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Enjeux théologiques du scandale
au début du XVIe siècle

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Aussi prompt que l’on soit à identifier des motifs de scandale, le fait de se scandaliser ne laisse pas de faire question. On le sait bien : il est des gens qu’un rien scandalise. On peut se scandaliser à mauvais escient ; on peut aussi scandaliser en toute innocence, se trouver en butte au scandale d’autrui pour de mauvaises raisons. Ce n’est pas parce qu’un fait scandalise qu’il est nécessairement scandaleux, ni d’ailleurs, inversement, légitime et paré des vertus de la plus exaltante contestation. Raisonner ainsi, en effet, ce serait prêter à toute opinion, contestataire ou offusquée, une forme de transcendance. Et pourtant, par définition, la notion de scandale se construit par référence à une transcendance : elle pose le problème du mal – moral ou spirituel – dans une interaction sociale. Telle est l’évidence dont part la réflexion théologique sur le scandale : s’il y a scandale, il y a du péché quelque part – mais où ?

L’enjeu est donc, pour la réflexion théologique sur le scandale, de fournir les critères d’une évaluation spirituelle et morale de faits principalement identifiés par la réaction qu’ils suscitent. Dans la première moitié du XVIe siècle, cette réflexion, dont la Somme théologique avait posé les cadres, se renouvelle avec une virulence sans précédent, en raison des remaniements conceptuels amenés par les débats religieux issus de l’évangélisme et du protestantisme. Question centrale, puisqu’elle engage la légitimité des idées nouvelles dans leur dimension anti-institutionnelle, la question du scandale est tributaire des notions clés autour desquelles se polarise le débat religieux : la charité, refuge de la tradition instituée, et la liberté, remise au goût du jour par la relecture des épîtres de Paul et sa célèbre opposition de la Lettre qui tue et de l’Esprit qui vivifie (II Cor III, 6). Les positions en présence, cependant, sont loin d’être schématiques, dès lors qu’elles se confrontent à la complexité des situations réelles et doivent tenir compte de la nécessité de souder et de régir une communauté vivante, dont les membres sont inégalement avancés dans la foi – du côté protestant, dans le cadre de la confessionnalisation, comme du côté catholique, où le souci d’un ordre de la communauté des chrétiens est depuis longtemps installé. Ce sont les grandes lignes de ces débats sur le scandale que je tenterai ici de retracer, de la tradition thomiste à l’ébranlement de ses catégories au cours du premier XVIe siècle, et à ses reformulations évangéliques et protestantes, des Lieux communs théologiques de Mélanchthon au traité Des Scandales1.

La tradition thomiste

L’une des données premières de la réflexion théologique sur le scandale est qu’elle doit composer avec deux grandes orientations du message chrétien : d’une part, son rattachement à la question de la charité ; mais aussi, d’autre part, la revendication évangélique et paulinienne d’une nouveauté radicale du christianisme, qui scandalise inévitablement les conceptions humaines. Cette tension initiale est à l’origine de toutes les reformulations ultérieures.

La notion de scandale est à l’origine métaphorique, puisque le terme σκάνδαλον désigne, au sens propre, l’obstacle et le piège. Attentif à ce sens premier, dont il présente plusieurs occurrences, l’Ancien Testament introduit en outre le sens figuré de l’incitation au péché et à l’incroyance, qui peut aller jusqu’à la mort spirituelle2. C’est cependant le Nouveau Testament qui charge la notion d’une valeur proprement paradoxale, puisqu’on y voit Jésus assumer le scandale qu’il est lui-même aux Pharisiens, en disant qu’il est nécessaire que les scandales arrivent, tout en jetant l’anathème sur le fauteur de scandale (Mt XVIII, 6-7), dont il vaudrait mieux, comme on sait, qu’il aille se jeter dans la mer, une pierre au cou, plutôt que de scandaliser « ces petits qui croient en [Jésus-Christ] ». L’annonce de scandales nécessaires, liés à l’avènement du Christ, a généralement été comprise comme l’énoncé d’une incompatibilité entre les pensées de l’homme et celles de Dieu. Elle résonne à ce titre avec la célèbre exclamation Vade retro, Satanas ! par laquelle le Christ récuse les protestations de Pierre face à l’annonce de la Passion (Mt XVI, 22-23), comme relevant d’une logique humaine imperméable, voire rétive, au dessein divin. Jésus dit aussi, dans ce même évangile, qu’il n’est pas venu apporter la paix, mais le glaive (Mt X, 34) : il est, par excellence, celui par qui le scandale arrive. Le Christ apparaît donc en quelque sorte comme un fauteur de scandale légitime, qui se heurte au scandale du monde, tout en exprimant sa préoccupation pour des « petits » à qui le scandale doit être évité.

Cette tension est également à l’œuvre dans les épîtres de Paul, qu’évangéliques et protestants relisent en ce début du XVIe siècle pour la liberté dans la foi qu’elles prônent, en vertu de l’opposition de l’esprit de la Loi à la lettre de la Loi (II Cor III, 6 et 17 ; Gal V, 1). L’idée d’une incompatibilité entre les logiques humaine et divine y est illustrée, en des termes célèbres, par la revendication par l’apôtre du « scandale de la Croix » (I Cor I, 18-25), « scandale pour les Juifs et folie pour les païens », une formule qui récuse à la fois l’attente judaïque du Messie et la philosophie grecque. Ainsi prend forme le paradoxe des « deux sagesses » qui oppose la sagesse de Dieu à celle de l’homme, une opposition que reprendra notamment Érasme dans l’Enchiridion et dans l’Éloge de la Folie3. Toutefois, avec Paul, une autre série de réflexions, issues de l’épître aux Romains, tend à modérer ce radicalisme : soucieux en effet de la paix sociale au sein d’une communauté mêlée de Juifs et de païens convertis, et obligé de composer avec l’attachement des judéo-chrétiens à la Loi, l’apôtre y développe des prises de position plus nuancées sur la question des idolothytes (les viandes sacrifiées aux idoles), en articulant le précepte de charité, qui préconise de ménager la sensibilité des plus faibles dans la foi en leur épargnant le scandale, à la liberté que donne l’Esprit à l’égard de la Loi (Rom XIV-XV, 2). S’il n’est donc pas en soi scandaleux de consommer des aliments païens, mieux vaut s’en abstenir pour éviter de choquer inutilement ceux qui pourraient y perdre leurs repères.

