En France, le terme de “romanisation” apparaît dès le XIXe s., à une époque marquée par l’impérialisme colonial où un certain dualisme entre les sociétés anciennes semblait aller de soi. De manière à mettre en perspective cette notion, il faut aujourd’hui rappeler dans quel contexte historiographique celle-ci a émergé. Dominée par une histoire qui était alors conçue comme linéaire, l’évolution de l’Empire romain était considérée – selon une approche également très “organique” – suivant une métrologie à trois temps : l’émergence, la pleine maturité accompagnée d’une phase d’hégémonie, et enfin le déclin. Pour cette dernière phase, les historiens ont proposé de substituer au terme “Bas-Empire” celui d’“Antiquité tardive” censé mieux exprimer le fait que cet empire avait muté, et que l’on ne pouvait résumer cette période selon une terminologie en apparence négative1. Ainsi, selon ce schéma, la romanisation se ferait mécaniquement au moment où, la conquête de la Gaule étant effective, tout un ensemble de transformations interviendrait sous la férule de Rome.
Dans de nombreux manuels, articles ou ouvrages de synthèse, il était ainsi courant de faire coïncider la romanisation avec l’emprise du pouvoir romain sur un territoire conquis, en abordant la question sous l’angle des modifications politiques et administratives engendrées par la conquête militaire. Les sources convoquées étaient principalement les textes, les inscriptions et la monnaie. Mais l’évolution de la recherche, l’attention portée aux aspects ethniques et identitaires2 en a fait une notion plus nuancée permettant aux historiens de mesurer l’impact de la romanitas sur les populations concernées3.
Sur le plan chronologique, la question du poids de l’influence romaine a été régulièrement évoquée par les protohistoriens qui ont constaté la présence d’importations méditerranéennes dans des contextes antérieurs à la conquête. Un glissement s’est opéré progressivement d’une vision classique de “colonisation” intervenant à la suite des opérations militaires romaines à celle d’une acculturation progressive voire d’une série d’échanges culturels et économiques ayant rapproché Romains et Gaulois4. Ce changement de posture émane en particulier des réflexions développées dans le cadre des recherches menées sur les habitats ouverts, les oppida et, d’une manière générale, sur le monde agricole à La Tène C et à La Tène D.
De fait, la question de la romanisation est devenue l’un des thèmes favoris de la recherche archéologique française et n’est plus une question réservée aux historiens comme en témoigne l’organisation en 1993 du colloque de l’AGER De la ferme indigène à la villa romaine : la romanisation des campagnes de la Gaule ou plus récemment le colloque Comment les Gaules devinrent romaines organisé par l’Institut national de recherches archéologiques préventives5. Le colloque de l’AGER a constitué une étape importante dans la définition d’un nouveau paradigme que l’on peut schématiser comme l’entrée de l’Europe celtique dans la sphère méditerranéenne6. D’emblée, comme le soulignait Olivier Buchsenschutz dans l’introduction de ce colloque, la posture adoptée par le protohistorien incite à s’écarter de la vision véhiculée par la littérature antique d’une ère celtique forcément barbare et d’un monde romain forcément civilisé7. En revisitant cette question, c’est en fait une introspection dans les sociétés de l’âge du Fer européen qui était alors proposée.
Onze ans plus tard, O. Buchsenschutz reprend cette question dans un numéro des Annales consacré à la romanisation8 et apporte au débat une contribution importante, car elle considère cette évolution de la recherche comme un acquis permettant d’inscrire la question de la romanisation de la Gaule dans le temps long. Sur ce point d’ailleurs, historiens et archéologues sont aujourd’hui d’accord, comme le souligne Daniel Paunier dans la synthèse qu’il a consacrée à cette problématique pour le colloque de clôture des récentes tables-rondes sur les Celtes en l’honneur de Christian Goudineau9. Il ne s’agit pas, bien entendu, de tomber dans le piège d’une relecture de l’archéologie et de l’histoire des Gaules depuis le Ve s. a.C. à la lumière de ce que nous savons de leur conquête par les Romains au Ier s. a.C.
Ainsi, le phénomène de romanisation ou plus général d’acculturation, que l’on a considéré uniquement en relation avec la conquête de la Gaule, s’avère en réalité plus ancien. Le développement des recherches sur l’âge du Fer et la remise à niveau du référentiel chronologique qui l’a accompagné ont mis en évidence les indices d’une ouverture graduelle des sociétés celtiques aux civilisations du bassin méditerranéen. Ce phénomène, qui serait aujourd’hui à placer entre le IIIe et le Ier s. a.C., selon la région considérée, a été vraisemblablement précédé par des contacts réguliers suivi de périodes de ruptures. C’est le cas également pour des époques plus anciennes, notamment la fin du VIe s., où émergent dans certaines régions des centres “princiers” en capacité de faire venir des objets d’origine étrusque ou grecque. La recherche sur les causes de ces mutations hésite depuis plusieurs décennies entre les facteurs internes et l’influence des contacts qu’ont pu entretenir ces “principautés˝ avec les sociétés méditerranéennes ayant atteint un niveau de complexité plus important10.
Quelques siècles plus tard, c’est à nouveau le dynamisme de la sphère méditerranéenne, et peut-être également l’évolution propre de la Gaule, qui aboutissent à une multiplication des contacts culturels et vraisemblablement économiques entre ces différentes aires. Une nouvelle fois, c’est sans doute le niveau de complexification atteint qui va permettre ces développements. L’émergence d’une économie monétaire, dont l’origine pourrait être le mercenariat, favorise largement ce rapprochement11. Les migrations celtiques illustrent ce phénomène, dont l’aspect diffusionniste ne doit pas faire oublier l’appropriation rapide de l’outil monétaire à partir du IIIe s. a.C. Cette appropriation s’effectue selon des modalités variées allant, comme dans l’ouest de la Gaule, à un usage exclusif du statère étalon, tandis que le Centre-Est se caractérise par son abandon au profit du quinaire d’argent12. On constate donc ici une volonté très nette de ces régions – hors de la Provincia et donc de l’autorité exercée par Rome – de s’aligner sur le monnayage républicain, ce qui peut être mis en relation avec l’existence d’échanges économiques accrus durant cette même période. Ce phénomène d’emprunt peut être d’une certaine façon étendu à l’écriture car, là-aussi, l’adoption de cet usage semble s’être effectuée de manières diverses. Le grec et le latin seront utilisés par les druides, seuls autorisés à manier l’écriture, en particulier pour l’administration publique dont l’organisation se développe durant les deux derniers siècles avant notre ère.
