’atellane, genre dramatique introduit à Rome au IIIe s. a.C.57. Faisant intervenir, sous la forme d’improvisations, des personnages masqués récurrents, les personae Oscae, l’atellane tirerait son nom de la petite cité campanienne d’Atella. Elle mêle ses racines à celles du théâtre comique qui fleurissait à la même époque dans les colonies de Grande Grèce ainsi qu’aux performances improvisées d’origine étrusque et latine que les auteurs romains placent à l’origine du théâtre latin58. Sans doute initialement en osque – la langue des Pompéiens de l’époque samnite – ce théâtre farcesque connut au fil du temps des mises en forme littéraires en latin et continua d’exister sur les scènes des théâtres de Rome et d’Italie jusque sous l’Empire.

Cicéron, dans une lettre écrite en octobre 55 a.C., à l’occasion des jeux donnés à Romepour l’inauguration du théâtre de Pompée, à son ami M. Marius demeuré dans sa villa aux environs de Stabies, fait une allusion aux “jeux osques” inclus dans les cérémonies. 

Non enim te puto Graecos aut Oscos ludos desiderasse, praesertim cum Oscos uel in senatu uestro spectare possis, Graecos ita non ames ut ne ad uillam quidem tuam uia Graeca ire soleas.59

En rassurant son ami sur le fait qu’il n’a rien manqué d’impérissable – ni jeux grecs qu’il n’apprécie pas, ni jeux osques qu’il peut observer chez lui au sénat – Cicéron livre une information qui peut concerner Pompéi60. Si son ironie s’adresse avant tout au faste démesuré et à la qualité des spectacles donnés par Pompée, il semble déprécier dans le même mouvement l’attitude, ou du moins l’origine, de certains décurions locaux, les comparant implicitement aux personae oscae de l’atellane. Le contexte du passage et la mention du sénat local suggèrent en effet qu’il associe les débats des décurions à des farces grotesques. Si le passage concerne bien Pompéi, s’agit-il plus précisément d’une boutade sur un usage rémanent de la langue osque dans la cité, une vingtaine d’années après l’instauration du latin comme langue officielle avec l’implantation de la colonie ? Faut-il y voir plutôt un indice que le lieu dans lequel se rassemblaient les décurions – le theatrum tectum à une époque selon certains – abritait aussi des spectacles d’atellane (le verbe spectare prenant alors tout son sens) ?

S’agissant d’un genre dramatique d’origine osque, il est en tout cas probable que l’atellane ait bien été présente à Pompéi, mais on n’en a aucune trace certaine.

Une certaine Methe Cominiae s(erva) Atellana, qui a laissé une touchante déclaration d’amour avec une invocation de la Vénus pompéienne sur les murs du couloir des théâtres61, a été identifiée à une actrice d’atellane. Cependant l’adjectif Atellana peut tout aussi bien être ici un nom d’origine62. Certes, son bien aimé Chrestus porte le même nom qu’une des personnes associées par d’autres graffiti au pantomime Actius Anicetus63, mais il peut s’agir aussi tout simplement d’un nom d’esclave, attesté par ailleurs. La teneur générale des graffiti du couloir des théâtres64 invite à ne pas imposer une interprétation théâtrale aux textes et images qui s’y accumulent et il n’est pas du tout certain que ces deux amoureux aient été des acteurs ; on ne peut donc les convoquer pour prouver le déroulement de spectacles d’atellane à Pompéi.

On a voulu également retrouver la trace de ces spectacles du côté de la culture visuelle. F. Gordon a ainsi cherché à constituer un corpus d’images tirées des décors pompéiens qu’elle associe à la fabula Atellana65 : il s’agit de quelques scènes peintes comiques qu’elle attribue à l’atellane en raison du type de vêtements et d’accessoires portés par les acteurs. Ses démonstrations, qui s’appuient pour une large part sur des copies anciennes de peintures disparues, demeurent cependant fragiles, le détail des costumes et accessoires n’y étant souvent que vaguement reproduit66.

Plus généralement, comme l’a démontré A. Santucci67, l’identification de scènes, acteurs ou masques d’atellane au sein du corpus plus vaste des images de figures grotesques ou de scènes de comédie pose de nombreux problèmes méthodologiques. Il est ainsi périlleux de distinguer les images relevant des farces “phlyaques” de Grande Grèce de celles qui témoigneraient de la tradition osque de l’atellane à l’époque hellénistique, ou encore de distinguer ces dernières d’autres genres dramatiques romains populaires comme le mime68. Les lacunes de nos connaissances sur les contenus des spectacles empêchent des identifications assurées. Ainsi A. Santucci rejette la plupart des images jusqu’ici identifiées à l’atellane et n’en reconnaît aucune dans les décors pompéiens, hormis un masque moulé en plâtre portant l’inscription “Buco”69 et appartenant à une série d’objets mal connue dont il reste à élucider précisément le contexte de découverte et la fonction70. On connaît également un objet décoratif en terre cuite provenant de la maison de Cérès (I 9, 13) qui associe quatre masques de l’atellane71. En tant qu’éléments décoratifs mobiles et potentiellement fabriqués en série, ces objets ne nous aident pas, cependant, à interroger une potentielle inclination de leurs propriétaires pour l’atellane72. Son absence dans la peinture murale pourrait traduire, selon A. Santucci, le dédain des classes élevées de la société, commanditaires des décors peints, vis-à-vis de ce type d’images et donc de spectacles73. Faut-il en conclure que le public de ce genre de spectacles était avant tout un public populaire74 ? Pourrait-on alors restituer une diversité sociale du public en fonction des genres de spectacles donnés sur la scène des théâtres de Pompéi ? Cela ne semble pas évident. Comme on l’a déjà vu à propos des peintures de scènes tragiques ou comiques, il y a en effet une différence entre le fait d’assister à des spectacles, éventuellement de les apprécier75, et la décision de choisir des images représentant ces spectacles pour en faire son décor quotidien et construire l’image qu’on souhaite présenter de soi au sein de sa maison.

Une dernière76 scène peinte pourrait se rattacher à l’atellane (fig. 3) : il s’agit d’une peinture découverte en 1940 en façade de l’édifice I 8, 10, après la chute d’un enduit postérieur77. Sur ce décor de façade, typique de ce que l’on a qualifié d’“art plébéien”78,  plusieurs scènes sont juxtaposées. À gauche, sous un feston retenu par des rubans, deux registres superposés évoquent un atelier de potiers. À droite, on retrouve la même structure79  avec une scène qui a été associée à la vie théâtrale pompéienne80 : en haut, sur une ligne évoquant le sol, deux danseurs vêtus d’un pagne, coiffés de bonnets pointus et tenant des bâtons, se tournent le dos et font face à d’autres éléments dont le seul encore lisible est un personnage à silhouette humaine affublé d’une tête d’âne. Les bonnets portés par les danseurs sont peu discriminants par rapport à d’autres scènes stéréotypées évoquant des spectacles de rue ou de banquets81, en revanche le personnage masqué en âne évoque effectivement des titres d’atellane littéraire82. Une seule explication a été proposée par F. Gordon pour le choix de telles images éventuellement liées à l’atellane : l’allusion à l’origine italique des commanditaires83. Au vu des parallèles désormais connus, cela semble peu probable et n’épuise pas la réflexion sur le sens de cette scène de spectacle juxtaposée à une scène artisanale en façade d’un édifice dont l’évolution et la fonction restent à préciser84.

Qu’il s’agisse des spectacles du théâtre dit “classique” ou de ceux de l’atellane, leurs traces visuelles demeurent incertaines et ne nous disent rien des spectateurs qui ont pu y assister ou les apprécier à Pompéi.

Photographie d’archives de la fresque découverte en 1940 sur la façade 
du bâtiment I 8, 10 à Pompéi
Fig. 3. Photographie d’archives de la fresque découverte en 1940 sur la façade du bâtiment I 8, 10 à Pompéi (Parco Archeologico di Pompei, inv. 45622, avec l’aimable autorisation du Ministero della Cultura – Parco Archeologico di Pompei, reproduction interdite).

Les spectacles “populaires” et leur public

Outre l’atellane, les spectacles dramatiques non littéraires occupèrent une place toujours plus grande sur les scènes des théâtres romains, avec des contenus plus ou moins codifiés et souvent protéiformes : mime, pantomime et autres performances longtemps considérées comme “mineures”. Évoqués par les sources littéraires pour l’attrait qu’ils exerçaient sur le public et leur place dans la vie sociale et politique des cités, ils demeurent pour certains difficiles à saisir dans leurs contenus précis.