Dès le Nouveau Testament, donc, et par la suite dans la tradition patristique et homilétique, la question du scandale est indissociable d’une interrogation sur la charité et la liberté. Il y a là de quoi justifier aussi bien le conservatisme d’une tradition établie que sa contestation la plus radicale. C’est ainsi autour des deux pôles de la charité et de la liberté que se repositionnent, au XVIe siècle, les auteurs humanistes et protestants qui réfléchissent sur le scandale. L’histoire de leurs reformulations donne la mesure de l’ébranlement qu’imprime à l’édifice des vertus chrétiennes la remise au jour de la notion de liberté par la foi.

Au moment où cette histoire commence, la pensée théologique du scandale est définie par la Somme théologique, où la question du scandale se rattache à celle de la charité : « c’est à la charité que semble s’opposer tout spécialement le scandale » (IIa IIae, q. 43), écrit ainsi Thomas d’Aquin en introduisant cette question dans le livre qu’il consacre à la charité4. Dans cette « question », l’Aquinate définit le scandale comme une parole ou un acte extérieur fournissant une occasion de ruine à autrui. La dimension publique du fait scandaleux est ici définitoire, quelles que soient les intentions qui l’ont motivé. Cette dissociation entre le fait du scandale en tant qu’acte public, abordé du point de vue des réactions qu’il suscite, et la question morale des intentions est fondatrice. Non que le problème des intentions soit négligé ; mais il n’intervient qu’en second lieu, lorsqu’il s’agit de catégoriser les faits scandaleux, mais aussi, et c’est essentiel, les réactions de ceux qui s’en scandalisent : pas de scandale en effet sans scandalisés. Or ces derniers peuvent se scandaliser à bon ou à mauvais escient, pour diverses raisons. Sur la typologie qui en résulte prendront appui tous les débats qui suivront.

Une première distinction est ainsi posée entre le scandale actif et le scandale passif (IIa IIæ, q. 43, art. 1, ad 4) : le scandale actif cause le péché par soi (per se), et procède de la mauvaise intention de celui qui scandalise, tandis que le scandale passif survient per accidens, et touche un cœur mal disposé : il s’explique par une réaction indue à un fait ou à une parole qui peut n’avoir en soi rien de blâmable. Une nouvelle distinction en découle, entre les « parfaits » (art. 5) que le scandale n’atteint pas, du fait de la fermeté de leur foi – tout au plus peuvent-ils éprouver, précise l’Aquinate, une approche du scandale (appropinquatio ad scandalum) –, et les « petits » qui sont susceptibles d’être scandalisés : les hommes sont donc inégaux dans leur réactivité aux scandales, en fonction des dispositions de leur cœur, mais aussi de leur avancement dans la foi, et, implicitement, de leur degré d’instruction dans celle-ci. Thomas d’Aquin en vient ainsi à détailler différents degrés dans le scandale : la faiblesse (infirmitas) qui induit une facilité à se scandaliser, l’indignation (offensio) contre le pécheur qui ne va pas nécessairement jusqu’à la ruine de l’âme, et enfin le scandale qui, lui, est occasion de chute.

L’approfondissement de ce qui peut motiver le scandale passif génère de là une autre distinction posée, au sein du scandale passif, entre le scandale des petits et le scandale des pharisiens (art. 7) : le scandale des pharisiens provient de leur « malice » (malitia) – car ils sont par ailleurs éclairés –, tandis que le scandale des petits n’est que le fait de la faiblesse ou de l’ignorance (infirmitas vel ignorantia). De cette distinction découle une responsabilisation des « grands » ou des « forts » selon le devoir de charité : il incombe à ceux-ci de ne pas scandaliser les faibles en leur donnant le mauvais exemple d’un scandale actif ou passif – un devoir qui pourra se renverser, dans le cadre de la critique protestante du clergé, en mise en question de la « malice » de ceux qui abusent de leur autorité sur les faibles pour les égarer. Parmi ceux qui se scandalisent à mauvais – et même à bon – escient, il y a donc, d’une part, ceux dont la « malice » s’extériorise dans des attitudes outragées, et ceux qui, simplement, n’ont pas les lumières nécessaires pour rester impassibles face à un scandale réel ou supposé. Les premiers, qui sont instruits et en position d’autorité, se scandalisent en raison de leur perversité intrinsèque, tandis que les autres, sans être mauvais par eux-mêmes, risquent d’être pervertis par la confrontation au scandale, qui ébranle leurs repères. Il faut donc les en préserver, et c’est ce qui, dans la Somme, justifie le conservatisme, au nom de la charité due aux « petits » et aux « faibles ». Mais on comprend qu’avec le protestantisme, cette question de la responsabilité morale des figures d’autorité – le clergé au premier chef – ait pu se retourner en une contestation violente de ceux qui scandalisent les « petits », comme fauteurs de scandale par leurs comportements et/ou comme propagateurs d’un sentiment de scandale par leur enseignement – un scandale qui sera, corollairement, pensé comme révélateur d’une résistance des traditions humaines à la Grâce.