Bien que les amphores italiques n’aient pas été les seuls produits d’origine méditerranéenne à avoir été importés, leur présence fréquente et dans des proportions inédites sur des sites d’Europe tempérée a pu surprendre les protohistoriens eux-mêmes, les incitant parfois à adopter des chronologies se révélant finalement trop basses. Là encore, l’introduction de l’usage de boire du vin n’apparaît pas comme un phénomène linéaire mais scandé par les mutations des sociétés celtiques. En l’occurrence, c’est peut-être le développement, durant La Tène C, des rassemblements à caractère militaire et religieux faisant usage de boissons euphorisantes qui a favorisé la réintroduction du vin13. Sa diffusion ira croissante jusqu’à La Tène D grâce à l’action de negotiatores romains dont la présence va au-delà des régions qui entretenaient des relations économiques anciennes avec la péninsule italique.
Ces différentes observations démontrent l’existence de contacts réguliers entre des mondes que l’on pensait “étanches” et qui, en réalité, fonctionnent selon un mode d’interpénétration qui a été observé pour des sociétés contemporaines. L’anthropologie des contacts culturels considère, à la suite des travaux de Herskovits, qu’il existe une assez grande variabilité dans la forme que prennent ces emprunts14. Qu’il s’agisse de la période précédant la conquête ou de la phase qui lui succède, les sociétés ont interagi entre elles, selon une graduation que les recherches actuelles tentent de préciser. Si on considère les premiers siècles de notre ère – et donc la phase de romanisation post-conquête –, on peut s’interroger légitimement sur les modalités de la cohabitation entre les deux cultures. La question religieuse est un bon exemple pour mesurer la part de la sélection “substitutive” des anthropologues, qui signifie qu’un trait culturel emprunté peut entraîner l’effacement de l’ancien, et la part de la sélection “additive”, où les éléments empruntés cohabitent avec la tradition. Dans le cas de la Gaule, l’association de dieux gaulois et romains aboutit par exemple à un nouveau sens religieux15.
La réflexion entamée par O. Buchsenschutz dans son article des Annales ouvre de nombreux axes de recherches sur l’évolution des sociétés méditerranéennes et celtiques dans les siècles qui précèdent la Conquête. Il est proposé dans le cadre de cet article d’étudier plus particulièrement deux thèmes, celui des oppida et celui des Gaulois au service de Rome qui s’inscrivent dans ce renouvellement de perspective du phénomène de la romanisation.
L’oppidum, un modèle urbain non méditerranéen ?
La question de l’émergence des villes en Europe celtique, ainsi que celle de ses origines, animent depuis les années 1980 les débats des archéologues. Certains travaux des années 1980, comme ceux menés à Levroux, au Titelberg ou encore à Manching, et la dynamique créée autour du centre archéologique européen du Mont-Beuvray ont largement contribué à relancer la recherche sur cette thématique. Lorsque Christian Goudineau et Venceslas Kruta élaborent leur synthèse sur l’histoire urbaine de la Gaule, le constat qu’ils dressent sur l’époque qui précède la conquête romaine souligne les lacunes de la documentation pour traiter de cette question pourtant fondamentale : “Comment parler de villes lorsque l’archéologie ne nous restitue presque rien d’une organisation (…) et ne donne aucune idée nette d’un chiffre de population ? Nos sources et la prudence invitent à conclure que la Gaule présentait des formes d’urbanisation embryonnaires, plus ou moins développées selon les cas […]”16. Le renouvellement des recherches liées à ces questionnements est venu notamment de la fouille et de la prospection géophysique de sites caractérisés souvent par une surface importante qui interdisait d’appréhender avec des moyens classiques leur organisation générale. Les recherches menées dans la vallée de l’Aisne (Condé-sur-Suippe et Villeneuve-Saint-Germain, Aisne) ont également participé à la redéfinition des problématiques sur l’évolution de l’habitat entre la fin de l’époque gauloise et la conquête romaine.
Abandonnant le vieux paradigme selon lequel toute ville devait présenter des analogies avec le modèle urbain gréco-romain, l’idée d’une ville gauloise ayant ses propres principes d’urbanisme s’est progressivement imposée. Sous l’influence de la New Archeology, les protohistoriens ont puisé dans les travaux des géographes soulignant qu’une ville se définit principalement par le développement de fonctions diverses à l’échelle d’un territoire qui s’organise autour d’elle17. La mise en place d’inventaires critiques des sites fortifiés a permis le développement de travaux sur la manière dont était structuré l’espace autour de ces oppida auxquels peut être attribuée la fonction de place centrale. Il a été notamment démontré que ces oppida n’étaient pas isolés, mais qu’ils s’inséraient dans un réseau économique dont ils constituaient probablement l’épicentre18. Ces sites centraux font leur apparition dans un contexte politique instable, avec plusieurs entités – les pagi et les civitates – qui interagissent vraisemblablement entre elles19. L’utilisation de techniques d’analyse spatiale, comme celle des polygones de Thiessen, montre dans de nombreuses régions la cohérence de l’implantation de ces sites par rapport aux distances inter-sites et aux échanges. Il s’agit cependant d’une projection fragile, car par essence diachronique. S’agissant des Suessiones, Patrice Brun a sur ce point bien mis en évidence la fragilité de toute construction territoriale en mutation, argument qui à lui seul peut expliquer la brièveté d’occupation des oppida20. Cette analyse peut être étendue à de nombreuses régions de la Gaule, bien que les données chronologiques soient sur ce point inégales21.