L’inscription funéraire d’A. Clodius Flaccus85, un des plus hauts magistrats de la Pompéi augustéenne, est une des plus loquaces à propos des ludi. Parmi les spectacles organisés lors des ludi Apollinares, à l’occasion des charges successives de duumvir de ce personnage, sont mentionnés des chasses, des combats de gladiateurs et de pugilistes, d’autres compétitions athlétiques et quelques spectacles relevant des ludi scaenici. À l’occasion de son premier duumvirat, il offrit notamment des “ludos omnibus acruamatis pantomimisq(ue) omnibus et Pylade”86, qui attestent la diffusion de la pantomime de Rome à Pompéi dès cette époque87. Pour célébrer son troisième duumvirat, sans que le contexte des ludi Apollinares soit mentionné cette fois, il donna uniquement des “ludos factione prima adiectis acruamatis”. Le sens des acruamata est incertain : visiblement des artistes de spectacle, liés par l’étymologie à une performance sonore et qui ne se classaient pas parmi les mimes ou pantomimes88. Même si une partie des divertissements se tinrent sur le forum, près du sanctuaire d’Apollon, on peut raisonnablement supposer que d’autres se déroulaient sur la scène des théâtres. Le contexte des ludi Apollinares invite à penser que c’est bien toute la cité, rassemblée à l’occasion des ludi, qui assistait à ces spectacles dits “populaires”. 

Les images de ces genres de spectacles sont difficiles à reconnaître et rarement attestées89. Les mêmes problèmes se posent pour les scènes de théâtre “classiques” qu’on cherche à identifier au sein de décors peints, même en présence de décors architecturaux d’inspiration théâtrale. O. Elia a proposé de reconnaître une scène de “pantomime” dans un des trois panneaux, aujourd’hui presque disparus, qui ornaient une pièce donnant sur l’atrium de la maison des quatre styles (I 8, 17). Des danseuses y évoluent autour de personnages qui pourraient être des acteurs installés sur une plateforme circulaire qu’elle interprète comme une machine de scène90. Si ce dernier élément est plausible, autant que la photographie publiée permette d’en juger, la multiplicité des acteurs invalide l’interprétation comme scène de pantomime91. À côté des scènes mythologiques présentes sur les autres parois de la pièce, le recours à une scène théâtrale visait en tout cas ici à animer le décor plutôt qu’à exprimer un intérêt particulier pour le spectacle92.

Quant aux images plus quotidiennes comme les graffiti, si les gladiateurs y sont nombreux et bien identifiables, les acteurs, danseurs et autres artistes de la scène, rarement dotés d’attributs explicites, y restent difficiles à reconnaître. Par exemple, sur les murs du couloir des théâtres64, certains dessins ont été rapprochés, à cause du contexte architectural, de scènes de mime ou de pantomime. Un portrait de profil, identifié comme celui d’Hercule à cause d’une léontè de lecture très incertaine93(fig. 4), ne saurait être retenu comme celui d’un acteur costumé en Hercule uniquement parce qu’il se trouve dans le couloir des théâtres94.

Graffito conservé sur le mur sud du couloir des théâtres de Pompéi 
(VIII 7, 20) représentant un visage de profil
Fig. 4. Graffito conservé sur le mur sud du couloir des théâtres de Pompéi (VIII 7, 20) représentant un visage de profil. Relevé de M. Langner (Langner 2001, n. 1188) ; photographie et lecture réalisées par l’équipe du projet “Bruits de couloir” en 2022 (F-18), échelle 1:3.

Seules deux scènes voisines, montrant un couple de personnages en mouvement dont l’un porte un bonnet pointu, peuvent être considérées comme une possible évocation de spectacles scéniques (fig. 5)95 : non pas à cause des accessoires – en réalité moins détaillés que dans le dessin de M. Langner qui y reconnaissait une mise en scène mythologique impliquant Hermès – mais en raison du schéma répété et de l’attitude des personnages, proche d’autres images de danseurs ou acteurs.

Graffiti conservés sur le mur sud du couloir des théâtres de Pompéi (VIII 7, 20)
Fig. 5. Graffiti conservés sur le mur sud du couloir des théâtres de Pompéi (VIII 7, 20) pouvant évoquer des spectacles théâtraux. De haut en bas : localisation sur la photogrammétrie réalisée en 2017 par T. Crognier ; photographies en lumière rasante réalisées par l’équipe du projet “Bruits de couloir” en 2022 ; relevés de M. Langner (Langner 2001, n. 1157 et 1158) ; nouvelles lectures de l’équipe du projet “Bruits de couloir” en 2022 (F-16 et F-17).

Parmi les nombreux dessins de bateaux, animaux, gladiateurs et autres personnages entremêlées dans le couloir, ces deux scènes offrent un maigre écho des spectacles dramatiques qui se tenaient juste à côté : les scripteurs des graffiti ne nous ont pas laissé d’indices qui permettent de les caractériser comme spectateurs des théâtres.

Les spectateurs dans la cité

C’est loin des théâtres, dans d’autres lieux publics et dans l’espace public de la cité qu’on retrouve les échos les plus clairement issus des spectateurs des théâtres, non pas tant comme amateurs de spectacles que comme citoyens et partisans.

Un graffito bien connu d’interprétation délicate96, retrouvé en façade d’une maison sur la via di Nola, prend la forme d’un calligramme pour évoquer les “jeux du serpent” exécutés avec talent par un certain Sepumius, membre de l’association des Iuuenes. L’auteur du jeu de mots graphique interpelle le passant – qu’il soit spectator scaenae ou studiosus equorum – pour lui adresser un souhait de bonne fortune97. Nous ne reviendrons pas ici sur le lien entre théâtre et spectacles équestres que suggère ce graffito98 et soulignerons seulement qu’il indique que les passants étaient susceptibles de se reconnaître comme “spectateurs de théâtre”. La confrontation des deux expressions spectator scaenae et studiosus equorum, peut se comprendre de deux manières. Elle peut faire allusion à des préférences individuelles pour tel ou tel spectacle : studiosus equorum, une expression ovidienne selon H. Solin, signifierait alors “passionné de chevaux” donc des ludi circenses, et par conséquent, spectator scaenae désignerait non seulement le spectateur mais aussi l’amateur de théâtre. Elle peut aussi cibler plus précisément l’appartenance aux factions liées aux compétitions du cirque et de la scène99 et viser alors des spectateurs particulièrement impliqués en tant que “partisans” d’une couleur du cirque ou d’un pantomime en particulier100.

Des “fan-clubs” de pantomimes vedettes sont attestés dans le monde romain, en particulier grâce à la conservation exceptionnelle de Pompéi. Les admirateurs du pantomime Paris101 y ont ainsi laissé de nombreux graffiti le mentionnant sous la forme de salutations ou d’acclamations dans toute la ville et ses alentours. On retrouve ces graffiti dans une des entrées au grand théâtre, mais aussi sur des façades ou à l’intérieur de maisons, de villas suburbaines ou agricoles et même d’un monument funéraire. Il en existe aussi sur la façade ou à l’intérieur d’édifices publics (“caserma dei gladiatori” V 5, 3 ; grande palestre ; lupanar) ou encore du sanctuaire d’Isis, montrant que le public des théâtres existait dans les gradins mais aussi partout ailleurs. Ces adeptes sont aussi à l’origine d’inscriptions dans lesquelles ils se désignent comme un groupe : les Paridiani102. Sur la façade d’une boutique donnant sur la rue de l’Abondance, devant la maison des Chastes Amants, ils s’associent à un certain Purpurio pour appeler à élire C. Cuspius Pansa comme édile, dans les toutes dernières années de la ville103. Comme le supposait M. della Corte dans le CIL, il peut s’agir d’un groupe constitué pour assurer la claque à l’occasion des apparitions du pantomime. On verrait alors avec cette inscription électorale que l’influence politique des factions théâtrales et de la claque ne se limitait pas à l’enceinte du théâtre mais pouvait rejaillir dans la ville, au rythme de la vie civique.

Une autre inscription électorale trouvée à proximité du carrefour le plus fréquenté de Pompéi104 révèle peut-être elle aussi des liens très concrets entre brigue électorale et claque théâtrale. Également datée des toutes dernières années avant 79, elle est destinée à soutenir M. Epidius Sabinus dans sa candidature au duumvirat et signée par un Sabinus dissignator, fonction souvent associée au placement des spectateurs au théâtre, comme le suggérait déjà K. Zangemeister dans le CIL105. La mention cum plausu facit, un unicum à Pompéi, renforce la consonance théâtrale de cette signature et pourrait se comprendre dans le cadre de la claque, venue renforcer d’une manière ou d’une autre le soutien électoral énoncé par l’inscription.  

L’autre groupe de “fans” attestés à Pompéi sont les Anicetiani106, du nom du pantomime Actius Anicetus, mentionné pas moins d’une quinzaine fois sur les murs de Pompéi dans des contextes publics et privés aussi divers que pour Paris (parfois d’ailleurs aux mêmes endroits, ce qui suggère des interactions entre les deux groupes par graffiti interposés). Dans une auberge (VII 12, 34-35), fréquentée par de nombreux étrangers qui y laissèrent leurs noms sur les murs107, on garde la trace d’un groupe de quatre hommes liés entre eux et avec Actius Anicetus108 (ce dernier est mentionné aussi dans l’espace central de l’auberge avec un autre artiste, nommé Castrensis)109. Le sens de l’inscription est obscur mais il faut certainement entendre anicetiani comme le qualificatif que se donnaient les membres du groupe en tant que partisans de leur pantomime favori, l’adjectif sinceri venant renforcer leur engagement. Impossible de dire si leur séjour à l’auberge fut lié à un spectacle au théâtre, ce qui concorderait toutefois avec ce que l’on sait de l’accueil d’un public “de passage” dans le théâtre de Pompéi comme dans tous ceux du monde romain17.