Le système thomiste propose donc une typologie fine des raisons qui poussent à créer et à éprouver le scandale, en s’attaquant principalement à sa force de perturbation sociale : pour Thomas d’Aquin, en effet, le problème est avant tout le trouble des consciences que provoque le scandale, un trouble qu’il s’agit d’éviter quand on est « fort », par l’impassibilité, et d’éviter aux « faibles », par charité. Cette approche présente l’avantage de dissocier le scandale de l’idée d’un mal en soi, pour l’interroger dans sa dimension communautaire, par le recours à la notion implicite de responsabilité. Elle vaut pour l’examen de conscience individuel – car tous les « forts » ne sont pas d’hypocrites « pharisiens », mais tout « fort » peut basculer dans le péché et l’hypocrisie – en même temps qu’elle justifie un ordre social où les figures d’autorité, et en particulier le clergé, sont appelées à la vigilance envers elles-mêmes et à la bienveillance envers les « petits », un ordre où, au-delà de l’injonction évidente d’éviter le scandale actif, s’impose le souci d’éviter, dans le péché inévitable du monde, le sentiment de scandale à autrui autant qu’à soi-même. La réflexion sur le scandale est donc un appel à la conscience individuelle autant qu’un instrument de cohésion – ou de contrôle ? – social. C’est bien entendu ce qui fait la solidité de ce système. Mais c’est aussi précisément ce à quoi va s’attaquer le protestantisme.

L’ébranlement des catégories thomistes

Si la réflexion sur le scandale subit une inflexion radicale avec l’émergence des idées nouvelles, c’est – outre le fait évident que la théologie protestante se construit alors dans la polémique – que celles-ci entraînent la redéfinition des notions auxquelles le scandale était associé, la charité et le pharisaïsme, du fait de la mise en cause des vertus morales et des œuvres, au nom du salut par la foi. La contestation du salut par les œuvres ébranle, en effet, l’ensemble de l’édifice thomiste des vertus en même temps qu’elle porte atteinte aux pratiques formalistes que l’Église gratifiait du nom d’« œuvres », dans un oubli des pratiques de charité que les évangéliques, et Érasme en particulier, ne manquaient pas de lui reprocher5. La théologie protestante conteste, on le sait, toute la tradition scolastique qui s’attache aux vertus cardinales, en tant qu’il est vain de s’en remettre à celles-ci pour faire son salut : signe de l’orgueil de l’homme qui prétend se sauver par lui-même, la philosophie morale est une illusion qui détourne l’homme d’un salut qui dépend de la seule Grâce divine. La charité, vertu théologale, est certes d’une autre nature ; mais elle n’est pas valorisée autant que la foi, dont tout procède, et surtout la réflexion sur elle est entachée par le problème des œuvres, qui font d’elle la plus suspecte des vertus théologales. Ainsi, alors que la Somme théologique faisait de la charité « la plus excellente des vertus » (IIa IIæ, q. 23, art. 6), la vertu ordonnatrice et la « forme » de toutes les autres, notamment de la foi (art. 7-8), Mélanchthon, par exemple, accorde nettement la primauté à la foi sur la charité ainsi que, significativement, sur l’ordre politique6.

La contestation du formalisme paraît relever d’une problématique différente, aussi longtemps qu’il est possible d’opposer les « œuvres » ritualistes à l’exercice véritable de la charité. Telle est la ligne argumentative suivie par Érasme, qui ne cesse de réaffirmer le devoir de charité en contestant un formalisme assimilé, sous l’influence des relectures de Paul, au respect de la Loi dans le mosaïsme ou le pharisaïsme7. Mais c’est bien là le fait d’une fidélité évangélique à la conception traditionnelle de la « foi formée de charité », car, d’un point de vue protestant, la doctrine des vertus elle-même est pharisaïque. Au-delà donc du problème de l’extension de ce qui porte alors le nom d’« œuvres », c’est le sens de la notion de « pharisaïsme » qui se trouve étendu. Représentants d’une dévotion à la Loi qui est le fait d’un groupe instruit et socialement considéré, les « scribes et pharisiens » sont, dans l’Évangile, une image des hypocrites qui opposent les arguties de leurs préceptes traditionnels à la révélation chrétienne. Dans la Somme théologique, n’est pas nécessairement « pharisien » tout membre du groupe des doctes – et du clergé. Mais, dès lors que la doctrine de l’Église est perçue comme une imposture qui dévoie les fidèles de la seule voie de salut, le pharisaïsme devient un fait institutionnel : l’Église est perçue comme pharisaïque dans son ensemble, dispensatrice d’une doctrine préjudiciable aux « petits » qu’il incombe aux nouveaux « forts » de ce temps de libérer de son emprise. La doctrine de l’Église constitue dans cette perspective un scandale.

Telles sont donc les grandes lignes d’une reformulation qui, cependant, reste traversée de multiples interrogations et ajustements. En effet, le protestantisme se trouve pris à cette époque entre plusieurs aspirations difficiles à concilier. Il s’agit bien entendu, avant tout, pour les réformateurs protestants de mettre en avant une position contestataire, qui s’autorise de la liberté dans la foi et revendique donc le scandale face aux scandales pharisaïques de l’Église : il n’est plus temps d’apporter la paix, mais le glaive, dont la force et le tranchant, sans être souhaités, sont posés comme inévitables. Du point de vue théologique, cette contestation va les conduire à réassumer les catégories thomistes afin de critiquer l’ordre établi au nom des « faibles » qui en sont victimes. Mais parallèlement, du point de vue social, les réformateurs seront rapidement confrontés à la nécessité d’organiser les nouvelles communautés, en évitant d’entretenir une logique de scandale permanent, et ce souci les amènera à atténuer leurs positions les plus radicales, au moins pour l’administration interne de leurs fidèles. C’est ainsi que, dans le heurt aux traditions instituées, mais aussi dans la confrontation à la réalité de communautés vivantes, l’articulation des notions de charité et de liberté se déplace sous leur plume. La question récurrente est de savoir jusqu’à quel point il faut tenir compte du scandale, et elle est étroitement corrélée à l’extension donnée aux différentes catégories de scandale.