L’expansion des oppida à l’échelle européenne a suscité différents modèles explicatifs et suggéré notamment leur origine cisalpine. Les mouvements de populations, dont nous reparlerons plus loin à propos des auxiliaires, ont conduit certains auteurs à postuler que les Celtes avaient emprunté le concept de la ville à l’occasion de leurs séjours en Italie du Nord. Cette assertion a été par la suite remise en cause par une analyse critique des textes démontrant le parti pris des auteurs antiques dans l’histoire de ces régions22. De la même manière, les invasions des Cimbres et des Teutons ont été autrefois utilisées pour justifier l’apparition des sites fortifiés dans certaines régions, hypothèse qui a été depuis écartée par la plupart des auteurs23.
Ces modèles explicatifs liés à l’histoire événementielle ayant été rejetés, la recherche a par la suite oscillé entre les explications mettant en avant l’influence indirecte de la péninsule italique, et celles qui privilégient un processus autonome d’apparition du phénomène urbain en Gaule. Selon la première hypothèse, l’apparition des oppida s’effectuerait en réponse à la présence de plus en plus importante des Romains – par le biais des marchands –, dont la fréquentation de la Gaule a précédé la conquête. L’implication croissante de Rome dans les affaires gauloises au moment de la création de la Narbonnaise a été également considérée très tôt comme un facteur crédible pour expliquer l’essor rapide d’une nouvelle vague de fortifications en Europe tempérée. Patrick Pion a récemment repris cette hypothèse en soulignant que la montée en puissance des Éduens, à la fin du IIe s. a.C., coïncide avec l’installation des Romains dans le sud de la Gaule et la fondation de nombreux oppida24.
Les autres hypothèses suggèrent que c’est l’évolution interne de la société gauloise qui aurait favorisé l’émergence de groupements durables de population, selon un phénomène qui aurait concerné les différentes régions de l’Europe celtique, et notamment la Gaule25. La cartographie proposée par John Collis en 1984, et actualisée par Olivier Buchsenschutz26, démontre une répartition des oppida assez large en Europe, de la Bretagne aux hautes vallées du Rhin, du Danube et de la Volta. Cependant, le récit de César témoigne du fait que certains peuples, comme les Germains ou les Éburons, ne possèdent pas de sites fortifiés de ce type. Outre la nécessaire distance qui doit être prise par rapport aux assertions de César, il serait erroné d’avancer que l’absence d’oppidum signifie le peu de complexité politique. La réflexion menée sur l’habitat groupé protohistorique a permis de souligner que, contrairement aux théories évolutionnistes ou néo-évolutionnistes, la ville ne constitue pas un stade obligé dans l’évolution des sociétés occidentales non méditerranéennes. La dichotomie urbanisé/non urbanisé et chefferie/Etat n’est pas recevable, comme l’a mis en avant notamment Colin Haselgrove27.
Ainsi, il a été proposé que l’émergence de ces oppida réponde à un processus autonome d’évolution. La mise en évidence de modifications importantes dans la structure politique de la société celtique fournit, sur ce point, un certain nombre d’éclairages. À la royauté, ou supposée telle, vont se substituer des formes mixtes d’autorité, comme le principat décrit par César à propos des Éduens28. Des magistrats élus remplacent au Ier s. a.C. les rois héréditaires. L’aristocratie, dont le pouvoir économique n’a vraisemblablement pas cessé de croître depuis le siècle précédent, est le grand bénéficiaire de ce nouveau système. Toutefois, l’établissement de cette nouvelle organisation politique ne semble pas avoir été uniforme ni linéaire, César faisant mention à plusieurs reprises de troubles engendrés par la velléité de certains à rétablir le régime antérieur. De plus, les prérogatives de l’aristocratie par rapport aux autres groupes sociaux identifiés dans la société gauloise ne sont pas non plus parfaitement définies. S’il peut être admis que l’aristocratie fonde son pouvoir sur les richesses foncières – comme le suggère notamment l’éparpillement des tombes “riches” dans le nord de la Gaule – elle peut avoir contrôlé aussi en partie la production et la commercialisation29.
La Guerre des Gaules souligne le lien entre le sénat, en tant qu’assemblée représentant la population – selon des modalités qui ne sont que partiellement connues – et la notion de centre politique ayant pu être incarné par l’oppidum : “Les Aulerques Éburovices et les Lexovii, ayant massacré leur Sénat, qui était opposé à la guerre, fermèrent leurs portes [portas clauserunt] et se joignirent à Viridorix”30. Cette corrélation n’est mentionnée qu’une seule fois dans le texte de César, mais rien ne s’oppose à sa généralisation. Les sources archéologiques fournissent, quant à elles, principalement des indices indirects mais qui peuvent néanmoins être considérés comme des éléments discriminants. L’émission d’un monnayage ou l’usage de l’écriture ont notamment été retenus, dans le cas des Suessiones, pour reconnaître l’apparition des structures d’un État archaïque31.
Dans ce paysage nouveau, l’oppidum est l’expression d’une forme nouvelle de la société dont la structuration, tant au niveau du rempart que de l’organisation interne, a fait l’objet de la part des archéologues d’une attention particulière. Si la question des influences externes a été régulièrement abordée sous l’angle de l’acculturation, l’étude des liens possibles avec les habitats groupés antérieurs n’a pas été pour autant négligée. En particulier, il a été souligné l’importance des agglomérations ouvertes dans la structuration territoriale de la Gaule32 entre La Tène C2 et La Tène D. L’absence de systèmes défensifs dans la plupart des régions celtiques jusqu’à un stade avancé de l’âge du Fer a amené, comme nous l’avons vu précédemment, à introduire des causalités externes. À l’opposé, il a été proposé que cette dernière vague de fortification protohistorique résulte d’un “transfert technologique” consécutif aux contacts militaires qui se sont multipliés aux IVe et IIIe s.33 En dépit d’un hiatus chronologique entre cette période et le développement des oppida, force est de constater que certains parements externes évoquent une influence méridionale, mais celle-ci peut être tout autant postérieure. En tout état de cause, les travaux récents sur la chronologie des fortifications ont démontré que la mise en œuvre de certains remparts de la fin de l’âge du Fer présentait des particularités techniques, en apparence étrangères à la tradition architecturale celtique.