La célébrité du mime Paris à Rome, le lien d’Actius Anicetus avec Pouzzoles110 tout comme la récurrence des acclamations de pantomime à Pompéi comme à Herculanum111 indiquent que ces acteurs pouvaient faire des tournées mais aussi que les plus fervents de leurs spectateurs pouvaient se déplacer pour les voir. Une enquête sur les annonces de combats de gladiateurs à Pompéi a montré que le calendrier des munera de la colonie tenait compte des grands événements festifs et ludiques de l’Vrbs pour éviter les chevauchements112 : on n’a pas d’informations similaires sur les spectacles théâtraux mais on peut faire l’hypothèse que le public des théâtres de Pompéi, en particulier les partisans de certains pantomimes, pouvait être mobile et venir d’ailleurs, en particulier des villes à proximité, ou se rendre ailleurs, voire jusqu’à Rome pour assister à des spectacles.

Les sources iconographiques ou épigraphiques ne nous permettent pas de bien connaître le public des théâtres de Pompéi : sa composition, ses goûts et préférences, sa provenance. Elles suggèrent que la variété des spectacles s’adressait à tous, dans un cadre avant tout civique et que, lorsqu’ils s’affirmaient comme tels, les spectateurs des théâtres le faisaient avant tout au sein de la ville, prenant part à la vie de la cité.

Les espaces réservés au public des théâtres : rassemblement et distinctions

Au sein même des théâtres, les espaces réservés au public permettent de porter un autre regard sur sa composition. Au fil des transformations des deux théâtres113, les gradins et leurs accès ont évolué, tout en continuant à répondre à des enjeux fondamentaux de rassemblement et de distinction.

L’évolution des espaces réservés au public dans le grand théâtre

On a très peu d’informations sur les premières phases du grand théâtre, probablement bâti au IIe s. a.C. dans un contexte d’intense activité constructive dans la ville samnite. Quelques vestiges observés sous la cauea actuelle au début du XXe s.114 indiquent que les gradins, peut-être en grand appareil de calcaire du Sarno115, étaient adossés à une pente naturelle complétée par un remblai que contenaient deux murs de soutènement bordant des parodoi découvertes. Le centre vers lequel convergeaient ces parodoi est différent de celui des phases ultérieures et indique que ce premier théâtre était implanté parallèlement au portique du forum triangulaire et au quadriportique situé en contrebas. Ce dernier servait-il de porticus post scaenam pouvant accueillir les spectateurs ? Rien ne permet à l’heure actuelle de s’en assurer.

Dans un deuxième temps – avant la construction du petit théâtre – la cauea fut totalement remaniée et agrandie. Les accès latéraux à l’orchestra furent transformés en aditus, couverts et alignés sur un même axe. On y accédait par deux baies symétriques qui s’ouvraient dans la façade rectiligne, celle de l’ouest ornée d’une clé d’arc sculptée en forme de protomé116. Dans cette phase, on n’a guère d’informations sur la nature des gradins, peut-être maçonnés117.

C’est probablement entre 2 a.C. et 14 p.C. que la cauea prit la forme qu’on lui connaît, grâce à l’ample reconstruction due à M. Holconius Rufus et M. Holconius Celer, qui financèrent, sur leurs fonds personnels118, la construction d’une galerie de circulation périphérique (crypta) servant de substruction à la summa cauea et donnant accès par le haut aux gradins de l’ima cauea. S’y ajoutèrent l’aménagement de tribunes honorifiques au-dessus des aditus (tribunalia) et la réfection de l’ensemble des gradins (theatrum). C’est certainement à la même époque que furent installés les quatre degrés bas de la proédrie, séparés de l’ima cauea par une précinction. Cette intervention, qui impliqua d’importants travaux de consolidation préalables119 ciblait spécifiquement les espaces dédiés au public et permit d’augmenter la capacité de l’édifice120 tout en le conformant aux exigences de la nouvelle législation augustéenne sur le public des spectacles. En effet, quatre zones permettaient de distinguer différentes catégories de spectateurs : la summa, l’ima cauea, la proédrie et les tribunes latérales121. Au cœur de ce dispositif, au centre du premier gradin de l’ima cauea, juste au-dessus de la précinction qui la séparait de la proédrie, une inscription en lettres de bronze122 réservait une place à M. Holconius Rufus, y compris de manière commémorative après son décès. Autant que le front de scène, la cauea était ainsi un espace d’affichage (fig. 6).

Vue de la cavea du grand théâtre avec les différentes zones créées 
à l’occasion de la rénovation financée par les Holconii
Fig. 6. Vue de la cavea du grand théâtre avec les différentes zones créées à l’occasion de la rénovation financée par les Holconii. En rouge, les dispositifs de séparation – non hermétique – entre ces différentes zones (photographie et DAO É. L.-T. avec l’aimable autorisation du Ministero della Cultura – Parco Archeologico di Pompei).

Les gradins de la summa cauea étaient simplement maçonnés comme on peut encore le voir à son extrémité sud. Ceux de l’ima cauea, en marbre,furent largement récupérés après l’éruption. Les quelques blocs conservés123 montrent un plan supérieur parfaitement horizontal, profond de 72 cm124. Le plan antérieur est vertical et mesure 39 cm ; sur un des blocs conservés, une série de chiffres de XI à XV sont encadrés par de courtes rainures espacées de 39 cm125. Un autre bloc présente seulement les rainures. Il s’agit des vestiges de délimitations de places individuelles, dans certaines parties des gradins uniquement126.

La proédrie était constituée de degrés bas et profonds sur lesquels on plaçait des sièges mobiles, comme c’était aussi le cas sur les plateformes des tribunalia. Le droit de siéger ainsi était un privilège accordé par décret des décurions et avec l’accord du peuple, comme en témoigne le monument funéraire de l’augustale C. Calventius Quietus à Pompéi127. On a conservé des éléments de sièges d’apparat provenant du théâtre d’Herculanum128. Lors des fouilles du XVIIIe s. à Pompéi, furent également retrouvés, sous le portique situé à la jonction entre les deux théâtres, de nombreux fragments de meubles en fer plaqué d’ivoire, travaillé au tour et parfois orné de motifs et figures en relief129. Ils furent dégagés et observés avec assez de soin pour permettre à F. La Vega d’y reconnaître les restes de plusieurs sièges, visiblement munis de dossiers, entreposés sur toute la longueur du portique et dont l’un aurait même conservé son coussin de laine. Il s’agit selon nous des sièges de la proédrie du grand théâtre, rassemblés à l’abri du portique dans l’attente du prochain spectacle. Attestant au passage que le grand théâtre était bien en activité au moment de l’éruption130 (même si les spectateurs n’y étaient pas précisément assis, contrairement à ce que suggérait Cassius Dion) ces découvertes exceptionnelles incarnent l’apparat associé au privilège de siéger dans la proédrie et montrent que ce type de mobilier n’était pas réservé au cadre domestique ou funéraire131 mais permettait aussi d’afficher un certain statut au théâtre. Leur conservation groupée dans une annexe132 invite à se demander si ces sièges, différenciés par le raffinement de leur décor respectif, appartenaient chacun à un propriétaire ou s’ils étaient mis à disposition de tous les spectateurs de la proédrie.

Les modalités concrètes d’installation des spectateurs dans les gradins incarnent ainsi la recherche de distinction sociale, caractéristique des pratiques romaines liées aux édifices de spectacles depuis la République et renforcées par Auguste.

Les accès aux différents secteurs étaient multiples133. Depuis le niveau haut du quartier, on pouvait emprunter plusieurs escaliers menant directement à la summa cauea ou se diriger de plain-pied vers la galerie périphérique couverte qui permettait d’accéder à travers six vomitoires aux différents secteurs de l’ima cauea par le haut. Depuis le niveau bas, l’accès se faisait par les deux aditus. À l’occasion de la reconstruction augustéenne, ces derniers furent agrandis et dotés d’un triple débouché desservant la tribune, l’orchestra, la proédrie et le bas de l’ima cauea134 . On pouvait aussi passer aisément de la proédrie à la précinction et à l’ima cauea par trois petits escaliers. Il n’y avait donc pas d’imperméabilité totale entre les zones et les différentes catégories de spectateurs pouvaient être mêlées jusqu’au dernier moment lorsqu’elles entraient au théâtre, ce qui invite à relativiser l’idée de ségrégation sociale : elle intervenait vraiment une fois les spectateurs assis, en une véritable “mise en scène” de l’ordre social.

Les travaux des Holconii permirent enfin d’améliorer le confort de l’ensemble du public, grâce à l’installation d’un vélum135 et à l’intégration du théâtre dans le réseau hydraulique urbain, comme l’attestent une petite latrine collective et de nombreux autres dispositifs hydrauliques en cours d’étude.

