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L’intention : délimitation des terrains et choix des médias

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Poser des bornes tout en restant alerte aux spécificités des terrains et à nos propres regards, voici un défi que nous avons dû relever. En prenant part au programme Fabcom, nous occupions, nous habitions en quelque sorte l’espace-temps de nos terrains de recherche et nous courions le risque de nous laisser aveugler par nos représentations. Le découpage du terrain supposait alors une vigilance méthodologique en vue de gérer les éventuels biais. Après avoir posé nos objectifs, c’est par le travail interdisciplinaire – qui nous a aidées à limiter ces écueils à travers la mise en commun de nos expériences et connaissances – que nous avons « borné » les deux terrains, nous permettant aussi bien une redéfinition qu’une appropriation de ces derniers.

Figure 1. La délimitation du terrain en Amérique latine
Fig. 1. La délimitation du terrain en Amérique latine
© Gabriela Dascalakis.
https://nakala.fr/10.34847/nkl.e5414s9a

À l’origine, le programme prévoyait un premier terrain en Amérique latine, mais ce vaste territoire posait un double questionnement : d’abord, sur le choix des pays et des régions où il serait possible d’enquêter, puis, sur les types de médias à analyser dans des contextes assez divers. J’ai rencontré l’une des deux responsables de projet lors d’un séminaire, alors qu’ils avaient déjà commencé à se renseigner auprès de différents interlocuteurs latino-américains. Il s’est avéré que nos recherches convergeaient. J’avais, pour ma part, travaillé sur la presse nationale argentine et la construction de l’agenda politique. Le programme Fabcom, en parallèle, cherchait à porter un regard plus aiguisé sur la « culture latino-américaine ». Lors d’un premier rendez-vous avec les porteurs de projet, j’ai exposé à ces derniers la difficulté qu’il pouvait y avoir à enquêter en « Amérique latine » ou même sur « l’Amérique latine ». En effet, il aurait été très difficile, voire impossible, de saisir ce territoire dans sa globalité pour des raisons contextuelles, logistiques et budgétaires. J’ai souligné la richesse de se focaliser sur un seul pays, en l’occurrence l’Argentine. Je me suis aussi proposé d’aller tâter le terrain sur place, profitant d’un voyage que je devais faire à titre personnel en juillet 2019. À l’issue de ce premier contact, le programme passait d’un terrain latino-américain très étendu (20 000 000 km²), à un autre plus réduit – mais dont la superficie équivaut tout de même à cinq fois celle de la France.

Il restait à cibler des médias, au sein de la vaste géographie argentine, selon un double critère : qu’ils manifestent des communs communicationnels et qu’ils soient logistiquement accessibles. Nous tenions à rendre notre travail de terrain pluriel et représentatif. Pour ce faire, nous avons configuré ce dernier à partir de quatre destinations aux réalités socio-économiques fort diverses. Dans les villes de Buenos Aires, Córdoba et San Carlos de Bariloche, nous irions enquêter sur des revues de type alternatif. Dans la ville de Pampa del Indio, nous allions étudier une radio afin d’observer le « faire ensemble » des peuples autochtones dont les traditions sont plutôt orales. En traversant le pays et en étudiant des médias variés, nous souhaitions rendre compte du riche panorama de l’écosystème médiatique alternatif argentin.

Figure 2. La délimitation du terrain en Nouvelle-Aquitaine
Fig. 2. La délimitation du terrain en Nouvelle-Aquitaine

Comme je l’ai évoqué précédemment, grâce au terrain argentin, nous espérions enrichir les nouvelles pratiques au sein des magazines municipaux de Nouvelle-Aquitaine. Pour créer un « nous éditorial », il était bien entendu nécessaire de délimiter ce « nous ». Il n’était pas question de voyager à travers toute la Nouvelle-Aquitaine (comme c’était le cas en Argentine), mais plutôt de circonscrire l’expérimentation à l’échelle d’une commune. La ville de Cenon, partenaire du programme Fabcom, avait exprimé son envie de renouveler son magazine municipal afin qu’il permette l’expression de ses citoyens.

Avant notre rencontre, cette commune avait voulu rendre la parole à ses habitants dans ses pratiques communicationnelles à plusieurs reprises. Déjà, en publiant un magazine intitulé Vies d’ici, vues d’ici au sein duquel les citoyens portaient un regard personnel sur leur quartier. Également, au cours de l’année 2018, la mairie avait lancé une campagne de consultation intitulée « Cenon 2030 » au cours de laquelle les habitants avaient formulé l’envie de créer un « comité communiquant ». L’enjeu pour la commune était de transformer les pratiques descendantes en des discours ascendants. Cette ville semblait être un espace propice à l’expérimentation de nouvelles pratiques, car ses institutions politiques étaient sensibles aux pratiques d’autogestion ou de participation. Notre choix s’est donc porté sur cette commune afin d’expérimenter des « communs communicationnels » que nous aurions observés en Argentine.

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Pessac
Chapitre de livre
EAN html : 9791030010787
ISBN html : 979-10-300-1078-7
ISBN pdf : 979-10-300-1077-0
Volume : 25
ISSN : 2741-1818
Code CLIL : 3385
licence CC by SA

Comment citer

Maria Gabriela Dascalakis-Labreze, Camille Forthoffer, « L’artisanat du/des terrain(s) : regards croisés », dans Maria Gabriela Dascalakis-Labreze, Camille Forthoffer, (dir.), Contemporanéité et hybridations des pratiques de la recherche, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, collection PrimaLun@ 25, 2024, [en ligne] https://una-editions.fr/lartisanat-du-des-terrains-regards-croises/ [consulté le 16/09/2024].
doi.org/10.46608/primaluna25.9791030010787.7
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