On assiste ainsi à cette époque à une modification des lignes de partage au sein de la typologie héritée de la Somme théologique. Les réformateurs protestants accordent le primat aux questions de foi et à la liberté contre les traditions humaines ; s’ils réaffirment l’exigence du précepte de charité, c’est surtout au sens où celui-ci commande de dénoncer les traditions qui font des « petits » les victimes du scandale des « pharisiens ». Il s’ensuit une nouvelle répartition des rôles entre les différents acteurs du scandale, où le « scandale des pharisiens » apparaît comme le fait de l’institution tout entière, tenue pour responsable du scandale des « petits » : dès lors, le « scandale actif » se superpose à celui des « pharisiens », et le « scandale passif » à celui des « petits » – l’exposition des « faibles » au scandale des « pharisiens » constituant en définitive un unique scandale, qu’il faut dénoncer au mépris du scandale ; et ainsi se rejoue le scandale de la Croix face aux logiques du monde. De ce fait, dans le heurt d’une réflexion contestataire sur la liberté dans la foi à une tradition scolastique qui enjoint, au nom de la charité, d’éviter le scandale aux « petits », la question du scandale se détache de la tradition qui faisait d’elle une annexe du problème de la charité pour se rattacher, dans les écrits protestants, au problème de la liberté.

Dans toutes ces reformulations, l’épître aux Romains joue un rôle majeur. Dès avant celles-ci, du reste, évangéliques et protestants avaient commencé, dans leurs commentaires du Nouveau Testament et notamment des épîtres, à s’interroger sur les conditions de légitimité du scandale dans une communauté de chrétiens déjà troublée. Il est temps d’aborder quelques-unes de ces reformulations de façon plus précise. Je me concentrerai ici sur celles qui ont été proposées par Mélanchthon, Érasme – notamment dans son débat avec Luther – et Calvin.

Les reformulations du scandale : Mélanchthon, Érasme, Calvin

Mélanchthon

Dans ses Lieux communs théologiques de 1521, issus d’un cours sur l’épître aux Romains, Mélanchthon se demande quelle extension donner au devoir de charité qui prescrit d’éviter le scandale aux faibles, et tranche en affirmant la priorité de la foi sur la charité8. Cet argument décisif justifie en bloc la contestation protestante de la théologie scolastique, en vertu de la rehiérarchisation de deux types de scandales : en effet, si le protestantisme porte atteinte à la paix publique, et peut donc être considéré comme une source de scandales au regard de la charité, la scolastique est un scandale pire encore, un scandale pour la foi, car elle occulte la Grâce divine en prêchant le salut par les œuvres. La contestation protestante est donc un scandale nécessaire, qui n’enfreint que la loi des hommes, ce qui reste légitime en cas de nécessité (in casu necessitatis), là où les biens spirituels sont de nécessité de salut (de necessitate salutis).

Les réécritures amplifiées de ce texte fondateur amènent Mélanchthon à préciser sa pensée. Deux évolutions sont ainsi notables. La première est constituée par les déplacements successifs du chapitre De scandalo au sein de l’ouvrage. Déjà situé de façon stratégique à la toute fin de l’édition de 1521, comme une ultime objection à dépasser au terme d’une démonstration imparable qui partait de la déconstruction du système des vertus, de la déchéance humaine et de l’assujettissement à la Loi pour poser le principe de la justification par la foi, ce chapitre 11 était de peu précédé par celui qui traitait de la charité (chap. 9), significativement abordée après tout le reste9. En 1535, le chapitre De scandalo précède, dans le même ordre d’idées, le chapitre De regno Christi ; mais plus tard (1543-1559), il introduit, au cœur d’une réflexion sur la Loi et la liberté de la foi, le chapitre De libertate chistiana10. Le déplacement de cette question, des problématiques de la charité à celles de la liberté, est donc lisible dans l’histoire de la conception d’ensemble de l’ouvrage.

Une seconde évolution est liée au fait que Mélanchthon reformule l’opposition posée entre le scandale pour la charité et le scandale pour la foi à partir des catégories héritées de la Somme théologique. Cependant, il les reprend dans un sens qui polarise le débat entre deux groupes sujets au scandale, les « faibles » et les « pharisiens ». Cette opposition, il l’exprime en 153511 dans les termes d’un conflit entre le « scandale pharisaïque » ou « scandale pris » (Pharisaicum, acceptum), éprouvé par les tenants de l’institution que scandalise la contestation protestante, et le « scandale donné » (datum) par ces mêmes « pharisiens » aux « faibles », c’est-à-dire un scandale de foi dont il faut libérer les consciences captives. La dénomination seule de « scandale pris », consenti et non plus simplement passif, renverse la perspective thomiste, puisqu’elle suppose que ce scandale d’indignation est le fait d’une conscience coupable. Mais plus encore, ces « pharisiens » scandalisés, ainsi exclus du « scandale passif », sont en même temps présentés comme les auteurs d’un « scandale actif », « donné » par eux aux faibles. Il n’y a donc plus qu’un seul vrai « scandale passif », subi par les faibles, tandis que les « pharisiens » apparaissent toujours actifs dans le scandale, qu’ils se scandalisent dans le « scandale pris » ou scandalisent les faibles dans le « scandale donné » ; ils sont irrémédiablement coupables, responsables des égarements d’autrui et porteurs d’une « malice » constitutive, qui est celle de l’institution qu’ils représentent et défendent.