Répartition des spectateurs dans le theatrum tectum

La cauea du theatrum tectum, bâtie dans les années 70 a.C. et dépourvue de transformations visibles136, est incluse dans une enceinte rectangulaire qui supportait le toit. Il offrait ainsi un confort exceptionnel aux spectateurs, qui prenaient place en nombre plus restreint dans cet édifice137. Le public se répartissait dans trois zones : les gradins de la cauea, la proédrie – isolée par une précinction et une balustrade – et les tribunes latérales au-dessus des aditus, les plus anciennes qu’on connaisse à ce jour (fig. 7).

Plan du theatrum tectum d’après F. Mazois
Fig. 7. Plan du theatrum tectum d’après F. Mazois (Les ruines de Pompéi, IV, Paris, 1838, pl. 28).

Deux escaliers situés dans les angles de l’enceinte rectangulaire, à l’arrière des gradins, permettaient d’accéder à la cauea par le haut. On y entrait par deux portes donnant sur le couloir VIII 7, 20 qui servait d’accès partagé avec le grand théâtre (voir fig. 1). On pouvait également arriver dans les gradins en entrant dans l’orchestra par les aditus et en empruntant quatre marches semi-circulaires en lave, adossées aux murs de soutènement de la cauea, pour atteindre la précinction. De cette précinction, en dalles de tuf, partaient les six escaliers de lave qui divisent les dix-huit rangs de gradins en cinq cunei. Les gradins sont composés de blocs de tuf installés sur un support en maçonnerie de lave138. Leur plan antérieur comporte une mouluration en surplomb par rapport au support de maçonnerie, ce qui ménageait de l’espace pour les pieds. Le plan supérieur, d’une profondeur moyenne de 74 cm, est décaissé dans sa moitié postérieure, réservée au passage et aux pieds des spectateurs du rang supérieur (fig. 8).

Schéma du profil des gradins de la cavea du theatrum tectum
Fig. 8. Schéma du profil des gradins de la cavea du theatrum tectum (S. Zugmeyer / EFR-IRAA).

Pour accéder aux tribunes latérales, il fallait entrer sur la scène par les portes latérales donnant à l’extérieur et emprunter un petit escalier adossé au mur de l’aditus. La première volée de marches conduisait à une plateforme qui pouvait accueillir quelques sièges mobiles. La seconde volée permettait d’accéder aux trois rangs de gradins situés en arrière. Il n’y avait pas de circulation possible entre ces tribunes et le reste de la cauea.

Ceux qui avaient le privilège de s’asseoir sur des sièges mobiles installés sur les degrés bas de la proédrie, en blocs de lave, entraient enfin par les aditus et traversaient l’orchestra dallée de marbres polychromes. L’espace qui leur était réservé était délimité par une balustrade en tuf. Le décor sculpté associé reprend un modèle commun aux théâtres de Pietrabbondante et Sarno, où la proédrie est en revanche composée de banquettes à dossiers, comme dans les théâtres grecs, et non de degrés bas pour des bisellia, qui inscrivent les deux théâtres de Pompéi dans des pratiques typiquement romaines.

Là encore, les gradins offrent un espace très efficace de distinction sociale, pour un public dont nous avons vu que nous connaissons mal la composition mais qui se réunissait dans les deux théâtres de manière à la fois unitaire et distincte, selon des modalités précises et adaptées que le cas de Pompéi contribue à éclairer.

Conclusion : des spectateurs aux usagers ?

Ce qui distingue le petit théâtre couvert du grand, outre le nombre restreint de spectateurs, c’est la possibilité de clore l’ensemble des accès, donc de contrôler l’entrée dans l’édifice en fonction des occasions tandis que dans le grand théâtre certains accès, notamment les aditus, sont dépourvus de portes. Il demeurait alors littéralement ouvert à tous139, comme le prévoient les textes juridiques140. Que faisait-on dans les gradins en dehors des spectacles ? Pouvait-on s’y réunir, profiter des espaces couverts, de l’eau courante ou des latrines par exemple ? Même à Pompéi, peu d’éléments archéologiques permettent de répondre à ces questions ; en revanche, nous pouvons les poser aux centaines de graffiti inscrits sur les murs du couloir commun aux deux théâtres et qui n’ont quasiment rien à voir avec les spectacles théâtraux141. Ces textes et ces images enchevêtrés nous offrent une fenêtre incomparable sur les usages quotidiens des lieux publics que constituaient les théâtres, et invitent à s’intéresser non seulement au public des théâtres dont on a vu qu’il demeurait assez insaisissable, mais aussi à leurs usagers.