Si l’utilisation de bois dans la structure interne, l’absence de fondation et de mortier constituent autant de traits originaux de l’architecture de l’âge du Fer en Europe tempérée, la technique de la taille de la pierre n’appartient pas à cette tradition. Dans plusieurs oppida localisés dans des régions très éloignées les unes des autres, le parement externe se caractérise par l’utilisation de pierre de taille ; citons notamment Le Hérisson (Allier), Vernon (Eure) ou encore le Fossé des Pandours, dans le Bas-Rhin34. L’abandon du moellon à la faveur de ces pierres de taille constitue un emprunt vraisemblable à la tradition gréco-romaine, comme cela a été rappelé à l’occasion du colloque “Murus celticus”35. Par ailleurs, l’aspect ostentatoire du rempart lui-même a dû s’en trouver renforcé, sans pour autant nuire à sa solidité qui repose essentiellement sur le blocage interne maintenu par la grille de bois36. Ce plaquage n’était donc pas contradictoire avec la fonction défensive de la fortification. Ce type de mise en œuvre nécessitait incontestablement des réfections constantes, mais il faut souligner ici le caractère intrinsèquement éphémère de l’architecture gauloise, radicalement opposée sur ce point à l’architecture méditerranéenne.
Les espaces internes des fortifications étudiés ces dernières années en France, au Luxembourg ainsi qu’en Allemagne, ont montré la présence de plans réguliers qui caractérisent aussi le fait urbain. Les observations accumulées en Europe tempérée – citons Manching (Bavière), Le Titelberg (Grand-Duché-du-Luxembourg), Bibracte (Nièvre) ou Boviolles (Meuse) – démontrent l’existence d’axes structurants qui découpent l’espace de manière régulière. Ces axes structurants sont, dans un certain nombre de cas, en relation avec des portes dont la monumentalisation n’était peut-être pas un cas isolé sur l’oppidum, si l’on considère l’existence de places publiques qui pouvaient être entourées de bâtiments aux proportions également importantes. Ces espaces publics, qu’il s’agisse d’espaces ouverts, de galeries comme à Villeneuve-Saint-Germain ou de sanctuaires à l’image du secteur oriental délimité par un fossé au Titelberg, sont autant d’éléments qui évoquent également la ville. Ces espaces ne sont pas l’apanage des oppida, si l’on se réfère notamment au site d’Acy-Romance37, mais en diffèrent par leur proportion et surtout leur intégration dans un réseau viaire de grande ampleur. De même, la spécialisation de certains quartiers, déjà observée dans quelques habitats ouverts de La Tène C, se généralise à La Tène D à la faveur du développement de l’artisanat. Les bâtiments d’habitation, ainsi que leurs dépendances, sont implantés à l’intérieur d’îlots, généralement de schéma quadrangulaire, qui sont délimités par des petits fossés. Ces bâtiments présentent la particularité d’être construits intégralement en bois, selon des modèles fréquemment reconnus dans les installations agricoles dont l’architecture tend à se standardiser durant la même période.
L’ensemble des recherches menées ces dernières décennies en Europe tendent à démontrer que les oppida ne sont pas un simple agrégat progressif de fermes – en dépit de leur aspect vraisemblablement rural – mais une fondation accompagnée d’une planification émanant vraisemblablement d’un pouvoir politique. Le récit de Tite-Live témoigne de la prise de possession, en 186, d’un territoire aux environ d’Aquilée en fondant un oppidum38. Cet acte de fondation volontaire n’est pas contradictoire avec la présence d’une fréquentation antérieure, sous la forme d’un lieu de rassemblement ou d’un sanctuaire, comme cela a été proposé par Jeannot Meztler39. Ces lieux, fréquentés parfois depuis des siècles, ont pu être à l’origine du choix du site mais, dans tous les cas, l’appropriation d’un vaste espace constitue une rupture dans la manière dont était organisé l’habitat dans les sociétés celtiques. Ainsi, si peu à peu semble émerger un modèle spécifique d’urbanisation, les facteurs apparaissent pluriels. Les recherches menées notamment à Moulay (Mayenne), Corent (Puy-de-Dôme) ou Boviolles (Meuse)40 renouvellent progressivement nos connaissances sur la manière dont était géré l’espace interne de ces vastes fortifications. Au regard de ces investigations, c’est peut-être sur les questions de l’organisation de la voirie, ainsi que de la place des activités communautaires, que ces recherches apporteront le plus dans l’avenir.
Auxiliaires gaulois et romanisation
Le deuxième cas de figure que nous souhaitons présenter ici, après la question des villes, concerne des individus, en l’occurrence les combattants gaulois des IIe et Ier s. a.C. qui ont servi dans l’armée romaine en qualité d’auxiliaires. Pour aborder des problématiques touchant de près à des personnes et à leur parcours de vie, l’archéologue doit souvent se contenter des ultimes moments de celles-ci : ce qu’il reste de leurs funérailles. Extrapoler toute une vie à partir de rites funéraires ou d’objets déposés avec un défunt peut sembler une entreprise hasardeuse ; l’archéologie funéraire constitue cependant un matériel précieux pour comprendre les sociétés anciennes.