Un autre effet de l’approfondissement de la pensée du réformateur, à cette date quasi contemporaine de l’Institution de la religion chrétienne de Calvin (1536)12, se décèle dans le souci qu’il a de compléter cette typologie nouvelle par un troisième type de scandale, l’usage intempestif de la liberté chrétienne dans les choses indifférentes (adiaphora). Cette question des adiaphora, qu’il avait abordée dès le traité de 1521, prend à cette époque une place essentielle dans le débat sur les prescriptions calendaires, alimentaires et vestimentaires13 : l’extension du champ des adiaphora à des prescriptions formelles et rituelles que l’Église considérait comme essentielles était en soi polémique et autorisait le renversement des formalismes au nom de la liberté dans la foi. Voici cependant que, soucieux du bon ordre des communautés protestantes, Mélanchthon – comme Paul dans l’épître aux Romains – souligne en matière d’adiaphora la nécessité de la modération, et dénonce l’ambiguïté d’un exercice incontrôlé de la liberté qui se transforme en revendication tyrannique. On voit ainsi avec Mélanchthon comment la redéfinition du scandale préside à une théologie de combat, progressivement conceptualisée à partir des catégories thomistes, mais aussi comment cette théologie, à l’épreuve des faits, éprouve le besoin d’engager ses sectateurs, exagérément conquis par la liberté nouvelle de la foi, à une modération où ressurgit l’exigence sociale d’un respect qui est alors pensé dans les termes de la charité.

Érasme

Alors que le luthéranisme se signale, sur le plan du débat théologique, par des « paradoxes » que Luther placarde et
développe14 – parmi lesquels la contestation du libre-arbitre – ainsi que, sur le plan des comportements, par la contestation des formalismes, Érasme intervient à plusieurs reprises sur ces questions d’actualité à propos desquelles il s’interroge, de façon plus modérée que Luther, sur la légitimité du scandale. Lui qui développe sur le plan spirituel, dans l’Enchiridion, l’opposition radicale des « deux sagesses », modère sa position dès lors qu’il est question de paix sociale et qu’intervient, précisément, le souci de la charité. C’est ainsi qu’il met en avant ses « scrupules » sur la question du scandale, en particulier en ce qui concerne les « choses indifférentes », ou adiaphora.

Il aborde ainsi la question alimentaire dans une épître particulièrement éclairante, Sur l’interdiction de manger de la viande (1522), écrite à propos du scandale suscité par un cochon de lait mangé en carême15. Dans cette épître, la notion de scrupule est positive : Érasme s’y interroge sur ce qu’il appelle le scrupulus scandali, c’est-à-dire à la fois la question délicate que pose le scandale et le scrupule qu’il convient ou non d’avoir face au risque du scandale16. Cette positivité de la notion s’oppose à son emploi dans les écrits protestants, qui assimilent le scrupule à la faiblesse superstitieuse, dont il faut libérer les consciences entravées, en particulier dans les débats sur la pénitence. Érasme, pour sa part, souligne volontiers les inconvénients des scrupules qui étouffent, notamment à propos de la pénitence (Exomologesis)17, mais il répète qu’ils ne valent pas que l’on prenne pour eux le risque du scandale (De libero arbitrio). Sur cette foule que le scandale guette, pourtant, l’humaniste ne se fait aucune illusion : elle est à la fois faible et pharisienne, tyrannisée et tyrannique. Toutefois, au lieu de vouloir libérer les consciences, il invite à la ménager quelle que soit son erreur. Cette adhésion nette au principe de charité va de pair avec une critique sans concession des dignitaires ecclésiastiques qui entretiennent la foule dans ses erreurs et l’égarent par leurs contradictions, car ils sont, à l’égard du carême qu’ils prêchent sans en respecter l’esprit eux-mêmes, à la fois scrupuleux par leur formalisme, scandaleux par leurs excès, et « faibles » en définitive ; mais cette faiblesse-là ne mérite guère d’indulgence : il n’est pas de scrupule qui tienne à leur sujet. Pas de charité pour les prélats scandaleux18.

Plus tard, la controverse sur le libre-arbitre (1524-1526) oppose Érasme et Luther19, avant même que ne soient abordés les points de dogme, sur la question de la légitimité d’une proposition qui fait scandale. Érasme dénonce ainsi les « paradoxes théologiques » de Luther– et notamment celui qui touche au libre-arbitre – comme fauteurs de scandale auprès d’un public dominé par la « faiblesse » et la « malice » humaines20. L’humaniste refuse notamment, au rebours de son adversaire, d’établir une ligne de partage stricte entre « pharisiens » et « petits21 » : il réfère au contraire à une foule mêlée, aussi faible dans ses erreurs que pharisaïque dans son formalisme, ce qui rend impossible une représentation selon laquelle les défenseurs des « petits » s’opposeraient légitimement aux « pharisiens ». Érasme se livre par ailleurs à une contestation rhétorique – et non théologique, dans une mise à distance stratégique des questions de foi22 – des « paradoxes » réformés qui, selon lui, surenchérissent sur les « paradoxes » de l’Église : à un formalisme qu’il interprète comme « exagération », il reproche à Luther de répondre par une exagération pire encore23. Cette notion d’exagération lui permet ainsi de contester le formalisme de l’Église sans l’attaquer de front, et de sauver, au détriment des petites « œuvres » ritualistes (opera), un message catholique recentré sur les œuvres de charité et, partant, sur les mérites humains (merita), ce qui sauvegarde l’importance des vertus morales, ou encore, à propos de la pénitence, de critiquer une institution qui empêtre les consciences scrupuleuses sans en déduire que cet empêchement (implicatio, un terme qui relève de l’isotopie du scandale) vaut la peine de risquer un scandale.

Au rebours, Luther insiste, bien sûr, sur le scandale de la Croix. Il procède aussi à une rehiérarchisation, analogue à celle qu’avait défendue Mélanchthon, entre une pratique qui peut choquer le prochain (c’est-à-dire un scandale de charité) et la nécessité de professer ouvertement sa foi, en vertu du primat de la foi24. Enfin, il s’en prend à Érasme en prenant le parti des « faibles » contre les arguties des « doctes » – dont Érasme fait évidemment partie –, accusés de pharisaïsme25. La fracture entre Érasme et Luther passe donc par une réassignation des scandales, ainsi que par de nouvelles injonctions issues de choix contrastés entre la charité – conservatrice ou libératrice – et la liberté – affirmée comme fondement du salut par les œuvres, ou fondée par la seule foi à contester le libre exercice des vertus morales.