Bibliographie

  • AA.VV. (1765) : Delle Antichità di Ercolano esposte. 4. Le pitture antiche d’Ercolano e contorni, Naples.
  • AA.VV. (1792) : Delle Antichità di Ercolano esposte. 8. Le lucerne ed i candelabri d’Ercolano e contorni incise con qualche spiegazione, Naples.
  • Alapont Martin, L. et G. Zuchtriegel (2022) : “The newly discovered tomb of Marcus Venerius Secundio at the Porta Sarno, Pompeii: Neronian zeitgeist and its local reflection”, Journal of Roman Archaeology, 35.2, 595‑620.
  • Alapont Martin, L., G. Zuchtriegel, J. Alfonso, V. Amoretti, P. Mas, A. Miguelez et J.J. Ruiz López (2022) : “L’area funeraria di Porta Sarno e la tomba di Marcus Venerius Secundio a Pompei, riflesso dell’impulso culturale dopo il terremoto del 62 d.C.”, Rivista di Studi Pompeiani, 33, 161‑172.
  • Alföldi-Rosenbaum, E. (1976) : “Alexandriaca – Studies on Roman Game Counters III”, Chiron, 6, 203‑239.
  • Arnaud, P. (2004) : “L’empereur, l’histrion et la claque, un jeu réglé et ses dérèglements”, in : Hugoniot et al., éd. 2004, 275-306.
  • Autin, L., M.-A. Le Guennec et É. Letellier-Taillefer (2023) : “« Bruits de couloir ». Étude spatialisée des graffiti du couloir des théâtres de Pompéi. Campagne 2022”, Bulletin archéologique des Écoles françaises à l’étranger, http://journals.openedition.org/baefe/7609  
  • Baker, D. (2005) : “The great theatre at Pompeii and a pompeian fresco”, Didaskalia, 6.2, https://www.didaskalia.net/issues/vol6no2/images/baker/baker.pdf  
  • Baldassare, I., A. Pontrandolfo, A. Rouveret et M. Salvadori (2002) : Pittura romana: dall’ellenismo al tardo-antico, Milan.
  • Balty, J.-C. (1991) : Curia ordinis : recherches d’architecture et d’urbanisme antiques sur les curies provinciales du monde romain, Académie royale de Belgique – Mémoires de la classe des beaux-arts. Collection in-4°, 2e série, tome XV, fasc. 2, Bruxelles.
  • Bianchi, C. (2021) : “Les jetons historiés dits ‘alexandrins’ : bilan et propositions”, in : Dasen, V. et Vespa, M., éd. : Play and Games in Classical Antiquity. Definition, Transmission, Reception / Jouer dans l’Antiquité classique. Définition, transmission, réception, Liège, 179-203.
  • Bieber, M. (1961) : The History of the Greek and Roman Theater, Princeton.
  • Boissier, G. (1877) : “Atellanae Fabulae”, in : Daremberg, C. et Saglio, E., éd. : Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, 513‑515.
  • Borriello, M.R. (2010) : “Il teatro romano: l’attore, la maschera”, in : Borriello et al., éd. 2010, 33‑36.
  • Borriello, M.R., L. Malnati, G. Montevecchi et V. Sampaolo, éd. (2010) : Histrionica: teatri, maschere e spettacoli nel mondo antico (mostra, Ravenna, Complesso di San Nicolò, 20 marzo – 12 settembre 2010), Milan.
  • Capaldi, C. et F. Zevi, éd. (2017) : Museo archeologico nazionale di Napoli. La collezione epigrafica, Naples.
  • Chapelin, G. et É. Letellier-Taillefer (2019) : “Théâtres de Pompéi – Campagnes 2017”, Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome, http://journals.openedition.org/cefr/3246  
  • Cormier, A. (2020) : “Les lits en ivoire et les lits en os du Musée archéologique de Naples”, Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome, http://journals.openedition.org/cefr/4367
  • Cormier, A. (2022) : “Ad luxuriae instrumenta. Les objets dans leur contexte, entre la demeure et la tombe : le mobilier en ivoire et en os à Pompéi”, Bulletin archéologique des Écoles françaises à l’étranger, http://journals.openedition.org/baefe/2294
  • Cube (von), G. (1906) : Die römische “scaenae frons” in den pompejanischen Wandbildern 4. Stils, Beiträge zur Bauwissenschaft 6, Berlin.
  • Castiglione Morelli Del Franco, V. et R. Vitale (1989) : “L’‘insula’ 8 della ‘Regio’ I: un campione d’indagine socio-economica”, Rivista di Studi Pompeiani, 3, 185‑221.
  • Dumont, J.-C. et M.-H. François-Garelli (1998) : Le théâtre à Rome, Paris.
  • Dunbabin, K.M.D. (2004) : “Problems in the Iconography of Roman Mime”, in : Hugoniot et al., éd. 2004, 161-181.
  • Dunbabin K.M.D. (2016) : Theater and Spectacle in the Art of the Roman Empire, Ithaque – Londres.
  • Dupont, F. et P. Letessier [2012] (2017) : Le théâtre romain, 2e éd., Cursus, Paris.
  • Elia, O. (1965) : “Rappresentazione di un pantomimo nella pittura pompeiana”, in : Gli archeologi italiani in onore di Amedeo Maiuri, [Cava de’ Tirreni], 167‑179.
  • Eristov, H. (1994) : Les éléments architecturaux dans la peinture campanienne du quatrième style, CEFR 187, Rome.
  • Fagan, G.G. (2011) : The Lure of the Arena: Social Psychology and the Crowd at the Roman Games, Cambridge.
  • Fincker, M., É. Letellier-Taillefer et S. Zugmeyer (2018) : “Théâtres de Pompéi – Campagne 2016”, Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome, http://journals.openedition.org/cefr/1853
  • Fiorelli, G. (1860) : Pompeianarum antiquitatum historia, Naples.
  • Fragaki, H. (2011) : Images antiques d’Alexandrie, Ier siècle av. J.-C. – VIIIe siècle apr. J.-C., Études Alexandrines-Publications de l’Institut Français d’Archéologie Orientale 20-1033, Le Caire.
  • Franklin, J.L. (1987) : “Pantomimists at Pompeii : Actius Anicetus and his troupe”, American Journal of Philology, 108.1, 95‑107.
  • Frassinetti, P. (1967) : Atellanae fabulae, Poetarum Latinorum reliquiae 6.1, Rome.
  • Frézouls, E. (1981) : “L’iconographie du théâtre romain : problèmes d’utilisation”, in : Siebert, G. éd. : Méthodologie iconographique, Actes du colloque de Strasbourg. 27-28 avril 1979, Strasbourg, 29‑38, pl. VIII‑XI.
  • Garelli, M.-H. (2007) : Danser le mythe : la pantomime et sa réception dans la culture antique, Bibliothèque d’études classiques 51, Louvain – Paris – Dudley.
  • Gigante, M. (1979) : Civiltà delle forme letterarie nell’antica Pompei, Naples.
  • Golvin, J.-C. (1988) : L’amphithéâtre romain : essai sur la théorisation de sa forme et de ses fonctions, Publications du Centre Pierre Paris 18, Paris.
  • Gordon, F. (2009) : “La fabula atellana e le pitture parietali pompeiane”, Raccolta rassegna storica dei comuni, 23, 166‑189.
  • Gourdet, C. (2004) : “Pantomimes et grandes familles au Haut-Empire”, in : Hugoniot et al., éd. 2004, 307‑325.
  • Gros, P. (1996) : L’architecture romaine du début du IIIe siècle av. J.-C. à la fin du Haut-Empire. 1, Les monuments publics, Paris.
  • Guzzo, P.G. (2007) : Pompei: storia e paesaggi della città antica, Milan.
  • Hugoniot, C., F. Hurlet et S. Milanezi, éd. (2004) : Le statut de l’acteur dans l’Antiquité grecque et romaine, Actes du colloque, Tours, 3-4 mai 2002, Perspectives historiques 9, Tours.
  • Ji̇ménez, L.N. et I. Rodríguez (2021) : “Reflections on music performance and dancing in a roman mosaic found on the Aventine”, Journal of Mosaic Research, 14, 217‑231.
  • Landes, C. (1989) : Le goût du théâtre à Rome et en Gaule romaine, Lattes.
  • Langner, M. (2001) : Antike Graffitizeichnungen: Motive, Gestaltung und Bedeutung, Palilia 11, Wiesbaden.
  • Lauter, H. (1976) : “Die hellenistischen Theater der Samniten und Latiner in ihrer Beziehung zur Theaterarchitektur der Griechen”, in : Zanker, P., éd. : Hellenismus in Mittelitalien, Colloque, Göttingen, 5-9 juin 1974, Abhandlungen der Akademie der Wissenschaften in Göttingen. Philologisch-historische Klasse, 2. Folge, 97, Göttingen, 413‑430.
  • Le Guennec, M.-A. (2019) : Aubergistes et clients. L’accueil mercantile dans l’Occident romain (IIIe s. av. J.-C. – IVe s. apr. J.-C.), BEFAR 381, Rome.
  • Letellier, É. (2015) : Le théâtre dans la ville : recherches sur l’insertion urbaine des théâtres romains (thèse de doctorat), Aix-Marseille Université.
  • Letellier-Taillefer, É. (2018) : “Textes, images et imaginaire de l’architecture : dans le dédale des graffitis labyrinthiques du couloir des théâtres de Pompéi”, in : Robert R. et Herbert de la Porbarré-Viard G., éd. : Les architectures fictives de l’Antiquité : textes – images, Scripta Antiqua 114, Bordeaux, 179‑209.
  • Letellier-Taillefer, É. (2019) : “Nouvelles recherches sur les théâtres de Pompéi”, Bulletin de la société française d’archéologie classique. Revue archéologique, 67, 178‑184.
  • Letellier-Taillefer, É. (2021) : “Les édifices de spectacles romains : lieux publics, lieux d’accueil, lieux d’hospitalité ?”, Topoi, 24.1, 275‑291.
  • Maioli, M.G. (2010) : “Suggestioni teatrali nell’edilizia privata romana”, in : Borriello et al. éd. 2010, 53‑58.
  • Maiuri, A. (1950) : “La parodia di Enea”, Bollettino d’Arte, 35, ser. IV, fasc. II, 108‑112.
  • Maiuri, A. (1951) : “Saggi nella cavea del ‘Teatro grande’”, Notizie degli Scavi di antichità, ser. 8.5, 126‑134.
  • Maiuri, A. (1953) : “Due singolari dipinti pompeiani”, Römische Mitteilungen des deutschen archäologischen Instituts, LX‑LXI, 88‑99.
  • Maiuri, A. (1954) : “Il restauro della cavea nei teatri di Pompei”, Bollettino d’Arte, 39, ser. IV, fasc. III, 264‑267.
  • Mau, A. (1906) : “Das grosse Theater in Pompeji”, Römische Mitteilungen des deutschen archäologischen Instituts, 21, 1‑56.
  • Meinel, R. (1980) : Das Odeion: Untersuchungen an überdachten antiken Theatergebäuden, Europäische Hochschulschriften. Reihe 28, Kunstgeschichte 11, Francfort.
  • Murolo, M. (1959) : “Il cosidetto odeo di Pompei ed il problema della sua copertura”, Rendiconti della Accademia di archeologia lettere e belle arti di Napoli, 34, 89‑101.
  • Osanna, M. et C. Rescigno, éd. (2017) : Pompei e i Greci. Catalogo della mostra (Pompei, 11 aprile-27 novembre 2017), Milan.
  • Pagano, M. et R. Prisciandaro (2006) : Studio sulle provenienze degli oggetti rinvenuti negli scavi borbonici del Regno di Napoli: una lettura integrata,coordinata e commentata della documentazione, Studi e ricerche della Soprintendenza per i beni archeologici del Molise 1‑2, Castellammare di Stabia.
  • Paillard, E. (2022) : “Greek Theatre in Roman Italy: From Elite to Autocratic Performances”, in : Csapo, E., Goette, H.R., Green, J.R., Le Guen, B., Paillard, E., Stoop J. et Wilson, P. éd. : Theatre and Autocracy in the Ancient World, Berlin – Boston, 85‑104.
  • Paillard, E. et V. Monteventi (2023) : “Les ludi Graeci chez Cicéron”, Hermes, 151.2, 177‑191.
  • Paribeni, R. (1902) : “Pompei. Relazione degli scavi eseguiti nel meso di settembre 1902”, Notizie degli Scavi di antichità, 512‑515.
  • Parise Badoni, F. (2001) : “Narciso a Pompei nella casa dei Quattro Stili?”, Mélanges de l’École française de Rome – Antiquité, 113.2, 787‑798.
  • Pepe, C. (2017a) : “La lingua greca a Pompei”, in : Osanna & Rescigno, éd. 2017, 185‑186.
  • Pepe, C. (2017b) : “Leggere. Testi greci a Pompei”, in : Osanna & Rescigno, éd. 2017, 291‑300.
  • Pesando, F. et M.P. Guidobaldi (2006) : Pompei, Oplontis, Ercolano, Stabiae, Guide archeologiche Laterza 14, Rome.
  • Poccetti, P. (2017) : “Parlare. la grecità nel contesto multilingue e multiculturale di Pompei e della Campania antica”, in : Osanna & Rescigno, éd. 2017, 300‑313.
  • Popkin, M.L. (2022) : Souvenirs and the experience of Empire in Ancient Rome, Cambridge.
  • Puchstein, O. (1907) : “Pompejanische Theaterbilder”, Jahrbuch des Deutschen Archäologischen Instituts mit dem Beiblatt Archäologischer Anzeiger, 22, col. 408‑410.
  • Pugliese Carratelli, G., éd. (1990) : Pompei: pitture e mosaici. Volume I, Regio I, parte prima, Rome.
  • Romanelli, D. (1811) : Viaggio a Pompei, a Pesto e di ritorno a Ercolano colla illustrazione di tutti i monumenti finora scoverti, e colle piante delle tre distrutte città (…), Naples.
  • Santucci, A. (2013) : “L’Atellana nella cultura figurativa: Presenze/assenze e consonanze di temi”, in : Raffaelli, R. et Tontini, A., éd. : L’Atellana preletteraria: atti della Seconda Giornata di studi sull’Atellana, Casapuzzano di Orta di Atella, 12 novembre 2011, Urbino, 61‑93.
  • Sauron, G. (2013) : “Le théâtre de Pompée et le ‘deuxième style pompéien’”, in : Rosso, E. et Dardenay, A., éd. : Dialogues entre sphère publique et sphère privée dans l’espace de la cité romaine. Vecteurs, acteurs, significations, Ausonius Scripta Antiqua 56, Pessac, 19‑33.
  • Schäfer, T. (1979) : “Le ‘sellae curules’ del teatro di Ercolano”, Cronache Ercolanese, 9, 143‑151.
  • Sear, F. (2006) : Roman Theatres: An Architectural Study, Oxford monographs on classical archaeology, Oxford.
  • Sheppard, J. (2019) : Mass Spectacles in Roman Pompeii as a System of Communication (PhD thesis), Columbia University.
  • Sogliano, A. (1908) : “L’attore Paride in Pompei”, Atti dell’Accademia Pontaniana, 38, 9.
  • Torelli, M. (2020) : “La cultura figurativa ‘plebea’”, in : Torelli, M., éd. : Pompei 79 d.C. Una storia romana. Catalogo della mostra, Roma, Colosseo, 6.11.2020-31.1.2021, Rome, 272‑275.
  • Tuck, S.L. (2008) : “Scheduling Spectacle: Factors Contributing to the Dates of Pompeian ‘Munera’”, The Classical Journal, 104.2, 123‑143.
  • Van Andringa, W. (2013) : Pompéi, mythologie et histoire, Paris.
  • Zanker, P. (1993) : Pompei, Società, immagini urbane e forme dell’abitare, Turin.
  • Zevi, F. (1995) : “Personaggi della Pompei sillana”, Papers of the British School at Rome, 63, 1‑24.
  • Zevi, F. (1996) : “Pompei dalla città sannitica alla colonia sillana: per un’interpretazione dei dati archeologici”, in : Cébeillac Gervasoni, M., éd. : Les élites municipales de l’Italie péninsulaire des Gracques à Néron, Actes de la table ronde internationale de Clermont-Ferrand, 28-30 novembre 1991, CollEfR 215, Naples – Rome, 125‑138.

