Contre-plaque trapézoïdale à contours festonnés
Alliage cuivreux
long : 5,8 cm
Larg. max. : 2 cm ; larg. min. : 1,4 cm.
La côte de Chalustre, commune de Montcaret, Dordogne.
La contre-plaque en bronze moulé a été coulée en une seule fois, c’est à dire que les bossettes, les oeillets de fixations et le décor sont venus de fonderie. Le revers porte une marque (un monogramme) qui a été gravée sur le positif de cire avant la fonte. Trois œillets permettaient la fixation de la plaque à la ceinture. Ils présentent la particularité d’être dans le prolongement du pourtour ce qui induit la verticalité de l’œillet distal. La contre-plaque est trapézoïdale avec un contour légèrement festonné. Le décor est organisé en deux registres qui encadrent un cartouche central. Les motifs géométrisés découlent des entrelacs du style animalier II des régions septentrionales1. La forme de la contre-plaque ainsi que son décor autorisent une de la deuxième moitié du VIIe siècle d’après les typo-chronologies des régions septentrionales. Les garnitures de ceinture avec de telles contre-plaques comprenaient par ailleurs, une plaque-boucle et une petite applique.
Ce type de garniture de ceinture est septentrional. De semblables sont connues dans le sud-ouest, mais elles présentent toutes une schématisation extrême des motifs. Dans l’est de la cité de Toulouse, une garniture de ceinture complète de Teilhet-Tabariane (Ariège) et une contre-plaque à Auterive (Haute-Garonne) présentent trois ocelles à l’emplacement des bossettes, alors qu’à Montferrand (Aude), une contre-plaque révèle une incompréhension des modèles d’origine, les festons sont devenus de multiples petits lobes, les motifs sont devenus géométriques et l’emplacement des bossettes n’est plus matérialisé2. À Lectoure (Gers), ont été trouvées une contre-plaque accompagnant une plaque-boucle plus précoce et une garniture de ceinture3. À Le Burgaud (Haute-Garonne), une plaque de plaque-boucle et une applique sont tout à fait semblables à celle de Montcaret. Ces deux derniers sites ont livré des plaques avec des bossettes venues de fonderie.
L’objet de Montcaret a été découvert en 1927 sur la côte de Chalustre, à environ trois cent mètres à l’est de la villa gallo-romaine4. Il fournit un témoin d’occupation sur un même terroir entre l’abandon supposé de la villa au début du VIe siècle et la réoccupation des ruines à la fin du XIe siècle. La datation de l’objet de la seconde moitié du VIIe siècle autorise une réflexion sur un glissement possible de la communauté rurale pour une nouvelle organisation sociale et/ou religieuse5. Cette observation ne pourra se transformer en hypothèse qu’a la suite d’une étude allant dans ce sens (prospection, recherche en archives).
Plaque de plaque-boucle triangulaire trilobée
Bronze étamé
Long. : 12,7 cm
Larg. max. : 7,7 cm ; larg. min. : 4 cm
Cimetière communal, commune de Pessac-sur-Dordogne, Gironde6.
Plaque triangulaire trilobée à trois bossettes. Elle présente la particularité d’avoir un cordon amovible qui souligne les trois bossettes et le champ central de la plaque. Ce cordon est strié, il est maintenu en place par les bossettes. Ces dernières sont rivetées à la plaque ce qui leur confère un rôle décoratif. La plaque était reliée à une boucle qui a disparu. La plaque-boucle était articulée à l’aide d’une charnière à goupille, les quatre languettes perforées de l’extrémité proximale en sont les témoins. Le revers de la plaque ne présente pas de signe particulier, il est évidé et comporte quatre œillets, deux proximaux, un médian et un distal. Ces derniers permettaient la fixation de la plaque à la ceinture à l’aide d’un lacet.
Le décor de la plaque relève du type aquitain, puisque les motifs inscrits dans des champs se découpent sur fond pointillé. Le type D11 de S. Lerenter, dans lequel a été classée la plaque, est caractérisé par la forme triangulaire associée au cordon en relief7. Aucune contre-plaque ou plaque dorsales ne sont connues dans ce groupe. Le champ central s’inscrit dans un trapèze. Il est orné d’un entrelacs en vannerie, réalisé avec un ruban hachuré. Son pourtour est souligné de trois frises oblongues ornées de motifs semblables que l’on retrouve dans deux petits cartouches, entre les bossettes proximales, de part et d’autre du cordon amovible. Une frise de dents-de-loup réalisée en pointillé, placée dans un long champ vertical à l’avant de la charnière, orne l’extrémité proximale de la plaque. L’organisation des différents champs reprend celle qui ordonne les champs des plaques-boucles triangulaires ornées d’émail en champlevé, du type H11 de S. Lerenter8.