Calvin

Enfin, Calvin, dans son Institution de la religion chrétienne (1536), aborde à son tour la question du scandale au chapitre De libertate christiana26. Ce chapitre, fortement inspiré des épîtres aux Galates et aux Romains pour ses enseignements sur l’abolition de la Loi et les adiaphora, appelle à se libérer des « superstitions » en ce qui regarde les « choses externes », qui sont indifférentes. Cette libération, qui épargne aux anxieux de tout poil le scrupule quant à la valeur de leurs « œuvres », ne doit cependant pas aller sans un minimum de retenue, que Calvin recommande vigoureusement, à l’égard des « frères infirmes » (infirmi) qu’une liberté exercée à mauvais escient pourrait scandaliser – par exemple, de la part de ceux qui tireraient prétexte de cette liberté pour vivre somptueusement, ou qui simplement feraient étalage d’une liberté provocatrice. L’Institution, qui vise à contrôler, en l’instruisant, une communauté nouvelle de convertis, rejoint donc la préoccupation de l’apôtre dans l’épître aux Romains : elle réfrène une liberté revendiquée par ailleurs, au nom du précepte de charité qui aboutira, in fine, à l’instauration d’un nouvel ascétisme.

Plus détaché de ces préoccupations, le plus tardif traité Des Scandales (1550) développe en revanche une théologie de combat, en même temps que Calvin y tire les leçons de son observation de la foule dans ses tentations superstitieuses, et pour tout dire pharisaïques27. Centré sur la multiplicité des scandales qui font obstacle à la révélation de la « pure doctrine de l’Évangile », ce traité développe l’idée d’un scandale unique, constitué par le message du Christ, et lié au heurt de la foi aux logiques humaines, dans un monde envahi de scandales. Les métaphores traditionnelles de l’empêchement et de l’obstacle sont donc mobilisées dans ce traité pour illustrer l’antinomie entre la nature humaine et la sagesse divine, en raison du scandale que le monde et le Christ sont l’un à l’autre. C’est aussi pourquoi l’omniprésence des scandales est imputée à la perversité humaine et posée comme « ordinaire28 ». Les scandales sont inévitables, car ils découlent du scandale de la Croix.

De là, Calvin réorganise, à son tour, les catégories thomistes – dont il est tributaire – dans une typologie qui n’a plus rien des ajustements de la Somme. En effet, si le Christ est l’« occasion » de tant de scandales « ordinaires », qui lui sont extérieurs, et pourtant s’attachent à sa personne, c’est du fait de la perversité de ceux qui se scandalisent. Par son être même, il provoque, en d’autres termes, des scandales per accidens, « passifs » selon les catégories de la Somme. Mais Calvin parle, lui, naturellement, de « scandale pris » – et ce depuis l’Institution29 – et même de gens qui « prennent matière de scandale », « cherchent scandales » ou encore « s’en forgent30 ». La responsabilité des scandalisés dans leur propre scandale est posée.

Il s’agit en effet pour Calvin d’inciter les fidèles à résister aux « occasions » de scandale, qui sont inévitables. Si, dans ce contexte, le souci des « petits » conduit à la dénonciation de l’hypocrisie des « pharisiens », tenus pour responsables du scandale des « faibles », toutefois, la perversité des « pharisiens » étant posée d’avance, et irrémédiable, là n’est pas la question. L’essentiel est plutôt d’engager chacun à s’abstraire, par la foi, de ce groupe des « petits » trop prompts à se scandaliser. Calvin dresse donc une typologie des scandalisés classés en quatre groupes, les « infirmes », les « ignorants », les « malins » et les « médisants31 ». Mais cette typologie s’ordonne en réalité selon des lignes très tranchées. On peut à première vue y reconnaître un dédoublement analytique des deux catégories des « faibles » et des « pharisiens » issues de la Somme théologique, mais l’ensemble reste structuré en deux groupes, et ces deux groupes sont antagonistes : en effet, les « infirmes et ignorants », qui sont faibles, ne sont pas seulement distingués des « malins » et des « médisants », mais sont présentés comme menacés par leur pharisaïsme ; et ces derniers s’identifient aux « ennemis de vérité » qui les menacent dans leur foi. De nouveau, le scandale des petits se surimpose au scandale passif, et le scandale des pharisiens au scandale actif.

Ce qui complexifie ce tableau polémique est cependant l’analyse que fait Calvin des tentations de la foule. Cette analyse n’est pas moins désabusée que celle d’Érasme. Calvin est en effet loin de magnifier l’« infirmité » des « petits » : il souligne au contraire leur adhésion spontanée à la Loi, une adhésion qui est à composante pharisaïque32. C’est ainsi qu’est souvent à l’œuvre une collusion des deux types de scandales. C’est précisément à celle-ci que s’attaque le traité Des Scandales, au bénéfice de ceux qui, n’étant qu’« infirmes » ou « ignorants », peuvent encore se laisser instruire – les pharisiens, irrécupérables, n’étant même plus à considérer.

La réflexion théologique sur le scandale qui se développe dans la première moitié du XVIe siècle est donc travaillée des tensions liées aux revendications d’un ordre de valeurs nouveau, mais aussi à la nécessité de faire communauté en dépit des scandales. Si une ligne de démarcation nette court entre ceux qui se réclament de la liberté dans la foi et ceux qui invoquent prioritairement l’impératif de charité, la confrontation aux nécessités de ce qu’on appellerait aujourd’hui le « vivre-ensemble » et la prise en considération d’une « faiblesse » constitutive de l’opinion du « peuple » ont imposé, dans les deux camps, de repenser, à partir des catégories thomistes et au fil des controverses et de la confessionnalisation, l’articulation entre les notions centrales de charité et de liberté.