Notes

  1. Une quantité indicible de cendre fut projetée […] et elle ensevelit aussi deux villes entières, Herculanum et Pompéi, alors que les habitants de cette dernière étaient rassemblés dans les gradins du théâtre”, Histoire romaine, 66.23.3 (éd. H. Baldwin Foster, Londres – New York, 1925, traduction personnelle).
  2. Voir A. Galimberti dans le commentaire de l’édition italienne de la collection Biblioteca Universale Rizzoli (Milan, 1995), note 126 p. 144.
  3. Cf. les contributions de Marion Bellissime et de Patrizia Arena dans ce volume.
  4. Cf. la contribution de Gian Luca Gregori et Fabio Mancuso, et celle de Joe Sheppard dans ce volume.
  5. Pour reprendre le titre d’un des chapitres du livre de M. Gigante : Gigante 1979, 112-152.
  6. Lauter 1976.
  7. Zevi 1995.
  8. Selon F. Zevi, cela explique mieux la construction que la recherche d’un lieu de réunion pour les colons. Pour des argumentations en faveur d’une utilisation du theatrum tectum pour des réunions politiques : Balty 1991, 593‑595 (peut-être dès l’époque samnite) ; Zanker 1993, 76 (au moment de l’implantation de la colonie) ; Gros 1996, 309-310. Il nous semble peu plausible que le theatrum tectum ait été conçu comme un lieu de réunion, car son nom comme ses caractéristiques architecturales le destinent sans équivoque aux spectacles ; en revanche, ces infrastructures publiques étant sans doute polyvalentes, rien n’empêche de penser qu’il ait pu accueillir aussi des réunions.
  9. Letellier-Taillefer 2019.
  10. Zevi 1995, 3.
  11. Landes 1989.
  12. Voir les notices de Suétone concernant les jeux donnés par César (Iul., 39 : ludos etiam regionatim urbe tota et quidem per omnium linguarum histriones), Auguste (Aug., 43 : uicatim ac pluribus scaenis per omnium linguarum histriones) ou le compte-rendu des jeux séculaires qui incluaient des ludi latini et des ludi graeci de diverse nature, organisés dans des lieux différents (CIL, VI, 877, 32323-32324 et 32326-32334).
  13. Alapont Martin et al. 2022 ; Alapont Martin & Zuchtriegel 2022. Voir aussi : https://georgykantorblog.wordpress.com/2021/08/17/a-new-find-from-pompeii/
  14. Paillard 2022 ; Paillard & Monteventi 2023.
  15. Le parallèle le plus proche provient de Caere, en 25 p.C. (CIL, XI, 3613) où un groupe de douze affranchis offrirent quatre jours de “jeux grecs et latins” ainsi que des distributions alimentaires. L’intervention de M. Venerius Secundio en son nom seul traduit par contraste l’aisance économique qu’il avait acquise.
  16. Alapont Martin et al. 2022, 212‑213 ; Alapont Martin & Zuchtriegel 2022, 615.
  17. Letellier-Taillefer 2021.
  18. Pepe 2017a ; Pepe 2017b ; Poccetti 2017.
  19. http://pompeiisites.org/comunicati/rinvenuta-a-porta-sarno-la-tomba-di-marcus-venerius-secundio-con-resti-umani-mummificati/
  20. Pagano & Prisciandaro 2006, vol. I p. 36.
  21. MANN inv. 77120.
  22. Cette interprétation persiste, depuis les premiers éditeurs de cet objet : AA.VV. 1765, III‑X ; jusqu’aux commentateurs les plus récents de la question de la mise en scène de théâtre grec à Pompéi : Pepe 2017a fig. 5 ; Pepe 2017b, 298 ; Sheppard 2019, 113 ; Alapont Martin et al. 2022, 213 ; Alapont Martin & Zuchtriegel 2022, 617. Chiara Bianchi a récemment retracé l’histoire de cette hypothèse et les possibles raisons de sa persistance malgré sa réfutation dès la fin du XIXe s. : Bianchi 2021.
  23. Alföldi-Rosenbaum 1976 ; Bianchi 2021.
  24. Alföldi-Rosenbaum 1976, 211 et pl. 18.
  25. Fragaki 2011, 31.
  26. Alföldi-Rosenbaum 1976 ; Fragaki 2011, 2 et 114‑119 ; Bianchi 2021.
  27. Pour les tenants de l’interprétation de cet objet comme un billet d’entrée au théâtre, l’image du droit est trop rapidement décryptée comme celle d’un théâtre, voire plus précisément du théâtre de Pompéi (par exemple récemment : Pepe 2017a, 185 ; Alapont Martin & Zuchtriegel 2022, 617). Pourtant, elle ne représente qu’un ensemble d’éléments architecturaux très génériques qui n’ont rien de spécifiquement théâtral. Il pourrait éventuellement s’agir de l’évocation des architectures fictives des décors scéniques, qu’on retrouve dans certains décors peints de IIe style, comme celui du cubiculum de la villa de P. Fannius Synistor à Boscoreale. Quoi qu’il en soit, si jamais l’image doit bien être liée à un cadre théâtral, ça ne serait pas celui de Pompéi mais d’Alexandrie : Fragaki 2011, 31.
  28. Par exemple MANN inv. 77111.
  29. Golvin 1988, 353‑354 ; Fagan 2011, 100-101.
  30. Romanelli 1811, 136. Voir : Letellier 2015, 783-784 ou Sheppard 2019, 113.
  31. Mise en scène de l’Alceste d’Euripide par E. Romagnoli, voir l’affiche : Museo nazionale Collezione Salce, inv. 10696.
  32. Par exemple : Bieber 1961, 227‑232 ; Gigante 1979, 113 ; Pepe 2017b, 297-298.
  33. Bieber 1961.
  34. Bieber 1961, 228 (fig. 760-764).
  35. Par exemple, Persée et Andromède : Bieber 1961, 157, fig. 570-571.
  36. Bieber 1961, 82 (fig. 300a et 302) : acteurs regardant un masque.
  37. Bieber 1961, 91 (fig. 322) : portrait de Ménandre.
  38. Bieber 1961, 11-12 (fig. 36) : préparation d’un drame satyrique.
  39. Bieber 1961, 95-96 (fig. 346-347) : pièces de Ménandre représentées par les emblemata de Dioscouridès provenant de la villa dite de Cicéron; 227-232 : alternances de scènes comiques et tragiques de la maison de Casca Longus (aujourd’hui “dei quadretti teatrali”, I 6, 11) et de celle du centenaire (IX 8, 6), avec propositions d’identification de pièces en fonction des personnages et situations représentées ; 231 (fig. 774), identification de l’Iphigénie de Naevius dans un décor de la maison de Pinarius Cerealis (III 4, b).
  40. Dunbabin 2016.
  41. Par exemple, Franklin 1987, 105 ; Pepe 2017b, 296.
  42. Dunbabin 2016, 10, 57, 62.
  43. On peut prendre l’exemple du portrait de Ménandre : Bieber 1961, 89‑91 ; ou des scènes issues de ses comédies dont témoignent en particulier les emblemata de Dioscouridès : Dunbabin 2016, 57-70.
  44. Par exemple : AA.VV. 1792, 174 (pl. XXXV).
  45. Musée du Louvre, MNC 1980, Bj 1924.
  46. Au sens moderne du terme du moins, c’est-à-dire conçus et/ou acquis pour évoquer a posteriori l’expérience d’un spectacle en particulier. Pour une réflexion sur la notion de “souvenir” dans le monde romain : Popkin 2022. Dans son chapitre consacré aux “memorabilia théâtraux” (165-206), l’autrice montre que ces objets, d’une grande variété et présents dans tout l’empire, attestent la diffusion d’une conception “abstraite” du théâtre, marqueur d’une culture commune à travers les provinces et les différentes classes sociales, plus qu’une évocation de spectacles spécifiques comme cela pouvait être le cas pour d’autres genres spectaculaires.
  47. De Cube (von) 1906 ; et Puchstein 1907 ; Bieber 1961, 231‑233 ; jusqu’à Baker 2005 (le cas des peintures des “thermes du Sarno”, VIII 2, 23, est un exemple privilégié pour ce type de démonstrations).
  48. On évoque souvent des scènes de comédies ou de tragédies, mais aussi de pantomime : Dunbabin 2016, 99-100.
  49. Maioli 2010, 55.
  50. De Arch. VII, 5, 2.
  51. Frézouls 1981 ; Eristov 1994, 9-14.
  52. Baldassare et al. 2002, 91-92.
  53. Sauron 2013.
  54. Gigante 1979, note 70 p. 123.
  55. Pepe 2017b, 297-298.
  56. Pepe 2017b, 297-298, à propos de deux graffiti trouvés à Herculanum et Pompéi composés de brèves citations d’Euripide et de Ménandre, que d’autres sources littéraires permettent de rattacher au goût antique bien attesté pour les collections de citations proverbiales.
  57. Boissier 1877 ; Frassinetti 1967 ; Dumont & François-Garelli 1998, 174‑176 ; Dupont & Letessier [2012] 2017, 165-170. À propos de Pompéi : Sheppard 2019, 274-276.
  58. Notamment Tite Live, 7.2 et Valère Maxime 2.4.4.
  59. “Car je ne pense pas que tu aies regretté les jeux Grecs ou les jeux Osques : ceux-ci, il te suffit d’une séance de votre Sénat pour en avoir le spectacle, et quant aux Grecs, tu les aimes si peu que tu évites même de prendre la via Graeca pour gagner ta villa.” Cicéron, Fam. 7.1 (éd. et trad. L.-A. Constans, Paris, 1971).
  60. On a estimé souvent que ce passage faisait allusion au sénat de Pompéi, colonie que Cicéron connaissait bien pour en avoir défendu le fondateur (Pro Sylla) et pour y avoir lui-même une villa : Zevi 1996, 131 ; Guzzo 2007, 135 ; voir aussi la note de J.-N. Robert dans l’édition de la Correspondance (Paris, 2021), p. 195. Cependant, comme on considère que le territoire de Stabies passa après la guerre sociale sous la dépendance de Nocera (Pesando & Guidobaldi 2006, 411‑412) la boutade de Cicéron pourrait plutôt viser le sénat de Nocera (Maiuri 1953, note 24 p. 96 ; Paillard & Monteventi 2023, note 16 p. 183). Comme on ne sait pas précisément où se trouvait la villa de M. Marius, la question semble difficile à trancher. Quoi qu’il en soit, ce passage peut nous renseigner sur l’atmosphère qui régnait dans les deux colonies voisines, à travers le prisme du regard de Cicéron.
  61. CIL, IV, 2457 = T-43 dans la nouvelle étude du corpus des graffiti du couloir des théâtres menée dans le projet “Bruits de couloir”. Le texte actuellement lisible est le suivant : Methe Caminia[e] s(erua)\Camina[e]s (serua) At+[—] ama[t] Ch[r]estum c[o]rde. [—] Vtreis [que] Ven[u]s Pomp[e]iana p[r]o[pi]tia e[t] sem[per] [conco]rdes ueiuan[t][—, que nous avons traduit ainsi : “Methe, esclave de Caminia, […] aime Chrestus dans son cœur. […] Que la Vénus de Pompéi leur soit propice à tous les deux et qu’ils vivent pour toujours dans l’harmonie.” Le mot atellana (après serua) n’est plus lisible aujourd’hui mais le relevé du CIL (pl. XXXIX) semble assez clair pour justifier sa lecture.