Les dépôts funéraires, comme le souligne Alain Testart, ne sont pas des “offrandes funéraires”41. Une offrande est, par définition, offerte, et n’appartient donc pas à celui qui la reçoit. Or, dans bon nombre de tombes riches en mobilier, les objets qui accompagnent le défunt sont ses objets personnels. Il s’agit donc d’objets qui procèdent d’une “certaine intimité entre la chose et le défunt”42. La présence de ces objets dans la tombe peut être interprétée de deux manières, qui ne sont par ailleurs pas exclusives. On peut leur donner une dimension religieuse en supposant que le mort tient à conserver ses objets et donc son statut dans l’au-delà, ou y voir la volonté du défunt d’être entouré d’un certain nombre d’objets afin de laisser une dernière image à ceux qui assistent aux funérailles. Image proche de celle qu’il a donnée pendant sa vie ou construite pour les funérailles, nous ne le saurons jamais. Toutefois, dans les deux cas, les objets présents dans la tombe ont une très forte proximité avec le défunt et son identité. Des armes dans une tombe sont ainsi le signe de la présence d’un personnage ayant des liens étroits avec le monde aristocratique et militaire.
Le corpus retenu pour cette recherche (145 sites), qui a fait l’objet d’une publication (Pernet 2010), contient environ 300 sépultures à armes pour lesquelles on peut parler d’auxiliaires. Il concerne toutes les Gaules (Transpadane comprise) ainsi que la région alpine. À partir de ces données, nous avons proposé différentes analyses, dont une sur la question de la romanisation et sur le rôle de l’armée romaine dans ce processus, avant même la période de conquête. Les résultats de celle-ci montrent que le phénomène commence en amont de la conquête militaire elle-même, souvent considérée comme point de départ de la romanisation par les archéologues antiquisants ou les historiens.
C’est au début du IIe s. a.C. que l’on peut commencer à parler d’auxiliaires gaulois et que la notion de mercenaires disparaît des textes. Les Romains ne qualifient en effet pas les combattants étrangers qui se battent à leurs côtés de mercenaires, même lorsque ceux-ci sont payés et servent, de facto, comme des mercenaires. Cette dernière situation est toutefois rare et la plupart des armées étrangères présentes du côté romain le sont soit au titre d’alliés, soit à celui de peuple soumis contraint de fournir des troupes, selon les termes d’un foedus, traité d’alliance qui prévoit les obligations militaires et financières des soumis43. Certains peuples gaulois d’Italie du Nord n’attendent pas leur soumission à Rome pour s’allier avec la nouvelle puissance méditerranéenne. Au IIIe s. a.C., les Cénomans et les Vénètes, encore libres, s’opposent aux autres peuples gaulois de Cisalpine et à Hannibal44.
La conquête de la Gaule Transalpine met les Romains aux prises avec deux peuples puissants de la Celtique : les Arvernes et les Helvètes. On sait que les Arvernes signent un traité de paix avec les Romains après leur défaite de 121 a.C. Il est fort possible que ce traité implique une coopération militaire. Les fouilles de Corent (Puy-de-Dôme) ont récemment mis en évidence les liens étroits qui unissent les élites arvernes et les Romains dans la première moitié du Ier s. a.C.45. La question helvète est plus complexe et les historiens ne sont pas tous d’accord avec le fait qu’à la suite de leur victoire en 107 a.C., les Helvètes ont signé un foedus avec Rome. Quant aux Éduens, on sait qu’ils ont légalisé leurs rapports avec Rome dans le courant du IIe s. a.C., mais c’est seulement au moment de la guerre des Gaules que nous commençons à avoir la preuve de la présence de troupes éduennes à leurs côtés.
Les meilleurs exemples pour cette phase de recrutement d’auxiliaires avant la Conquête proprement dite ont été mis en évidence dans les Alpes, en particulier chez les Lépontiens (Tessin, Suisse) et les Carniens (Slovénie). En l’absence de sources écrites, notre problème était de corréler la présence d’armement (celtique et romain) dans les tombes de grandes nécropoles comme celles de Giubiasco (Tessin) et d’Ornavasso (Piémont) avec un éventuel statut d’auxiliaire. Si l’armement romain de certains guerriers nous a semblé un argument suffisamment fort pour les qualifier d’auxiliaires, nous avons eu plus de peine pour les tombes à armes des mêmes nécropoles qui ne possèdent aucun élément d’armement romain. Pour les Lépontiens, ce sont les tombes à armes datées entre La Tène C2 et La Tène D1, voire certaines tombes de La Tène D2, avec une panoplie celtique46. Nous avons proposé de retenir comme possible la collaboration des élites lépontiennes avec le pouvoir romain dès la conquête de la Transpadane. Cela ne signifie pas forcément que ces hommes ont servi dans l’armée romaine ; en échange de l’autonomie de leur territoire, ils ont peut-être accepté de tenir les cols alpins et de surveiller le passage des Alpes en direction du territoire insubre. Ce n’est que plus tard, dans le courant du Ier s. a.C., que certains guerriers, alors partiellement équipés à la romaine, ont servi comme auxiliaires. Même situation chez les Carniens qui auraient pu être chargés très tôt, dès l’établissement du traité avec Rome (au plus tard en 171 a.C.), de surveiller la frontière alpine orientale.
Le moment de la conquête militaire romaine, qui peut s’étaler sur une longue période suivant les régions de Gaule, représente aussi un moment important dans le processus qui va mener certains aristocrates gaulois et leurs hommes à se battre aux côtés des Romains. Rappelons que la conquête d’un territoire est, pour Rome, l’occasion de créer des cercles d’amis, d’alliés ou de clients47 ou de renforcer ces liens, lorsqu’ils existent déjà, comme dans les cas exposés précédemment. Ceux qui cherchaient ensuite à en sortir “devenaient inimici et allaient rejoindre le lot des hostes du peuple romain. Ceux-ci s’exposaient à des châtiments exemplaires et ne devaient espérer retrouver un crédit (fides) aux yeux du conquérant qu’avec un temps très long”48. Les exemples de peuples gaulois rayés de la carte ne manquent pas : Boïens, Atuatuques, Vénètes (de Celtique), Éburons et Mandubiens pour n’en citer que quelques-uns. Pour les autres, les conditions sont plus ou moins pesantes et consistent souvent à payer un tribut et à participer à l’effort de guerre romain.