Sœurs ennemies, dans un débat qui se polarise à partir d’elles sur le plan théologique, ces deux notions sont donc conciliées en pratique, au sein de communautés qui se structurent et se repensent. Il n’en reste pas moins qu’une radicalité nouvelle apparaît, qui revendique l’héritage de l’Évangile et se heurte de front à l’édifice des vertus morales et à sa patiente casuistique, au nom de la réactualisation du scandale de la Croix. Confrontée à un traditionalisme lui-même oublieux du précepte de charité au profit du formalisme et d’un ordre auquel cette vertu était censée présider, elle porte en elle, dans le double scandale du monde et des fauteurs de trouble, les traumatismes à venir. Et en même temps, les textes que nous venons de parcourir manifestent dans chaque camp une tension, liée à leurs visées respectives : pacifier une communauté d’un côté, et libérer les consciences de l’autre, telle est la question, car l’ordre impétueux de la foi, confronté à la réalité de la vie sociale, a ses propres accommodements.

Or précisément, le scandale ne peut faire l’économie de cette problématique sociale, car la prise en considération d’un public nécessairement fragile, versatile, superstitieux et nullement irréprochable, est incluse dans sa définition. Centrée sur l’extériorité d’un acte et de ses effets, la question du scandale ne s’attache aux intentions qu’en amont – dans la recherche de ce qui motive le « scandale actif » – et qu’en aval – dans celle de ce qui motive le fait de se (laisser) scandaliser. Mais c’est assurément sur l’aval que se concentrent la plupart des débats. En effet, la question de l’amont n’a de sens que pour qui cherche, dans une casuistique hors de saison, à démêler le péché individuel d’un fauteur de troubles ; mais dès lors qu’est postulée la « malice » du camp adverse, érigée en scandale institutionnel ou en source de tous les scandales contemporains, cette question n’a plus lieu d’être : ne reste plus qu’un aval des faits et dits scandaleux où tout accommodement est faiblesse, superstition, manque de fermeté dans la foi. Au temps des troubles, cette foule à la fois victime et coupable, objet de la préoccupation de ceux qui réfléchissent sur le scandale, encourra dans sa chair de plus grands scandales dans la tragédie des guerres civiles. Et, lorsqu’aux premiers temps de la coexistence civile, il s’agira de réunifier une communauté, c’est bien sur l’ordre du cœur, dans un idéal de « concorde » qui ne pourra se penser qu’en termes d’acceptation de l’erreur et de la « faiblesse » d’autrui, que l’on comptera de nouveau pour mettre un terme aux scandales de fait advenus en ce temps.