  62. Voir la notice de H. Solin dans CIL, IV, Suppl. 4, 2, 1774.
  63. Franklin 1987, 103, qu’on suivra plus volontiers ici que M. Gigante qui associe le nom de Chrestus à un masque de Pollux ; Gigante 1979, 146.
  64. Autin et al. 2023.
  65. Gordon 2009.
  66. Voir les variations entre les différentes copies anciennes d’une scène comique de la maison de la grande fontaine (VI 8, 22) rassemblées par Jackie et Bob Dunn : https://www.pompeiiinpictures.com/pompeiiinpictures/R6/6 08 22 p4.htm  (consulté le 14/07/2023).
  67. Santucci 2013.
  68. Voir Dunbabin 2004, 163‑165.
  69. Santucci 2013, 79‑80 et fig. 7.
  70. Borriello et al., éd. 2010, 81‑85 ; Borriello 2010, 35-36. Il pourrait s’agir de modèles pour la production de masques décoratifs en terre cuite.
  71. Santucci 2013, 87‑88 et fig. 12.
  72. Le contexte de découverte du premier, dans la zone suburbaine de la porte d’Herculanum, est très flou. Dans la maison où a été trouvé le second, les autres décors ne contiennent aucune allusion particulière au théâtre.
  73. Santucci 2013, 89-90. On pourrait alors rapprocher ce constat de l’ironie du passage de Cicéron évoqué plus haut.
  74. Maiuri 1953, 96.
  75. Maiuri 1953, 96 note 25 renvoie à Horace qui décrit une scène de spectacle évoquant l’atellane dans un cadre privé, sous les yeux des voyageurs de haut rang qui l’accompagnent à Brindes : Satires, 1.5.51-69.
  76. Une autre scène, représentant une mise en scène parodique de la fuite d’Énée avec des acteurs portant masques d’animaux et phallus postiches, a été interprétée comme l’image d’un spectacle donné dans un des théâtres de Pompéi : Maiuri 1950 ; Maiuri 1953, 96‑97 ; Gordon 2009, 182-185. Mais sa provenance peu claire empêche d’interroger plus avant son rapport avec des spectacles réels et leurs éventuels amateurs/spectateurs.
  77. Maiuri 1953 ; Pugliese Carratelli, éd. 1990, 826-827.
  78. Pour une synthèse sur cette vaste question historiographique et sur le cas de Pompéi : Torelli 2020.
  79. La jonction des deux moitiés semble abrupte, le feston de la partie de droite apparaissant coupé à gauche : la seule photographie ne permet pas de vérifier si les deux parties sont contemporaines ou si ce décor a subi des transformations.
  80. Maiuri 1953, 94.
  81. Sur le corpus des images de “pointy-hatted stick-dancers” : Dunbabin 2004 ; Dunbabin 2016, 127‑13 ; sur le contexte convivial, voir aussi Jíménez & Rodríguez 2021.
  82. Santucci 2013, 90-93 : l’autrice évoque l’Asina de Pomponius et l’Asinus de Novius.
  83. Gordon 2009, 186.
  84. Castiglione Morelli Del Franco & Vitale 1989, 197-199 (demeure modeste ayant pu fonctionner un temps comme boutique ?).
  85. CIL, X, 1074d.
  86. Il faut sans doute sous-entendre un « cum » avant le groupe de mots à l’ablatif dont la composition chiasmatique met en valeur la variété des acteurs engagés, tout en détachant le plus célèbre d’entre eux, le pantomime Pylade (Cf. Franklin 1987, 95).
  87. Garelli 2007, 179 et 418.
  88. Voir ThLL s.v. acroama, sens 2. W. Van Andringa traduit par “bouffons” : Van Andringa 2013, 170 “des représentations avec des bouffons de toutes sortes et des pantomimes de tous styles, parmi lesquels Pylade” puis “des représentations scéniques avec une compagnie de premier ordre à laquelle furent ajoutés des bouffons”. Le terme factio a sans doute ici un sens plus technique lié aux jeux scéniques, renvoyant à l’organisation des acteurs (en particulier de pantomime) et de leurs partisans en différents groupes ou factiones (ThLL s.v. factio, sens II.B.3). Celles du cirque sont désignées par des couleurs tandis que celles liées aux jeux scéniques pourraient avoir été désignées par des numéros, comme l’attestent quelques inscriptions mentionnées par le ThLL.
  89. Dunbabin 2016, 85-113 (pantomime) et 86-137 (mime et divertissements populaires).
  90. Elia 1965.
  91. Dunbabin 2016, 100 (note 74).
  92. Cf. Parise Badoni 2001, 297.
  93. Il peut aussi simplement s’agir de cheveux.
  94. Langner 2001, 59 et n. 1188. Voir le graffito F-18 du projet “Bruits de couloir”.
  95. Langner 2001 n. 1157 et 1158, Cf. BdC F-16 et F-17.
  96. CIL, IV, 1595 ; MANN inv. 4693. Voir la notice de Heikki Solin dans : Capaldi & Zevi, éd. 2017, 261, avec la bibliographie précédente ; nous restons convaincue du lien de ce graffito avec les parades équestres liées au ludus troiae attestées à Pompéi : Letellier-Taillefer 2018, 193‑194 et 203-204.
  97. Nous lisons cette inscription ainsi : [Ser]pentis lusus si quis ibi forte notauit Sepumius iuuenis quos fac(i)t ingenio, spectator scaenae siue es studiosus equorum sic habeas lances semper ubique pares. “Si quelqu’un ici a prêté attention aux “jeux du serpent” que le iuvenis Sepumius exécute avec talent, que tu sois spectateur de théâtre ou amateur de chevaux : qu’ainsi la fortune te soit toujours égale.” Voir Letellier-Taillefer 2018, 193.
  98. Letellier-Taillefer 2018, 203-204.
  99. Sur le sens de studiosus dans ce cadre : Arnaud 2004, §58.
  100. Sur le poids politique de ces factions à l’époque impériale : Arnaud 2004 ; Gourdet 2004 ; sur le rôle possible des iuuenes, dont fait partie Sepumius, dans les désordres liés au monde du spectacle et en particulier aux pantomimes au début de l’Empire : Garelli 2007, 180 et 199-200.
  101. Sur le Paris dont il s’agit, actif sous le règne de Domitien : Garelli 2007, 179.
  102. Sogliano 1908 ; Franklin 1987, 96, note 8 ; Garelli 2007, 241‑242, 419.
  103. CIL, IV, 7919 et notice de J. Kepartová dans le Suppl. 4, 1. Le groupe des Paridiani est par ailleurs salué dans plusieurs graffiti (CIL, IV, 8885 et 8888) regroupés en façade d’un édifice encore non dégagé rue de l’Abondance (III 5, 2).
  104. CIL, IV, 768 = CIL, IV, 1030 et notices de V. Weber dans le Suppl. 4, 1.
  105. L’autre attestation d’un dissignator à Pompéi provient aussi d’une inscription électorale (CIL, IV, 597) avec pour signataire Elainus dissign(ator), sans plus de précision.
  106. Franklin 1987.
  107. Le Guennec 2019, 358‑359 et RE6 p. 430.
  108. CIL, IV, 2155 et la notice de H. Solin dans le Suppl. 4, 2 : C. Cominius Pyrrichus et / L. Novius Priscus et L. Campius / Primigenius fanatici tres / a pulvinar synethaei / hic fuerunt cum Martiale / sodale actiani anicetiani sinceri / Salvio sodali feliciter.
  109. CIL, IV, 2450.
  110. Franklin 1987, 97.
  111. CIL, IV, 10607, 10643.
  112. Tuck 2008.
  113. Letellier-Taillefer 2019, 182-184.
  114. Paribeni 1902, 514‑515 ; Mau 1906, 42 ; Maiuri 1951.
  115. Maiuri 1951, 130.
  116. Fincker et al. 2018 (état 1).
  117. Mau 1906, 42-43.
  118. CIL, X, 833-836.
  119. Maiuri 1951.
  120. Jusqu’à 3850 places tous secteurs compris d’après le calcul proposé par F. Sear : Sear 2006, 26-27.
  121. Fincker et al. 2018, fig. 3.
  122. CIL, X, 838.
  123. Dans leur disposition actuelle, ils ne sont pas tous en place. Tous les gradins manquants ont été reconstruits en petits moellons de tuf lors des restaurations de 2010.
  124. Seul le premier gradin, donnant sur la précinction, est précédé d’un repose-pied.
  125. D’autres chiffres (I à III) étaient lisibles à la fin du XIXe s. : CIL, X, 8143-8144.
  126. On a vu plus haut qu’aucun “billet de théâtre” antique ne permet de connaître les modalités concrètes de numérotation ni d’accès à ces places.
  127. CIL, X, 1026.
  128. Schäfer 1979.
  129. Fiorelli 1860 : mars à juin 1769.
  130. Contrairement au theatrum tectum qui était lui en travaux.
  131. Voir les recherches en cours d’A. Cormier : Cormier 2020 ; Cormier 2022.
  132. Le portique situé entre les deux théâtres pouvait être devenu à cette époque non plus une zone de circulation mais un espace clos, qui n’était plus accessible depuis le theatrum tectum (fermé pour travaux) ni depuis le quadriportique (clôturé pour servir d’espace réservé aux gladiateurs).
  133. Fincker et al. 2018, §12.
  134. Fincker et al. 2018 (état 2).
  135. Voir : Chapelin & Letellier-Taillefer 2019. Sur les différents types de vélums dans les édifices de spectacles romains, voir aussi la contribution de Sophie Madeleine dans ce volume.
  136. Quelques indices ont tout de même été relevés suggérant que certaines parties de la proédrie étaient au moins en situation de remploi : Fincker et al. 2018.
  137. Dans l’état actuel des connaissances, on ne connaît pas avec certitude les modalités d’éclairage de cette salle couverte : Murolo 1959 ; Meinel 1980, 36-44. Pour la capacité de ce second théâtre, estimée entre 1500 et 1850 places, voir Sear 2006, 132.
  138. Objet de restaurations en 1945 : Maiuri 1954, 265.
  139. Il faut sans doute relativiser ce constat pour les dernières phases de la ville où la privatisation du quadriportique et quelques réaménagements associés impliquèrent une plus grande fermeture des circulations dans le quartier.
  140. Letellier-Taillefer 2021, 276.
  141. C’est l’objet du projet en cours “Bruits de couloir” : Autin et al. 2023.
ISBN html : 978-2-35613-549-0
Rechercher
Pessac
Chapitre de livre
EAN html : 9782356135490
ISBN html : 978-2-35613-549-0
ISBN pdf : 978-2-35613-551-3
Volume : 23
ISSN : 2741-1818
Posté le 23/04/2024
27 p.
Code CLIL : 3385; 4117
licence CC by SA
Licence ouverte Etalab