Avec cette phase de conquête, les sources archéologiques prennent de l’importance. Nous les avons bien entendu croisées avec les sources écrites, qui nous renseignent “en temps réel” sur la participation des Gaulois à l’effort de guerre romain, tandis que les sources archéologiques requièrent un effort d’interprétation supplémentaire, le décès du guerrier pouvant survenir de nombreuses années après les événements. Il nous importait donc surtout de donner une vision d’ensemble cohérente de ce moment charnière qu’est la phase de conquête. Pour les sources archéologiques, nous avons travaillé autour de deux notions fondamentales rencontrées tout au long de l’analyse de nos données funéraires : continuité et rupture.
La conquête touche les régions étudiées à des moments très différents : années 190 pour la Transpadane, années 120 pour la Narbonnaise, années 60 a.C. pour la Celtique et la Belgique, et l’époque augustéenne pour les Alpes. Il y a toutefois de nombreux points communs à mettre en lumière et, tout en prenant garde au contexte particulier de chacun des sites étudiés, de grandes lignes directrices peuvent être proposées. Commençons par les ensembles funéraires où une nette continuité est observée entre la période qui précède la conquête romaine et celle qui la suit.
Les exemples les plus anciens de notre étude sont ceux de Transalpine. En nous intéressant aux petites nécropoles volques arécomiques, peu nombreuses il est vrai, nous avons montré que le dépôt d’armes commençait bien avant la conquête romaine, au début du IIe s. a.C. La quasi-absence de tombes du début de La Tène C dans cette zone49 ne permet pas de savoir s’il y a continuité du dépôt d’armes en Languedoc depuis le Premier âge du Fer jusqu’à la période qui nous intéresse. Mais en l’état actuel de la documentation dans la région nîmoise, il semble que le dépôt d’armes reprenne au début du IIe s. a.C. La continuité a été observée, à Nîmes et à Beaucaire (Gard), entre les tombes de guerriers décédés avant la conquête des années 120 a.C. et celles de guerriers nés à cette période ou après. Elle concerne toute la période de La Tène D, avec une régularité à la fois dans le nombre de tombes et dans la panoplie, où l’épée figure en bonne place. Selon nous, les familles qui utilisent ces nécropoles sur une longue durée sont celles qui ont conservé leur pouvoir régional en concertation avec Rome et Marseille (cette dernière continuant à percevoir un tribut sur les Volques). Pendant toute cette phase de conquête et jusqu’après la révolte des Volques des années 80, il n’y a pas de traces de rupture dans les données archéologiques que nous avons répertoriées. Dans les faits, les guerriers que nous avons qualifiés d’auxiliaires n’ont peut-être pas modifié grand-chose à leurs habitudes, car ils étaient dans la sphère massaliète avant la conquête romaine et ils le restent jusqu’à la défaite de Marseille en 49. Mais ils ont de nouveaux devoirs face aux Romains, notamment le contrôle de la voie vers l’Espagne. Le même type de raisonnement peut être appliqué à l’aire alpine et aux nécropoles lépontiennes, carniennes et taurisques. Le passage à l’époque augustéenne s’y fait sans que l’on constate de rupture dans les rites ou dans l’architecture funéraire des nécropoles (Giubiasco, Ornavasso, etc.) qui continuent à être utilisées. La seule différence majeure consiste en l’apparition d’armement de tradition romaine, avec parfois des panoplies qui sont proches de celle du légionnaire.
La période de la Conquête donne lieu à une situation beaucoup plus contrastée chez les Trévires, avec d’un côté de grandes nécropoles comme Hoppstädten ou Wederath (Rhénanie-Palatinat), qui sont fréquentées sans interruption avant et après la conquête, et de l’autre de nombreux sites nouveaux, dont les tombes sont toutes contemporaines ou postérieures aux années 50 (comme Lebach ou Goeblingen-Nospelt au Luxembourg). Les sites tels que Hoppstädten ou Wederath présentent une continuité toute apparente, qui ne résiste pas à l’analyse de la nature des dépôts des tombes à char ou à armes. En suivant Ralf Gleser50, nous avons interprété en termes sociaux la différence entre les dépôts des tombes de La Tène D2a d’Hoppstädten, où le char et d’autres éléments (tuyères à foyers, augets à sel, etc.) symbolisent le pouvoir politique et économique du défunt, et ceux de La Tène D2b, desquels les chars ont disparus. La transmission du pouvoir qui s’était faite sur plusieurs générations cesse, et bien que des tombes à armes apparaissent encore sur le même site, l’auxiliaire, même s’il est de la même lignée que ses prédécesseurs, a perdu, symboliquement et matériellement, les prérogatives politiques et militaires de ses ancêtres. Il manque dans cette nécropole les tombes des guerriers qui ont vécu pendant et juste après la guerre des Gaules, résultat probable des dures répercussions du conflit sur la population masculine de cette communauté51.
Ce n’est pas le cas à Goeblingen-Nospelt, qui livre un instantané de la génération des contemporains et de ceux qui ont vécu juste après le conflit. Dans le cas de ces tombes exceptionnelles, on ne remarque pas de changements notables dans la manière dont se présentent ces élites sur ces deux ou trois générations : en armes, avec leurs éperons et les nombreux objets méditerranéens qui attestent de contacts réguliers avec le monde romain. Ils ont choisi une architecture funéraire (tombe en chambre sous tertre) qui les situe dans la droite ligne des grands aristocrates du IIe et du début du Ier s. a.C. (comme à Tartigny, Vieux-lès-Asfeld ou Clémency), voire de ceux du Hallstatt D et de La Tène A52. Ce qui est en revanche intéressant en termes de rupture, c’est le choix d’un nouveau site (qui ne présente apparemment pas d’occupation antérieure) pour cette mise en scène funéraire grandiose. Est-ce une manière d’indiquer dans l’espace la création d’une nouvelle lignée53, de la part de ceux qui auraient “choisi le bon camp” au moment de la guerre des Gaules ? Ces aristocrates auraient fait allégeance à César dans le contexte troublé des rapports entre Trévires et Romains, dont témoignent les sources écrites54. Pour les Éduens, nous ne disposons quasiment d’aucune source archéologique. Nous sommes renseignés sur leur coopération avec l’armée romaine par le texte de César : ils forment le gros de sa cavalerie et nous avons une bonne idée de l’ampleur de leur concours et de celui des autres peuples gaulois55.