Notes

  1. Le présent article synthétise les grandes lignes d’une enquête effectuée dans mon livre, Panurge comme lard en pois. Paradoxe, scandale et propriété dans le Tiers Livre, Genève, Droz, 2013, ainsi que dans un article, « Calvin et le scandale », dans Franco Giacone (éd.), Calvin insolite. Actes du colloque de Florence (12-14 mars 2009), Paris, Classiques Garnier, 2012, p. 77-91.
  2. Voir Johannes Lindblom, « Skandalon. Eine lexikalisch-exegetische Untersuchung », Uppsala Universitets Årsskript Teologi, 45, 1921, p. 5-22 ; Gustav Stählin, Skandalon. Untersuchungen zur Geschichte eines biblischen Begriffs, Gütersloh, C. Bertelsmann, 1930, Ire partie ; et Pascale Hummel, Trébuchets : étude sur les notions de pierre de touche et de pierre de scandale, Bern, Peter Lang, 2004.
  3. Érasme, Enchiridion militis christiani, éd.-trad. André-Jean Festugière, Paris, Vrin, 1971, chap. 3, p. 106 ; Éloge de la Folie, trad. Claude Blum, § LXV, dans Érasme, éd.-trad. Claude Blum, André Godin, Jean-Claude Margolin et Daniel Ménager, Paris, Robert Laffont, 1992, p. 91-95.
  4. Thomas d’Aquin, Somme Théologique, IIa IIæ, q. 43, De scandalo : sed contra caritatem specialiter scandalum esse videtur ; trad. par Vincent Vergriete : Somme théologique. La Charité, éd. Henri-Dominique Gardeil, Paris/Tournai/Rome, Cerf, 1957.
  5. Voir par ex. Érasme, Convivium Religiosum, L. B., I, 684 F-685 C ; trad. par Daniel Ménager dans Érasme, éd. cit., p. 253-255.
  6. Dans ses Loci communes de 1521 (Loci communes rerum theologicarum seu hypotyposes theologicæ, Wittenberg, s.n., 1521 ; éd.-trad. allemande Horst G. Pöhlmann, Gütersloh, 1993, rééd. 1997) : voir infra.
  7. Voir Simon Markish, Érasme et les Juifs, trad. Mary Fretz, Paris, L’Âge d’Homme, 1979, chap. 2.
  8. Mélanchthon, Loci communes, op. cit., chap. 11 sur le scandale. Voir sur cet ouvrage Ann Moss, Les Recueils de lieux communs. Méthode pour apprendre à penser à la Renaissance (1996), trad. Patricia Eichel-Lojkine et al., Genève, Droz, 2002, chap. 5 ; Francis Goyet, Le Sublime du « lieu commun ». L’invention rhétorique dans l’Antiquité et à la Renaissance, Paris, Champion, 1996, p. 439 sq. ; Kees Meerhoff, Entre logique et littérature. Autour de Philippe Mélanchthon, Orléans, Paradigme, 2001, chap. 1 et 4.
  9. Voici le détail des chapitres de 1521 : chap. 1, De hominis viribus adeoque de libero arbitrio ; chap. 2, De peccato ; chap. 3, De lege ; chap. 4, De evangelio ; chap. 5, De gratia ; chap. 6, De justificatione et fide ; chap. 7, De discrimine veteris ac novi testamenti. Item de abrogatione legis ; chap. 8, De signis ; chap. 9, De caritate ; chap. 10, De magistratibus ; chap. 11, De scandalo.
  10. Mélanchthon, Loci theologici, in Corpus Reformatorum, éd. C. G. Bretschneider et H. E. Bindseil, Brunswick, C. A. Schwetschke & Sohn, 1854, t. XXI, pour les éd. de 1521, 1535 et 1543 ; et Loci præcipui theologici, Leipzig, Valentin Babst, 1559, chap. 23, p. 736-749.
  11. Mélanchthon, Loci theologici, in Corpus Reformatorum, éd. cit., t. XXI, col. 516-519.
  12. Sur l’importance de cette édition pour la pensée calvinienne, voir Richard A. Muller, « Ordo docendi. Melanchthon and the Organization of Calvin’s Institutes, 1536-1543 », dans Karin Maag (éd.), Melanchthon in Europe. His Work and Influence beyond Wittenberg, Grand Rapids, Baker Books, 1999, p. 123-140 ; et Olivier Millet, « Les Loci communes de 1535 et l’Institution de la Religion chrétienne de 1539-1541, ou Calvin en dialogue avec Mélanchthon »,
    dans Günter Frank et Kees Meerhoff (éd.), Melanchthon in Europa. 2. Teilband: Westeuropa, Stuttgart, J. Thorbecke, 2002, p. 85-96.
  13. Voir Michael A. Screech, Rabelais et le mariage. Religion, morale et philosophie du rire (1958), trad. Ann Bridge, Genève, Droz, 1992, chap. 7 ; Thierry Wanegffelen, Ni Rome ni Genève. Des fidèles entre deux chaires en France au XVIe siècle, Paris, Champion, 1997, chap. 3 ; Jean Delumeau, Thierry Wanegffelen et Bernard Cottret (dir.), Naissance et affirmation de la Réforme, Paris, PUF, 2012, p. 84-87.
  14. Luther, Controverse contre la théologie scolastique (1517) et Controverse tenue à Heidelberg (1518), dans Œuvres, Genève, Labor et Fides, t. I, 1957, p. 96-101 et p. 121-140. Voir Jean Delumeau, Thierry Wanegffelen et Bernard Cottret (dir.), Naissance et affirmation de la Réforme, op. cit., p. 47-48.
  15. Érasme, Epistola apologetica de interdicto esu carnium deque similibus hominum constitutionibus (1522), ASD, IX-1, p. 1-50, trad. André Godin, dans Érasme, éd. cit., p. 641-683.
  16. Ibid., p. 42, l. 690 (L. B., IX, 1209 E) ; trad. p. 672.
  17. Érasme, Exomologesis, L. B., V, 147-156 A ; trad. Claude Chansonnette (1524) dans Eugénie Droz, Chemins de l’hérésie. Textes et documents, Genève, Slatkine reprints, 1970, t. I « Quatre manières de se confesser », p. 10-41 pour la traduction de l’Exomologesis par Chansonnette. Sur l’Exomologesis, voir ibid., p. 1-5.
  18. Érasme, Epistola apologetica, op. cit., p. 44, l. 762-772, L. B., 1211 A-B ; trad. p. 675.
  19. Érasme, Le Libre arbitre, trad. André Godin, dans Érasme, éd. cit., p. 683-772.
  20. Ibid., p. 706.
  21. Ibid., p. 705.
  22. Sur cette ligne argumentative d’Érasme, voir également Blandine Perona, « Scandale et interprétation dans la lettre d’Érasme à Martin Dorp », BHR, 78, 2016, p. 297-309.
  23. Érasme, Le Libre arbitre, op. cit., p. 767-768.
  24. Martin Luther, Werke, Weimar, H. Böhlaus Nachfolger, à partir de 1912, t. XVIII, p. 628 ; trad. cit., t. V, p. 46.
  25. Ibid., p. 132-144.
  26. Jean Calvin, Christianæ religionis institutio, Bâle, T. Platter et B. Lasius, 1536, chap. 6 ; Institution de la religion chrétienne (1541), éd. Olivier Millet, Genève, Droz, 2008, chap. 14 ; L’Institution chrétienne (1560), éd. Société Calviniste de France, Genève, Labor et Fides, 1957, livre III, chap. 19.
  27. Jean Calvin, Des Scandales, éd. Olivier Fatio avec la collaboration de Claude Rapin, Genève, Droz, 1984.
  28. Ibid., p. 56.
  29. Jean Calvin, Institutio, 1536, p. 412 ; éd. 1541, chap. 14 ; et Des Scandales, éd. cit., p. 53-56.
  30. Ibid., p. 177.
  31. Ibid., p. 175.
  32. Ibid., p. 157.
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Chapitre de livre
EAN html : 9791030008036
ISBN html : 979-10-300-0803-6
ISBN pdf : 979-10-300-0804-3
ISSN : 2743-7639
Posté le 07/01/2022
11 p.
Code CLIL : 3387 ; 4024 ; 3388 ; 3345
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Comment citer

Pouey-Mounou, Anne-Pascale, “Enjeux théologiques du scandale au début du XVIe siècle”, in : Perona, Blandine, Moreau, Isabelle, Zanin, Enrica, éd., Fabrique du scandale et rivalités mémorielles en France et en Europe (1550-1697), Pessac, Presses Universitaires de Bordeaux, collection S@voirs humanistes 2, 2022, 27-37 [en ligne] https://una-editions.fr/enjeux-theologiques-du-scandale-au-debut-du-xvie-siecle/ [consulté le 07/01/2022].
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Illustration de couverture • D’après la gravure « Massacre d'un village d'Indiens par les Conquistadors » de Johann Theodor de Bry, in : Las Casas, Bartholomé de,Narratio regionum Indicarum per Hispanos quosdam devastattarum, 1598.
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