Comment citer

Letellier-Taillefer, Éloïse, “Sur les traces du public des théâtres de Pompéi : des spectateurs aux usagers”, in : Bell, Sinclair W., Berlan-Gallant, Anne, Forichon, Sylvain, dir., Un public ou des publics ? La réception des spectacles dans le monde romain entre pluralité et unanimité, Pessac, Ausonius éditions, collection PrimaLun@ 23, 2024, 383-410, [en ligne] https://una-editions.fr/du-public-des-theatres-de-pompei [consulté le 24/04/2024].
doi.org/10.46608/primaluna23.9782356135490.15
Illustration de couverture • Montage S. Forichon et SVG, à partir de :
Sezione interna del Colosseo con spettatori e finta caccia al leone (1769-1770), Vincenzo Brenna, Victoria and Albert Museum, Londres (d'après Gabucci, A. ed. (1999): Il Colosseo, Milan, p. 166-167) ; Relief dit de Foligno (130×55 cm), Détail, Museo di Palazzo Trinci, Foligno, Italie (photo de S. Bell) ; Mosaïque dite du Grand Cirque de la villa de Piazza Armerina, Détail, Sicile (d’après Gentili, G. V. et A. Belli (1959) : La Villa Erculia di Piazza Armerina: i mosaici figurati, Collana d’arte Sidera 8, Rome, pl. X) ; Diptyque en ivoire dit des Lampadii (29×11 cm), Détail, Santa Giulia Museo, Brescia (d’après Delbrueck, R. (1929) : Die Consulardiptychen und verwandte Denkmäler, vol. I-II, Studien zur spätantiken Kunstgeschichte, Berlin-Leipzig, vol. II, pl. 56) ; Mosaïque dite de Gafsa (4,70×3,40 m), Détail, Musée du Bardo, Tunis (d’après Blanchard-Lemée, M., M. Ennaïfer, H. et L. Slim (1995) : Sols de l’Afrique romaine : mosaïques de Tunisie, Paris, p. 196, fig. 143).
Retour en haut
Aller au contenu principal