Les données archéologiques de Gaule celtique sont plus contrastées suivant les sites, nous y avons observé majoritairement deux cas : soit des petites nécropoles, soit des tombes en chambre de grande taille. Les petites nécropoles, comme Esvres-sur-Indre (Indre-et-Loire), Feurs (Loire) ou Tavant (Indre-et-Loire) sont utilisées avant et après la Conquête, de manière continue, indiquant la permanence de certains groupes sociaux qui ont conservé leur statut après la guerre. Le phénomène le plus étonnant concerne la multiplication des grandes tombes en chambre, comme celles de Fléré-la-Rivière (Indre), Antran (Vienne), Ménestreau-en-Villette (Loiret), Berry-Bouy (Cher), Neuvy-Pailloux (Indre) ou Boé (Lot-et-Garonne). Ces grandes tombes apparaissent toutefois avant La Tène D2b. Plusieurs exemples nous indiquent que cette architecture funéraire, abandonnée à la fin de La Tène ancienne, est remise au goût du jour à La Tène D1. On ne peut donc pas mettre en relation son apparition avec le statut exceptionnel acquis par ces aristocrates après la Conquête. Sans voir une origine belge dans les tombes à chambre de La Tène D, origine qui est exclue à Boé et à Verna, on ne peut pas s’empêcher de voir un lien entre les tombes de la région Centre, dont il vient d’être question, et celles de Goeblingen-Nospelt, Saint-Nicolas, Boé et Verna. Toutes marquent une volonté de mettre en évidence un pouvoir acquis très probablement des mains du conquérant romain, pour bons et loyaux services rendus à la guerre. Ces tombes marquent, dans le territoire et dans la conscience des contemporains, la construction d’une identité et d’un pouvoir nouveaux hérités du conquérant.
La zone retenue dans notre travail présente une grande homogénéité en termes de “civilisation” au moment de sa conquête. Que ce soit l’Italie du Nord, au début du IIe s. a.C., ou la Gallia Comata de 58, ces parties de la Gaule possèdent de nombreux points communs et permettent un bilan global de l’impact du phénomène de l’auxiliariat sur le processus général engagé par la Conquête et par les contacts économiques, politiques et militaires que ces territoires entretiennent avec l’Urbs. Toutes ces régions de la Gaule ont connu, nous l’avons dit dans le chapitre précédent sur les oppida, une urbanisation importante avant la conquête : dès le Ve s. pour la Transalpine, dès le IIIe s. pour la Transpadane, dès le IIe s. a.C. pour la Gaule celtique. Au moment des guerres césariennes, plusieurs peuples (par exemple les Éduens, les Helvètes ou les Arvernes) sont organisés sur le mode de l’oligarchie et du clientélisme. Les voies de communications sont bien développées, et c’est une des raisons de l’avancée rapide de César en Gaule. La monnaie est étalonnée sur le denier romain dans la “zone du denier”. La composante militaire ne fait donc qu’ajouter un élément de plus à ce rapprochement qui avait déjà commencé avant l’arrivée des troupes romaines sur le sol gaulois. Mais la proximité des auxiliaires gaulois avec l’armée romaine et son organisation, son système de ravitaillement, ses religions, sa cuisine, sa capacité à produire des armes, des outils, des monnaies et de la parure – notamment en utilisant des alliages nouveaux comme le laiton56 – a agi comme un catalyseur, accélérant le processus57. De plus, les troupes levées chez les Gaulois pour suivre César dans la guerre civile privent de fait la Gaule chevelue du sang jeune nécessaire pour alimenter une révolte contre l’occupant – sans compter que les partis anti-romains ont été supprimés de la carte au moment de la guerre des Gaules. Les auxiliaires permettent donc une romanisation “par le plein” (contacts, échanges, discipline, langue, etc.) et “par le vide” (leur absence en terres gauloises n’entrave pas la réorganisation voulue par Rome). Même s’il est évident que le rapport des élites gauloises avec l’armée romaine, qu’il soit conflictuel ou sur le mode de la participation à l’effort de guerre, n’explique pas à lui seul l’entrée des Gaulois dans le processus de romanisation, il en représente un aspect non négligeable.
Il est toutefois difficile de cerner le degré d’assentiment des auxiliaires gaulois. Dans quelle mesure les Gaulois enrôlés à l’époque républicaine se sont-ils sentis romains ? Sans données épigraphiques, c’est une question difficile à résoudre, car même leur statut exact nous est inconnu. Nous avons postulé pour un certain nombre d’entre eux, sur la base des dépôts funéraires et de leur datation, un statut potentiel d’auxiliaire. Pourtant, les équipements militaires restent dans la tradition celtique (au moins jusqu’à l’époque augustéenne) et la culture matérielle des aristocrates n’est pas radicalement différente entre les deux ou trois premières générations d’auxiliaires et celle de leurs prédécesseurs. Les schémas mentaux n’ont certainement pas changé tout de suite non plus. L’organisation militaire gauloise repose sur de forts liens de clientélisme et les Romains exploitent largement cette situation : ils ne font qu’ajouter “un étage” à la hiérarchie militaire existante. Les chefs de guerre gaulois continuent à avoir sous leurs ordres des combattants dévoués, tandis qu’eux jurent loyauté à César, qui leur offre en contrepartie des cadeaux et des avantages sociaux (argent, terre, citoyenneté, etc.). Ce n’est qu’à l’époque augustéenne, au moment où les armes disparaissent totalement des tombes, que les mentalités vont changer58.
