Un terrain étant à la fois objet de recherche et lieu de cette dernière, il se choisit en fonction des objectifs que les chercheurs se fixent. Fabcom avait pour objectif de considérer les communs communicationnels, c’est-à-dire que le commun y était compris comme un processus de transformation du rapport au collectif revendiquant la capacité à imaginer, construire, expérimenter et agir à travers une communication éloignée des pratiques traditionnelles. Pour ce faire, le programme souhaitait puiser dans les pratiques de presse dites alternatives en Amérique latine1 en vue de renouveler et de dynamiser la communication entre les citoyens et les institutions dans le cadre de la presse territoriale néo-aquitaine. Pour répondre à cet objectif, deux terrains bien distincts ont été projetés : l’un d’observation en Amérique latine et l’autre d’expérimentation en Nouvelle-Aquitaine.
Concernant le terrain latino-américain, il s’agissait d’interroger des médias de la presse écrite qui échapperaient aux circuits classiques des journaux nationaux et régionaux dans leurs pratiques énonciatives et d’usage. Auraient été observées les pratiques éditoriales alternatives ayant à cœur l’émancipation de la voix citoyenne dans des espaces où les communs se font jour. Mais pourquoi s’intéresser à l’Amérique latine ? En effet, le vaste territoire latino-américain connaît progressivement, à partir des années 1960, l’émergence de nouveaux mouvements qui se présentent comme des « alternatives » aux modèles communicationnels dominants qui donnent la voix aux différents acteurs des luttes sociales. Dans les années 1980-1990, après le retour de la démocratie, les pays latino-américains n’ont eu de cesse d’innover dans leurs pratiques communicationnelles. Le débat s’est déplacé des revendications générales vers celles de collectifs plus réduits ayant montré des résistances communes et/ou communautaires (peuples autochtones, structures militantes, union de métiers, etc.). Malgré la divergence des projets, toutes ces formes communicationnelles reposent sur l’idée de participation citoyenne où l’émetteur et le récepteur pourraient communiquer sans intermédiaire.
Au tournant du XXIe siècle, comme le note Couffignal en 2013, les pays d’Amérique latine deviennent une source d’inspiration d’un point de vue politique. L’auteur écrit que : « les anciennes puissances en perte de vitesse observ[e]nt ce politique qui se renouvelle pour s’en inspirer » (p .12). Ce sont des motivations similaires qui ont guidé le second terrain de Fabcom. Sur celui-ci, il s’agissait d’expérimenter de nouvelles manières de concevoir le magazine municipal en constituant un « nous » éditorial au sein d’une ou plusieurs communes de Nouvelle-Aquitaine. Ce terrain se serait nourri des observations faites lors de notre voyage en Amérique latine, permettant d’insuffler une nouvelle dynamique aux magazines municipaux néo-aquitains. Un échéancier de trois ans prévoyait d’appréhender le terrain d’expérimentation en 2019-2020, puis d’aller sur le terrain d’observation en juin 2020 pour enfin revenir à Cenon en 2021 et expérimenter à partir des nouvelles pratiques observées.