Les rubans hachurés apparaissent comme une originalité car dans le style aquitain, les rubans lisses ont été privilégiés. Tout comme le traitement de l’entrelacs central, ils évoquent plus sûrement les damasquinures du premier quart du VIIe siècle. La plaque-boucle de Pessac-sur-Dordogne peut être datée de cette période au plus tard, ce que corrobore l’absence de plaques annexes, la forme triangulaire trilobée qui, dans les typochronologies septentrionales9, apparaît dans le dernier tiers du VIe siècle, et sa parenté avec les plaques du type H11 de S. Lerenter. À partir des 11 exemplaires qu’elle a rassemblés, on remarquera la diversité iconographique pour un nombre assez restreint d’objets. Par ailleurs, l’existence de plaques avec un cordon amovible qui ne présente pas un décor dans le style aquitain10 et la parenté avec les plaques triangulaires en bronze champlevé qui sont dispersées dans toute la Gaule sont d’autres éléments pour voir dans cet objet de type aquitain, une influence septentrionale encore bien perceptible11.
Hache (proto-francisque)
Fer
Long. env. 15,5 cm
Larg. tranchant env. 8,5 cm ; larg. talon env. 3,5 cm
L’objet est connu par un dessin de Conil qui effectuait des représentations assez fidèles des objets qu’il dessinait12. C’est une hache à dos profilé en S et emmanchement oblique. Ces caractéristiques sont celles de la “francisque”13. Toutefois, la base de l’emmanchement cantonnée de deux pointes révèle qu’il s’agit d’une hache précoce datée du milieu du Ve siècle avec des caractéristiques morphologiques qui annoncent la francisque.
Ce type d’objet constituait un élément important de l’armement germanique. Il a été trouvé dans des tombes de militaires barbares au service de l’armée romaine à proximité du limes ou dans des tombes de fédérés, dans le Nord de la Gaule et la province de Belgique. On peut comparer la proto-francisque de Montcaret à celles de Rhenen tombe 833 (Prov. Utrecht)14, Chouy tombe 127 (Aisne)15 et Vermand III tombe 284 (Aisne)16. Les trois sont issues du groupe “Äxte mit Schaftlochlappen” de type B de Böhme dont la plus forte représentation est localisée entre Somme et Belgique et dont la datation relève de la première moitié du Ve siècle. C’est la seule hache d’arme de ce type connue au sud de la Loire avec peut-être celle qui est conservée au musée de Carcassonne17. Elle pose un problème d’interprétation quant à la nature du contact entre les occupants de la villa, des gallo-romains (?), une personne (ou un groupe) associée à une culture romano-germanique qui s’était développée en contexte militaire septentrional (?), et les liens établis entre ces personnes et les Wisigoths installés en Aquitaine à partir de 418 p.C.
L’objet provient de la villa gallo-romaine, salle 1 pour Conil18, ce qui doit correspondre à la salle XX sur le plan de Formigé19. Sur le carnet de Conil, une coupe stratigraphique de la pièce montre qu’elle était dans une zone de réaménagement des thermes. On ne peut toutefois déterminer si le remblai était antérieur ou postérieur aux réaménagements.
Bibliographie
Contre-plaque trapézoïdale à contours festonnés
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- Conil P.-A. : Carnet 11.
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- Salin, E. (1952) : La civilisation mérovingienne, t. 2, Paris.
- Stutz, F. (2000) ; “L’inhumation habillée à l’époque mérovingienne au sud de la Loire”, Mémoire de la société Archéologique du Midi de la France, 60.
Plaque de plaque-boucle triangulaire trilobée
- Bulletin de la Société Archéologique et Historique de la Charente, 1914.
- Delestre, X. et Perin, P., dir. (1994) : La datation des structures et des objets du Moyen Âge : méthodes et résultats, Actes des XVe journées internationales d’Archéologie mérovingienne, Rouen.
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- Lerenter, S. (1991b) : Les plaques-boucles en bronze de style aquitain à l’époque mérovingienne, thèse dactylographiée, Université de Paris I, 1991.
- Martin, M. (1988) : “Das frühmittelalterliche Grabgebäude unter der Kirche St. Pankratius in Hitzkirch”, Archäologie der schweiz, 11-2, 89-101.
- Perin, P. (1998) : “La question des « tombes-références » pour la datation absolue du mobilier funéraire mérovingien”, Mémoire de l’Association Française d’Archéologie Mérovingienne, 7, 189-206.
- Roth, H. (1998) : “La chronologie des tombes féminines mérovingiennes d’Allemagne du sud à partir de bases statistiques”, Mémoire de l’Association Française d’Archéologie Mérovingienne, 7, 117-122.
Hache (proto-francisque)
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- Conil P.-A. : Carnet 10 ; Carnet 11.
- Formigé, J. (1941) : “Fouilles de Montcaret”, in : 102e Congrès archéologique de France (Bordeaux-Bayonne 1939), Paris.
- Monod, A. et Rancoule, G. (1969) : “Quelques objets de provenance audoise appartenant à la période romaine tardive et au Moyen-Âge“, in : Bulletin de la Société d’Études Scientifiques de l’Aude, 69.