En guise de conclusion
Les quelques exemples qui ont été développés dans cet article ont permis de souligner le changement de point de vue opéré par les protohistoriens ces dernières années, à partir notamment des travaux de terrain qui ont permis de renouveler considérablement les données disponibles. La romanisation, considérée dans l’historiographie classique comme un phénomène propre à la période postérieure à la Conquête, apparaît à la lumière des recherches récentes en réalité bien antérieure. L’introduction de cette phase, que l’on peut caractériser par une interpénétration culturelle, et le changement de perspective qui en résulte, ne remettent pas fondamentalement en cause le modèle d’une ouverture aux échanges nord-sud de manière durable, mais le déplacent chronologiquement.
Ainsi, les protohistoriens ont pris l’initiative d’évaluer plus précisément le dynamisme du modèle méditerranéen, au cours des siècles qui précédent notre ère, en interprétant les changements observés sur le modèle des transferts culturels et non plus en termes d’hégémonie de type colonialiste. Comme les anthropologues l’ont depuis longtemps mis en évidence, il est rare que ces transferts culturels ne soient pas réciproques et l’on commence à appréhender – dans le domaine de la métallurgie par exemple – comment les Gaulois ont pu influencer les artisans romains. Au final, bien que la période de la conquête de la Gaule elle-même ait constitué une césure historique, l’interpénétration observée lui est antérieure. La période post-conquête correspond à la phase de romanisation stricto sensu mais ne peut être interprétée pour autant comme une phase d’homogénéisation systématique. Au contraire, les travaux récents soulignent l’importance de la diversification régionale, suggérant que la notion de civilisation gallo-romaine est, elle aussi, une construction historiographique. La romanisation de la Gaule correspond avant tout à l’intégration politique de la Gaule dans un Empire alors en construction.
Pour conclure, insistons encore, comme le fait P. Le Roux à la suite de G. Woolf59, sur la nécessité du renforcement du dialogue entre historiens et archéologues sur la question de la romanisation : le renouvellement des problématiques passe par la mise sur pied de programmes de recherche associant étroitement ces disciplines. Alors que les spécialisations des uns et des autres rendent l’établissement de synthèses toujours plus complexe, l’article d’O. Buchsenschutz dans les Annales montre que l’on peut donner une vision d’ensemble de cette lente transformation du monde celtique en provinces romaines et que les travaux des protohistoriens, mis bout à bout, représentent une somme considérable de données à verser à ce passionnant dossier des prémices de la romanisation, qu’il faut continuer à alimenter.
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- Fischer 1990 ; Goudineau 1998, 53-62.
- Gruel & Haselgrove 2006, 125.
- Poux 2004, 274.
- Herskovits 1952.
- Van Andringa 2006, 228.
- Goudineau & Kruta 1980, 231.
- Pumain 1982.
- Meztler et al. 1991, 172.
- Nous ne reprendrons pas ici les discussions sur la possibilité de reconstituer les limites de ces entités sur la base de documents postérieurs, les échanges avec les chercheurs travaillant sur l’Antiquité ayant été sur ce point particulièrement fructueux en incitant à la plus grande prudence ; voir notamment Leveau 2002, 10.
- Brun 2002, 308.
- De nombreuses recherches récentes sur les oppida tendent à ne pas les considérer comme un ensemble homogène, et il apparaît aujourd’hui nécessaire, comme le suggère notamment G. Kaenel, d’établir de nouvelles représentations cartographiques tenant compte en particulier de l’importance de l’occupation mise en évidence et de la chronologie (Kaenel 2006, 22).
- Peyre 1979.
- Kruta 2000, 762.
- Pion 2010, 45-46.
- Buchsenschutz et al., 1993, 250.
- Buchsenschutz 2004, 339.
- Haselgrove 1995, 82.
- Caes., Gal., I, 3.
- Voir sur cette question la discussion finale de la table-ronde du Mont-Beuvray de 1999, notamment p. 327 (Guichard & Perrin 2002).
- Caes., Gal., 3.17.
- Brun 2002, 307.
- Sur cette question, voir notamment l’exemple de la Gaule centrale (Collis et al. 2000, 81).
- Maier 1991, 425.
- Dechezleprêtre & Fichtl 2000 ; Fichtl 2005.
- Fichtl, dir. 2010.
- Dechezleprêtre 2010, 160.
- Lambot & Méniel 2000, 99.
- Liv. 30.20.
- Metzler et al. 2006.
- Voir notamment : Labaune & Meylan 2011 ; Poux et al. 2011 ; Dechezleprêtre et al. 2011.
- Testart 2001, 46.
- Testart 2001, 47.
- Pernet 2010, 28.
- Liv. 21.55.4.
- Poux et al. 2007.
- Pernet & Carlevaro 2006.
- Le Roux 2006, 23.
- Le Roux 2006, 23.
- L’exception est la nécropole d’Ensérune, où une part importante d’armement de La Tène C1 a été mise au jour (Schwaller et al. 2001).
- Gleser 2005.
- Gleser 2005, 265.
- Pour la comparaison entre ces deux périodes et les tombes riches de chacune d’elles nous renvoyons à l’analyse de Metzler-Zens, Metzler 1998, en particulier la figure 4 ; Metzler et al. 1991, 149.
- Cette nouvelle lignée se matérialise par de nombreuses tombes, plus petites, disposées autour des cinq grandes tombes et par “un culte des ancêtres” au Haut-Empire, sous forme de dépôts monétaires dans la tombe en chambre 14 ; Metzler & Gaeng 2009.
- Gal., 5.3 ; 5.58 ; 6.8 ; 8.44.
- Gal., 1.18 ; 2. 5 ; 2.10 ; 5.54 ; 7.33 ; 7.50.
- Istenic 2005, 200.
- Poux 2008, 428-429.
- Le Roux 2006, 26.
- Le Roux 2004, 307.