- Stutz, F. (1993) : Les objets mérovingiens de type septentrional dans la moitié sud de la Gaule, Mémoire de Maîtrise, Université de Paris I.
Notes
- Édouard Salin a parlé de “cubisme mérovingien” (Salin 1952, t. 2, 318). On peut voir plusieurs exemples de plaques festonnées avec des entrelacs animalier dans Moosbrugger-Leu 1967, Taf. 27.
- Roger 1908, pl. XXVI ; Stutz 2000, 44 fig. 8 n° 3 (Montferrand) n° 5 (Teilhet). La plaque d’Auterive est inédite.
- Barbe & Ducasse 1978, fig. 8, 9, 13, 18 ; Boudartchouk et al. 2000, 65 fig. 32, 34.
- Conil, Carnet 11, 30.
- Ce type de glissement de communauté a été observé sur plusieurs sites ruraux à la même époque. Pour S. Lebecq, il est à mettre en relation avec l’expansion démographique du VIIe siècle (Lebecq, Chap. 2, 137-144. De nombreux exemples de sites se trouvent dans : Lorren & Perin, dir. AFAM, tome VI.
- Cette plaque de plaque-boucle était attribuée à Montcaret par E. James et S. Lerenter, jusqu’à la redécouverte des Carnets Conil. Elle figure dans le Carnet 11, feuille 28, avec sa provenance et l’indication sur le lieu de la découverte. (James 1977, 456 catalogue C n° 291 et Lerenter (1991), n° 24. 231. D11, pl. LXII n° 3).
- Id., 54-55, 137, pl. LXI à LXIII et Lerenter 1985, 225 sq.
- Lerenter, op. cit., 63, note 1, 142, pl. LXXXVII-XCI. Dans le catalogue, 25 exemplaires ont été rassemblés (on en a retiré deux, qui découlent du type plutôt qu’il n’en relève : ceux de Beaucaire-sur-Baïse et de Montégut). Seulement 9 exemplaires ont été trouvés au sud de la Loire. À la suite de M. Martin, on pense que le type H11 ne peut être considéré comme strictement aquitain mais comme gallo-romain, Martin 1988, 2, 89-101. La plupart des plaques-boucles du type H11 de S. Lerenter avait des boucles godronnées que l’on place dans la seconde moitié du VIe siècle.
- Voir Delestre & Périn, dir. 1998 qui rassemble des synthèses récentes, notamment les articles de P. Périn : “La question des ‘tombes-références’ pour la datation absolue du mobilier funéraire mérovingien”, 189-206 ; Legoux : “Le cadre chronologique de Picardie. Son application aux autres régions en vue d’une chronologie unifiée et son extension vers le Romain tardif”, 137-188 et Roth : “La chronologie des tombes féminines mérovingiennes d’Allemagne du sud à partir de bases statistiques”, 117-122.
- En premier lieu, la plaque-boucle de Ronsenac (Charente), conservée à Angoulême à la Société Archéologique de la Charente et publiée pour la première fois dans le Bulletin de la Société Archéologique et Historique de la Charente, 1914, 105-107.
- Sur les 11 exemplaires rassemblés par S. Lerenter, 4 présentent un décor avec des références septentrionales directes, dont deux plaques identiques, l’une trouvée à Évreux (Eure), l’autre de provenance inconnue, sont ornées de quatre-feuilles en barrette proximale, motif ponctuellement observé de la Normandie à la Loire Moyenne.
- Conil, Carnet 10, 28.
- De nombreuses haches d’armes sont dénommées à tort francisque. La francisque n’est qu’un des types de hache qui recouvre les deux caractéristiques mentionnées dans le texte et qui est déposé dans les tombes à partir de 475 (horizon archéologique de Childéric) jusqu’au milieu du VIe siècle.
- Böhme 1974, vol. 1, 26, notice 64 ; vol. 2 pl. 63 n° 13.
- ibidem, vol. 1, 26, notice 156, vol. 2 pl. 116 n° 7.
- ibidem, vol. 1, 26, notice 192, vol. 2 pl. 140 n° 13.
- Monod & Rancoule 1979, fig. 15. Les autres haches profilées connues dans la zone méridionale sont des francisques proprement dites, très profilées, et sont datées du dernier quart du Ve et de la première moitié du VIe siècle. Ces haches sont plutôt à mettre en relation avec la conquête de l’Aquitaine à partir de 507. Il s’agit des francisques de Aucamville (Tarn-et- Garonne), Courbillac (Charente), Biron (Charente maritime), Saint-Cybardeaux (Charente), Castéra-Verduzan (Gers), Macqueville (Charente maritime), L’Isle-Jourdain (Gers). Elles sont représentées dans Stutz, 1993.
- Op. cit. note 1 ; Carnet 11.
- Formigé 1941, 183.